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Étude de prévalence du virus de l'immunodéficience humaine et du virus de l'hépatite C chez les personnes incarcérées dans les établissements provinciaux au Québec

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Étude de prévalence du virus de

l'immunodéficience humaine et du virus de

l'hépatite C chez les personnes incarcérées

dans les établissements provinciaux au

Québec

Mémoire

Yohann Courtemanche

Maîtrise en épidémiologie

Maître ès sciences (M.Sc.)

Québec, Canada

© Yohann Courtemanche, 2016

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Étude de prévalence du virus de

l'immunodéficience humaine et du virus de

l'hépatite C chez les personnes incarcérées

dans les établissements provinciaux au

Québec

Mémoire

Yohann Courtemanche

Sous la direction de :

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RÉSUMÉ

Nous avons étudié les infections au virus de l'immunodéficience humaine (VIH) et au virus de l'hépatite C (VHC), les comportements à risque associés et l'accès aux services chez les individus incarcérés dans les prisons provinciales du Québec, en comparant nos résultats à une étude précédente dans les mêmes prisons. Au total, 19,8% des hommes et 28,6% des femmes ont rapporté s'être déjà injecté de la drogue, ce qui demeure élevé malgré une baisse depuis 2003. La majorité des comportements à risque étaient moins fréquents en 2014 qu'en 2003. Les prévalences du VIH (hommes: 1,8% ; femmes: 0,8%) et du VHC (hommes: 11,9% ; femmes: 19,2%) sont aussi plus basses en 2014 qu'en 2003. Les principaux comportements à risque associés au VIH et VHC sont l'injection de drogue et le partage de matériel d'injection. L'accès aux services est problématique dans cette population, principalement pour le VHC. Nos résultats démontrent que les prisonniers du Québec sont à risque et nécessitent un meilleur accès aux soins.

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ABSTRACT

We studied human immunodeficiency virus (HIV) and hepatitis C virus (HCV) infections, related risky behaviours and access to services among individuals incarcerated in Quebec's provincial prisons and compared our results to a previous study conducted in the same prisons. Globally, 19.8% of men and 28,6% of women reported an history of injection drug use, which is still high, despite a decrease since 2003. Most risky behaviours were less frequent in 2014 than in 2003. HIV (men: 1.8%; women: 0.8%) and HCV (men: 11.9% ; women: 19.2%) prevalence were also lower in 2014 than in 2003. Access to care and services is problematic in this population, particularly regarding HCV treatment. Our results demonstrate that Quebec's provincial prisoners are a population at risk for HIV and HCV infections and need better access to care and services.

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TABLE DES MATIÈRES

RÉSUMÉ ... III ABSTRACT ... IV TABLE DES MATIÈRES ... V LISTE DES TABLEAUX ... VII LISTE DES FIGURES ... IX LISTE DES ABRÉVIATIONS ... X REMERCIEMENTS ... XI AVANT-PROPOS ... XII

1. INTRODUCTION ... 1

2. REVUE DE LITÉRATURE ... 3

2.1SITUATIONGLOBALE ... 3

2.1.1 GÉNÉRALITÉS SUR LE VIH ... 3

2.1.2 GÉNÉRALITÉS SUR LE VHC ... 5

2.2SITUATIONCANADIENNE ... 6

2.2.1 LE VIH AU CANADA ... 6

2.2.2 LE VHC AU CANADA ... 8

2.4SITUATIONENPRISON ... 9

2.4.1 SITUATION DU VIH EN PRISON ... 10

2.4.2 SITUATION DU VHC EN PRISON ... 11

2.4.3 INTERVENTION / TRAITEMENT EN PRISON ... 11

2.4.3.1 DÉPISTAGE ... 12

2.4.3.2 TRAITEMENTS ... 13

2.4.4 TRANSITION POST-INCARCÉRATION ET RÉINCARCÉRATION ... 14

2.5MODESDETRANSMISSION ... 15

2.5.1 UTILISATION DE DROGUES INJECTABLES ... 15

2.5.2 RELATIONS SEXUELLES ... 16

2.5.3 TATOUAGE ET PIERCING ... 17

2.6POPULATIONCARCÉRALEPROVINCIALEQUÉBÉCOISE ... 18

2.6.1 CARACTÉRISTIQUES SOCIODÉMOGRAPHIQUES ... 19 2.6.2 CARACTÉRISTIQUES PÉNALES ... 20 3. OBJECTIFS ... 21 4. MÉTHODOLOGIE ... 22 4.1DEVISD’ÉTUDE ... 22 4.2POPULATIONÀL’ÉTUDE ... 22

4.3ÉCHANTILLONAGEETPUISSANCESTATISTIQUE ... 22

4.3.1 SÉLECTION DES SITES ... 22

4.3.2 SÉLECTION DES SUJETS ... 23

4.3.3 PUISSANCE STATISTIQUE ... 23

4.4PLANIFICATIONOPÉRATIONNELLE ... 24

4.5COLLECTEDEDONNÉES... 25

4.5.1 QUESTIONNAIRE ... 25

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4.6VARIABLESÀL’ÉTUDE ... 27

4.6.1 VARIABLES DÉPENDANTES ... 27

4.6.2 VARIABLES INDÉPENDANTES ... 28

4.7SAISIEETANALYSEDESDONNÉES ... 28

4.8CONSIDÉRATIONSÉTHIQUES ... 29

5. RÉSULTATS ... 31

5.1PARTICIPATIONÀL'ÉTUDE ... 31

5.2CARACTÉRISTIQUESDESPARTICIPANTS ... 32

5.2.1 SOCIODÉMOGRAPHIQUE ET INCARCÉRATION ... 32

5.2.2 ANTÉCÉDENTS DE SANTÉ ... 34

5.2.2.1 DÉPISTAGE DU VIH, VHC ET VHB ... 34

5.2.2.2 ACCÈS AUX SERVICES DE SANTÉ ... 37

5.2.2.3 INDIVIDUS IGNORANT LEUR STATUT ... 38

5.2.2.4 AUTRE HISTORIQUE DE SANTÉ ... 38

5.3.1 COMPORTEMENTS À RISQUE À L'EXTÉRIEUR DE PRISON ... 40

5.3.2 COMPORTEMENTS À RISQUE À L'INTÉRIEUR DE PRISON ... 41

5.4PRÉVALENCEDUVIHETVHC ... 43

5.4.1 PRÉVALENCE DU VIH... 43

5.4.2 PRÉVALENCE DU VHC ... 43

5.5FACTEURSDERISQUEASSOCIÉSAUVIHETVHC ... 46

5.5.1 FACTEURS DE RISQUE ASSOCIÉS AU VIH ... 46

5.5.2 FACTEURS DE RISQUE ASSOCIÉS AU VHC ... 50

6. DISCUSSION... 52

7. CONCLUSION ... 62

RÉFÉRENCES ... 63

ANNEXE 1 - FORMULAIRE DE CONSENTEMENT ... 71

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LISTE DES TABLEAUX

Tableau 1 - Région de résidence de la population carcérale, Québec 2007-2008……..…19 Tableau 2 - Durée de séjour en établissement de détention chez les personnes condamnées à une peine continue dans le système provincial québécois en 2007-08.….20 Tableau 3 – Composition des questionnaires………26 Tableau 4 – Résultats finaux aux tests ELISA: critères de positivité ...………...27 Tableau 5 - Distribution des participants selon les établissements de détention………….32 Tableau 6 - Caractéristiques sociodémographiques et d'incarcération selon le sexe, en 2003 et 2014………33 Tableau 7 -Historique et résultat du dépistage pour le VIH, VHC et VHB entre 2003 et 2014, selon le sexe……….35 Tableau 8 - Temps moyen depuis le dernier test de dépistage pour le VIH, VHC et VHB selon le sexe, utilisation de drogues injectables et HARSAH………..……...36 Tableau 9 - Suivi médical et traitements des individus infectés pour le VIH et VHC, selon l'utilisation de drogues injectables………37 Tableau 10 - Proportion d'individus infectés ignorant leur statut, selon le sexe et l'utilisation de drogues injectables………38 Tableau 11 - Comparaison des antécédents de jaunisse, transfusion sanguine et vaccination pour l'hépatite B………..…39 Tableau 12 - Comparaison des comportements à risque à l'extérieur de prison entre 2003 et 2014, selon le sexe……….40 Tableau 13 - Comparaison des comportements à risque en prison entre 2003 et 2014, selon le sexe……….…...42 Tableau 14 - Prévalence du VIH et VHC pour les hommes et les femmes, selon l'utilisation de drogues injectables à l'extérieur de prison………44 Tableau 15 - Distribution et prévalence des individus infectés au VIH et ceux ayant des anti-VHC selon les établissements de détention………45 Tableau 16 - Analyses multivariées de l'association entre les facteurs de risque et l'infection au VIH chez les individus incarcérés dans les établissements de détention provinciaux du Québec……….……….46

