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LES MORALITES FINALES DANS LA NOUVELLE
B!:.
FRANCEMl.
XVe ET AU XVIe SIECLEby
Naz1i Fathi-Rizk
A
thesissubmitteë to ç
the Faculty of Graduate Studies and Research, McGill University,
in partial fulfibnent of the requirements for the degree of
D>~tor
of
~~~O.OPh~.
/
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Department of French Language
and Literature Aug~t, 1976
t , : , 0' Nazli Fathi-Rizk, 1!l77'
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{' \ ~, l',~LES MORALITES FINALES DANS·LA NOUVELLE
~ fRANCE AU ~e ET AU XVIe SIECLE
bi'!
Nazli Fath~-Rizk
.;Department of French Laflguage and Li terature
McGill University
La moralité finale de la nouvelle au XVe et au XVIe siècle peut être'
définie co~e une conclusion-appendice qui double la conclusion
événementiel-le des narrations. Lieu d'une distanciation, elle découvre l'énonciation et
/
implante un dialogue' dfrect entre le destinateur et le destinataire "du text~.
Méta-discours, elle interprète dans un sens moral la narration. Bref,
dis-•
cOurs didàctique dans son ra~port avec le discours narratif. L'analyse de la
moralité finale opère une coupe en profondeur dans quelques textes du XVe et
du XVIe siècle et poursuit la moralité finale dans sà structuration à
l'inté-rieur du -texte clos des n6uvelles. Elle rend comptè des manifestations du \
'\
modèle et de sa transformation dans ce mouvement qui se saisit entre la st
y-q
lisation dti procedé t,elle qu'elle apparaît dans le Réconfort' de Madame du
'1 .. t,r
Fresne, d'Antoine de l~ Salle, ,et son souvenir dans L'Heptaméron de
Margue-rite de Navarre. Glissement qui coche ses étapes dans la stylisation
parodi-que des .~. Joies de mariage, dans la carnavalisation des Cent Nouvelles
Nouvelïes, dans le "j e" du narrateur plei~ent assumé- des Nouvelles
Récré-ations et Joyeux Devis de Bonav~nture Des P'êriers ~ dans le', ttansfeJ:t du Q
symbole hors de sa motivaj:ion habituelle des Comptes amoureux de Jeanne Flore.
Lacfonction et la forme de la moralitê finale y devoilent leurs mutations et
, , 1 "
en 'fin de compte ltévolution de la moral~tê finale reflète cette
transforma-~ fi" \
tion d'une pratique du symbole én une pratique du signe qUi signifie son ar-bitra1re.
"
THE FINAL MORALITIES IN THE FRENCH
--OF THE XVth and XVlth ëËNTURIES
- - - 'by
'Nazli Fathi-Ri~k_
,,1
I-i,
,
Department of French -Language
~nd/~I'terature
M~~ill un~~ersity
--
,/'-=-0-1 \
. The final moral1ty in the "nouvelle,,!I;'Of' the ISth and 16th centuries
may be defined as a "conclusion-appendix" t-ihièh reinforces the concluSl\~n
\ ~
of events of the narrative.
\ By taking a
persp~~tive>
it establishesa
.
\ 'direct dialogue
betw~~
the narrator and - the rec\'Pient 0 f the text. Beinga critical discours, it interprets the narrative n a morai sense. The
analysis shows the interaction between the d~dacti and the na~rative
'" 1 (~ :~ ~
discourses. The final morality of sorne l5th and 16t century texts i8
studied in depth and the structuring of the discourse is traced throughout
'the entire text of the "nouvelle". The manifestations of the theoretical
"-model of the final morality and its transformation from the stylization of
the technique (Du Réconfort de Madame la Salle) to
its echo (Hepeameron by Harguerite de Navarre) is Intermediate
stages have also been considered: the parodistic (.XV. Joies
de mariage);, the "ca'rnival" (Les Centr-Nouvel1es Nouvell.es), of
the characte'r of the narrator (Les NQuvel1ès Récréations et 0 eux Devis by
Bonaventure Des Périers), the transfer of the symbol beyond usual
motiv-ation (ComEtes amourewr. by Jeanne Flore). The function and t e form reveal
the~ein their mutations. Finally, the evolution of the final morality ia seen
to reflect this transformation from a uS~ of symbol to a use 0 indice (sispe~,
which signifies its arbitrary nature.
