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Approches d'aide à la décision pour une transformation efficace de l'industrie forestière au Canada : cas des compagnies de pâtes et papiers

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Academic year: 2021

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Approches d’aide à la décision pour une transformation

efficace de l’industrie forestière au Canada

Cas des compagnies de pâtes et papiers

Thèse

Mahdi Machani

Doctorat en génie mécanique

Philosophiae doctor (Ph.D.)

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Résumé

L'industrie forestière québécoise est à la croisée des chemins. La hausse du prix de l'énergie, la montée du dollar canadien, ainsi que le déclin de plusieurs marchés conventionnels ont rendu obsolète l'ancien modèle d'affaires de la plupart des compagnies forestières; cet ancien modèle étant basé sur la production de masse de produits standards destinés à des marchés conventionnels.

Pour le cas des papetières, la baisse structurelle de la demande pour plusieurs produits de pâtes et papiers ainsi qu'une structure de coûts lourde, désavantagée face à la compétition à faible coût, ont rendu inévitable la transformation de ce secteur afin de survivre à la crise. Plusieurs avenues de transformation s’offrent au secteur de pâtes et papiers incluant la modernisation des processus de production, ou encore la diversification de la plateforme de production en intégrant des produits de pâtes et papiers innovateurs ou des nouveaux produits à haute valeur ajoutée tels que les bioproduits.

Notre contribution à travers ce projet est de développer des outils d'aide à la décision permettant aux preneurs de décision au sein du secteur de pâtes et papiers de revoir et d'innover leurs réseaux de création de valeur, d’identifier les stratégies de transformation les plus robustes, de réinventer leurs modèles d'affaires et établir des feuilles de route pour optimiser cette transformation. L'objectif est de proposer à une compagnie forestière des modèles adaptés aux changements majeurs affectant l'industrie forestière, qui seraient en mesure de créer et de livrer une valeur ajoutée tout en assurant un avantage concurrentiel durable.

Trois contributions sont ainsi présentées dans de cette thèse. La première propose une approche décisionnelle à plusieurs niveaux (multi-niveaux) pour réinventer les modèles d’affaires des compagnies de pâtes et papiers. La deuxième contribution présente un cadre d’aide à la décision pour évaluer le potentiel technico-économique d’intégrer la bioénergie au sein des compagnies de pâtes et papiers. Quant à la troisième contribution, elle apporte une approche de modélisation par scénarios permettant d’identifier les stratégies les plus robustes pour le secteur de pâtes et papiers, qui sauraient résister aux incertitudes technologiques, économiques et sociopolitiques affectant le secteur dans les années à venir.

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Table des matières

Résumé ... III  Table des matières ... V  Liste des tableaux ... IX  Liste des figures ... XI  Remerciements ... XVII  Avant-propos ... XIX 

Chapitre 1  Introduction générale ... 1 

1.1  Introduction ... 2 

1.2  Problématique de recherche ... 3 

1.2.1 Conception d’un nouveau modèle d’affaire ... 5 

1.2.2 Évaluation de la profitabilité d’un modèle d’affaires prometteur : la bioraffinerie forestière intégrée . 6  1.2.3 Évaluer différentes avenues de transformation dans un environnement incertain ... 7 

1.3  Revue de littérature ... 8 

1.3.1 Conception de nouveaux modèles d’affaires ... 9 

1.3.2 Analyse de la profitabilité du modèle d’affaires de la BRFI... 12 

1.3.3 Évaluation des stratégies de transformation des compagnies de P&P dans un environnement incertain ... 21 

1.4  Méthodologie scientifique et contributions ... 26 

1.5  Conclusion ... 28 

Chapitre 2  Une approche de décision à multi-niveaux pour la conception du modèle d’affaires de la bioraffinerie forestière intégrée pour le cas des compagnies de pâtes et papiers ... 29 

Résumé ... 31 

Abstract ... 32 

2.1  Introduction ... 33 

2.2  Literature review ... 35 

2.3  The approach ... 40 

2.3.1 Current state analysis ... 43 

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2.3.3 The need for change ... 45 

2.3.4 Strategic vision ... 47 

2.3.5 Strategy ... 50 

2.3.6 Business model design ... 58 

2.3.7 Business model validation ... 69 

2.3.8 Continuos adaptation ... 73 

2.4  Conclusion ... 73 

Chapitre 3  Un cadre de travail basé sur un modèle mathématique pour évaluer le potentiel technico-économique d’intégrer la bioénergie dans les usines de pâtes et papiers ... 77 

Résumé ... 79 

Abstract ... 80 

3.1  Introduction ... 81 

3.2  Literature Review ... 85 

3.2.1 Supply chain design integrating bioenergy ... 85 

3.2.2 IFBR potential for P&P mills... 87 

3.2.3 Paper contribution ... 88 

3.3  Methodology ... 89 

3.3.1 Initial pool definition ... 90 

3.3.2 Relevant database construction ... 91 

3.3.3 Mathematical model ... 92 

3.3.4 The investments roadmap ... 92 

3.4  Mathematical model ... 93 

3.4.1 Model assumptions ... 94 

3.4.2 Sets... 95 

3.4.3 Parameters ... 96 

3.4.4 Decision variables ... 97 

3.4.5 Costs and Revenues ... 99 

3.4.6 Objective function ... 103 

3.4.7 Constraints ... 103 

3.5  Results and Discussion ... 106 

3.5.1 Bioenergy investment roadmap ... 108 

3.5.2 P&P operational roadmap ... 109 

3.5.3 Feedstock and product flows ... 110 

3.5.4 Discussion ... 113 

3.5.5 Sensitivity analysis ... 114 

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3.7  Appendix ... 118 

3.7.1 Appendix A: Model database ... 118 

3.7.2 Appendix B: Sensitivity analysis ... 126 

Chapitre 4  Une approche de modélisation par scénarios pour identifier des stratégies de transformation robustes pour le cas des compagnies de pâtes et papiers ... 129 

Résumé ... 131 

Abstract ... 132 

4.1  Introduction ... 133 

4.2  Literature review ... 134 

4.2.1 Scenario planning ... 134 

4.2.2 Scenario-based strategic design ... 135 

4.2.3 Paper contribution ... 136 

4.3  Methodology: A four-step approach ... 137 

4.3.1 Identifying a number of transformation strategies ... 138 

4.3.2 Scenario design ... 141 

4.3.3 Scenarios... 143 

4.3.4 Strategy/Scenario evaluation ... 145 

4.3.5 Mathematical Model ... 146 

4.4  Case-study: A Kraft pulp mill ... 153 

4.4.1 Future trends for model parameters under the different scenarios ... 153 

4.5  Results and Discussion ... 155 

4.6  Conclusion ... 163 

4.7  Appendix ... 165 

4.7.1 Appendix A: Model parameters’ future trends ... 165 

4.7.2 Appendix B: Model database ... 170 

Chapitre 5  Conclusion générale et perspectives ... 173 

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Liste des tableaux

Tableau 2.1 Literature review on strategic decision support methodologies ... 39 

Tableau 2.2 Strengths and weaknesses of the Canadian P&P sector ... 43 

Tableau 2.3 Federal programs to support the Canadian forest industry ... 48 

Tableau 3.1 Time-related parameters values ... 107 

Tableau 3.2 Summary of financial results ... 108 

Tableau 3.3 Roadmap of bioenergy investments ... 109 

Tableau 3.4 Operational financial summary of P&P activity over the planning horizon H ... 110 

Tableau 3.5 Biomass supplied over planning horizon H ... 111 

Tableau 3.6 P&P and bioenergy production over the planning horizon H ... 112 

Tableau 3.7 Flows of final products within the IFBR and to the market over the planning horizon H ... 112 

Tableau 3.8 Co-products flows within the IFBR and to the market over the planning horizon H ... 113 

Tableau 3.9 Operational costs and revenues summary over the planning horizon H ... 113 

Tableau 3.10 Sensitivity analysis results ... 115 

Tableau 4.1 Summary of the transformation strategies considered ... 141 

Tableau 4.2 Financial summary for the transformation strategies under the scenarios ... 158 

