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Efficacité de la thérapie cognitive pour la dépression chez les femmes atteintes d'un cancer métastatique : étude exploratoire

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Academic year: 2021

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EFFICACITÉ DE LA THÉRAPIE COGNITIVE POUR LA DÉPRESSION CHEZ LES FEMMES ATTEINTES D'UN CANCER MÉTASTATIQUE: ÉTUDE EXPLORATOIRE

Mémoire Présenté

à la Faculté des études supérieures de l'Université Laval pour l'obtention du grade de maître en psychologie (M.Ps.)

École de psychologie

FACULTÉ DES SCIENCES SOCIALES. UNIVERSITÉ LAVAL

Mars 2001

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Certaines études indiquent que la dépression est un problème fréquent chez les patients atteints d'un cancer métastatique. L'efficacité de la thérapie cognitive est bien démontrée pour traiter la dépression dans la population générale mais n'a jamais été vérifiée dans le contexte du cancer métastatique. Le but de cette étude est d'évaluer l'efficacité de la thérapie cognitive pour la dépression chez quatre femmes atteintes d'un cancer métastatique à l'aide d'un protocole à cas unique expérimental A-B à niveaux de base multiples. Durant, le niveau de base (A) et le traitement (B), les participantes complètent l’ÉHAD-D et l’IDB hebdomadairement, ainsi qu'une grille d'auto:enregistrement de l'humeur à tous les jours. Les données d'auto-enregistrement et celles obtenues aux deux questionnaires de dépression révèlent que la thérapie cognitive est associée à une amélioration statistiquement et cliniquement significative de l'humeur chez chacune des participantes et que les gains se maintiennent dans le temps jusqu'à 3 mois après la fin du traitement. Myiène Lévesque Candidate Janel Gauthier, Ph.D. Directeur de recherche Josée Bavard, Ph.D. Co-directrice de recherche

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Avant-propos

La réalisation d'une maîtrise fut une étape dans ma vie des plus enrichissantes autant au niveau de ma vie professionnelle que personnelle. L’accomplissement d'un tel projet ne se fait toutefois pas seul. Je profite donc de l'occasion pour remercier tous ceux qui de près ou de loin ont contribué à l'atteinte des mes objectifs.

Tout d'abord, je tiens à remercier mon directeur de recherche, Dr Janel Gauthier, pour avoir eu confiance en moi et avoir accepté que j'entreprenne ce périlleux projet. Vous avez été le premier à m'initier aux balbutiements de la science en psychologie en m'ouvrant la porte de votre laboratoire. Un gros merci à ma co-directrice, Josée Savard, pour m'avoir proposé un projet aussi exaltant. Je te suis extrêmement reconnaissante pour ta disponibilité

exceptionnelle. Tuas manifesté une grande générosité autant au niveau de ton temps que dans ton enseignement. Je me considère privilégiée d'avoir évoluée dans un milieu aussi formateur et stimulant. Je tiens également à remercier tout particulièrement les participantes de mon mémoire, sans qui cette aventure n'aurait jamais pu prendre forme. Vous avez été une source d'inspiration pour moi. Je pense à vous très fort.

Plusieurs autres personnes ont contribué concrètement à l'élaboration de ma recherche. Merci à Annie Tremblay qui, malgré un horaire chargé, a réussi à trouver des petits trous pour évaluer les participantes. Merci à Hans !vers qui a fait preuve d'une patience inouïe envers mon incompétence en statistique et qui chaque fois que j'étais confuse face à mes projets d'avenir réussissait à me mettre en tête des projets tous plus emballants les uns que les autres. Merci à Sébastien Simard qui m'a donné ma première chance comme assistante de recherche et qui s'est toujours montré réceptif envers mes besoins de m'affirmer. Cette belle aventure m'a également permis de découvrir une amie en Catherine Quesnel. Tu t'es toujours montrée très généreuse et je n'oublierai jamais toutes nos discussions enrichissantes à propos de tout et de rien.

Je ne peux pas passer sous silence le support de Jean-François qui a toujours été là pour m'écouter lorsque je me décourageais. Malgré ta formation d'ingénieur, tu as fait preuve de beaucoup de psychologie en trouvant souvent les mots justes pour me rassurer et

m'encourager. Un merci des plus sincères pour tous ceux qui ont été là lors des moments plus difficiles et lors de mon séjour parmi les sans abri. Vous ne saurez jamais à quel point je suis

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touchée par toute cette générosité.

Mes 5 années universitaires m'ont permis de développer des amitiés riches, avec qui j'ai pu développer une complicité peu commune. Caro, je te suis reconnaissante de m'avoir ouvert ton cœur assez grand pour me permettre d'être ton amie. Merci aussi pour avoir tout de suite aimé l’authentique Mylène et pour m'avoir donné confiance en ce je ce que je ressens. Merci à ma petite Mé qui a manifesté une générosité sans borne à tous les niveaux et qui s'est montrée toujours là pour me réconforter et me dire des petits mots doux lorsque j'en avais besoin. Les nombreux moments inoubliables que j'ai partagés avec vous deux resteront toujours gravés. Nos discussions existentielles ont toujours été bénéfiques pour moi.

Un gros merci maintenant pour les gens qui sont à mes côtés depuis toujours. Merci à mon petit frère que j'adore plus que tout. Merci pour tes 15 minutes de solidarité qui semblaient peut-être futiles pour toi mais qui réussissaient chaque fois à réchauffer mon cœur. Ta curiosité intellectuelle fut un stimulant pour moi. Le petit frère est une source d'inspiration pour la grande sœur.

Et finalement, un merci des plus chaleureux pour mes parents adorés. Vous avez toujours cru en moi et avez eu assez confiance en moi pour me supporter dans tous mes choix, sans exception. Merci également pour m'avoir dit que vous m'aimiez chaque fois que j'avais besoin de l'entendre. Merci à toi maman, qui s'est toujours montrée ouverte, compréhensive et chaleureuse même durant mes remises en question constantes. Ta vivacité et ta joie de vivre sont un modèle pour moi. Merci à toi papa pour m'avoir fait connaître ta sensibilité et pour m'avoir permis de partager de beaux moments de complicité. Je vous aime!

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TABLE DES MATIÈRES

Page

RÉSUMÉ ... i

AVANT-PROPOS ... ii

TABLE DES MATIÈRES ... iv

INTRODUCTION GÉNÉRALE ... 1

Cancer ... 1

Cancer chez la femme ... 1

Traitement du cancer du sein ... 1

Impact psychologique du cancer ... 2

Prévalence de la dépression et cancer métastatique ... 3

Facteurs de risque de la dépression dans le contexte de la maladie physique et du cancer ... 4

Évaluation de la dépression dans le contexte de la maladie physique et du cancer ... 5

Conséquences de la dépression ... 6

Traitement de la dépression et cancer ... 7

CHAPITRE 1 ... 10 Résumé ... 11 Introduction ... 12 Méthodologie ... 16 Participantes ... 16 Devis expérimental ... 18 Procédure ... 18 Pré-traitement ... 18 Traitement ... 19 Post-traitement ... 20 Suivi ... 20

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Mesures ... 20

Entrevue clinique structurée pour le DSM-IV ... 20

Échelles d'idéations suicidaires ... 21

Entrevue structurée pour l'Échelle de dépression de Hamilton .. 21

Inventaire de dépression de Beck ... 21

Échelle hospitalière d'anxiété et de dépression ... 22

Grille d'auto-enregistrement de l'humeur ... 22

Questionnaire de qualité de vie de l'EORTC ... 23

Analyses des données ... 23

Analyses de séries chronologiques ... 23

Analyse visuelle ... 24

Signification clinique ... 24

Résultats ... 25

Analyses de séries chronologiques ... 25

Analyse visuelle ... 26 Signification clinique ... 27 Discussion ... 27 Références ... 32 Tableau 1 ... 39 Tableau 2 ... 40 Figure 1 ... 41 Figure 2 ... 42 Figure 3 ... 43 Tableau 3 ... 44 CONCLUSION GÉNÉRALE ... 45 BIBLIOGRAPHIE ... 47

Annexe A : Formulaire de consentement ... 54

Annexe B : Échelle hospitalière d’anxiété et de dépression ... 60

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Échelle d’idéations suicidaires ... 67

Entrevue structurée pour l’Échelle de dépression de Hamilton ... 72

Grille d’auto-enregistrement de l’humeur ... 82

Questionnaire de qualité de vie de l'EORTC ... 85

Questionnaire d’informations démographiques ... 89

Questionnaire des attentes thérapeutiques ... 92

Questionnaire d’évaluation de traitement ... 94

Résultats aux analyses de séries chronologiques ... 96 Annexe D: Annexe E : Annexe F : Annexe G : Annexe H : Annexe I : Annexe J : Annexe K :

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INTRODUCTION GÉNÉRALE Cancer

Le cancer est une maladie qui se caractérise par une croissance et une multiplication anarchique de cellules anormales dans un organe ou un tissu du corps humain. Tout au long de la vie, les cellules normales de l’organisme se divisent, mais de manière ordonnée et contrôlée. Lorsque les cellules se développent de manière incontrôlée au point de former une masse, celle-ci est appelée tumeur. Certaines tumeurs grossissent uniquement à l'endroit où elles se sont formées. D'autres tumeurs, peuvent envahir et détruire les tissus sains avoisinants, et même se propager à d'autres parties du corps. Ces tumeurs sont alors dites malignes ou cancéreuses. La propagation du cancer se produit lorsque des cellules malignes se détachent de la tumeur originale et sont amenées par les vaisseaux sanguins ou lymphatiques vers d'autres parties du corps pour former des métastases.

