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Placements, déplacements et négociations de l’étranger. Les hôtels meublés de Paris : des espaces de projection et de compensation identitaire

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et de compensation identitaire

Céline Barrere

To cite this version:

Céline Barrere. Placements, déplacements et négociations de l’étranger. Les hôtels meublés de Paris :

des espaces de projection et de compensation identitaire. Lieux Communs - Les Cahiers du LAUA,

LAUA (Langages, Actions Urbaines, Altérités - Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Nantes),

2009, L’altérité, entre condition urbaine et condition du monde, pp.33-53. �hal-03216161�

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Comment concevoir et éprouver l’altérité dans les espaces urbains contempo-rains ? Comment se manifestent des constructions composites d’identités mais aussi comment les acteurs publics et de la “société civile” les promeuvent ou les orientent ? Ces questions sont au cœur du dossier de ce numéro de la revue qui a choisi d’aborder la question de l’altérité au croisement de deux lignes d’influence : l’urbain et le monde.

Cette entrée permet de questionner, via des terrains aussi variés que des associations de migrants, des hôtels meublés parisiens, les espaces publics du quartier Barbès à Paris, les sociabilités observables à Miami ou encore un fragment spatial d’Ulaan-Baatar, les enjeux et degrés de réalité du cosmopoli-tisme, de l’orchestration de la diversité urbaine, des regards que l’on porte sur les multitudes. Principalement d’ordre géographique, sociologique et anthro-pologique, les textes comportent tous une dimension descriptive, qualité déci-sive pour entrer en cette difficile matière. Le questionnement est aussi le fait d’artistes, photographes ou plasticiens, qui parviennent ici à exprimer l’enche-vêtrement des conditions urbaines et du monde. L’ensemble des notes de lecture ici regroupées est directement en lien avec la thématique du numéro.

LIEUX COMMUNS

LES CAHIERS DU LAUA

ISSN 1779-5885 12 EUROS L ’A L T É R IT É , E N T R E C O N D IT IO N U R B A IN E E T C O N D IT IO N D U M O N D E

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LIEUX COMMUNS

LES CAHIERS DU LAUA

ÉCOLE NATIONALE SUPÉRIEURE D’ARCHITECTURE DE NANTES

L’ALTÉRITÉ, ENTRE CONDITION URBAINE

ET CONDITION DU MONDE

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“Depuis quelque temps, j’ai la vie d’un arbre arraché à ses racines. Desséché et exposé dans une vitrine. Je ne sens plus la terre. Je suis orphelin. Orphelin d’une terre et d’une forêt.

Écoutez-moi :

Ma chambre est une malle où je dépose mes économies et ma solitude”

“Orphelin d’une terre et d’une forêt”, “arbre arraché à ses racines”, telle est l’expérience du migrant pour Tahar Ben Jelloun : l’arrachement à un ailleurs et le confinement dans l’ici. L’expérience migrante, sans cesse réactivée par les jeux et les tensions accrus entre échelle locale et échelle mondiale. Dans ce contexte, il importe de s’interroger sur l’existence des territoires migrants dans nos espaces et nos sociétés urbaines occidentales, c’est-à-dire sur les mécanismes et les formes de revendication, d’appropriation et d’identification de l’espace urbain par les migrants. Quels sont la place, le statut et la signification de ces lieux habités en grand nombre par des migrants et des étrangers, et identifiés comme tels ? En quoi et comment participent-ils de positionnements et de repositionnements identitaires et culturels ?

Depuis quelques années, de dramatiques et média-tiques événements1ont contribué à remettre les

hôtels meublés, en tant qu’espaces précaires d’ac-cueil et de vie des migrants, sur le devant de la scène urbaine, sociale et politique, dans une perspective

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PLACEMENTS, DÉPLACEMENTS

ET NÉGOCIATIONS DE L’ÉTRANGER.

LES HÔTELS MEUBLÉS DE PARIS : DES ESPACES

DE PROJECTION ET DE COMPENSATION IDENTITAIRE

Céline Barrère

Post-doctorante, CRH LOUEST FRE 3222, École d’Architecture Paris-Val-de-Seine

1Les incendies meurtriers d’hôtels meublés parisiens entre

2005 et 2006, notamment celui du Paris Opéra qui a fait 25 morts ainsi que les nombreux reportages qui ont suivi sur le thème des marchands de sommeil et de l’habitat indigne, ont replacé les hôtels meublés dans la lumière alors que depuis les années 1960 ils avaient été largement occultés.

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de dénonciation de l’habitat indigne et d’inflation des stigmates. En effet, les hôtels meublés véhiculent tout un imaginaire fortement négatif lié aux notions d’exploitation, de précarité et de promiscuité. Ils sont le plus souvent réduits à n’être qu’une figure repoussoir tant de l’imaginaire du migrant que de celui de la société d’accueil, figure repoussoir qui non seulement le condamne, mais le pousse paradoxalement vers l’oubli. À l’autre extrémité du spectre imaginaire, ils peuvent être l’objet d’une mythification de l’expérience, d’une idéalisation d’un antan fantasmé qui dévie vers la légende ou la nostalgie, elles aussi réductrices, à l’exemple de l’Hôtel du Nord d’Eugène Dabit, espace réel et fictionnel.

Entre ces deux pôles extrêmes, au-delà des figures proposées – ou imposées ? – à l’opinion publique qui sont loin de l’épuiser, toute une gamme de situations et de représentations intermédiaires existe qu’il faut répertorier et analyser. En effet, les hôtels meublés sont porteurs d’une multiplicité de récits, produisent des fictions et reposent sur une imbrication des imaginaires migratoires. Ces médiations constituent un moment très spécifique du processus de construction sociale des territoires urbains. Parmi cette hétérogénéité de récits produits par les hôtels, nous nous appuierons sur l’espace testimonial de l’inscription littéraire2, révélant une existence

long-temps invisible et enfouie, sous forme de récits collectifs et de parcours individuels. L’écriture migratoire comme celle des hôtels meublés n’est jamais neutre, mais relève d’un discours engagé, soit dans le sens d’une dénonciation soit dans l’expression d’une douleur. Bien qu’appartenant à des genres littéraires bien identifiés et différents, ces récits constituent, néanmoins, un corpus cohérent dans la mesure où ils placent tous le “je” et l’intime de l’expérience au cœur de leur discours. Le parcours migratoire y est toujours rendu de l’intérieur avec toutes les distorsions, les discontinuités, les jeux de positions et de regards – écrire dans, sur, et à partir de l’hôtel meublé – que cela suppose. Bien plus, ces espaces polémiques réverbèrent des discours marginalisés, des récits de “vies perdues”, d’histoires passées et présentes, où les temporalités se chevauchent, en des trajectoires de cassures et de fêlures, où sont repensées les questions d’intimité, du rapport à l’autre et d’identité.

