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Les facteurs explicatifs de la sous-performance des IPO à long terme : une synthèse théorique

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Working P aper IMRI

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LES FACTEURS EXPLICATIFS DE LA

SOUS PERFORMANCE DES IPO A LONG

TERME :

UNE SYNTHESE THEORIQUE

1

Sonia BEN SLIMANE

IMRI

Université Paris-Dauphine

Place du maréchal de Lattre de Tassigny

75775 Paris CEDEX 16

sonia.benslimane@dauphine.fr

1 Cet article fait partie d’un projet sur lequel nous travaillons pour le compte de la CDC, sur les problèmes de

sous performance des IPO’s à long terme. Ainsi, nous tenons à la remercier la CDC pour sa contribution financière dans l’élaboration du projet.

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Résumé

Le développement croissant des IPO’s répond à une logique économique complexe liée aux caractéristiques des entreprises candidates, à la nature des projets et à la spécificité du contexte informationnel caractérisant ces opérations. Un phénomène est souvent observé, celui de la sous performance à moyen et long termes sur le marché boursier. Le présent article tente à travers une synthèse des travaux traitant des IPO’s d’expliquer les causes de la sous performance observée en insistant sur le rôle des compétences et de l'expérience de l’analyste dans l’explication de ce phénomène.

Mots clés:

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Introduction

Une littérature abondante s’est développée autour du phénomène de la performance des « initial public offerings » (IPO’s). Un problème est souvent souligné, celui des rendements des émissions qui sont anormalement élevés à court terme et anormalement faibles à moyen et long termes. Les explications sont pour la plupart fondées sur la théorie d’agence dans le sens où elle permet de comprendre les relations entre les parties prenantes et les enjeux qui les sous-tendent. La présence d’une divergence d’intérêts et la recherche de rentabilité rapide pourraient déboucher sur des comportements « opportunistes » ayant un effet sur l’évaluation de l’entreprise au moment de son introduction et par conséquent sur le niveau des rendements à long terme (EDWIN, GROSMAN et GRUBER J, 1986; HART et HOLSTROM, 1987). Les travaux de LOUGHRAN et RITTER (1995, 2004) sur le marché financier américain confirment cette hypothèse. Ces auteurs montrent que les entreprises sont surévaluées à cause des paris de rentabilité excessive des investisseurs. Des travaux similaires effectués sur les marchés européens confirment la baisse anormale des rendements des émissions à long terme. C’est dans ce cadre que se place notre recherche, qui a pour objectif, au travers d’une synthèse de la littérature d’expliquer les raisons de la sous performance systématique des IPO’s, quelques années après l’introduction. Nous focaliserons l’analyse sur le rôle de l’analyste dans l’explication de ce phénomène. Nous verrons ainsi comment les recommandations avancées par les analystes contribuent à expliquer la baisse anormale des valeurs des titres observée sur le marché deux ans en moyenne après l'introduction. Pour y parvenir, nous expliquerons l’influence du contexte spécifique des IPO’s sur la qualité des évaluations émises par l’analyste. En effet, l’incertitude et le risque influent sur la nature et la qualité de l’information détenue par chaque acteur. Par conséquent les prévisions de rentabilité ne se feront pas indépendamment des informations diffusées. L'évaluation ne traduira pas forcément la valeur fondamentale du titre, et ce en raison de la qualité des

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informations détenues par l'analyste. Dans un deuxième temps, nous mettrons l'accent sur l'inefficacité des évaluations émises par l’analyste. En effet, le risque d'erreur nul n'existe pas, en revanche, les évaluations sont systématiquement biaisées et l’écart d’erreur entre le résultat réel et les prévisions est observé en moyenne dès la fin de la première année. Cette inefficacité est d'autant plus évidente que l'écart entre le prix estimé et le prix observé est important. Dans un troisième temps, nous verrons les raisons des erreurs systématiques d’évaluation. À ce sujet, plusieurs travaux empiriques l'expliquent par des raisons fonctionnelles, liées notamment au fait que l’analyste ne puisse pas aller à l’encontre des intérêts de la banque à laquelle il appartient. Nous synthétiserons les travaux qui appuient ce raisonnement. Dans le prolongement de l’analyse nous présentons une autre voie d’explication, dont l’originalité consiste à expliquer les erreurs d’évaluation par les compétences de l’analyste (LIM 2001, TEOH et WONG 2002). Cette voie bien qu’elle ne soit pas encore beaucoup développée expliquerait mieux à notre sens la variation du niveau d’erreur.

