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La dimension organisationnelle dans la productivité des tic : Le cas de la messagerie électronique dans le secteur des services

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Academic year: 2021

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Working P aper IMRI

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La dimension organisationnelle

dans la productivité des tic :

Le cas de la messagerie électronique

dans le secteur des service

Sylvie ROLLAND

Maître de Conférences (Université de la Rochelle) et chercheur associée à Paris-Dauphine DRM-DMSP (CNRS UMR 7088)

Tél : +33 (0)6 88 47 57 29 Courriel : sylvie.rolland@univ-lr.fr

Sébastien TRAN (auteur désigné pour la correspondance)

Professeur associé, CEREGE/Groupe Sup de Co La Rochelle et chercheur associé à M-Lab (ENS Cachan) et à l’IMRI (Paris-Dauphine)

Tél : +33 (0)6 23 35 39 82 Courriel : trans@esc-larochelle.fr

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Résumé

Depuis plusieurs années, les entreprises doivent faire face à une forte complexification de leur environnement en raison d’une intensité concurrentielle exacerbée et d’une masse croissante d’informations à traiter. L’une de leurs réponses se matérialise dans l’utilisation des Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) qui permettent de saisir, traiter, stocker et communiquer l’information (Reix, 2002). Les TIC sont censées améliorer la performance des organisations (Rice et Blair, 1984 ; Malone et alii, 1987 ; SESSI, 2004, 2006) au travers notamment d’une meilleure productivité des facteurs de production. Or, leur mise en place et leur utilisation au fil du temps sont souvent associées à l’application de processus de changement organisationnel (Reix, 1990 ; Marciniak et Rowe, 1997 ; Monod, 1998) souvent occultés par les managers. La diffusion et l’appropriation par les utilisateurs des TIC dans les entreprises ne sont pas sans poser un certain nombre de questions en termes organisationnels car les recherches montrent qu’il n’existe pas de déterminisme technologique (Benghozi, 2001 ; Van den Hooff et alii., 2005). C’est dans ce cadre que se positionne notre recherche en se focalisant sur l’analyse du rôle joué par le courrier électronique dans les entreprises dans le secteur des services. Cet outil s’est imposé comme un outil de communication incontournable dans les entreprises (Rice et Gattiker, 2001) dont les effets sont significatifs (Karahanna et Limayen, 2000). Nous chercherons dès lors à cerner les principaux impacts organisationnels du courrier électronique avec une méthodologie qualitative centrée sur plusieurs entretiens semi-directifs de cadres dirigeants et de fournisseurs de solutions logicielles.

Mots clés

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Introduction

Les entreprises doivent faire face depuis plusieurs années à une forte complexification de leur environnement en raison d’une intensité concurrentielle exacerbée et d’une masse croissante d’informations à traiter. Fréquemment, l’une de leurs réponses se matérialise dans l’utilisation des Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) qui permettent de saisir, traiter, stocker et communiquer l’information (Reix, 2002). Les TIC sont ainsi censées améliorer la performance des organisations (Rice et Blair, 1984 ; Malone et alii, 1987 ; SESSI, 2004, 2006) en augmentant la productivité des différents facteurs de production. Or, leur mise en place et leur utilisation au fil du temps sont souvent associées à l’application de processus de changement organisationnel (Reix, 1990 ; Marciniak et Rowe, 1997 ; Monod, 1998). Dans cette logique, la diffusion et l’appropriation par les utilisateurs des TIC dans les entreprises ne sont pas sans poser un certain nombre de questions en termes organisationnels, d’autant plus que les recherches montrent qu’il n’existe pas de déterminisme technologique (Benghozi, 2001 ; Van den Hooff, 2005). Enfin, l’analyse empirique est rendue encore plus difficile étant donné les nombreux facteurs de contingence qui sont difficilement identifiables et mesurables.

Notre recherche a ainsi pour objectif, au travers du lien entre la diffusion des TIC et une meilleure productivité, de mieux cerner les impacts organisationnels de la diffusion à grande échelle de la messagerie électronique, notamment dans le secteur des services. En effet, une étude interne de Microsoft indique que la messagerie électronique constitue le premier outil de travail pour 65 % des salariés. Nous verrons ainsi que, derrière une recherche d’amélioration de la productivité, l’email conduit à une évolution de l’organisation plus complexe que la simple superposition d’un outil de communication sur les processus métiers et qu’elle soulève un certain nombre de questions d’un point de vue organisationnel, dimension souvent occultée en raison de l’apparente simplicité de cette technologie1. Dans une première partie, nous ferons une synthèse de la littérature sur les impacts des TIC en termes de productivité et d’impacts organisationnels, en nous focalisant plus particulièrement sur le courrier électronique. Ensuite, nous présenterons notre méthodologie centrée sur des

1 Une récente étude souligne que près de 96 % des chefs d’entreprise considèrent le courrier électronique comme

un outil de simplification de l’organisation du travail dans leur entreprise (Enquête Novamétrie, Microsoft, Cigref, 2006)

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études de cas réalisées à partir d’entretiens semi-directifs et l’analyse des principaux résultats afin d’en recueillir des enseignements pour les managers.

