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Le temps et la duree dans Madame Bovary.

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Academic year: 2021

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(1)

; .

(2)

-FRENCH DEPARTMENT, M.A.

Le présent mémoire est le résultat d'une étude très poussée de la chronologie de Madame Bovary. Un examen quasi-microscopique des faits romanesques que Flaubert situe dans le temps a fait paraître des incertitudes et des invraisemblances surprenantes dans une oeuvre si scrupuleusement structurée. Que les critiques, qui les ont sans

doute:.découvertes avant nous, ne s'y soient pas attardés, démontre que ces erreurs chronologiques ne nuisent en rien à la réussite du

roman. Mais leur existence même est assez révélatrice: elle indique que Flaubert, à plusieurs Teprises, s'est volontairement écarté du schème temporel pour donner à ses personnages, et à Emma en

particulier, l'occasion de vivre d'une vie purement romanesque, dans une "durée" pré-bergsonienne où le temps s'abolit.

L'analyse de cette "durée romanesque", - qui se dérobe au regard destructeur de l'intellect, mats dont l'intelligence saisit les effets, - fait ressortir les rapports de la durée et de l'affectivité. Le génie de Flaubert lui a permis de "vivre ses personnages"et, les ayant vécu, d'évoquer le monde tel qU'il apparait à leurs yeux. Il a ainsi substitué un "temps vital"

à

une stricte chronologie et imprimé

à Madame Bovary un rythme profondément humain où le temps se plie aux exigences des tendances les plus secrètes de notre nature.

(3)

··e

by

Elise Hockman

A thesis submitted to the Faculty of Graduate Studies and Research in partial fulfilment of the requirements for the degree of Master of Arts.

Department of French Language and Literature, . Mc Gill Uni versi ty ,

Montreal.

@)

Elise Hockman 1968

(4)

,

TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • •• l

CHAPITRE l - Le Temps ~

.

.

.

• • • • • • • • •

• • • •

15

CHAPITRE II - Les Incertitudes de la chronologie •

• •

• • •

50

CHAPITRE III - La Durée

. .

.

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. .

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~

. .

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.

60

CONCLUSION • • • • • • • • ~ • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 81

(5)

Aussitôt terminée La Tentation de saint Antoine, le 12 septembre

1849,

Flaubert convie Louis Bouilhet et Maxime Du Camp à écouter la

lecture de son manuscrit et à lui donner leur avis sur son oeuvre. Dans ses Souvenirs littéraires, Du Camp nous dépeint la scène de la lecture, qui dura trente-deux heures (huit heures par jour pendant quatre jours!) A l'en croire, vers le minuit du quatrième jour, "Flaubert, frappant

. ~ . .

.

- .

sur la table ••• dit 'A nous trois, maintenant, dites franchement ce que vous pensez ••• ' Il ~olP.J.het .r~pond:. n 'Nous pensons qu'.il .faut

jeter cela au feu et n'en jamais reparler 1 ;-nl

Les deux amis, ~pquvant~s .par ,la débauche d'.imagination

échevelée dont ils viennent d'être les victimes, conseillent à Flaubert de changer son fusil dl~pauie~

~

..

...

Il devrait écrire un roman complètement dépouillé de ~0ll:t lyr:i,s~e,. qhoi~iI: un s,!-jet Uterre à· terre, un de ces incidents dont la vie bourgeoise est pleine ••• ,,2

D'après ce que rapporte l'auteur des Souvenirs littéraires, . Flaubert et ses deux amis se réunirent le lendemain dans le jardin,

à Croisset:

"C ••• )

nous nous taisions, nous étions tristes, en pensant à

la déception de Flaubert et aux vérités que nous ne lui avions point ménagées. Tout à coup, Bouilhet dit: 'Pourquoi

n'écriras-tu pas l'histoire de Delaunay?' Flaube)t redressa la tête, et avec joie, SI écria: 'Quelle idée!' n

1. Du Camp, Maxime, Souvenirs littéraires, Hachette, Paris,

1892,

T. l, Chap. XII, p.

315

2. Ibid., p.

317

3. Ibid., p. 319: N.B. La mémoire de Maxime Du Camp semble lui avoir joué un mauvais.tour, puisqu'il est avéré que l'histoire proposée à Flaubert fut celle de Delamare, non celle de Delaunay.

(6)

Mais Flaubert ne suivit pas ce éonseil immédiatement. Désemparé par l'échec de son roman romantique, (trois ans de travail perdul) et l'âme encore endeuillée par la disparition précoce de son cher ami Alfred Le Poittevin (qui était mort le

3

avril

1848),

Flaubert estime qu'il a grand besoin de vacances. Ce besoin, il l'éprouvait depuis

plusieurs mois. Dès le

6

mai

1849,

il écrivait en effet à Ernest Chevalier, son ami d'enfance et son condisciple au lycée de Rouen: "J'ai besoin de prendre l'air, dans toute l'extension du mot."ih

- -

-Les circonstances conspirent donc à pousser Flaubert

à

reprendre son projet de voyage en Orient, caressé depuis longtemps •. Maxime

tentait d'ailleurs depuis février ·de cette année-là de persuader à

Flaubert de l'accompagner. Les deux voyageurs s'embarquent donc

à

Marseille pour Alexandrie .. le

4

novembre

1849.

Flaubert ne reviendra à Croisset que dix-neuf mois plus tard, en mai

1851 •

. ~ en croire Maxime Du Camp (dont le témoignage paraît suspect

à beaucoup de critiques ••• ), Flaubert songea constamment à son oeuvre nouvelle au cours de son pér~ple:

"( ••• ) son futur roman l'occupait; il me disait: 'J'en.suis obsédét' ••• Aux confins_de la' Nubie inférieure, sur le sommet.de Djebel-Aboucir qui domine la seconde cataracte, pendant que nous regardions le Nil se battre contre les épis de rodhers en granit noir, il jeta un cri 'Euréka' Je

l'appellerai Emma Bovary!' Et plusieurs fois, il.répéta,

il d~gusta le nom de Bovary, en prononçant 1'0 très bref ••• "2

1. Flaubert, Gustave, corresïrndance, Louis Conard, Nouvelle édition augmentée, Paris, 1927, S ie Deux, p. 86

(7)

dont Maxime Du Camp se souvient si clairement après plus de quarante ans, on~en trouve aucune trace ni dans les Souvenirs de voyage de Flaubert, ni dans sa Correspondance. Etant donné que notre romancier a l'habitude de confier à ses amis et correspondants ses projets littéraires, les idêes qui lui viennent, et les difficultés qU'il

éprouve

à

les mettre en forme, il nous semble étrange qU'aucune allusion

-~ la gestation de Madame Bovary au bord du N~~àit jamais été retrouvée. Il est toutefois évident que le va,yage en Orient a fourni des matériaux

à

l'édification laborâeuse et patiente de Madame Bovary. S'il n'est pas du tout certain que Flaubert songeait à son roman, au

-bord du Nil, il est indéniable qU'il a c?ntemplé des paysages dont la grandeur, le pittoresque et le charme ont nourri son imagination. C'est vers l'Orient que s'envoleront en effet,les rêveries romanesques d'Emma, vers l'Orient qu'elle désirera se faire enlever par Rodolphe:

"Au galop de quatre chevaux, elle était emportée depuis hlÛt . jours vers un pays nouveau, d'où ils ne reviendraient plus •••

Souvent, du haut d'une montagne, ils apercevaient tout à coup quelque cité splendide avec des dômes, des ponts, des navires, des forêts de citronniers et des cathédrales de marbre blanc! dont les clochers aigus portaient des nids de cigognes ••• "

Pourtant, il semble que le 23 juillet 1851, quelque deux mois après son retour à Croisset, Flaubert ne se soit pas encore décidé à commencer Madame Bovary, car dans une autre lettre à Flaubert, Du Camp lui demande:

1. Flaubert, Gustave, Madame Bovary, éditions Garnier Frères, Paris,

1960,

P. II, Chap~ XII, p •.

183

(8)

