ARTheque - STEF - ENS Cachan | Jouer avec des blocs de construction à l'école normale primaire !

"JOUER" AVEC DES BLOCS DE

CONSTRUCTION A L'ECOLE NORMALE

PRIMAIRE!

G.CALANDE

Ecole Normale d'Instituteurs, Gosselies

fORMATION PES INSTITUTEURS - EVEIL - SIMULATION PE

CLASSEMENT - PROPUCTIONS PES ENfANTS - CONSTRUIRE

SON SAVOIR.

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Les preml~res leçons dans les brsnches d'éveil (sclences,géogrsphle, histoire) que doivent préparer et donner les normaliens de 2~me snnie tournent assez aouvent, chez nous, autour de mêmes thèmes 1 Dans le cOllrant des mols d'octobre, novembre, le sujet "d'actualité" est la chute des feuilles ... Elles jaunissent, tombenl. .. Il est facile de les ramasser, donc sujet de choix pour une première observation. Il ne demande pas beaucoup d'Investissement en matériel et en préparation ... La leçon est facilement préparée: quelques feuilles à ramasser, quelques points de morphologie foliaire à sélectionner et les enfants n'ont plus Qu'à regarder et appliquer pour produire (plutet re-produire 1) un beau tableau, pour aulvre une clé de détermination toute faite (foisonnant dans les manuels scolaires) ••• suivre sans trop savoir ce qu'Ils font ..• en quoi seraient-lIa Intéressés par le sujet 7

J'al assisté d'ailleurs à d'étranges "ballets" durant ces leçona sur la classification des feuilles d'arbres où lea él~ves tournaient en rond cherchant l'Intérêt de l'exercice, l'articulation avec leur système de claaslflcatlon, et le ataglalre piétinant aur place, s'embrouillant dans les définitions morphologiques, s'embourbant dans des distinctions claires à ses yeux mals bien moins évidentes pour les enfants .••

Quelle utlliti 7 .•• D.LACRDIX (Ecole normale de Grenoble) résume avec pertinence les difficultés que rencontrent les normaliens en formation, les probl~mes que nous rencontrons pour les aider à prendre conaclence que la science est loin d'être achevée, qu'Il est d'autrea chemins Insoupçonnis et riches à découvrir avec les enfants; que ceux-cl ont des tas d'Idées, d'explications sur le aujet, à eux, avec une formulation

à eux, qui est le fruit d'un niveau de conceptualisation propre à leur expérience (1) : "les enaelgnants cherchent à communiquer aux enfants leura propres certltudea, leurs propres repréaentstlona Qu'Ils Identifient en outre à cellea qui leur ont été enaelgnées. Beaucoup n'Imaginent même pas qu'Il puisse en exister d'autres et que lea enfants pulasent lea utiliser" (2).

Il m'eat apparu néceasalre de travailler avec les ataglalres le probl~me

des classlflcstlons, et à cette occaalon d'sborder des questions plua fondamentales (Intérêt de travailler ce sujet à l'école primaire) :

- Comment établir des critères pour clasaer dea objets 7 A quelles compétences de l'Intelligence faire appel pour énoncer ceux-cl, pour qu'Ils aolent fonctlonnela?

(1) ASTER: Procédures d'apprentlaaage en sclencea expérlmentsles,INAP, Coll. rapporta de recherchea 1985 N°)

(21 D.LACRDIX : "un modèle de référence, un mod~le pour l'enseignant, des modèles utilisés par les enfants", Actes dea 7~me

- Comment analyser l'activité de classement non plus en

terme de but

à

atteindre mais de moyen, d'outil à construire et à utiliaer dans le cadre d'une démarche?

- Comment faire fonctionner une telle activité pour qu'elle joue un rôle important dans une séquence de "formulation! résolution de problème"? problème posé en termes pouvant être reçus (compris) par l'élève et non une formulation décriptable seulement par l'enseignant. Ce ser~ grâce à des phases de tâtonnements, d'essais, de prQduction "originalE gérée en autonomie où l'élève se constitu8ra les points d'appui nécessairesà la construction de son savoir.

J'estimais nécessaire également de confronter les stagiaires avec leur propre proposition de travail c'est-à-dire de leur demander de se pencher eux-mêmes sur un travail de classification afin d'en découvrir les rouages, les difficultés. Le problème de dégager des critères de classement est-il aussi facile à résoudre qu'ils semblaient le prétendre "La"vérité scientifique n'allait-elle pas revêtir des formes bien différentes, imprévues, en dehors des sentiers battus des manuels scolaires?