Cancer chez la femme

Malgré des progrès médicaux remarquables, le cancer fait encore de nombreuses victimes. Chez la femme, le cancer du sein est le cancer le plus fréquent et il est le deuxième cancer le plus meurtrier, après le cancer du poumon. L’incidence du cancer du sein a continué d’augmenter dans les 10 dernières années, touchant 19,200 nouvelles femmes au Canada en 2000. De plus, il est estimé que 5,500 femmes sont décédées du cancer du sein cette même année. Pour ce qui est du cancer de l’ovaire, 2,500 nouveaux cas ont été diagnostiqués en 2000, alors que 1,500 femmes sont décédées de ce cancer (Institut national du cancer du Canada, 2000). La majorité des décès dus au cancer sont attribuables au développement des métastases à distance. Les métastases reliées au cancer du sein se développent surtout dans les poumons, le foie, les os et le cerveau (Canellos, 1987). Le cancer métastatique constitue toujours une maladie incurable. La médiane de survie à partir du diagnostic initial de

métastases est de 2 à 3.5 ans, avec 25 à 35% des patients survivant plus de 5 ans et 10% survivant plus de 10 ans (Tripathy & Henderson, 1994).

Traitement du cancer du sein

Il existe de nombreux moyens efficaces pour traiter le cancer du sein soit, la chirurgie, la radiothérapie, la chimiothérapie et l'hormonothérapie. Un seul traitement ou la combinaison de

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plusieurs traitements peuvent être utilisés. La chirurgie demeure la méthode d'intervention la plus fréquente et la plus efficace quand le cancer du sein est localisé. Le plus souvent, on procédera à une tumorectomie (Le., ablation de la tumeur) qui est souvent accompagnée de l’excision de ganglions axillaires pour établir le stade du cancer et à de la radiothérapie. Le but de la radiothérapie est de détruire les cellules cancéreuses qui auraient échappé à la chirurgie. Malheureusement, des cellules saines contenues dans l'espace irradié sont parfois affectées, ce qui peut entraîner des effets secondaires. La chirurgie et la radiothérapie constituent des

méthodes d'intervention très efficaces pour retirer ou détruire des tissus cancéreux bien localisés. Par contre, la chimiothérapie agit sur tout l'organisme et peut détruire les cellules cancéreuses partout où elles se trouvent. Le principal problème avec les médicaments utilisés en chimiothérapie est qu’ils peuvent aussi être nocifs pour les cellules saines puisque que les médicaments anticancéreux sont disséminés dans toutes les cellules, qu’elles soient saines ou cancéreuses. Finalement, l'évolution du cancer du sein peut dépendre du milieu hormonal que l'organisme fournit à la tumeur. Il est possible parfois d’empêcher la croissance d'une tumeur en réduisant le niveau des hormones impliquées à l’aide de médicaments neutralisant l'effet de certaines hormones tel le tamoxifène.

Impact psychologique du cancer

Un grand nombre d’études ont démontré que le diagnostic de cancer a un impact psychologique sur le patient. Derogatis et al. (1983) ont observé que 53% des patients s’adaptent normalement au stress de la maladie alors que 47% rencontrent les critères d’un trouble psychiatrique selon le DSM-III. Le trouble d’adaptation avec humeur dépressive ou anxieuse était le plus fréquent dans cette étude, touchant 68% des patients souffrant d’un trouble psychiatrique. Par ailleurs, une méta-analyse de 58 études (Van’t Spijker, Trijsburg, & Duivenvoorden, 1997) indiquent, qu’à l’exception de la dépression, la prévalence des troubles psychologiques et psychiatriques chez les patients atteints d’un cancer ne diffère pas

significativement de celle dans la population générale. Malgré tout, chez les patients en phase terminale du cancer, plus de la moitié, soit 54%, souffrent d’un trouble psychiatrique (Minagawa, Uchitomi, Yamawaki, & Ishitani, 1996).

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Prevalence de la dépression et cancer métastatique

Le terme « dépression », communément utilisé dans le langage courant, réfère tantôt à une manifestation symptomatique (i.e., humeur dépressive), tantôt à un état mental

pathologique (i.e., trouble dépressif). L'humeur dépressive est souvent décrite comme étant un sentiment de tristesse ou de déprime, alors qu’un trouble dépressif réfère plutôt à un syndrome, c'est-à-dire, à un état psychopathologique regroupant plusieurs symptômes dépressifs comme une humeur dépressive, une perte d'intérêt ou de plaisir, des perturbations du sommeil, des changements dans l'appétit, de la fatigue, des idéations suicidaires ou un ralentissement psychomoteur, tel que décrit par le DSM-IV (American Psychiatrie Association, 1994).

Malgré le mauvais pronostic du cancer métastatique, peu d’études ont évalué la

prévalence de la dépression chez cette population. Pinder et al. (1993) ont évalué à l’aide de la sous-échelle de dépression de l’Échelle hospitalière d’anxiété et de dépression (ÉHAD-D; Zigmond & Snaith, 1983) 139 femmes atteintes d’un cancer du sein à un stade avancé dont 81% avaient des métastases à distance. Les résultats révèlent que 12% des patientes souffraient de dépression en utilisant une cote limite de 11 ou plus à cet instrument. Plus récemment, Fulton (1999) a évalué la sévérité de l’humeur dépressive en utilisant l’ÉHAD-D auprès de 80 femmes atteintes d’un cancer du sein métastatique. Dans cette étude, huit évaluations sont menées à huit semaines d’intervalle chacune. Les résultats de la première évaluation indiquent que 31% des participantes souffraient de dépression, tel que déterminé en utilisant une cote de 11 ou plus à l’ÉHAD-D. Parmi les 80 participantes, 44 sont décédées au cours de l’étude. Une analyse des données récoltées avant leur décès (entre 1 à 7 semaines avant le décès) a permis de constater que 50% des patientes souffraient de dépression en utilisant le même critère (Fulton, 1997). Il est peu probable que !’augmentation de la prévalence de la dépression à !’approche de la mort soit attribuable aux plus grands nombres de

symptômes associés à !’aggravation de la maladie puisque l’ÉHAD-D est dépourvue d'items somatiques. Il semble donc qu’une proportion importante des femmes atteintes d’un cancer du sein métastatique manifestent des niveaux cliniques de dépression. De plus, les résultats de Fulton (1997) suggèrent que le risque de souffrir de dépression augmente à l’approche de la mort.

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Facteurs de risque de la dépression dans le contexte de la maladie physique et du cancer

Plusieurs facteurs jouent un rôle dans le développement de la dépression chez un patient atteint d’une maladie physique. Tout d’abord, il existe des facteurs prédisposants qui augmentent la vulnérabilité de certains patients à souffrir de dépression lorsqu’une maladie survient. Premièrement, l’âge et les antécédents de dépression semblent avoir un impact puisque les troubles dépressifs sont plus fréquents chez les patients atteints d’un cancer âgés de moins de 45 ans (Blazer, Kessler, McGonagle, & Swartz, 1994; Kathol et al. 1990) et les patients rapportant des épisodes dépressifs antérieurs (Lansky et al., 1985; Plumb & Holland, 1981). Le soutien social joue également un rôle dans l’adaptation psychologique des patients à une maladie physique sérieuse (Wilson, Chochinov, de Paye, & Breitbart, 2000). Le support émotionnel et matériel et la remise d’information sont trois aspects du support social pouvant faciliter l’adaptation au cancer (Dunkel-Schetter & Wortman, 1982).