En partant de la tension inhérente à l’hôtel meublé entre un étiquetage négatif et la possibilité d’être un lieu ressource pour les migrants, nous allons considérer le rôle spécifique de l’hôtel meublé : à la fois son anatomie, son fonctionnement interne et son fonctionnement externe. L’hôtel meublé y fonctionnerait comme une matrice de l’imaginaire, un principe narratif, un champ de bataille de 2Cet article est issu d’une recherche en cours intitulée

“Les hôtels meublés : quels lieux de mémoire de l’immigration?”, sous la direction de Claire Lévy-Vroelant et Céline Barrère, dans le cadre du programme de la Mission à l’Ethnologie du Ministère de la Culture, sur les “lieux de mémoire de l’immigration”. Cette recherche entend documenter ces lieux de vie que sont et ont été les hôtels meublés pour les immigrés, afin de saisir les conditions d’émergence et de formalisation d’une mémoire migrante. Pour cela, nous avons croisé deux espaces testimoniaux : la verbalisation des acteurs des hôtels meublés par des entretiens qualitatifs répétés et l’inscription littéraire.

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l’identité migrante où s’opèrent des positionnements et des repositionnements de son expérience et de sa mémoire. Du stigmate au contre-stigmate, il figure en quelque sorte un “traceur” ordinaire d’une identité migrante fragmentée et en construction. Dans un premier temps, nous montrerons que l’hôtel meublé n’est pas un simple observateur muet, mais un système matériel, social et symbolique de relations. Dans un second temps, l’objet et le lieu “hôtel meublé”, pris dans les logiques inverses du transit et de l’installation, nous permettront de mettre en perspective les conditions d’accueil de l’étranger, la notion d’hospitalité élargie ou restreinte. Enfin, dans un troisième temps, nous verrons comment il s’affirme comme un espace de “mises en relations” (Glissant, É., 1990 et 1995), un espace d’hybridation au sens de P. Chamoiseau, c’est-à-dire un foyer de résistance, de transfert et de compensation (Bosjen, H., 2002, p. 236-238). LE DOUBLE CORPS DES HÔTELS MEUBLÉS

La structure de l’hôtel meublé est irréductible à un simple édifice construit, mais se compose d’un corps double – architectural et social, ainsi que l’a identifié Bruce Bégout à propos du motel américain (Bégout,B., 2003, p. 13-14). L’hôtel est, alors, un système chargé de résonances sociales et mythiques qui nous renseignent sur les caractéristiques passés et présentes de l’espace urbain, de la présence migrante en regard de la société parisienne. Espace parlant, l’hôtel meublé demeure un monde clos, le plus souvent ignoré ou oublié de la société française, un espace refoulé qui expose les envers de l’urbain comme le refoulé vis-à-vis de la présence des migrants.

L’espace historique d’inscription de l’autre

Lieux privilégiés d’installation de “l’étranger” dans la ville, ils se sont développés, diversifiés et adaptés à la ville jusqu’à nos jours selon des rythmes plus ou moins soutenus et avec des niveaux différents d’intégration urbaine. En quelque sorte, ils ont accompagné et continuent d’accompagner les phases de tensions, d’expansion ou de repli de l’urbain en contribuant à réguler les flux migratoires, les circulations et les mouvements de peuplement3.

Ils se présentent comme un secteur plastique et protéiforme du logement populaire.

En diachronie, leur fonction a considérablement évolué. D’une fonction initiale de transit, ils se définissent, de plus en plus, par une sédentarité

subie. Ils occupent toujours une position charnière dans les parcours migrants comme dans le parc de logements, car ils sont appelés à pallier les manques, les déséquilibres entre l’offre et la demande de logements, ce aussi bien dans le

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3Dans leur étude circonstanciée sur la formation et

l’évolution des hôtels meublés de Paris, l’historien Alain Faure et la sociologue Claire Lévy-Vroélant ont pu déterminer quatre âges de l’hôtel meublé des années 1880 à nos jours, marqués par deux tendances – la prolifération et le reflux –, entraînant, à chaque fois, une adaptation et une recomposition du secteur. Cf. Faure A., Lévy-Vroelant, C., (2007)

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secteur privé que dans le secteur social. De plus, il s’agit d’un

habitat fragile, en voie de disparition – parfois de démolition –, soumis à la concurrence et à la transformation, à la modernisation du secteur hôtelier – franchises et chaînes à bas coût, hôtels-résidences –, à la pression immobilière ou encore à la réglementation administrative sur la sécurité et l’hygiène publique.

Par ailleurs, l’hôtel se distingue clairement d’autres modes d’habitat réservés aux migrants. À la différence du foyer ou de la cité de transit, il ne s’agit nullement d’un mode d’hébergement institutionnalisé ou subventionné par l’État ou une col-lectivité locale. Au contraire de l’extrême visibilité et densité du bidonville, l’hôtel meublé n’appartient pas à un moment historique délimité et ne relève pas du régime de l’exceptionnel, mais est un signe ordinaire, voué aux silences et à l’oubli.

Les replis cachés de l’urbain

Le schéma de localisation des hôtels est complexe. À l’inverse des motels américains confinés aux périphéries urbaines, les hôtels parisiens, eux, sont

Rue des Moines, 17earrondissement, Paris.

Photographie: Céline Barrère.

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disséminés dans l’ensemble des arrondissements et des quartiers de Paris. Ils figurent une sorte de marge intérieure omniprésente. Pourtant, depuis les années 1960, les transformations urbaines comme les modifications internes au secteur de l’hôtellerie – et surtout de la tranche la plus populaire, les hôtels de préfecture – ont entraîné un glissement de leur implantation et de leur répartition à Paris4. Dans un contexte généralisé de diminution

du parc d’hôtels meublés, il s’opère une redistri-bution urbaine importante. Ainsi, la géographie des hôtels meublés parisiens se déplace et se concentre dans les arrondissements périphériques (Faure, A., Lévy-Vroélant, C., 2007, p. 274-283).