"Que décides-tu? Que travailles-tu? Qu1écris-tu? As-tu pris un parti? est-ce toujours Don Juan? est-ce l'histoire de Mme Delamarre qui est bien belle?"l

Le

2

août

1851,

Maxime D\.\ Camp, "engagé dans une douloureuse crise sentimentale", écrit encore à Flaubert:

"Je dois prendre ça comme un sujet de 'notes': je te donnerai pour ta Bovary tout ce que j'ai eu dans le corps ••• , ça pourra peut-être te servir. Il 2

Ainsi Flaubert s'est décidé, et le titre du roman est déjà choisi. Dans une lettre non datée, mais que l'évidence interne place entre le début d'août et la fin de septembre

1851,

Flaubert écrit à Louise Colet: "J'ai commencé hier au soir mon roman. J'entrevois maintenant des difficultés de style qui m'épouvantent.") Ces

"difficultés" le font apparemment hésiter à se consacrer exclusivement à Madame Bovary, et à abandonner définitivèment toute tentative de révision de La Tentation de saint Antoine. Le

21

octobre

1851,

en effet, Flaubert n'a pas encore perdu tout espoir de faire imprimer cet épanchement lyrique. Il l'avoue clairement dans une lettre à Maxime Du Camp:

IIIl me tarde bien que tu sois ici et que nous puissions causer un peu longuement et serré, afin que je prenne une décision quelconque. Dimanche dernier, avec Bouilhet, nous avons lu des fragments de Saint-Antoine... L'objection de Bouilhet à la publication est que j'ai mis là tous mes défauts et quelques-unes de mes qualités. Selon lui, ça me calomnie ••• Je ne sais que penser ••• Ne faut-il pas suivre sa voie?.. Il y a des moments où je crois

1. Pommier, Jean et Digeon, Claude, "Du nouveau sur Flaubert et son oeuvre", Mercure de France, T.

315,

mai

1952,

p.

45

2. Ibid.

(9)

\

même que j'ai tort de vouloir faire un livre raisonnable et de ne pas m'abandonner à tous les lyrismes, violences, excentricités philosophico-fantastiques qui me viendraient. Qui sait? Un jour j'accoucherais peut-être d'~ne oeuvre qui serait mienne, au moins.

J'admets que je publie. Y résisterai-je? De plus forts y ont péri ••• "1

Flaubert conclut en demandant conseil à Maxime Du Camp. Aux yeux de celui-ci, le principal, c'est de publier un roman: rester

auteur inédit à trente ans, lorsqu'on a été ambitieux comme lui et Flaubert l'ont été, cela devient inquiétant. Le

29

octobre,

Maxime Du Camp s'en prend

à

Flaubert, et l'exhorte à publier aussitôt que possible: "Si tu n'as pas commencé avant deux ans, je ne sais

. .

comment tout cela finira.,,2 Au sujet de la publication de sa Tentation de Saint Antoine, Maxime écrit, dans la même lettre:

"Si tu publies, que publieras-tu? - Tes fragments de Saint Antoine, sauf peut-être un ou deux, sont de nature âcennuyer le public; et c'est avant tout ce qu'il faut

éviter... Et puis, ce ne sont que de fragments ••• "3 Nulle mention de Madame Bovary dans cette épitre qui se termine par l'offre condescendante de Maxime d'aider Flaubert à "faire son succ~s":

"Pas une seconde je ne t'ai séparé de moi dans ma pensée: j'ai travaillé pour trois, Bouilhet, toi et moi ••• J'ai fait mon succès, je vais faire celui de Bouilhet; envoie-moi une bonne chose et je fais le tien.

1I4

.

Dans son indécision sur la "bonne chose"à envoyer à Maxime, Flaubert prit le parti d'aller à Paris consulter Théophile Gautier.

1. Correspondance, pp. 319-320

2. Pommier, Jean et Digeon, Claude, op. cit., p.

46

3. Ibid., p. 47

4. IbId.

(10)

Celui-ci lui déclara que ni lui ni personne ne pouvait savoir s'il était capable d'écrire un chef-d'oeuvre: 11( ••• ) dans deux cent ans peut-être on pourra le savoir.111 Il ajouta que "garder des manuscrits

en réserve, c'est un acte de folie; dès qU'un livre est terminé, il faut le publier, en le vendant le plus cher possible." Du Camp en conclut que:

I1Ce fut cet exposé de principes qui, agissant en se~ contraire·, . détermina Flaubert à mettre la Tentation~' de saint Antoine en portefeuille et à écrire Madame Bovary." Ce témoignage aurait plus de force si bous n'avions déjà constaté qu'il faut prendre les déclarations de Maxime Du Camp avec un grain de sel.

Aussi préfèrons-nous nous fier aux paroles de Flaubert quand il écrit à Louise Colet, au début de novembre 1851:

"Honnis soient les sujets simples! Si vous saviez combien je m'y torture, vous auriez pitié de moi. M'en voilà bâté pour une grande année au moins •

. Quand je serai en route j'aurai du plaisir; mais c'est difficile." 2

Ainsi Flaubert envisage, malgré les difficultés du sujet, et probablement même àc:cause de ces difficultés, de se consacrer entièrement à la rédaction de Madame Bovary.

Il semble bien l'avoir commencé dans le but d'accomplir une tâche qui f~t pour lui une thérapie contre ses tendances romanesques.

1. Du Camp, Maxime, op. cit., T. II, Chap. XVI, pp. 15-16 2. Flaubert, Gustave, Correspondance, Série Deux, p. 329

(11)

Le

6

avril

1853,

après un an et demi de labeur, il affirme, dans une lettre à Louise Colet:

"Tout est de tête. Si c'est raté, ça m'aura toujours été un bon exercice ••• Saint Antoine ne m~a pas demandé le quart de la tension d'esprit que la Bovary me cause ••• 111 Cette tension d'esprit dont Flaubert se plaint pendant toute la composition de son roman a plusieurs causes: la minutie de l'analyse psychologique; la sobriété presque terne du sujet, comparée aux tableaux fantastiques de La Tentation de saint Antoine; et le style nécessité par le sujet, style qui devait être à la fois souple, discret, et

précis, en contraste avec le style flamboyant de sa dernière oeuvre: cadre, sujet, personnages, tout lui para1t horripilant. Madame Bovary est donc un roman "intellectuel", dont le plan a été construit à froid,

-

-dans un souci de discipline, et dont la rédaction a reposé sur l'utilisa-tion consciente et laborieuse de techniques littéraires, non sur un élan d'inspiration.

La correspondance avec Louise Colet permet de suivre pas à

pas la composition de Madame Bovary. Flaubert écrit à sa blonde amie soit pour lui confier les difficultés dans lesquelles il s'enlise, soit pour lui faire part sur un ton triomphal de l'achèvement d'une page

sur laquelle il a peiné plusieurs jours. Grâce à ce document, nous pouvons garder un c.ontact étroit avec Flaubert presque jour par jour.

Cet-te abondance de renseignements en rend l'utilisation difficile: on trouve en effet de tout dans cette correspondance:

(12)

précisions matérielles, détails techniques, boutades à l'emporte-pièce, sans compter les grandes "gueulades" d'un homme harassé de fatigue et

de dégo~t; parfois un rayon de soleil"un cri d'enthousiasme pour

le métier d'écrivain; mais, dans l'ensemble, beaucoup plus de récriminations et de plaintes que de motifs de satisfaction.

De façpn générale, il nous paraît juste de résumer les griefs de Flaubert par les mots: discipline, dégoût. Discipline parce que Flaubert reconnaît à plusieurs reprises que: "La Bovary ••• aura été pour moi un exercice excellent."l Dégoat, car: "On ne m'y reprendra plus, à écrire ~es choses bourgeoises.- La fétidité du fond me fait mal au coeur. Les choses les plus vulgaires sont, par cela même, atroces

à

dire ••• "2

Mais, un an auparavant, Flaubert avait reconnu que discipline et dégoût devaient marcher de pair, et que leur coexistence en lui était la condition d'un chef-d'oeuvre:

"Bovary ... aura été un tour de force inoui et dont moi seul aurai conscience: sujet, personnage, effet, etc., tout est hors de moi." 3

Presque sans le savoir, Flaubert a mis le doigt sur la

caractéristique essentielle du réalisme littéraire: la "distanciation" de l'écrivain par rapport à son sujet. Le romancier doit observer ses personnages avec une exactitude scientifique. Son but étant d'analyser

1. Ibid., le 26 aoat 1853, à Louise Colet; p •. 32l 2.

Ibid.,

le 16 avril 1853, à Louise Colet, p. 172 3. Ibid., le 27 juillet 1852, p. 3

(13)

1.