Tableau 4.3 Summary of min-max regret criterion analysis ... 161 

Tableau 4.4 Kraft pulp model parameters' future trends ... 166 

Tableau 4.5 MFP model parameters' future trends ... 167 

Tableau 4.6 Bioethanol model parameters' future trends ... 168 

Tableau 4.7 Forest residues’ supplying cost future trends ... 168 

Tableau 4.8 Wood chips’ supplying cost future trends ... 169 

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Liste des figures

Figure 1.1 Illustration de la problématique liée à la transformation d’une compagnie de pâtes et papiers ... 4 

Figure 1.2 Canevas de modèle d’affaires en neuf blocs ... 10 

Figure 1.3 Exemple d’un réseau de création de valeur d’une BRFI ... 17 

Figure 2.1 Multi-level decisional approach to design business models ... 42 

Figure 2.2 Perspectives for change using the four-action framework ... 47 

Figure 2.3 The P&P company vision ... 50 

Figure 2.4 Transformational strategies for Canadian forest companies ... 56 

Figure 2.5 The three-step decisional levels ... 58 

Figure 2.6 A multi-scenario development for business model ... 60 

Figure 2.7 P&P company-based IFBR value creation network ... 61 

Figure 2.8 Business model canvas ... 63 

Figure 2.9 Potential partnerships for IFBR ... 67 

Figure 2.10 Cost structure for the IFBR ... 68 

Figure 2.11 The business model canvas for a P&P company-based IFBR ... 69 

Figure 3.1 IFBR value creation network ... 84 

Figure 3.2 IFBR design methodology ... 93 

Figure 3.3 Decision variables over the IFBR supply chain ... 99 

Figure 3.4 Sets and nodes over the IFBR supply chain ... 107 

Figure 4.1 A four-step methodology to design robust transformation strategies for P&P companies ... 138 

Figure 4.2 Future trend-based scenarios for Canadian P&P companies’ business environment ... 145 

Figure 4.3 The P&P company value creation network integrating the considered strategic options ... 146 

Figure 4.4 Estimated financial values for the different transformation strategies under all the scenarios considered ... 161 

Figure 4.5 Estimated cash flows for the different transformation strategies under all the scenarios considered ... 162 

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À ma grand-mère Mariem,

À mon père, À ma mère,

À mes deux sœurs,

À mon Halloul.

Lis, au nom de ton Seigneur qui a créé,

qui a créé l´homme d´une adhérence.

Lis! Ton Seigneur est le Très Noble,

qui a enseigné par la plume,

a enseigné à l´homme ce qu´il ne savait pas

. [Coran 96.1-96.5

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Remerciements

Je tiens à exprimer ma gratitude envers mon directeur de recherche Mustapha Nourelfath pour son soutien académique et personnel durant cette thèse. Étant déjà mon directeur de recherche durant la maitrise, son dévouement et son expertise m’ont initié au monde de la recherche et m’ont été d’une grande utilité pour me lancer dans le long projet qu’est le doctorat. Pr. Nourelfath était toujours à l’écoute, prêt à donner conseil pour le bien de ma carrière. L’ayant côtoyé durant presque six ans, fût un agréable périple tant au niveau professionnel qu’au niveau humain.

Je tiens également à remercier Sophie D’Amours pour son support considérable tout au long de la thèse. Par ses précieux conseils, et son expertise dans l’industrie forestière, j’ai été surement chanceux de l’avoir comme co-directrice de recherche. Son implication était fort enrichissante pour bien mener ce travail.

Je voudrais aussi exprimer ma reconnaissance pour FORAC pour son support financier et académique durant la thèse. Les multiples conférences et séminaires auxquels j’ai pu participer m’ont été fortement utiles pour peaufiner mes habiletés de communication et partager mes travaux avec des chercheurs du monde entier. Finalement, un grand merci à tous les membres de FORAC, en particulier Catherine Lévesque, Julie Richard, Anis Ben Amor, et Philippe Marier pour leur disponibilité et leur contribution pour mener à terme ce travail. Je remercie également Christian Prins, Mikael Rönnqvist et Paul Stuart pour avoir accepté de donner de leur temps précieux pour évaluer ce travail et faire partie des membres du jury.

Quant à mes parents, Hèdi et Radhia, je leur dois tout simplement l’homme que je suis devenu aujourd’hui. Durant ces vingt-quatre longues années d’études, leurs prières, leurs larmes de joie, leur fierté de leur fils étaient mon carburant pour avancer et exceller. Leur offrir cette thèse sera un modeste présent pour tous leurs sacrifices. Un grand merci à mes deux sœurs Sannouna et Mariouma pour leur amour et leur encouragement inconditionnels.

Pour Halloul, ma chère femme, son amour et son affection étaient une condition nécessaire et suffisante pour que je puisse accomplir ce travail. Souffrant d’une sècheresse oculaire parfois invalidante, son sourire et son cœur rayonnant m’humidifiaient l’esprit dans les moments les plus obscurs. Sans elle à mes côtés, je n’aurais été surement pas capable d’en arriver là. Je tiens également à remercier chaleureusement mon beau-père pour son encouragement et ma belle-mère pour son affection et ses belles invocations.

Un grand merci à mon ami Chahir Fitouhi, pour ses conseils tout au long de la thèse et pour l’opportunité qu’il m’a offerte pour faire de la consultation au Québec. Je voudrais aussi remercier Paul-André Proulx pour

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m’avoir donné la chance d’acquérir une expérience dans l’industrie au Québec. Son expertise exceptionnelle et ses conseils prodigieux m’ont été d’une énorme valeur pour mon parcours professionnel.

Un grand merci à tous mes chers amis Marouene Ben Jabeur, Mohamed Dhib, Mohamed Jmour, Mahdi Guellouz, Soumaya Guellouz, Anouar Zouaoui, Slim Ben Ayed, Sabrine Ben Arab, Haythem Ghanouchi, Zied Chakroun, Naoufel Limayem, Brahim Fazaa, Mohamed Bouchaala, Mohamed Dhiaeddine Boussema, Sam et Yasmine, pour les moments agréables passés avec eux, qui étaient si importants pour me permettre d’avancer.

Finalement, je tiens à remercier ma « Tunisie », mon pays, qui m’a permis de poursuivre mes études supérieures au Canada en m’octroyant une bourse d’excellence gouvernementale. En espérant que demain sera un jour meilleur pour la terre du Jasmin!

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Avant-propos

Ce travail, intitulé « Approches d’aide à la décision pour une transformation efficace de l’industrie forestière au Canada - Cas des compagnies de pâtes et papiers », est réalisé dans le but d’obtenir le grade de Doctorat en Génie Mécanique (Ph.D.) de l’Université Laval. Il a été effectué sous la direction du Pr. Mustapha Nourelfath et sous la codirection de Pr. Sophie D’Amours, au sein du Consortium de Recherche FORAC.

Cette thèse est rédigée selon le principe d’insertion d’articles. Elle se compose de trois articles qui ont été tous coécrits avec Pr. Mustapha Nourelfath et Pr Sophie D’Amours. Pour chacun des articles présentés, j’ai agi à titre de chercheur principal dans le développement des approches proposées, la rédaction des articles ainsi que la révision des versions soumises aux journaux. Pour les articles 1 et 2, j’ai contribué à la proposition de la problématique, développé la méthodologie proposée et rédigé l’article. Pour l’article 3, j’ai proposé la problématique, développé la méthodologie et rédigé l’article. Les trois articles ont été effectués sous la supervision périodique et la validation des résultats obtenus à chaque étape par Pr. Mustapha Nourelfath et Pr. Sophie D’Amours.

Le premier article, intitulé « A multi-level decisional approach to design Integrated Forest Biorefinery business model for pulp and paper companies », a pour auteurs Mahdi Machani, Mustapha Nourelfath et Sophie D’Amours. Il a été soumis au journal « Long Range Planning » en Décembre 2013 (Facteur d’impact évalué à 3,667 en 2012). La version présentée dans cette thèse est identique à la version soumise.

Le deuxième article, intitulé « A mathematically-based framework for evaluating the technical and economic potential of integrating bioenergy production within pulp and paper mills », a pour auteurs Mahdi Machani, Mustapha Nourelfath et Sophie D’Amours. Il a est maintenant publié dans le journal « Biomass & Bioenergy » (Volume 63, April 2014, Pages 126–139). Le facteur d’impact du journal est évalué à 3,931 pour les cinq dernières années. La version présentée dans cette thèse est la version complète (plus longue) incluant le modèle mathématique et la base de données.