(
) ("
•
'.
• '"
"
~,/I
/' ~' tr (Nous ~emer:~nseil des Arts du Canada de~nous avoir octroyé
une bourse pour la réalisation de cette, thèse.
Nous remer~ons 'les, b~bliothèques des universités MeGill, de ~ntréal
, 0 .J
et Laval d~avoir $racieusement fuis. à notre disposition leurs services et
1 •
leur matériel.
Nous remercions chaleureusement notre ~recteur de thèse, Prof. Gius~p~
Di ~èfarul, pour~es conseils précieux, sa diiectiqn judicieuse et sa pa~ien
ce à toute.épreuve.
Nous savo:S gré
~r~f.
Russel McGillivray d'avoir eu l'amabilité deregarder 'ce travail
et~de
nous avoir suggéré des remarques pertinentes surla mise en oeuvre. (
1
Nous remercions Mme Geneviève Vastel pour la dactylographie de cette
thèse, Mlle Mona Chehadé Dr Karen Victoria Alward et M. Jean~laude Poncet
pour la correction
)
, ' 9'
,
~ .:'"l
'\
1 '1 , ) " TABLE D MATIERES • Q INTRODUCTI ON 0.1 , , jqu'est-ce que la ~ralité finh1e ?
"
, l,
,
...
,0.1.1, Récit 'discours et·méta-diacours
0.1:2 La m
rali~é
finale:,~st~~e
de significatiOn0.2
doub e 1 (;;'
0.1.,3 Le ignifié idéologique
0.1 3.1 L'idéo1ogème du symbç1e
0.1~3.2 Le passage du symbole au s!gne"
0.~.3.3 Particularités du signe
Le choix Ju corpus
ChaEitre
1.
,LA STYLISATION
D~
LA. MORALIT.É FINALE1.1 Les cocrrAonnées didacti~ues
1.2 La "mdr âle nafve" du récit, u
1.3 . Le sig~ifié moral dans le discours narratif
1.4 Le disc9urs de la conclusion
1.5 L'aspect rhétorique
1.6 L'énonciatlop de la moralité
1.6.1 Les registres de la parole
1.6.2 Le destinateur de la moralité finale
1.6.3 Le destinataire de la mo~alité finale
Chapitre II
STYLISATION ET PARODI~ DE LA MORALITÉ FINALE
2~1 Le discour~ didactique p. 11 14 15 17 , j ;i " 1 20. 21 25'
~
36J
51 61{
'1 i 69 69 72 78 " 86 881
;
fr
2.1.1
2.1.2
La programmation des "j oies:' -, '1
La manifestation didactique dans les "joies"
2.1.2.1 2.1.2.2 2.1.2.3 2.L2.4 Le disaours démonstratif La vision omnisciente Le mode de l'énonciation Le discours délibératif \ 2.2 La contestation du systè~ 2.2.1 2.2.2 2.2 • .3 2.2.4 Chapitre
ru
Ltébranlement de la pratique dh symbole
Le jeu de l'écriture '.'
L'activité ludique de la conclusion
La charade
.~ "
LES TRANSFORMATIONS ,DE LA MORALITE FINALE
3.1 Les C.N.N.
3.1.1 La Nouvelle dans les C.N.N.
3.1.2 La programmation contes~ataire
3.1.2.1 La carte boccacesque 3.1.2.2 Le carnaval
\
3.1.?3 La-parodie du discours courtois
3.1.3 L'actualisation de la contestation
\
\
.3.1.3.1 .3.1..3.2
La Nouvelle
le
et la NouvelleXXVI
Le fonctionnement de la moralité
finale dans les C.~~N.
