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Méthodes et théories de l’architecture. Le projet, ses
matériaux, son exercice
Alain Rénier, Stéphane Favier, Jean-Jacques Anne, Florence Renier, Albert
Levy, Alain-François Vergniaud, Jacques Odinot
To cite this version:
Alain Rénier, Stéphane Favier, Jean-Jacques Anne, Florence Renier, Albert Levy, et al.. Méthodes
et théories de l’architecture. Le projet, ses matériaux, son exercice : L’espace et sa segmentation en
”matière d’œuvre” pour la conception (tome 1). Mémoire artificielle de ”matière d’œuvre” pour la
conception (tome 2). Stratégie de ”mise en œuvre ” de la matière d’œuvre dans la conception (tome 3).
[Rapport de recherche] 665/90, Ministère de l’équipement, du logement, des transports et de la mer
/ Bureau de la recherche architecturale (BRA); Ecole nationale supérieure d’architecture de Paris-La
Villette / Laboratoire d’architecture n° 1. 1990. �hal-01908944�
(AS
M I N I S T E R E DE L ' E Q U I P E M E N T , D U . L O G E M E N T , DES T R A N S P O R T S ET DE LA MER D I R E C T I O N DE L ' A R C H I T E C T U R E ET DE L ' U R B A N I S M E
B UR E A U DE LA R E C H E R C HE A R C H I T E C T U R A L E
RE CHERCHE A R C H I T E C T U R A L E L I É E À
L'EN SEIG N EM EN T
PROGRAMME P L U R I - ANNUEL 1-986-1 989
Exer ci ce 1989
-METHODES
ET
THEORIES
DE
L ' ARCHITECTURE
GROUPE DE RECHERCHE
META
LABO N°1 EAPLV
-L
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S O N E X E R C I C E Vo l u me 1 S u b v e n t i o n de r e c h e r c h e du M i n i s t è r e de l ’ E q u i p e m e n t , du L o g e m e n t , d e s T r a n s p o r t s e t de l.a M e r , D i r e c t i o n de 1 ’ A r c h i t e c t u r e e t de l ’ U r b a n i s m e , B’u.reau de l a R e c h e r c h e A r c h i t e c t u r a l e , en d a t e du 26 S e p t e m b r e 1 9 8 9 ..15 J u i n 1990
E C O L E D ' A R C H I T E C T U R E DE P A R I S - L A V I L L E T T E 1 4 4 , r u e de F l a n d r e - 7 5 0 1 9 P A R I SMETHODES
ET
THEORIES
DE
L ' ARCHITECTURE
GROUPE DE RECHERCHE
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A l a i n R E N I E R R e s p o n s a b l e s c i e n t i f i q u e J a c q u e s O D I N O T A . F . V E R Ç N I A U D A l b e r t L E V Y J . J . ANNE F l o r e n c e R E N I E R S t é p h a n e F A V I E RL E
P R O J E T
S E S
M A T E R I A U X
S O N
E X E R C I C E
L IM IN A IR E
PREMIÈRE PARTIE
L'ES P A C E ET SA SEGMENTATION
EN "MATIERE D'OEUVRE"
POUR
LA CONCEPTION
DEUXIÈME PARTIE
MEMOIRE A R T IF IC IE L L E DE
"MATIERE D'OEUVRE" POUR
LA CONCEPTION
TR O ISIÈM E PARTIE
STRATEGIE DE "MISE EN SCENE"
DE LA MATIERE D'OEUVRE
DANS LA CONCEPTION
L'ESPACE
1. L
a modélisation hiérarchiquede l
'
espace en architecture2. E
ffets de sens d'
un espaceÉPHÉMÈRE
3.
L
e temps dans la représentation de l'
espaceLA SEGMENTATION
LA MÉTHODE DE SEGMENTATION SPATIALE SIGNIFICATIVE
5. M
odes de lecture critiqueDE L'ESPACE
6.
L
a s e g m e n t a t i o n s p a t i a l e s i g n i f i c a t i v e comme méthode DE CONNAISSANCE LES SEGMENTS7. L'
utilisation de la notion DE MOTIF EN ARCHITECTURE ° ( ° ) d o c u m e n t s c o m m u n i q u é s d a n s de p r é c é d e n t s r a p p o r t s a n n u e l s du p r o g r a m m e de r e c h e r c h e1986-1989
L 'a c c è s à l'in f o r m a t io n pour l'e n r i c h i s s e m e n t du pr o jet
ARCHITECTURAL
L
e d é v e l o p p e m e n t d'un p r o j e t- p i l o t e DE BANQUE DE DONNÉES POUR L'AIDE À LA CONCEPTION °Les BANQUES DE DONNÉES EN ARCHITECTURE Elé m e n t s pour la c o n s t i t u t i o n d'une banque de "m o t i f s" ARCHITECTURAUX °
A
n n e x eL
e s y s t è m e d e s ba nques de d onnéesLA CONCEPTION DU PROJET
L 'é v a l u a t io n de la c o n c e p t io n
DANS LA STRATÉGIE DE PROJET °
L
e parcours g é n é r a t i f du projet UN MODÈLE D'ANALYSE DE LA CONCEPTION ARCHITECTURALE *L
e nouvel e x e r c i c e du projet d'a r c h i t e c t u r e 9 LA STRATEGIE DE CONCEPTION Al t e r n a t i v i t é a c t a n t i e l l e de l'homme et de son e s p a c e de v i e Ac t a n t s et i n s t a n c e s dans l e s OPÉRATIONS DE LA CONCEPTION ARCHITECTURALEL
a m o d é l i s a t i o n d e s s y s t è m e s RÉFÉRENTIELS EN ARCHITECTURE A n n e x e Ta b l e a u x s y n t h é t iq u e sA N N E X E
R É F É R E N C E S DES TRAVAUX THEORIQUES COMPLEMENTAIRES RELATIFS AU CONTENU DU "Ra p p o r t de Re c h e r c h e" et DES TRAVAUX EXPERIMENTAUXRÉALISÉS SUR CONTRATS EN RELATION AVEC CERTAINS OBJECTIFS DU Programme de Recherche
P
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LIMINAIRE
"D IA LO G IE" DE L 'I D E E L ET DU CONCEPTUEL
POUR UNE CONCEPTION RENOUVELEE DE L'ESP AC E
"DIALOGIE" DE L'ID EEL ET DU CONCEPTUEL
POUR UNE CONCEPTION RENOUVELE DE L'ESPACE
I. CONCEPT/. CONCEPTION, CONCEPTUALISATION
I I ,
P
r é c is io n s terminologiques et commentairesI I I ,
D
e s fragments de l'
espace b â t i auxSEGMENTS DE L'ESPACE VECU
IV, C
onjugaisons pedagogiquesLa conception architecturale s'effectue sur un fond d'ambiguité. Alors
que le terme conception* se forge a partir du mot concept*, c'est en
fait l'id é e * gui est, aujourd'hui encore, la source de l'invention
spatiale.