La maladie physique peut également précipiter ou aggraver un trouble dépressif. Tout d’abord, Harrison et Maguire (1994) ont démontré qu’un diagnostic de maladie menaçant la survie peut précipiter un épisode dépressif chez un individu préalablement vulnérable. Les patients souffrant de maladies sévères sont plus à risque de présenter un trouble psychiatrique (Derogatis et al., 1983). De plus, une association a été observée entre l’ampleur de l’incapacité physique et la sévérité de la dépression (Buckberg, Penman, & Holland, 1984; Lansky et al., 1985). Spiegel, Sands et Koopman (1994) ont aussi établi que le taux de prévalence de la dépression est plus élevé chez des patients rapportant un haut niveau de douleur que chez ceux ayant un faible niveau. D’autre part, la maladie elle-même peut causer un trouble dépressif. Par exemple, chez les patients atteints d’un cancer, la tumeur ou les métastases situées dans le système nerveux central peuvent produire des symptômes dépressifs (Brown & Paraskevas, 1982; Massie, Gagnon, & Holland, 1994). Certaines complications métaboliques reliées au cancer (e.g., toxine sécrétée par la tumeur, réactions autoimmunes, infections virales, déficits nutritionnels, dysfonctions endocriniennes, etc.) sont également associées à la dépression (Breitbart, 1989; McDaniel, Musselman, Porter, Reed, & Nemeroff, 1995; Patchell & Posner, 1989). Finalement, il semble aussi que les traitements anti-néoplasiques produisent des effets secondaires toxiques pouvant précipiter des symptômes dépressifs (Devlen, Maguire, Philipps, & Crowther, 1987; Devlen, Maguire, Philipps, Crowther, & Chambers, 1987). Par exemple, il est reconnu que la toxicité de la chimiothérapie peut avoir des effets secondaires physiques (e.g., nausée, perte de cheveux, immunosuppression, fatigue, etc.) mais elle peut également avoir

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des effets secondaires psychologiques comme la détérioration cognitive, de l’image corporelle et du fonctionnement sexuel ainsi que le déclenchement de troubles psychiatriques telle la

dépression (Cull, 1990).

Évaluation de la dépression dans le contexte de la maladie physique et du cancer

Dans le contexte d’une maladie grave, nombreux sont ceux qui croient, de façon erronée, que la dépression est une réaction normale et appropriée (Cassem, 1995). Cette attitude fait en sorte que la dépression est trop souvent sous-diagnostiquée et sous-traitée (Rodin & Voshart, 1986). Cohen-Cole, Brown et McDaniel (1993) insistent sur le danger de prétendre qu’un patient atteint d’une maladie physique a de bonnes raisons d’être triste ou déprimé. En croyant que la dépression est une réaction normale, le clinicien risque de ne pas voir l’utilité d’offrir un traitement pour la dépression même si des traitements peuvent la traiter efficacement (Cohen-Cole et al., 1993; Wilson, Chochinov, de Paye, & Breitbart, 2000).

D’autres minimisent la portée de la dépression puisqu’ils croient que presque tous les patients qui vont mourir sont déprimés. Cette affirmation n’est pas appuyée empiriquement puisque moins de 50% de la population souffrant de maladie physique rencontre les critères de dépression majeure.

Toutefois, il n’est pas toujours facile de diagnostiquer la dépression chez une personne malade. En effet, les symptômes somatiques de la dépression comme la perte ou le gain de poids, l’insomnie, la fatigue et le ralentissement psychomoteur peuvent être confondus à des symptômes attribuables à la maladie ou aux effets secondaires des traitements. Certaines maladies physiques (e.g., cancer, maladies cardiovasculaires, infections, maladies

endocriniennes, troubles neurologiques, etc.) peuvent être responsables de symptômes similaires à ceux de la dépression. Cohen-Cole, Brown et McDaniel (1993) suggèrent quatre solutions pour remédier au problème des symptômes somatiques dans le diagnostic et

l’évaluation de la dépression. La première est l’approche inclusive qui consiste à inclure tous les symptômes présents, qu’ils soient attribuables à la maladie ou non. L’approche étiologique inclut à l’inverse un symptôme seulement si celui-ci n’est clairement pas attribuable à la maladie. Ensuite, l’approche substitutive modifie plutôt les symptômes dont la cause est difficile à

identifier. Par exemple, Endicott (1984) suggère de remplacer la perte (ou gain) de poids par d’autres symptômes tel qu’avoir les larmes aux yeux ou avoir une apparence dépressive. Finalement, l’approche exclusive élimine tous les symptômes somatiques de la liste des

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symptômes dépressifs. Par conséquent, un diagnostic de dépression peut être établi seulement avec la présence des critères de diagnostic non somatiques de la dépression.

Conséquences de la dépression

La dépression est un problème qui affecte considérablement la qualité de vie des

personnes atteintes d'un cancer et ce, à divers niveaux. En effet, la dépression semble affecter négativement leur niveau d’énergie, la qualité de leur vie sexuelle, leur fonctionnement au travail (Tross & Holland, 1989) et peut conduire à l'isolement social (Spiegel, 1990). La dépression peut également diminuer l’adhérence des patients à leur plan de traitement, ce qui pourrait indirectement diminuer leur survie (Valente, Saunders, & Cohen, 1994). D’ailleurs, certaines études suggèrent que la dépression peut affecter la survie. En effet, Buccheri (1998) qui a étudié la relation entre la dépression et la survie chez les patients atteints d'un cancer du poumon concluent que les patients déprimés survivent moins longtemps que ceux non- déprimés. Toutefois, cette tendance n'est pas statistiquement significative. De plus, d'autres études ont obtenu des résultats qui ne démontrent aucune relation entre la dépression et la survie au cancer (Richardson, Zarnegar, Bisno, & Levines, 1990).

Malgré cette controverse, il est proposé en psychoneuroimmunologie que la dépression affecte la survie à un cancer par le biais de son impact négatif sur le système immunitaire (Bovbjerg, 1991; Weisse, 1992). La théorie de l'immunocompétence du cancer postule que le cancer résulte de l’échec du système immunitaire à détruire les cellules cancéreuses. Une défaillance du système immunitaire pourrait donc augmenter la susceptibilité d'un individu à développer un cancer ou influencer sa progression. Par ailleurs, plusieurs études rapportent que la dépression clinique altère le fonctionnement du système immunitaire. Plus précisément, la dépression est associée à une réduction de l’activité lytique des cellules NK (« Natural Killer ») et des différentes sous-population de lymphocytes circulants, en incluant les cellules B, NK, T, T-auxiliaires (Helper-T ou CD4) et T-suppresseurs/cytotoxiques (ou CD8) (Herbert, 1993; O’Leary, 1990; Stein, Miller, & Trestman, 1991; Weisse, 1992).

Toutefois, il faut interpréter ces résultats avec prudence puisqu’il n’est pas clair que la magnitude des changements immunitaires reliés à la dépression est suffisante pour influencer la progression de maladies comme le cancer (Irwin, 1988). Finalement, le postulat de base sur lequel repose l'ensemble des études en psychoneuroimmunologie, soit que le système

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immunitaire est impliqué dans le combat contre le cancer, demeure encore controversé (Bovbjerg, 1991).

Traitement de la dépression et cancer

Comme la dépression chez les patients atteints de cancer est associée à plusieurs conséquences néfastes sur la qualité de vie, et possiblement sur la survie, il est impératif de la traiter efficacement. L’efficacité des antidépresseurs est peu étudiée pour le traitement de la dépression dans le contexte du cancer mais les données disponibles indiquent que ce traitement est aussi efficace chez les patients atteints d’un cancer que dans la population générale. En effet, certaines études randomisées et contrôlées par placebo ont observé chez des patients atteints d'un cancer non métastatique que les antidépresseurs diminuaient significativement les symptômes dépressifs et amélioraient la qualité de vie (Costa, Mogos, & Toma, 1985; van Heeringen & Zivkrov, 1996). Cependant, il est important de développer des alternatives aux antidépresseurs. Premièrement, !’utilisation des antidépresseurs peut être contre-indiquée pour certains patients en raison d’une co-morbidité médicale (e.g.,

hypertension). Également, nombreux sont ceux qui craignent que des effets indésirables s’ajoutent à ceux résultant des traitements anti-néoplasiques. De plus, certaines personnes rapportent des effets secondaires importants aux antidépresseurs qui peuvent nuire à l'adhérence et par le fait même, à l'efficacité du traitement. D’autre part, !’utilisation des antidépresseurs peut aller à l’encontre des convictions personnelles de certains patients (i.e., anti-pilule). Certains refusent de prendre des médicaments par crainte de développer une dépendance ou parce qu’ils croient que les médicaments sont inappropriés pour traiter un problème qu’ils considèrent psychologique plutôt que physiologique. Finalement, il importe de développer des alternatives aux antidépresseurs puisque des données expérimentales, quoique fortement contestées, suggèrent que la consommation d’antidépresseurs pourrait être associée à une progression plus rapide du cancer (Brandes et al.,1992).