,
,3.2, Les Nouvelles Récréations et Joyeux Devis "
3.3
3.2.1 La programmation 3.2.2 Les moralités finales
Les Comptes amoureux
3.3.1 3.3.2 3.3.3 t'écriture " L'idéologèm~ du symbole? L'intertextualité , 3.3.4 L~ moralité finale '. iL 88 .107-107r' 113 119 123 12'6 127 133·· 140 . 155 168 169 169-118 118 181 186 i. 193 194 220 229 .330 340 259 260 266 , '271 276 "
.
" ;,
\
/)
c
,
---,---\) 3.4 (\,
.
L'Heptamêron 3.4.1 La pratique du vrai8emb~.able3.4.2 'Les idéologèmes moraux
(!IJ ... CONCLUSION NOTES BIBLIOGRAPHIE
•
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'. Hi. 282 28~ 290 304 314 351 . ,J
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INTR'ODUCTION (JIr
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Dans la des recueils ~ ... eww 'il' N +J
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product:!:on IfnoVellrSj!quell du XVe et'" du XVIe siècles en France,
1
narratifs aussi variés que' le R~confort de }mdame du Fresne
2
d'Antoine de la S~.Les .XV. Joies de maria~g Les Cent Nouvelles
Nouvelles ,'3 Les
N~iies Récréa~ions
et Joyeux Devis 4d~
Bonaventure DesPé.riers.
1~8~,Ç~te5
n.:moureuxS de Jeanne Flore ou L 'HcEtaméron 6 de(
Marguerit~dc Nav<!.rro, mauifestent li. des dèg:rés de fréquence plus' ou.moins
intenDes,
~
trace d'une moralité finale à la remorque de la narration.{'
K. Kasprzyk, dam; son ouvrage Nicolao de Troyea ct le genre narratif en
".,~ .;.
France au XVIc siècle. (Paris, Varsovie: LibrairicI\...I..I.nckoieckp 1963) a
relevé cc ph~nomènc ct elle a même soutenu que la moralité finale o (p. 3"25)
è,
eGt un den trois a!Jpccto r;ênéraux de ln nouvelle de la Renaissance (loD
.'
deux autre!> il.fpectD étant le "cndre" rJ;) le "réo.liGme", cf. pp. 313-316 et
",
pp. 326-329). Toutefois elle n'a pas manqué d'.~jouter que la moralité
finale de la nouvelle mérit:erait une analyse plu:J approfondie. Tel est
donc le su) ct de thèse que nous nOUG SOIrullCS 'proposé de traiter. suite à'
sa sU8eestion.
Cependant. une fois le oujet adopté. des restrictions n'ont pas tardé
à saillir. En ouvrant la voie
des·
recherches sur le problème, K. Kasprzyk-avait semble-t-il en vue la que!Jtion de la genèse de l~ moralité finale,
puisqu'elle propose de remonter jusqu'à l'excmplum, la poésie courtoise
r
r
l'"
l',
<. 3.
c, ,
et le fabliau (p. 320) nfin de déterminer les apijQrts de ceG différents
genres dauD la formation de 1<1 moralité r·inalc de la nO,l.lvcl;!.c au rtlé
' /
siècle.'
.
Or, diGons-le tout do 8uitc~ notre objectif n'0ct pas de faire un
.historique de la moralité finale qui expliquerait ~".E.!!.2.!l sa fonction daUD.,
....
la nouvelle au XVe ct au x~Ic siècles. SanD minimiSer ICG méthodes d'in"
.'