La permutation, dans le langage courant, des termes concept et idée
aux memes positions syntaxiques créé un effacement sémantique* de
leurs différences.
Ceci se manifeste dans le domaine de l'expression architecturale où le
stock d'idees disponibles dans la société vient s ’in ve stira un moment
de son histoire sans incorporer la variété des solutions permises par
le potentiel technologique. Celui-ci est difficilement exprimable en
lui-même, sinon dans ses produits et ses oeuvres. Il revient a
l'architecture de manifester l'existence de cette potentialité par une
maîtrise des oeuvres subsumant les produits.
L'utilisation d'une "capacité industrielle" suppose un projet*: un
concept, plus qu'une idée. Mais la constitution de dispositifs d’usage
et d'action, sous forme de "capacités spatiales", physiques et
techniques, a l'image de la capacité indiquée ci-dessus, se produit par
simple itération idée/forme*. Ce processus é boucles innombrables ne
cesse de se reproduire dans l'histoire de la conception des oeuvres
architecturales et a force de loi aujourd'hui.
* Les mots et expressions marqués d'un astèrique sont commentés
dans la 2ème partie du texte.
L élaboration implicite du concept, rearticulant, les idées pour une
cohérence de l'action, était la marque d'une production "remettant sur
le rnetier cent fois son ouvrage", tel parfois encore le dessin de
projet.
Le développement de i industrie et du geme informatique rend
illusoire l'efficacité de la seule idée, lors même que la duree de sa
longue maturation qui lui donnerait force de concept-construit
échappé
aux temps-éclairs
des productions conceptuelles et
materielles, contemporaines.
Certes, tout potentiel industriel - la contemplation de la machine
aidant - n'est pas absent du ieu des images. Agent de rentabilité, il
est également source d'utopie. A la difficulté de m aîtriser les
produits et composants dans des oeuvres nouvelles, il incite à lui
substituer le plaisir de la métaphore, valorisant l'architecture par la
référence directe à la beauté des appareils de l'industrie.
Le propos n'est pas ici d'exploiter les déviances maximales du
potentiel technologique par idéation* débridée, mais simplement de
savoir comment mieux en tirer parti, pour aujourd'hui, en agissant sur
le procès conceptuel, véritable maître d'oeuvre du "process", que
celui-ci soit totalement industrialisé ou qu'il demeure encore hybride
comme dans le secteur du batiment.
L'idée qui peut accéder à la rigueur d’un concept par un travail
critique sur l'existant, le "déjà là", ne peut engendrer une
représentation de l'anticipé, le "non encore là", si elle ne procède que
de l'im age et non de la technè.
On le voit bien aujourd'hui en architecture: l’idée s'exprime par un jeu
sur les images, débrayé la plupart du temps des possibilités offertes
par le 'potentiel technologique" des laboratoires d’industrie et des
chaînes de production de composants et systèmes.
Certes il manque une "grammaire" gérant les interfaces des produits
industriels. Mais cette grammaire ne peut provenir que de celle,
préalablement constituée, gerant l’organisation de l’espace. Or
celle-ci ne peut être engendrée par les procès actuels d’idéation et de
mise en forme des programmes au coup par coup. Elle résultera plus
sûrement de la définition explicite de concepts relatifs aux lieux,
nommés ou non, délimités ou non, articulés selon des "règles" de
contiguïté spatiale formant des "métarègles" pour les produits de
l ’industrie.
L idéation dènèratrice de formes selon le principe cybernétique de la
"boîte noire” ne peut prendre en charge ce travail clair sur l’espace,
qui relèverait au contraire d’un procès de construction explicite des
concepts.
L’idée seule paraît impropre à solliciter les capacités industrielles,
sinon dans la reproduction du "déjà la", é des variantes près. Le
remede a cette situation de conception n’est pas dans un changement
de programme d’enseignement comprenant plus de calcul et de
technique,
et
moins
d’art
et de
sociologie.
La
formation
d'architectes-faux ingénieurs est depuis un siècle une tentative sans
cesse renouvelée, et sans résultats probants.
Li3 question a résoudre, celle de l'efficacité de la conception
architecturale, serait, plutôt de substituter a un fonctionnement ideel.
agissant comme seule source de la conception, un fonctionnement
associant cette germination et expression de 1 idée a une construction
explicite du concept. En d'autres termes, il conviendrait d'associer au
procès d'ideation fonctionnant en "black box" un procès de formation
de concept (conceptualisation) fonctionnant en "glass box" et surtout
de les vivre dialectiquement au sein d'un même procès de conception.
Telle est la problématique développée dans ce document a travers un
parcours en quatre étapes.
Tout d'abord, l'interrogation porte sur la place du procès conceptuel
dans 1 industrie, dans la maîtrise d'ouvrage et dans l'usage de l'espace.
La deuxieme partie est consacrée à un commentaire sur les principaux
termes et expressions, employés dans ce texte, à la fois pour préciser
ce qui a été abordé dans le développement précédent sur le procès
conceptuel et pour introduire ensuite dans la troisième partie, l'étude
des conditions d'un renouvellement du mode de conception de l'espace.
Le document se termine par une réflexion sur l’expérimentation
pédagogique, associée à la poursuite de cette recherche.
1. CONCEPT, CONCEPTION. CONCEPTUALISATION
Le process industriel requiert une conceptualisation
préalable
8
Les concepts de ia maîtrise d'ouvrage et de la
programmation : une facilité de langage
12
L habiter : une conceptualisation incessante et
renouvelée de l'espace
15
Il PRECISIONS TERMINOLOGIQUES ET COMMENTAIRES
Idée-concept - Projet - Itération idée/forme
20
Construction du concept - Emergence de l'idée
23
Idéation - Conception - Conceptualisation
26
III. DES FRAGMENTS DE L'ESPACE BATI AUX SEGMENTS
DE L’ESPACE VECU
Fragmentation spatiale et segmentation significative
Le procès de conceptualisation
31
La conceptualisation de l'espace - Le concept d'espace
34
L'espace dans le "parcours génèratif de la signification"
IV. L ÛNJIJGAI SüNb HEDAGObI DUES
Expérimentation de la conceptualisation - Attitudes :
interprétation vs construction
41
Pratiques alternatives : structuralisme et
deconstructionmsme - Expérimentations conjuguées
45
Idéation et aide logique a la conception - Sémantique
I. CONCEPT, CONCEPTION, CONCEPTUALISATION.
LE PROCES INDUSTRIEL: UNE INDISPENSABLE CONCEPTUALISATION
Le passage de la conception par itération idée/forme, nourrie au jeu
des images, a la conception intégrant idéation et conceptualisation
dans une même operation de modélisation du projet n'est pas une
recommandation fortuite. Elle n'est pas non plus proposée par simple
convenance avec les manières de faire de la publicité ou de toute
autre pratique ayant maîtrisé les instrumentations conceptuelles et
matérielles de ce temps.