Il existe plusieurs approches psychothérapeutiques pour la dépression. Parmi celles-ci, la thérapie cognitive (Beck, Rush, Shaw, & Emery, 1979) a récemment été identifiée comme l’un des deux seuls types de psychothérapie ayant reçu un support empirique pour traiter la

dépression dans la population générale (DeRubeis & Crits-Christoph, 1998), l’autre étant la thérapie comportementale. En fait, les données de recherche disponibles suggèrent que la thérapie cognitive est au moins aussi efficace que les antidépresseurs dans le traitement de la

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traitement.d’une dépression sévère (Hollon et al., 1992). De plus, il semble que la thérapie cognitive soit associée à un meilleur maintien des gains thérapeutiques dans le temps. En effet, une analyse qui combine quatre études (Blakburn, Eunson, & Bishop, 1986; Evans et al., 1992; Kovacs, Rush, Beck, & Hollon, 1981; Simons, Murphy, Levine, & Wetzel, 1986), a évalué que le risque de rechute serait de 26% après avoir suivi une thérapie cognitive comparativement à 64% chez les patients traités uniquement avec un antidépresseur tricyclique (Hollon, 1990).

Cependant, la psychothérapie nécessite une implication active de la part du patient et ce dernier doit croire qu'il est capable de poser les actions qui lui permettront de contrôler sa dépression. Malgré tout, la thérapie cognitive représente une alternative efficace aux antidépresseurs et comporterait même certains avantages dans le traitement de la dépression dans la population générale.

De plus, les thérapies cognitives-comportementales, telle la thérapie cognitive, font partie des interventions psychologiques les plus fréquemment administrées dans les centres de cancer (Jacobsen & Hann, 1998). Plusieurs raisons justifient son utilisation dans le contexte du cancer. Premièrement, les thérapies cognitives-comportementales sont des interventions brèves qui peuvent facilement cibler un symptôme particulier nuisant à la qualité de vie des patients atteints d’un cancer. De plus, ce type d’intervention est généralement bien accepté par les patients en raison de l’emphase mise sur la résolution de problèmes actuels et !’augmentation du sentiment de contrôle personnel et d’efficacité personnelle.

À notre connaissance, seulement deux études ont évalué l’efficacité de la thérapie cognitive pour le traitement de la dépression dans le contexte du cancer. Dans l’étude de Marchioro et al. (1996), une thérapie cognitive individuelle hebdomadaire est administrée en combinaison avec un counseling familial bimensuel à des femmes atteintes d’un cancer du sein non métastatique. Cette intervention psychologique s’est avérée plus efficace qu’une condition sans traitement pour diminuer l’humeur dépressive et améliorer la qualité de vie. Une lacune de cette étude est qu’il est impossible de départager l’effet de la thérapie cognitive de celui du counseling familial puisque les deux modalités du traitement ont été administrées ensemble. Dans le cadre d'une étude pilote, Tarder et Maguire (1984) ont comparé l’efficacité de la thérapie cognitive individuelle administrée seule à celle de la thérapie cognitive combinée à un antidépresseur chez dix femmes atteintes d’un cancer du sein ayant subi une mastectomie

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totale. Une amélioration significative de l’humeur est observée dans les deux conditions et aucune différence significative n'est observée entre les deux conditions au post-traitement. Ces résultats suggèrent que la thérapie cognitive administrée seule est aussi efficace qu’un

traitement combinant la thérapie cognitive et un antidépresseur pour le traitement de la dépression dans le contexte de cancer du sein.

Toutefois, il est important d’étudier l’efficacité de la thérapie cognitive chez la population spécifique de femmes atteintes d’un cancer métastatique. En effet, il n’est pas certain que les données récoltées auprès de femmes atteintes d’un cancer non métastatique, ayant un bien meilleur pronostic, peuvent se généraliser à celles ayant développé des métastases à distance.

Le but de la présente étude est donc de vérifier l’efficacité de la thérapie cognitive pour l’humeur dépressive chez des femmes atteintes d’un cancer métastatique. L’hypothèse est que la thérapie amènera une diminution statistiquement et cliniquement significative de l’humeur dépressive chez cette population.

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CHAPITRE 1

Efficacité de la thérapie cognitive pour la dépression chez les femmes atteintes d’un cancer métastatique : Étude exploratoire

Mylène Lévesque Université Laval, Québec

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Résumé

Certaines études indiquent que la dépression est un problème fréquent chez les patients atteints d'un cancer métastatique. L'efficacité de la thérapie cognitive est bien démontrée pour traiter la dépression dans la population générale mais n'a jamais été vérifiée dans le contexte du cancer métastatique. Le but de cette étude est d'évaluer l'efficacité de la thérapie cognitive pour la dépression chez quatre femmes atteintes d'un cancer métastatique à l'aide d'un protocole à cas unique expérimental A-B à niveaux de base multiples. Durant, le niveau de base (A) et le traitement (B), les participantes complètent l’ÉHAD-D et l’IDB hebdomadairement, ainsi qu'une grille d'auto-enregistrement de l'humeur à tous les jours. Les données d'auto-enregistrement et celles obtenues aux deux questionnaires de dépression révèlent que la thérapie cognitive est associée à une amélioration statistiquement et cliniquement significative de l'humeur chez chacune des participantes et que les gains se maintiennent dans le temps jusqu'à 3 mois après la fin du traitement.

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Efficacité de la thérapie cognitive pour la dépression chez les femmes atteintes d’un cancer métastatique : Étude exploratoire

Malgré des progrès médicaux remarquables, le cancer fait encore de nombreuses victimes. Chez la femme, le cancer du sein est le cancer le plus fréquent et il est le deuxième cancer le plus meurtrier, après le cancer du poumon. Le cancer du sein a touché 19,200

nouvelles femmes au Canada en 2000. De plus, il est estimé que 5,500 femmes sont décédées du cancer du sein cette même année. Pour ce qui est du cancer de l’ovaire, 2,500 nouveaux cas ont été diagnostiqués en 2000, alors que 1,500 femmes sont décédées de ce cancer (Institut national du cancer du Canada, 2000).

La majorité des décès dus au cancer sont attribuables au développement des métastases à distance. Le cancer métastatique demeure encore aujourd’hui une maladie incurable. Malgré le mauvais pronostic d'un cancer métastatique, peu d’études ont évalué la prévalence de la dépression chez cette population. Rinder et al. (1993) ont évalué à l’aide de la sous-échelle de dépression de l’Échelle hospitalière d’anxiété et de dépression (ÉHAD-D; Zigmond & Snaith, 1983) 139 femmes atteintes d’un cancer du sein à un stade avancé dont 81% avaient des métastases à distance. Les résultats révèlent que 12% des patientes souffraient de dépression en utilisant une cote limite de 11 ou plus. Plus récemment, Fulton (1999) a également évalué la sévérité de l’humeur dépressive auprès de 80 femmes atteintes d’un cancer du sein métastatique. Dans cette étude, huit évaluations sont menées à huit semaines d’intervalle chacune. Les résultats de la première évaluation indiquent que 31% des participantes souffraient de dépression, tel que déterminé en utilisant une cote limite de 11 ou plus à l’ÉHAD-D. Parmi les 80 participantes, 44 sont décédées au cours de l’étude. Une analyse des données récoltées avant leur décès (entre 1 à 7 semaines avant le décès) révèle que 50% des patientes souffraient de dépression en utilisant le même critère (Fulton, 1997). Il est peu probable que !’augmentation de la prévalence de la dépression à l’approche de la mort soit attribuable aux plus grands nombres de symptômes somatiques associés à !’aggravation de

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la maladie puisque l’ÉHAD-D est dépourvue d'items somatiques. Ces résultats suggèrent que le risque de souffrir de dépression augmente à l’approche de la mort.

En somme, malgré le nombre restreint d’études et l’absence de groupe témoin, la dépression semble constituer un problème fréquent chez les femmes atteintes d’un cancer métastatique. La dépression affecte considérablement la qualité de vie des personnes atteintes de cancer à divers niveaux. En effet, la dépression semble affecter négativement leur niveau d’énergie, la qualité de leur vie sexuelle, leur fonctionnement au travail (Tross & Holland, 1989) et peut conduire à l’isolement social (Spiegel, 1990). La dépression peut également diminuer l’adhérence des patients à leur plan de traitement (Valente, Saunders, & Cohen, 1994).

Certaines études suggèrent même que la dépression est associée à une réduction de la survie au cancer (Buccheri, 1998), bien que d’autres études n'observent aucune relation (Richardson, Zarnegar, Bisno, & Levines, 1990).