1. Sous performance à long terme : Problème d’évaluation

Les opérations d’IPO’s concernent des petites et moyennes entreprises, souvent qualifiées d’innovantes. L’innovation n’est pas exclusivement technologique, même si bon nombre d’entreprises recensées sur le nouveau marché appartiennent à des secteurs technologiques. L’innovation peut être associée à une innovation de produit ou de service, de processus ou de commercialisation (sociétés de vente en ligne). Ces entreprises présentent non seulement des potentialités de croissances relativement élevées, mais aussi des particularités « irrationnelles » (BERNASCONI M, MONSTET M, 2000) pour lesquelles les notions de prévision, d’incertitude et de risque prennent toute leur importance. L’incertitude renvoie à la rentabilité qui n’est pas définie ni fixée d’avance. Elle varie selon les caractéristiques initiales

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-financières et techniques- des entreprises candidates et selon leur contexte d’évolution. Plus l’asymétrie d’informations est élevée, plus l’incertitude sur la rentabilité est élevée et plus le risque encouru par les investisseurs est important. Pour le porteur des fonds, la décision de financement correspond à une décision d’investissement qui s’inscrit dans une logique de maximisation des flux positifs générés par l’investissement (LOUGHARAN, RITTER, 1995). Cela veut dire qu’au fur et à mesure que le risque augmente, la rentabilité escomptée par les investisseurs doit être telle qu’ils jugeront suffisant de prendre un tel risque. Ce qui expliquerait le taux de rendement « élevé » exigé par l’investisseur. Pour l’entreprise candidate désireuse d’un financement important, la rentabilité n’est pas une donnée ex-ante mais un enjeu déterminant d’autant plus que les investisseurs ne veulent pas prendre le risque dans un environnement incertain. L’évaluation s’avère dans ce contexte, déterminante puisqu’elle permet de réduire le risque et l’incertitude et constitue l’élément fondamental et stratégique pour l’entreprise candidate à une IPO. Cependant, la sous performance est observée quelques années après l’introduction (GOMPERS et LERNER, 2003). Dans ce sens, RITTER (1991) observe une sous performance à long terme de 29,13% sur 36 mois sur le marché américain. Sur le marché européen, différents travaux traitant des IPO’s notamment sur le marché français (LELEUX, 1993, CHAHINE, 2004 et BOUTRON, 2005), confirment cette tendance.

Plusieurs voies de recherche tentent d’expliquer le phénomène de sous performance des IPO’s à long terme, en se basant sur le contexte informationnel de l’évaluation du titre. À ce sujet, la notion de « valeur réelle» du titre (LARDIC S, MIGNON V, 2006) s'avère importante dans le sens où elle permet d'un côté, de connaître la base de calcul de la valeur du titre, c’est-à-dire sa valeur réelle et d'un autre côté, de comprendre l’influence du contexte informationnel sur l’éloignement du prix observé sur le marché de sa valeur fondamentale. En effet, dans un contexte d’efficience informationnelle, le prix observé sur le marché est censé refléter au

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mieux la valeur fondamentale du titre. Les investisseurs anticipent par conséquent les dividendes sur la base des informations dont ils disposent. Or les résultats des études menées sur les différents marchés financiers montrent que les prix observés ne reflètent pas la valeur réelle des titres. L’exemple le plus concret est celui de la bulle Internet pour laquelle les valeurs (les cours d’actions) des entreprises ne reflétaient pas la valeur fondamentale des titres. Ainsi, la sous-performance à long terme pourrait être liée à une insuffisance informationnelle.