En effet, à la différence des espaces organisés par l'acte
architectural, les produits industriels pour le batiment sont
totalement conceptualisés. Le procès de fabrication "en usine” se
différencie du procès de travail "sur chantier" en ce qu'il ne peut
exister sans que chacune des propriétés qui seront investies dans le
produit n'ait été préalablement distinguée, isolée, objectivée.
Le véritable objet du travail d'industrie, s'il est un produit au terme
du process, est à chaque phase de celui-ci une propriété particulière
et une seule, informant (in-formant) la matière è oeuvrer a un
moment particulier de sa transformation.
La dématérialisation du produit en ses propriétés constitutives est
l'acte préalable de la mise en place du process industriel qui le
mettra ensuite en oeuvre. Ce n est pas tarit le dessin du produit
termine qui s'impose que le dessin necessaire chaque fois a
l'operation d'information de la matière par une propriété.
Le dessin d'architecture, fait a la planche ou sur ordinateur, est un
dessin de produit fin i, représente schématiquement en plan, coupe,
élévation et axonomet.rie fou perspective). Il ne correspond pas a
l'ensemble des dessins qui seraient, nécessaires pour montrer a
chaque pas de la construction l’in-formation du batiment par une
propriété, comme cela se produit dans l'industrie.
Le croquis de calepin fait sur chantier n'est lui aussi qu'une précision
du dessin de produit fini, apportant le bénéfice d'un agrandissement
local du détail d'une synthèse technique, non la représentation du
changement d'état d'un élément physique produit par l'information
d'une propriété dans sa constitution antérieure.
L espace projeté n'est pas ainsi dèmatérialisé sur la planche-a-dessin
en ses diverses propriétés pour être ensuite reconstruit. Seul
l’ensemble de l'espace et ses parties font l'objet d'une représentation.
D’ailleurs, l'emploi actuel de l'informatique en architecture, ne remet
pas en cause la façon de concevoir le projet. Il apporte seulement la
possibilité d'amplifier la connaissance de l'articulation des p a rtie s
dans le tout, non celle des procès de constitution du tout par ses
propriétés successivement investies dans la matière du construit.
Le procès de matérialisation explicite du bâtiment par "information
séquentielle" de celui-ci jusqu'à son achèvement (à l'image même du
traitement informatique classique) ne peut donc avoir lieu, ni sur le
chantier, ni dans l'ordre de la représentation architecturale préalable.
L'informatique contemporaine, meme celle qui utilise les ressources
de puissants systèmes, perpétue la conception du projet selon le
principe de I'idéation/mise en forme (de l’esquisse au projet). Elle ne
recourt pas au détour par l’explicitation des propriétés du concept,
qui deviendraient chacune a leur tour, par l’acte de production, les
propriétés du produit, s ’investissant ensuite dans l’oeuvre.
L’espace produit par imagination et idéation pourrait être explicité
parallèlement dans ses propriétés constitutives. Les lim ites de la
représentation schématique d’objets physiques, qui demeure la régie
en architecture, freinent la mise en oeuvre du double mouvement de la
conception, qui assumerait dialectiquement les procès d’idéation et
de conceptualisation.
L’espace n’est pas en effet explicité dans ses propriétés, meme s ’il
est nommé. Sa détermination se fait par analogie avec d’autres
espaces portant le même nom et réalisés en d’autres lieux. Ceux-ci ne
sont pas davantage conceptualisés que l’espace lui-même en projet,
sans doute par absence de la pratique du diagnostic préalable qui
aurait permis de les évaluer.
Ce procès par analogie dispense de la construction loqioue du concept,
que ce soit celui du lieu, du solide d’englobement ou de la relation de
l’ensemble "lieu englobé” avec son environnement à composantes
multiples.
L analogie est mise en jeu par l'idéation dans son jeu comparatif sur
les images. Elle permet de faire leconomie de la recherche des
propriétés pertinentes a investir dans l’objet du projet. Dans
l'acte
de comparaison
quelle opère entre diverses oeuvres
architecturales qui
constituent les references du concepteur,
conscientes ou non, et entretiennent le jeu des images, l'idéation ne
retient que les propriétés s a illa n t e s qui fondent l'identité de
i oeuvre en projet.
La détermination de l'anticipe repose ainsi sur le reperage de sa
similitude ou de sa différence avec d’autres oeuvres existantes,
provenant de "matrices industrielles" antérieures au potentiel
technologique disponible a l'instant de la conception.
L'ideation qui nait de l'analogie, limitée à la confrontation des
apparences, fonde son oeuvre sur un procès de reproduction des
images. L’incarnation dans la matrice technique contemporaine lui
est contraire. La culture architecturale en est dissociée.
Le retard de l'expression architecturale par rapport au développement
industriel de la société où elle èclot et la fuite dans le jeu formel sur
les images a travers des représentations schématiques d'ouvrage,
imporpres à rendre compte de l’oeuvre en cours d eiaoorauun, uni teur
origine dans
la manière de penser l’architecture. L’analogie
d’apparence est la source de sa reproduction ; la conceptualisation
serait celle de son renouvellement.
LES
"CONCEPTS"
DE
LA
MAITRISE
D'OUVRAGE
ET
DE
LA
PROGRAMMATION : UNE FACILITE DE LANGAGE.
si l’idéation se nourrit du fonctionnement des images et de leur
rapport analogique, cela se produit quel que soit le domaine où ce
mode de penser opère.
L'espace est le lieu de pratiques sociales, dont l'existence concourt ë
le définir par lé-méme. Si l'espace, dans sa constitution physique et
son organicité, relève de procès de fabrication, il est en même temps
un d is p o s it if d'action et praticipe au jeu social des activités
d'échange économique et symbolique.