1

le caractère de ses protagonistes, et de les dépeindre dans leur

milieu social, sa propre personnalité doit être exclue des observations. Comme les oeuvres scientifiques ne révèlent rien de la vie du savant, le roman ne doit rien révéler de la vie intime de l'auteur.

Cette IIdistanciationtt permet à Flaubert de prendre devant le monde l'attitude scientifique qui lui est si pénible. Flaubert écrit

--son nouveau roman avec la précision d'un savant. Né d'un père qui fut chirugien en chef de l'Hôtel-Dieu de Rouen, il transporte dans son roman la méthode rigoureuse des médecins qu'il a côtoyés depuis son enfance. C'est ce que Sainte-Beuve nota, dans son célébre article du Moniteur, le

4

mai

1857,

lors de la publication de la première édition originale de Madame Bovary:

IIFils et frère de médecins distingués, M. Gustave Flaubert tient la plume comme d'autres le scalpel. Anatomistes et et physiologistes, je vous retrouve partoutl"l

L'auteur prend le parti de ~,tout montrer, avec un soin minutieux, car en matière de réalisme littéraire, comme dans les

sciences biologiq'iles,. les détails les plus minimes. ont une grande portée. Ainsi, dans une lettre à Laurent-Pichat, co-directeur de la

Revue de Paris,2 et éditeur de Madame Bovary, Flaubert affirme: IIAussi ai-je pris la chose (la composition de Madame BovaryJ d'une manière héroique, j'entends minutieuse, en acceptant tout, en disant tout, en peignant tout ••• ")

l. Dumesnil, René, Le Réalisme,

J.

De Gigord éd., Paris,

1936,

Chap. II, p. 100

2. Madame Bovary a paru dans la Revue de Paris du le octobre au

15

décembre

1856,

en six livraisons.

(14)

Gë,)IICOUp d'oeil médical de la vieil que Flaubert prône dans sa lettre à Louise Colet, du

24

avril

1852,

aboutit au retrait total du

II moi", qui ne subsiste que dans l'équation personnelle; le

6

juillet

1852,

Flaubert déclare à Louise Colet: IIMoins on sent une chose, plus on

est apte à l'exprimer comme elle est (comme elle est toujours en elle-même, dans sa généralité et dégagée de tous ses contingents éphémères).l

Ainsi le premier impératif dans la rédaction de Madame Bova;r est un impératif de réalisme; mais c'est un réalisme aux antipodes de celui de Champfleury, de Murger et de Duranty, les premiers tenants de cette doctrine littéraire. Pour Flaubert, le néologisme "réalisme" s'applique à l'infralittérature de Champfleury, celle qui se donne pour but principal de scandaliser le bourgeois. Flaubert tient à se dissocier de la nouvelle école, dont les champions, bohêmes littéraires, n'ont rien de commun avec le riche seigneur de Croisset. Sa correspondance'

l'~tteste: 11( ••• ) c'est en haine du réalisme que j'ai entrepris ce

r~man

••• [Madame

BOV~ryl"2

Si Flaubert méprise la racaille réaliste, celle-ci le lui rend bien. Duranty se chargera en son nom de l'éreintement de Madame Bovary:

"Madame Bov~, roman par Gustave Flaubert, représente l'obstination de la description. Ce roman est un de ceux qui rappellent le dessin linéaire, tant il est fait au compas, avec minutie, calculé, travaillé, tout à angles

1. Ibid., pp.

461-462

(15)

droits, et en définitive sec et aride... Il n'y a ni

émotion, ni sentiment ni vie dans ce roman, mais une grande force d'arithméticien qui a supputé et rassemblé tout ce qU'il peut y avoir de gestes, de pas ou d'accidents de terrains dans des personnages, des événements et des pays donnés ••• nl

Flaubert, cela va de soi, ne se borne pas à une observation détachée et glaciale du réel, comme le proclame injustement Duranty. L'observation, au contraire, n'est que la première démarche d'une opération complexe aboutissant à la création littéraire. De son observation (ou de sa documentation écrite) Flaubert tire les détails exacts de "la chose" qu'il doit décrire. Sur ce "donné" son imagination construit une "représentation" de la chose, et c'est cette dernière, non la chose en soi, qu'il tentera d'exprimer.

Il en a pleinement conscience, et sa lettre du 6 juillet 1852 le prouve: pour "exprimer une chose ••• "il faut avoir la faculté de se la faire sentir. Cette faculté n'est autre que le génie: ~, avoir le modèle devant soi, qui

pos~.t12

Faire surgir ce modèle sur l'écran de son esprit, telle est la fonction de l'imagination. Et Flaubert, sur ce point, est en plein accord avec Balzac, qui lui aussi "exprime" les choses qu'il projette par un effort douloureux, sur l~ ,bla~cheur de la page vide qu'il peuple d'un monde que perçoit son oeil intérieur. Par une opération quasi-magique l'expression accompagne cette projection:

1. L'opinion de Duranty était publiée dans Le Réalisme, revue fondée par Champfleury. L'article parut le 15 mars ltl57. Il se trouve cité en entier par René Dumesnil, dans Madame Bovary de

Gustave Flaubert, Mellottée, "Les chefs-d'oeuvre de la littérature expliqués",

1932,

pp. 255-256

(16)

ainsi la création littéraire, tout en demeurant mystérieuse en son

essence, comprend à coup sûr le déclenchement simultané de l'imagination et du verbalisme.

Ainsi la description du :r'éel "au deuxième degré" est-elle nécessairement une évocation, une sorte de vision interne qui pénètre l'opacité des choses. Seule une telle évocation permet au lecteur de sentir à son tour (par cette collaboration que tout ~criyain sOllicite) "la chose'" dont la seule trace matérielle se r~uit à une suite de signes noirs sur blanc... Et voilà qui fait justice du "réalisme photographique" 1

Flaubert ne "décrira" donc pas la société normande, il

- _.

l'évoquera. C'est pourquoi il assène aux na'l.!s qui lui demandent qui était Madame Bovary, la célèbre riposte: "Madame Bovary, c1est moi",

~

-mettant ainsi llaccent sur le phénomène représentation-expression sans

, tt ,

quoi n'existeraient nil 1hero1ne, ni le roman; qU'il a, litteralement, nourris de sa substance.

Si représentation-expression sont des opérations concomittantes, pourquoi "les Himalayas de brouillons" de Flàubert? C'est que ces

opérations réussissent rarement du premier coup: seule une maîtrise totale de moyens d'expression, acquise à force de travail et de pratique, permet la coincidence de la vision et du terme qui l'exprime. C'est après avoir noirci pendant quarante ans des monceaux de papier que

Stendhal opère le miracle de la Chartreuse ••• Si Flaubert est obsédé par

(17)

Et Maupassant, qui le connaissait mieux que tout autre par filiation spirituelle et partage de métier, a mis les choses au point en 1885:

"Il

r

FlaUbert) n'imaginait pas des styles comme une série de moJles particuliers dont chacun porte la marque d'un écrivain et dans lequel on coule toutes ses idées; mais il-croyait au style, c'est-à-dire une manière unique, absolue,

d'exprimer une chose dans toute sa couleur et son intensité. nl Que l'art soit la conjonction de l'imagination et du style, Flaubert n'en a jamais douté. Mais une parfaite adéquation du style

à une représentation ne suffit pas à assurer le succès d'un roman sous le Second Empirel Le roman peut servir de cadre aux créations les

-plus libres de l'écrivain, mais encore faut-il que celui-ci se soumette de bonne grâce aux conventions du genre.

