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La reconversion professionnelle subie : une redéfinition identitaire?

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Academic year: 2021

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UNIVERSITE TOULOUSE-LE MIRAIL

DIPLOME d’ETAT D’INGENIERIE SOCIALE

Promotion DEIS 3 – 2010-2013

L

A RECONVERSION PROFESSIONNELLE SUBIE

:

UNE REDEFINITION IDENTITAIRE

?

Toulouse

Mars 2014

Mémoire présenté par Marlène DANGOUMAU Directeurs de recherche : Madame Jenny ANTOINE Madame Zohra GUERRAOUI

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SOMMAIRE

REMERCIEMENTS 4

INTRODUCTION 5

PREMIERE PARTIE : CADRE CONCEPTUEL ET THEORIQUE

I. Contexte 10

A. Le monde du travail d’aujourd’hui 10

1. Valeurs et fonctions du travail 10

2. Mutations du monde du travail 12

B. La reconversion professionnelle d’un point de vue règlementaire 15

1. Mesures de droit commun 15

2. Mesures spécifiques à la population étudiée 16

3. Quelques données statistiques 27

II. Enquête exploratoire 33

III. Cadre théorique 38

A. La reconversion professionnelle 38

1. Des approches multiples 38

2. Une première définition de la transition : les conséquences de la reconversion

comme objet d’étude 40

3. L’individu, partie prenante dans le processus de reconversion professionnelle 41

B. L’identité 43 1. Approche psychosociologique 44 2. Approche interactionniste 46 3. Approche existentialiste 48 4. Identité et travail 49 C. Identité et handicap 53 1. Le stigmate 53

2. Le handicap comme situation de seuil 55

3. Lorsque le handicap survient 57

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A. Problématique 59

B. Hypothèse 62

DEUXIEME PARTIE: PARTIE EMPIRIQUE

I. Méthodologie 66

A. L’hypothèse et son opérationnalisation 66

B. Modalités d’enquête 68

1. Présentation de la population 68

2. La technique de recueil de données : l’entretien semi-directif 72

3. Conditions de réalisation des entretiens 73

4. Mode de traitement des données 74

II. Analyse des entretiens 75

A. La variable indépendante : la « reconversion professionnelle subie » 75

1. Les phases 75

2. Les actions entreprises 76

B. La variable dépendante : la « redéfinition identitaire » 79

1. Perception de sa situation 79

2. Sentiment de continuité 84

3. Intégration sociale 86

4. Affiliation 89

III. Interprétation des résultats et retour sur les hypothèses 91 A. Interprétation des résultats et retour sur les hypothèses opérationnelles 91 B. Interprétation des résultats et retour sur l’hypothèse générale 92 IV. Discussion des résultats et limites de la recherche 93

A. Discussion des résultats 93

1. La transition : de la survenance de la problématique de santé à la constatation de

l’inaptitude 93

2. L’importance de la prise en compte du moment de la transition 98 3. Des dispositifs et des acteurs nombreux mais mal identifiés

ou de manière inégale 100

4. Etre soi-même malgré le changement 105

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3

CONCLUSION ET PERSPECTIVES 114

LISTE DES ABREVIATIONS UTILISEES 116

BIBLIOGRAPHIE 118

ANNEXES

Annexe 1 : Définition de quelques mesures de droit commun par rapport à la reconversion professionnelle

Annexe 2 : Procédure de constatation de l’inaptitude médicale au poste de travail à compter du 1er Juillet 2012

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Remerciements

En préambule à ce mémoire, je souhaite adresser mes remerciements les plus chaleureux aux personnes qui m’ont apporté leur soutien et qui ont contribué à l’élaboration de ce mémoire.

Je tiens tout d’abord à remercier mes Directrices de recherche, Jenny ANTOINE et Zohra GUERRAOUI, pour leurs conseils, leur soutien précieux et leur patience dans mon apprentissage de la recherche.

Je remercie également mes collègues de formation qui ont partagé avec moi l’atelier de recherche.

Je tiens également à remercier, d’une part les structures qui m’ont ouvert leurs portes et qui m’ont mis en lien avec les personnes concernées par ma recherche, et d’autre part les personnes qui ont accepté d’être interviewées, et qui m’ont permis de réaliser ce travail de recherche.

Mes remerciements s’adressent également à mes proches, famille et amis qui ont partagé mes moments de doute et d’enthousiasme. Je remercie tout particulièrement Christophe Baert, mon conjoint, qui a contribué à ce que je puisse faire cette formation.

Je remercie également Corinne Gonet, sans laquelle je ne serais pas là aujourd’hui, qu’elle trouve ici l’expression de ma reconnaissance.

Ces remerciements seraient incomplets si je ne m’adressais pas à Paule Sanchou, pièce maîtresse du Diplôme d’Etat en Ingénierie Sociale (D.E.I.S.) tant pour son investissement dans cette formation que pour son soutien indéfectible.

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Introduction

Trois exemples de parcours :

Monsieur A., 38 ans, est boucher. Il souhaite changer de métier, ne s’épanouissant plus dans le sien et souhaitant transformer sa passion en activité professionnelle. Il demande un Congé Individuel de Formation et part un an en formation pour devenir éducateur sportif.

Monsieur B., 50 ans, est boulanger. Devenu allergique à la farine, le médecin du travail le déclare inapte à son poste de travail. L’employeur ne peut pas le reclasser à un autre poste dans l’entreprise. Monsieur B est licencié pour inaptitude médicale à son poste et à tout poste dans l’entreprise, et doit se reconvertir professionnellement. Il est orienté vers un bilan de compétences afin de définir un projet professionnel ou de formation.

Madame C., 29 ans, est employée libre-service dans un supermarché. Après un long arrêt maladie, elle rencontre le médecin du travail dans le cadre d’une visite de reprise. Celui-ci prononce une inaptitude car les problèmes de dos de Madame C. ne lui permettent plus de rester debout toute la journée. Son employeur lui propose une reconversion professionnelle, un reclassement en interne au poste de caissière, qu’elle accepte.

Nous avons choisi de commencer par ces exemples afin d’introduire notre sujet de recherche, la reconversion professionnelle. Les raisons qui poussent aujourd’hui des personnes à se reconvertir sont plurielles. Ce peut être un choix personnel, comme Monsieur A. dont le métier ne correspond plus à ses aspirations, ou lié à une difficulté à trouver un emploi dans le métier actuel. Ce peut être également lié, comme pour Monsieur B. et Madame C., à une inaptitude au poste de travail en lien avec les conséquences d’une problématique de santé. Ceci nous montre que la reconversion peut être « choisie » ou « subie ».

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Nous avons fait le choix, en lien avec notre parcours professionnel, de nous intéresser aux reconversions professionnelles subies, c’est-à-dire suite à la survenance d’une problématique de santé rendant impossible le maintien sur le poste occupé.

De plus, il nous semble que la reconversion professionnelle du fait de la survenance d’un handicap est un véritable enjeu sociétal : « La question du maintien en emploi des

personnes affectées par une incapacité prend donc une importance sociale au moins équivalente à celle de la réinsertion professionnelle des personnes handicapées. Elle constitue le volet « amont » d’une problématique identique, avec une spécificité : la possibilité d’agir avant la perte d’emploi, quand la personne n’est pas encore éloignée du monde du travail » (Atlas national de l’Association de Gestion des Fonds pour l’Insertion

des Personnes Handicapées - A.G.E.F.I.P.H., 2008, p. 106). D’autant que l’A.G.E.F.I.P.H. estime qu’un français sur deux sera confronté à une situation de handicap, total ou partiel, provisoire ou permanent, au cours de sa vie active.