Le troisième article, intitulé « A scenario-based modelling approach to identify robust transformation strategies for pulp and paper companies », a pour auteurs Mahdi Machani, Mustapha Nourelfath et Sophie D’Amours. Il a été soumis à « International Journal of Production Economics » en janvier 2014 (Facteur d’impact évalué à 2,594 durant les cinq dernières années). La version présentée dans cette thèse est identique à la version soumise. Il est actuellement en processus de révision.

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Chapitre 1

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1.1 Introduction

Dans un contexte compétitif global marqué plus que jamais par des incertitudes économiques et sociopolitiques accrues, les économies émergentes et l’avènement des nouvelles technologies ont rendu les stratégies traditionnelles, que les compagnies entreprennent pour faire face à la compétition, de plus en plus insuffisantes. En particulier, pour le cas des industries évoluant dans des marchés saturés, à l’instar de l’industrie forestière en Amérique du Nord (PwC, 2010a), les compagnies n’ont plus intérêt à limiter leurs stratégies à l’emporter face à leurs compétiteurs traditionnels, mais devraient s’orienter vers de nouvelles manières de penser afin de rendre la compétition sans importance, et ce explorant de nouveaux horizons au-delà des frontières traditionnelles (Kim and Mauborgne, 2005a). Un tel revirement de cap nécessite une transformation fondamentale dans la façon à gérer l’entreprise à tous les niveaux de décision, pour lui permettre d’achever un avantage concurrentiel durable. Dès lors, produire aux meilleurs coûts et livrer aux meilleurs délais ne suffiraient plus pour assurer la pérennité des compagnies, qui devraient en plus se doter d’une agilité leur permettant de réagir rapidement aux imprévus, d’une adaptabilité aux tendances économiques, sociopolitiques et technologiques redessinant les marchés au futur, ainsi que d’une capacité d’aligner les performances de l’ensemble des maillons de la chaine logistique aux intérêts de l’entreprise (L.Lee, 2004).

Au Canada, l’industrie forestière, en particulier le secteur de pâtes et papiers (P&P), vit une conjoncture difficile à cause d’une crise structurelle où la demande pour un nombre de produits conventionnels (papier journal, papier à écriture, etc.) est en baisse à cause des produits de substitution (MRNF, 2012), conjuguée à un déclin cyclique de demande pour la plupart des produits forestiers, dû à la hausse du dollar canadien, à la compétition à faible coût, et à l’incertitude quant aux ressources énergétiques (FPInnovations, 2011).

Ainsi, les compagnies forestières devraient entreprendre une transformation profonde leur permettant aussi bien de survivre au sein des marchés saturés que de saisir de nouvelles opportunités de croissance en dehors de ces marchés, afin d’être le mieux possible préparées aux changements majeurs affectant le secteur dans les années à venir.

Depuis quelques années, praticiens et chercheurs se sont penchés sur le développement de méthodologies et d’outils (d’aide à la décision) pour aider les compagnies forestières à mieux comprendre les enjeux et les défis auxquels elles font face, à analyser les opportunités qui s’offrent à elles et en déceler les avenues de transformation les plus prometteuses, et à se doter des moyens stratégiques pour réussir cette évolution. Cette thèse de doctorat s’inscrit dans cette thématique de recherche en s’intéressant de près à l’industrie forestière au Canada, en particulier le secteur de P&P, dans le but de contribuer au développement de

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nouvelles approches permettant à ces compagnies de s’adapter aux nouvelles réalités des marchés et d’entreprendre une transformation réussie et durable. Ce travail se veut ainsi une contribution aux efforts déjà entrepris dans la planification stratégique, la conception et la gestion des réseaux de création de valeur des produits forestiers intégrant les changements majeurs affectant le secteur, où les outils de recherche opérationnelle sont combinés à des approches stratégiques pour amener de nouvelles réflexions quant aux outils d’aide à la décision proposés à une industrie forestière en pleine mutation.

Dans ce qui suit, nous détaillons la problématique de recherche ainsi que les objectifs des contributions proposées. Nous présentons en deuxième lieu une revue de littérature des travaux de recherche portant sur le sujet traité tout au long de cette thèse. La troisième partie est consacrée à la présentation des différentes contributions. Finalement, une conclusion du chapitre est présentée.

1.2 Problématique de recherche

Tout au long de cette thèse, nous nous intéressons à la problématique de transformation de l’industrie forestière au Canada, en prenant le cas particulier du secteur de P&P. En fait, les papetières ont été fortement affectées par la crise touchant l’industrie forestière (Marinova et al., 2010), devenant au fil des années un secteur attirant de moins en moins d’investisseurs à cause de son faible retour d’investissement (CIFQ, 2010). La baisse soutenue de la demande pour un nombre de produits conventionnels de pâtes et papiers, la hausse des prix de l’énergie, ainsi que l’émergence d’une compétition à faible coût (Browne, 2011) ont pesé lourd sur le bilan opérationnel du secteur, engendrant de faibles profits et une surcapacité de ressources de production (NRC, 2012). Ainsi, de nombreux industriels et chercheurs plaident en faveur d’une transformation du secteur ((PwC, 2010a), (FPAC, 2010), (Stuart, 2006), (Pätäri et al., 2011), (Caisse and Montreuil, 2007), (Thorp, 2005)); une transformation qui pourrait remettre en question un nombre de paradigmes au niveau de la gestion des ressources de la compagnie, de ses relations d’affaires avec l’ensemble du réseau de création de valeur des produits proposés, de ses sources d’avantage concurrentiel, voire de sa raison d’être.

Ce questionnement pourrait amener la compagnie à intégrer de nouvelles matières premières telles que la biomasse forestière, ou encore enlever des matières premières déjà existantes regroupant les matières premières conventionnelles pour une usine de pâtes et papiers telles que les billes et les copeaux de bois, les pâtes et papiers, et de l’énergie. Au niveau de l’usine, la compagnie pourrait être amenée à réajuster ses capacités de production, intégrer de nouvelles technologies produisant de nouveaux produits tels que les produits de pâtes et papiers innovateurs et les bioproduits. Au niveau des marchés, le maintien ou encore l’élargissement des marchés conventionnels de pâtes et papiers pourraient être une piste à considérer. D’autre part, de nouveaux marchés à nouvelles exigences pourraient être accédés.

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Au delà du réseau de création de valeur, l’ensemble des niveaux décisionnels de la compagnie pourraient être profondément révisés. Le modèle d’affaires, décrivant la façon avec laquelle la compagnie gère ses affaires tout en interagissant avec ses différents partenaires du réseau de création de valeur (Osterwalder and Pigneur, 2010), pourrait être remis en question afin d’optimiser la création, la livraison et la capture de la valeur. La compagnie pourrait être ainsi amenée à réajuster sa proposition de valeur ou encore redéfinir ses relations avec les fournisseurs et les marchés. La stratégie de l’entreprise, régissant les sources d’avantage concurrentiel de la compagnie, pourrait être remodelée afin d’évaluer comment la compagnie fait face à la compétition, quelles sont dorénavant les sources d’avantage concurrentiel à considérer, et quelles seraient les limites de la transformation par rapport aux frontières actuelles des marchés desservis. Même au niveau de la vision globale de la compagnie, des questions fondamentales pourraient être posées quant à la mission de la compagnie et la direction vers laquelle elle s’en va. La Figure 1.1 résume l’étendue de ces questionnements et les niveaux décisionnels qui pourraient être sérieusement affectés par une telle transformation. Une liste non exhaustive des problématiques qui pourraient être considérées, est présentée en couleur verte dans la figure.

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Dès lors, une panoplie de possibilités s’offrent aux compagnies de P&P afin d’entreprendre une transformation. De la remise en question des ressources de production, jusqu’à la révision de la vision globale de la compagnie, une telle mutation devrait être accompagnée de cadres méthodologiques afin de supporter les preneurs de décision dans leurs processus. Ces approches doivent proposer des ‘‘guides’’ de transformation ayant comme finalité d’assurer la pérennité de la compagnie évoluant dans un environnent d’affaires de plus en plus dynamique et incertain.