1. La revue de littérature

Le courrier électronique s’est imposé au fil des années comme un outil de communication incontournable dans l’organisation (Rice et Gattiker, 2001) dont les effets sont significatifs (Karahanna et Limayen, 2000) mais très difficiles à cerner tant les configurations organisationnelles sont différentes. Au-delà de l’apparente simplicité de cet outil de communication, le courrier électronique est marqué par des logiques sociales et organisationnelles qui expliquent ainsi sa large diffusion dans les entreprises, et cela quelle que soit leur taille, ainsi que ses effets sur l’organisation et les métiers.

1.1. La messagerie électronique : une diffusion de masse dépassant une logique communicationnelle

Dans le cadre de la recherche de performance organisationnelle, le courrier électronique, appelé aussi email ou courriel, est l’une des premières technologies de communication à s’être largement diffusée au sein des entreprises (SESSI, 2006, 2004). S’il est clair que la recherche de la productivité au travers de la diffusion des TIC dans les entreprises est une des explications de la pénétration de la messagerie électronique, cette dernière s’avère néanmoins insuffisante pour comprendre le niveau très important de diffusion, et cela, quels que soient les secteurs ou les pays. L’une des clés de lecture de la diffusion de la messagerie électronique repose ainsi sur les facteurs relatifs au contexte social au sein des organisations, ces derniers étant souvent mobilisés dans la littérature visant à expliquer le choix des moyens de communication.

Le débat sur les déterminants du choix des moyens de communication au sein des organisations concerne le pouvoir explicatif de diverses théories et se centre régulièrement sur la théorie de la richesse des média (TRM) et sur le modèle de l’influence sociale (MIS) (Fulk et Boyd, 1991 ; Markus, 1994 ; Webster et Trevino, 1995). Toutefois, il existe d’autres théories qui permettent de mieux comprendre le processus de diffusion et d’appropriation du courrier électronique et qui tendent à relativiser le poids de la TRM dans l’analyse. Le choix

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d’un média n’est pas uniquement un processus rationnel qui résulte de la correspondance entre les caractéristiques objectives du média et le contenu de la communication. On peut noter par exemple l’importance du contexte social et du comportement interdépendant des individus. L’email est un exemple particulièrement révélateur dans ce sens au vu des résultats des études empiriques menées la plupart du temps au sein de grandes organisations. Ainsi, certains travaux montrent que son utilisation est positivement corrélée avec l’influence du management et des collègues (Wijayanake et Higa, 1999 ; Limayem, Bergeron et Richard, 1997 ; Webster et Trevino, 1995) ou bien par la symbolique du pouvoir (Rowe et alii, 1994). Le tableau ci-dessous synthétise les différentes théories visant à cerner les déterminants de l’utilisation de la messagerie électronique2.

Synthèse des principaux apports de la littérature sur le courrier électronique

Théorie Principaux auteurs Idées principales

Théorie de la richesse des médias

Daft et Lengel, 1986 ; Trevino, Lengel et Daft, 1987 ; Markus, 1994

Le choix des moyens de communication est un processus rationnel résultant de l’adéquation entre les caractéristiques des moyens de communication (feedback, indices, richesse du langage…) et le contenu du message.

Modèle de l’influence sociale

Fulk et Boyd, 1991 ; Markus, 1994 ; Webster et Trevino, 1995

Le choix d’un média n’est pas un processus rationnel qui résulte de la correspondance entre les caractéristiques objectives du média et le contenu de la communication. Importance du contexte social et du comportement interdépendant des individus, ainsi que des groupes.

Théorie de l’interactionnisme symbolique

Trevino et alii., 1987 ; 1990

Processus d’interaction entre les individus dans la formation des significations. Le choix d’un média peut être expliqué par des explications subjectives liées à la formation des normes relatives à son utilisation.

Théorie de l’expansion du canal

Carlson et Zmud, 1999 ; Linlin, 1996 ; Van den Hooff et alii, 2005

Plus l’utilisateur développe des connaissances expérientielles, plus il perçoit la richesse d’un média.

Théorie du millefeuille

Boukef et Kalika, 2006, Kalika et alii, 2007

Phénomène d’empilement des différents médias en fonction du contexte d’utilisation des TI ; création d’effets de substitution entre les différents moyens de communication.