De cela on peut avoir aisément une idée, voire meme de nombreuses
idées. Celles-ci
nous
viennent de notre expérience et de
l'environnement culturel où chacun de nos actes se produit.
Au jeu des im ages, provenant de la vision et de la connaissance des
objets, des produits et des oeuvres, s'ajoute celui des actes, des
rapports sociaux et des procès que ces derniers régissent. Le social
comme le spatial est source d'idéation.
Mais si le potentiel industriel, d’où nait la matérialité du bâti,
engendre l'obligation de décrire la sémantique de l'organisation
phusique et de son fonctionnement (analyse organique et analyse de
valeur),
la
"matrice sociale" d'où se génère
le programme
production aussi strictes que celles d'un "process".
A la rigueur des sciences sociales, qui se constituent dans
l'observation critique des pratiques, fait face dans la détermination
des objectifs et des contenus par la maîtrise d'ouvrage., une mise en
parallèle des expériences passées. C'est de cette comparaison entre
ses propres expériences et parfois celles des autres, sur le mode de
la simple confrontation, que naît par différence l’identité du nouveau
programme.
Aucune nécessite, provenant d'un quelconque procès séquentiel de
traitement de la m atière, ne fait loi dans la production d'un
programme.
Les
contraintes d'un traitement
automatique de
l'inform ation paraissent par ailleurs bien légères par rapport à
celles d'un process industriel.
Le passage obligé par la construction du concept n'a pas ainsi de
raison d'exister. Si le terme "concept" est fréquemment utilisé dans
les milieux de la maîtrise d'ouvrage et de la programmation, celui-ci
résulte le plus souvent d'une facilité de langage (comme dans les
discours sur l’architecture), faisant croire à un procès de pensée
différent de la production empirique d'idées.
L'analogie d'apparence qui régit les procès de conception spatiale est
installée, dès la phase de programmation des ouvrages, dans les
textes et schémas que les maîtres d’ouvrage remettent aux
architectes. Elle est la cause de la rédaction des programmes en
termes de moyens évalués quantitativement (m2, nombre de
personnes, prix), à l'instar des descriptifs, non en termes d'o b je ctifs
évalués qualitativement. L'analogie est plus simple à réaliser, en
effet, lorsqu’elle porte sur des objets concrets qui font image., plus
que sur leur fonctionnement abstrait, telles leurs valeurs d'usage ou
de symbole.
L HABITER : UNE CONCEPTUALISATION INCESSANTE ET RENOUVELEE DE
L'ESPACE PAR SES HABITANTS
Le troisième
grand
acteur de l'espace, sinon le premier, c'est celui qui
en a l’usage quotidien, celui qui en fait quelque chose de précis
lorsqu’il en dispose : 1 habitant, "l'habitateur", dit-on en vieux
français.
Sa pratique de l'espace est considérée, a n'en pas douter, comme celle
de quelqu'un qui procédé par idée plus que par concept, par
enchaînement
linéaire
d'idées
plus que
par a rtic u la tio n
pluridimensionnelle de concepts. L'habitant aurait-il le temps de
spéculer sur le concept pour apprendre à se servir de l'espace
préalablement conçu par d'autres puis m atérialisé"?
Cette attitude restrictive v is-à -v is de l'utilisateur des lieux fait
l'impasse sur le nécessaire travail de re-conception permanente de
l'espace par celui qui se l'approprie pour en constituer le terrain
concret de sa pratique et de ses actes.
Si la production architecturale met "en place" des dispositifs
d'espace, elle ne met pas directement "en scène" des acteurs, à défaut
sans doute de ne pouvoir disposer encore de véritables programmes de
simulation informatique.
L'espace construit n'est qu'un espace potentiel, une capacité
physique. Sans inscription de ce dispositif dans le contexte d'une
utilisation sociale selon des programmes d'usage., individuels ou
collectifs, privatifs ou publics, l'espace n’accede pas à la valeur de
lieu, segment significatif de l'étendue, fragmentée préalablement en
volum es construits.
Il est plus difficile de reconnaître que le processus d'appropriation de
l'espace ne peut s'effectuer, ni être totalement assumé, sans une
affectation de valeur au lieu ou plus exactement a ce qui fait d'un
espace disponible un lieu. Le génie du lieu serait-il seulement le fait
de celui qui le pense dans l'anticipation, non celui de l'acteur qui
l'habite, agissant sans cesse sur sa relation à l'espace et pouvant
ainsi le modifier et "l'amplifier'' dans sa valeur ?
Avant de prendre possession des lieux a la veille de les occuper, un
"état des lieux” est dressé. Il s'agit en fait d'espaces identifiés de
façon banale, en raison d'une description linéaire acceptée, partagée
et fondant le sens commun de ces lieux. Cette désignation des lieux
permet d'affecter, par exemple, le nom "cuisine" à l'espace
rassemblant les objets et attributs associés au programme
stéréotypé "faire la cuisine".
La mémoire collective opère cette puissante simplification de la
dénomination des espaces en indiquant leur destination principale
apparente.
Le jeu des concepteurs sur les idées et les images a peu d'effet contre
cette réduction des pratiques sociales a des m odèles élém entaires
d'usage de l'espace et, par la, à des stéré o typ e s spatiaux. Ceux-ci
deviennent les matériaux d'appui de la programmation a défaut d'être
dématérialisés par un diagnostic (dont la pratique est inexistante
aujourd'hui) sous forme de concepts qui seraient producteurs de
nouvelles occurrences spatiales. Matériaux figes de la programmation,
ceux-cile demeurent dans ! acte de conception qui la prolonge. Cette
façon d'opérer rend inelectulable la perpétuation des modèles
réducteurs., sous les habillages partiellement renouvelés des modes
de formes.
Le langage quotidien sim plifie le rapport à l'espace, à l'inverse de la
pratique qui le multiplie et l'enrichit. Cette réduction s'apparente à
celle qu'opère l'architecte en dessinant ses plans. Les deux procès,
celui de la conception et celui de l'usage. participent autant de cette
sim p lific a t io n verbale
Les
faits
d'usage des
habitants révèlent
au contraire une
spécification d'emploi des lieux instaurant, a l'intérieur des pièces,
des coin s portant parfois un nom, mais également des endroits
apparemment non bornés, ni remarqués, ni meme désignés par un
attribut quelconque.
Certains de ces endroits sont cependant précisément circonscrits
dans une géométrie aux bords flous, mais bâtie par triangulation
complexe sur des points de repères certains. Ceux-ci sont des
fragm ents d'environnement, tels des objets d'usage courant, un angle
de meuble, un bord de tapis, un bas de mur, un bibelot, une zone de
lumière, un pli de tissu, un reflet, un bruit cylique.