Cette périphérisation géographique des hôtels meublés renforce leur situation déjà marginale au regard du logement et du développement urbain. L’imagerie négative qu’il véhicule est accrue du fait

de l’association quasi systématique avec des quartiers dégradés et paupérisés. Ils entrent de plain-pied dans une topographie de la relégation (Pinçonnat, C., 2007, p. 287-290), une géographie des espaces invisibles au même titre que les cités de transit, les bidonvilles, etc. Paris y apparaît comme une ville lointaine, formée de petits mondes clos qui ne communiquent pas. La distance n’est pas métrique ni topographique, mais symbolique : il s’agit d’une mise à distance volontaire, d’un pacte d’opacité intégré par les migrants comme par la société migrante dont l’hôtel est partie prenante.

Des formes discrètes et banales

Dans le paysage urbain, les hôtels meublés se distinguent peu des édifices alentours de par leurs formes ou leurs styles et se fondent, voire disparaissent, dans le parcellaire. À l’inverse des hôtels franchisés, ils n’affichent pas un style unique et uniforme à visée commerciale, dont chaque élément est codifié, recon-naissable et reproductible à l’infini, ici ou ailleurs. Signes discrets et quotidiens, ils sont les témoins peu remarquables et remarqués du développement urbain et s’affirment comme une présence ancrée dans le tissu urbain. À ce titre, ils n’existent que sous le régime du minimal, de la dégradation intériorisée et de la réduction vitale. Nous ne sommes pas dans le registre de la monumentalité ou de l’ostensible, mais dans celui de l’ordinaire et du précaire. Les descriptions liminaires des hôtels se réduisent à un simple constat de fait, sans détail ni fioriture, listant brièvement les caractéristiques principales du lieu : nombre d’étages, de chambres, état uniforme et dégradé de la façade qui retentit sur celui des habitants. Le tout, généralement, sur un ton plus que dépréciateur,

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4Depuis les années 1960-1970, les hôtels meublés se

concentrent principalement dans les 11e, 17e, 18e, 19eet 20e

arrondissements. Il s’agit principalement des arrondis-sements populaires, ceux qui concentrent le plus grand nombre d’ouvriers et de populations précaires, ceux dont les profils sociologiques se sont peu transformés. À l’inverse, les arrondissements centraux – 1er, 3e, 4e, et 5e

arrondissements –, qui connaissent de profondes transfor-mations urbanistiques et sociologiques, voient disparaître dans une large proportion leurs hôtels meublés. En cela, l’on peut dire que la présence ou non d’hôtels meublés devient un indice de rénovation urbaine et de gentrification des quartiers parisiens.

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à l’image de cette description lapidaire d’Orwell parlant d’ “une sorte de taupinière sombre et délabrée abritant sur cinq étages quarante chambres délimitées par des cloisons de bois” (Orwell, G., 1933, p. 12-13). De prime abord, ils se signalent par des éléments officiels et obligatoires de la nomenclature hôtelière (Faure, A., Lévy-Vroélant, C., 2007, p. 61-66) – enseigne, plaque, bureau d’accueil –, auxquels s’ajoutent des signes vernaculaires, des indices d’une occupation et d’une tenta-tive d’appropriation des lieux, tels que des plantes, des sacs de nourriture attachés aux montants des balcons, des cages à oiseaux, des rideaux de couleurs différentes aux fenêtres. Marqué par l’exiguïté et la précarité, le dispositif physique de l’hôtel entraîne des repositionnements dans les rapports à soi et aux autres, des renégociations de l’intime et du public, de leurs espaces et de leurs codes explicites et tacites.

Un système d’acteurs conflictuel

Les formes banales de l’hôtel, distribuées entre extérieur et intérieur, parties communes – salles du café, foyer, etc. –, parties privées – chambres – et espaces intermédiaires – seuil, couloirs, escaliers, etc. – sont le pivot d’un système et d’un jeu d’acteurs spécifiques entre deux groupes – les logeurs-hôteliers et les logés – amenés à interagir, à cohabiter de manière imposée et/ou subie. La population des hôtels est loin d’être homogène même si elle se rassemble autour d’une commune précarité et fragilité, de hiatus dans un parcours rési-dentiel et social. Il n’existe pas un seul profil type des résidents des hôtels meublés. Ils concentrent une mosaïque de situations dans un espace restreint aussi bien en termes d’âges que de genres, d’origines, de compositions familiales, de modes de financement. Du fait de cette grande hétérogénéité, les relations y sont contraintes, placées sous les régimes conjoints du provisoire et de la tension. Elles relèvent d’une obligation de vivre ensemble, dans une proximité extrême, où l’intimité est un défi constant. Ce collectif contraint, à géométrie toujours variable – entre renouvellement rapide et installation prolongée –, en équilibre instable, toujours sur le fil du rasoir, ménage une place importante aux conflits – larvés ou/et ouverts – et aux stratégies de pacification autour de mécanismes de frottement, de frôlement et d’évitement.

La clientèle était en perpétuel renouvellement. Elle se composait en majorité d’étrangers qui débarquaient sans bagages, restaient une semaine et disparaissaient comme ils étaient venus. Ces gens exerçaient les activités les plus diverses : cordonniers, maçons, tailleurs de pierre, terrassiers, étudiants, prostituées, chiffonniers… Certains vivaient dans un incroyable dénuement […].

George Orwell, Dans la dèche à Paris et à Londres

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Le second pôle est celui des gérants et des hôteliers, figures omniprésentes et ambiguës de l’hôtel, personnages incontournables au quotidien. Maître des lieux, l’hôtelier est un personnage de frictions, basé sur la combinaison d’aspects contradictoires et d’oppositions jamais résolues. La relation des logés aux logeurs repose sur un couple ressentiment-affinité, dénonciation-compréhension, revendication-solidarité. La plupart du temps, l’hôtelier ou le gérant est un voisin au même titre que les autres locataires, car il réside sur place. Il est en permanence au contact de ses logés, formant une communauté complexe aux équilibres fragiles. En effet, l’hôtelier occupe plusieurs rôles successifs : à la fois garant de la paix sociale dans son hôtel, exerçant, donc, un contrôle plus ou moins contraignant sur ses locataires et occupant une position dominante. Par ailleurs, l’hôtelier est amené, de plus en plus souvent, à remplir une fonction sociale auprès de sa clientèle pour qui l’hôtel devient le garant d’une certaine stabilité et sécurité dans la précarité5. Face à la détresse sociale,

l’hôtelier ménage en quelque sorte un refuge, à la fois réel et fantasmé.