Il ressort par ailleurs de la revue de littérature deux niveaux d’analyse qui sont souvent complémentaires. Le premier, très présent dans le tableau, est le niveau de l’utilisateur individuel. Par exemple, de nombreux travaux se sont centrés sur la satisfaction de

2 Il est à noter que nous avons volontairement procédé à une sélection des théories concernant la revue de

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l’utilisateur à partir de l’identification de plusieurs déterminants (Davis, 1986, 1989) pour expliquer l’appropriation du courrier électronique et d’autres TIC. Le second, le niveau méso-économique, souligne que les TIC sont nécessaires à la coordination inter-organisationnelle et visent à accroître la productivité, tant individuelle qu'organisationnelle (Rice et Bair, 1984). La diffusion d’un moyen de communication se trouve être corrélée au développement d’une masse critique d’utilisateurs (Markus, 1987 ; 1990). La progression régulière de l’équipement en TIC des entreprises en France, notamment en accès à Internet3, accentue les externalités de réseaux. On peut citer par exemple les travaux se focalisant sur les nouvelles formes organisationnelles (gestion de projet, co-conception, conception collaborative…) qui exigent une très grande réactivité et nécessitent une coordination accrue de personnes, d’équipes, ou d’unités, opérant dans des lieux toujours plus distants (Saunders, 2000). Le développement d’Internet et des outils associés répond en partie à cette nouvelle contrainte dont le courrier électronique peut être considéré comme l’un des symboles dans les organisations. Nous verrons plus loin que ce dernier n’est pas resté cantonné à son rôle d’outil de communication asynchrone entre deux utilisateurs.

1.2. Les principaux effets du courrier électronique sur l’organisation

Le courrier électronique apparaît comme un outil simple de communication mais en réalité il s’avère plus complexe car il faut intégrer dans la réflexion la présence d’autre TIC dans les entreprises, et, comme nous l’avons vu précédemment, la dimension sociale au travers de l’adoption par les utilisateurs qui peut s’avérer par ailleurs très structurante dans les usages. Plusieurs effets marquants de détachent ainsi des études empiriques et des travaux de recherche.

Le premier élément de compréhension concerne le processus d’apprentissage par rapport à l’outil et l’évolution des usages du courrier électronique. Il est fondamental à ce niveau de bien distinguer diffusion et usage car la mise à disposition de TIC n’engendre pas systématiquement un fort degré d’utilisation4, ce dernier étant lié à un effet d’apprentissage plus ou moins long, à une certaine perception de la valeur ajoutée de l’outil, et enfin à une

3 En 2007, 92 % des entreprises de 10 à 19 salariés sont connectées à Internet, contre 77 % en 2003. Par ailleurs,

86 % des entreprises d’au moins 10 salariés connectées disposent de l’ADSL, et 26 % d’une connexion Internet d’au moins 2 Mbits/s (SESSI, 2007)

4 Une étude du SESSI (2006) sur les entreprises industrielles montre que dans seulement 15 % d’entre elles, plus

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facilité d’utilisation. Toutefois, il apparaît clairement que l’expérience d’utilisation du courrier électronique ou le nombre d’années d’expérience d’utilisation de l’outil est positivement corrélée avec la fréquence de son utilisation (Linlin, 1996 ; Limayem, Bergeron et Richard, 1997). Par ailleurs, les utilisateurs deviennent plus compétents dans l’utilisation du courrier électronique (Van den Hooff et alii., 2005), ce qui amène également une évolution forte et rapide dans les usages de l’outil telles que des communications quasi-synchrones (« emails ping-pong » entre des collaborateurs géographiquement proches), une utilisation de l’email en tant qu’outil de sauvegarde des données (Gspace de Google par exemple), voire même une utilisation de l’email en tant qu’outil de travail collaboratif au détriment des groupwares. Certains travaux ont souligné cette évolution en matière de TIC où « bien des logiciels et des interfaces qui n’ont à priori rien de coopératif, sont à l’origine inattendue de rapprochements qui finissent parfois par de réelles coopérations entre individus » (Rowe, 2002).

Au-delà d’un effet de substitution avec certains autres médias qui tend alors à repositionner le courrier électronique comme un média plus « chaud » contrairement à la typologie de la TRM (Panteli, 2002) référence manquante, ce dernier s’inscrit également selon les configurations organisationnelles dans une logique de complémentarité avec d’autres outils (téléphone, intranet, ERP…). En effet, les évolutions des métiers et le décloisonnement des organisations (souvent reflété dans la littérature par le concept « d’entreprise étendue ») amènent de plus en plus les salariés à être multiéquipés et à gérer un portefeuille d’outils de communication. Les individus utilisent souvent plusieurs outils qui s’avèrent donc complémentaires au cours d’une succession de tâches ou d’un processus. On retrouve dans plusieurs travaux un principe de substitution/complémentarité entre les technologies de la communication et l’organisation (Struck, 1995 ; Rowe et Struck, 1999). Certains auteurs traduisent ce phénomène d’empilement des différents médias, qui n’est pas souvent réfléchi, « d’effet millefeuille » (Boukef et Kalika, 2006). Ainsi, la diffusion du courrier électronique dans le portefeuille d’outils de communication des managers n’a pas conduit à une réorganisation de celui-ci, mais à une augmentation des canaux de communication de l’entreprise (Kalika et alii, 2007). Le courrier électronique, par sa simplicité d’utilisation, peut facilement s’intégrer avec d’autres technologies et la question n’est plus tant de savoir quelle technologie utiliser mais plutôt comment coordonner de manière efficace les différentes technologies par rapport aux besoins de l’organisation.