Ainsi vient l’intérêt de développer des outils d’aide à la décision qui permettent aux différents intervenants et preneurs de décision dans le secteur de P&P d’évaluer les différentes pistes de transformation et de s’orienter vers les avenues de transformation les plus profitables. C’est la problématique que nous traitons durant ce travail : la conception d’approches décisionnelles pour supporter une transformation réussie et durable des compagnies de P&P.

Afin d’aborder cette problématique générale, nous proposons trois contributions portant chacune sur un aspect spécifique de la problématique présentée. La première contribution porte sur la conception d’un nouveau modèle d’affaires supportant la transformation des compagnies de P&P. La deuxième contribution traite l’évaluation de la profitabilité d’un modèle d’affaire prometteur. Quant à la troisième contribution, elle aborde la problématique de l’évaluation de la profitabilité de différentes avenues de transformation en considérant l’incertitude au sein de l’environnement d’affaires des compagnies de P&P.

Dans ce qui suit, la problématique ainsi que les objectifs de chacune des trois contributions sont détaillés.

1.2.1 Conception d’un nouveau modèle d’affaire

Cette contribution traite la problématique de la conception de nouveaux modèles d’affaire afin de supporter la transformation du secteur de P&P. En fait, les compagnies de P&P au Canada doivent plus que jamais revoir leur façon de gérer leurs affaires en ne se limitant plus aux stratégies d’affaires traditionnelles basées sur l’efficacité opérationnelle et la réduction des coûts de production. Il est indispensable pour ces compagnies d’appréhender les défis et d’analyser les opportunités d’affaires afin de survivre à la crise et retrouver leur compétitivité. Ainsi, créer une nouvelle proposition de valeur, réinventant la manière avec laquelle la valeur (produits et services) est créée et offerte aux différents segments de clients (Osterwalder and Pigneur, 2010), est jugée comme vitale pour réussir la transformation voulue (Kim and Mauborgne, 2005a).

Le modèle d’affaire, définissant la logique avec laquelle la compagnie crée, livre et capture la valeur (Osterwalder and Pigneur, 2010), a pour mission principale de régir les relations d’affaires que l’entreprise entreprend avec ses différents partenaires à partir des fournisseurs jusqu’aux clients. Transformer ainsi la proposition de valeur de la compagnie passe obligatoirement par la réinvention de son modèle d’affaires. Par

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ailleurs, la conception d’un nouveau modèle d’affaires nécessite l’interaction avec d’autres niveaux de décision tels que la vision globale, la stratégie ainsi que le réseau de création de valeur, d’où l’intérêt de proposer une approche holistique remettant en question différents niveaux décisionnels afin de les aligner dans la même direction.

La première contribution s’intéresse donc à cette problématique de transformation des modèles d’affaires dans le cadre d’une approche intégrée permettant aux preneurs de décision dans le secteur de P&P de relever les défis actuels et de transformer les opportunités d’affaires en une innovation de valeur durable.

Pour aborder cette problématique, les objectifs de la première contribution sont les suivants :

 Identifier les défis ainsi que les opportunités de transformation pour le secteur de P&P au Canada;  Proposer une approche décisionnelle à multi-niveaux pour supporter la transformation;

 Proposer des outils de conception de modèles d’affaires;

 Amener aux preneurs de décision du secteur de P&P un outil de réflexion stratégique sur l’interaction des différents niveaux de décision dans le processus de transformation.

1.2.2 Évaluation de la profitabilité d’un modèle d’affaires prometteur : la

bioraffinerie forestière intégrée

Lors de la deuxième contribution, on aborde la problématique d’évaluation de la profitabilité d’un modèle d’affaires pour le cas des compagnies de P&P au Canada. Le modèle d’affaires reposant sur le concept de la bioraffinerie forestière intégrée (BRFI) est identifié en tant qu’avenue prometteuse pour transformer le secteur de P&P canadien. Pour le cas d’une usine de P&P, le concept de la BRFI repose sur l’intégration d’un ensemble de bioproduits; des produits obtenus par transformation de biomasse, au sein de l’usine, et ce parallèlement à l’activité conventionnelle de production des produits de pâtes et papiers (Stuart, 2006). Les bioproduits englobent une grande famille de produits qui peuvent être produits à partir de la biomasse incluant chaleur, électricité, biocarburants, biomatériaux, etc. (FPInnovations, 2011).

La biomasse considérée dans une BRFI regroupe les résidus forestiers, les résidus agricoles, les résidus issus de l’industrie forestière, les cultures énergétiques qui sont des plantes cultivées spécialement pour la production de l’énergie ou des bioproduits, ainsi que les déchets solides municipaux et urbains (Bradley, 2010).

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Dans cette contribution, nous nous intéressons à analyser le potentiel d’une famille particulière de bioproduits : la bioénergie, qui représente une source d’énergie produite à partir de la biomasse incluant chaleur, électricité et biocarburants.

Pour se transformer en une BRFI, différents types de biomasse sont disponibles et différents processus et technologies de transformation sont possibles. La maturité technologique et économique de ces technologies, bien qu’encore instables, connaitraient une évolution durant les prochaines années (de Wit et al., 2010). Un nombre de nouveaux marchés de bioproduits présentent un potentiel énorme de croissance durant les prochaines années. Cela exige une adaptabilité exceptionnelle de compagnies de P&P afin de saisir les opportunités qui s’y présentent avant qu’il ne soit trop tard, une fois que les parts dans ces nouveaux marchés seraient prises (Nunes and Breene, 2011).

Décider du chemin de transformation optimal est ainsi crucial pour permettre à la compagnie de P&P d’achever une transformation profitable. L’obtention de ce chemin passe inévitablement par l’évaluation des différentes options possibles afin d’en dégager la plus profitable. La deuxième contribution traite cette problématique d’évaluation du potentiel de la transformation d’une compagnie de P&P en une BRFI. Le but est d’amener aux décideurs du secteur de P&P une approche d’aide à la décision permettant d’analyser l’intégration de la bioénergie tout au long du réseau de création de valeur des produits considérés, et ce en considérant l’évolution de l’environnement d’affaires des compagnies de P&P dans les années à venir.

Les objectifs de cette deuxième contribution sont ainsi définis comme suit :

 Analyser la profitabilité de l’intégration de la bioénergie tout au long du réseau de création de valeur;  Développer un modèle mathématique pour évaluer le potentiel financier des options considérées;  Proposer une feuille de route des investissements profitables en bioénergie à intégrer.

1.2.3 Évaluer différentes avenues de transformation dans un environnement

incertain

La troisième contribution s’intéresse à la problématique d’évaluer plusieurs pistes de transformation pour le cas des compagnies de P&P, qui évoluent dans un environnement d’affaires de plus en plus incertain.

Un nombre croissant de chercheurs et d’industriels soutient la nécessité d’entreprendre un virage stratégique pour l’ensemble du secteur de P&P, notamment dans des marchés saturés tels que le Canada ((PwC, 2010a), (MRNF, 2012), (Pätäri et al., 2011)). Les pistes de transformation proposées varient d’une restructuration

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opérationnelle basée sur la réduction des coûts, jusqu’à l’intégration de nouvelles technologies et l’accès à de nouveaux marchés.

Néanmoins, en dépit des nombreuses études soulignant le potentiel d’une stratégie ou d’une autre, la présence de fortes incertitudes rend la décision de choisir telle ou telle option un exercice complexe; parmi ces incertitudes, on peut citer par exemple la disponibilité des matières premières, les prix de l’énergie, les tendances des marchés, ainsi que les orientations sociopolitiques qui affecteraient sérieusement la compétitivité des compagnies de P&P au Canada dans les années à venir (UNECE/FAO, 2012).