Le gérant, un homme venu comme eux de la Contrée, ayant buté dans des labyrinthes, enrichi par obstination et vite oublieux des temps jadis où il leur ressemblait comme deux gouttes de café noir qu’ils font donc réchauffer en cachette.

Rachid Boudjedra, Topographie idéale pour une agression caractérisée

Les relations sociales y sont fondées sur des ambivalences, sur des systèmes d’opposition explicites ou latents comme sur un rapport proximité/distance complexe entre le “patron” et ses locataires. La relation de ressentiment et compréhension est forte lorsque le logeur est comme son client un immigré, qui plus est de la même origine. L’hôtelier n’y apparaît pas comme un migrant qui a réussi, qui s’est intégré à la société d’accueil, mais comme un relais du pays d’origine dont le migrant a besoin mais sur lequel il bute. L’anatomie première de l’hôtel meublé est celle de la précarité dans ses différentes dimensions – économique, sociale, psychologique – et du manque qui sont également les premiers éléments constitutifs de l’accueil réservé à l’étranger.

ENTRE MISÈRE ET HOSPITALITÉ URBAINE

Paradoxe d’une première inscription d’une réalité invisible, l’hôtel meublé est un espace-limite qui concentre et devient le catalyseur de l’expérience migrante, tant sur le plan collectif qu’individuel. Les premières étapes de cette inscription

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5Sur les modalités de cohabitation dans les hôtels meublés,

nous renvoyons à la thèse de Florent Hérouard qui analyse les conditions de la coexistence dans ces espaces de la pré-carité en insistant particulièrement sur les possibilités ou impossibilités de la reconstitution d’un chez-soi, sur les stratégies d’appropriations et sur les conséquences des stigmates de l’habitat à l’hôtel. Cf. Hérouard, Fl., 2 déc. 2008, Habiter l’hôtel : un reflet de la précarité dans les agglomérations de Caen, Lisieux et Rouen, Université Paris-Est, Institut d’Urbanisme de Paris.

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investissent son versant négatif : celui de la désorientation et de la souffrance des immigrés. Plus qu’un désenchantement, les témoignages portent la marque d’une désillusion. Au rêve propagé par les récits de ceux qui sont revenus au pays succède le cauchemar des nouveaux arrivés. L’“aventure ambigüe” (Kané, C. H., 1961) à Paris se déroule entre surveillance et répression, entre mépris et indif-férence. Dès lors, l’hôtel meublé fait figure de déversoir des humiliations et des frustrations, des perceptions négatives plus ou moins intériorisées par les migrants ainsi que de miroir des discours xénophobes, d’une répulsion mêlée de peur (Blanchard, P., 2001, p. 157-158). Les conditions d’accueil n’y sont pas appréhendées sous l’angle des déclarations et des idéaux, mais sous celui de la confrontation brutale avec une réalité crue où la place du sujet migrant est furtive et non légitime.

La dénonciation de conditions précaires

Les conditions de logement dans les hôtels accumulent les signes d’une déchéance des lieux et, par osmose, de ceux qui y résident, d’une “dégringolade” pour re-prendre le diagnostic émis par L.-F. Céline sur les hôtels meublés dès les années 1930 dans Voyage au bout de la nuit. Dans les hôtels, dans les couloirs, à l’intérieur des chambres, les gens pourrissent sur pied “corps et âme” et y perdent toutes leurs illusions. La règle est de ne pas “se faire remarquer”, de ne pas “être repéré”, de se fondre dans la masse (Céline, L.-F., 1932, p. 451-454). L’hôtel s’inscrit comme un lieu marquant la rupture avec le chez-soi. Il se resserre toujours plus sur l’immigré comme un cul-de-sac, une “cage” ou encore une “cellule” selon les mots de Ben Jelloun. L’image négative des lieux contamine les résidents et les mine. Dans un premier temps, elle transforme le regard qu’ils portent sur eux-mêmes, en ce qu’ils intériorisent cette dégradation, qu’elle diminue leur estime d’eux-mêmes et distille le sentiment d’un échec (Boudjedra, R., 2005, p. 149-152). Dans un second temps, elle agit comme le révélateur du regard que porte la société d’accueil dans son ensemble sur les migrants, un regard mêlé de mépris, de rejet et d’hostilité.

Il n’a pas vu les chambres d’hôtels avec des lits superposés les uns au-dessus des autres et séparés par une trentaine de centimètres représentant tout l’espace vital dont les locataires peuvent disposer non seulement quand ils dorment mais aussi quand ils se reposent ou quand ils rêvent […] étendus sur leurs grabats humides et moisis et éventrés […] fumant cigarette sur cigarette pour tuer le cafard, enfumer les punaises […] et décoller du réel sordide qui les hisse, ainsi, entre plafond pourri aux larges taches vertes […], et un sol glacial, en ciment troué de dizaines de crevasses qui leur meurtrissent les pieds.

Rachid Boudjedra, Topographie idéale pour une agression caractérisée

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Les marques de délabrement de l’hôtel meublé soulignent la place marginale réservée aux immigrés. L’hôtel meublé symbolise la dimension carcérale de la société d’accueil dans laquelle le migrant perd son identité initiale et est réduit à une certaine animalité. Le migrant n’est plus un sujet, mais un élément d’un troupeau, réduit à sa qualité de déplacé et à sa fonction de force de travail. Il rejoint ceux que D. Chraïbi appelle les “boucs”, cohorte de silhouettes animalisées, niées par les membres de la société d’accueil.

Solitude et réclusion

En ce sens, l’horizon de la présence migrante se rétrécit toujours plus. De l’intérieur, la traversée de l’exil – du départ à l’installation dans le pays d’accueil – est une traversée de la solitude, un enfoncement non voulu dans la solitude aux marges de la folie. Le narrateur migrant y vit l’expérience de la relé-gation, du vertige identitaire et de la “double absence” d’une place stable (Lopès, H., 1990 et 1997). L’hôtel dit l’enfermement, la coupure, toujours plus profonde, avec l’autre. Solitude et réclusion sont imposées aux migrants et consti-tuent, paradoxalement, une stratégie de survie leur permettant de convoquer leurs souvenirs du pays natal, du pays perdu et de voyager dans leur “pays intérieur”.