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2. L’impact organisationnel du courrier électronique : une approche empirique qualitative

Notre problématique de recherche sur la productivité des TIC et les effets organisationnels, bien que relativement étudiée dans la littérature, demeure très largement exploratoire compte-tenu des résultats très hétérogènes mis en avant dans les différents travaux, ne serait ce qu’en Sciences de Gestion. Elle se focalise sur un objet technique évolutif (la messagerie électronique) s’inscrivant dans une multitude de contextes très différents les uns des autres, avec de surcroît des facteurs de contingence difficiles à identifier et surtout à mesurer (taille, environnement, maturité de la structure, caractéristiques personnelles des utilisateurs…). Nous avons alors choisi de développer une stratégie de recherche basée exclusivement sur une approche qualitative au travers d’études de cas d’entreprises et de fournisseurs de solutions logicielles (Miles et Huberman, 1991 ; Yin, 1994 ; Wacheux, 1996).

2.1. Les études de cas : présentation des entreprises et analyse de la messagerie électronique

Dans le cadre de notre recherche exploratoire, deux principales sources de données ont été mobilisées parmi lesquelles plusieurs entretiens semi-directifs d’une durée approximative d’une heure auprès de responsables dans les entreprises et une importante collecte de données secondaires auprès de cabinets spécialisés ou de divers organismes d’études spécialisés (Cigref, Novamétrie, l’Idate, IREPP, EBG5…). Nous avons systématiquement recherché à faire les entretiens avec des personnes possédant une vision globale et systémique de l’entreprise, du SI et de l’utilisation du courrier électronique (Directeurs des systèmes d’information - DSI, Directeur Intranet, chefs d’entreprise…). Ces entretiens ont tous été intégralement retranscris et accompagnés d’une note de synthèse présentée en annexe. Afin de mieux comprendre les impacts organisationnels du courrier électronique, nous avons également pris en compte le point de vue des éditeurs de solutions logicielles généralistes et spécialisés en analysant plus précisément leur discours en matière d’argumentaire commercial. Nous avons ensuite procédé à un croisement des données des deux sources pour

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les entretiens afin de faire ressortir les principaux points concernant la dimension organisationnelle du courrier électronique.

Le point de vue des utilisateurs PME « technophile » (directeur associé) TDF (DSI) Groupama (Directeur Intranet) La productivité

Très difficile à évaluer mais un a priori positif qui a tendance à s’atténuer avec les problèmes liés au problème de traitement et aux usages.

Gain de temps, multidiffusion.

Aide dans la formulation de la prise de décision car l’écrit oblige à une réflexion au préalable.

Perte de temps et de productivité du fait du traitement des informations mais l’outil n’est pas à remettre en question.

L’impact organisationnel

Modification des habitudes de travail, substitution partielle au téléphone et moins de réunions entre les différents services.

Substitution partielle au téléphone et au courrier papier.

Nécessite un service continu et régulier dans les échanges commerciaux d’où une nouvelle organisation.

Evolution des métiers et des habitudes de travail

(secrétaires deviennent des assistantes, moins de documentalistes). L’email se substitue en partie aux outils

collaboratifs existants dans l’entreprise.

Les avantages Accélération du mode de communication en interne et en externe.

Média souple et simple à utiliser.

Outil simple et performant intrinsèquement.

Les inconvénients

Le mail peut devenir intrusif et difficile à contrôler.

Perte du contact interpersonnel.

Problème du spamming.

Utilisation du mail pour « régler » ses comptes, accentue certains comportements négatifs. Saturation des boîtes mails avec une utilisation personnelle.

Messagerie surchargée avec le spamming et l’utilisation personnelle.

Outil déstructurant au niveau des habitudes de travail.

Le mail n’est pas intégré dans le droit français.

Ces quelques exemples dans le secteur des services démontrent bien que le débat sur la productivité de la messagerie électronique est loin de conduire à un consensus. Il apparaît, après plusieurs années de diffusion, que cette technologie peut poser certains problèmes qui se situent plus au niveau organisationnel qu’au niveau technique. Le premier point concerne l’évolution des usages de la messagerie, qui, peu à peu, évoluent vers des fonctions qui dépassent le cadre de l’échange de messages et amènent progressivement une substitution avec d’autres outils présents dans l’entreprise ou d’autres modes de communication plus synchrones. Saga et Zmud (1996) évoquent ainsi l’utilisation émergente, à savoir des

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transformations qui relèvent d’un processus de structuration (Desanctis et Poole, 1992) à mesure que les utilisateurs s’approprient la technologie et la mettent en œuvre dans l’exercice quotidien de leurs tâches. Le second point concerne l’encadrement des usages qui devient problématique car les TIC offrent des possibilités de plus grande porosité entre la sphère professionnelle et la sphère privée sans forcément des moyens de contrôle de la part de l’entreprise. Cela peut entraîner des effets négatifs sur la productivité, sans oublier le problème croissant du spamming et des pourriels qui nécessitent des protections techniques de plus en plus élaborées et une réglementation des usages qui touche surtout aux routines organisationnelles.