Au delà de ces évidences physiques, -même si l'habitant n'en a pas
conscience dans l’usage- c'est le concours de ces fragments d'espace
au deroulement, d'un programme d'action qui leur conféré valeur
La oelection des valeurs dans l'espace d’environnement proche se
produit à partir d’un m icro -u n iv e rs sémantique, disponible chez
I habitant, qu'un programme d'action sollicite et met en oeuvre dans
l'appropriation du lieu par le recours a des fragments repérés,
utilisés, devenus significatifs d'un usage particulier.
Vivre un lieu selon un faire caractérisé, c'est choisir dans
l'environnement disponible un ensemble de ses fragments en fonction
d'un projet (dessein) qui se manifeste ainsi. De meme que le
programme d'usage demeure la plupart du temps un non-dit,
l'opération qui ressemble ici a un travail patient sur les propriétés du
concept, reste dans l'implicite.
Mais la durée de vie dans les lieux fait que le concept du lieu, relatif
é l'endroit même où se produit un acte, se rode par le renouvellement
possible de l'acte lui-même, selon les programmes répétés de
l'existence.
S'approprier durablement un espace, c'est participer sans cesse é sa
re-conception. de la même manière que la reconnaissance de “la
potentialité d'un espace" par l'habitant est à l'origine d'un processus
d'idéation de 1 utilisateur qui l'incite à nouveau è s'approprier le lieu.
Dans sa pratique de médiation de l'habitant, l'architecte établissant
le projet tente de revivre ces procès d'appropriation des lieux. S'il le
fait, il ne dispose pas du même "temps d’expérimentation" que
l'hcb’tGnt. Le procès d'idèation/mise en forme, qu'il vit lors ae cette
médiation, se déroule dans des temps incomparablement courts par
rapport a ceux que l'usager connaît et vivra dans les lieux projetés. Ce
procès ne peut correspondre à celui d'une construction non explicite
du concept dont l'habitant devient pragmatiquement l'auteur, "dans la
duree".
Certes, il n'est pas utile a l'habitant des lieux de forger explicitement
des concepts pour entreprendre une action dans l'espace. Meme s'il le
souhaitait, l'architecte ne disposerait pas du temps nécessaire pour
opérer une conceptualisation "dans l'implicite" de sa pratique, lors de
sa médiation mentale du sujet s'appropriant l'espace.
Renvoyé au seul procès de la conception par idéation, qui le condamne
au jeu des images et des stéréotypes restreignant sa liberté, il lui
reste cependant la possibilité d'effectuer un travail sur le concept
"dans l'explicite", a condition que ce travail puisse s'effectuer dans le
temps contingent de la conception du projet.
Les méthodes d'explicitation existent. Il suffit d'y recourir. Seule, en
outre, la méthode est productrice de temps. Ce temps ainsi libéré est
paradoxalement rendu disponible, y compris pour une élaboration non
explicite du concept, (sans méthode), enrichissant par ailleurs le
procès d'idéation dans le cadre de la "stratégie de conception" qui
subsume ainsi dialectiquement ces différents procès.
II. PRECISIONS TERMINOLOGIQUES ET COMMENTAIRES
IDEE/CONCEPT - PROJET - ITERATION - IDEE/FORME
- IDEE :
* “tout objet immédiat interne de la pensée" (Larousse du XXe
siècle)
* "représentation qui se fait de quelque chose dans l'esprit,
soit que cette chose existe au dehors ou qu'elle soit purement
intellectuelle" (Littré)
- CONCEPT :
* "les idées sont différentes des concepts qui précisément n'ont
pas un caractère in t u it if (Universalis. Le Savoir)
* “un produit de l'abstraction" (Larousse du XXe siècle)
* "idée générale et abstraite, construite par l'esprit" (Le Robert)
De l'opposition concept/idée on retiendra :
* le caractère construit du concept et celui intuitif de l'idée
* la durée nécessaire pour la construction du concept, face é
l 'immédiateté de l’émergence de l'idée
* l'extériorisation possible de la construction du concept, à
l'inverse de l'intemalité de l'organisation de l'idée.
Note a propos de l'expression EFFACEMENT SEMANTIQUE
Exemple d’effacement sémantique entre deux termes :
l'emploi indifférencié de "construire" et "bâtir" aux
memes positions syntaxiques. Appartenant au même
paradigme, ils sont souvent utilises l’un pour l'autre.
Cela revient a faire disparaître le seme /support/ qui
différencie le bâtir du construire. Construire s'applique
a tout espece d'arrangement, alors que bâtir impliquant
une relation au sol ou à l’eau ne se rapporte qu’aux
édifices ou aux vaisseaux.
PROJET :
* "but que l’on pense atteindre, idée que l'on forme de ce que l'on
fera et des moyens que l'on emploiera’’ Voir DESSEIN (Le Robert)
Dans cette acceptation "projet" appartient au meme paradigme
que celui de programme aux deux sens où l'on peut l'utiliser :
programme d'objectifs et programme de moyens, ce dernier
correspondant à l'usage le plus fréquent en architecture.
* "la première pensée, la première rédaction de quelque acte ;
ébauche du plan d'édifice à construire" (Littré)
Ici le basculement commence a s ’opérer entre deux acceptions du
terme projet : le pensé et l’exprimé.
* "dessin en plan, coupe, élévation d'un édifice a construire" (Le
Robert)
Cette dernière définition du projet est réservée dans le Robert a
l’architecture, où se pratique effectivement la réduction du
projet a celui d'un dessin (le projet comme chose, non le projet
de taire quelque chose),
La pregnance du projet-dessin risque d'estomper la valeur
"dessein" du projet et rend inutile de préciser, plus que l'idée du
but, le concept sous-jacent au projet.
ITERATION IDEE/FORME
Dans un processus cybernétique fonctionnant selon le principe de
la boîte noire, il n’est pas utile de savoir comment les idées du
concepteur s'investissent dans des formes. Le passage des idées
aux formes et leur bouclage inverse conduisent à une précision
des unes et des autres, en réponse à un programme ; mais
l'investissement de valeurs dans l'expression architecturale se
fait alors implicitement.
Si une argumentation in fine est toujours possible, le contrôle de
son adéquation au projet-dessin demeure incertaine sans le
détour par le concept construit, seul fondement possible d'une
argumentation explicite.
ÛNSTRUCTION DU CONCEPT - EMERGENCE DE L'IDEE
LA CONSTRUCTION DU CONCEPT
Les deux composantes du concept :
* la dénotation ou extension : "ensemble des ind ivid u s qui
vérifient le concept".