Comme la dépression est associée à plusieurs conséquences néfastes sur la qualité de vie des patientes atteintes de cancer, et possiblement sur leur survie, il est important de pouvoir offrir un traitement efficace aux patientes qui le désirent. En effet, compte tenu de l’aspect évolutif du cancer du sein métastatique, il est peu probable qu’une rémission spontanée de la dépression survienne chez cette population. L’efficacité des antidépresseurs est peu étudiée pour le traitement de la dépression dans le contexte du cancer mais les données disponibles indiquent que ce traitement est aussi efficace chez les patients atteints d’un cancer que dans la population générale. En effet, certaines études randomisées et contrôlées par placebo ont observé chez des patients atteints d'un cancer non métastatique que les antidépresseurs diminuaient significativement les symptômes dépressifs et amélioraient la qualité de vie (Costa, Mogos, & Toma, 1985; van Heeringen & Zivkov, 1996). Cependant, il est important de

développer des alternatives aux antidépresseurs. Premièrement, !’utilisation des

antidépresseurs peut être contre-indiquée pour certains patients en raison d’une co-morbidité médicale (e.g., hypertension). Également, nombreux sont ceux qui craignent que les effets

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indésirables des antidépresseurs s’ajoutent à ceux résultant des traitements anti-néoplasiques. De plus, certaines personnes rapportent des effets secondaires importants aux antidépresseurs qui peuvent nuire à l'adhérence et par le fait même, à l'efficacité du traitement. D'autre part, !'utilisation des antidépresseurs peut aller à l’encontre des convictions personnelles de certains patients (i.e., anti-pilule). Certains refusent de prendre des médicaments par crainte de

développer une dépendance ou parce qu’ils croient que les médicaments sont inappropriés pour traiter un problème qu’ils considèrent psychologique plutôt que physiologique. Finalement, il importe de développer des alternatives aux antidépresseurs puisque des données

expérimentales, quoique fortement contestées, suggèrent que la consommation

d’antidépresseurs pourrait être associée à une progression plus rapide du cancer (Brandes et al.,1992).

Il existe plusieurs approches psychothérapeutiques pour la dépression. Parmi celles-ci, la thérapie cognitive (Beck, Rush, Shaw, & Emery, 1979) a récemment été identifiée comme l’un des deux seuls types de psychothérapie supportés empiriquement pour traiter la dépression dans la population générale (DeRubeis & Crits-Christoph, 1998), l’autre étant la thérapie comportementale. En fait, les données de recherche disponibles suggèrent que la thérapie cognitive est au moins aussi efficace que les antidépresseurs dans le traitement de la dépression majeure (Dobson, 1989; Murphy, Simons, Wetzel, & Lustman, 1984; Robinson, Berman, & Neimeyer, 1990; Rush, Beck, Kovacs, & Hollon,1977) et ce, même pour le traitement d’une dépression sévère (Hollon et al., 1992). De plus, il semble que la thérapie cognitive soit associée à un meilleur maintien des gains thérapeutiques dans le temps. En effet, une analyse portant sur quatre études (Blakburn, Eunson, & Bishop, 1986; Evans et al., 1992; Kovacs, Rush, Beck, & Hollon, 1981; Simons, Murphy, Levine, & Wetzel, 1986) a évalué que le risque de rechute serait de 26% après avoir suivi une thérapie cognitive comparativement à 64% chez les patients traités uniquement avec un antidépresseur tricyclique (Hollon, 1990). Cependant, la psychothérapie nécessite une implication active de la part du patient et ce dernier doit croire

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qu'il est capable de poser les actions qui lui permettront de contrôler sa dépression. Malgré tout, la thérapie cognitive représente une alternative efficace aux antidépresseurs et

comporterait même certains avantages dans le traitement de la dépression dans la population générale.

De plus, les thérapies cognitives-comportementales, telle la thérapie cognitive, font partie des interventions psychologiques les plus fréquemment utilisées dans les centres de cancer (Jacobsen et Hann, 1998). Plusieurs raisons justifient son utilisation dans le contexte du cancer. Premièrement, les thérapies cognitives-comportementales sont des interventions brèves qui peuvent facilement cibler un symptôme particulier nuisant à la qualité de vie des patients atteints d’un cancer. De plus, ce type d’intervention est généralement bien accepté par les patients en raison de l’emphase mise sur la résolution de problèmes actuels et

!’augmentation du sentiment de contrôle personnel et d’efficacité personnelle.

À notre connaissance, seulement deux études ont évalué l’efficacité de la thérapie cognitive pour le traitement de la dépression dans le contexte du cancer. Dans l’étude de Marchioro et al. (1996), une thérapie cognitive individuelle hebdomadaire est administrée en combinaison avec un counseling familial bimensuel à des femmes atteintes d’un cancer du sein non métastatique. Cette intervention psychologique s’est avérée plus efficace qu’une condition sans traitement pour diminuer l’humeur dépressive évaluée selon l'Inventaire de dépression de Beck (IDB: Beck, Ward, Mendelson, Mock & Erbraugh, 1961) et améliorer la qualité de vie. Une lacune de cette étude est qu’il est impossible de départager l’effet de la thérapie cognitive de celui du counseling familial puisque les deux modalités du traitement ont été administrées ensemble. Dans le cadre d'une étude pilote, Tarder et Maguire (1984) ont comparé l’efficacité de la thérapie cognitive individuelle administrée seule à celle de la thérapie cognitive combinée à un antidépresseur chez dix femmes atteintes d’un cancer du sein ayant subi une mastectomie totale. Une amélioration significative de l’humeur est observée dans les deux conditions et aucune différence significative n'est observée entre les deux conditions au post-traitement. Ces

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résultats suggèrent que la thérapie cognitive administrée seule est aussi efficace qu’un traitement combinant la thérapie cognitive et un antidépresseur pour le traitement de la dépression dans le contexte de cancer du sein.

Bien que ces résultats soient encourageants, il est nécessaire de reproduire ces résultats auprès d’un plus grand nombre de participants. De plus, il est important d’étudier l’efficacité de la thérapie cognitive spécifiquement chez les femmes atteintes d’un cancer métastatique. En effet, il est loin d’être certain que les données récoltées auprès de femmes atteintes d’un cancer non métastatique, ayant un bien meilleur pronostic, peuvent se généraliser à celles ayant

développé des métastases à distance. L’objectif de la présente recherche est donc de vérifier l’efficacité de la thérapie cognitive pour l’humeur dépressive chez des femmes atteintes d’un cancer métastatique. L’hypothèse est que la thérapie cognitive amènera une diminution statistiquement et cliniquement significative de l’humeur dépressive chez cette population.

Méthodologie Participantes

Recrutement. Les participantes sont recrutées par le biais d’un dépistage systématique de la dépression effectué à l’aide de la sous-échelle de dépression de l’Échelle hospitalière d’anxiété et de dépression (ÉHAD-D; Zigmond & Snaith, 1983) au département d’hémato- oncologie de l’Hôtel-Dieu de Québec du Centre Hospitalier Universitaire de Québec (CHUQ). Pour être acceptées dans l’étude, les participantes doivent remplir les critères d’inclusion suivants : a) être atteinte d’un cancer métastatique (stade IV); et b) présenter une humeur dépressive au moins de sévérité modérée telle que déterminée par une cote de 17 ou plus à la version canadienne-française de l’Inventaire de dépression de Beck (IDB: Gauthier, Morin, Thériault & Lawson, 1982 ) ou une cote de 7 ou plus à la version canadienne-française de l’ÉHAD-D (Bavard, Laberge, Gauthier, !vers & Bergeron, 1998). L’étude de Bavard, Laberge, Gauthier et Bergeron (1998) menée dans le contexte du VIH, démontre que ces cotes limites sont optimales pour le dépistage de niveaux cliniques de dépression.

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Les critères d’exclusion pour cette étude sont les suivants: a) être en phase terminale définie comme l'espérance de vie de moins de 2 mois; b) souffrir de dépression majeure sévère selon les critères du DSM-IV (American Psychiatrie Association, 1994); c) souffrir d’un autre trouble mental sévère (trouble anxieux, trouble psychotique, trouble d’abus ou de dépendance aux substances psychoactives, trouble alimentaire, etc.) selon les critères du DSM-IV (APA, 1994); d) présenter des Idéations suicidaires comportant un danger de passage à l’acte, telles qu’évaluées par la traduction maison canadienne-française élaborée par un des auteurs de cette étude (J.S.) de l’Échelle d’idéations suicidaires (ÉIS; Beck, Kovacs, & Weissman, 1979); e) consommer des antidépresseurs; et f) être déjà impliquée dans un processus

psychothérapeutique ciblant la dépression. Les patientes qui ne sont pas retenues pour l’étude sont référées au service de psycho-oncologie du département de psychiatrie de l’Hôtel-Dieu de Québec.