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Tableau 17 - Analyses multivariées de l'association entre les facteurs de risque et l'infection au VIH chez les UDIs incarcérés dans les établissements de détention provinciaux du Québec (n=281). Modèle avec le partage de matériel d’injection mais sans les relations sexuelles avec un ou une UDI...47 Tableau 18 - Analyses multivariées de l'association entre les facteurs de risque et l'infection au VIH chez les UDIs incarcérés dans les établissements de détention provinciaux du Québec (n=281). Modèle avec les relations sexuelles avec un ou une UDI mais sans le partage de matériel d’injection. ...48 Tableau 19 - Analyses multivariées de l'association entre les facteurs de risque et l'infection au VIH chez les UDIs incarcérés dans les établissements de détention provinciaux du Québec (n=281). Modèle avec une variable représentant la présence de partage de matériel d’injection ou de relations sexuelles avec un ou une UDI. ...49 Tableau 20 - Analyses multivariées de l'association entre les facteurs de risque et l'infection au VHC chez les individus incarcérés dans les établissements de détention provinciaux du Québec (n=1518). ...50 Tableau 21 - Analyses multivariées de l'association entre les facteurs de risque et l'infection au VHC chez les utilisateurs de drogues injectables incarcérés dans les établissements de détention provinciaux du Québec. ...51

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LISTE DES FIGURES

Figure 1 – Nombre estimé d'adultes et d'enfants infectés par le VIH par région géographique, en 2014……….4 Figure 2 - Prévalence estimée et rapportée de l'infection au VHC chez les adultes par pays en 2014………...6 Figure 3 – Taux (par 100 00 habitants) de rapports de tests positifs pour le VIH par province/territoire, 2012………7 Figure 4 - Proportion des tests positifs pour le VIH déclarés dans la population canadienne adulte, selon le sexe et la catégorie d'exposition (HÉT-ARS: hétérosexuel aucun risque signalé, HÉT-risque: hétérosexuel avec personne à risque, HÉT-endémique: hétérosexuel provenant d'une région endémique, UDI: utilisateurs de drogue injectable et HRSH:

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LISTE DES ABRÉVIATIONS

VIH : virus de l’immunodéficience humaine VHC : virus de l’hépatite C

VHB : virus de l’hépatite B

UDI / UDIs : utilisateur(s) de drogues injectables

HARSAH : homme ayant des relations sexuelles avec des hommes SCC : Service correctionnel Canada

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REMERCIEMENTS

Je tiens à exprimer toute ma gratitude au Dr. Michel Alary pour m'avoir acceuilli dans son équipe de recherche et pour sa direction de ce mémoire. Ce milieu stimulant et ses précieux conseils m'ont permis d'appliquer et de développer mes connaissances en recherche.

Je remercie Céline Poulin, pour son accompagnement et encadrement pendant la réalisation de ce projet de recherche. Participer aux différentes étapes de la réalisation du projet à ses côtés fut une opportunité hors du commun.

Je suis très reconnaissant envers tous les employés de l'Axe santé des populations et pratiques optimales en santé du centre de recherche du CHU de Québec, pour leur support pendant la réalisation de ce projet. Particulièrement, je remercie Ginette Desbiens, Jacinthe Bégin, Denis Guillette et Céline Valin pour leur aide dans l'organisation et la réalisation du projet. Mes remerciements vont également à Éric Demers, pour sa précieuse assistance pour les analyses statistiques de ce mémoire.

Enfin, je remercie ma famille et mes amis pour leur soutien et encouragement pendant la réalisation de ce projet

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AVANT-PROPOS

Le projet de maîtrise présenté dans ce mémoire a été réalisé sous la direction du Dr. Michel Alary, au sein de l'Axe santé des populations et pratiques optimales en santé du Centre de recherche du CHU de Québec. Céline Poulin, la coordonatrice de ce projet, m'a aussi assisté dans toutes les étapes de ce projet.

J'ai participé activement à ce projet de recherche dans la collecte des données, les analyses statistiques et pour la présentation des résultats. Les rencontres avec les participants dans les établissements de détention m'ont permis de constater les défis de la collecte de données sur le terrain, mais aussi d'apprécier l'importance des résultats de cette enquête pour les individus incarcérés .

Les résultats de cette étude ont été présentés sous forme d'affiche à la Journée scientifique du Centre de recherche du CHU de Québec tenue le 20 octobre 2014 et sous forme de présentation orale à la Journée de la recherche 2015 des étudiants de l’Axe santé des populations et pratiques optimales en santé du Centre de recherche du CHU de Québec le 4 mai 2015. Ces résultats ont aussi été présentés par affiche au 24e Congrès annuel canadien de recherche sur le VIH/Sida organisé par l'Association canadienne de recherche sur le VIH/Sida à Toronto au printemps 2015, ainsi qu'une présentation orale au The North American Housing and HIV/AIDS Research Summit à Washington DC en septembre 2015. Finalement, un atelier portant sur les résultats de cette étude a été réalisé lors de la 29e rencontre nationale de l'association des intervenants en toxicomanie du Québec le 6 mai 2015.

Le financement pour la réalisation de ce projet provient du Ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec. Le Dr Michel Alary m'a supporté financièrement pendant mon programme de maîtrise. La Faculté de médecine de l'Université Laval m'a aussi supporté en m'octroyant la Bourse de maîtrise pour la recherche sur le VIH/SIDA.

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1. INTRODUCTION

Les infections par le virus d’immunodéficience humaine (VIH) et de l’hépatite C (VHC) sont des infections transmises sexuellement et par le sang (ITSS). Ces infections causent de graves problèmes de santé et même la mort. Il a été démontré que la prévalence de ces infections est plus élevée dans la population carcérale que dans la population générale (1, 2). En 2003-04, la prévalence de l’infection au VIH était de 3,4% et de 18,5% pour l’infection au VHC dans la population carcérale du Québec, contre 0,2% et 0,8% dans la population canadienne (3-5). Plusieurs études ont identifié des comportements à risque présents en prison qui favorisent la transmission du VIH et du VHC, notamment les activités sexuelles, l’injection de drogues et le partage d’instruments de tatouage (2, 6). De plus, les individus incarcérés proviennent souvent d’un milieu social défavorisé, avec des contacts moins fréquents avec le système de santé conventionnel (2). Il n’est toujours pas clair si les facteurs de risque du VIH et du VHC augmentent le risque d’incarcération ou si l’incarcération augmente l’incidence de ces facteurs de risque (7). Le milieu carcéral représente une opportunité importante pour le dépistage et la prise en charge du VIH et du VHC pour ces populations à risque, ce qui permet de limiter la transmission et d'épargner les coûts associés aux nouvelles infections (8, 9).

Les études antérieures ont démontré des différences géographiques dans la prévalence du VIH, VHC et des facteurs de risque (1, 10). La dernière étude sur le sujet au Québec a été effectuée en 2003 (3). Il est donc primordial d’avoir des données plus récentes, tant sur la prévalence des infections que sur les facteurs de risque, pour mettre en place des interventions adaptées aux besoins spécifiques de cette population. Aucune étude n’a permis d’évaluer l’évolution de la situation dans les établissements de détention du Québec. Il y a aussi peu de certitude dans la littérature quant aux modes de transmission du VIH et VHC dans la population carcérale (11).