Tout au long de notre parcours d’Assistante de Service Social, nous avons rencontré et accompagné des personnes qui devaient changer de métier, de poste de travail pour des raisons de santé. Nous les avons guidées dans les démarches et orientées vers les différents dispositifs. Nous avons constaté que la reconversion professionnelle est un processus long, difficile, et que les personnes ne sont pas toutes « égales » face à ce changement. En effet, nous avons vu des personnes pour lesquelles la reconversion professionnelle a été très rapide (construction du projet, recherche d’emploi) et d’autres beaucoup plus longue. Nous avons également le sentiment que la reconversion professionnelle, même si elle est subie, n’empêche pas la personne d’être partie prenante dans son projet.

Ce travail de recherche est pour nous l’occasion de nous interroger sur ces idées, ces « évidences » liées à notre pratique professionnelle : « quand de praticien on devient

chercheur, on ne change pas d’objet et on ne sort pas de la pratique. Mais on change de regard et d’attitude. C’est cette conversion qui est difficile » (P. Idiart, 1984, p. 218-219).

Nous cherchons à comprendre ce qui se joue pour un individu qui se trouve en pleine reconversion professionnelle. Cette recherche n’a pas la prétention de comprendre tous les enjeux d’un tel processus mais de tenter d’en donner des clés de compréhension afin d’éclairer les acteurs qui œuvrent dans ce domaine.

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7 Ceci nous amène à la question suivante :

Comment les personnes reconnues travailleurs handicapés envisagent et vivent leur reconversion professionnelle, suite à la survenance d’une problématique de santé ?

Afin de répondre à cette question, nous circonscrirons dans la première partie de notre travail le cadre contextuel de notre recherche. Nous définirons la place qu’occupe le travail, et nous nous intéresserons à définir le monde du travail tel qu’il est aujourd’hui avec ses exigences, notamment en terme de mobilité. Ensuite, par une approche socio-historique, nous caractériserons le processus de reconversion professionnelle pour les personnes reconnues travailleurs handicapées. Puis, nous développerons les concepts théoriques à partir des éléments qui seront ressortis de l’enquête exploratoire. Ceci nous permettra de construire la problématique de recherche et de formuler une hypothèse.

Dans la deuxième partie de notre travail, nous nous consacrerons à la vérification de nos hypothèses opérationnelles et de notre hypothèse principale à partir du traitement des entretiens menés auprès de personnes vivant une reconversion professionnelle subie du fait de la survenance d’une problématique de santé. Ce sera l’occasion pour nous de faire le lien entre l’analyse des matériaux recueillis et la première partie de notre travail, par le biais d’une discussion. Enfin, avant de conclure, nous évoquerons les limites de notre travail.

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9 I. CONTEXTE

A. Le monde du travail d’aujourd’hui 1. Valeurs et fonctions du travail 2. Mutations du monde du travail

B. La reconversion professionnelle d’un point de vue réglementaire 1. Mesures de droit commun

2. Mesures spécifiques à la population étudiée

a) Détour historique et règlementaire de la notion de reclassement dans le champ du handicap

b) La reconnaissance administrative du handicap ouvrant droit à l’Obligation d’Emploi des Travailleurs Handicapés (O.E.T.H.)

c) Le maintien dans l’emploi d’un point de vue règlementaire 3. Quelques données statistiques

a) Concernant la reconversion professionnelle

b) Concernant la reconversion professionnelle liée à la survenance d’un handicap II. ENQUETE EXPLORATOIRE

III. CADRE THEORIQUE

A. La reconversion professionnelle 1. Des approches multiples

2. Une première définition de la transition : les conséquences de la reconversion comme objet d’étude

3. L’individu, partie prenante dans le processus de reconversion professionnelle B. L’identité 1. Approche psychosociologique 2. Approche interactionniste 3. Approche existentialiste 4. Identité et travail C. Identité et handicap 1. Le stigmate

2. Le handicap comme situation de seuil 3. Lorsque le handicap survient

IV. PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES A. Problématique

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I.

Contexte

Dans cette première partie, nous proposons d’aborder les éléments de contexte afin d’avoir un premier éclairage sur notre objet de recherche. Nous porterons notre regard dans un premier temps sur le monde du travail et sur les évolutions qu’il a subi. Ceci afin de mieux comprendre les enjeux actuels, et de mieux cerner notre objet de recherche : la reconversion professionnelle. Nous ciblerons ensuite un type spécifique de reconversion professionnelle, la reconversion professionnelle du fait de la survenance d’un handicap, d’une maladie rendant difficile le maintien dans le poste de travail occupé.

A. Le monde du travail d’aujourd’hui

Avant d’aborder le contexte socio-économique actuel, il nous paraît important de nous intéresser à ce que représente le travail, la valeur qui lui est accordée, et les fonctions qu’il remplit.

1. Valeurs et fonctions du travail

L’importance du travail dans la vie a notamment été mise en évidence par des auteurs qui ont travaillé sur les effets du chômage, de la privation d’emploi comme D. Schnapper. Elle a notamment montré que le chômage constitue une épreuve, une expérience traumatisante, conduisant les individus à remettre en question leur identité personnelle et sociale.

V. De Gauléjac montre que le travail occupe une place privilégiée, et qu’il est non seulement un moyen pour subvenir à ses besoins mais aussi un moyen pour se réaliser: « Le travail reste une valeur importante, et sa place est centrale dans la vie comme lieu

d'épanouissement, comme vecteur de socialisation, comme moyen de subsistance, comme plaisir de la rencontre, comme lieu de développement personnel » (V. De Gauléjac, 2011,

p. 38).

Des enquêtes quantitatives ont été réalisées, à partir de l’analyse de la perception subjective de l’importance accordée au travail par les individus, afin d’évaluer la place qu’occupe le travail aujourd’hui. D. Méda fait référence à l'enquête « Travail et modes de vie » réalisée en 1997 : « interrogés spontanément : « qu'est-ce qui est pour vous le plus

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important pour être heureux ? », 46 % des personnes répondent la santé, 31 % la famille, 25 % le travail, 25 % les amis et 20 % l'argent. Ceux qui répondent massivement et en premier le travail (avoir un travail, avoir du boulot…) sont des chômeurs ou des précaires, donc des personnes éloignées de l'emploi […] » (D. Méda, 2010, p. 35). Ceci est confirmée

par une enquête plus récente (2003) « Histoires de vie-Construction des identités » « qui

pour la première fois met les différents investissements des individus en concurrence, révèle que le travail n'est pas ou plus la préoccupation centrale des actifs en emploi : les deux tiers indiquent en effet que, pour eux, le travail est « assez important, mais moins que d'autres choses (vie familiale, vie personnelle, vie sociale…) », ce qui constitue un résultat essentiel » (D. Méda, 2010, p. 38). L’Enquête Histoire de vie de 2003 conclut à l’idée que

deux éléments peuvent constituer une « identité par le travail forte » : appartenir aux catégories socio-professionnelles les plus élevées et ne pas avoir de « charge » de famille. Ces enquêtes montrent que le travail reste une valeur forte, et prend toujours une place importante dans la vie des individus. Mais elles montrent aussi que les individus ont d’autres préoccupations : « Toutes les enquêtes montrent que, d'une part, les Français

restent plus que tous les autres européens attachés au travail et, d'autre part, que ce n'est pas pour avoir plus de loisirs que les Français souhaitaient ou continuent de souhaiter voir leur temps de travail réduit, mais principalement pour avoir plus de temps avec leur famille, les hommes comme les femmes, la famille venant désormais très loin avant le travail en tant que valeur » (D. Méda, 2010, p. 109).

Revenons aux fonctions du travail et appuyons-nous sur V. De Gauléjac (2011) :

- « travailler, c’est produire » dans le sens où le travail est considéré comme un acte de production.