De ce fait nous présenterons dans ce qui suit, à partir d’une synthèse de la littérature, les situations qui traduisent au mieux le contexte d’asymétrie d’information. Cette présentation nous paraît indispensable pour comprendre l’influence de la perception des enjeux de la transaction par chacun des acteurs sur les anticipations et ainsi sur l’évolution du prix des titres.

1-1- Les différents types d’asymétrie informationnelle

L’asymétrie d’information est liée aux informations détenues par chacun des acteurs intervenant dans l’IPO. L’objet de cette asymétrie est généralement lié à la situation antérieure de l’entreprise et à la situation du marché. Quant aux enjeux que représentent ces opérations, bien qu'ils diffèrent selon la situation de la société candidate, ils renvoient toujours à une dimension financière qui se traduit par le fait qu’aucun des acteurs n’assumera sa part dans l’investissement que si le taux de rendement ne correspond pas au minimum requis pour le risque encouru. Ainsi, le contrat ne sera conclu que lorsque le bénéfice escompté par l’investisseur et l’entrepreneur est égal ou supérieur à toute autre alternative du projet (BEBCZUK, RICARDO, 2003). Face à la divergence des intérêts des parties prenantes, l’évaluation s’opère dans un contexte d’incertitude et d’asymétrie d’informations où chaque acteur essaie de tirer un maximum de bénéfice de l’opération. Plusieurs cas de figure illustrent

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des situations d’asymétrie d’information, mais nous retenons pour l'analyse les deux situations d’asymétrie d’information les plus développées dans la littérature :

- Le premier cas de figure illustre bien les conséquences de l’aversion au risque. Il s’agit d'abord de l’adverse selection selon laquelle, face à deux projets, présentant des valeurs prévisionnelles identiques, l’investisseur préfère celui qui présente le minimum de risque et l’emprunteur celui le plus risqué. On retrouve ensuite le monitoring costs lié généralement aux actions cachées par l’entrepreneur qui tire avantage des informations dont il dispose, il y aura une possibilité qu'il dissimule certains risques liés au projet en exploitant l’ignorance de l’investisseur ;

- Le deuxième cas d’asymétrie d’information est posé lorsque les investisseurs sont mieux informés que les dirigeants en ce qui concerne le marché et la demande. Ces derniers ne disposent pas d’informations efficaces quant au prix moyen des actions sur le marché et son évolution. Ils ne connaissent pas non plus le niveau de demande de leurs titres. De leur côté, les investisseurs institutionnels disposent de plus d’informations et représentent des clients importants (LOUGHRAN et RITTER, 2002). Ils n’investissement que lorsque le prix proposé est inférieur à leur propre évaluation.

Connaissant la prédominance des enjeux financiers dans les opérations d’IPO, la présentation des différentes situations d'asymétries informationnelles permet de réaliser l'ampleur de ces enjeux et nous permet d'expliquer dans ce qui suit l’influence du contexte informationnel sur l’attribution de la valeur du titre ainsi que son évolution.

1-2- Évaluation du titre dans un contexte d’asymétrie d’information

Plusieurs études traitant des problèmes des IPO’s montrent que les titres ayant connu une sous performance à long terme, ont été évalués initialement à des prix très différents de leurs prix

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réels. PURNAMANDAM et SWAMINATHAN (2002) étudient l’évolution de la performance d’un échantillon très large d’IPO (2000 entreprises) sur la période 1980 à 1997. Ils observent une sous performance des titres à long terme. Ils constatent à cet effet que lorsque la valeur du titre correspond au prix de l’offre, cette valeur est en moyenne 50% au-dessus du prix moyen des titres sur le marché. Cette constatation illustre bien l'influence du contexte informationnel sur l'évolution de la valeur du titre sur le marché. De plus elle permettrait d'établir un lien entre la sous performance et la surévaluation du prix du titre. En effet, si la valeur du titre observée sur le marché est significativement supérieure à la vraie valeur du titre on pourrait penser au phénomène de spéculation illustré par la bulle internet où les prix observés ne traduisaient pas la vraie valeur des titres et qui ont eu pour conséquence une sous performance des titres. Au-delà des phénomènes de spéculation, la sur évaluation conduit à s'intéresser au processus d'évaluation. Celle-ci est opérée par un intermédiaire mandaté par l’entreprise candidate dans le cadre de la préparation du dossier d’introduction. Sa démarche est essentiellement prospective et prévisionnelle et repose sur des principes de la finance classique, notamment d’irréversibilité, d’incertitude et de durée. Cela suppose l’utilisation de méthodes ni constantes ni absolues. À ce sujet, COPELAND, KOLLER et MURRIN (2000)soulignent la difficulté de mesurer la rentabilité pour le cas des PME innovantes dans le sens où le calcul de la rentabilité se base sur la notion d’actualisation selon laquelle le taux d’actualisation augmente au fur et à mesure que le risque est élevé, ce qui a pour conséquence de baisser la valeur de la VAN2