Nous avons conduit une étude transversale chez des hommes et des femmes détenus dans un établissement carcéral au Québec pour mesurer la prévalence de l’infection au VIH, de l’infection au VHC et des comportements à risque. Cette étude, dont les résultats sont présentés dans ce mémoire, a permis de mettre à jour les connaissances sur la situation dans les établissements de détention québécois, en plus de pouvoir observer les différences de prévalence des infections au VIH et VHC sur une décennie, une première au Québec. Aussi, les comportements à risque ont été évalués à l’intérieur et à l’extérieur de la prison, ce qui permettra de mieux comprendre la dynamique

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de transmission dans la population carcérale. L’augmentation constante du nombre de détenus en fait un groupe à haut risque d’importance (12). Les résultats de cette étude permettront aux autorités de santé publique et des services correctionnels de planifier leurs interventions avec des données valides et précises sur les infections au VIH et VHC et les comportements à risque.

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2. REVUE DE LITÉRATURE

2.1 SITUATION GLOBALE

2.1.1 GÉNÉRALITÉS SUR LE VIH

Le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) appartient à la famille des Retroviridae (13). Le VIH se retrouve sous deux types, le VIH-1 et le VIH-2. Le VIH-1 est le plus répandu et est responsable de l'épidémie mondiale (13). La première phase d'une infection au VIH est l'infection primaire, qui se caractérise par des symptômes d'allure grippale. Ces symptômes sont généralement faibles et ne se retrouvent pas chez tous les individus infectés (14). Au niveau sérologique, on observe temporairement une baisse du taux de CD4 et une augmentation de la charge virale (14). La deuxième phase, l'infection asymptomatique, peut durer jusqu'à plus de dix ans. Durant cette phase, les CD4 et la charge virale sont généralement à des niveaux plus normaux, cependant les anticorps anti-VIH sont toujours détectables dans le sang (14). La troisième phase, l'infection symptomatique, est le résultat d'une augmentation de la réplication du VIH et la diminution associée de la capacité du système immunitaire. Au niveau sérologique, le taux de CD4 chute, tandis que la charge virale augmente durant cette phase. La gravité des symptômes dictera l'entrée dans la phase Sida (syndrome d'immunodéficience acquise), qui est la phase terminale de l'infection au VIH (14).

Aucun vaccin n'est disponible pour prévenir le VIH. Cependant, l'administration de traitements antirétroviraux en prophylaxie pré-exposition et en prophylaxie post-exposition peuvent prévenir l'infection au VIH (15, 16). La trithérapie antirétrovirale est une combinaison de trois médicaments utilisés pour traiter l'infection au VIH. Les plus récentes recommandations suggèrent le traitement pour toute personne infectée, peu importe le stade de l'infection (sauf certaines exceptions) (17). Les traitements antirétroviraux ne permettent pas d'éliminer l'infection au VIH, mais ils permettent de réduire le taux de décès, d'infections opportunistes, d'atteindre une suppression virale et finalement de réduire le risque de transmission (17). À noter que même si un individu a une charge virale indétectable (avec ou sans traitement), les anticorps anti-VIH seront toujours détectables après l'infection primaire (séroconversion) (18).

À l’échelle mondiale, on estimait en 2014 qu’environ 36,9 millions de personnes étaient infectées par le VIH (figure 1), avec environ 2,5 millions de nouveaux infectés par année (19). On obtient ainsi une prévalence de 0,8% pour la population adulte mondiale (20). Cependant, la distribution géographique des cas n’est pas homogène : près de 70%

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des individus infectés se trouvent en Afrique subsaharienne, alors que seulement 13% de la population mondiale habite dans cette région du monde (19, 21).

La prévalence la plus élevée se retrouve donc ainsi en Afrique subsaharienne (4,7%), ainsi que le plus grand nombre de personnes vivant avec le VIH, de nouvelles infections et de décès reliés au VIH. Avec une prévalence de 1,0%, les Caraïbes sont la deuxième région avec la prévalence la plus élevée. Toutes les autres régions présentent une prévalence moindre que la moyenne mondiale, avec la prévalence la plus faible observée au Moyen-Orient / Afrique du Nord à 0,1%. On retrouve une situation particulière en Asie du sud /sud-est: malgré une prévalence relativement faible (0,3%), cette région se classe au deuxième rang pour le nombre absolu de personnes vivant avec le VIH, de nouvelles infections et de décès reliés au VIH car elle abrite 33% de la population mondiale (21).

Figure 1 – Nombre estimé d'adultes et d'enfants infectés par le VIH par région géographique, en 2014.

Adaptation de UNAIDS (2015). Core Epidemiology Slides – July 2015 (22).

Les épidémies de VIH dans les pays développés, où vivent environ 7% des individus infectés par le VIH, présentent des caractéristiques communes qui sont très différentes de l'épidémie globale et de celles dans les pays en voie de développement

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(23). Notamment, le mode d'infection le plus courant est les relations sexuelles entre hommes, ce qui résulte en un ratio homme/femmes plus élevé que deux dans tous les pays industrialisés (23). Les programmes de dépistage ne sont pas toujours adéquats, même dans les pays les plus riches: en moyenne 29% des diagnostiques y sont considérés comme tardifs (23).

2.1.2 GÉNÉRALITÉS SUR LE VHC

Le virus de l'hépatite C est un virus à ARN monocaténaire linéaire enveloppé de la famille Flaviviridae. Sept génotypes du virus ont été identifiés et leur distribution varie beaucoup à l'échelle mondiale (24). Au Canada, c'est la souche un qui est la plus présente. Dans la phase aiguë de l'infection au VHC, la plupart des personnes infectées ne présentent pas de symptômes. De plus, pour ceux présentant des symptômes, ils sont pour la plupart non-spécifiques à l'hépatite C (25). De 15% à 50% des individus infectés vont éliminer l'infection en phase aiguë. Ceux qui n'éliminent pas l'infection progressent en phase chronique d'infection, qui est elle aussi asymptomatique. De 20 à 25% des individus infectés en phase chronique ne savent pas qu’ils le sont, principalement parce que les manifestations clinique sont souvent absentes tant en phase aiguë qu'en phase chronique (26). L'infection chronique provoque des cirrhoses du foie, des cancers du foie et des hépatopathies décompensées (25). Ultimement, une transplantation hépatique peut être nécessaire (25).

Aucun vaccin n'est disponible pour prévenir l'infection au VHC, mais des traitements sont cependant disponibles pour traiter l'infection (27). Ces traitements permettent d'éliminer l'infection et de prévenir les dommages chroniques. Cependant, tout comme pour l'élimination spontanée en phase chronique, les anticorps anti-VHC seront toujours présents dans le sang d'une personne après un traitement (28). Un résultat positif à un test de dépistage d'anti-VHC indique donc une infection passée ou présente, c'est pourquoi un test de détection d'ARN viral est nécessaire pour identifier les infections présentes (28).

Dans une méta-analyse menée par Gower et al. (2014), on estimait qu’environ 2% de la population mondiale teste positif pour les anticorps contre le VHC, ce qui représente entre 87 et 124 millions d’individus (29). Comme pour le VIH, la distribution géographique des infections n’est pas homogène : plus de la moitié des cas se retrouvent dans les six pays les plus fortement touchés (Chine, Pakistan, Nigeria, Égypte, Inde et Russie)(29). De 55% à 85% des personnes infectées vont développer une infection chronique, et parmi

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celles-ci, 15% à 30% développeront une cirrhose (30). Entre 300 000 et 500 000 personnes meurent chaque année de complications du VHC (30). La figure 2 présente la prévalence du VHC selon les régions géographiques.

Figure 2 - Prévalence estimée et rapportée de l'infection au VHC chez les adultes par pays en 2014.1

Source : Gower et al. (2014) (29).

2.2 SITUATION CANADIENNE 2.2.1 LE VIH AU CANADA

On estime qu’il y a environ 71 300 individus infectés par le VIH au Canada, soit une prévalence de 0,208% (31). Le nombre de nouvelles infections est plus faible que par le passé, les 2 237 cas rapportés en 2011 étant beaucoup moins que les estimations de plus de 4000 nouveaux cas par année dans les années 80 (31, 32). Cependant, une grande proportion des infections acquises pendant une année donnée ne seront pas diagnostiquées et donc rapportées cette même année. Cette sous-estimation des cas incidents par la surveillance peut être corrigée par la modélisation, ce qui porte le nombre de nouveaux cas annuel à environ 3 175 cas pour 2011 (31). La distribution des infections dans la population n’est pas homogène, notamment chez les hommes (77% des cas), les

1 Cette figure fut publiée dans le Journal of hepatology, 61(1 Suppl), Gower E, Estes C, Blach S

Razavi-Shearer K, Razavi H, S45-57, Copyright Elsevier (2014). Permission de reproduction de la figure dans ce mémoire accordé par Elsevier le 7 août 2015.