- « travailler, c’est subvenir à ses besoins » : il fait référence à P. Bourdieu indiquant que l’aspect économique n’est qu’un aspect de la valeur du travail. En effet, le travail apporte capital économique, capital social (« L’emploi est devenu un élément

déterminant pour avoir une existence sociale, un statut, une place dans une organisation, des protections juridiques, uns sécurité objective et subjective. Par ailleurs, l’insertion professionnelle donne accès à des réseaux sociaux, à des collectifs, à un ensemble de relations sociales […] », p. 30) ; capital culturel

(développement de compétences, accès à des formations, accès à de nouveaux savoirs,…) ; capital symbolique (« attaché au statut socioprofessionnel et à la

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reconnaissance dont il bénéficie. […] C’est dire que la valeur travail a une dimension symbolique incontournable qui se « calcule » au croisement du psychique, du côté de l’estime de soi et des enjeux narcissiques, et du social, du côté du regard des autres et du statut social attaché à chaque profession », p. 31).

- « travailler pour exister » : « […] Le travail donne une position, un statut, une

identité qui permet de définir sa place dans la société en comparaison avec d’autres. Le métier exercé et la position professionnelle indiquent une classe d’appartenance et une identité sociale » (p. 31).

2. Mutations du monde du travail

Nous l’avons vu, la valeur et les fonctions accordées au travail ont évolué, passant ainsi d’une obligation envers la société, à un moyen de subsistance (apportant revenu et sécurité), à un moyen d’exister, de se réaliser, et de s’accomplir.

Le monde du travail lui-même subit également de profondes transformations. Il est aujourd’hui marqué par une exigence de mobilité là où hier il était question de stabilité, de continuité. En effet, après 1945, une norme d’emploi a émergé : le Contrat à Durée Indéterminée (C.D.I.) à temps plein, avec un salaire décent et une protection sociale comme l’a souligné R. Castel lors de sa conférence en Seine Saint-Denis: « À cette époque

[années 70], l'organisation du travail était dominée par l'hégémonie du statut de l'emploi. Ce statut de l'emploi correspond au fait que des protections et des droits forts avaient été rattachés à la relation de travail […]. Ce statut de l'emploi a été le socle de ce qu'on a appelé la société salariale » (R. Castel, 2009, p. 6-7).

Mais, depuis le milieu des années 70, le secteur économique est traversé par de nombreuses transformations qui ont remis en cause cette norme d’emploi. Les formes d’emploi dites « atypiques » se multiplient (Contrat à Durée Déterminée - C.D.D., intérim, stages, emplois aidés,…). L'emploi devient progressivement plus instable, tout comme la place que les individus occupent au sein de la société. R. Castel parle de la remise en cause de l’emploi stable à vie, de l’effritement de la société salariale. Il faut rappeler que le travail sous la forme du contrat à durée indéterminée, à temps plein, avec un employeur unique reste néanmoins le modèle majoritaire. D’après l’enquête emploi de l’I.N.S.E.E. de 2012, le C.D.I. reste la forme d’emploi salarié la plus répandue (86,5%).

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Cependant, délocalisations, réorganisations, plans sociaux, licenciements économiques font désormais parti intégrante de notre société. Ces mots sont dans l’actualité chaque semaine et concernent des milliers de personnes. En effet, le marché de l’emploi a beaucoup évolué : « Les organisations productives ont rencontré depuis les années 1990

une vague de changements qui se traduit par le renforcement des contraintes d’environnement. L’intensification de la concurrence, son élargissement, le bouleversement technologique, le foisonnement de règlementations à une échelle supranationale et la financiarisation de l’économie ont largement contribué à remodeler le paysage des entreprises contemporaines. » (F. Osty, R. Sainsaulieu, M. Uhalde, 2007,

p. 27).

Les transformations du marché du travail ont également eu pour conséquence de modifier le statut des travailleurs : « Ces changements sociétaux se sont déroulés dans un contexte

attribuant une plus grande responsabilité aux individus dans l'organisation de leur vie »

(J. Guichard, M. Huteau, 2001, p. 180). En effet, il est aujourd’hui demandé aux travailleurs de fortes capacités d’adaptation (au changement), d’autonomie : « Puisqu'on

vit dans un monde incertain, dominé par la flexibilité, chacun doit savoir que durant sa vie active, pour conserver son « employabilité », il doit être prêt à changer d'entreprise, de métier, voire de secteur d'activité ou de région » (D. Linhart, N. Mauchamp, 2009, p. 53).

Le changement serait une valeur, « Le changement est fortement valorisé, il semble compter maintenant comme une valeur prégnante de nos sociétés postmodernes »

(T. Levené, C. Négroni, 2010, p. 1), une condition même de l’employabilité tout comme la formation tout au long de la vie: « chaque salarié a le droit de bénéficier d’un bilan de

compétences et d'une Validation des Acquis de l'Expérience (V.A.E.). Ces deux dispositifs mettent l'accent sur la transposabilité et la valorisation des compétences acquises »

(D. Linhart, N. Mauchamp, 2009, p. 57). Il est d’ailleurs de plus en plus demandé aux travailleurs de se former tout au long de la vie. Les parcours sont individualisés et les individus sont désormais responsables de leur parcours de vie et donc de leur parcours professionnel.

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V. De Gauléjac (2011, p. 254-255) résume en trois points ce qui est attendu du travailleur aujourd'hui :

- « Les compétences attendues ne sont plus seulement des compétences techniques

liées aux métiers […]. D'autres qualités « comportementales » sont attendues, sans que l'on puisse les définir aussi clairement, tant elles laissent place à des considérations subjectives et incertaines ».

- « Le salarié est invité à prendre des initiatives, à exercer sa réflexion, en

contrepartie d'une exigence en termes de résultats ».

- « Enfin, le salarié est invité à gérer sa carrière comme un entrepreneur, à prendre

des risques : mobilité, adaptabilité et employabilité deviennent les maîtres mots de la révolution managériale. Il doit gérer son portefeuille de compétences, acquérir les nouvelles techniques nécessaires à son activité, être partie prenante de sa formation, apprendre à gérer son capital humain, à devenir l'entrepreneur de son

existence1. […] Il ne s'agit plus seulement de « bien faire son métier » mais de

s'adapter aux nouvelles exigences de polyfonctionnalité, de mobilité, de flexibilité ».

Certains auteurs pensent qu’il y a une césure générationnelle entre des jeunes ayant intériorisé les normes actuelles du marché de l’emploi et notamment l’incertitude de leur avenir professionnel, et les générations plus anciennes. Ainsi, F. Fraccaroli écrit à propos des jeunes : « On remarque que les jeunes ont tendance à considérer comme inéluctable

une période plus ou moins longue d'exploration, d'insertion progressive dans le monde du travail, de précarité et d'incertitude, ainsi que de faibles bénéfices matériels. […] Ils sont conscients de l'incertitude qui caractérise les formes du travail […] » (F. Fraccaroli, 2007,

p. 240).

Enfin, il convient de souligner la double nature du travail, facteur d’émancipation et parfois source de souffrances, comme le souligne V. De Gauléjac : « Le travail a donc des

visages opposés. D'un côté, il est un élément de la construction de soi comme sujet, il apporte du plaisir, du sens, des éléments objectifs de bien-être ; de l'autre, il peut être le

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lieu de l'aliénation, de l'oppression, il génère de la souffrance, de l'incohérence, des éléments subjectifs de mal-être. » (V. De Gauléjac, 2011, p. 40).

B. La reconversion professionnelle d’un point de vue règlementaire

1. Mesures de droit commun

Pour commencer, il nous paraît important de présenter les dispositifs favorisant la reconversion professionnelle.