Celles-ci n'ont guère varié depuis l'époque classique: la nécessité de héros et d'héroines qU%quels le lecteur peut s'identifier .s'impose encore. Et toujours s'impose la vraisemblance de l'intrigue,

point sur lequel l'abbé Huet insistait, au dix-septième siècle:

,,( ••• ) la vraisemblance, qui ne se trouve pas toujours dans l'Histoire, est essentielle au Roman. tt2

Flaubert devra se plier à oes contraintes s'il veut toucher un large public. Et placer dans notre monde perçu sous les catégories

kantiennes de l'espace et du temps, une "histoire feinte" et vraisemblable exige que le monde romanesque s'insère dans les mêmes catégories. Celle du temps a retenu notre attention.

1. Mayoux, Jean-Jacques, IIFlaubert et le réel", Mercure de France,

15 février 1934, p. 35. _

2. Huet, Traité de l'Origine des Romans, Préface de Zayde, Paris,

(18)

L'objet de notre mémoire est d'analyser, dans un premier chapitre, comment Flaubert a soumis ses personnages à la loi du temps mesuré par nos calendriers et nos horloges; en d'autres termes,

c'est la chronologie du roman. que nous explorons en détail. Un second chapitre en montrera les incertitudes et

Un

troisième tentera de les expliquer en substituant à la chronologie traditionnelle le concept contemporain de "durée romanesque". Cette étude de techniques littéraires nous amènera

à

de conclusions qui, sans prétendre

bouleverser les traditions de la critique flaubertienne, ajouteront

(19)

LE TEMPS

Madame Bova~ comporte des indications précises qui permettent l'établissement d'une chronologie historico-romanesque. Cette dernière a comme point de départ l'année 1812. L'auteur en effet cite cette date comme celle du mariage des parents de Charles. Son point d'arrivée se situe en 1847. Homais, en effet, quelques mois après la mort d'Emma, adresse une pétition au roi. l Ce roi, c'est Louis-Philippe qui sera chassé de son tr8ne par la Révolution de février 1848. La mort d'Emma se produisant au mois de mars, elle doit donc se placer au plus tard en mars 1847.

Charles Bovaryest né soit fin 1812, soit en 1813. D'ailleurs le Delamare dont Flaubert s'est inspiré au départ était né en 1812. 2 Flaubert indique que Charles a quinze ans, lorsqu'il entre au "collège" de Rouen. 3 Le lecteur peut retrouver exactement la date de son admission,

car le jour est marqué par un événement de la vie commerciale rouennaise,

1. Flaubert, Madame Bova~, p. 322

2. Op. éit., Société des Belles Lettres, Paris, 1945, "Plan chronologique de Madame Bovary", par. René Dumesnil, T. II, p. 371

3. Ibid., Garnier, p. 3

Le "collège" en question est en fait un lycée, puisqu'il est dirigé par un Proviseur, mentionné à la première ligne du roman.- Est-ce une

erreur de Flaubert? N1a-t-il pas été influencé par le souvenir de l'expression "1es années.de COllège"?

(20)

la foire Saint-Romain, qui a lieu le 23 octobre.1 Charles quitte le Lycée:trois ans plus tard (il est entré en cinquième, et finit ses

études en troisième), pour commencer son cours de médecine. 2 Il est reçu officier de santé avec un an de retard, après avoir échoué à son premier examen.3 Le cours de

médeci~e

durait quatre ans à cette époque

4

(1835). Charles a accompli cinq ans d'études, et reçoit son dipl&me en 1835. Notons que Delamare ava,~i;;, lui aussi, été reçu médecin le 18 septembre 1835.

5

Flaubert omet de nous informer de la date du premier mariage de Charles. Mais il nous dit que la veuve Dubuc meurt en mars, après quatorze mois de vie conjugale.

6

Mais le romancier a fort bien pu s'écarter de atm modèle, et comme il précise qu'il Y a eu de ,longues négociations a~ant le mariage de Charles,1 il ~st assez probable que ce mariage a été célébré au début de 1831. Dans l'incertitude du texte, nous nous en tiendrons à cette date probable.

1. A la légende de Saint Romain, évèque et patron de Rouen, se rattachent la pl'ocession de la Gargouille à Rouen, et le privilège de la Fierte. Une bê~~ hideuse désolait la contrée. Saint Romain conjura le monstre, lui jeta son étole au cou, et le donna à mener au prisonnier qui

l'accompagnait, jusqu'à ce qU'ils fussent arrivés au pont, o~ ils le précipitèrent dans.la Seine. En soùvenir de ce miracle, un

dragon, que le peuple appelait Gargouille, figurait aux processions de la Fierte... Le roi Dagobert avait accordé à la cathédrale de

Rouen le droit de délivrer un prisonnier, tous 'les ans, à la fête de l'Ascension. De là le privilège de la Fierte. La Fierte était le cercueil ou plutôt la châsse de Saint Romain.

La Grande EnCYClopédie, Vol. 28, p. 833 2. Flaubert, ~., p. 9

3. ~., p. l i

4.

Renseignement fourni par le Directeur du mémoire. 5. Flaubert, op. cit., Société des Belles Lettres, p. 312

(21)

La première rencontre de Charles et d'Emma a lieu le lendemain de la ~ête des Rois - qui se place traditionnellement le dimanche qui suit le Premier de l'An. Cette rencontre doit avoir eu lieu aux premiers jours de 1838. Il Y a, en ef~et, assez longtemps que Charles est uni à la veuve Dubuc, puisque Flaubert a décrit leur vie conjugale en des termes qui excluent la lune de miel et évoquent un "vieux" ménage: Hélolse a déjà imposé sa loi, ses préjugés, ses caprices, sa cupidité, sa jalousie ••• l

Le père Rouault guérit en quarante-six jours, et Hélo!se

b t t d ' d " , 2 L

Du uc Meur au commencemen u pr~ntemps e la meme annee. a première ~emme de Delamare était morte à Ry, le 12 décembre 1837, ce qui réduit le décalage des évènements réels et fictifs à trois mois.3 Environ un mois ou six semaines plus tard, le père Rouault rend visite

à Charles.

C'est ici que la chronologie doit utiliser les allusions aux fleurs ou aux fruits qui déterminent pour le lecteur la saison où se place un épisode. Par exemple une phrase telle que "les poiriers étaient

en fleurll4 indique que Charles allant aux Bertaux pour la première fois après la mort de sa femme s'y est rendu fin avril ou début mai.

7. ~., p. 11 1. Ibid.

2. ~., p. 18

3.

Ibid., ~ociêté des Belles Lettres, p. 372

(22)

Cette indication se trouve confirmée dans Madame Bovaryz Ebauches et fragments

inéditsl~

où nous trouvons la précision chronologique:

"Six semaines après la mort de sa femme, le père Rouault vint lui_même ••• u2

1. Le terme "scénario", dont Flaubert se sert parfois~ fut repris par les éditeurs des manuscrits de Madame Bovary. Ces manuscrits, conservés à la Bibliothèque municipale de Rouen, comportaient deux dossiers distincts de "scénarios" et de brouillons quand ils

parvinrent à la Bibliothèque. Les scénarios, dont il y a environ

une soixantaine, constituent dans l'ensemble la préparation pré~iminaire du travail de rédaction, quoique Flaubert ait continué de faire des scénarios après le commencement de la rédaction.

Ce sont surtout des plans se rapportant

à

l'ensemble du récit, ou du moins

à

plusieurs des passages essentiels, des "esquisses" '.:"': de l'intrigue. Ils r~pondent à des besoins divers: invention de détails, étude d'une question particulière, organisation de la matière romanesque, reprise des points essentiels avant la rédaction. Mlle Gabrielle Leleu, Bibliothécaire

à

Rouen, et M. Jean Pommier les ont classés, et publiés en tête dé leur Nouvelle version de Madame Bovary (Paris, José Corti,

1949).

