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Nourrir les villes sans les paysans ?

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Academic year: 2021

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Editorial

Nourrir les villes sans les paysans

?

Bertrand Hervieu

Secrétaire général du Centre international

des hautes études agronomiques méditerranéennes (CIHEAM) Ancien président

de l'Institut national

de la recherche agronomique

(lnra)

<hervieu@ciheam.org>

Dans l'histoire des civili ations, l'appr ovi-sionnement des villes est une obsession ja-mais complètement résolue. Mais en ce d

é-but de XXIe siècle, la question prend une

allure nouvelle.

En effet, ce début de millénaire enregistre

cieux événements à la charge symbolique

forte.

• Les paysanneries du monde ne sont plus la majorité absolue de la population mo n-diale. Bientôt, d'ici une à deux décennies,

la population mondiale sera urbaine aux

cieux tiers.

• L'urbanisation massive des populations,

alliée à un processus de littoralisation des

économies et de mobilité des cultures, est bien le trait dominant de notre civilisatio n-moncle.

C'est clans ce contexte qu'il nous faut penser de façon radicalement nouvelle la question de la sécurité alimentaire mon-diale en cherchant à résoudre l'un des paradoxes les plus angoissants de notre époque qui s'épanouirait en faisant

comme si les villes n'avaient plus besoin des paysans pour se nourrir.

En effet, ou les sociétés paysannes demeu

-rent, en survivant clans une pauvreté

acca-blante et en étant focalisées vers la réso lu-tion exclusive de leur propre subsistance ;

là se comptent les 800 millions d'hommes et de femme qui vivent en dessous du

seuil de pauvreté et clans la malnutrition. Ou les sociétés paysannes disparaissent en nombre et en culture pour laisser place à

de grandes puissances agricoles marchan

-des, spécialisées clans leurs productions,

urbanisées clans leurs manières de pro-duire, géographiquement localisées à

proximité des grands cenu·es d'échanges et de consommation.

Jusqu'à ces toutes dernières années, nous avons pensé l'avenir des paysanneries

clans la perspective d'une croissance de la

demande alimentaire urbaine. Nous pr

e-nons conscience aujourd'hui que les gran

-des conurbations, urbaines et littorales,

s'adressent de façon massive et croissante au marché international et à une agricul

-ture périurbaine et la plupart du temps

hors sol, pour assurer leur sécurité alimen-taire. C'est déjà Je cas en Chine où nous voyons les très grandes agglomérations en

Cahiers Agricultures 2004 ; 13 : 8

zones franches se tourner délibérément vers une production agricole industrielle

et insérée clans les agglomérations tandis

que s'accroissent les cohortes des paysans

.. flottants .. qui, clans une sorte de para

-doxe terrible, ont compris que puisqu'ils

ne nourriraient pas les villes, il leur faut

espérer que les villes les nourrissent. Que dire des paysans sans terre du Brésil qui savent que ce sont les firmes et non les paysans qui pourvoient à l'alimentation urbaine? Comment penser l'avenir des agricultures africaines au moment où la

coupure entre les zones Littorales et les zones intérieures du continent est en train de s'accroître.

Ainsi clone, tout se passe comme si, loin de

renforcer une articulation féconde enu·e

les villes et Je campagnes, l'urbanisation massive du XXIe siècle avait besoin, d'un

côté, d'absorber l'agriculture en l'urba

-nisant et, de l'auu·e, d'ignorer les paysan-neries en les abandonnant.

Le risque est grand, en ce début de siècle,

au moment où les paysanneries devien-nent minoritaires, cl constater que ce d

es-tin ne pourrait êu·e repensé. En acceptant de considérer ces paysanneries à la seule

aune de leur utilité supposée pour nourrir les villes, c'est non seulement le sens de

leur destin collectif qui serait refoulé, mais

finalement c'e t aussi leur propre dignité

qui leur serait niée. Si techniquement,

éco-nomiquement, il pourrait suffire d'une poi-gnée de producteurs dotés d'un très haut niveau de compétences, de capitaux,

d'équipements, pour assurer la sécurité

alimentaire mondiale, peut-on démogr

a-phiquement, géographiquement et cultu

-rellement, rejeter hors du monde tous ceux

qui, hier encore, en représentaient sa pro

-pre moitié?

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