Il s’agit du : Congé Individuel de Formation (C.I.F.), Droit Individuel à la Formation (D.I.F.), bilan de compétences, Validation des Acquis et de l’Expérience (V.A.E.), congé pour création ou reprise d’entreprise, plan de formation.

Il existe également des dispositifs spécifiques, soit liés à l’entreprise (signature d’accords), soit liés à la situation du salarié : compte épargne-temps, congé de reclassement et Contrat de Sécurisation Professionnelle (C.S.P.) dans le cadre de licenciements économiques, périodes de professionnalisation.

Une fiche est jointe en annexe 1 afin d’expliquer ces dispositifs.

Nous porterons notre attention sur un type de public qui bénéficie depuis longtemps de dispositifs spécifiques concernant son reclassement et ses possibilités de reconversion professionnelle : les personnes en situation de handicap, et plus particulièrement sur les personnes qui doivent se reconvertir professionnellement, leur état de santé ne leur permettant plus d’occuper leur poste de travail. La survenue d'un handicap peut en effet obliger l’individu à se reclasser au sein de son entreprise, voire à changer de profession et/ou d’envisager une nouvelle formation.

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2. Mesures spécifiques à la population étudiée

Il nous semble important de faire un détour historique afin de comprendre l’origine de la notion de reclassement et de reconversion. En effet, l’évolution de la terminologie du handicap et de sa prise en compte par le législateur était fortement liée à la notion de capacité ou non de travail.

Cette partie ne vise pas l’exhaustivité des textes législatifs qui régissent le champ du handicap mais uniquement ceux qui nous permettent de définir et circonscrire notre objet de recherche.

a) Détour historique et règlementaire de la notion de reclassement dans le champ du handicap

Jusqu’à la fin du XVIIIème siècle, les personnes qui ne peuvent travailler relèvent de la bienfaisance. Elles mendient et vivent de la charité de la famille, du voisinage, de l’Eglise. Puis « Avec l'avènement de la société industrielle, et surtout avec les conséquences de la

Première Guerre mondiale, apparaissent les notions de solidarité pour les infirmes et de droit au travail » (C. Bardoulet, L. Igounet, 2007, p. 19). En effet, la question de l’emploi,

du retour au travail va ainsi se poser pour les mutilés de guerre et pour les accidentés du travail, avec l’idée de responsabilité (de la Nation pour les premiers et de l’employeur pour seconds). D’après H-J. Sticker, deux types de réponses coexistent : avec pour ceux qui peuvent exercer un emploi, le reclassement professionnel c’est à dire une aide à l’insertion professionnelle, et pour les autres, l’attribution de pensions : « Les termes de

reclassement, de rééducation, puis de réadaptation ou de réhabilitation en contexte anglo-saxon, de réinsertion et de réintégration expriment cette nouvelle orientation sociale à l'égard des infirmes. Même si le vocabulaire défectif « infirme, invalide, impotent, incapable, débile, etc.) ne disparaît pas, il est remarquable que celui indiquant le retour [dans le social et le travail] prenne de plus en plus de place » (dans S. Paugam, 1996,

p. 313).

Plusieurs lois vont ainsi se succéder en faveur de l’emploi des mutilés de guerre (emplois réservés dans l’administration, création de l’Office national des mutilés et réformés de guerre chargé de subventionner des écoles de rééducation, obligation d’emploi dans toutes

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les entreprises de plus de 10 salariés,…). Il nous paraît important de souligner l’accueil réservé au projet de loi de 1924 que l’on peut considérer comme une innovation puisqu’il s’agissait de la première loi, sur l’obligation d’emploi des mutilés, veuves, orphelins et victimes civiles de la guerre: « Les travaux préparatoires de la loi du 26.4.1924 sur

l'emploi obligatoire des mutilés ne parlent pas de héros, mais de « charges pour les entreprises », de « question humanitaire », de « mutilés à occuper ». L'organisation scientifique du travail (taylorisme) gagne l'espace industriel et ne plaide pas pour la présence de mutilés sur les lieux de travail. Les organisations patronales font tout pour l'éviter » (P. Doriguzzi, 1994, p. 89). Cette loi sera ensuite étendue aux accidentés du

travail (loi du 14 Mai 1930). Les employeurs ont dès lors des représentations négatives à l’idée d’intégrer des personnes handicapées dans le monde de l’entreprise, du travail (ce que nous retrouvons dans notre enquête exploratoire).

La logique de l’intégration de cette époque, tend à s’inscrire dans un processus de normalisation effaçant ainsi les conséquences des déficiences grâce à la réadaptation : « le

rôle social du handicapé se structure autour de la figure du travailleur et le reclassement professionnel sert alors de projet de reclassement social » (V. Boissonnat, 2006, p. 277).

La loi 57-1223 du 23 Novembre 1957, dite loi Gazier, sur le reclassement professionnel des travailleurs handicapés marque une étape importante. En effet, elle introduit, pour la première fois dans la législation française, la notion de handicap par la définition du « travailleur handicapé » dans son article 1er :

« Est considéré comme travailleur handicapé pour bénéficier des dispositions de la

présente loi, toute personne dont les possibilités d’acquérir, ou de conserver un emploi sont effectivement réduites par suite d’une insuffisance ou d’une diminution de ses

capacités physiques ou mentales ».

Cette définition du « travailleur handicapé » est toujours en vigueur aujourd’hui. Cette loi affirme également le droit au reclassement professionnel de toutes les personnes handicapés quelle que soit la cause du handicap (infirmes de naissance, suite à une maladie, un accident,….) : « […] l'obligation d'emploi est désormais élargie à « l'infirmité

civile » puisque les dispositions de la loi de 1957 s’adressent à l'ensemble des populations confrontées à des problèmes de reclassement professionnel par suite d'une affection durable » (S. Ebersold, 1997, p. 147). Le principe de réadaptation domine.

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La reconnaissance du statut de travailleur handicapé marque une rupture dans la manière de considérer les personnes handicapées. L’accent est mis sur les aptitudes : « l'infirmité

n'est plus marquée du sceau de l'incapacité, elle est au contraire perçue à travers les aptitudes restantes ou celles qu'il convient de développer » (S. Ebersold, 1997, p. 46).

Le législateur vient ensuite attester du fait que certaines personnes ne peuvent pas travailler en créant l’Allocation Adulte Handicapé (A.A.H.) (loi du 13 Juillet 1971). L’A.A.H. sera ainsi accordée aux personnes handicapées dont le taux d’incapacité est d’au moins 80% et qui ne peuvent pas travailler (avec une condition de ressources). L’A.A.H. est venue combler les faiblesses du système qui existait jusqu’alors, celui-ci s’adressant aux personnes qui avaient travaillé (le régime assurantiel de la sécurité sociale). L’A.A.H. en tant que minima social, apporte un revenu minimum garanti pour les personnes qui ne peuvent pas travailler.

Puis, en 1975, deux lois importantes dans le champ du handicap ont été votées.

D’une part, la loi 75-534 d’orientation en faveur des personnes handicapées du 30 Juin 1975 consacre une politique spécifique aux personnes handicapées. La loi garantit les droits fondamentaux des personnes handicapées: droit à l'éducation, à la formation, au travail, etc. La loi marque le passage d’une logique d’assistance à une logique de solidarité.

La loi ne donne pas de définition du handicap mais confie la reconnaissance de celui-ci à deux commissions départementales : pour les jeunes de 0 à 20 ans (C.D.E.S. : Commission Départementale de l’Education Spéciale) et pour les adultes (C.O.T.O.R.E.P. : Commission Technique d’Orientation et de Reclassement Professionnel à partir de 20 ans). D’autre part, le même jour est adoptée la loi relative aux institutions sociales et médico-sociales organisant et structurant le secteur social et médico-social.