Les brouillons rédaction détaillée de passages et d'épisodes -sont reliés en six volumes, dont Mlle G. Leleu a publié de larges extraits dans Madame Bovary, ébauches et fragments inédits (Paris, Conard,

1936;

deux volumes). De fait, il existe, entre les

(23)

Charles obtient la main d'Emma à la Saint-Michell, le 29 septembre, six mois après la mort d'Héloïse, et environ neuf après la première rencontre du médecin et de la belle fermière. Leur mariage a lieu au printemps de l'année suivante

(1&39),

car Charles doit attendre la fin de la période de deuil obligatoire (un an). Emma passe tout l'hiver

" , t 2

a preparer son rousseau. Ici Flaubert rattrape la chronologie de l'histoire Delamare puisque le héros épousa Delphine Couturier le

7

août

1839.

3

Emma et Charles s'installent à Tostes deux jours après la noce.

4

Emma se consume en vagues regrets pendant tout l'été, et ce n'est que vers la fin de septembre qU'un événement vient dissiper la monotonie de cette vie de province: le couple Bovary est invité à un

b~l

à la Vaubyessard.

5

Pour Madame Bovary, l'hiver se passe dans le souvenir nostalgique de ce bal, et elle s'éloigne progressive-ment de son mari. Au printemps

(1840),

Emma a des étouffements aux

,.'. dU;lroman, un grand nombre d'étapes intermédiaires: brèves notations

à être développées, phrases ou fragments de phrases qui se retrouvent dans le texte définit~; sur trois mille six cents pages de brouillons,

cent soixante-quinze esquisses de ce genre ont été dénombrées.

Cf. La genèse de Madame Bovary, par Claudine Gothot-Mersch, José Corti, Paris,

1966.

2. Leleu, Gabrielle, Madame Bovary. Ebauches et Fragments inédits, p.

84

1. Flaubert,

°E·

cit., p.

23

2. Ibid., p.

24

3.

Op. cit. , Société des Belles Lettres, p.

372

(24)

premières chaleursl , elle attend avec une

angoi~se

grandissante une invitation au bal de l'année suivante. Elle passe un deuxième hiver

à Tostes, égayé brièvement par la visite du père Rouault, à la fin de l'hiver (février).2E~in, en mars 1841, après deux ans de mariage, les Bovary quittent Tostes pour Yonville.3

Flaubert indique l'époque du déménagement à Yonville par des allusions aux faits-divers de l'époque. Ce départ a eu lieu en 1841, puisque Homais parle de la crue du Rhône, et des inondations de la Guillotière qui ont eu lieu en 1840.

4'

De plus, l'auteur donne une date qui précise la durée du séjour de Charles à Tostes: quatre ans.' En outre, il y a moyen de déterminer l'époquedù déménagement, puisque Flaubert rapporte que, lors de "l'épidémie de choléra, pour agrandir le cimetière d'Yonville, lion a abattu un pan du mur et acheté trois acres de terre à coté.,,6 Or il Y eut une épidémie de choléra à Paris en mars 1832, et elle y sévit pendant six mois. Elle se répandit dans toute la France, et ne disparut qU'en

1837.7

Les Bovary arrivent à Yonville vers six heures, un mardi,

5.

Op. cit., p. 43 1. Ibid., p.

59

2. ~., p. 62

3.

~., p.

64

4.

DE·

cit., Les Belles Lettres, p. LXXII $.

DE·

cit., Garnier, p.

63

6.

~., p.

68

(25)

veilie du jour de marché dans le bourg.l Berthe naît la même année, 1841, vers la fin de mai ou le début de juin, car l'auteur nous dit que

le soleil se lève, ce jour-là, à six heures du matin. 2

Environ six semaines après, Emma, accompagnée de Léon Dupuis, rend visite à la nourrice de la petite Berthe. Ces six semaines sont en effet la période dite tldes relevailles", ou "six semaines de la Vierge", que, dans son impatience de voir son enfant, Emma abrège quelque peu ••• 3 Cette promenade a lieu en plein été, car les troènes, les véroniques, et les églantiers sont en fleur. ,4 De plus, Flaubert décrit un temps d'été:

"Il était midi: les maisons avaient leurs volets fermés et les toits d'ardoises, qui reluisaient sous la lumière âpre du ciel bleu, semblaient à la crête de leurs pignons5 faire pétiller des étincelles. Un vent lourd soufflait." Dans.sa Correspondance, Flaubert indique que c'est une scène d'été qu'il a voulu dépeindre: "J'étais en train, ce soir, d'écrire une scène d'été avec des moucherons, des herbes au soleil,

et~.tl6

Pendant l'automne et l'hiver qui suivent, Léon fait une

-cour discrète à Emma; en février (1842), après une visite à une filature de lin que l'on établissait près d'Yonville, Emma se rend

1. Flaubert, Op. cit., p. 70 2. ~., p. 83

, .

3.

~., p. 85

4.

~., p. 86 5. ~., p. 85

6.

Flaubert, Correspondance, Nouvelle édition augmentée, Série III, 17 décembre 1852, p. 65

(26)

compte qu'elle aime Léon.l Dans les brouillons de Flaubert, il y a une allusion

à

l'affaire Pritchard, qui permet de préciser l'année

d e ceep~so t , · d 2 e. Lheureux donne à Félicité un foulard, OÙ'"P on voit Pritchard, Guizot, et la reine Pomaré en train de boire de" la bière.3 "En 1843, la campagne contre Guizot, ministre des Affaires étrangères ••• prit une violence extrème ••• 114 Il y avait à Rouen, en 1842-1843, des foulards pareils à celui décrit par Flaubert. René Dumesnil rapporte que Mlle Leleu, Bibliothécaire à la Bibliothèque municipale de Rouen, en a vu un semblable au Musée industriel de la ville. Peut-être fut-ce le modèle de Flaubert?

Au début d'avril 1842, Emma va à l'église pour voir

l'abbé Bournisien.

5

"Environ un mois plus tard (début mai), Léon quitte Yonville, car ses hésitations et les préparatifs de voyage doivent occuper plusieurs semaines.

6

Son départ a lieu au printemps, puisque deux ans plus tard, au théâtre de Rouen, Emma se souvient de lice soir

1. Flaubert, op. cit., p. 94

2. Ibid., Société des Belles Lettres, T. 1, p. LXXII

3.

Ibid.

4.

L'opposition accusait Guizot de faire le jeu des Anglais ••• le ministère désavoua l'action de l'amiral Dupetit-Thouars

à

Tahiti. L'amiral,

" , ,

en effet, avait arrêté,puis expuls~Pritcbard et déposé la reine Pomaré; Pritchard ayant fomenté une insurrection; et Pomaré, en 1843, sollicita le protectorat français, puis à l'instigation de Pritchard, se rangea sous les couleurs anglaises.

(27)

. l

de printemps quand ils se dirent adieu." Emma s'endette pendant le mois qui suit le départ de son amoureux transi.2 -La mère de Charles vient à point rendre visite aux Bovary peu après, et reste chez eux pendant trois semaines.3

Le jour du départ de sa belle·~mère (fin juin), Emma rencontre Rodolphe Boulanger.

4

D~après

ces indications de Flaubert, elle revoit Rodolphe aux Comices agricoles, à la mi-juillet, et celui-ci lui rend une deuxième visite six semaines plus tard.

5

Au début d'octobre, Emma

et Rodolphe font une promenààe

à

cheval.

6

Les mois suivants, Emma va à la Huchette de plus en plus souvent; pendant l'hiver ont lieu les , rendez-vous nocturnes avec Rodolphe, dans le jardin, ou dans le cabinet de consultation de Charles.7 Quand le printemps arrive, leur liaison

n'a déjà plus pour eux le même enchantement.8 En avril (1843), Emma reçoit une lettre de son père, qui fait naître en elle le désir

de se rapprocher de son mari.

9

s..

Flaubert, op. cit., p. 103 6. ~., pp. 110-111 1. ~., p. 211 2. ~., p. 116 3. ~., p. 118 4. ~., p. 118 5. ~., p.

144

6. ~., p. 141

7.