Le point de vue des fournisseurs de solutions logicielles Microsoft

(Chef de produit Unified Communications, chef de produit Exchange) Akio Software (Directeur commercial) Sight’Up (PDG) La productivité

Pas d’étude en interne sur la productivité mais perception contrastée chez les clients. Demande forte de mener les actions plus rapidement.

Raccourcissement des délais de traitement : Club créateur beauté a amélioré sa productivité de 21 % et Damart de 20 %.

Le temps de traitement des réponses est divisé par 3 pour les clients.

L’impact organisationnel

Intégration de l’email avec les autres outils de l’entreprise.

Utilisation de plus en plus synchrone de l’email. Les gains nets sont liés aux changements de méthodes de travail.

Réorganisation en interne pour déterminer les périmètres des services afin de configurer l’outil Interconnexion du logiciel avec les autres outils et bases de données de l’entreprise.

Création d’une nomenclature des réponses types et d’une politique cohérente dans la communication externe. Interfaçage possible avec les outils de relation client (CRM pour Customer Relationship Management ).

Les avantages

Appropriation facile de l’outil car déjà présent dans la sphère privée des utilisateurs.

Logique de briques selon les besoins du client.

Prise en main facile (0,5 jours de formation) et gains rapides : outil ergonomique et intuitif.

Réponses plus rapides aux clients, possibilité de suivis et d’historiques, élaboration de statistiques.

Appropriation facile car utilisation de l’intelligence artificielle dans le software.

Les

inconvénients/ les freins

Problématique forte de la joignabilité des personnes. Substitution avec des outils présents dans l’entreprise présentant plus de sécurité (ERP, groupware…).

Problème du coût pour les PME (45 à 50 K€). Paramétrage du logiciel chez le client. Maturité de l’entreprise en matière de TIC. Changement organisationnel et modification des habitudes de travail chez les clients.

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On constate que l’argumentaire commercial lié à la vente de solutions logicielles de gestion des emails est très largement centré sur la productivité de l’entreprise, notamment au travers de la réduction de délais des traitements des échanges, qu’ils soient internes ou externes. Toutefois, la mise en place des solutions de messagerie se heurte plus à des freins organisationnels importants que financiers. Ces freins, même s’ils sont connus des éditeurs, sont visiblement souvent sous-estimés par leurs clients, même pour un média aussi simple. Cela met bien en évidence le lien entre la productivité et l’organisation de l’entreprise, or la réflexion chez les acheteurs ou clients se limite fréquemment au premier point. Nous allons ainsi tenter de proposer quelques enseignements managériaux de ce travail, en confrontant la littérature et le discours des acteurs afin de faire ressortir les points saillants.

2.2. Synthèse des résultats et apport managérial

L’un des premiers points mis en avant lors des entretiens et dans la littérature concerne la mesure de la productivité liée au TIC, et, dans notre cas, au courrier électronique, avec de nombreux contre-sens. D’une part, il serait utile dans les études empiriques menées de bien distinguer le niveau d’équipement du niveau d’utilisation, les deux n’étant pas forcément liés, ce qui peut amener parfois des conclusions très différentes6. La mise à disposition de TIC n’engendre pas systématiquement un fort degré d’utilisation, ce qui peut entraîner des biais dans les indicateurs et les mesures réalisées. D’autre part, l’hypothèse sous-jacente à de nombreuses réflexions est que plus on utilise la technologie, plus cela s’avère bénéfique pour l’organisation en terme de productivité. Or, il convient de bien distinguer les cas car, dans certaines configurations, bien utiliser la technologie, c’est l’utiliser à bon escient, ce qui sous-entend même parfois l’utiliser peu, comme nous l’a confirmé le directeur Intranet de Groupama. Le cas de la messagerie électronique est emblématique puisque la volumétrie des messages échangés peut amener à une sous-productivité étant donné la perte de temps engendrée par le traitement des informations7. Enfin, ces dernières ne s’avèrent pas toutes pertinentes mais les individus doivent traiter le contenu du message qui est un bien d’expérience dont la valeur ne se découvre qu’avec la lecture. Il est donc nécessaire de penser des solutions techniques et organisationnelles qui se situent plutôt avant l’envoi des messages.