Il est important de faire le lien entre ces lois et les valeurs qui structurent la société à cette époque. En effet, d’après S. Paugam (1996) la nécessaire réinsertion dans la vie sociale et professionnelle s’explique par l’importance du travail dans la société qui est le principal moyen de subsistance, de reconnaissance et par les protections qu’il apporte.

La loi n°87-517 du 10 Juillet 1987 en faveur de l’emploi des travailleurs handicapés apparait dans un contexte caractérisé par un chômage important et le développement de

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19

formes précaires de l’emploi, et en particulier pour les personnes handicapées. Elle rend obligatoire leur embauche dans tous les établissements privés et publics qui comptent vingt salariés ou plus. Le taux d’emploi est fixé à 6% de l’effectif total. Dans le cas contraire, les entreprises sont soumises à des sanctions financières. L’A.G.E.F.I.P.H. est créée pour gérer le fonds pour l’insertion des personnes handicapées.

Cependant, pour respecter l’obligation d’emploi, les entreprises ont plusieurs possibilités (toujours en vigueur) :

- employer des personnes handicapées,

- conclure un contrat de sous-traitance (de fournitures, de prestations de service ou de mise à disposition de travailleurs handicapés avec les Entreprises Adaptées (E.A.) ou les Etablissements et Services d’Aide par le Travail (E.S.A.T.),

- accueillir des demandeurs d’emploi handicapés dans le cadre d’un stage,

- conclure un accord de branche, d’entreprise ou d’établissement en faveur de l’emploi des travailleurs handicapés,

- engager des dépenses pour favoriser l’accueil, l’insertion ou le maintien dans l’emploi des personnes handicapées au sein de l’entreprise,

- verser une contribution à l’Association de Gestion de Fonds pour l’Insertion des Personnes Handicapées (A.G.E.F.I.P.H.).

Par ailleurs, le législateur s’est également préoccupé d’intégrer le handicap dans la lutte contre les discriminations, conformément à ce qui se déroulait sur le plan international. Nous citerons la loi n°2001-1066 du 16 novembre 2001 relative à la lutte contre les discriminations qui indique dans son article L. 122-45 : « Aucune personne ne peut être

écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat […] sauf inaptitude constatée par le médecin du travail dans le cadre du titre IV du livre II du présent code, en raison de son état de santé ou de son handicap ». Les discriminations

en raison du handicap peuvent survenir dans différents domaines de la vie (en matière de transport, de logement, d’accès aux loisirs…) mais c’est dans le domaine de l’emploi

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20

qu’elles sont les plus fréquentes. Ainsi, le rapport annuel du Défenseur des droits de 2012 montre que l’état de santé et le handicap sont le premier motif de discrimination invoqué dans les requêtes. Parmi les différents domaines, l’emploi dans le secteur privé et dans le secteur public sont les plus représentés (respectivement 6,4% et 7,2%) devant le logement et les services publics.

La loi n°2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées est la première loi de mainstreamingen France2. Le mainstreaming est un concept anglo-saxon. Il vise à intégrer la personne dans le courant de la vie ordinaire, et s’oppose aux solutions réservées à certaines catégories de personnes, leur reprochant d’être stigmatisantes et génératrice d’exclusion.

La loi du 11 Février 2005 se fonde sur deux principes : la non-discrimination et la compensation intégrale du handicap. En effet, la législation qui prévalait jusqu’alors correspondait à une logique de discrimination positive à l’aide de mesures telles que l’obligation d’emploi. Cette logique a été très critiquée dans les années 2000 notamment du fait du risque de stigmatisation des populations concernées.

La loi définit pour la première fois le handicap dans son article 2 :

« Constitue un handicap, au sens de la présente loi,

toute limitation d'activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d'une altération substantielle, durable ou définitive d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles,

mentales, cognitives ou psychiques, d'un polyhandicap ou d'un trouble de santé invalidant. »

Le législateur met l’accent sur les conséquences de l’altération et non sur son origine, ainsi que sur l’environnement : « Le handicap dépend donc de la réponse de l’environnement

pour faciliter la vie dans la société : accessibilités des lieux bâtis, accessibilité à l’école, aux transports, à la culture, aux loisirs sans oublier l’accessibilité à l’emploi »3

. Le

2 Cours D.E.I.S. de Jesus Sanchez du 21/03/2011

3 Guide pratique à destination des entreprises, « développez votre politique emploi/handicap », comité

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21

parallèle peut être fait avec l’évolution des classifications du handicap, prenant désormais en compte les facteurs contextuels et environnementaux.

La loi du 11 février 2005 réaffirme les principes de la loi du 10 juillet 1987 (dans laquelle les entreprises de 20 salariés et plus sont tenues à une obligation d’emploi d’au moins 6% de personnes handicapées), en élargissant la liste des bénéficiaires de l’obligation d’emploi et en alourdissant la contribution financière de l’entreprise en cas de non-respect du taux d’emploi.

Sur le plan international, la Convention des Nations-Unies relative aux droits des personnes handicapées du 13 décembre 2006 a été ratifiée par la France en 2010. Les Etats s’engagent à promouvoir, protéger et assurer la pleine et égale jouissance des droits de l’homme et de des libertés fondamentales par les personnes handicapées et de promouvoir le respect de leur dignité intrinsèque. Une personne handicapée s’estimant lésée pourra invoquer ce document au caractère opposable devant une juridiction internationale.

Enfin, nous avons voulu mettre en exergue un dernier élément en rapport avec notre objet de recherche, à propos de l’A.A.H., puisque cette prestation depuis la loi du 11 Février 2005 est devenue un équivalent à la R.Q.T.H..

Depuis le 1er Janvier 2009, une procédure de Reconnaissance de la Qualité de Travailleur Handicapé (R.Q.T.H.) est engagée à l’occasion de l’instruction de toute demande d’attribution ou de renouvellement de l’A.A.H. (Article L821-7-3 du Code de la sécurité sociale). Ce dispositif a pour objectif affiché d’améliorer le niveau de ressources des personnes handicapées en favorisant leur démarche d’insertion professionnelle et donc leur accès à l’emploi.

Nous pouvons toutefois nous interroger sur les objectifs sous-jacents à cette règlementation en référence à R. Castel : « cela s’accompagne de la montée des idées de

« contreparties », de « responsabilisation », de « participation », etc., ce que l’on regroupe sous le terme d’« activation » des politiques sociales. Or ces idées rompent avec la logique du droit au secours tel qu’il a été constitué initialement. Désormais, les gens qui sont secourus devraient participer, s’activer, pour ne pas vivre aux crochets de « la France qui se lève tôt » comme disait notre précédent président de la République »

(23)

22

Nous avons l’impression depuis quelques années d’une injonction au travail qui concerne notamment les bénéficiaires du Revenu de Solidarité Active (R.S.A.) et les bénéficiaires de l’Allocation Adulte Handicapé.

Nous l’avons vu, le champ du handicap est marqué par une succession de textes législatifs afin d’encadrer le reclassement et la reconversion professionnelle. Nous allons maintenant approfondir ces données pour voir comment s’opère le mécanisme de reconversion professionnelle de personnes confrontées à une situation de handicap. Pour cela, nous aborderons tout d’abord la reconnaissance administrative du handicap, puis nous nous intéresserons à la question du maintien dans l’emploi.

b) La reconnaissance administrative du handicap

ouvrant droit à l’Obligation d’Emploi des Travailleurs Handicapés (O.E.T.H.)