Description de l’échantillon. Durant la période de recrutement, 28 femmes atteintes d’un cancer métastatique ont obtenu une cote de 7 ou plus à l’ÉHAD-D. Parmi celles-ci, 15 ont refusé de participer à l’étude et 7 sont exclues sur la base des critères décrits précédemment. Au total, six femmes atteintes d’un cancer métastatique ont débuté l’étude, mais seulement quatre femmes ont complété l’ensemble du protocole. Les participantes ayant abandonné l’ont fait à la première et à la troisième séance de traitement en raison de complications médicales les rendant inaptes à participer.

Les caractéristiques démographiques et médicales des quatre participantes sont présentées au Tableau 1. Les quatre participantes sont atteintes d’un cancer du sein mais les métastases chez la Participante 1 sont attribuables à son cancer de l’ovaire. La moyenne d’âge des participantes est de 51.0 ans. Elles ont reçu leur diagnostic initial de cancer depuis en moyenne 69.5 mois, alors que la présence de métastases est connue depuis en moyenne 9.5 mois. Toutes les participantes, sauf une, ont reçu un traitement palliatif.

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Devis expérimental

Un protocole à cas unique expérimental A-B à niveaux de base multiples avec réplications directes et suivi (Kazdin, 1992) est utilisé pour vérifier l’efficacité de la thérapie cognitive pour la dépression. La phase A correspond au niveau de base, dont la durée varie d’une participante à l’autre (i.e., de trois à huit semaines). La durée du niveau de base de chacune des participantes est déterminée aléatoirement. Durant cette phase, aucune intervention n’est administrée. Les participantes complètent seulement les évaluations quotidiennes et hebdomadaires de l’humeur. Une fois que le niveau de base est terminé, les participantes reçoivent la thérapie cognitive composée de huit séances hebdomadaires (i.e., Phase B). Elles continuent alors de remplir des évaluations quotidiennes et hebdomadaires de l’humeur. Une évaluation post-traitement a lieu la semaine qui suit la huitième séance de traitement alors qu’une évaluation de suivi se déroule trois mois après la fin du traitement afin d’évaluer le maintien des gains thérapeutiques.

Procédure

Pré-traitement. Une brève entrevue téléphonique est menée pour évaluer sommairement !’éligibilité des patientes ayant une cote de 7 ou plus à l'ÉHAD-D lors du

dépistage. Les patientes qui semblent éligibles à l’étude sont invitées à une entrevue clinique. Lors de cette entrevue, les procédures de l’étude sont d’abord expliquées en détail et la

participante est invitée à lire et signer le formulaire de consentement. Ensuite, un psychologue clinicien administre la traduction maison canadienne-française de l’Entrevue clinique structurée pour le DSM-IV (APA, 1994) et de l’Échelle d’idéations suicidaires (ÉIS; Beck Kovacs &

Weissman, 1979). Puis, la participante complète un questionnaire d’informations

démographiques et médicales, l'IDB, l’ÉHAD et la version française du Questionnaire de qualité de vie de l'EORTC (QQV) de Aaronson, Ahmedzai et Bergman (1993). Enfin, la traduction maison canadienne-française (J.S.) de l’Entrevue structurée pour l’Échelle de dépression de Hamilton (ESÉDH; Williams, 1988) est administrée par une résidente en psychiatrie,

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indépendante par rapport aux objectifs et aux procédures de l’étude. L’ensemble de l’entrevue clinique dure environ 120 minutes. À la fin de l'entrevue, des grilles d’auto-enregistrement de l’humeur et plusieurs copies de l’IDB et de l’ÉHAD sont remises à la participante qui doit les remplir jusqu’à ce que le traitement débute. La chercheure principale de cette recherche (M.L.) téléphone à chaque semaine pour rappeler aux participantes de compléter la grille d’auto- enregistrement de l’humeur sur une base quotidienne, ainsi que l’IDB et l’ÉHAD sur une base hebdomadaire.

Traitement. La thérapie cognitive est constituée de huit séances individuelles

hebdomadaires d’une durée de 60 minutes et de trois séances d’appoint et suit les procédures du manuel de traitement de Beck, Rush et al. (1979). Ces stratégies, élaborées pour traiter les personnes de la population générale souffrant de dépression, sont adaptées pour répondre aux besoins spécifiques des femmes atteintes d’un cancer métastatique. Le but ultime du traitement est de développer une attitude optimiste mais réaliste face à leur situation, par opposition à une attitude négative (e.g., ne penser qu'à la mort) ou encore exagérément positive (e.g., espérer une guérison). La thérapie cognitive débute par la présentation du modèle de la théorie cognitive des émotions. Puis, les participantes sont amenées à augmenter leur niveau d’activités quotidiennes d’abord en tenant un auto-enregistrement de leurs activités, puis en planifiant davantage d’activités plaisantes et énergisantes chaque jour. Ensuite, les patientes sont entraînées à identifier leurs pensées négatives puis à utiliser la restructuration cognitive pour modifier les cognitions erronées et irrationnelles envers le cancer et d’autres situations de leur vie (e.g., « il ne me sert à rien d’avoir des projets puisque je vais mourir »). Ensuite, les patientes sont amenées à redéfinir leurs objectifs de vie. Typiquement, les personnes atteintes d’un cancer métastatique n’ont plus de projets, ce qui nuit significativement à leur humeur. Au cours du traitement, elles sont donc amenées à élaborer de nouveaux objectifs à court, moyen et même à long terme, le rationnel étant que les projets donnent un sens à la vie et qu’il n’

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pas nécessaire d’avoir la certitude de pouvoir réaliser ses projets pour en avoir. Finalement, des stratégies favorisant le maintien des gains thérapeutiques et la prévention de la rechute sont offertes aux patientes.

Deux psychologues expérimentés dans !’application de la thérapie cognitive auprès de la population cancéreuse administrent les séances de thérapie cognitive. Le premier psychologue administre la thérapie cognitive depuis 10 ans et travaille avec la population atteinte de cancer depuis 3 ans alors que l'autre psychologue utilise cette approche depuis 5 ans et depuis 2 ans auprès de cette clientèle. Chaque séance est enregistrée et 20% des séances sont évaluées à l’aide de l’Échelle de thérapie coanitive-Révisée (Dobson, Shaw, & Vallis, 1985) pour vérifier leur conformité au manuel de traitement. Durant le traitement, les patientes continuent de compléter une grille d’auto-enregistrement de l’humeur quotidiennement, ainsi que l’IDB et l’ÉHAD à chaque semaine. À la cinquième séance (i.e., à la mi-traitement), l’ESÉDH est administrée à nouveau par un évaluateur indépendant.

Post-traitement. Une semaine après la dernière séance de traitement, la participante est rencontrée par un évaluateur indépendant qui administre l’ESÉDH. L’IDB, l’ÉHAD et le QQV sont également complétés au même moment.

Suivi. Trois séances d’appoint de thérapie cognitive de 60 minutes sont offertes aux participantes à chaque trois semaines suivant l'évaluation post-traitement. Les participantes complètent l’IDB et l’ÉHAD à chaque séance d’appoint. De plus, une évaluation de suivi se déroule trois mois après la fin du traitement. À ce moment, les participantes complètent encore une fois l’IDB et l’ÉHAD et l’évaluateur indépendant administre l’ESÉDH une fois de plus. Mesures

Entrevue clinique structurée pour le DSM-IV. Le « Structured Clinical Interview for DSM- IV » (SCID) est une entrevue semi-stucturée conçue pour évaluer les principaux troubles de l’axe I du DSM-IV (APA, 1994). Les études menées sur les qualités psychométriques du SCID pour le DSM-III-R (i.e., la version précédente) indiquent que la fidélité test-retest varie entre .70

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et .93 (Segal, Hersen, & Hasselt, 1994) et que la fidélité inter-juges est excellente (r = .93) pour le diagnostic des troubles dépressifs (Skre, Onstad, Torgerson, & Kringlen, 1991). La version française du SCID utilisée dans cette étude est une traduction maison.

Échelle d’idéations suicidaires (ÉIS). L’ÉIS, version française du « Scale for Suicide Ideation » (Beck, Ko vacs, & Weissman, 1979), est une entrevue semi-structurée évaluant la sévérité des idéations suicidaires et le danger de passage à l’acte. Cette échelle comprend cinq items évaluant les attitudes envers la vie et la mort, six items évaluant les idéations suicidaires, quatre items évaluant la planification d’une tentative et quatre items évaluant !’actualisation de la tentative. Les indices de fidélité se révèlent élevés avec une consistance interne de .89 et une fidélité inter-juges de .83 (Beck, Kovacs, & Weissman, 1979). La validité convergente avec les items de l'IDB portant sur le risque suicidaire est modérée (Beck, Kovacs, & Weissman, 1979). La version française est une traduction maison élaborée par un des auteurs de cette étude (J.S.).