* l'intention ou la compréhension : "le contenu du concept”
(Umversalis. Le Savoir)., c'est-a-dire l'ensemble des propriétés
dont sont dotés les individus vérifiant le concept.
En architecture, par exemple, le concept "cuisine" peut se définir
ainsi :
* en extension : un ensemble de lieux (endroits, coins) réalisés,
servant au déroulement de pratiques relatives à l'acte de faire la
cuisine, conformément à leur destination.
Le diagnostic porté sur plusieurs cuisines "en utilisation"
permet de construire progressivement le concept par le travail
de modélisation qu'autorise leur mise en comparaison.
Il est impossible et de toutes façons non nécessaire d'explorer
toute l'extension du concept par une reconnaissance de tous les
cas de figure. Aux réductions de l'échantillonnage se conjugue
l'économie des études qualitatives (sémiotiques et systémiques)
mettant en évidence "le relationnel" propre à la cuisine
considérée en tant que lieu d’un faire socialement reconnu.
* en compréhension : l’ensemble des prop rié té s attribuées aux
lieux où se fait la cuisine, chacun des lieux "cuisine" observé
constituant une occurrence du concept, c’est-à-dire une
organisation particulière de ses propriétés hiérarchisées. Les
unes sont communes à toutes les cuisines-occurrentes et
fondent leur type ; les autres sont spécifiques ë chacune d'entre
elles et établit leur identité, leur originalité dans la famille des
cas répondant au type.
La définition du concept a lieu simultanément dans son extension
et sa compréhension.
L'EMERGENCE DE L'IDEE.
Les idées relatives a la cuisine, associées aux im ages
mémorisées par l'expérience, ne fait pas naître nécessairement
une représentation construite du concept, sous la forme d’un
ensemble de propriétés hiérarchisées, mais plutôt un analogon
fabriqué a partir de réminiscences et de comparaisons récentes.
Toutefois la réflexion durable sur l'expérience peut conduire a
dégager une idée générale par a b stra c tio n des cas singuliers et
ë en forger une sorte de modèle. 11 s'agit alors d'un concept en
voie de construction dans l'implicite du concepteur.
L'analyse de lieux-cuisines "en utilisation", selon le principe de
l'analyse de valeur, révéle que le concept n'est pas une
construction finie de l'esprit et qu'il n'est pas un ensemble de
propriétés stabilisé, mais qu'il est doté d'un dunamisme interne.
relevant ainsi d'une approche systémique.
La sémantique du concept est constructible en effet ë des états
de connaissance caractérisés et successifs. L'observateur des
lieux et de leurs usages, de meme que l'auteur du diagnostic ne
ont pas etrangers a la représentation dynamique du contenu du
oncept.
Note a propos de l'incertitude sémantique de certains
termes utilisés dans le texte
Conformément
aux
habitudes du
langage courant
conduisant à l'effacement des différences sémantiques
pour ne pas indisposer le lecteur par la répétition des
memes
termes.,
"élaboration".,
"fabrication"
et
"construction" permutent parfois dans le texte au sein
d'un même paradigme et ne sont pas distingués
volontairement.
De même "consciente" et "implicite" ne sont pas des
termes situés dans une opposition définitive : ils
suggèrent une différence toutefois entre la façon de
forger un concept par le renouvellement de l'expérience,
quelle que soit la conscience que l'on puisse en avoir, et
la manière de le définir à la fois en compréhension et en
extension par une suite d'opérations rigoureuses
d’observation, de comparaison et de déduction.
IDEATION - CONCEPTION - CONCEPTUALISATION
- IDEATION .
* "formation et enchaînement, des idées ; les operations de
l'idéation sont directement influencées par les sensations et par
les affections quelles provoquent dans le moi sensible"
(Larousse du XXe siècle)
- CONCEPTION :
* “tout acte de l’intelligence, de la pensée, s'appliquant a un
objet réel ou imaginaire" (Le Robert)
* "état de l’intelligence qui fait apercevoir certains rapports
entre les idées et les objets auxquels elles se rapportent ;
faculté de comprendre les choses" (Littré).
"Comprendre les choses" par une définition "en compréhension"
du concept relatif aux choses : ceci consiste tout d’abord é
reconnaître les propriétés investies dans les choses lors de leur
production et les propriétés attribuées aux choses par leur
appropriation.
Un classement des propriétés peut être ensuite effectué selon
deux directions :
. d’une part, celles qui fondent l’id e n tité commune aux choses
en raison de leur similarité, constituant ainsi le type de
référence des cas étudiés ou encore "la famille d’appartenance"
susceptible de recevoir un nom générique.
aux autres cas singuliers répondant à ce meme type, l'altérité
suffisante de toute chose pour assurer par différence son
identité propre
dans la famille
Dans le langage courant, le nom de la chose qui désigne le cas
particulier d'un type apporte une précision à son nom générique:
par exemple, chaise (cas) par rapport à siégé (type) ; chambre
(cas) par rapport à pièce habitable (type) ; chambre d'enfant par
rapport a chambre. La meme précision s'obtient par l'emploi d’un
prénom pour les personnes et d'un qualificatif pour les choses,
et dans ce dernier cas, soit sous la forme d'un adjectif, "le
balcon vitre", ou d'un autre substantif, "la maison avec perron".
L'axe d'opposition identitê/altèritè sert tout autant a qualifier
le
type
par rapport à d'autres types, que le
cas
par rapport au
type et a d'autres cas.
Le type et le cas sont placés conceptuellement dans une relation
d'inclusion (le cas dans le type). Cette relation peut jouer, quel
que soit le niveau de fragmentation de l'espace en micro-unités,
telles que le coin, ou en unités correspondant à la construction
(le volume), ou encore en unités d'espaces ayant une pertinence
urbaine (l'endroit).
A ce propos, les études récentes de typologie architecturale et
de morphologie urbaine ont un fondement insuffisant. Elles
éliminent en effet les multiples niveaux de l'articulation
spatiale où il est tout autant justifié de reconnaître une
typologie des unités morphologiques de l'urbain, (du bâti et du
non bâti), quune typologie des volumes internes et externes,
2 )3
voire meme celle des lieux qu'ils comportent dans une hiérarchie
non évidente.