Le handicap peut être reconnu par différents organismes selon la situation de la personne (et notamment selon l’origine du handicap). S. Ebersold constate par rapport au terme de handicapé : « Celui-ci évoque désormais un statut particulier (qui est à la fois

constatation d'une déficience, évaluation de l'incapacité qui en découle et ouverture de droits compensatoires) autorisant une gestion particulariste, pour autant que les handicapés se voient reconnaître leur « différence » par les organismes chargés de leur prise en charge » (S. Ebersold, 1997, p 92).

En lien avec la loi du 10 Juillet 1987 en faveur de l’emploi des travailleurs handicapés et la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, plusieurs statuts peuvent donc ouvrir droit à l’Obligation d’Emploi des Travailleurs Handicapés (O.E.T.H.). Il s’agit de :

- travailleurs reconnus handicapés (R.Q.T.H.) par la Commission des Droits et de l'Autonomie des Personnes Handicapées (C.D.A.P.H.),

- accidentés du travail ou victimes de maladies professionnelles dont l'incapacité permanente est au moins égale à 10% et titulaires d'une rente versée par la sécurité sociale,

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23

- titulaires d'une pension d'invalidité à condition que leur invalidité réduise au moins des 2/3 leur capacité de travail ou de gain,

- pensionnés de guerre ou assimilés,

- veuves de guerre non-remariées et orphelins de guerre âgés de moins de 21 ans, - veuves de guerre remariées ayant au moins un enfant à charge avec le militaire

décédé,

- sapeurs-pompiers volontaires titulaires d'une allocation ou d'une rente d'invalidité attribuée en raison d'un accident survenu ou d'une maladie contractée en service, - titulaires de la carte d'invalidité,

- titulaires de l'A.A.H..

Seule la reconnaissance administrative du handicap (c’est à dire l’un de ces 9 statuts ci-dessus) permet l’accès à l’ensemble des mesures législatives, réglementaires, et conventionnelles pour l’emploi et la formation professionnelle des personnes handicapées, soit :

- l’orientation, par la C.D.A.P.H., vers une Entreprise Adaptée (E.A., anciennement « Atelier Protégé »), un Etablissement et Service d’Aide par le Travail (E.S.A.T., anciennement « Centre d’Aide par le Travail ») ou une formation (stage en centre de formation ordinaire ou spécialisé, contrat d’apprentissage…),

- le soutien du réseau de placement spécialisé Cap Emploi4,

- l’obligation d’emploi définie par la loi du 10 juillet 1987 et modifiée par la loi du 11 février 2005,

- l’accès à la fonction publique par concours, aménagé ou non, ou par recrutement contractuel spécifique,

- les aides de l’Association de GEstion des Fonds pour l’Insertion des Personnes Handicapées (A.G.E.F.I.P.H.).

Il convient de s’intéresser à ce que la reconnaissance d’un statut de travailleur handicapé implique. En effet, M. Amar et S. Amira (2003, p. 6) mettent en évidence que parmi les cinq millions de personnes déclarant avoir un problème durable de santé ou un handicap

4 Cap Emploi est un intermédiaire du marché du travail. Il favorise la rencontre entre les demandeurs

d’emploi reconnus travailleurs handicapés (dont l’orientation vers Cap emploi se fait par Pôle Emploi) et les employeurs.

(25)

24

limitant leur capacité de travail, toutes ne font pas la démarche de demander une reconnaissance administrative du handicap. En effet, « ce n’est que quand on a un grave

problème d’employabilité combinant limitations des capacités de travail, déficit de qualification et âge avancé qu’on s’inscrit plus volontiers dans la loi » (en référence à la

reconnaissance administrative du handicap ouvrant droit à l’O.E.T.H.).

En effet, la demande est une démarche personnelle et facultative. La reconnaissance de la qualité de travailleur handicapée constitue une clé d’accès aux dispositifs d’accompagnement vers l’emploi mais n’oblige en rien la personne handicapée à intégrer ces dispositifs. Il appartient donc au travailleur handicapé d’informer, s’il le souhaite, son employeur de son statut.

Nous pouvons alors nous demander ce qui incite les personnes handicapées à ne pas demander un statut qui apparait comme protecteur, et aux bénéficiaires de l’O.E.T.H. à ne pas se déclarer auprès de leur employeur. Tout d’abord, la R.Q.T.H. ou tout autre statut équivalent, même si elle peut présenter des avantages au moment de l’embauche ou en terme d’adaptation du poste de travail, peut être perçue comme stigmatisante, mettant l’accent sur les incapacités de la personne. La méconnaissance des droits liés à la R.Q.T.H. est également un facteur avancé dans la littérature.

Par ailleurs, et c’est un des éléments que nous avons retrouvé dans l’enquête exploratoire : « Certains éprouvent, consciemment ou non, le besoin de démontrer leurs capacités et de

ce fait ont tendance à fournir plus d’efforts, à produire davantage que leurs collègues non handicapés au risque de leur santé. Cette crainte à être perçu comme différent, moins performant, crée parfois une réticence à faire connaître et reconnaître sa qualité de travailleur handicapé. Dans certains secteurs d’activités, notamment ceux où la force physique est valorisée, s’ajoute la crainte d’être licencié » (Rapport du Conseil

Economique, Social et Environnemental Régional - C.E.S.E.R. Midi-Pyrénées, 2012, p. 51).

Enfin, N. Amrous montre que les ayants droits à l’O.E.T.H. ont davantage peur de perdre leur emploi. Elle s’appuie pour cela sur l’Enquête Santé et Itinéraire Professionnel de 2007. 14% ont peur de perdre leur emploi (« toujours ou souvent ») ; « l’insatisfaction

vis-à-vis de l’itinéraire professionnel semble par ailleurs corrélée au parcours professionnel vécu comme subi puisque 21% des ayants droits se déclarent insatisfaits contre 10% des non ayants-droits. » (2011, p. 7-8). Les ayants droits à l’O.E.T.H. accordent une place

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25

importante au travail : pour 15% d’entre eux, le travail ou la recherche d’un emploi est plus important que tout le reste, et pour 47% il est très important mais autant que d’autres secteurs (vie familiale, vie sociale,…).

Cette crainte est également soulignée par T. Le Bianic en terme d’avenir professionnel : « Dans certaines entreprises, l'existence de qualifications hautement spécifiques et

faiblement transposables dans un autre secteur peut ainsi conduire les travailleurs à sous-déclarer leurs troubles physiques afin de ne pas avoir à quitter leur emploi. Un tel constat a été fait par F. Piotet (2001) à propos d'ouvrières de la construction aéronautique, qui préfèrent ne pas déclarer au médecin du travail leurs pathologies compte tenu des difficultés de reconversion des salariés du secteur » (T. Le Bianic, dans Les

inemployables, 2003, p. 60).

Par conséquent, nous voyons que la démarche d’obtention d’un statut en lien avec son handicap n’est pas chose aisée. Mais elle permet néanmoins d’accéder à un certain nombre d’aides en vue d’une meilleure insertion professionnelle ou afin d’éviter la désinsertion professionnelle.

c) Le maintien dans l’emploi d’un point de vue règlementaire

Le maintien dans l’emploi fait référence à toute situation d’inaptitude ou de risque d’inaptitude lié à l’emploi. A la suite d’une maladie, d’un accident ou d’usure prématurée du salarié, peut se poser la question de l’adéquation du poste de travail et du maintien dans l’emploi. Seul le médecin du travail peut apprécier l’aptitude médicale au poste d’un salarié. En effet, le médecin du travail évalue la compatibilité de la santé du salarié avec le poste de travail.

L’aptitude médicale n’est pas définie par le code du travail. Elle s’appréhende à la lumière de la notion d’inaptitude professionnelle.