. Ceci veut dire que les projets les plus risqués peuvent être pénalisés en raison d'une certaine aversion au risque. Par ailleurs, le financement est conditionné par des garanties « prévisionnelles et non réelles » avancées par les analystes qui doivent inclure la possibilité de présence d’une asymétrie d’information. Leur intervention permet d’un côté de discipliner le comportement des dirigeants notamment

2 VAN: valeur actuelle nette. C'est un critère qui permet de mesurer la rentabilité d'un investissement en fonction

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en termes de manipulation des résultats comptables et de l’autre côté de rassurer les investisseurs potentiels sur leur choix d’investissements. Ainsi, leur présence dans la chaîne de financement permettrait en théorie, de réduire l’incertitude relative à la situation antérieure de l’entreprise candidate et de résoudre les tensions informationnelles. Cependant plusieurs travaux soulignent que les analystes ont souvent tendance à surévaluer ces entreprises au moment de leur introduction (KRIGMAN et al., 1999; HOUGE et al., 2001). Plus précisément, les analystes proposent généralement un prix qui dépend du prix moyen sur le marché (CORNELLI et GOLDREICH, 2001), ce qui veut dire que la valeur du titre serait de plus en plus éloignée de sa valeur fondamentale. Les prix proposés seront par conséquent supérieurs au prix moyen du marché ce qui augmente le risque de sous performance. Ce comportement illustre bien les effets de la présence d'une asymétrie informationnelle. En effet, les analystes disposent généralement des informations relatives aux entreprises candidates, au marché et aux investisseurs. Ces informations leur sont utiles pour déterminer la valeur des titres et prévoir les gains futurs. Le fait même que ces informations soient restreintes aux analystes, augmente les risques de surévaluation ou sous-évaluation. Ainsi, la valeur du titre au moment de l’introduction ne reflète pas systématiquement sa vraie valeur fondamentale. Cet écart tend à s’accentuer en présence d’une asymétrie informationnelle, qui caractérise le plus le contexte d’évolution de ce type d’entreprises. Ce qui nous permet de valider l’hypothèse qui stipule que quelle que soit l’origine de la situation d’asymétrie, l’information diffusée relativement aux potentialités de gains futurs, influera sur la vraie valeur du titre et ainsi sur sa performance à long terme.

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2. La qualité de l’évaluation serait-elle à l’origine de la sous

performance ?

La relation entre l’évaluation au moment de l’introduction et la performance à long terme a fait l’objet de plusieurs études sur les marchés des IPO’s, qui portent notamment sur la qualité des prévisions émises par les analystes. Ces études montrent des erreurs systématiques dans les prévisions qui s'avèrent dans la plupart des cas assez éloignées des résultats réels. Nous verrons dans ce qui suit les facteurs qui influeraient sur les prévisions, ainsi que les enjeux des prévisions pour l'analyste surtout que ces prévisions sont souvent supérieures aux résultats observés.