6 On peut citer la célèbre phrase du prix Nobel d’économie 1987 Robert Solow: « On voit des ordinateurs

partout, sauf dans les statistiques de productivité »

7 Une étude interne chez Groupama (32 000 salariés) montre qu’en moyenne les salariés recevaient 30 messages

par jour (dont certains relevaient de la sphère personnelle) avec 90 minutes pour la lecture et le traitement des informations

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Le second élément dans la réflexion concerne le cloisonnement des réflexions entre la notion de productivité et celle de l’organisation, voir même du métier de l’entreprise. Ainsi, avant même de travailler sur la notion de productivité qui peut conduire à des opérations d’externalisation ou de off-shoring du point de vue des outils technologiques, il est fondamental de savoir quel est le métier de l’entreprise et de surtout pouvoir le décrire de manière précise (analyse des chaînes de production et de création de valeur). Concernant l’utilisation du courrier électronique, la véritable problématique dans l’entreprise est de savoir comment sont échangées les informations et quels sont les circuits existants, ces derniers pouvant être différents des canaux de transmission des informations découlant de l’organigramme. Par ailleurs, la plupart des organisations oublient parfois également d’aller jusqu’au bout de la logique en menant en parallèle une réflexion sur l’utilisation des gains de productivité en interne (évolution des salariés vers d’autres fonctions comme chez Lasminute où les administratifs sont devenus des commerciaux…). Groupama s’est ainsi posé la question de la réaffectation des gains de productivité suite à l’électronisation de la gestion documentaire afin d’éviter le syndrome « machine à café » ou d’apporter un confort supplémentaire aux salariés sans que l’entreprise en soit bénéficiaire à terme. Nos entretiens ont aussi mis en évidence l’impérieuse nécessité pour les entreprises d’obtenir des gains de productivité à très court terme une fois les TIC diffusées, ce qui peut être difficile étant donné que les outils électroniques impliquent une évolution des routines organisationnelles.

Par ailleurs, la question des usages et des utilisateurs doit également être prise en compte en cherchant à identifier des comportements types pour élaborer une typologie en interne qui doit permettre de déterminer des actions correctives et/ou de formations. Il n’existe pas de « fracture numérique » au sein des entreprises (entre les utilisateurs et les non-utilisateurs) mais bien une « fracture des usages » entre différentes manières d’utiliser les TIC. Les directeurs des systèmes d’information et responsables de réseaux électroniques doivent alors travailler sur des outils permettant de partager des informations avec des strates d’utilisateurs qui fonctionnement comme des communautés de pratiques dans l’entreprise. Autre chantier à venir souvent sous-estimé, les entreprises devront également prendre en compte de plus en plus les obligations juridiques qui se greffent sur ces outils8 et mener une vraie réflexion sur les systèmes d’incitation pour bien veiller à l’utilisation du courrier électronique (rédaction de

8 Par exemple, depuis la loi du 13 Mars 2000, l’écrit électronique a la même valeur juridique que le support

papier sous deux conditions : l’entreprise doit assurer l’intégrité du message et avoir une certitude sur l’émetteur du message. Ces deux conditions dans les faits s’avèrent très difficiles à réaliser d’où une substitution atténuée entre les deux médias

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chartes d’utilisateurs simples et signées par les salariés annexées au règlement intérieur pour faire le lien avec le droit social, des règles de management interne9, une articulation pensée entre les différents outils une fois la connectivité établie, une réflexion sur l’outil le plus approprié à l’organisation qui n’est pas forcément le meilleur du point du vue technique…).

Enfin, du point de vue des éditeurs de solutions logicielles, il est opportun à ce stade de maturité de mener une profonde réflexion sur « l’outil courrier électronique » et ses fonctionnalités. Longtemps pensé et perçu comme un outil de communication asynchrone entre plusieurs acteurs, les développements récents en termes d’appropriation et d’usages doivent amener les éditeurs à repenser l’outil au travers de deux logiques. La première est le déplacement d’une concurrence sur les dominants design (Abernathy et Utterback, 1978 ; Utterback, 1994) à une concurrence sur l’identité même de l’objet (évolution vers une fonctionnalité de sauvegarde et de gestion des données, outil de text mining, de codification des connaissances…), le tout étant intégré dans une logique systémique avec des acteurs spécialisés sur des domaines connexes. Cette évolution est également la conséquence que de plus en plus d’applications métiers s’appuient sur la messagerie, l’email devenant alors par exemple un portail d’information pour des applications de CRM ou des ERP. La seconde, que l’on pourrait qualifier de learning from using, est une meilleure intégration des besoins et des évolutions souhaitées ou mises en place par les lead users (Von Hippel, 1986), ces derniers s’étant appropriés l’outil au travers d’usages non forcément prévus initialement par les concepteurs. Par ailleurs, la littérature souligne que l’engagement des utilisateurs dans le processus de développement de l’application est un facteur de succès. La messagerie électronique pourrait ainsi devenir un artéfact composé de plusieurs modules, l’éditeur définissant les principales règles en tant qu’architecte et les utilisateurs rassemblés au sein de plusieurs communautés développant les sous-modules axés sur des fonctionnalités particulières.