Morphologie et typologie sont présentes à tous les niveaux
d'articulation du spatial à condition de mettre en place les
conditions de leur reconnaissance, non par par un découpage de
l'espace en fragments géométriques rendus pertinents par une
interprétation ultérieure, (comme cela se pratique en majorité
aujourd'hui), mais par une saisie dialectique (expression-
contenu) de segm ents pertinents. Ceux-ci correspondent ou non
aux fragm ents qui sont considérés, par un a priori formel,
comme objectifs parce qu'ils sont identifiables sur plans et
cartes.
Cette saisie de segments (et non seulement de fragments) n’est
réalisable que par un travail préparatoire de "dématérialisation
de l'espace" effectué selon un procès de conceptualisation qui
est, a l'inverse de l'interprétation du réel, un travail de
construction sémantique.
CONCEPTUALISATION
Ce terme est absent des dictionnaires usuels, bien qu'il soit
employé pour dénommer l'acte de forger explicitement un
concept à partir d'une situation empirique donnée ou d'une
volonté d'action.
Dans les faits de production architecturale, il s'avère que la
conception pratiquée n'établit pas de différence entre concevoir
une chose (un objet, un projet, un produit, une oeuvre) et
élaborer un concept relatif à cette chose, c’est-à-dire, son
organisation sémantique. Cette définition du concept s'obtient
non pas par approximation d'idées., mais en le construisant
dialectiquement "en compréhension" et "en extension", sans
donner nécessairement
forme immédiate au projet qu'il
sous-tend et motive.
Si l’on considéré, par exemple, le mot "tête", il est tout a fait
possible dans une situation concrète de se faire une idée
immédiate de la tête de quelqu’un ou de quelque chose : les
images et les mots ne manquant pas pour dire dans l'instant une
parole à son propos. Cependant le repérage des sèmes, qui
constituent les unités de signification minimales de ce nom, ne
se fait pas pour autant de façon explicite. C'est en exploitant
l'extention et la compréhension du concept, dans des occurrences
d'emploi du mot tête que l’on parvient a identifier certains
sèmes tels que ceux de sphéricité, supériorité, antériorité,
extrémité, so lid ité ,... au sens propre ou figuré.
il n’est pas évident non plus que les quelques dizaines de semes,
présents dans l'ensemble des expressions du langage courant et
comportant le mot tète, apparaissent immédiatement dans leur
hiérarchie sémantique : "tête d'un arbre", "tête de canal", "être à
la tête dune affaire", "tête bien pleine", etc. Certains sèmes
relèvent du type : (ce sont les sèmes génériques). Les autres
fondent la particularité d'un cas, d'une occurrence du concept: les
sèmes spécifiques. Certaines sèmes (par exemple, "extrémité")
font partie du noyau sémique du mot tête, sa figure nucléaire,
alors que d autres sèmes (par exemple, "antériorité" dans
l'expression
"tète de canal")
sont porteurs des effets
environnementaux de son emploi : les sèm es contextuels.
D'autres catégories de sèmes sont reconnaissables: par exemple,
les sèmes dénotatifs et les sèmes connotatifs. Cette opération
d'identification sémantique est réalisable à partir de n'importe
quel objet de notre environnement (confère AJ. Greimas et J.
Courtes in Dictionnaire raisonné de la théorie du langage,
Hachette Université, page 333).
11 ne présente pas d'interet d'exposer ici davantage ce procès de
dèmatèrialisation-reconstruction, mais d'indiquer seulement
que, hors d'un travail explicite de construction du concept, il est
pratiquement impossible dans notre saisie empirique du monde, è
un instant donné, d'en établir une représentation précise par le
seul procès de l'idéation.
11 en est de l'espace construit et vécu comme de tout autre objet
du monde. En avoir une idée ne peut remplacer l'élaboration
explicite du concept qui correspond é son être. Etre un certain
espace, c'est appartenir a l’in te rse ctio n conceptuelle de deux
ensembles, l'un défini en extension, l'autre en compréhension ; ou
encore, appartenir à une famille d'espaces du même type et
recevoir de ce fait les attributs particuliers de son altérité et
de son individualité.
Il en est ainsi de tout ce qui est identifiable : personnes, choses,
idées, objets, normes, espaces ... et des relations elles-mêmes
qui les
associent, comme celles qui nous concernent ici et
III DES FRAGMENTS DE L'ESPACE BATI
AUX SEGMENTS DE L'ESPACE VECU
FRAGMENTATION SPATIALE ET SEGMENTATION SIGNIFICATIVE
Interprétation de fragments et construction de segments sont donc
deux opérations de saisie du réel totalement distinctes. La première
considère que le fragm ent d'espace, isolable objectivement dans le
réel construit (ou dans sa représentation analogique) est pertinent
pour en produire ensuite une interprétation. Celle-ci est peut-être
valable au regard de ! histoire, mais ne renseigne pas sur les valeurs
de la représentation sociale hic et nunc avec lesquelles on travaille
en architecture.
La re-sémantisation des morphèmes de l’urbain par leur réemploi
formel dans le projet d'aujourd'hui reste une entreprise hasardeuse,
couramment pratiquée. Elle repose sur une sémiologie triviale
réduisant les signes à leur seule expression et laissant par ailleurs
libre cours à leur interprétation au moment de leur réutilisation.
Un procès de conceptualisation mené à ce propos prendrait en charge
simultanément les propriétés qui sont de l'ordre de la constitution
physique de l'espace, mais aussi de ses fonctionnements pratiques et
symboliques. Cela reviendrait a remettre a l'étude les fragments
isoles a partir des critères opérant au seul plan de leur expression
L'on serait ainsi parvenu au deuxieme type d'operation annonce
ci-dessus qui considère tout fragment spatial., dit objectif parce que
facilement repérable (parcelle ou travée), comme un découpage
provisoire permettant seulement de reporter l'information relative
aux valeurs contemporaines attribuées a l'espace. Ce report
d'information montre à l’expérience (confère les recherches du
laboratoire sur des parcours urbains et routiers, et par ailleurs sur
des logements) qu'une nouvelle segmentation de l'espace se superpose
au découpage objectif initial, selon des segm ents s ig n if ic a t if s gui
ne lui correspondent pas nécessairement.
Le travail de l'histoire "qui se fait" ne s'arrête pas aux
représentations graphiques
de l'espace (les cartes
et plans
constituant les relevés de 1 urbain d aujourd hui), ni a la recherche
historique faite a partir de ces documents.
Le travail de l'histoire est sans cesse à l'oeuvre, y compris dans la
remise en cause actuelle de ce que nous livre une représentation
géométrique, fidèle et contemporaine de l'urbain. Les pratiques
sociales nous précédent dans le travail théorique
La mise en oeuvre d'une observation des saisies perceptives et
proprioceptives de l'urbain a l'aide d'un logiciel opérationnel de
segmentation pertinente de l'espace in vivo montre le manque de
réalité de l'espace fragmenté de la cartographie, dont les unités
spatiales ne sont pratiquement jamais perçues comme telles
aujourd'hui.