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personnes originaires de pays où le VIH est endémique (14,9% des cas) et les autochtones (8,9% des cas) qui sont surreprésentés (31). La répartition des nouveaux cas d’infection varie grandement entre les différents territoires et provinces. Les provinces de l’Atlantique et les territoires présentent des taux d’incidence plus faibles que les autres provinces (32). La Saskatchewan présente un taux d’incidence près de trois fois plus élevé que n’importe quelle autre région du Canada (32). Cependant, la Saskatchewan se retrouve au 4e rang du nombre de nouvelles infections, la plupart des nouveaux cas provenant de l’Ontario et du Québec (environ 40% et 22% respectivement).

Presque la moitié des nouveaux cas (48%) sont des hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes (31). Les relations sexuelles hétérosexuelles sont la deuxième catégorie d’exposition en importance, avec 32,5% des nouvelles infections attribuées (31). Finalement, près d’un cas sur cinq est un utilisateur de drogues injectables (UDI) (31). Cependant, des différences sont observables dans certains groupes. Ainsi, les femmes sont proportionnellement plus nombreuses à être dans la catégorie utilisation de Figure 3 – Taux (par 100 00 habitants) de rapports de tests positifs pour le VIH par province/territoire, 2012.

Adapté de ASPC. Le VIH et le sida au Canada : Rapport de surveillance en date du 31 décembre 2012 (31).

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drogues injectables (32). Le profil des catégories d’exposition change selon les régions géographiques (32).

2.2.2 LE VHC AU CANADA

Environ 0,8% de la population canadienne est aux prises avec une infection au VHC, soit environ 242 521 canadiens (4, 26). La majorité des cas déclarés sont des hommes, le plus souvent âgés de 40 à 59 ans (26, 33). Pour les femmes, le groupe d’âge le plus à risque est de 25-29 ans (26). Le système canadien de surveillance du VHC ne

Figure 4 - Proportion des tests positifs pour le VIH déclarés dans la population canadienne adulte, selon le sexe et la catégorie d'exposition (HÉT-ARS: hétérosexuel aucun risque signalé, HÉT-risque: hétérosexuel avec personne à risque, HÉT-endémique: hétérosexuel provenant d'une région endémique, UDI: utilisateurs de drogue injectable et HRSH: hommes ayant des relations sexuelles avec d'autres hommes).

Adapté de ASPC. Le VIH et le sida au Canada: Rapport de surveillance en date du 31 décembre 2012 (31).

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permet pas d'attribuer une catégorie d'exposition aux nouvelles infections, mais les résultats de différentes études épidémiologiques permettent d'identifier des populations clés (26). La prévalence des infections au VHC est beaucoup plus élevée dans certains groupes à risque que dans la population générale canadienne, notamment les autochtones (3%), les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes (5%), les détenus fédéraux (28%) et les UDIs (69%) (26). D'autres facteurs de risque associés au VHC sont identifiés pour les individus vivant au Canada: la transfusion de produits contaminés, la transmission liée aux soins de santé et le tatouage/perçage corporel (26). De plus, près d'une nouvelle infection sur dix serait attribuable à des pratiques non-sécuritaires de sniffage de drogue (26). Les communautés autochtones sont aussi plus touchées que la population générale du Canada, en raison de la prévalence élevée chez les UDIs autochtones combinée à l'importante proportion d'UDIs dans la communauté (33-35). En effet, les autochtones ne représentent que 1,8% de la population québécoise, mais représentent 13,1% des UDIs recrutés par le réseau SurvUDI-I-Track (34, 35). D’importantes différences géographiques sont observables dans la distribution des cas de VHC : avec un taux de nouveaux cas rapportés de 107 par 100 000 habitants, le Yukon présente un taux près de sept fois plus élevé que celui du Nunavut (26). En général, on retrouve des taux de nouvelles infections plus élevés dans l’ouest canadien, alors que l’est du pays est plus épargné (26). Le Québec est la province avec le plus faible taux de nouvelles infections, soit 22,2 par 100 000 habitants (26).

Les infections au VHC au Canada ont des conséquences au niveau de la santé publique. En 2008, il est estimé qu’environ 33 000 personnes avaient une cirrhose du foie et que 750 personnes nécessitaient une transplantation suite à une infection chronique (4). De plus, il est estimé qu'en 2008, environ 1400 personnes sont décédées des suites de leur infection à l'hépatite C (4).

2.4 SITUATION EN PRISON

La prévalence élevée des infections au VIH et VHC chez les personnes incarcérées est reconnue et étudiée depuis des décennies. Cependant, les résultats diffèrent beaucoup tant au niveau de la prévalence et de l’incidence qu’au niveau des facteurs de risque. Cette hétérogénéité peut notamment s’expliquer par deux facteurs : le fardeau de ces maladies varie grandement entre les différentes régions et la composition de la population carcérale peut varier grandement selon la législation en place (36, 37). De

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plus, les différentes études présentent souvent un portrait incomplet des comportements à risque des détenus; il est donc difficile d’avoir un représentation juste de la situation (38).

Le système carcéral canadien est divisé entre le réseau de pénitenciers fédéraux et les établissements de détention provinciaux. Selon l'article 743.1 du Code criminel, une personne devant purger une peine dont la durée totale est inférieure ou égale à deux ans moins un jour sera incarcérée dans un établissement de détention provincial. Toutes les peines d'incarcération de deux ans et plus sont purgées dans des pénitenciers fédéraux. À noter que le réseau provincial québécois est aussi responsable des individus en détention préventive en attente de leur procès ou pendant celui-ci (prévenus) (39). Ainsi, les prisons provinciales canadiennes ont un débit de prisonniers plus important et une population plus changeante que les pénitenciers fédéraux.

2.4.1 SITUATION DU VIH EN PRISON

Il y a d'importantes variations géographiques dans la prévalence/incidence du VIH en prison. En 2007, une revue de la littérature publiée et grise a identifié 20 pays à faible et moyen revenu rapportant des prévalences du VIH de plus de 10% dans leurs populations carcérales (40). L'Asie du Sud et l'Amérique latine sont les régions où les populations carcérales sont les plus touchées (40). Les femmes et les utilisateurs de drogues injectables sont souvent identifiés comme des groupes particulièrement à risque. Il n'est cependant pas possible de déceler des tendances générales dans les pays à faible et moyen revenus, particulièrement parce que la qualité et la représentativité des données disponibles sont questionnables (40).

Les différentes études sur la prévalence du VIH en prison dans les pays industrialisés rapportent des résultats très variables. Cependant, la plupart des études rapportent que la prévalence chez les prisonniers est plus élevée que pour la population générale, dépassant même les 5% (1, 2, 41-46). Pour les hommes incarcérés, on rapporte des prévalences entre 0% et 16,1%, tandis que pour les femmes incarcérées les prévalences oscillent entre 1% et 25% (2, 6, 11, 47-50). Dans les études présentant simultanément les prévalences pour les deux sexes, les femmes sont souvent plus touchées que les hommes (2, 3, 6, 11, 43-46, 51). Les prévalences observées par les études dans les pays industrialisés semblent diminuer avec le temps, les études rapportant les prévalences extrêmement élevées datant des années 90. Cette même tendance à la baisse a été observée dans les prisons fédérales américaines entre 2001 et 2010 (52).

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La prévalence dans les populations carcérales canadiennes est relativement homogène pour les hommes. Dans les centres de détention fédéraux, la prévalence était de 2% chez les hommes en 2000 et 2004 (6, 49). Des résultats similaires ont été observés dans les centres de détention de différentes provinces canadiennes : des prévalences entre 1,9% et 2,4% ont été observées chez les hommes dans différentes études réalisées entre 1994 et 2007 (3, 11, 47, 50, 53). Les femmes incarcérées dans les prisons canadiennes sont généralement plus touchées que les hommes, avec une plus grande variabilité dans les résultats : les prévalences oscillent entre 1% et 8,8% selon différentes études dans les établissements provinciaux réalisées entre 1994 et 2007 (3, 11, 47, 50, 53). Finalement, la prévalence du VIH chez les détenus provinciaux du Québec était estimée à 2,4% pour les hommes et 8,8% pour les femmes en 2003 (3).