L’article R.4624‐47 du Code du Travail prévoit la délivrance obligatoire d’une fiche d’aptitude à l’issue des examens médicaux d’embauche, périodiques, de reprise ou pour effectuer des travaux spécifiques (surveillance médicale renforcée) ou encore s’il s’agit de

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26

salariés en situation particulière (handicapés, femmes enceintes, jeunes travailleurs et stagiaires de moins de 18 ans…).

L’inaptitude5

n’est acquise, en principe, qu’au terme de deux visites médicales espacées de deux semaines (art. R.4624‐31 du Code du Travail). Mais, en cas de danger immédiat pour la santé ou la sécurité du salarié ou lorsqu'un examen de pré‐reprise a eu lieu dans un délai de 30 jours au plus, elle peut être prononcée dès la première visite.

Le médecin du travail ne peut conclure à l’inaptitude du salarié qu’après une étude de son poste et des conditions de travail dans l’entreprise et de deux examens médicaux espacés de deux semaines. Lorsque l’inaptitude est constatée, l’employeur dispose d’un délai d’un mois pour reclasser ou licencier le salarié devenu inapte à son poste. L’employeur est tenu de tenter de sauvegarder l’emploi du salarié et doit rechercher toutes les possibilités de reclassement compatibles avec les conclusions écrites du médecin du travail. Pendant cette période le salaire n’est pas légalement dû. À l’issue de ce délai d’un mois, à défaut de reclassement ou de licenciement, l’employeur doit reprendre le versement du salaire correspondant à l’emploi que le salarié occupait avant la suspension de son contrat, conformément aux dispositions des articles L.1226‐4 et L.1226‐11 du Code du Travail. A noter que tout licenciement est interdit en raison de l’état de santé du salarié, sauf inaptitude constatée par le médecin du travail (article L.1133‐3 du Code du Travail).

T. Le Bianic a travaillé sur la notion d’inaptitude au travail et a mis en lumière l’impact de l’inaptitude médicale : « La mise en inaptitude inaugure alors une double destitution : « pour soi » (perte de l'identité et de la fierté professionnelle) et « pour autrui »6

(isolement, malaise envers les collègues…). Dans ce contexte, les ajustements identitaires sont multiples (allant du repli sur soi au conformisme bureaucratique), mais ils amorcent le plus souvent une lente exclusion du travailleur de l'entreprise et du monde du travail. »

(dans Les inemployables, 2003, p. 64)

A propos de l’inaptitude, T. Le Bianic distingue deux conceptions : une plutôt négative à partir du processus d’exclusion, et une seconde dans laquelle l’inaptitude médicale pourrait être une opportunité. Processus d’exclusion dans le sens où « Elle [L’inaptitude] constitue une rupture dans la carrière du salarié, qui se trouve brutalement

5 Cf Annexe 2. 6

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27

dessaisi des éléments structurants de son identité personnelle et professionnelle. C'est le cas dans certaines grandes entreprises (telles la R.A.T.P.7, la S.N.C.F.8 ou La Poste) qui orientent les inaptes vers des postes déqualifiées et souvent éloignés du métier pour lequel ils ont été recrutés, prélude fréquent à une exclusion du monde du travail […]. D'autres voient au contraire dans l'inaptitude l'aboutissement d'un processus d'exclusion déjà amorcé pour des raisons autres que médicales. On tente cette fois de réinscrire l'inaptitude dans la trajectoire d'un salarié, en montrant le lien entre ce phénomène et d'autres formes d'exclusion du marché du travail » (p. 61).

D’un autre côté, l’inaptitude peut être perçue positivement : « elle vient récompenser une

vie de dur labeur, autorisant les salariés à quitter le marché du travail avant l'échéance légale. Elle permet aussi à certains salariés, reconnus partiellement inaptes, de terminer leur carrière sur des postes moins pénibles physiquement, tels les anciens ouvriers des lignes de montage de Peugeot mutés dans les bureaux » (p. 62).

Les aspects règlementaires maintenant présentés, il nous semble important d’inscrire la reconversion professionnelle dans des données chiffrées.

3. Quelques données statistiques

Nous avons souhaité apporter quelques informations de type quantitatif afin de mieux cerner la population faisant l’objet de notre recherche. Ces données sont présentées à titre indicatif, elles n’ont pas vocation à refléter la multitude des situations et des réalités vécues notamment par les personnes en situation de handicap9.

a) Concernant la reconversion professionnelle

La reconversion professionnelle est un terme utilisé assez fréquemment. Il exprime cependant une diversité de situations. En effet, la reconversion professionnelle s’origine

7

Régie Autonome des Transports Parisiens

8 Société Nationale des Chemins de Fer français

9 Il faut souligner que les données appréhendent toutes les situations de handicap et pas seulement les

personnes dont le handicap est survenu au cours de la vie. D’où une certaine précaution à prendre à la lecture de ces données.

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28

dans différentes causes : selon l’enquête Ipsos10 (réalisé pour l’Association nationale pour la Formation Professionnelle des adultes - A.F.P.A.) d’octobre 2012, les reconversions professionnelles vécues par les personnes interviewées ont pour motif (par ordre d’importance) : un choix professionnel volontaire (55%), un plan social, une perte d'emploi, une restructuration ou fermeture de site (24%), des raisons familiales, géographiques (16%).

Plusieurs éléments ressortent de cette étude :

- 56% des actifs déclarent avoir déjà changé d’orientation professionnelle, c'est-à-dire de métier ou de secteur d’activité, au cours de leur carrière. Parmi les catégories ayant le plus tendance à changer d’orientation professionnelle, on retrouve les ouvriers (66%) et les employés (63%) et surtout les demandeurs d’emploi (72%).

Chez ceux qui ont déjà changé d’orientation professionnelle au cours de leur vie :

- Une grande majorité y a trouvé des changements positifs (64% un épanouissement professionnel, 56% conditions de travail, 54% évolution de carrière…).

- Pour 71% des personnes interrogées, la reconversion représente un nouveau départ dans la vie, au-delà des aspects professionnels.

- Il y a toutefois des différences sensibles entre catégories socioprofessionnelles dans le bilan de la reconversion. Pour 52% des ouvriers, leur reconversion est considérée comme une contrainte purement dictée par le marché du travail, alors que c’est le cas pour seulement 20% des cadres.

Chez ceux qui n’ont pas changé d’orientation professionnelle au cours de leur vie :

- Plus d’un actif sur trois (35%) se dit prêt à envisager de changer de métier ou de secteur d’activité dans les douze prochains mois.

- 28 % des personnes estiment qu’un plan social, une perte d’emploi… constituent les motifs principaux à l’origine d’une reconversion, alors que ce facteur n’est évoqué que par 24 % des personnes ayant changé de métier.

10

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29

- Les 3 facteurs pouvant motiver une reconversion professionnelle sont un meilleur épanouissement professionnel (61%), un meilleur équilibre vie professionnelle/vie privée (55%), et une meilleure rémunération (54%).

- Sur les freins à la reconversion professionnelle, 15% ne se sentent pas capables de suivre un parcours de formation. Le fait de se sentir satisfait dans sa vie professionnelle (premier frein dans les statistiques) exclue l’idée d’envisager une reconversion professionnelle.

Comme souligné dans cette enquête, les conditions de travail sont parfois invoquées chez les travailleurs qui envisagent de changer de métier au cours de leur carrière : « En 2005,

parmi les salariés âgés de 35 à 55 ans, un sur trois pensait « ne pas être capable de faire le même travail jusqu'à 60 ans » ; c'était particulièrement le cas pour plus d'un tiers des femmes et pour 40 % des employés de commerce et de services et des ouvriers non qualifiés. Ces salariés invoquent la pénibilité physique, mais aussi d'autres facteurs, tels que des tensions avec le public ou les supérieurs, des horaires imprévisibles ou excessifs, etc. (source : D.A.R.E.S. [Direction de l’Animation de la Recherche, des Etudes et des Statistiques], juillet 2008) » (D. Linhart, N. Mauchamp, 2009, p. 57).

b) Concernant la reconversion professionnelle liée à la survenance d’un handicap

En 2008, selon l’enquête Handicap et Santé auprès des Ménages (H.S.M.), 2,5 millions de personnes, âgées de 15 à 64 ans et vivant à domicile, déclarent avoir une reconnaissance administrative du handicap leur permettant de bénéficier de l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés selon la loi n°2005-102 du 11 février 2005.