LE PROCES DE CONCEPTUALISATION
Le procès de conceptualisation tend à reconnaître les contenus de
sig n ific a tio n ancres spatialement et a identifier simultanément les
segm ents qu'ils déterminent.
Il constitue le moyen de relativiser ce que nous livre l'étude
historique faite à partir de fragm ents urbains d'hier, encore
observables
aujourd'hui,
par
rapport
a
l'étude
des
f a it s
contem porains qui opèrent sur cette fragmentation. Les fragments
de l'urbain sont toujours actuels, mais ils sont oubliés dans le
quotidien, comme une trame derrière le motif, par les apports de
valeurs qui créent chaque fois une nouvelle segmentation.
Par le procès de conceptualisation, le rapport du social et du spatial
ne s'évalue pas à partir d'une géométrie urbaine et architecturale
découpée a priori. Leur rapport est permanent dans les "chaînes
syntagmatiques" que l'on peut reconnaître par conceptualisation dans
l'urbain ou dans les parties collectives et privatives de l'habitat.
Celles-ci sont distinctes des "chaînes séquentielles" d'espaces
obtenues par l'observation directe, organisant leur continuité par
séquences urbaines (rues, places, carrefours) ou par enchaînements de
volumes (entrée, couloir, chambre) et conférant ainsi une pertinence a
priori à ces fragments.
Les chaînes syn tagm atiq ues sont faites de segments non évidents,
définis par un travail de reconstruction du réel qui seul permet de
découvrir un rapport entre un contenu projeté et le lieu de son
ancrage. Cette opération constitue dialectiquement le motif du faire
et son lieu d'accomplissement dans l'espace.
Au-delà de la configuration géométrique sous les traits de laquelle se
perçoit
le
motif,
celui-ci
est ainsi
doté également d'une
configuration
modale
(les
modalités
du
faire)
et
d'une
configuration topique, le lieu du faire qualifié sémantiquement par
ses propriétés physiques, organiques, fonctionnelles et symboliques.
* * *
LA CONCEPTUALISATION DE L'ESPACE
La conceptualisation de l'espace, entendue comme une opération
distincte et à la fois constitutive de la conception d'un espace - et,
aboutissant directement au dessin d'un projet, - peut être considérée
de deux manières. Dans le premier cas, c'est l'espace relatif à une
catégorie de lieux qui est étudié, sans référence à une situation
concrète. Dans le second cas, il s'agit d'une opération de définition du
concept relatif à un espace particulier, empiriquement constitué à
partir d'un programme donné.
Le premier concept ne servira que de "modèle général" à la
détermination du concept du type relatif à cet espace particulier. Il
servira également à définir l'une des occurrences du concept, celle
à laquelle devra répondre le projet conçu.
-demeurera lui-meme, hors sa référence au type d'espace, un objet de
conceptualisation pour définir sa propre co n stitu tio n in situ. Le
contexte du projet fera de son côté l'objet d'un travail similaire pour
en définir le type et par ia-meme i occurence qu il représente.
Tout projet d'espace, conçu selon un certain programme, relève ainsi
de deux espèces de types : celui relatif à l'espace en question et celui
de son contexte.
Le projet est ainsi a conceptualiser comme "objet unique", situé à
leur intersection.
LE CONCEPT D'ESPACE
Le concept d'espace, servant de modèle général, est ô construire à
plusieurs niveaux.
L'espace peut-être considéré tout d'abord du point de vue de son
o rgan isatio n topologique et (géo)métrique, a l'exclusion de toute
autre propriété.
Cependant cette manière d'envisager l'espace conduit ensuite a
privilégier le visuel. Dès lors, cet espace s'enrichit de la présence
sensible de matériaux et de textures, qui s'incrustent dans sa
géométrie et lui donnent une existence concrète.
L'espace ainsi m a té ria lisé devient par adjonction de propriétés
relatives à sa stabilité un instrum ent d'usage social. L'espace est a
comprendre alors comme un dispositif impliquant la participation de
tous les sens et exigeant, par la, la prise en considération de toutes
îes qualités sensibles, sans les lim itera celles du visuel.
Cette reconnaissance progressive des propriétés de l'espace, par
! artifice d'un procès abstrait de sa reconstruction, conduit a faire
ensuite de l'espace un objet d'appropriation. L'espace relatif à un
programme ne peut plus être pensé dans un absolu, mais dans la
relation qui l'instaure comme lieu de la pratique.
L'espace n'est pas alors seulement une "configuration mise en matière
et en mesure", et répondant aux seules caractérisations de la
tndimentionnalitë : haut/bas, gauche/droite, en avant/au fond
(prospectivitè).
A mesure que croit la complexité de l'espace par ces définitions
successives, celui-ci ne devient paradoxalement qu'un terme de la
relation qui le lie a son utilisateur dans une situation de programme
caractérisé. Du statut de "cadre spatial de l'action temporalisèe",
l'espace objectivé par le faire qui s'y produit devient l'un des termes
dune nouvelle "relation actantielle”, celle du su je t et de l'objet.
Dans ces conditions l'habitant et le dispositif spatial sont
susceptibles d'occuper alternativement dans diverses situations
concrètes, des positions actantielles répondant aux rôles d'un agent
agissant ou agi . So lide d englobement, l espace peut devenir
également a c te u r
L'espace ainsi conceptualisé est inassimilable à celui que l'on
considère par simple imagination, lui conférant immédiatement une
matérialité pour le représenter dans le projet.
La représentation architecturale classique ne sait donner forme à
1 espace comme actant agissant ou agi. Ce sera le propre de la
simulation (operation difficile a mettre en oeuvre aujourd’hui) de
rendre évident les divers statuts de l'espace et ses changements de
rôle au sein d’une meme situation concrète. L’espace a en effet cette
capacité à devenir actant "processeur" ou "processé”, suivant les
états successifs du système auquel il participe., dans la relation
d usage et d’appropriation qui le lie à l’habitant.
La proxèmique n’est pas ainsi à concevoir dans un seul sens. Le sujet
ou l’objet de la relation proxèmique peut être tout autant l’espace que
son utilisateur.
Si l’espace est défini par "le faire qui s ’y produit et l’instaure en
lieu”, alors le dispositif physique ou l’action se produit accède tout
autant que l’habitant au rôle de sujet du faire.
* * *