Ibid., p. 151 8. ~., p. 159 9. ~., p. 161

(28)

Ses tentatives de réconciliation avec Charles ayant abouti

à un échec total, Emma s'endette pendant l'été; elle paie Lheureux

avec ltenvoi de M. Derozerays, client de'son mari, à la Saint-Pierre,

l

le 29 juin. En aoüt, après une dispute avec Mme Bovary mère, Emma et Rodolphe décident de s tenfuir. 2 Les préparatifs de voyage, et la maladie de Rodolphe remettent la date du départ au lundi, le 4 septe~bre

(1843).3 Ltannée où Flaubert place cet événement correspond aux recherches de René Dumesnil et dtErnest Bovet; ceux-ci ayant trouvé dans un calendrier que l'année où le

4

septembre tombait un lundi fut effeëti vement 1I.84J~ \7, ,

La veille du départ) Emma reçoit la lettre de rupture de Rodolphe;4 le choc ressenti par la jeune femme occasionne une fièvre cérébrale qui se dé~lare à partir de minuit, et qui dure quarante-trois jours.

5

Pendant l'hiver, et le' printemps (1844), Emma est en

convalescence. Madame Bovary mère vient en visite, et reste jusqutà P" aque.s.c 6

1. Flaubert, op. cit., p. 176 2. Ibid., p. 184

3.

Ibid.

4:.i.

~., pp. 184, 190

5.

~. p.

195

6. Ibid., p. 201

(29)

Au milieu de l'été, Emma et Charles vont au théâtre de Rouen, entendre Lagardy cp,anter dans "Lucie de Lamermoor".l Flaubert indique son intention de situer cet épisode en plein été, car il note la chaleur au dehors; et vers la fin du spectacle, Emma, Charles et Léon vont "s'asseoir sur le port, en plein air, devant le vitrage d'un café.,,2 Deux jours après, "par un beau matin d'étél1, il Y a la promenade en

f o 3

~acre .• Lheureux arrive quarante-huit heures après la scène du

fiacre, pour offrir de renouveler un billet signé par Charles pendant la maladie d'Emma. 4 Désormais Lheureux surgira aux crises les plus

aigues.

Pendant l'hiver de 1844 - 1845, Emma et Léon se rencontrent

à

Rouen, tous les jeudis. Flaubert donne quelques détails qui

permettent de rapporter ces rendez-vous à l'hiver: il y avait un poêle chez le coiffeur où Emma se rendait avant de revenir

à

Yonville;5

le froid la faisait grelotter pendant-le voyage de retour;6 et un jour qu'elle venait de s'embarquer dans la diligence pour Rouen, il a commencé

à

neiger. 1 1. Ibid., p. 206 2. Ibid., p. 213

3.

Ibid., p. 222 4. ~., p .. 235 5. ~., p. 247 6. ~., p. 249 7. Ibid., p. 252

(30)

-Désormais la 'chronologie romanesque est mesurée p;.~~que entièrement par des éch?ancés de billets. Trois jours après avoir vu

, ' l

Emma et Léon à Rouen, Lheureux vient réclamer de l'argent. Lheureux rédige quatre billets pour régler les dettes d'Emma; l'échéance du dernier tombera six mois après le paiement d'une li masure " qu'Emma a consenti à vendre.2 Puisque l'époque des

rendez-~ous

à Rouen dure

-

,

déjà depuis quelque temps, cet épisode doit dater de décembre, et le dernier billet viendra à échéance en juin 1845. Charles découvre ce quatrième billet, et Lheureux en rait deux autres, dont le premier est payable dans

t~ois

mois (en septembre).3 Un incidënt permet de situer l'époque où l'intrigue'se déroule: une fois, lorsqu'Emma reste à Rouen, Charles va la chercher dans son "boc". " Il arrive IIvers deux

heures du matin", 4 et le jour parait peu après. Puisque le jour se lève ~u plus t8t à quatre heures au solstice d'été, Charles doit en effet découvrir le dernier billet en juin. De plus, lorsqu'telle va à ses rendez-vous, Madam~ Bovary porte des roses d'Yonvillé, ce

qui indique le passage de

l'ét~.5

Quand un envoyé de Vinçart, ami ,de Lheureux, et banquier à

-Rouen, arrive chez les Bovary pour leur réclamer de l"argent, Emma

1. ~., p. 252 2. ~., 'p. 254

3.

~., p. 254

4.

~

..

,

p. 257 5. Ibid., p. 263

(31)

va voir le rusé marchand. Celui-ci lui parle des deux billets souscrits par Charles, dont le premier venait à échéance au bout de trois mois:l ceci permet de placer en automne la visite dlEmma chez Lheureux. Cette date est confirmée par Flaubert: IIL'automne commençait, et déjà les

~euilles

tombaient - comme il y a deux ans, lorsqu'elle

~m~

était malade. 11 2

Le jour de la mi-carême

(1846),

Emma va

à

un bal masqué

à

Rouen.

3

Le lendemain, elle reçoit un papier qui réclame le paiement de huit

mille francs pour éviter la saisie !Ide ses meubles et effetsll

,

vingt-. quatre heures plustardvingt-.

4

Le samedi est consacré au

procès-~erbal.

de la saisie.

5

Le dimanche, Emma part pour Rouen, pour essayer de faire un emprunt' chez les banquiers qu'elle conna1t de nom.

6

L'après-midi elle essaie de persuader à Léon de lui prêter de 11 argent

~

7 Le lundi matin, Enuna va dl abord chez Guillaumin, le notaire, ancien ma1tre de Léon, lorsque ëelui-ci étatt clerc

à

8 .. . 9

Yonville; et ensuite chez Binet, le percepteur.

1. ~., p.

265

2.

Ibid., p.

268

3.

~., p.

270

4.

~., p.

271

5.

Ibid., p.

275

6.

Ibid.

7.

Ibid.

8.

~., p.

279

9.

Ibid., p.

283

(32)

e;

L'après~midi

elle court attendre Léon chez la mère Rolet.l Vers la~in de l'après-midi (Léon devait lui apporter de l'argent vers

2 .

trois heures), Emma va chez Rodolphe. La nuit tombe déjà lorsqu'elle quitte Rodolphe, et se rend chez Homais.3 Pendant que les Homais sont en train de dîner, Emma obtient de Justin la clef du capharnaum, et avale de. l'arsenic. Elle rentre chez elle après six heures, puisque Charles part la chercher

à

six heures du soir.

4

Pendant la nuit, Charles découvre qu'Emma s'est empoisonnée. Il écrit aussi vite que possible une lettre à M. Canivet, et au

docteur Larivière. Canivet arrive au milieu de la nuit, le docteur Larivière au matin.

5

Homais invite le docteur Larivière à déjeuner.

6

Emma meurt le'même jour, mardi (1846), au cours de l'après-midi.

Homais et l'abbé Bournisien font la veillée. Madame Bovary mère arrive tôt le lendemain matin. 7 Le mercredi soir il y a une deuxième veiliée. 8 Le jeudi matin, c'est l'arrivée du père Rouault, et le jeudi après~Midi a lieu l'enter;ement:9

1. ~., p.

285

2.

~., p. 276 3. ~., p. 291

4.

~., p. 292

5.

~.; pp. 296-297 6. ~., p. 298

7.

~

..

,

p. 307

8.

Ibid. 9. ~., pp. 311, 313

(33)

Léon se marie vers la Pentecôte, et Félicité s'enfuit à

cette époque.l Désormais il devient difficile de dater les événements. On sait que Homais perséc~te l'aveugle pehdant six mois, ce qui établit sa victoire contre cet homme

a~

début de l'automne 1846. 2 D'après les brouillons de Madame Bovary, c'est au mois de février qU'a lieu le voyage de Homais et de Charles à.Rouen pour choisir une pierre tombale pour Emma.3 Après ce voyage, Homais compose une Statistique générale, se préoccupe de "grandes questions", ce qui nous mène sans doute

à

l'hiver de 1847.4 -Homais adresse une pétition au roi.

Ceci se place donc

a~ant

la

Ré~olution

de .février 1848.

5

En aoat 1848, Charles rencontre Rodolphe au mar.ché

d'Argu~il.6

Le lendemain, Charles va s'asseoir dans le jardi~. Dans les brouillons, Flaubert ajoute:

"Et tous les chagrins de sa vie lui revinrent, toutes les . .félicités·de son mariage, depuis le premier jour

7jusqu'au -dernier. Il y avait dix-huit mois~ maintenantl" _.