2-1- La réalité des évaluations : Des erreurs de prévision

Les prévisions des analystes sont censées aider les investisseurs désireux d'une rentabilité élevée, à faire un arbitrage face à plusieurs possibilités de financement. Cet arbitrage tient souvent compte du risque encouru et des potentialités de rendements affichées par les analystes. À ce sujet, plusieurs études montrent que les évaluations sont systématiquement biaisées (STHELE, EHRARDT, PRZYBOROWSKY, 2000; LOUGHRAN et RITTER, 2002; CHAHINE, 2001, 2004). Dans ces sens, PURNAMANDAM et SWAMINATHAN (2002), qui se basent sur la mesure de la valeur intrinsèque d’entreprises comparables (prix/EBITDA) constatent que les entreprises sont systématiquement évaluées à un niveau supérieur au prix réel. Les travaux de BOUTRON (2005) qui étudie un échantillon d'IPO's sur la période (1983-1987), confirment l’hypothèse de surestimation des gains futurs. Une des explications de la sur évaluation est liée au marché (CORNELLI et GOLDREICH, 2001). En effet, les analystes proposent généralement un prix qui dépend du prix moyen sur le marché et ajustent leur prix à la hausse par rapport au prix estimé au départ. Néanmoins, cette méthode ne sert pas les entreprises à long terme puisque le risque de sous performance augmente. Cette

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tendance à la surestimation s'illustre durant les "périodes de spéculation" (RITTER, WELCH 2002 et BOUTRON 2005), durant lesquelles les analystes motivent les investisseurs à investir dans un souci de rentabilité en profitant de l'effervescence qui anime les transactions sur le marché, sans se soucier des conséquences de l'éloignement du prix observé de celui traduisant la vraie valeur de l'entreprise et par suite de l’avenir de l’entreprise. À cet effet, l'erreur nulle d'évaluation et de détermination des gains futurs n'existe pas et ce en raison de la nature même de la démarche essentiellement prospective et prévisionnelle. Par ailleurs, le degré d’incertitude élevé caractérisant les opérations des IPO's et auquel sont confrontés les analystes accentuerait la probabilité des erreurs. À ce sujet, CHAHINE montre en calculant le (ES)3

pour deux échantillons dont la variable discriminante est l'IPO, que les analystes ont des problèmes d’évaluation lorsqu’il s’agit des entreprises candidates à des IPO’s. Nous pouvons ainsi comprendre les limites d'efficacité des critères financiers classiques en tant qu'outils dans le calcul des prévisions En revanche, lorsque l'écart d'erreur est important, dans le sens d'une surestimation par exemple, il serait nécessaire d'expliquer sur les raisons du suroptimisme de l'analyste et ses motivations et ce au détriment de l'avenir de l'entreprise qui le mandate.

2-2- Une tendance pour le suroptimisme ?

Le suroptimisme correspond au fait que l'analyste prévoit un potentiel de croissance trop élevé compte tenu de la situation de l'entreprise candidate et du marché. Cette situation est validée dans les travaux de RAJAN et SERVAES (1997) qui expliquent que lorsque les analystes décrivent un potentiel de croissance moyen, les IPO affichent de meilleures performances sur le long terme que lorsqu’ils prédisent un potentiel de croissance trop élevé. Sur le marché financier français, l'hypothèse de sur-optimisme est défendue dans plusieurs

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études empiriques notamment celle de CHAHINE (2004) portant sur un échantillon de 168 entreprises dont la variable discriminante est l’IPO. Il constate l'existence d'un biais dans les prévisions avancées par les analystes puisque celles-ci dépassent clairement les gains réels des IPO’s. Ce résultat est d'autant plus intéressant lorsqu'il remarque que l’écart d’erreur est anormalement important la première année. Sur le marché américain, les résultats des travaux de MICHAELY et WOMACK (1999) vont dans ce même sens. Ces auteurs étudient un échantillon de 391 IPO's sur la période 1990- 1991. Ils constatent que les valeurs réelles des entreprises sont souvent faibles lorsque les prévisions sont établies par l’analyste souscripteur. Nous pouvons confirmer cette tendance à la surestimation des gains. En revanche, il serait nécessaire d'essayer d'expliquer les raisons de ce comportement, étant donné que l'analyste s'engage par les fonctions de certification qui lui sont attribuées à évaluer les entreprises candidates et à prévoir des gains. Certains auteurs défendent à ce sujet l'hypothèse selon laquelle les recommandations de l'analyste souscripteur sont subjectives puisqu'il prend des décisions biaisées en faveur des IPO auxquelles sa banque d’investissement souscrit (MICHAELY et WOMACK 1999). D'autres auteurs défendent l'hypothèse de la présence d'anomalies ayant des origines comportementales des analystes (ABARBANELL 1991 et RAJAN et SERVAES 1997). Ainsi, la partie suivante se propose d'expliquer les raisons de suroptimisme de l'analyste et de savoir s'il résulte d’un conflit relatif à l’analyste dans sa fonction ou il s'agirait d’un problème lié aux compétences.