Les enquêtes (Atlas national A.G.E.F.I.P.H. 2008, Enquête Handicap et Santé auprès de Ménages (H.S.M.) de 2008) montrent que la majorité des personnes ont une reconnaissance administrative du handicap par la C.D.A.P.H.. En effet, selon l’enquête H.S.M., 830 000 personnes déclarent avoir la R.Q.T.H., 718 000 une pension d’invalidité (sécurité sociale), 717 000 l’A.A.H., 669 000 une carte d’invalidité, et 381 000 déclarent avoir été victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle. A noter qu’une personne peut avoir plus d’un type de reconnaissance (par exemple, avoir la R.Q.T.H. et une pension d’invalidité). Les personnes reconnues administrativement

(31)

30

handicapées sont majoritairement des hommes, notamment parmi les victimes d’accident du travail ou de maladies professionnelles (70 %). Elles sont plus âgées que l’ensemble de la population, surtout celles bénéficiant d’une pension d’invalidité (70 % ont au moins 50 ans). Elles ont également un niveau de formation inférieur à l’ensemble de la population, particulièrement pour les détenteurs de la carte d’invalidité ou les bénéficiaires de l’AAH.

L’atlas national A.G.E.F.I.P.H. pointe qu’en 2007, les bénéficiaires de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés (B.O.E.T.H.) ont un plus fort taux de chômage en comparaison de l’ensemble de la population : « Comme en 2002 (dernière situation connue), le taux de chômage des travailleurs handicapés en 2007 est plus du double de celui de l’ensemble des publics (20% contre 8%) ». Concernant le chômage, des données

plus récentes issues du bilan A.G.E.F.I.P.H. à fin Mars 2013 mettent en exergue que « Le

nombre de demandeurs d'emploi handicapés continue de progresser avec 370 674 demandeurs inscrits en catégories A-B-C, soit une augmentation à champ constant de 17,2% en un an (+8,6% pour le tout public). […] En revanche, ils demeurent significativement plus âgés (42% de 50 ans et plus contre 20% tous publics confondus) et ont un moindre niveau de formation (23% de bac et plus contre 43%) ».

Toutefois, les statistiques, telles qu’elles sont conçues aujourd’hui par Pôle Emploi ne permettent pas d’identifier les personnes qui s’inscriraient dans les suites d’un accident de santé. Une étude a toutefois été menée sur les régions Auvergne et Bourgogne en octobre 2006 à partir de 1 200 demandeurs d’emplois handicapés. Les résultats permettent une réévaluation des motifs d’entrée des personnes handicapées. Cette étude confirme que dans près de 27% des cas, les personnes s’inscrivent du fait de raisons de santé, notamment suite à un licenciement pour inaptitude (21%) ou lors d’une reprise d’activité après une interruption pour longue maladie.

Des discontinuités sont soulignées dans les parcours des personnes bénéficiaires de l’O.E.T.H., l’enquête Santé et itinéraire professionnel menée de novembre 2006 à janvier 2007 montre que « les personnes de 20 à 64 ans ayant ou ayant eu une reconnaissance

administrative de leur handicap ouvrant droit à l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés ont des parcours professionnels plus hachés et instables que l’ensemble de la population ».

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31

Nous avons consulté le rapport d’activité des Services d’Appui au Maintien dans l’Emploi des Travailleurs Handicapés (S.A.M.E.T.H.)11 de 2009. Cette année-là, les interventions des S.A.M.E.T.H. ont permis la réalisation de 12 385 maintiens dans l’entreprise contre 11 628 en 2008, soit une augmentation globale de 7%.

Dans 80% des maintiens réussis, les personnes conservent leur poste de travail. Il est également constaté que la quasi-totalité des personnes maintenues conservent un même niveau de qualification (96%) dans le même métier (84%), même celles qui sont maintenues à un autre poste dans l’entreprise.

La saisie du S.A.M.E.T.H. s’effectue (par ordre d’importance) d’abord par le médecin du travail, ensuite par l’entreprise concernée, puis par le salarié lui-même et enfin par les services sociaux des Caisse d’Assurance Retraite et de Santé au Travail (C.A.R.S.A.T.).

Dans ce rapport, les S.A.M.E.T.H. s’interrogent sur le nombre d’avis d’inaptitude (environ 160 000 par an) au regard du nombre de signalements auprès des S.A.M.E.T.H. (6 signalements pour 100 avis d’inaptitude délivrés).

Repérons quelques caractéristiques des personnes ayant bénéficié de l’accompagnement du S.A.M.E.T.H. dans le cadre du maintien dans l’emploi :

- La majorité des bénéficiaires ont déjà le titre de bénéficiaire de la loi 2005 (B.O.E.T.H.) à l’ouverture du parcours, c'est-à-dire être reconnu travailleur handicapé ou un équivalent.

- Pour la moitié des bénéficiaires, la problématique de maintien est liée à une maladie dont l’origine n’est pas professionnelle.

- Les avis d’inaptitude représentent 15% des avis délivrés par les médecins du travail pour les bénéficiaires des S.A.M.E.T.H. à l’ouverture du parcours.

- Les plus de 50 ans représente un quart des bénéficiaires des S.A.M.E.T.H., les 41-50 étant les plus représentés.

- 43% des bénéficiaires ont plus de 10 ans d’ancienneté dans l’entreprise. - Plus de la moitié des bénéficiaires sont des employés.

11

Les S.A.M.E.T.H. ont pour mission d’aider les entreprises et les personnes handicapées à trouver une solution sur-mesure de maintien dans l’entreprise quand apparaît une inadéquation entre l’état de santé de la personne et son poste de travail entraînant un risque de perte d'emploi.

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- Plus de la moitié des bénéficiaires ont un handicap moteur.

- Plus de la moitié des personnes concernées ont un niveau de formation égal au niveau V12. A noter que : « Les maintiens semblent favorisés par un niveau de formation plus élevé ».

A propos de la formation des personnes en situation de handicap, l’A.G.E.F.I.P.H. (Atlas national, p. 93) met en avant trois freins : « ceux qui ne maîtrisent pas les acquis

fondamentaux n’ont pas accès, du moins directement, aux formations qualifiantes ; l’idée de “retourner à l’école” devient plus difficile à accepter avec l’âge or ce public est plus âgé que la moyenne ; une scolarité problématique rend encore plus réticentes les personnes à cette idée ».

La formation repose notamment sur l’alternance. Le nombre de contrats signés en alternance diminue depuis 2011 alors qu’il augmentait chaque année depuis 2005. 3971 contrats en alternance ont été signés en 2012 dans le secteur privé, dont 1950 contrats d’apprentissage et 2021 contrats de professionnalisation (respectivement 2495 et 3 029 en 2010, et 2563 et 2618).

Cap Emploi, en 2012, a accompagné 14 349 entrées en formation de type remise à niveau ou pré-qualifiantes, et 18 458 en formation professionnalisante ou qualifiante. Nous pouvons remarquer que seulement 15% des personnes qui ont été accompagnées vers une formation professionnalisante ou qualifiante ont retrouvé un emploi durable dans les 6 mois qui ont suivi la formation.

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