Entrevue structurée pour l’Échelle de dépression de Hamilton (ESÉDH). L’ESÉDH, version française du « Structured Interview guide for the Hamilton Depression Rating Scale » (SIGH-D: Williams, 1988), est conçue pour standardiser !’évaluation de la dépression du « Hamilton Depression Rating Scale » (Hamilton, 1960, 1967). Elle contient 21 items, dont 17 portent sur la dépression. Les qualités psychométriques de l’ESÉDH sont adéquates (Rehm & O’Hara, 1985) avec une consistance interne modérée (a de Cronbach = .76) et une bonne entente inter-juges (r = .84). La validité convergente est relativement élevée avec l’IDB et la sous-échelle de dépression du « Minnesota Multiphasic Personality Inventory » (MMPI-D; Hathaway & McKinley, 1983). L’ESÉDH permet également de différencier les personnes déprimées des personnes non déprimées (Rehm & O’Hara, 1985). La version française a été traduite par un des auteurs de la présente étude (J.S.).

Inventaire de dépression de Beck (IDB). Cette mesure d’auto-évaluation est la version française du « Beck Depression Inventory » (Beck et al., 1961). L’inventaire comprend 21 items

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évaluant les symptômes de dépression, chacun étant accompagné de quatre choix de réponse. Les coefficients de fidélité sont excellents avec un alpha de Cronbach variant entre .73 et .92 (Beck, Steer, & Garbín, 1988). De plus, la validité convergente est relativement élevée avec le « Hamilton Depression Rating Scale » ( r = .73 à .80) et le « Zung Self-Rating Depression (Zung, 1965) (r = .41 à .70). La version française a été développée et a fait l’objet d’une validation empirique par Gauthier et al. (1982). Ceux-ci concluent que les propriétés

psychométriques de la traduction française sont comparables à celles de la version anglaise (Gauthier et al., 1982).

Échelle hospitalière d’anxiété et de dépression (ÉHAD). L’ÉHAD est la version française du « Hospital Anxiety and Depression Scale » (HADS; Zigmond & Snaith, 1983). Cette échelle d’auto-évaluation est spécifiquement conçue pour évaluer et dépister l’anxiété et la dépression chez les patients atteints d’une maladie physique. L’avantage principal de l’ÉHAD est qu’elle est dépourvue d’items somatiques pouvant être confondus avec les manifestations symptomatiques de la maladie physique. L’échelle comprend 14 items, dont 7 mesurant la dépression et 7 mesurant l’anxiété. La présente étude utilise uniquement la sous-échelle mesurant la dépression (ÉHAD-D). M00rey et al. (1991) observent un alpha de Cronbach de .90 pour la

sous-échelle de dépression. Des corrélations positives entre les résultats au HADS et les résultats d’entrevues diagnostiques effectuées par des cliniciens démontrent une bonne validité convergente (Moorey et al. 1991). La version française, dont !'équivalence est démontrée à l'aide de la technique d’équivalence par groupe unique, s’avère posséder des qualités psychométriques équivalentes à celles de la version originale anglaise (Savard, Laberge, Gauthier, !vers, & Bergeron, 1998).

Grille d’auto-enreaistrement de l’humeur. La grille d’auto-enregistrement de l’humeur comprend quatre items. La sévérité de l'humeur dépressive et le manque d'intérêt pour les activités, deux symptômes dépressifs, sont évalués à l’aide des items suivants: 1) « Aujourd’hui, quelle était l’intensité la plus élevée de mon humeur dépressive? »; et 2) « Aujourd’hui, à quel

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point avais-je le goût de faire mes activités? ». Les deux autres items évaluent l'anxiété et la fatigue, des symptômes fréquemment associés à la dépression : 1) « Aujourd’hui, quelle était l'intensité la plus élevée de mon anxiété? »; et 2) « Aujourd’hui, à quel point je me suis sentie fatiguée? ». Pour chaque item, la participante détermine à quel point elle s’est sentie de cette façon sur une échelle allant de « 0 » (pas du tout) à « 100 » (énormément).

Questionnaire de qualité de vie de l’EORTC (QQV). Le QQV est la version française du « The European Organization for Research and Treatment of Cancer Quality of life

Questionnaire » (Aaronson et al., 1993). Ce questionnaire a été élaboré et validé auprès de personnes atteintes de cancer. Seules les échelles globales de santé et de qualité de vie sont utilisées dans cette étude. Une échelle de Likert de sept points allant de « 1 » (très mauvaise) à « 7 » (excellente) est utilisée pour répondre à ces deux items: 1) « Comment évalueriez-vous l’ensemble de votre condition physique des 7 derniers jours? »; et 2) Comment évalueriez-vous votre qualité de vie des 7 derniers jours? ». Les cotes totales sont transformées pour qu'elles varient entre 0 et 100. Toutes les échelles du QQV ont une bonne fidélité (a de Cronbach > .70). Des corrélations de .40 ou plus sont observées entre tous les items et leur échelle

respective (Aaronson et al., 1993). La version française a été développée par les auteurs de la version originale anglaise mais n’a pas fait l’objet d’une validation empirique.

Analyses des données

Analyses de séries chronologiques. Une analyse de séries chronologiques est utilisée pour déterminer si des changements statistiquement significatifs sont survenus pour chaque variable évaluée par la grille d’auto-enregistrement de l’humeur, soit l’intensité de l’humeur dépressive, le niveau d’intérêt pour les activités, l’intensité de l’anxiété et le niveau de fatigue. La grille d’auto-enregistrement de l’humeur remplie quotidiennement permet d’obtenir un minimum de 21 données dans la phase A (i.e., pré-traitement) et de 56 dans la phase B (i.e., traitement). Ce nombre de données est suffisant pour noter une tendance dans les données et

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déterminer si les changements survenus sont statistiquement significatifs (Jones, 1991). L’analyse de séries chronologiques permet d’évaluer deux effets différents attribuables à

!’intervention : un changement de niveau et un changement de pente. Le changement de niveau est observable lorsqu’il y a un changement abrupt dans la distribution des données suite à !’administration de !’intervention, alors que le changement de pente est observé lorsque le changement apparaît de façon plus graduelle après !’administration de !’intervention. Des analyses de régression avec un terme auto-régressif sont réalisées à l’aide de la procédure SAS AUTORES (SAS Institute, 1993). L’auto-corrélation entre les observations est étudiée pour les 12 premiers lags. Un alpha de .05 unilatéral est utilisé et les données extrêmes situées à plus d’un 1.5 écart-type de la moyenne de leur phase respective sont supprimées. Les données supprimées ou manquantes (i.e., 0 à 16 données par participantes) sont estimées par une projection linéaire de !’observation précédente et suivante de la série. Les résidus des modèles finaux sont contrôlés pour la normalité, la linéarité et l’auto-corrélation.

Analyse visuelle. L’IDB, l’ÉHAD-D et l’ESÉDH n’étant pas administrés assez

fréquemment pour soumettre les données recueillies à une analyse statistique, une inspection visuelle est plutôt effectuée. Une telle analyse permet de faire l’examen de la distribution des données et de vérifier si la tendance des données change lors d'un changement de phases. Ce type d’analyses est régulièrement utilisé dans les recherches utilisant un protocole à cas unique expérimental (Barlow & Hersen, 1984; Kazdin, 1992).

Signification clinique. Lors de l’évaluation de l’efficacité d’un traitement, il peut être utile pour les cliniciens d’identifier que ses effets ne sont pas seulement statistiquement significatifs mais aussi cliniquement significatifs. Quatre critères de signification clinique sont utilisés dans cette étude. Tel que spécifié par Foster et Mash (1999), le premier critère a trait à la satisfaction de la participante envers les effets du traitement. Dans la présente étude, la participante évalue elle-même au post-traitement à quel point le traitement reçu a amélioré son humeur. Une échelle bidirectionnelle qui varie de 0 à 7, permet d’évaluer le degré de changement, « 0 »

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signifiant une détérioration, «3 » signifiant aucun changement et «7 » signifiant une

amélioration. Une cote minimale de 6 est établie pour indiquer un changement cliniquement significatif. Le deuxième critère utilisé (Foster et Mash, 1999) est !1évaluation par le clinicien du niveau d’amélioration de l’humeur dépressive chez la participante. La même échelle de réponse est utilisée et encore une fois, la cote minimale requise est établie à 6. Troisièmement, les cotes obtenues à l’ÉHAD-D et à l’IDB doivent avoir diminué d'au moins 50 % au post-traitement

comparativement au pré-traitement pour que le changement soit considéré cliniquement significatif. Finalement, il est établi que les participantes doivent atteindre une cote moyenne supérieure à 67 aux échelles globales de santé et de qualité de vie du QQV, ce qui correspond à la médiane des cotes obtenues par un groupe de 150 femmes atteintes d’un cancer du sein métastatique dans une autre étude (McLachlan, Devins, & Goodwin, 1997), qui peut être considéré comme un groupe normatif. La comparaison avec un groupe normatif est une des méthodes utilisées pour déterminer s'il y a eu changement cliniquement significatif (Kendall, Marrs-Garcia, Nath & Sheldrick, 1999). De plus, Gladis, Gosch, Dishuk et Crits-Christoph (1999) suggèrent que la qualité de vie est un concept utile et mesurable qui reflète un changement cliniquement significatif.