Toute décision relative au choix de transformation stratégique devrait donc considérer les incertitudes qui y sont liées, afin d’amener une solution robuste qui permettrait aux compagnies d’être mieux préparées aux changements pouvant affecter le secteur dans les années à venir. Ainsi vient l’intérêt de proposer des approches d’aide à la décision appliquées au cas du secteur de P&P, ayant pour objectif de supporter l’orientation stratégique de la compagnie vers une transformation profitable et robuste. De ce fait, nous abordons cette problématique à travers la troisième contribution dans le but de proposer une approche permettant aux compagnies de P&P en quête de transformation d’évaluer différentes options stratégiques en tenant compte de leur environnement d’affaires incertain. En se basant sur une approche par scénarios, où un nombre de scénarios est conçu dans le but d’identifier différentes tendances futures au sein de l’environnement d’affaires des compagnies de P&P, notre contribution consiste à proposer un outil d’aide à la décision pour aider ces compagnies à transformer de potentielles opportunités de transformation en un avantage concurrentiel, et ce, de façon robuste vis-à-vis des incertitudes.

Ainsi, les objectifs de la troisième contribution sont les suivants :

 Identifier des stratégies de transformation prometteuses pour les compagnies de P&P au Canada;  Identifier les tendances majeures affectant leur environnement d’affaires durant les années à venir;  Évaluer la profitabilité de chacune des stratégies sous différents scénarios plausibles basés sur les

principales tendances identifiées;

 Proposer un nombre de recommandations stratégiques quant aux options de transformation robustes pour le secteur de P&P au Canada.

1.3 Revue de littérature

Tout au long de la revue de littérature, nous présentons un aperçu global des principaux travaux de recherche en rapport avec chacune des trois contributions effectuées. Ainsi, nous nous intéressons dans un premier lieu

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à la littérature abordant la problématique de la conception de nouveaux modèles d’affaires. Ensuite, nous passons en revue les principales contributions portant sur l’analyse de profitabilité du modèle d’affaire de la bioraffinerie forestière intégrée. Finalement, nous examinons de près les travaux traitant la problématique de l’évaluation des stratégies de transformation dans un environnement incertain.

1.3.1 Conception de nouveaux modèles d’affaires

Les modèles d’affaires décrivent la façon avec laquelle l’entreprise entreprend ses affaires (Osterwalder and Pigneur, 2010). Dans (Magretta, 2002), le modèle d’affaires d’une compagnie est assimilé à une histoire expliquant quels sont les consommateurs, quelle est leur valeur, et comment l’entreprise sera profitable en fournissant à ces consommateurs cette valeur. Ainsi, le modèle d’affaires formule la relation de l’entreprise avec ses différents partenaires afin d’atteindre ses objectifs stratégiques. Toute compagnie devrait donc se doter d’un modèle d’affaires bien structuré, afin d’optimiser la façon de gérer ses affaires tout au long du processus de création de valeur à partir des fournisseurs jusqu’aux consommateurs.

En fait, dans (Johnson et al., 2008), les auteurs définissent comme modèle d’affaires réussi tout modèle reposant sur trois piliers : une proposition de valeur aux consommateurs supérieure aux offres alternatives, une formule de profit où les revenus, les marges de profit et les coûts sont bien structurés, et des ressources et processus clés composés des personnes, des technologies, des produits et des équipements requis afin d’acheminer la proposition de valeur aux consommateurs ciblés. Les auteurs proposent une analyse systémique de ces différentes composantes afin de dresser les forces et les limites du modèle d’affaires mis en place. Selon (Nunes and Breene, 2011), l’analyse des différentes composantes d’un modèle d’affaires permettrait de déceler tôt les faiblesses du modèle d’affaires et de le réadapter avant qu’il ne soit trop tard. Une étude présentée dans le même article, constate qu’une compagnie aurait moins de 10% de chance de se remettre d’une chute significative de ses revenus. Dans (Govindarajan and Trimble, 2011), les auteurs vont même jusqu’à présenter les modèles d’affaires en tant que concepts périssables que les compagnies doivent réinventer constamment pour assurer une compétitivité durable. Une méthodologie combinant la préservation des forces du présent, la destruction sélective des faiblesses du passé, ainsi que la création d’opportunités durables, est ainsi proposée dans le but de baliser une telle transition. Les auteurs de (Osterwalder et al., 2005) présentent une revue de littérature approfondie sur les modèles d’affaires en s’intéressant à l’origine du concept du modèle d’affaires, aux différentes interprétations développées, ainsi qu’à l’évolution de ce concept dans la littérature. L’un des travaux les plus extensifs sur les modèles d’affaires est celui dans (Osterwalder and Pigneur, 2010), où les auteurs proposent un manuel de référence pour la conceptualisation, la caractérisation et la conception des modèles d’affaires, dans le but d’amener un outil pratique pour accompagner les preneurs de décision au sein des compagnies dans le processus d’innovation de modèle d’affaires. Un processus de conception de modèle d’affaires à cinq phases est présenté, incluant la

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mobilisation, l’appréhension, la conception, l’implémentation et la gestion du modèle d’affaires. Pour accompagner les différentes phases de ce processus, un canevas composé de neuf blocs est développé (voir

Figure 1.2), dans le but d’illustrer la logique avec laquelle l’entreprise crée, livre et capture la valeur.

Dans cette logique, le modèle d’affaires repose sur quatre principales composantes : l’infrastructure, l’offre, les consommateurs et la viabilité financière.

Pour l’infrastructure, elle repose sur des activités clés, des ressources clés ainsi que les partenaires clés requis pour créer la valeur. L’offre quant à elle est définie par la proposition de valeur que l’entreprise crée en exploitant son infrastructure afin de livrer la valeur aux consommateurs. Concernant la composante des consommateurs, elle inclut les différents segments des consommateurs auxquels l’entreprise livre sa proposition de valeur, les relations que la compagnie entreprend avec chaque segment de consommateurs, ainsi que les canaux de communication utilisés pour interagir avec les consommateurs. Finalement, la viabilité financière inclut la structure de coût engendrée par la création et l’acheminement de la proposition de valeur aux consommateurs, ainsi que les flux de revenus générés par l’offre à chaque segment de consommateurs. Avec les changements profonds affectant l’industrie forestière, de nombreuses études s’intéressent de plus en plus au concept de modèle d’affaires afin d’amener de nouveaux cadres conceptuels supportant la transformation du secteur. Dans ce qui suit, nous présentons la littérature portant sur l’application du concept de modèle d’affaires à l’industrie forestière.

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1.3.1.1 Le concept de modèle d’affaires dans l’industrie forestière

Concernant le cas de l’industrie forestière au Canada, avec la crise cyclique et conjoncturelle affectant la plupart des secteurs, notamment le secteur de P&P ((MRNF, 2009), (MRNF, 2012)), un nombre croissant de chercheurs et de praticiens s’intéressent au concept de modèle d’affaires comme solution prometteuse pour la transformation des compagnies forestières.

D’après un document de travail portant sur les conditions requises pour une transformation réussie pur l’industrie forestière au Québec (CIFQ, 2010), la transformation du modèle d’affaires, rendu obsolète pour la plupart des secteurs, sera vitale afin de permettre aux compagnies forestières d’achever une vision basée sur l’innovation, le développement durable et la compétitivité. À l’échelle du Canada, un rapport d’études détaillé sur l’état de l’industrie forestière au Canada en 2011-2012, met en valeur la nécessité de transformer les paradigmes traditionnels de gestion ainsi que les modèles d’affaires traditionnels des compagnies forestières en vue d’achever une nouvelle vision orientée vers les nouvelles technologies, les nouveaux produits et la gestion durable des forêts (NRC, 2012).

En termes de travaux de recherche, l’évocation de la problématique liée à la transformation des modèles d’affaires est souvent limitée au soulignement de la nécessité de transformer le modèle d’affaires pour entreprendre une transformation réussie. Dans (V. Chambost et al., 2008), une approche à trois phases est proposée supportant la transformation des compagnies de P&P en un modèle d’affaires basé sur la BRFI, en argumentant que la réinvention du modèle d’affaires de ces compagnies est essentielle pour assurer la viabilité de la transformation. Dans un travail complémentaire, une approche de sélection des partenaires de qualité, présentés comme un élément crucial du modèle d’affaires basé sur la BRFI, est proposée afin de supporter la transformation de la compagnie (Chambost et al., 2009). Dans (Pätäri et al., 2011), les auteurs présentent une approche stratégique permettant aux compagnies de P&P de créer un avantage concurrentiel durable. En analysant les opportunités d’affaires qui se présentent au secteur de P&P, le modèle d’affaires de BRFI est présenté en tant qu’option stratégique prometteuse.