Tout me poussait à cette réclusion : la violence quotidienne, la vente de ma force de travail, la haine ou l’indifférence, l’exclusion systématique hors la vie, la séparation d’avec les miens. Il faut vous dire : le recours au souterrain de ma vie ne fut pas une joie, mais un besoin, une nécessité. Vous savez. Dehors, les ratonnades. Le crime. Les rafles. Les fouilles. L’humiliation. La peur .

Tahar Ben Jelloun, La Réclusion solitaire

En conséquence, l’hôtel exsude l’absence et porte en creux les songes des migrants. La tristesse ordinaire et les fissures provoquées par un quotidien difficile et aliénant en forment le socle (Baldwin, J., 1968, p. 202-203). En effet, le pays d’accueil est celui de la désillusion où cesse “le chant fou, le chant retenu” qui a déterminé l’acte migratoire. La parole y est rare tout comme la main tendue à l’étranger, le simple contact physique avec l’autre. C’est le lieu de l’absence, où le migrant, surtout nord africain, est tenu de vivre la “tête enfouie dans le corps” pour échapper aux actes racistes, aux paroles xénophobes comme à un climat généralisé de tension principalement contre les ressortissants maghrébins6. La journée s’y passe dans l’anonymat

et la solitude sous la forme d’un “vague terne” et du “frisson de l’exil”. Le quotidien est celui d’une errance répétée, où le migrant s’est peu à peu effacé

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6 La Réclusion solitaire de T. Ben Jelloun comme

Topographie idéale pour une agression caractérisée ont été publiés au milieu des années 1970-73 dans un climat de tensions entre communautés et de campagnes racistes culminant dans des agressions et des assassinats racistes. Ces deux romans sont des manifestes dénonçant la xénophobie et les conditions de vie inhumaines des travailleurs migrants.

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de la scène urbaine comme de lui-même jusqu’à n’être plus qu’une “transparence, un champ en papier que le vent emportait” (Ben Jelloun, T., 1995, p. 69). Plus qu’anonyme, le migrant n’est personne : il disparaît. Il n’est plus qu’une fêlure, une coquille dépossédée de tout. En contrepoint de cette désorientation, du manque du pays perdu, il ne lui reste qu’un “bout de vie” qui s’organise en contrebande autour de quelques éléments arrachés et de quelques habitudes répétées mécaniquement.

En ce sens, la verticalité de l’édifice s’inverse, passant d’une élévation à un enfon-cement. L’hôtel se métamorphose, alors, en une malle sans fond qui abrite les maux et les pathologies des migrants (Haddad, M., 1973, p. 18, 47) de la plus bénigne à la plus destructrice : pesanteur de l’exil, désespérance, misère sexuelle, dépression, tentation du suicide, pulsion meurtrière, schizophrénie. Elle encap-sule, écrase, puis déploie le mal être migrant, “localisé au niveau de la poitrine, du cœur et du reste”. Cependant, cette malle ne fonctionne pas en autarcie, hors d’un contexte urbain et social. L’hôtel est un espace d’où il faut toujours sortir. Sortir de l’hôtel et entrer en ville

Porte d’entrée sur le quartier et, plus largement, sur l’espace urbain, il est le point d’ancrage des déplacements quotidiens pour le travail ou, plus rarement, pour les loisirs, le point nodal distribuant les explorations et les incursions dans Paris. Au départ comme au retour, il est autant un espace refuge, une protection contre un extérieur menaçant qu’un espace qui enferme et qui enfonce.

Il est ainsi, amené à occuper diverses positions dans les parcours géographiques et identitaires aux côtés d’une chaîne de lieux de l’anonymat et de la réduction du sujet migrant, au même titre que l’usine, le métro, les rues, les cafés arabes, les cités de transit, les bidonvilles, les terrains vagues, etc. qui participent d’une pri-vation progressive d’identité, d’une mise à l’écart. Le contact avec la rue se fait sur le mode de la suspicion et du conflit, accentué par les humiliations répétées. Le rejet et le mépris caractérisent les interactions entre la société française et les im-migrés chez tous nos auteurs. Le parcours migratoire est une épreuve graduée, de l’insulte (Lopès, Etcherelli, Boudjedra) à la mise à mort (Boudjedra) en passant par l’agression, l’arrestation (Lopès, Chraïbi, Etcherelli), l’emprisonnement (Chraïbi), la réclusion (Ben Jelloun), l’expulsion et le retour au pays (Mabanckou, Haddad). Du plus ordinaire au plus tragique, le parcours migratoire depuis l’hôtel meublé est une initiation à la perte et à la dépossession : une expérience de l’angoisse.

Il y aurait le labyrinthe qui l’affolerait et que si, par miracle, il en réchappait, il ne pourrait supporter les fiches de débarquement, les bidonvilles, les chambres d’hôtel, les cafés maures, les perquisitions, les contrôles sanitaires, les

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chantiers, les putains acariâtres, les contrôles d’identité, les contremaîtres corses ou italiens ou polonais, les homosexuels en maraude, les hauts fourneaux, le crachin, les filles languides et possessives, le verglas, le climat, le frimas, la cuisine préparée à la hâte dans quelque casserole cabossée, les marteaux-pilons, le plexiglas, les fleurs en plastique, les plans du métro, le gaz carbonique, les HLM, etc.

Rachid Boudjedra, Topographie idéale pour une agression caractérisée

L’espace urbain n’y est que rarement l’objet de descriptions réalistes ou visant un effet de réel. Au contraire, celles-ci relaient une perception distordue, entre fantasme et cauchemar, manifestant une expérience douloureuse de l’égarement, de la désorientation et de l’incompréhension. La brutalité de l’espace urbain est rendue par le rythme continu et effréné de la circulation automobile, par la caco-phonie des machines et des outils, par l’enchevêtrement des constructions et des matériaux, par le tourbillon des voix des autochtones, l’immigré ayant perdu la sienne et ne possédant pas la langue du pays. Les sens et la perception y sont malmenés et saturés. La ville est assimilée à un souterrain à l’image de la topo-graphie labyrinthique du métro dans laquelle le vieil immigré de R. Boudjedra s’égare. Il n’y a aucune différence formelle ni de contenu entre le souterrain et la surface, tous deux sont des topographies mortifères.