2.4.2 SITUATION DU VHC EN PRISON

Les variations géographiques qu'on observe pour la prévalence du VHC dans la population générale s'observent aussi dans la population carcérale. Une méta-analyse de 2013 identifiait l'Asie du centre/Sud, l'Europe de l'Ouest et l'Amérique du Nord comme les régions où les prisonniers étaient le plus touchés par le VHC (54). Plusieurs études sur les populations incarcérées des pays industrialisés rapportent des prévalences très élevées du VHC, et comme pour le VIH les femmes incarcérées sont généralement plus touchées que les hommes (3, 6, 37, 46, 47, 55). Les prévalences varient entre 15,9% et 33% pour les hommes et entre 29,2 % et 34% pour les femmes (3, 47). En 2003, les prisonniers provinciaux québécois se trouvaient au bas de ce spectre, avec une prévalence du VHC de 16,6% chez les hommes et de 29,2% chez les femmes (3).

2.4.3 INTERVENTION / TRAITEMENT EN PRISON

Les prisons sont des milieux de prédilection pour intervenir et traiter des populations à risque (9, 56). En effet, il est estimé qu’entre 20 et 26% des personnes vivant avec le VIH au États-Unis seront incarcérées au courant d’une année donnée (57). Cette proportion est encore plus élevée pour le VHC, allant de 29 à 43% (58). Il est aussi reconnu depuis longtemps que ces groupes à risque bénéficieraient davantage d’interventions de réduction des méfaits que la population générale (59). Les UDIs sont encore plus démunis que les autres prisonniers: ils sont moins nombreux à avoir un médecin, à recevoir des antirétroviraux (si infectés par le VIH) et à avoir une bonne adhérence à leur traitement (60). Il est primordial d’agir pendant l’incarcération, car les

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détenus peuvent avoir des difficultés d'accès à un traitement dans la communauté vu leur statut marginalisé (61). Cependant, les traitements et les interventions en milieu carcéral comportent plusieurs difficultés, notamment au niveau de la confidentialité et de la confiance entre les détenus et le personnel des prisons (62). Des problèmes au niveau organisationnel sont aussi présents : dans une étude exploratoire, Edwards et al. (63) ont démontré que 25% des rendez-vous à l’hôpital manqués par des personnes infectées par le VIH incarcérées l’étaient parce que le prisonnier avait été transféré, 13% parce qu’il était impossible de trouver le prisonnier et 6% par manque de temps (63). L’intégration des mesures de prévention du suicide lors de l’admission en détention peut cependant servir comme exemple pour inspirer des interventions systématiques, efficaces et réalistes en lien avec le VIH et le VHC (56).

2.4.3.1 DÉPISTAGE

Vu la prévalence élevée d'infections au VIH et VHC chez les détenus, les programmes de dépistage sont de première importance dans les centres de détention. Cependant, certains problèmes logistiques peuvent entraver la mise en place de tels programmes, particulièrement dans les prisons avec un grand nombre d'admissions et de courtes durées de séjour (64). Malgré cela, les états américains du Rhode Island et de Washington ont mis en place d'ambitieux programmes de dépistage dans leurs centres de détention de courte durée (65, 66). Entre 2006 et 2010, l'état de Washington a changé à deux reprises sa politique de dépistage du VIH lors de l'évaluation médicale à l'admission, ce qui permet d'évaluer l'efficacité de ces différentes politiques. Seulement 5% des prisonniers sont dépistés lorsqu'ils doivent explicitement le demander, alors que 72% ont été dépistés avec une politique ''opt-in'' et 90% avec une politique ''opt-out''(66). Avec une politique 'opt-in', le dépistage est offert, mais le patient doit explicitement l'accepter. Inversement, avec une politique 'opt-out', le dépistage est offert comme un test de routine au patient et celui-ci doit demander explicitement à ne pas le recevoir. Même si les détenus avec des comportements à risque sont généralement plus nombreux à demander un test de dépistage, il a été observé que plus de la moitié ne le feront pas (67, 68). Dans cette même étude, un programme offert selon une évaluation des facteurs de risque aurait exclu 48% des nouveaux diagnostiques (66). La rapidité avec laquelle le dépistage est effectué influence aussi l'efficacité des programmes: dans l'état du Rhode Island - qui offre le dépistage dans les 24 heures de l'admission - il a été estimé que 43% des nouveaux cas diagnostiqués de VIH auraient été libérés avant d'être testés si le dépistage avait été

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effectué sept jours plus tard (65). Une étude prospective a aussi démontré qu'un plus grand nombre de détenus acceptaient un test de dépistage s'il était offert dans les 24 premières heures après l'admission qu'à sept jours (69, 70). En somme, plusieurs facteurs doivent être pris en compte pour l'implantation d'un programme de dépistage en détention et d'importantes ressources sont nécessaires pour en assurer l'efficacité. Par conséquent, une évaluation coût-efficacité d'une telle intervention est nécessaire pour tenir compte des prévalences et caractéristiques des populations générale et carcérale de la juridiction (64). Finalement, il est important de tenir compte des enjeux éthiques et des droits humains dans la mise en oeuvre de ces programmes. Notamment, certains experts critiquent la mise en place de programmes systématiques si la prise en charge des individus séropositifs n'est pas disponible (71). En effet, les directives de dépistage des Centers for Disease Control and Prevention mentionnent qu'un dépistage aura peu ou pas d'effet bénéfique pour le patient si la prise en charge n'est pas assurée (72).

2.4.3.2 TRAITEMENTS

Certains centres de détention qui ont mis en place des programmes de traitements ont obtenu des résultats encourageants. Farley et al. (61) ont notamment rapporté que près de 79% des détenus infectés au VHC ont complété un traitement. Pour le VIH, on rapporte des taux de traitement de 47% des prisonniers éligibles (63). Il est possible d'atteindre des taux de traitement presque parfaits, comme il a été démontré au Connecticut (plus de 99% prisonniers séropositifs ont reçu un prescription), mais l'atteinte d'une charge virale indétectable (but premier du traitement du VIH) demeure difficile malgré tout (73). Tout comme pour les programmes de dépistage, plusieurs modalités de l'accès aux traitements pour le VIH et le VHC en prison doivent être considérées pour maximiser la portée de ces programmes. Différents modes d'administration sont utilisés en milieu de détention, par exemple le prisonnier peut être lui-même responsable de la prise de son traitement (self-administered), ou encore une prise sous observation directe (directly observed therapy, DOT) (64). Il ne semble pas qu'un mode d'administration soit meilleur qu'un autre au niveau de l'adhérence, par contre une prise sous observation directe peut compromettre la confidentialité si une ''pill line'' est utilisée (les prisonniers attendent en ligne pour reçevoir leurs médicaments les uns après les autres) (64). Le coût de tels traitements a été estimé par Service correctionnel Canada : il coute 29 000$ annuellement pour traiter un détenu vivant avec le VIH (74). Pour le VHC, la dernière estimation de Service correctionnel Canada établissait le coût d'un traitement à 26 000$

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(74). Cependant, de nouveaux traitements pour le VHC sont disponibles au Canada depuis cette estimation. Ces nouveaux traitements à base de sofosbuvir sont plus courts (12 semaines), plus efficaces (surtout pour le VHC de type 1), mais aussi beaucoup plus chers que les anciens traitements (75). En effet, le prix d'un traitement de 12 semaines au sofosbuvir peut atteindre 67 000$ au Canada (75). Aucune étude sur le rapport coût-efficacité des nouveaux traitements n'est disponible au Canada, l'approbation de Santé Canada étant trop récente. Des études du Royaume-Uni, de l'Allemagne et d'Italie ont démontré que les traitements à base de sofosbuvir ont un bon rapport coût-efficacité (76-78). Une étude américaine confirme par ailleurs ces résultats dans la population carcérale (79).