Résultats Analyses de séries chronologiques

Les résultats des analyses de séries chronologiques menées sur les quatre variables évaluées par la grille d’auto-enregistrement de l’humeur sont présentés au Tableau 2. Trois paramètres (i.e., changement de pente, changement de niveau et auto-corrélation) sont testés à l'intérieur de chaque variable. À chaque test statistique, le niveau d'erreur alpha augmente mais une correction pour l'unité conceptuelle d'erreur au niveau de la famille de contrastes a permis de la contrôler. Malgré cette correction, une amélioration statistiquement significative est obtenue pour chaque participante sur au moins un des deux symptômes dépressifs. En général, il s’agit de changements de pente, donc de changements graduels. Plus précisément,

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le niveau d’intérêt pour les activités s'est amélioré significativement chez la Participante 1 (p < .001), alors que l’humeur dépressive diminue significativement chez la Participante 2 (p < .0038) suite à !’introduction de la thérapie cognitive. Quant aux participantes 3 et 4, c’est sur les deux variables de dépression qu’un changement statistiquement significatif est observé (g < 0.001).

Le patron de résultats est similaire pour l’anxiété et la fatigue, deux symptômes souvent associés à la dépression. En effet, au moins un des deux symptômes s’est amélioré de façon statistiquement significative et les changements s’effectuent surtout graduellement.

Spécifiquement, l’anxiété a diminué significativement chez la Participante 1 (p < .02), alors que la fatigue s’est améliorée significativement chez la Participante 2 (p < .0001). Les participantes 3 et 4 se sont améliorée significativement tant sur l'anxiété (p < .05) que la fatigue (p < .0001). En somme, l’ensemble des analyses de séries chronologiques indique un changement significatif pour la plupart des variables mesurées par la grille d’auto-enregistrement de l'humeur.

Analyse visuelle

Les Figures 1 et 2 illustrent les données obtenues à l’IDB et l’ÉHAD-D tout au long de l’étude pour chacune des participantes. Il est à noter que l’évaluation effectuée à la première séance de thérapie cognitive est placée dans la phase du niveau de base puisque le

participante complète les questionnaires auto-administrés avant que la séance de thérapie ne débute. Il y a donc seulement 7 données dans la phase de traitement. L’inspection visuelle des Figures 1 et 2 révèle que les données obtenues au niveau de base sont relativement stables pour les quatre participantes. Lorsqu’il y a un changement, il s’agit généralement d’une

aggravation des symptômes dépressifs, ce qui permet de débuter le traitement (Kazdin, 1992). Immédiatement après !’introduction de la thérapie cognitive, une diminution progressive de l’humeur dépressive survient autant mesurée avec l’IDB qu’avec l’ÉHAD-D.

L’inspection visuelle des courbes révèle également que les gains thérapeutiques se maintiennent bien jusqu’à 3 mois après le traitement. Plus précisément, les cotes obtenues à

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l’IDB et à l’ÉHAD-D demeurent sous le seuil clinique lors des séances d'appoint pour les quatre participantes. De plus, les évaluations effectuées 3 mois après la fin du traitement (disponibles pour trois des quatre participantes) confirment le maintien des gains thérapeutiques.

La moyenne des cotes obtenues à l’ESÉDH par les quatre participantes corrobore dans l’ensemble les résultats obtenus avec les mesures hebdomadaires (Voir Figure 3). L’humeur dépressive diminue graduellement au cours de la thérapie cognitive. En général, au post- traitement, les cotes se retrouvent sous le seuil clinique (Le., < 6). La sévérité des symptômes dépressifs mesurés par l’ESÉDH augmente légèrement au suivi 3 mois mais les cotes

demeurent bien en deçà des cotes obtenues au pré-traitement. L’augmentation de la moyenne est principalement due à la cote de la Participante 2 qui augmente de façon plus importante (Le., cote de 12).

Signification clinique

L’amélioration de l’humeur dépressive des quatre participantes semble être cliniquement significative (Voir Tableau 3). En effet, toutes les participantes remplissent les quatre critères identifiés précédemment pour déterminer la présence d'un changement cliniquement significatif. Les quatre participantes ont évalué que leur humeur dépressive s’est améliorée suite à la thérapie cognitive. Le clinicien a lui aussi noté une amélioration de l’humeur pour !’ensemble des participantes. De plus, toutes les cotes à l’ÉHAD-D et l’IDB diminuent d'au moins 50 % au post-traitement. Et finalement, la moyenne des cotes aux échelles globales de santé et de qualité de vie est supérieure à la donnée normative (Le., > 67) chez les quatre participantes. Il est à noter que la médiane des résultats des quatre participantes au post-traitement est de 83 alors qu’elle était de 44 lors de l’évaluation pré-traitement. Ainsi, il semble que la thérapie cognitive de la dépression améliore considérablement la qualité de vie globale.

Discussion

L’objectif de la présente étude était de vérifier l’efficacité de la thérapie cognitive pour l’humeur dépressive chez des femmes atteintes d’un cancer métastatique. Les résultats de

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cette étude suggèrent que la thérapie cognitive est efficace pour diminuer l’humeur dépressive chez cette population. En effet, les analyses de séries chronologiques portant sur les données quotidiennes de l’humeur et l’analyse visuelle des données obtenues aux auto-évaluations hebdomadaires démontrent une diminution de la dépression chez l’ensemble des participantes suite à !’introduction du traitement. De plus, ces résultats sont corroborés par une évaluation clinique effectuée par un évaluateur indépendant par rapport aux objectifs de l’étude, ce qui renforce la validité de cette conclusion. Bien que les gains thérapeutiques soient généralement graduels, ils surviennent assez rapidement dans le processus thérapeutique et se maintiennent dans le temps. En plus d’être statistiquement significatifs, les changements de l’humeur sont cliniquement significatifs sur la totalité des critères utilisés. Enfin, les résultats indiquent également un effet de la thérapie cognitive de la dépression sur des variables fréquemment associées à la dépression (Le., anxiété, fatigue) et la qualité de vie globale des patientes.

Les résultats de la présente étude sont consistants avec ceux des études antérieures menées chez des patientes ayant un cancer du sein non métastatique (Terrier & Maguire, 1984; Marchioro & al., 1996). En effet, la présente étude révèle une amélioration de l’humeur

dépressive au post-traitement semblable à celle notée chez les patientes dans les deux

conditions de l’étude de Terrier et Maguire. (1984) (Le., thérapie cognitive administrée seule vs thérapie cognitive combinée à un antidépresseur). Ainsi, il semble que la thérapie cognitive est efficace pour diminuer l'humeur dépressive même chez des femmes atteintes d’un cancer avec un pronostic plus sombre. De plus, contrairement à l’étude de Marchioro et al. (1996), qui ont administré une combinaison de thérapie cognitive et de counseling familial, la présente

recherche permet d'attribuer la diminution de l’humeur dépressive spécifiquement à la thérapie cognitive et non à une autre modalité d’intervention. Spiegel, Bloom et Yalom (1981) avaient aussi démontré l’efficacité d’une intervention psychologique (Le., supportive-expressive) pour diminuer l’humeur dépressive chez des femmes atteintes d’un cancer du sein métastatique, mais cette intervention était d’une durée d’un an. La présente étude suggère que l’on peut

Figure

FIGURE 1. Cotes obtenues à l'Inventaire de dépression de Beck par chacune  des participantes à chaque phase.
FIGURE 2. Cotes obtenues à la sous-échelle de dépression de l'Échelle hospitalière  d'anxiété et de dépression par chacune des participantes à chaque phase.
Figure 3. Cotes moyennes obtenues à l’Entrevue structurée pour l’Échelle de dépression de Hamilton pour les quatre  participantes à chaque temps de mesure.
Tableau résumé des procédures d’évaluation

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