9 A titre d’exemples, les managers chez Microsoft ne doivent pas envoyer d’emails après 23H00 à leurs

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Conclusion

Depuis plusieurs années, de nombreuses recherches tendent à démontrer que l’utilisation des TIC est un facteur de compétitivité pour les entreprises, d’autant plus lorsque l’organisation industrielle du secteur s’oriente vers des logiques réticulaires et de désintégration verticale. L’un des fondements de la diffusion des TIC repose ainsi sur une recherche constante d’amélioration de la productivité. Or, notre recherche souligne que les gains de productivité se font sur la transformation des tâches plus que sur l’automatisation des tâches en elles mêmes. Il est donc fondamental pour les décideurs de mener simultanément une réflexion sur les métiers et l’organisation de l’entreprise, sous peine de ne pas atteindre les résultats escomptés. Plusieurs recherches au niveau macro-économique semblent d’ailleurs démontrer que le changement organisationnel constitue un déterminant majeur dans la réalisation de gains de compétitivité, notamment au travers de la productivité des facteurs de production (Hitt et Brynjolfsson, 1995 ; Gollac et alii, 2000).

Le déploiement des TIC n’entraîne pas systématiquement une amélioration de la productivité dans les organisations. Cette recherche, qui comporte des limites intrinsèques à la méthodologie qualitative, doit donc être approfondie afin de déterminer quels sont les points sensibles en matière d’appropriation (et de satisfaction) par les utilisateurs, et, surtout ceux qui concernent aussi l’innovation dans les usages au fil du temps. Il serait ainsi pertinent de mener une étude longitudinale et de nature plus quantitative auprès de populations cibles d’entreprises quant à la diffusion et l’utilisation de la messagerie électronique, en distinguant sans doute les PME et les groupes. L’objectif est par ailleurs sur le plan académique de cerner plus précisément le passage de l’impact individuel à l’impact organisationnel, ainsi que les variables dépendantes et indépendantes concourant au succès des TIC en termes d’impact sur la productivité (engagement des utilisateurs, rôle des décideurs, culture de l’entreprise…).

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Bibliographie

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Annexe : synthèse des entretiens et des cas d’entreprises

Le point de vue des utilisateurs

L’utilisation de l’email par un cadre dirigeant dans une PME « technophile »

La PME compte environ 180 personnes avec 3 structures dont 2 en province et elle est spécialisée dans les journaux électroniques et la création de services d’hébergement de sites Internet. Notre entretien avec l’un des directeurs associés souligne qu’il considère l’email comme son outil principal de travail. Il a une vision très positive de l’email (accélération de l’interaction entre les acteurs et du mode de communication) malgré une réelle conscience des inconvénients au niveau des usages et de la sécurité des données. D’un point de vue organisationnel en interne, l’email s’est substitué en partie au téléphone, qui est devenu un moyen de communication réservé à « l’hyper-urgent », et la fréquence des réunions s’est également réduite. L’entreprise a mis en place des procédures de travail sur l’intranet à l’aide de tutoriels et elle a créé également une charte des bonnes pratiques axée sur deux points : l’utilisation du poste de travail et les règles de bienséance quant à l’utilisation de l’email en interne et en externe.

Entretien semi-directif réalisé en Février 2007 avec le directeur associé de la PME

L’utilisation de l’email dans un grand groupe : TDF

TDF est un groupe prestataire de services pour les opérateurs télécom qui compte plus de 3 000 salariés répartis sur plusieurs sites géographiques. Le constat réalisé est que le courrier électronique se substitue en partie à deux autres canaux de communication que sont le courrier papier et le téléphone. Ce phénomène s’explique par des avantages « perçus » comme un gain de temps, une possibilité de transmission de messages à plusieurs personnes en mode asynchrone et un « traitement coopératif du texte » qui fait de l’email un outil de travail et de partage de documents. Il permet également selon l’interviewé de mieux formuler les points de vue dans la prise de décision.

Toutefois, le courrier électronique induit également des effets pervers. C’est un outil qui a tendance à être utilisé pendant des conflits entre plusieurs personnes car il y a moins de risque que dans une relation face à face. La relation écrite est différente de celle à l’oral et certaines personnes « se réfugient dans l’email pour régler des comptes », phénomène accentué par la mise en copie de plusieurs personnes qui jouent un rôle de « témoin ». Dans les relations avec des tiers (clients, prestataires…), le courrier électronique nécessite un service continu et à haute disponibilité, ce qui n’est pas sans poser des problèmes organisationnels en interne.