2.4.4 TRANSITION POST-INCARCÉRATION ET RÉINCARCÉRATION

Plusieurs études ont démontré que les ex-prisonniers sont particulièrement vulnérables après leur libération (64). Une incarcération récente est associée avec le partage de matériel d’injection de drogue (80, 81). Il a aussi été démontré que les individus ayant été impliqués avec le système judiciaire ont plus de partenaires sexuels multiples concomitants (82). Le retour dans la communauté a aussi des impacts sur l'accès aux soins/services de santé. Par exemple, seulement 5,4% des ex-prisonniers texans ont renouvelé leur prescription d'antirétroviraux dans les dix jours suivant leur libération (83). L'effet d'interventions menées en prison peut aussi être affecté par le retour dans la communauté. Dans une étude longitudinale au Connecticut on a observé, par rapport aux niveaux lors de la libération, un taux de CD4 diminué et une charge virale augmentée lors d'une réincarcération (73). Des programmes de transition entre le milieu carcéral et la communauté sont donc essentiels (64). Ces programmes peuvent prendre différentes formes, mais il n'est pas possible d'identifier un modèle de référence pour l'instant vu l'état des connaissances dans ce domaine (84). Cependant, il a été démontré que les programmes plus élaborés n'apportaient pas nécessairement de meilleurs résultats (85). Les principaux éléments d'importance dans de tels programmes sont: faciliter le lien avec les services dans la communauté, assurer la continuité du traitement, traiter les problèmes de consommation, maintenir la prise en charge des problèmes de santé mentale et réduire les comportements à risque (prévention secondaire) (86).

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15 2.5 MODES DE TRANSMISSION

Plusieurs facteurs de risque pour les infections au VIH et au VHC ont été identifiés dans la littérature, avec d'importantes différences selon la population étudiée. Nous nous concentrerons ici sur les facteurs de risque identifiés chez les individus incarcérés.

2.5.1 UTILISATION DE DROGUES INJECTABLES

L’utilisation de drogues injectables a été identifiée comme un facteur de risque important pour la transmission du VIH et VHC. Au Canada, environ 14% des nouvelles infections au VIH sont liées à l’utilisation de drogues injectables, alors que c’est 83% pour le VHC (26, 31). Pour la population carcérale, la majorité des individus infectés par le VIH et le VHC se sont déjà injecté de la drogue (que ce soit à l'intérieur ou à l'extérieur de la prison), ce qui se traduit par une prévalence très faible chez les prisonniers non-UDIs (3). Une plus grande proportion de femmes contractent le VIH par l’utilisation de drogues injectables, car une importante proportion d'hommes contractent le VIH par relations sexuelles avec d'autres hommes (31).

Les études présentant les prévalences selon l'utilisation de drogues injectables constatent souvent que les prisonniers UDIs sont plus à risque d'être infectés par le VIH que les non-UDIs (3, 37, 47, 53). La même situation est présente pour les infections au VHC (3, 37, 47, 55). Il a été démontré qu’entre 19% et 30% des détenus ont été UDIs à l’extérieur de la prison (1, 11, 42, 43, 48, 87). La proportion d’UDIs est encore plus élevée chez les individus qui n’en sont pas à leur première incarcération et chez les femmes incarcérées (11, 87). De plus, entre 44 et 92% des individus s'injectant des drogues en prison partagent du matériel d’injection dans ce contexte (42, 43, 88). Le partage du matériel d’injection est le principal facteur de risque associé avec les infections au VIH, au VHC et aux coinfections VIH-VHC-hépatite B (VHB) (1, 2, 11, 42, 50, 54).

Bien que moins sécuritaire que l’utilisation de seringues neuves, le nettoyage des seringues demeure un moyen employé par les UDIs pour se protéger lors du partage de seringues. Le nettoyage des seringues est d’un intérêt particulier dans le contexte carcéral où l’accès à des seringues neuves est inexistant (sauf dans certains pays européens). Plusieurs éléments sont à considérer pour qu’un nettoyage soit le plus efficace possible et ainsi diminuer au maximum le risque de transmission du VIH et du VHC. Premièrement, une solution aqueuse d’eau de Javel 1 :10 semble être l’agent le plus efficace pour le nettoyage des seringues (89). D’autres types de produits de nettoyage ménager, de l’alcool à friction ou encore de l’eau ne sont pas aussi efficaces (89). Cependant, l’eau de

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Javel est un produit instable qui se dégrade rapidement, c’est pourquoi des précautions particulières doivent être prises lors de l’entreposage pour assurer l’efficacité du produit (89). Aussi, il est préférable d’effectuer un deuxième rinçage plutôt que d’augmenter le volume de rinçage (89). Finalement, le type de seringues utilisé doit être pris en compte : les seringues avec un embout détachable sont plus difficiles à nettoyer que les autres seringues (90). Les bouteilles d’eau et les filtres utilisés pour l’injection de drogues peuvent eux aussi être contaminés et doivent donc être traités comme tel (91). Le VHC survit plus longtemps que le VIH dans les seringues, ce qui pourrait expliquer en partie pourquoi la prévalence du VHC est beaucoup plus élevée que celle du VIH dans la population UDI et par conséquent dans la population carcérale (90).

Plusieurs prisonniers du système provincial québécois font usage de drogues injectables, tant à l’extérieur qu’à l’intérieur de prison. En 2003, 27% des hommes et 43% des femmes ont rapporté s’être déjà injecté de la drogue à l’extérieur de prison, un peu plus de la moitié ayant déjà partagé leur matériel d’injection (3). L’utilisation de drogues injectables est certes moins fréquente à l’intérieur de prison, mais 4,4% des hommes et 0,8% des femmes rapportaient tout de même s’être déjà injecté et encore une fois un peu plus de la moitié en partageant le matériel d’injection (3).

2.5.2 RELATIONS SEXUELLES

La majorité des relations sexuelles qu’un prisonnier aura au cours de sa vie auront vraisemblablement lieu à l’extérieur de prison. Cependant, il a été démontré que l’expérience de l’incarcération module les comportements à risque de nature sexuelle à l’extérieur de prison pour les hommes (82, 92). Notamment, Khan et al. mentionnent que les incarcérations répétées peuvent mener à un fragilisation des relations interpersonnelles, ce qui peut résulter en un plus grand nombre de partenaires sexuels (92). Plusieurs études ont démontré que les comportements sexuels à risque continuent après l’incarcération, particulièrement pour les femmes (93). En somme, même si un individu incarcéré n’a pas de relations sexuelles en détention, son passage en prison peut néanmoins augmenter son risque lié aux comportements sexuels.

Les agressions sexuelles ou les relations coercitives en prison sont généralement étudiées uniquement chez les hommes, étant donné qu’ils représentent la majorité des individus incarcérés et que la transmission du VIH est plus fréquente pour les relations sexuelles entre hommes qu’entre femmes. Il semble que les agressions sexuelles soient plus le résultat de jeux de pouvoirs/domination entre les prisonniers plutôt que motivées

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par le plaisir sexuel (94). Une étude de modélisation mathématique du risque d’acquisition du VIH par le viol en prison conclut que le risque de transmission suite à une agression est très faible (95). Cependant, ce risque augmente rapidement et peut dépasser les 1% si le nombre d’agresseurs et la fréquence des agressions augmentent (95). Une récente étude australienne confirme que ce type de dynamique se retrouve effectivement en prison, soit qu’un petit nombre d’hommes répondent aux besoins sexuels de plusieurs autres hommes (96). Cette dernière étude semble démontrer que le risque d’être agressé est plus grand au début de l’incarcération : l’incidence pour la première année d’incarcération est de une agression par 16,5 personnes-années, tandis qu’elle est de une par 61 personnes-années pour toute l’incarcération (96).

La disponibilité des condoms dans les établissements de détention varie grandement selon les juridictions et différentes méthodes de distribution sont utilisées. Le mode de distribution semble avoir un effet important sur l’efficacité de ces programmes : l’installation d’une machine distributrice libre-service dans une prison de San Francisco a permis de faire connaître et augmenter l’utilisation du programme (97). Plusieurs études concluent que de telles interventions ont un bon rapport coût-efficacité, mais ces études sont souvent réalisées uniquement dans des unités spécialisées pour les hommes ayant des relations sexuelles avec d'autres hommes (HARSAH) (98, 99). Cependant, les études réalisées sur des populations carcérales complètes et mixtes montrent que ces programmes sont sécuritaires et diminuent les relations sexuelles non-protégées (100, 101). Bien entendu, les condoms distribués ne seront pas nécessairement utilisés lors d’une relation sexuelle (102). En effet, il est rapporté que les prisonniers utilisent les condoms comme bandes élastiques, ballons et autres, mais rarement à des fins illicites ou mal intentionnées (102). Le principal problème mentionné par le personnel d’une prison de Los Angeles est que les prisonniers ne disposent pas des condoms utilisés de façon appropriée (102).