A sep t h eures u d so~r, o B th t er e rouve Cha l r es mor t da ns e Jar 1 ° dO ~n. 8

1. ~., p. 317 2. ~., p. 318

3. Flaubert, Madame Bovaryz Nouvelle Version, p. 637 4. Flaubert, 0E •. cit., p. 318

5.-

~., p. 322 6. Ibid., p. 323

7. Flaubert, Madame Bovary2 Nouvelle Version, p. 642 8. Flaubert,

°E·

cit., p. 323

(34)

Madame Bovary mère meurt dans l'année, et la petite Berthe est envoyée chez une tante. l

Dans Madame Bovary, il y a environ soixante indications d'où l'on peut d~duire la date précise d'un événement. Cependant il y a de longues périodes qui passent sans aucune mention de dates. Il y a soixante-cinq indications temporelles qui laissent le passage du temps indéterminé. Vingt-deux de ces indications imprécises consistent en l'emploi de "un jO)lr", ou "une fois", pour situer un événement:

1.

2.

3.

4.

5.

l!,une fois, par un temps de dégel, l'écorce des arbres suintait dans la cour ••• n2

"Un matin, le père Rouault vint apporter à Charles le payement de sa jambe remise ••• ,,3

"Il arriva un jour vers trois heures. 1I4

"Un jo~ qu'en prévision de son départ elle faisait des

~., ~., ~., !!?j.~. ,

Ibid .• ,

rangements dans un' tiroir, elle se piqua les doigts à

quelque chose. 1I5

p.

324

p. 11

p. 19 p. 20

(35)

Madame Bovary mère meurt dans l'année, et la petit~ Berthe est envoyée chez une tante. l

Dans Madame Bovary, il y a environ soixante indications d'où l'on peut d~uire la date précise d'un événement. Cependant il y a de longues périodes qui passent sans aucune mention de dates. Il y a soixante-cinq indicatLons temporelles qui laissent le passage du temps indéterminé. Vingt-deux de ces indications imprécises consistent en l'emploi de "un jo~", ou "une fois", pour situer un événement:

1.

2.

3.

4.

~Une fois, par un temps de dégel, l'écorce des arbres suintait dans la cour ••• n2

"Un matin, le père Rouault vint apporter à Charles le payement de sa jambe remise ••• ,,3

"Il arriva un jour vers trois heures.,,4

~., Ibid., ~.,

"Un jour qu'en prévision de son départ elle faisait des rangements dans un" tiroir, elle se piqua les doigts à

quelque chose.,,5 p.

324

p. 11 p. 19 ~., p. 20 5. ~"., pp.

63 - 64

(36)

1.

2.

3.

4.

5.

6.

"Un jour, Emma fut prise tout à coup du besoin de voir sa petite fille, qui avait été mise en nourrice chez la femme du menuisier

.,,1

"Un soir, en rentrant, Léon trouva dans sa chambre un tapis de velours et de laine ••• ,,2

"Un. matin que Charles était sorti dèS l'~ube, elle fut prise par la fantaisie de voir.Rodolphe à

i~instant.ua

"Un matin qU'elle s'en retournait (p.e.la Huchette) ainsi, elle

crutdi~tinguer to~t à

coup

'le

long'canon d'une carabine qui sembiait la tenir en joue.ll

IIElle-~üt désiré le voir plu~~érieux:, et même plus dramatique

à l'occasion, comme cette fo:i-s OÙ ,elle crut entendre dans l'allée un bruit de pas qui s'approêhaient.11

5.

\lUn jour, qu1au plus fort de sa maladie elle s'était crue agonisante, 'elle avait demandé la

communion.n~

~., p.

85

~., p. 93 ~., p.

152

~., p.

154

~., p.

158

~., p.

198

(37)

1.

2.

3.

4.

5.

6.

7.

"Il était brave homme, en effet, et même un jour ne fut point scan(~.alisé du pharmacien, qui conseillait à Charles, pour distraire Madame, de la mener au

théâtre~

•• lIl

"Un jour qulils causaient philosophiquement des désillusions

. - 2

terrestres ••• "

"Il se trouvait donc le plus fortuné des mortels, et Emma vivait sans inquiétudes, lorsqulun soir, tout. à coup ••• 1I3

"Un jour, pourtant, M. Lheureux la rencontra qui sortait

de 11

H~tel

de Boulogne au bras de Léon ••• 114 .

"Un soir, elle ne rentra pas à YOnville.

u5

"Donc, un jeudi,· Emma fut surprise de rencontrer, dans la cuisine du 'ILion d r oru , M. Homais ••• ,,6

ItUn jour qu 1 ils Si étaient quittés de bonne heure, et. qu r elle

~., Ibid., ~., ~., ~., ~., ~.,

s'en revenait seule par le boulevard, elle aperçut les murs de son couvent ••• 11.7

p.

203

p.

250

p.

251

p.

252

p.

256

p .•

259

p.

263

(38)

e,

"Une fois, pourtant, un homme d'allure chétive ••• entra chez elle ••• "l

ltUn jour, elle tira de son sac six petites cuillers en vermeil ••• ,,2 "Un jour qu'errant sans but dans la maison, il était monté

jusqu'au grenier, il sentit sous sa pantouf'fle une bouJ.ette de papier fin ••• ,,3

"Un jour, enfin, il s'assit devant, tourna la clef, et poussa le ressort.

n4

Neuf de ces indications consistent en l'emploi du mot "le lendemain": 1.

2.

3.

4.

5.

6.

"Huit jours après, comme elle étenfudt du linge dans sa cour, elle fut prise d'un crachement de sang, et le lendemain, tandis que Charles avait le dos tourné pour fermer le rideau de la fenêtre, elle dit •••

,,5

"Le lendemain, en revanche, il semblait un autre homrne,,6

Ibid., p.

264

~., p.

268

Ibid., p.

317

Ibid., p.

322

~., p. 19 ~., p.

28

(39)

ilLe lendemain fut, pour Emma, une journée funèbre."l "Le lendemain, à midi, Rodolphe arriva devant la porte de

Charles avec deux chevaux de maltre.,,2·

"Mais le lendemain il se présenta chez elle avec une facture.,,3 "Le lendemain donc, vers cinq heures, il entra r'lDns la cuisine

de l'auberge •••

,,4

''Dès le lendemain, elle s'embarqua dans l' Hirondelle pour aller à Rouen consulter M. Léon .. c ,,5

ilLe lendemain, au point du jour, Emma courut chez M. Lhèureux le prier de refaire une autre note ••• ,,6

"Mais le lendemain, à midi, elle reçut un protêt.,,7

Cinq fois l'auteur emploie les mots "dès lors, à partir de ce moment, de cette époquetl :

1. ~., p. 115 2. ~., p. 141

3.

~., p •. 176

4.

Ibid., p. 216 5. ~., p. 231 6. ~., p. 255 7. ~., p. 264

(40)

"Dès-lors, elle but du vinaigre pour se faire maigri.r. lll "Dès lors, ce souvenir de Léon fut comme le centre de son

i ,,2

ennu •••

UA partir de ce jour-là, ils s '·écri virent régulièrement tous les sOirs.,,3

liA partir de ce moment, son existence ne fut pl.us qu'un assemblage de

mens~nges

•••

,,4

"Ce !=Juccès l'enhardit; et dès lors il n'y eut plus dans l'arrondissement un chien écrasé •••

'.5

-Cinq fois l'auteur se sert de l' expression "àl~esure que" pour indiquer le passage du temps:

1. 2. 3.

4.

5. 6.

7.

"Il y pensa moins, à mesure qU'il s 'habituai.t à vivre seul.,,6

"Mais à mesure que se serrai.t davantage l'intimité de leur

~., ~.~,. ~., ~., ~., ~., ~.,

vie, un détachement intérieur se faisait qui la déliait de lui. 117 p. 63 p. 115 p. 152 p. 251 p. 319 p. 20 p.