À notre connaissance, le seul article de recherche traitant explicitement la problématique de la conception de modèles d’affaires pour le cas de l’industrie forestière est celui de (Caisse and Montreuil, 2007), où les auteurs proposent une approche conceptuelle tétraédrique de conception de modèles d’affaires afin d’innover le modèle d’affaires d’une compagnie en quête de transformation, et ce, en présentant un cas d’étude portant d’une compagnie de fabrication de bois au Québec. L’outil proposé repose sur quatre pôles de conception : les intervenants qui interagissent avec la compagnie, les offres représentant les interfaces entre la compagnie et les intervenants, la création de valeur aux intervenants, et le caractère définissant la manière avec laquelle la compagnie et les intervenants font affaire.

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En analysant la revue de littérature présentée ci-dessus, nous observons que le concept de modèle d’affaires est généralement traité sous deux angles différents. Dans la littérature orientée vers les sciences de gestion (management), l’intérêt a été essentiellement porté sur la proposition de méthodologies conceptuelles permettant aux entreprises d’identifier, concevoir et implémenter des modèles d’affaires compétitifs ((Osterwalder and Pigneur, 2010), (Nunes and Breene, 2011), (Johnson et al., 2008), (Govindarajan and Trimble, 2011), (Osterwalder et al., 2005)). Bien qu’elles amènent de réelles contributions aux entreprises en termes d’outils de management stratégique, ces approches ne s’attardent pas, en général, aux liens entre le modèle d’affaires et les autres niveaux de décision tels que la définition d’une stratégie ou encore la conception du réseau logistique.

D’autre part, les travaux de recherche s’intéressant à la conception des réseaux de création de valeur s’intéressent principalement à développer des approches de conception stratégiques ayant comme finalité de rendre le modèle d’affaires plus compétitif, sans toutefois détailler explicitement l’impact de telles approches sur les composantes du modèle d’affaires considéré ((Caisse and Montreuil, 2007), (V. Chambost et al., 2008), (Chambost et al., 2009)).

D’où vient l’intérêt de notre première contribution, qui consiste à proposer une approche d’aide à la décision qui amène à la fois un cadre conceptuel pour réinventer le modèle d’affaires, ainsi qu’une méthodologie intégrant cette transformation dans une séquence de décisions allant du plus haut niveau stratégique jusqu’au réseau de création de valeur de la compagnie.

Le but de cette contribution est de développer une approche qui soit suffisamment conceptuelle pour poser les fondements d’une transformation réussie, tout en amenant un outil pratique aux compagnies de P&P leur permettant de traduire ces concepts à travers les différents niveaux de décision incluant la vision, la stratégie le modèle d’affaires et le réseau de création de valeur.

1.3.2 Analyse de la profitabilité du modèle d’affaires de la BRFI

Dans un rapport discutant l’état actuel et les perspectives liées à l’industrie forestière au Canada (NRC, 2012), des experts soulignent le poids économique important de cette industrie, et le rôle qu’elle détient dans le développement d’une économie canadienne basée sur l’exploitation écoresponsable des ressources naturelles et une proposition de valeur aussi bien durable que compétitive. L’étude présentée dans (NRC, 2012) discute, entre autres, la crise du secteur forestier canadien. La hausse du dollar canadien, la crise du marché de l’immobilier aux États-Unis ainsi que l’émergence de compétiteurs à faible coûts, ont pesé lourdement sur l’industrie forestière canadienne et ont engendré des pertes importantes durant ces dernières

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années, ce qui s’est traduit par une nette détérioration des profits d’un nombre de secteurs, en particulier le secteur de P&P.

Pour sortir de cette crise, plusieurs rapports et études perçoivent le développement d’une bioindustrie comme l’une des solutions les plus prometteuses pour permettre au secteur forestier canadien de retrouver sa compétitivité ((FPInnovations, 2011), (NRC, 2012), (FPAC, 2010), (FPInnovations and MRNF, 2009), (FPAC, 2011)). La transformation de l’industrie forestière en une bioindustrie passe par l’intégration de la biomasse lignocellulosique1 en tant que source de création de valeur au sein des compagnies forestières, leur permettant de diversifier leurs sources de revenus et d’accéder à de nouveaux marchés en dehors des marchés conventionnels saturés.

Afin d’exploiter la biomasse d’une façon optimisée, le concept de bioraffinerie, représentant une usine transformant de la biomasse en des bioproduits, tels que la bioénergie, les biocarburants et les produits biochimiques, est de plus en plus étudié depuis quelques années, dans le but d’apporter des solutions innovatrices quant à l’incertitude liée aux énergies fossiles, tout en amenant de nouvelles plateformes de produits à haute valeur ajoutée pour un ensemble de marchés en phase de croissance.

La biomasse considérée dans une bioraffinerie pourrait regrouper les résidus forestiers, les résidus agricoles, les résidus issus de l’industrie forestière, les cultures énergétiques qui sont des plantes cultivées spécialement pour la production de l’énergie ou des bioproduits, ainsi que les déchets solides municipaux et urbains (Bradley, 2010).

Pour pouvoir transformer cette biomasse, plusieurs technologies sont développées, ou sont en cours de développement. Le degré de maturité de ces technologies varie entre des technologies au stade commercial et d’autres qui sont encore au stade de projets pilotes (Bradley et al., 2009). Les auteurs de (de Wit et al., 2010) modélisent la maturité des technologies de fabrication d’un nombre de bioproduits ainsi que les coûts d’investissement et d’opération qui y sont associés. Les auteurs démontrent l’énorme potentiel de développement technologique et de réduction des coûts associés à ces technologies, dans les années à venir, favorisé par les incitations gouvernementales et une demande de marchés croissante d’ici 2030. Dans une étude explorant le potentiel économique et environnemental de la production de la bioénergie et des biocarburants, les auteurs de (Huang et al., 2009) soulignent l’avantage des bioraffineries lignocellulosiques pour produire de l’éthanol, de l’électricité, de la chaleur, de la vapeur et possiblement d’autres biocarburants et des produits chimiques, à partir de la biomasse lignocellulosique.

1 La lignocellulose est composée de lignine, d’hémicellulose et de cellulose en proportions variables. Elle est très présente dans la paroi des cellules des végétaux, du bois et de la paille (Bradley, 2010).

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L’intégration du concept de la bioraffinerie dans le modèle d’affaires des compagnies de P&P révèle un énorme potentiel pour ce type d’entreprises qui sont considérées comme des bioraffineries « conventionnelles » transformant le bois en produits de pâtes et papiers (Huang et al., 2009). Une compagnie de P&P aurait ainsi les infrastructures de base et le réseau logistique adapté pour développer une nouvelle plateforme de bioproduits, afin de diversifier ses marchés et retrouver la profitabilité, tout en contribuant à la réduction des émissions de gaz à effet de serre (V. Chambost et al., 2008).

Une telle intégration a donné naissance à un nouveau concept de modèle d’affaires, appelé bioraffinerie forestière intégrée ou BRFI. Le potentiel des BRFIs a été souligné à travers plusieurs travaux de recherche ((PwC, 2010a), (Stuart, 2006), (Pätäri et al., 2011), (Chambost et al., 2009), (Huang et al., 2009)). Le réseau logistique conventionnel d’une entreprise de P&P est orienté vers le traitement et le transport des produits forestiers, et jouit surtout d’un emplacement stratégique par rapport aux points d’approvisionnement de la biomasse forestière. De plus, le processus de production du papier génère une multitude de résidus et de sous-produits (liqueur noire, copeaux de bois, eaux usées, boues de papier, etc.) qui pourraient être valorisés pour la fabrication de bioproduits.

Une telle transformation nécessite la revue du réseau de création de valeur des produits forestiers, et ce à partir des fournisseurs, en passant par l’usine jusqu’aux consommateurs.