Au sein de chaque récit, deux réalités qui ne sont pas appelées à se rencontrer évoluent séparément : d’un côté, le Paris autochtone jamais troublé par les sou-bresauts du Paris immigré, indifférent face aux sorts des immigrés ; de l’autre, le Paris immigré, plus rétréci, composé de territoires circonscrits, fermés. Les deux étant séparés par des barrières étanches et des zones tampons. Ces deux Paris jouent des postures de visibilité et d’invisibilité de l’étranger, des dif-férents degrés d’ouverture et de fermeture (Blanchard, P., 2001, Jules-Rosette, B., 1998). Ces deux villes qui voisinent en se tournant le dos sont le personnage principal d’Élise ou la vraie vie (Etcherelli, Cl., 1967), mettant en scène ce compar-timentage spatial, cette binarité : d’un côté, le Paris de la provinciale Élise, de son frère et de ses amis et, de l’autre, celui clandestin et instable de l’immigré algérien Arezki et de ses compatriotes. Le Paris d’Élise est celui des lieux officiels, appartenant à la nomenclature urbaine, tandis que celui d’Arezki est un Paris clandestin, à l’identité refoulée. L’hôtel meublé semble, alors, être une structure qui projette le migrant dans un univers hostile dans lequel il se perd, dans lequel les rencontres avec l’autre sont placées sous le signe du danger, de la méfiance. Il entérine en quelque sorte la partition de l’espace parisien en zones étanches les unes ou autres où les rencontres comme les transferts culturels sont problématiques.

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RECOMPOSITIONS ET RÉSISTANCES : L’ÉMERGENCE D’UNE IDENTITÉ MIGRANTE

Tout en actualisant les ruptures identitaires, géographiques, affectives, sociales et économiques que subissent les migrants, l’hôtel meublé, malgré son état précaire, s’affirme également comme un lieu ressource pour les migrants, un espace qui préside à tout un processus de recomposition identitaire. S’il apparaît de prime abord comme l’espace d’une défaite, il est aussi celui où se mettent en place des stratégies de résistance, de résilience. Il pose la question de la survie : celle de l’individu migrant, celle d’une communauté venue d’ailleurs et de ses valeurs. En cela, il n’est pas le lieu de l’amnésie, mais celui du défi de la mémoire, individuelle comme collective, car il s’y dépose et s’y sédimente les traces d’existences successives. En ce sens, il n’est pas un espace de perte ou d’abandon identitaire, mais un espace de construction progressive et itérative. Il n’est pas celui d’une absence de culture, mais celui de cultures vivantes et, durablement, un lieu de mémoire de l’immigration7.

L’hôtel meublé est, pour le sujet migrant, un espace élastique, le nœud d’une enquête topographique et identitaire.

Dans et à partir de l’hôtel meublé, s’opère un double mouvement de déracinement et d’enracinement. À partir d’une première expérience de l’enfermement dans l’hôtel et dans la chambre, le sujet migrant y fait l’expérience conjointe de la résurgence et de la mise en relations à la fois horizontales et verticales. L’hôtel devient, alors, un espace du métissage : celui des rencontres interculturelles, des transferts des langues et de l’échange des récits. L’hôtel devient un territoire migrant (Harel, S., 2005, p. 15-69), revendiqué, approprié et mis en scène par les migrants. Les parcours n’y sont plus linéaires, mais fondés sur de nouveaux régimes d’associations et d’échanges, sur le montage de fragments d’expériences et de signes culturels.

Une cartographie perturbée et des regards décentrés

Les hôtels meublés participent de la visibilité croissante des migrants, sanctionnent leur présence durable dans l’urbain et contribuent à l’émergence d’une nouvelle organisation, proposent une cartographie qui s’émancipe de la doxa officielle et repose sur de nouvelles centralités. À une géographie fondée sur la sédentarité se surimpose une géographie maillée sur le mouvement. Différents Paris migrants – maghrébin, africain, asiatique – accèdent à la visibilité et à la reconnaissance. Ceux-ci contestent le modèle établi comme le lissage de l’espace et mettent en avant les points de rupture, les entre-deux

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7En nous appuyant sur les analyses de Pierre Nora, nous

entendons le lieu de mémoire comme une “unité signi-ficative, d’ordre matériel ou idéal, dont la volonté des hommes ou le travail du temps a fait un élément symbolique d’une quelconque communauté”. Cf. Nora, P., (1984), vol. 1, p. 25.

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comme les lisières entre la géographie autochtone et la géographie migrante (Pinçonnat, C., 2007, p. 283-284). La scène métropolitaine se transforme et laisse apparaître les strates refoulées et oubliées de la mémoire autochtone, proposant de nouveaux découpages territoriaux.

Voici mon partage : la porte des Lilas, la descente vers le Pré-Saint-Gervais, avec, à l’horizon, les fumées mourantes des usines qui s’assoupissent, la steppe banlieusarde desséchée par le froid et l’air vicié, le boulevard quasi désert où les voitures frôlent le trottoir, et, près de moi, cet homme avec lequel, pour la troisième fois, je vogue, comme si le paradis nous attendait au bout.

Claire Etcherelli, Élise ou la vraie vie

Dans cette géographie en formation et en déformation, l’hôtel meublé est un des rares points fixes redistribuant les localisations, mettant en place un Paris commun et provisoire, toujours inachevé et suspendu comme les rencontres amoureuses d’Élise et d’Arezki. La “casbah de Paris” rencontre momentanément le Paris officiel à travers ces parcours répétés. L’hôtel se mue en une sorte de point magnétique, à l’image de Voyage de noces et Dora Bruder de Patrick Modiano, où les hôtels meublés du boulevard Ornano et de la Porte Dorée permettent aux narrateurs d’explorer la mémoire traumatique de Paris : celle des dénonciations, des rafles et des déportations d’étrangers. Il s’inscrit au cœur d’une ronde d’espaces provisoires, hantés par la culpabilité et la disparition, qui échangent leurs histoires, leurs caractéristiques et la présence-absence des étrangers. En effet, il accroche les traces dérisoires, le souvenir des disparus et fonctionne comme une “zone franche” qui défie le passage du temps, c’est-à-dire, pour Modiano, un espace de passage.