2.5.3 TATOUAGE ET PIERCING

Les tatouages/piercings sont un mode de transmission biologiquement plausible pour le VIH et le VHC. Le risque de transmission lors d’une exposition percutanée à du sang infecté est relativement faible : environ 0,3% pour le VIH et de 1,8% pour le VHC (103, 104). Comme le processus de tatouage implique plusieurs perforations de la peau, le risque associé est plus élevé que pour le perçage (105). Au Canada, le risque de transmission du VIH/VHC dans la population carcérale est considéré comme élevé,

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principalement à cause des prévalence élevées dans cette population (106). Une étude portant sur les prisonniers australiens rapporte une association entre l'infection au VHC et avoir reçu un tatouage (communauté et/ou en prison) (37). Dans une étude irlandaise, les tatouages reçus en prison ont été identifiés comme seul facteur de risque pour une infection au VHC chez les non-UDIs (46). Une méta-analyse de 2012 sur le sujet a conclu que le risque de transmission du VHC par tatouage est significativement plus élevé lorsque le tatouage a lieu dans un milieu non-professionnel, particulièrement en prison (107). La plupart des études ne démontrent pas d'association entre les tatouages et l'infection au VIH, mais des cas de transmission sont documentés dans la littérature (37, 46, 108). Il est important de mentionner que plusieurs études rapportent que les prisonniers UDIs sont plus nombreux à avoir un tatouage que les prisonniers non-UDIs (46, 109).

Même s'ils s'adonnent à des pratiques à risque, les prisonniers cherchent à prendre des moyens pour diminuer ce risque: 74% des prisonniers québécois demanderaient à ce que le matériel de perçage/tatouage soit nettoyé avec de l'eau de Javel (110). Certaines interventions d'envergure ont eu lieu en milieu carcéral canadien pour tenter de diminuer les pratiques de tatouage non-sécuritaires, notamment l'Initiative sur les pratiques de tatouage sécuritaires de Service correctionnel Canada (SCC) (111). Ce programme fournissait des salles de tatouage et une intervention de nature éducative dans six prisons fédérales (111). Selon une évaluation préliminaire par SCC, le programme était efficace pour réduire les méfaits liés au tatouage en prison et informer les prisonniers sur les risques, alors que les bénéfices potentiels dépassaient grandement les coûts (111). Elliott (2007) a lui-aussi conclu que cette intervention avait un bon rapport coût-efficacité pour la prévention des infections au VIH et au VHC (74). Cependant, certains croient qu'investir dans un tel programme ne serait pas une bonne gestion optimale des ressources, plusieurs études ayant démontré que seulement une minorité des infections sont transmises par tatouage (112).

2.6 POPULATION CARCÉRALE PROVINCIALE QUÉBÉCOISE

Cette section décrit la population à l’étude, soit la population carcérale provinciale du Québec. Pour l’année 2012-2013, en moyenne 5031 individus étaient incarcérés à chaque jour dans les centres de détention provinciaux québécois, ce qui représente une augmentation de 34% par rapport à 2003-2004 (113, 114). La description de la population à l’étude servira deux objectifs distincts : évaluer si le profil de la population a changé

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depuis la dernière étude sur le VIH et le VHC dans les prisons québécoises en 2003-2004, ainsi que pour vérifier si notre échantillon est représentatif de la population carcérale québécoise en général. Les caractéristiques pénales permettent aussi de mieux définir la population, notamment pour comparer nos résultats avec ceux d’autres juridictions.

2.6.1 CARACTÉRISTIQUES SOCIODÉMOGRAPHIQUES

La population carcérale est composée à environ 91% d’hommes (12). Environ 99% des individus incarcérés sont citoyens canadiens et 3% sont issus des nations autochtones (12). La grande majorité des individus déclarent parler le français (82%), alors qu’environ 8% sont anglophones et autant sont bilingues (12). Seulement 1% de la population carcérale québécoise ne parle ni français ni anglais (12). La plupart des individus avaient entrepris ou complété leur secondaire, alors que c’est 6% chacun pour le primaire et le collégial. Seulement 4% ont entrepris ou complété une formation universitaire (12). La région de résidence des individus est montrée dans le tableau suivant :

Tableau 1 - Région de résidence de la population carcérale, Québec 2007-2008 1 Région administrative % Bas-Saint-Laurent 2,2 Saguanay-Lac-Saint-Jean 3,7 Capitale-Nationale 8,6 Mauricie 5,4 Estrie 4,8 Montréal 26,5 Outaouais 5,4 Abitibi-Témiscamingue 1,6 Côte-Nord 1,5 Nord-du-Québec 1,6 Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine 1,3 Chaudières-Appalaches 3,9 Laval 3,4 Lanaudière 5,9 Laurentides 7,4 Montérégie 15,1 Centre-du-Québec 1,7 Total 100,0 1 n total = 27 155 Adapté de Giroux, L. (2011) (12).

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20 2.6.2 CARACTÉRISTIQUES PÉNALES

La durée moyenne de séjour en détention est de 67,3 jours (12). En comparant ces chiffres, on comprend qu’il y a un nombre disproportionné de personnes dont le séjour est de très courte durée, alors que peu d’individus ont des séjours très longs :

Tableau 2 - Durée de séjour en établissement de détention chez les personnes condamnées à une peine continue dans le système provincial québécois en 2007-08. 1

Durée de séjour %

1 jour 10,5

2 jours à 10 jours 26,5

11 jours à 1 mois - 1 jour 15,2 1 mois à 2 mois - 1 jour 12,6 2 mois à 3 mois - 1 jour 9,5 3 mois à 4 mois - 1 jour 5,8 4 mois à 6 mois - 1 jour 8,6 6 mois à 1 an - 1 jour 9,0 1 an à 18 mois - 1 jour 2,2 18 mois à 2 ans - 1 jour 0,1

Total 100,0

1 n

total = 13 253

Adapté de Giroux, L. (2011) (12).

Lors de la dernière étude descriptive de la population carcérale, il a été observé que la durée des séjours semble augmenter de façon très importante avec les années : la durée moyenne de séjour a doublé entre 1999 et 2008, soit de 32,4 jours à 67,3 jours (12). Cependant, plus de 75% des individus sont incarcérés avec un statut de prévenu. Près de 24% des détenus seront transférés une fois ou plus durant leur incarcération (12).

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3. OBJECTIFS

L’étude proposée a pour objectif principal d’évaluer transversalement le portrait épidémiologique des infections au VIH et VHC chez les hommes et femmes incarcérées dans sept établissements provinciaux du Québec. Les objectifs spécifiques sont :

1. Mesurer la prévalence des infections au VIH et au VHC;

2. Identifier les facteurs de risque associés aux infections au VIH et au VHC, incluant les comportements sexuels et l’utilisation de drogues des sujets autant avant que pendant l’incarcération;

3. Comparer la prévalence du VIH et du VHC ainsi que la fréquence des facteurs de risque à celles observées il y a une décennie.

4. Décrire les antécédents de santé et le profil des cas d’infection au VIH et VHC non diagnostiqués.

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4. MÉTHODOLOGIE

4.1 DEVIS D’ÉTUDE

Il s’agit d’une étude descriptive transversale mesurant la prévalence du VIH, du VHC et des comportements à risque dans la population carcérale des sept établissements de détention provinciaux québécois. Pour évaluer les tendances au cours de la dernière décennie, les résultats de notre étude ont été comparés à ceux d'une étude auprès de la même population en 2003-2004 (3).

4.2 POPULATION À L’ÉTUDE

Tous les détenus adultes incarcérés dans un centre de détention sous responsabilité du ministère de la Sécurité publique du Québec constituent la population à l’étude. En 2012-2013, 42 720 personnes ont été admises dans le système québécois, pour une population moyenne présente à chaque jour de 5 031 individus (115). Il y a de plus en plus d’individus incarcérés dans les centres de détention québécois. Lors de la dernière étude en 2003-2004, il y avait en moyenne 3 757 individus incarcérés dans le système québécois, ce qui représente une augmentation de 34% depuis la dernière étude (12).