La Figure 1.3 illustre de façon macro et conceptuelle des avenues de transformation possibles de la biomasse en bioénergie et en biocarburants de deuxième génération ((Bradley, 2010), (BIOCAP Canada Foundation, 2008), (Londo et al., 2008), (Wakker et al., 2005)). Cette figure représente graphiquement l’éventuel réseau de création de valeur basé sur la BRFI. Un tel réseau inclut les fournisseurs des matières premières conventionnelles telles que les copeaux de bois et l’énergie fossile, les nouveaux fournisseurs de biomasse, les processus conventionnels de production des produits de pâtes et papiers, ainsi que plusieurs processus possibles de transformation de biomasse en un ensemble de produits (incluant la bioénergie et les biocarburants, allant de la chaleur, la vapeur et l’électricité jusqu’aux granules de bois, Diesel Fisher-Tropsch (F-T), Gaz naturel synthétique (GNS), et Bioéthanol). Des co-produits, tels que la Naphta et la lignine, pourraient être directement vendus aux marchés. L’activité conventionnelle de production de pâtes et papiers génère un nombre de sous-produits et de résidus (tels que la liqueur noire et les boues de papier) qui pourraient être utilisés pour alimenter l’activité de production de bioénergie et de biocarburants, ou encore vendus en tant que co-produits. Les produits finis issus de l’activité conventionnelle et de l’ensemble des technologies implantées serviraient un nombre de marchés incluant celui de produits de pâtes et papiers davantage exigeant en termes de compétitivité et d’écoresponsabilité, et un ensemble de marchés de

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bioproduits en croissance recherchant des alternatives aux énergies fossiles qui soient innovatrices et économiquement viables.

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La problématique liée à la transformation des compagnies forestières, en particulier les usines de P&P, en bioraffineries intégrées attire de plus en plus de chercheurs dans le domaine de conception stratégique et de la gestion des chaines logistiques. Le but commun de ces travaux en forte émergence est de proposer des approches et des outils optimisant les décisions stratégiques et tactiques liées à cette transformation.

La littérature traitant cette problématique peut être divisée en deux grandes familles. D’une part, un nombre de travaux se sont intéressés à la problématique de la conception de réseaux de création de valeurs des produits forestiers intégrant la biomasse. D’autre part, un nombre croissant d’études s’est penché particulièrement sur un concept prometteur permettant la transformation du secteur : la bioraffinerie forestière intégrée. Dans ce qui suit, nous présentons une revue de littérature des principaux travaux appartenant à ces deux catégories. 1.3.2.1 Conception des réseaux de création de valeur des produits forestiers intégrant la

biomasse

Étant une matière première présentant plusieurs particularités liées à la densité, la saisonnalité et le degré d’humidité, la biomasse nécessite une gestion de chaine d’approvisionnement bien adaptée afin d’optimiser son potentiel. Les auteurs de (Jenkins and Sutherland, 2009) analysent un nombre d’options liées à l’acheminement de la biomasse forestière vers une installation de conversion en énergie. Ils considèrent trois grandes étapes d’approvisionnement incluant la récolte, le transport, le stockage et le prétraitement. Dans (Rentizelas et al., 2009), les auteurs étudient la chaine d’approvisionnement en biomasse pour le cas d’une installation de cogénération d’électricité, de chauffage et de climatisation. Trois différents scénarios de stockage sont évalués afin d’estimer le degré de séchage et la détérioration de la qualité de la biomasse stockée.

Plusieurs travaux s’intéressent de près à la problématique de la conception des réseaux logistiques intégrant la biomasse. Dans (Lakovou et al., 2010), les auteurs présentent une revue de synthèse sur les réseaux logistiques transformant la biomasse en bioénergie. Les auteurs analysent l’état de développement des technologies de conversion ainsi que les différents niveaux d’intégration de biomasse dans la gestion des chaines logistiques intégrant la biomasse.

Les outils proposés font souvent coupler des décisions stratégiques liées à la localisation et la capacité des sites de production, à des décisions tactiques liées aux flux de matières premières et produits finis, et ce afin de mieux évaluer l’impact de la conception proposée. Un système d’aide à la décision est présenté dans (Freppaz et al., 2004) permettant de décider des capacités et des localisations des installations de cogénération, ainsi que de la quantité annuelle de biomasse forestière à acheminer aux sites de conversion et la proportion d’électricité et de chaleur produite dans chaque installation. Dans (Ekşioğlu et al., 2009), un modèle à nombres entiers mixtes est proposé permettant d’optimiser la localisation, le nombre et la capacité

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des bioraffineries et des sites de collections, ainsi qu’un nombre de décisions concernant l’acheminement, le stockage et le traitement de la biomasse et du biocarburant considérés. Le but étant d’optimiser la conception de la chaine logistique considérant la production de bioéthanol à partir de quatre types de biomasse. En couplant également les décisions stratégiques et les décisions tactiques liées à la conception de la chaine logistique de production de bioéthanol, les auteurs de (Huang et al., 2010) apportent un modèle multi-périodes où l’on peut agrandir la capacité d’une bioraffinerie déjà construite au cours des années, dans un horizon de planification de vingt ans.

1.3.2.2 Le concept de bioraffinerie forestière intégrée (BRFI) dans le secteur de P&P

Pour le cas des usines de P&P, la conjoncture économique difficile que vit le secteur depuis quelques années a soutenu le développement d’une littérature récente ayant pour but d’analyser le potentiel des différentes options offertes aux compagnies de P&P, notamment le concept de la BRFI.

Dans une étude portant sur le secteur de P&P canadien (Stuart, 2006), le concept de la BRFI est qualifié comme étant la stratégie de survie pour un secteur en quête de modèle d’affaires innovateurs et compétitifs. L’auteur avance qu’il est indispensable d’investir dans des produits à la fois économiquement et écologiquement viables, tout en s’assurant d’une certaine sécurité en termes d’approvisionnement et de marchés de distribution. Dans un travail complémentaire, considérant la BRFI en tant qu’option prometteuse pour réussir la transformation du modèle d’affaires du secteur de P&P canadien (V. Chambost et al., 2008), une approche stratégique de transformation à trois phases est proposée dans le but d’intégrer une nouvelle plateforme de bioproduits, tout en abandonnant la fabrication de certains produits à faibles marges de profit. Dans (Mansoornejad et al., 2010), une méthodologie hiérarchique est développée pour soutenir la transformation d’une entreprise de P&P en une BRFI. La méthodologie présentée intègre, en ordre, la conception de la plateforme des technologies et des produits à intégrer, l’intégration d’une flexibilité liée aux capacités de production et aux proportions fabriquées de chaque produit, et enfin la revue de la conception de la chaine logistique, où plusieurs alternatives d’expansion et d’acquisition sont évaluées, et ce en générant différents scénarios reflétant la volatilité de la demande et des prix de marchés. Les auteurs de (Feng et al., 2012) apportent un modèle pour l’optimisation du réseau logistique intégrant la biomasse, et ce pour décider des sites de production à utiliser, de leurs localisations, des technologies, des capacités, ainsi que des matières premières à s’approvisionner. Les bioraffineries à intégrer dans la structure du réseau considéré pourraient être des scieries, des usines de P&P ou des sites autonomes de production de bioéthanol, d’énergie ou de granules de bois. Le but est de maximiser la valeur des investissements à implanter.

L’analyse de la revue de littérature portant sur l’évaluation du potentiel de l’intégration des bioproduits, en particulier la bioénergie et les biocarburants, au sein des compagnies forestières, révèle la spécialisation de la portée des travaux cités. Une partie de la littérature s’est intéressée essentiellement à traiter les

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problématiques liées à l’intégration de la biomasse dans les chaines d’approvisionnement des compagnies forestières, en proposant des modèles optimisant cette intégration ((Jenkins and Sutherland, 2009), (Rentizelas et al., 2009)). D’autres travaux se sont penchés sur la problématique de la conception de réseaux logistiques intégrant les bioproduits afin d’aboutir à une conception optimale, en se limitant souvent à un seul produit ((Freppaz et al., 2004), (Ekşioğlu et al., 2009), (Huang et al., 2010)).

D’autre part, la littérature portant sur l’analyse du potentiel des BRFIs pour le cas des compagnies de P&P s’est principalement intéressée à proposer des approches stratégiques permettant aux compagnies d’assurer une transition efficace, sans toutefois fournir d’outils mathématiques évaluant quantitativement la profitabilité d’une telle transformation ((Stuart, 2006), (V. Chambost et al., 2008), (Mansoornejad et al., 2010)). Le seul travail apportant un modèle mathématique afin d’évaluer le potentiel d’investir dans un nombre de bioproduits ((Feng et al., 2012)), considère seulement le Bioéthanol, la cogénération et les granules de bois dans un problème d’optimisation de la conception du réseau logistique global. La considération d’un horizon de planification de trois ans (dans (Feng et al., 2012)) ne permettait pas, toutefois, de tenir compte de l’évolution technologique et économique liée aux investissements en bioproduits, jugés encore en début de phase de croissance.