Cette plaque sensible redistribue les lieux, en bouleversant les rapports hiérar-chiques, les logiques comme les repères. Paris n’est plus au centre ou à la tête d’un réseau. L’hôtel enregistre les allers-retours, les allers sans retour, les retours, les trajectoires en tous sens qui composent une chaîne de lieux, de localisations, de noms sans rapport hiérarchique, une constellation de place-ments et de déplaceplace-ments (Bhabha, H., 2007, p. 184) qui est au cœur de l’identité migrante. Aux oppositions binaires traditionnelles, ce décentrement géogra-phique oppose, propose et surimpose des scénarios alternatifs et l’invention d’un troisième espace. Pour H. Lopès, l’hôtel instaure tout un système de va-et-vient physiques et figuratifs entre le pays natal et le pays d’accueil. Lopès retrace toutes les étapes de ce déracinement, multiplie les itinéraires, emboîte les échelles entre le quartier de Bacongo ou de Poto-Poto et la métropole, entre le

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village et le continent européen, entre l’île des pêcheurs et Paris, entre les Congo et la France, marquant une progression de l’extérieur vers l’intérieur, de la case villageoise à la chambre en dur d’un immeuble parisien. On peut ainsi re-construire les localisations du Chercheur d’Afriques : Nantes, le poste de brousse, la case du Commandant, Paris, Chartres, le pays gangoulou, Mpoto, le village, Brazzaville, Léopoldville, Bangassou, Bolobo, Makotimpoko, le fleuve, l’île des pêcheurs, le Congo, Ossio, Bolobo, Bangui, Fort-Lamy, Kano, le quartier Bacongo. Les itinéraires sont comparativement plus linéaires, moins complexes et moins nombreux dans Le Lys et le flamboyant : Brazzaville, Léopoldville, Bangui, Paris, Métropole, Brazzaville, Ghana, Alger, Guinée, le Kassaï, le Kawango, Brazzaville, etc. Les échelles s’enchaînent et se désenchaînent du continent au village. Tout un atlas particulier s’étale dans les hôtels, remettant en cause les frontières, mettant en avant les territoires de l’expérience. De l’image de la cellule, l’hôtel se déploie jusqu’à devenir et se revendiquer comme un carrefour géographique, un point de déploiement : un espace mondes.

Un réseau de traces et d’empreintes mémorielles

Ce processus de mise en relations s’apparente à une double enquête : longitudinale, c’est-à-dire en profondeur sur le lieu lui-même, et transversale à partir de ce lieu pour suivre les trajectoires individuelles, les parcours ano-nymes. En complément d’ancrages et de désancrages géographiques successifs, il s’appuie sur des réseaux mémoriels, sur la mise au jour de traces et d’empreintes migrantes. Ces traces parcellaires, ces indices, même les plus dérisoires – indications topographiques, fiche de police, nom sur un registre scolaire ou de secours –, ramènent P. Modiano sur la piste des hôtels meublés et le projettent vers un autre lieu : pensionnat, mairie, rue, métro, centre d’internement, gare, wagon, camp d’extermination (Modiano, P. ,1997). En effet, il est bien souvent le seul édifice physique à avoir survécu en dépit des transformations. C’est une capsule qui permet de remonter le temps. La reconstitution de la disparition de Dora Bruder ne peut que débuter par l’historique précis de l’hôtel où elle habitait avec ses parents, en exhumant ses changements de destination et de propriétaires, ainsi que le sort des immeubles alentours dès années 1940 jusqu’à nos jours. En cela, l’hôtel meublé active de multiples réseaux mémoriels dont les cadres ne sont ni toujours constitués ni stables, dont la place n’est pas forcément encore légitimée. L’hôtel s’apparente à une archive de la mémoire où se surimposent et se télescopent les temporalités : la seconde guerre mondiale du point de vue de Dora et de sa famille (immigration juive d’Europe de l’Est), la seconde guerre mondiale du point de vue de l’expérience du père de Modiano, la connaissance de

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ces quartiers à l’âge adulte dans les années 1960, puis dans les années 1990, les étapes de la recherche de Dora et de la clarification de la période de l’Occupation et de la collaboration. Toutefois, ce lieu de mémoire ne fonctionne pas à sens unique, car il expose les traces comme les zones d’ombre. De même, il projette les souvenirs comme les trous de mémoire, nous révèle les vies perdues comme les “blocs d’inconnu et de silence” (Modiano, P., 1997, p. 27-29). Disparition et résurgence, présence et absence s’y combinent. Les localisations s’y agrègent. Les temporalités s’y imbriquent, rendant leur épaisseur à ces destinées. L’hôtel meublé devient alors une structure d’interrogation et de jeu autour de leur identité fragmentée.

Un entre-deux identitaire

À partir de ce brouillage des frontières et des temporalités générés par l’hôtel meublé, se déploie toute une fantasmatique quant aux jeux de positions et se matérialise une oscillation pérenne, entre ici et ailleurs, entre avant et après, entre une langue et l’autre. L’hôtel et sa chambre se révèlent être la structure d’accueil de ce que Simon Harel nomme un “moi valise” (Harel, S., 2005, p. 111-123), exposant les tiraillements, les blessures identitaires et les stratégies de compensation. Dans les romans de H. Lopès, l’hôtel abrite cette opération de réintégration des racines africaines au cœur de la métropole. Elle passe par l’investissement d’objets apportés du pays natal – amulettes – ou acquis au cours du séjour à Paris – statuettes, masques, livres, disques, affiches. Ce sont ces objets déposés, jamais par hasard, qui opèrent ces opérations de transferts identitaires, qui supportent ces bricolages en vue d’une récupération de soi, d’une histoire personnelle multidimensionnelle. En ce sens, l’hôtel est le réceptacle, le reliquaire de traces intimes. Pour les protagonistes de Lopès, il s’agit de s’ap-proprier et de revendiquer une telle mosaïque identitaire, dont les limites et les ajustements ne sont pas fixes, en tentant d’intégrer les influences multiples et les contradictions qui les constituent. Il leur importe de se débarrasser d’un vide et de rétablir des filiations complexes en liant et en métissant leurs références, en articulant la dispersion des appartenances et de l’éclatement des lieux (J. Bisanswa, 2003, p. 39), en provoquant des rencontres inédites. À l’expression de l’absence et la négation d’une présence qui s’exposent dans un premier temps dans l’hôtel meublé, ils cherchent à opposer les moyens d’exprimer une ap-partenance, de valoriser l’expérience de l’entre-deux. À tout le moins, ils entendent connaître et à faire reconnaître les éléments disjoints relevant de chaque culture, de chaque société qui les structurent ou les déstructurent. Les récits s’emparent d’éléments positifs comme négatifs, d’éléments pacifiés ou conflictuels. Ils exposent leurs caractéristiques propres et tentent de les mettre

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en relations. L’hôtel meublé s’émancipe, alors, des rapports de force, des rapports hiérarchiques traditionnels pour devenir le lieu de mises en relations sans cesse renouvelées, l’espace de transferts culturels et identitaires.