Et s'il en était ainsi pour eux, futurs instituteurs peut-être prendraient-ils conscience avec plus d'aisance que les enfants sont eux-mêmes capables de créer, d'inventer et argumenter leurs critères (peut-être différents, très différents de ceux du martre 1) pour produire un autre type de clé, un cheminement original, fonctionnel pour eux parce que investi par eux, élaboré à la "sueur" de leur raisonnement, émanant d'un bouillonnement de l'esprit de chacun? J'al donc imaginé une simulation de classification permettant BUX

étudiants de s'immerger dans le problème, de vivre par l'intérieur la recherche de classement d'objets,essayant ainsi d'articuler contenu et méthode, agir et réflexion théorique: par groupe de 4, ils ont reçu une borte de blocs de construction (support didactique emprunté à mes enfantsl) avec les consignes suivantes:

1- classer tous les élèments de la botte selon a. 1 critère que vous rédigez avec précision b. 2 critères (différents de 1.a) que vous rédigez 2- classer tous les éléments de la botte

a. en 3 groupes - rédigez les autres critères choisis (critères différents de 1.a,b)

b. en 4 groupes - rédigez le ou lea critère(s) cholais (critères différents de 1.a,b - 2.a)

3- rédaction d'un rapport comportant BU molna les points suivants :

a. quelle démarche de travail le groupe a-t-il choisie? expliciter

b. la rédaction des solutions proposées à l'exercice. c. une réflexion personnelle:

Temps mis à la disposition des groupes: 1H*.

Il n'est pas nécesssire de faire de larges commentaires sur le

déroulement de l'exercice mais toutefois je désire résumer l'atmo"phère qui régnait pendant cette heure

*

de travail en groupe ••• elle e.t significative des ruptures engendrées chez chacun:

1- d'abord un long silence de perplexité, de tension où chacun se demandait à quoi je voulais en venir, si c'était vraiment sérieux, en contemplant le jeu de construction.

2- ensuite un moment d'exaltation (très court), de "pour qui nous prend-il 7", de "on va lui montrer •.• " mais le "soufflé" retombe assez vite" •••

3- un long moment de piétinement: "c'est impossible", "cela n'a pas de sens!", "on y arrivera jamais ••• "

4- le temps venu où l'imagination se met au service de l'intelligence où germent des idées différentes, dynamiques, hors des référents habituels, où ils ont compris la nécessité de s'ouvrir à de nouveaux horizons, de reculer ou d'enjamber les barrières construites dans leurnpensées, les soi-disant évidences .,. C'est par une mise en commun, toute la classe réunie, que commence le

Lu.jrS suivant. Chaque groupe informe l'assemblée des critères retenus,

de la conception de leur classement. C'est à cet endroit que je demande aux normaliens de mener une réflexion sur une évaluation de tout ce qui s'est passé dans le groupe, ce que l'exercice semble leur avoir apporté. De cet échange ressortent quelques prises de conscience

1- de la difficulté de s'extraire des sentiers battus, qui font considérer les objets avant tout comme des volumes à classer selon leur forme, leur contenu, le calcul de la surface de base,

2- de l'appauvrissement général et constant de la créativité, de l'imagination (ce qui serait à rapprocher du point 1 ci-dessus) ••• serait-ce l'école qui a atrophié ainsi la créativité 7 3- d~ la variété des solutions possibles ••. (alors qu'il s'attendaien

en fin de procesaus à recevoir "la" solution du maitrel) 4- de la difficulté d'énoncer (et rédiger) des critères de

classement clair et précis, ré-utiliaables par d'autres difficulté de communiquer c.a.d. d'écouter et d'énoncer. 5- de la difficulté de confronter Ba propre vue des choses

(ses représentations) à celles des autres (manque d'arguments, défense à coup d'évidenceal •••• mais de la formidable

dynamique que peut engendrer cette pratique. Cette confrontation devient alors génératrice d'ouverture ••• les évidences

deviennent moins évidentes, les arguments prennent forme, consistance.

peut devenir une activité de

à la recherche de chaque indice, travail efficace et ajustée

Mais une lame de fond a bou~ersé le système de pensées bien installé chez de nombreux normaliens:dans cet exercice .••et, par application à

l'école primaire, dans tout exercice de classification, il devient possible pour les enfants de produire et non plus ae conformer aux référents "académiques~ecréer son propre aystème de détermination, à aa mesure, avec aea mota.

Classer des feuilles d'arbres ne se résumera plus à appliquer un code enseigné par le maître pour reproduire un aystème de classement, certes pertinent, mais pour lequel l'enfant reste extérieur, ne se sent pas impliqué puique ce n'est pas aon affaire, Bon expérience, puisqu'il n'en voit pas le pourquoi et le comment.

Mais classer des feuilles d'arbres recherche, une enquête palpitante, dans l'élaboration d'une grille de BUx enfanta par lea enfants.

Tout cela, mes étudiants semblent bien l'avoir perçu par le travail sur les blocs de construction où ils ont été confrontés à cette exploration, à cette obligation d'imaginer, de créer pour eux une classification. Jusqu'à présent, ils ne se r~ndaient pas tellement compte de la difficulté de la démarche non pas par ignorance mais parce qu'ils n'avaient pas fait le pas de la construire eux-mêmes avec leurs moyens puisqu'ils s'étaient contentés de l'appliquer docilement, sans question .. , et ils s'appr~taient, toujours de l'extérieur, à la transmettre à combien de groupes d'enfants •.• Je ne me sens pas encore en mesure d'estimer toutes les retombées de cette expérience que je mène depuis 3 ans à l'école normale de Gosselie~

Des adaptations, des corrections, des prolongements sont à introduire dans la démarche, c'est ce que nous comptons faire, les normaliens et moi au fil des problèmes rencontrés.

Une conclusion s'impose quand même la systématique ,aux abords si ardus, si lourds, si "traditionnels" peut devenir un outil dynamisant, fonctionnel pour autant que par elle on puiase chercher, agir,

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