3. Conflits fonctionnels ou problèmes de compétences ?

Plusieurs hypothèses sont avancées pour expliquer les raisons du biais dans les prévisions des analystes. Plusieurs auteurs (DUGAR et NATHAN, 1995, MICHAELY et WOMACK, 1999, BAUMAN et MILLER, 1997) défendent l’hypothèse de subjectivité de l'analyste pour des raisons fonctionnelles. À ce sujet, MICHAELY et WOMACK (1999) expliquent que lorsque

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les analystes travaillent pour des banques d’investissements associées à des sociétés qui veulent s’introduire en bourse, ils ne peuvent pas avancer de prévisions de performance et de gains objectives des sociétés candidates, ce qui augmente le niveau des erreurs. Une autre explication place les compétences de l’analyste au cœur du débat. Nous procéderons par l'analyse de la première voie d'explication, souvent soulignée dans les travaux traitant de la sous performance des IPO's et liée notamment aux conflits fonctionnels. Ensuite, nous présenterons une autre voie d'explication, bien qu'elle ne soit pas très développée, celle relative à l'aptitude de l'analyste à émettre des prévisions efficaces quant aux potentialités de gains futurs de l'entreprise candidate.

3-1- Les conflits fonctionnels et divergences d’intérêts

Les analystes financiers travaillent souvent pour des sociétés de courtage pour lesquelles les opérations d'IPO présentent des enjeux financiers importants. Les prévisions des analystes sont ainsi influencées par les objectifs de la société en termes d'évolution des parts de marchés (DUNBAR 2000). La situation apparaît complexe pour la banque d’investissement qui doit d’un côté attirer de nouveaux investisseurs en sous évaluant les entreprises candidates à une IPO (SHILLER, 1990) et d’un autre côté, la banque ne prend pas la charge d’émettre des recommandations négatives concernant l’un de ses clients. De ce fait, la qualité des recommandations influe sur la réputation externe du cabinet qui souscrit l’IPO ou la banque d’investissement à laquelle appartient le cabinet, puisqu'en sous évaluant trop les titres, la banque perd de futurs émetteurs tandis que si elle ne sous-évalue pas assez, elle perd de potentiels investisseurs. Dans ce contexte, les prévisions effectuées par l'analyste s'avèrent optimistes (HAMAO, PACKER et RITTER, 2000). À ce sujet, la comparaison effectuée par MICHAELY et WOMACK (1999) entre les prévisions établies par des analystes appartenant à une banque d’investissement par rapport à celles qui sont établies par des analystes

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n’appartenant pas la société qui souscrit confirme l'influence des relations d'agence sur la subjectivité de l’analyste. Les analystes portent donc deux casquettes. D’un côté, ils servent leurs clients, et de l’autre coté, ils aident les sociétés auxquelles ils appartiennent à augmenter le volume des actions qu’elles souscrivent. Cette situation pourrait conduire l’analyste à chercher les meilleurs profils et à effectuer une évaluation positive qui lui assure une meilleure rémunération et une meilleure réputation.

Une autre voie d'explication que nous présentons dans le paragraphe suivant remet en cause l'aptitude de l'analyste à prévoir efficacement les potentialités de gain des entreprises candidates. Cette voie vient compléter celle que nous venons de développer. Elle apparaît intéressante dans le sens où elle s'inscrit dans une optique de responsabilisation de l'analyste face aux enjeux ainsi qu'aux risques des évaluations.