Entretien semi-directif réalisé en Mars 2007 avec le directeur des systèmes d’information de TDF

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L’utilisation de l’email dans un grand groupe : Groupama

Groupama est un groupe important dans l’assurance avec 32 000 salariés. La messagerie électronique a été généralisée à l’ensemble des salariés depuis 2000 dans une optique de trouver des gains de productivité dans les services. L’email est considéré par l’interviewé comme l’un des meilleurs outils de communication à tel point qu’il entre même en concurrence avec les outils de travail collaboratif. D’un point de vue organisationnel, la diffusion et l’appropriation des TIC participent à l’évolution des métiers au sein de l’entreprise. Par exemple, les secrétaires sont devenues des assistantes et l’entreprise a réduit son nombre de documentalistes.

Toutefois, le courrier électronique ne possède pas que des avantages. Chez Groupama, une étude a été réalisée sur les usages de l’email montrant des effets pervers. Le premier relève du temps de traitement des informations. Ainsi, en moyenne les salariés recevaient 30 messages (dont certains relevaient de la sphère personnelle) avec 90 minutes pour la lecture et le traitement des informations. Pour certains managers, l’email était le seul outil d’organisation et certains salariés étaient incapables de faire une gestion et une hiérarchisation de leurs emails, phénomène accentué par une baisse de la qualité des notes et des mémos. Au final, l’email possède un effet déstructurant sur l’organisation. Entretien semi-directif réalisé le 18/07/2007 avec le Directeur Intranet de Groupama

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Le point de vue des fournisseurs de solutions logicielles

Le point de vue d’un éditeur de solutions logicielles : Microsoft

Le chef de produit Unified Communications de Microsoft France souligne que la tendance globale du marché est d’intégrer l’email avec les autres outils de communication et de travail de l’entreprise, avec un réel souci des entreprises de faire en sorte que l’accès et l’utilisation restent simples. L’email devient aussi parallèlement un outil de plus en plus synchrone car il permet le partage d’applications en temps réel. Dans certains cas, certaines solutions centrées sur le courrier électronique (exemple de Business Contact Manager) peuvent satisfaire les besoins des PME et leur éviter de faire l’acquisition d’outils de relation client (CRM).

L’interviewé constate également que cette évolution est liée à la démocratisation des outils partagés dans la sphère privée et une demande de transfert de ces outils par les utilisateurs dans les entreprises. On peut distinguer ainsi dans les entreprises des « power users » qui sont des utilisateurs early adopters de nouvelles technologies.

Entretien semi-directif réalisé en Février 2007 avec le chef de produit Unified Communications de Microsoft France

L’exemple d’un prestataire de service d’emailing : Sight’up

L’entreprise de 4 personnes vient du monde de l’intelligence artificielle. Elle a développé en interne une solution technologique de gestion des emails baptisée Mailrelatio dont l’achat se justifie souvent au-delà d’une centaine d’émails reçus par jours. Les clients sont présents dans différents secteurs d’activités comme la banque, l’e-commerce, la radio… Le produit permet aux entreprises de répondre à trois problématiques importantes : la rapidité du traitement, la cohérence des réponses quelque soit le canal de communication et enfin la supervision en interne des échanges.

Mailrelatio est capable de fédérer les différents canaux de communication de l’entreprise (fax, téléphone…), et de s’interfacer avec les autres outils existants notamment ceux de gestion de la relation client (CRM). Ainsi, les clients de Sight-up favorisent de plus en plus le contact par le courrier électronique plutôt que le contact par téléphone dans un souci d’efficacité organisationnelle. Le retour d’expérience des clients est que le délai de traitement des réponses est divisé par 3. Toutefois, le principal frein pour les clients de Sight’up est la gestion du changement organisationnel en interne car l’outil nécessite de déterminer le périmètre d’action de chaque personne/service.

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L’exemple d’un prestataire de service d’emailing : Akio Software

Akio est un éditeur de solutions logicielles de gestion multicanal (communication écrite et gestion des échanges) avec un cœur d’offre autours des emails entrants/sortants. L’entreprise propose des briques logicielles selon la volumétrie des emails entrants via les sites Internet de ses clients qui sont aussi bien de grands comptes que de petites PME en passant parfois par des TPE dans des secteurs très variés (transport, assurance, distribution de biens culturels…).

L’argumentaire de vente par rapport aux clients potentiels de l’éditeur repose en grande partie sur l’amélioration de la productivité de la gestion des emails entrants (qui se mesure comme étant le raccourcissement des délais de traitements) et sur l’apprentissage très rapide en interne si le paramétrage du software est bien réalisé. Par exemple, l’éditeur estime que sa solution logicielle a permis rapidement au Club des Créateurs de Beauté d’améliorer sa productivité de 21 % et celle de Damart de 20 %. Le coût de la solution pour une gestion de 300 à 400 emails par jour est de 45 000 à 50 000 € (formation des utilisateurs comprise). Par ailleurs, l’une des évolutions de l’offre de service concerne l’interconnexion du software de gestion des emails avec les outils de gestion de la relation client (CRM) présents chez les clients

Entretien semi-directif réalisé en Octore 2006 avec le directeur commercial d’Akio Software

Références

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