Chaque système pénal comporte certaines caractéristiques qui vont affecter la composition de la population incarcérée, notamment la législation en place et l’organisation des centres de détention. Il est donc primordial de bien définir la population étudiée afin de pouvoir comparer les résultats aux études dans d’autres centres, régions ou juridictions. L’article 743.1 du code criminel canadien prévoit que les individus condamnés à une peine d’incarcération de deux ans moins un jour ou moins seront incarcérés dans un centre de détention provincial (39).

4.3 ÉCHANTILLONAGE ET PUISSANCE STATISTIQUE 4.3.1 SÉLECTION DES SITES

Des 17 établissements de détention du réseau québécois, sept ont été inclus dans la présente étude. Ces sites hébergent environ 40% des individus incarcérés dans le réseau québécois (12). Les établissements ont été sélectionnés pour représenter au mieux la population carcérale. En effet, les centres pour hommes de Montréal et de Québec sont en milieu urbain, tandis que les centres de Saint-Jérôme, Chicoutimi et Baie-Comeau sont en milieu semi-urbain. Les deux centres pour femmes se trouvent en milieu urbain, soit Montréal (Maison Tanguay) et Québec. Les femmes provenant de toutes les

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régions du Québec y sont transférées. Les sites de Saint-Jérôme et de Chicoutimi devraient aussi inclure une population autochtone importante. Finalement, les sites sélectionnés pour la présente étude sont les mêmes que ceux de l’étude de Poulin et al. (3), ce qui devrait permettre une comparaison optimale de l’évolution de la situation.

4.3.2 SÉLECTION DES SUJETS

Tous les individus présents au centre de détention lors de la visite de l’équipe de recherche et répondant aux critères de sélection ont été invités à participer. Vu le nombre limité de détenues dans les centres de détention pour femmes, trois visites avec deux mois d’écart ont été effectuées dans ces centres pour obtenir un nombre acceptable de sujets féminins.

Critère d’inclusion

- Être inscrit dans le fichier informatique des admissions pour plus de 24 heures dans l’établissement.

Critère d’exclusion

- Représenter un risque pour le personnel de recherche (selon l’avis du gardien).

4.3.3 PUISSANCE STATISTIQUE

Les résultats de l’étude de Poulin et al. (3) ont été utilisés pour évaluer la puissance statistique de notre étude, car ce sont les derniers résultats disponibles pour notre population. La dernière étude ayant recruté 1 357 hommes et 250 femmes, nous proposons un nombre légèrement plus élevé pour la présente étude, soit 1500 hommes et 300 femmes (3).

Si 2,4% d’hommes sont positifs pour le VIH, la prévalence du VIH peut être mesurée à un niveau de confiance de 95% avec une précision de 0,8% (3, 116). Pour l’hépatite C, avec 16,6% des hommes infectés, la précision correspondante est de 1,9% (3, 116). Chez les femmes, avec une prévalence de 8,8%, on obtient une précision de 3,1% au niveau de confiance de 95% (3, 116). La précision associée à une prévalence du VHC de 29,2% est de 5,1% au niveau de 95% (3, 116).

Pour obtenir une puissance suffisante dans un modèle de régression avec variable indépendante dichotomique, il est généralement admis qu’il faut entre cinq et dix événements (infections au VIH/VHC) par variable incluse dans le modèle (117, 118).

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Selon les tailles d’échantillons et les prévalences décrites ci-dessus, on estime obtenir environ 299 infections au VHC pour l'ensemble des participants, dont 267 chez des participants UDIs, ce qui permet d’inclure jusqu’à 29 et 27 variables dans les modèles et obtenir une bonne puissance. Pour le VIH, on s’attend à trouver environ 54 cas pour l'ensemble des participants, dont 49 cas chez des participants UDIs. Ces petits nombres d’évènements permettent d’inclure respectivement de cinq à dix et de quatre à neuf variables dans les modèles, ce qui pourrait s’avérer problématique (118). La puissance pour détecter une association entre les principaux facteurs de risque et les infections au VIH et au VHC est élevée. En se basant sur les dernières données disponibles pour cette population, une puissance de plus de 99% est attendue pour détecter un rapport de prévalence de 10 entre l'utilisation de drogues injectables (principal facteur de risque identifié dans la littérature) et les infections au VIH et VHC (des RP de plus de 15 sont généralement obtenus). Pour des associations secondaires, comme les tatouages et le VHC, il sera possible de détecter un RP entre 1,5 et 2,5 avec une puissance de 90% et plus. Rappelons que Poulin et al. (3) ont pu mener leurs analyses sans problème avec une taille d’échantillon moindre.

4.4 PLANIFICATION OPÉRATIONNELLE

Chacun des sept établissements de détention inclus dans cette étude a été contacté dans les mois précédant la collecte de données pour organiser une rencontre avec les responsables du projet. Ces rencontres avaient entre autres pour but de planifier la venue de l’équipe de recherche (notamment pour minimiser les conflits d’horaire avec les activités des détenus), de rencontrer le gardien de prison assigné au projet et d’obtenir une liste d’intervenants. Le gardien de prison assigné au projet a accompagné l’équipe de recherche, qui était composée de la coordinatrice du projet, d’un étudiant à la maîtrise et d’intervenants. Il était en effet souhaitable que les interviewers engagés pour le projet de recherche soient des intervenants en milieu carcéral ou dans des domaines communautaires connexes, ces derniers étant habitués de travailler avec la population étudiée.

Lors des sessions de collecte de données, les interviewers étaient installés dans les salles de classes ou des bureaux dans un des différents secteurs de la prison (parfois plus d’un soir dans le même secteur). Le gardien était responsable du transport des prisonniers ainsi que de leur supervision pendant la collecte, cependant il demeurait à l’extérieur des locaux lors des interviews pour des raisons de confidentialité. Lorsque le

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prisonnier arrivait au local, un interviewer lui transmettait les informations pertinentes quant au projet de recherche, lui proposait de participer et obtenait son consentement verbal (voir l’annexe 1 pour le formulaire de consentement). Ensuite, le participant répondait au questionnaire auto-administré, avec un membre de l’équipe de recherche disponible pour répondre aux questions ou encore administrer le questionnaire si nécessaire. Une fois le questionnaire terminé, le prisonnier devait mettre le questionnaire lui-même dans une enveloppe scellée avant de le remettre à l’interviewer. Ensuite, ce dernier procédait au prélèvement de salive (deux échantillons en même temps, de chaque côté de la bouche, pour un temps total de deux à cinq minutes). Des informations sur les ressources/organismes pour le dépistage du VIH et VHC en prison et en milieu communautaire ont été remises au participant.

4.5 COLLECTE DE DONNÉES 4.5.1 QUESTIONNAIRE

Le questionnaire utilisé a été conçu spécialement pour cette étude par le même groupe qui a dirigé l’étude de Poulin et al. (3). Un pré-test du questionnaire a été effectué avec des détenus (trois hommes et quatre femmes) au centre de détention de Québec. Les trois sections du questionnaire comportent 67 questions pour les femmes et 72 questions pour les hommes, réparties sur une vingtaine de pages (annexe 2). Les différences entre la version pour hommes et femmes s’expliquent par les différences entre les comportements à risque entre les sexes. Il est important de noter que la plupart des questions des sections deux et trois comportent plusieurs questions secondaires associées.

Figure

Figure  1  –  Nombre  estimé  d'adultes  et  d'enfants  infectés  par  le  VIH  par  région  géographique, en 2014
Figure 2 - Prévalence estimée et rapportée de l'infection au VHC chez les adultes par pays  en 2014
Figure 4 - Proportion des tests positifs pour le VIH déclarés dans la population  canadienne adulte, selon le sexe et la catégorie d'exposition (HÉT-ARS:
Tableau  1  -  Région  de  résidence  de  la  population  carcérale,  Québec   2007-2008  1 Région administrative   %  Bas-Saint-Laurent  2,2  Saguanay-Lac-Saint-Jean  3,7  Capitale-Nationale  8,6  Mauricie  5,4  Estrie  4,8  Montréal  26,5  Outaouais  5,4
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