38

(41)

IIUn souci meilleur vint le distraire, à savoir la grossesse de sa femme. A mesure que le- terme en approchait, il la chérissait davantage. lIl

tt ( ••• ) il fut heureux, cependant, de lui voir enfin manifester

une volonté quelconque. Elle en témoigna. davantage à mesure qU'elle se rfltablissait.,,2

liA mesure que ses ·affections disparaissaient, il·se resserrait plus étroitement à l'amoUr de son enfant.,,3

L'auteur emploie neuf fois les mots "quelquefois", ou "de temps à autre'.!;

"Elle songeait quelquefois que c'étaient là pourtant les plus heureux jours de sa vie ••• 114

1. 2. 31'

4.

5. 6.

"Il lui arrivait parfois des rafales de vent, brises de la mer qui ••• apportaient ••• une fraS:cheur salée. 1I5

~., ~., ~., ~., ~.,

"L'al>rès-mi.di, quelquefois, elle allait causer en face avec les postillons.,,6 p. 82 p. 202 p. 321 p. 38 p.

42

~., p. 56

(42)

1.

2.

3.

4.

5.

6.

1~.

"Quelquefois aussi" elle lui parlait des choses qu'elle

.. l

avait lues ••• "

I~ans l'après-midi" quelquefois" une tête d'homme apparaissait derrière les vitres de la salle.1I2

"En de certains jours" elle bavardait avec une abondance fébrile ••• ,,3

"La nuit" quelquefois, Charles se réveillait en

s~saùt

•••

,,4

"Parfois, il est vrai, elle tâchait de fa:ire des calculs •••

,,5

"Quelquefois, pourtant, un curieux se haussait par-dessus

la haie du jardin ••• ,,6

Six fois le mot "souvent": est employé:

"Souvent, lorsque Charles était sorti, elle allait prendre dans l'armoire ••• le porte-cigares en soie verte.,;7

~., p.

58

~., p.

61

~., p.

63

~., p.

117

~., p.

261

~., p.

322

~., p.

53

(43)

1.

2.

3.

4.

S".

6.

1.

"Souvent des défaillances la prenaient. lIl

nSouvent même, au milieu de la journée, Emma lui écrivait

- 2

tout à coup ••• u

"Souvent]elle lui disait, avec des douceurs de voix mélancolique ••• 113

IISouvent, lorsqu'ils parlaient ensemble de Paris, elle

f · · 1n1ssa1 par murmurer ••• . t -

,,4

n( ••• ) elle était à peu près de sa taille, souvent Charles, en l'apercevant ••• , était saisi d'une illusion ••• IIS

Deux fois on voit l'expression upeu à peull employée:

"L'amour peu à peu s'éteignit par l'absence .... 116

"Peu à peu, ces craintes de Rodolphe la gagnèrent.,,1

~., p.

117

Ibid., p.

174

~~, p. 250 ~

..

,

p. 250 Ibid.,

p.

317

~., p. 116 ~., p. lS4

(44)

Cinq fois on trouve le mot "d'abord", ou l'e~ession

"les premiers jours~,=

1.

2.

3.

4. .5.

6.

"D'abord, elle se soulagea par des allusions."l "Elle s'occupa, les premiers jours, à méditer des

changements dans sa maison.,,2

"Emma, d'abord, sentit un granp..étonnement ••• ,,3

"Elle réussit d'abord

à

éconduire Lheureux •••

"U

"D'abord, il ne savait comment faire pour dédommager M. Homais de tous les médicaments pris chez lui.".5

Fl~iib~rt emploie deux fois "bientôtu :

~aéon, bientôt, prit devant ses camarades un air de

supériorité~

•• 116 ~., p.

17

Ibid., p.

31

Ibid., p. 82 ~., p.

177

~., p.

196

~., p. 240

(45)

--"Les affaires d'argent bientôt recommencèrent ••• "l

Ainsi, puisque sur cent vingt-cinq indications temporelles, .il Y en a soixante-cinq qui ne délimitent pas clairement les

événements, nO,'3 pouvons relever des invraisemblances dans la chronologie établie par Flaubert.

Charles se trouve plongé dans des cours avancés de médecine, immédiatement après avoir quitté le"collège'lde R?uen. Plus tard, Madame Bovary essaie d'apprendre

à

lire à Berthe, au printemps de

1844,

quand celle-ci n'a que trois ans. Et après la mort d'Emma, Charles regarde Berthe "enluminer des estampes",2

-

-alors que l'enfant n'a que cinq ans (en

1846).

De m~me,· la fréquence des rendez-vous avec Rodolphe (qui vient trois ou quatre fois par semaine voir Emma), 3 est

invr~isemblable, s~tout

lorsqu'on

con~idère

que les rendez-vous avaient lieu dans le cabinet de consultation de Charles, ou dans le jardin. Si Charles ne découvre jamais les

absences d'Emma, il est improbable. que les voisins de la jeune femme et de Charles ne soupçonnent rien.

Quelquefois l'auteur place des scènes à des saispns ou

à

des heures invraisemblables. La promenade chez la nourrice se fait

1.

~., p.

316

2. ~., p.

318

(46)

au moment le plus chaud de la journée.l Pourtant Emma est encore faible après la naissance de Berthe. De même, les deux promenades d'amoureux

(Emma-Rodolphe; Emma-Léon), ont lieu vers midi ou une heure, heure de repas, d'habitude. 2 tie plus, si le lecteur se voit obligé de placer les Comices à la mi-juillet, à cause du départ de Léon pour Paris, cette date ne semble pas s'accorder avec l'époque habituelle de la moisson, qui n'a lieu en Normandie que vers la fin de juillet

ou le début d'août.: >

Il Y a un exemple d'erreur dans le choix du jour pour un épisode. Lorsque Emma va à Rouen, dans un effort désespéré pour obtenir d,e l'argent des banquiers, c'est un dimanche qu'elle choisit pour ses dé~rches.3

Il Y a des fautes dans les dates qui résument une période dans la vie des protagonistes. Quand Charles échoue à son premier examen d'officier :,de santé, il n' en dit rien à son père. "Cinq ans plus tard seulement, M. Bovary connut la vérité.,,4 Il est peu

probable que Charles ait pu cavher la vérité aussi longtemps, même en expliquant qu'il était malade au moment des examens.

D'autre part, lorsque Charles revient aux Bertaux, il trouve que tout y est exactement "comme la veille, comme il y avait

1.

Ibid., p.

85

2.

~., p.

141;

p.

228

3.

Ibid.,' p.

215

4.

Ibid., p. 10

(47)

cinq mois, crest-à-dire."l

S'il Y a cinq mois depuis la dernière visite de Charles chez les Rouault, cela remonte à la fin d'octobre (1837), puisque la première femme de Charles était morte en mars 1838. Mais Charles n'a rencontré les Rouault qurau début de janvier 1838, quelques deux mois avant la mort de sa femme. De plus, comme Flaubert fait

remarquer que ce premier mariage a duré quatorze mois, on ne peut reculer cette visite d-~:un an. Il est également impossible de penser que Charles ait visité les Bertaux une première fois il

y a cinq mois, puisque cinq mois après le début de janvier établirait la date de la visite au début de juin. Or le père Rouault dit à Charles:

ItVoil~

le printemps bientôt,,2: on ne peut être qurau début de mai.

De même, Emma se trompe en pensant que Berthe avait é-t-é retirée de nourrice depuis un an, lorsque Binet la découvre au retour de la Huchette, au commencement de sa liaison avec Rodolphe(novembre 1842).3 Berthe

nr~tait

revenue chez ses parents qU'il y a neuf mois au plus, en février 1842, quand sa mère essayait de lutter contre sen amour pour Léon.

Flaubert commet la même inadvertance plus tard, en notant que Léon revient en Normandie après "trois ans d'absencell,4 car

1. Ibid., p. 20 2. Ibid.

3. Ibid., p. 155 4. ~., p. 215

Figure

tableau  qU'ils  présentent  que  Flaubert  songe,  plutôt  qu'à  l'écoulement  du  temps
Tableau  de  la  philosophie  française  Paris,  Gallimard"  1962,  pp.  116-123.

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