Nous pensons qu’il est ainsi indispensable de développer des outils d’aide à la décision permettant d’évaluer le potentiel de l’intégration de la biomasse au sein des compagnies de P&P, en considérant l’ensemble de la chaine de valeur allant des fournisseurs de matières premières jusqu’aux marchés .

En particulier, le potentiel des BRFIs, offrant une réelle opportunité aux compagnies de P&P pour diversifier leurs sources de revenus, devrait être évalué aussi bien qualitativement que quantitativement sur un horizon à long-terme afin de tenir compte des évolutions technologiques et économiques liées aux bioproduits. Le but est de permettre aux décideurs au sein du secteur de P&P d’identifier les avenues de diversification les plus prometteuses technologiquement et financièrement, tout en considérant une panoplie de matières premières, de produits, et de marchés.

Ainsi, notre deuxième contribution consiste à amener aux compagnies de P&P une approche d’aide à la décision basée sur la modélisation mathématique, leur permettant d’identifier les opportunités qui leur sont offertes en termes de matières premières, de technologies, et de marchés, analyser en détail la profitabilité associée à de telles intégrations, et en déceler les options les plus avantageuses. En considérant un horizon de planification à long-terme, les tendances futures associées aux couts d’investissement, à la maturité technologique, à la demande ainsi qu’aux prix de vente sur les marchés, sont intégrées explicitement dans l’approche développée, dans le but de proposer des solutions qui tiennent compte des mutations qui affecteraient l’environnement d’affaires du secteur dans les années à venir.

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1.3.3 Évaluation des stratégies de transformation des compagnies de P&P

dans un environnement incertain

Tel que mentionné auparavant, les compagnies de P&P, secouées par une crise conjoncturelle difficile et par un nombre de changements structurels, devraient entreprendre une mutation pour faire face à un environnement d’affaires de plus en plus imprédictible et en mouvement (JAAKKO Pöyry consulting, 2005). Une chose est sure : repenser les stratégies de base sera crucial pour ces compagnies, afin de se doter d’un avantage concurrentiel capable d’assurer leur compétitivité. Une telle transformation pourrait amener l’entreprise à remettre en question son offre de produits, ses relations avec ses consommateurs, les marchés qu’elle dessert, etc. (PwC, 2010a).

Dans ce qui suit, nous présentons la littérature proposant différentes stratégies de transformation au secteur de P&P, ainsi que les travaux considérant différentes approches pour intégrer l’incertitude dans les décisions de transformation stratégique.

1.3.3.1 Les différentes avenues de transformation proposées

Depuis quelques années, plusieurs travaux de recherche se sont intéressés à la problématique de transformation des compagnies de P&P, en proposant des méthodologies pour évaluer différentes options stratégiques potentielles. La bioraffinerie forestière intégrée est considérée comme étant une avenue prometteuse pour l’industrie forestière, en particulier les compagnies de P&P. Les auteurs de (Feng et al., 2012) proposent un modèle mathématique pour optimiser la conception d’un réseau de création de valeur des produits forestiers intégrant la bioénergie. Les investissements considérés peuvent être intégrés dans des scieries ou des usines de P&P déjà en place, ou implantés sur des sites de production autonome. Dans (Pätäri et al., 2011), le potentiel stratégique de la BRFI pour une compagnie de P&P est analysé, en proposant une approche stratégique afin d’analyser les opportunités d’affaires se présentant à ces compagnies et les transformer en une source d’avantage concurrentiel.

D’autre part, un nombre d’études se sont penchées sur la mutation des marchés des produits P&P afin de proposer des stratégies permettant aux compagnies de retrouver leur compétitivité. Dans (Frandina et al., 2008), les principales tendances transformant la demande de différents marchés de P&P sont analysées, dans le but de proposer des recommandations stratégiques d’investissements répondant aux nouvelles exigences des consommateurs des produits de P&P. Les auteurs de (Marinova et al., 2010) discutent trois options stratégiques qui permettraient aux compagnies de P&P d’améliorer leur rentabilité. La première étant l’implantation des mesures d’efficacité énergétique permettant à l’entreprise d’optimiser ses coûts d’opération. La deuxième option repose sur le concept de grappes industrielles regroupant des papetières afin de se partager les ressources et optimiser leurs stratégies de collaboration. La troisième option discutée présente le concept de bioraffinage incluant la valorisation des sous-produits issus de la production des produits de P&P,

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tels que la lignine, la liqueur noire et les résidus de bois afin de fabriquer un nombre de produits de valeur ajoutée tels que la bioénergie et les produits biochimiques. Dans une étude analysant les perspectives liées au secteur de P&P au Québec (Ministère des Finances and MERN, 2000), les stratégies basées sur la modernisation des processus de fabrication sont présentées comme cruciales pour les compagnies en manque de compétitivité. Le rôle des subventions gouvernementales supportant les investissements à considérer est mis en valeur.

1.3.3.2 La considération de l’incertitude dans les transformations stratégiques

Quelle que soit la piste de transformation empruntée, les compagnies de P&P auraient à gérer un nombre d’incertitudes associées aux matières premières, aux prix de l’énergie, aux politiques gouvernementales, aux tendances des marchés, aux attitudes des consommateurs, etc. (UNECE/FAO, 2012).

Ces incertitudes sont traitées de différentes façons dans la littérature. De nombreux travaux portant sur l’exploration du potentiel des bioraffineries et voulant analyser l’effet de l’incertitude sur les solutions proposées, présentent des analyses de sensibilité afin d’explorer l’impact de varier certains paramètres sur les décisions prises. En modélisant la compétitivité d’un ensemble de biocarburants considérant une évolution technologique et des réductions de coût dans les années à venir, les auteurs de (de Wit et al., 2010) analysent l’impact de varier certains paramètres du modèle proposé tels que le coût d’investissement, le timing d’introduction au marché, et la courbe de maturité technologique sur les coûts de production et le potentiel compétitif des biocarburants étudiés. Dans (Ekşioğlu et al., 2009), les auteurs proposent un modèle mathématique optimisant la conception et la gestion d’un réseau logistique de bioraffinage intégrant le bioéthanol, évaluent l’effet de varier les coûts logistiques liés au transport et à la récolte ainsi que les coûts d’investissement sur les extrants du modèle tels que le coût de livraison du bioéthanol et la localisation des site de production. Présentant un modèle mathématique à multi-étages optimisant l’ensemble des coûts sur la totalité de la chaine de valeur de bioéthanol produit à partir de biomasse sur un horizon de planification donné, les auteurs de (Huang et al., 2010) analysent l’effet de varier le coût de transport, la capacité de production, et la disponibilité de la biomasse sur la conception de la chaine logistique et les coûts obtenus.

D’autre part, l’environnement d’affaires des compagnies de P&P de plus en plus instable et incertain, a suscité l’intérêt d’un nombre de chercheurs quant à la planification par scénarios, afin d’évaluer l’impact qu’aurait différentes tendances sur le potentiel d’un ensemble d’avenues de transformation. La planification par scénarios étant une méthodologie permettant de concevoir un ensemble de scénarios plausibles basés sur différentes tendances futures possibles et d’évaluer l’impact qu’aurait chaque scénario sur les options stratégiques évaluées (Wright and Goodwin, 2009). Dans (Wetterlund et al., 2010), les auteurs proposent un modèle mathématique déterminant le support politique financier requis pour rendre l’intégration de la technologie de gazéification aux usines de P&P profitable. Le prix de l’énergie étant un facteur crucial dans la

Figure

Figure 1.1 Illustration de la problématique liée à la transformation d’une compagnie de pâtes et papiers
Figure 1.2 Canevas de modèle d’affaires en neuf blocs (Osterwalder and Pigneur, 2010)
Figure 1.3 Exemple d’un réseau de création de valeur d’une BRFI
Tableau 2.1 Literature review on strategic decision support methodologies
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