Ces opérations se réalisent sous le régime de l’épreuve et de l’initiation à la fois physique, psychique et symbolique. En effet, cette recomposition s’assimile à un vertige “parcourant en tous sens les méandres du temps, s’affolant, se bloquant, reprenant le dessus même à travers un bégaiement ou un miroitement ou un éblouissement très court allant et venant, intermittent et saccadé” (Boudjedra, R., 1975, p. 142-143). C’est l’espace des chevauchements identitaires, identifié par Justin Bisanswa, où s’enchevêtrent le spatial et le temporel dans un certain malaise (Bisanswa, J., 2003, p. 171-187). La topographie de l’espace se surimpose à celle de la mémoire, “confondant même et les malaxant à travers une chose bizarre que le voyeur s’empresse d’appeler pompeusement : paramnésie, mais qui échappe au voyageur” (Boudjedra, R., 1975, p. 142-143). Ces lignes enchevêtrées s’appuient sur des cadres collectifs peu stables et formalisés ainsi que sur les traumatismes, tels que la guerre, la répression, le racisme, la culpabilité, des conditions de subsistance misérables et sur les images fantasmées du pays natal. L’hôtel figure une sorte de pont, d’entre-deux entre le pays natal et le pays d’accueil et ne vaut que pas cette position médiane. Il est le point d’équilibre qui permet de réconcilier identité africaine et identité européenne. Une fonction similaire est dévolue à la chambre d’hôtel du migrant, par T. Ben Jelloun. Sa “chambre-malle” est un refuge et un carrefour où se déploie un regard du dedans vers le dehors. Les personnages y sont capables d’y assumer une succession d’identités, de les assembler, de les bricoler, ce en recourant à des combinatoires de récits de soi et des autres.

La projection de récits

En conséquence, l’hôtel et la chambre cessent d’être des espaces de silence et de non-dits, pour s’affirmer comme des espaces parlants, des espaces de prises de parole, même fragmentaires et embryonnaires. Par ces jeux d’associations, d’imbrications et de montages des temps, des lieux et des voix, l’hôtel permet de retranscrire les tensions, les tiraillements et les frustrations de l’expérience migrante. À partir de ces “points capiton”, le sujet migrant explore et essaie de réconcilier ses appartenances en se faisant chambre d’échos, structure de projection de récits et de fictions polyphoniques.

Épuisé, je suis rentré à l’hôtel pour me jeter au lit […] Je ne savais plus où j’en étais et j’ai eu l’impression que le temps s’était déréglé […] Des paysages

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d’Afrique se mêlaient à ceux de France, et je parlais un charabia composé de phrases gangoulous, roupéennes, lingalas et latines.

Henri Lopès, Le Chercheur d’Afriques

Dans ce lieu d’énonciation précaire, les logés acquièrent un savoir spécifique dans le va-et-vient entre deux univers, entre deux systèmes de références. Les récits y sont accueillis et projetés. La description des lieux précaires par les personnages eux-mêmes enclenche la mémoire des espaces perdus, celle des espaces encore inhabitables et trahit l’espoir de futurs espaces habités. Dans le même temps, se mettent en place des rites de réparation, tel que le surgissement des langues africaines, des bribes de contes et de chansons, les récits des anciens qui voisinent avec les auteurs classiques du cursus français, avec les traces du père français et ses carnets d’étude. La chambre est, donc, plus qu’un simple refuge : elle est un espace de récupération et de réparation face à la violence des contacts entre les civilisations. Le personnage migrant y projette son pays et la femme aimée, leur donne une épaisseur à l’image du protagoniste de Malek Haddad qui la peuple des collines et des forêts de sa région d’origine. Le transfert se produit dans l’écriture, dans les diverses formes de témoi-gnages – verbalisation ou rêve – où se déroulent des rencontres improbables, des chocs et des collisions inattendues. Lors de ces re-figurations du temps pour reprendre l’expression de Paul Ricœur, la formalisation et la projection des récits sont des processus réparateurs, compensateurs dans le sens d’une réap-propriation de soi comme de l’espace. Leur dimension thérapeutique est ici fortement soulignée : ils opèrent des recoupements et des tris identitaires, active les imaginaires et les formulations identitaires. Là où dans un premier temps les voix migrantes, les discours marginalisés n’étaient présents que par leur absence, la structure symbolique et imaginaire de l’hôtel meublé permet une interrogation des positions, dés-automatise le sens des relations. En créant un espace de jeux et de décalages, un espace intermédiaire, il propose de nouvelles modalités de négociations des valeurs collectives et des affiliations

L’expérience des hôtels meublés s’apparente à une véritable traversée des cultures et des territoires, compose un palimpseste mémoriel par toute une série de transferts imaginaires prenant appui sur l’instabilité, la pluralité et la fragmentation. Espaces de l’inconfort, de l’extrême précarité et de la relégation, les hôtels meublés et toute l’imagerie négative qu’ils véhiculent sont en définitive le réceptacle des voix migrantes. Édifices durables tout autant que fragiles, ils accueillent et inscrivent la présence invisible des étrangers, les épreuves de leur parcours migratoire comme les tentatives de se construire en tant que sujet

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migrant, être de l’entre-deux. Ce ne sont pas des espaces statiques, mais des lieux de métamorphose de l’invisible en visible, du silence en parole, de la réclusion en existence. En l’absence de cadres définis, de structures collectives sur lesquels les migrants peuvent s’appuyer, les hôtels meublés sont des espaces proches d’expérimentations, de rencontres entre la scène natale et la société nationale. À la peur, au mépris, à l´indifférence, subis au quotidien par l’étranger, les hôtels, en leurs espaces et leurs usages, opposent de manière précaire et instable, un lieu provisoire de dialogues et de rapprochements, la formation temporaire de communautés fragiles.

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