3-2- Vers une remise en cause des compétences de l’analyste

Au-delà des conflits d’intérêts qui influenceraient les prévisions émises par l’analyste, il serait intéressant de s’interroger sur le rôle de l’analyste de par ses compétences et son expérience dans une optique d'efficacité des prévisions. Cette capacité dépend non seulement de ses aptitudes à utiliser les outils métriques et de son expérience mais aussi de sa capacité à interpréter les résultats, et à inclure dans son raisonnement, une éventuelle asymétrie d’information. Cette hypothèse bien qu'elle ne soit pas encore très développée, est soulignée dans plusieurs travaux notamment ceux de LIM (2001) qui met l'accent sur le lien entre information incertaine et expérience de l’analyste. Les travaux de TEOH et WONG (2002) vont aussi dans ce sens. Ces auteurs remettent en cause la capacité des analystes à inclure la possibilité d’une asymétrie d’information et soulignent que si les analystes prenaient en considération l’implication de l’information contenue dans les comptes dans une optique de gain futur, la sous performance serait quelque peu évitée. Le biais d’erreur nul n’existe pas, et

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ce en raison de la spécificité du contexte des IPO's. Cependant, les analystes ont tendance à surestimer les gains et leurs estimations sont moins fiables sur un horizon de long terme (CHAHINE, 2004). En revanche, un analyste expérimenté et connu pour la qualité de ses prévisions réduirait les erreurs de prévision et aiderait mieux les investisseurs dans leurs décisions. Dans ce sens, DINH et GAJEWSKY (2005) qui expérimentent 10 marchés sur lesquels les prévisions des analystes sont biaisées et divergentes, montrent que les imperfections contenues dans les prévisions entraînent des déviations des prix des titres par rapport à leur valeur fondamentale. Par ailleurs, l’absence d’une attente raisonnable de la part des investisseurs contribue au manque d'efficacité de l'analyste (LOUGHRAN et RITTER, 1995). Les prévisions biaisées des analystes affectent par conséquent les comportements et les anticipations des investisseurs (TEOH et WONG, 2002). À ce propos, les enquêtes effectuées par KRIGMAN, SHAW et WOMACK (1999) auprès de chefs d'entreprises et de directeurs financiers faisant des IPO’s, indiquent que 75% de leurs décisions se basent sur la réputation de l’analyste souscripteur.

Ainsi, nous estimons que le contexte des IPO’s permet de tester la capacité de l’analyste à inclure la présence d’une asymétrie d’information dans l’opération et donc à ne pas trop s’écarter des futurs gains réels. Certes, l'écart nul n’existe pas puisque la démarche d’évaluation demeure prospective et prévisionnelle. En revanche, la réduction des écarts d’évaluation repose sur l’expérience et les compétences propres de l’analyste, qui déterminent au final sa réputation.

Conclusion

L’explication des raisons de la persistance du phénomène de sous performance à long terme dans le contexte des IPO’s est aussi complexe que celui des intérêts des acteurs impliqués. Cette complexité se reflète à travers les comportements des analystes qui affichent un

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optimisme exagéré quant aux prévisions de gain des entreprises candidates. Ces erreurs d’évaluations conduisent à réfléchir au statut de l’analyste dans le sens d’une séparation des fonctions afin de réduire le biais dans l’évaluation. Il serait aussi important de mettre en place un système de notation des analystes par rapport à leurs résultats pour une meilleure efficacité dans leurs fonctions. Il est aussi question d’établir des règles claires,

une meilleure définition de l’évaluation métrique, surtout pour les entreprises n’ayant pas d’antériorité et pour lesquelles les prévisions sont très imprécises. Enfin, si les entrepreneurs cherchent à modifier positivement la perception des investisseurs sur la distribution des flux de liquidités futurs en vue d’obtenir un prix plus élevé, le coût de la sous évaluation n’est pas supprimé, il est simplement transféré dans le temps. Par ailleurs, la présence d’intermédiaires compétents qui apportent une garantie au marché permet de réduire l’asymétrie d’information et l’incertitude des investisseurs.

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