.
vcotigution de la philoloSlc et de. l'histoire 1ittéru:l.rc, noue adoptQns
toutcfoia une tiutrc npproche, non p.:lS opposée mois complémentaire; c,Ç!llc
qui Je pLlçant dans le
[li11a~e
cl 'une "p'oétiquc"~
7 Gtudierai t fc discoursde la moralité fln;:11e dana le texte de quclqu~G -recueils de nouvelles du
1.'VC et du XVIe siècles. Critique immanente GanG doute. ll13.is qui cherche
cunat bien à décrire' quelqucn modèles de moralitéo finalco dans leur
Yl"
~1 1
structure èt leur ill<>.nifcGtütion discuroivc, qu'il ;l:ctrOU\'''''x" ct à écle.ircr la
EJ:,r~Jcturat::L2!l de la tl"è-:>ralJ.tê [in:.1.1c G l'intérieur du te:tte de ln nouvelle.
)
11in:.11. dl.1DS un premier temps. i1 parti'r" du Prolop;uc. dano ln Gtructurc
des récita. au niveau du ~i.GcourG narratif» noue:; tenteront:) de découvril~ le
cheminement du sicnifié moyal, pris en '~h:.\r2e et ~nnJ.fcst&. par l,e discours
\ 8"
de la ùloralité finale. Cur il cst C(n:taitt~ dans le texte clef> . de
13:.-nouvelle. chaque frnClJ1cnt ne peul; GC lire qu' ü"partir de la totalité:
/
proloeuc du recueil, pl1rnsco introductives deo n3rrationG, _nouvcllco
pro~re-.~' f
t!>
ment dites, conclus,ions lilor<11cG. ni elles' apparaicGent comme deG partieG
~ ' ...
autonomes GaUD l'anGle de lu compoott'ion, Gout 'cn réalité corrêlationncllèG"
et GoumiGCG
a
1;:1 tOI:Jlitê du texte du point de vue "oe:uo". Cl cot pourquoi\
nous con,ccvons le probll::1ilc COIlliD.C une interdépendance et une. iIl\tcraction de
\
la Nouvcll~·-coIUDc totalité--et de la moralité finalc--cn tant que pa~tic
"
,
,-
' ---1
4.
~ ,1
,~u~
tout. : Dans un deuxième temps. selon la même~roche
de coupe verticale. " t-,Pi,nOU9 étudierops le d~scours de la moralité finale: premièrement dans la
,-' . - 9
st~ucture en profondeur de la pratique discursive; deuxièmement dans les opératipns rhétoriques qu'elle actualise; troïsièmement dans sa fonction de
\
communication ehtre le des~inateur et le distinataire.
L'objet ultime d~ notré. analyse n'est 'pas un simple-recertsement des
, ,
procédês '<\e la moralité finale
~
l'intérieur ode 'quelques pratiquesS7émi
c,h · , . ' ! >'
tiques de la nouvell~~u XVe et a'u XVIe _slècles. ' Notre étude synchron _ que,
\., .;-.1..:;
loin de se complaire dans la contemplation, accueille le principe d1!ilchro-"
, 1
nique~ non pas tant par le, recours à des consid~r~t1ons historiques,
socio-~
logiques ou psychologiques~' qu'à Jtravers le concept de ntransfo~tion"
développé par les recherches sémiotiques. 10 D' abord·, la moralité finale est
\ . . (\ \
perçue comme la transf~rmation, d'un discours' en un autre: le signifié moral
assumé par l,e,signifian,t'.narrat1f e~t récupéré par la moralité fina-l~, lIlais
:;. ~ ,
avec un autre signifiant". '. EnSUit,,,, le texte de la nouvelle e.st ,conçu coume
lr~" - '
une "intertextualité", c,''êsE''::à-dire comme un dialogue avec d'autr~ ~~tes,
passés ou contemporains. qui s'y dévoitent en
fil~~rane;
yuchronoty~~
selon la terminologie de C. Segre. Dans la moralité 'finale qui nous inté-
,
resse part~cul~~rement, nous essaierons de lire ces différents discourS qui
~/~ 7 ~.
s'y mirent, mais réorganisés. transformes ou d~formés. ~~fin, la moralité
finale est vue commè
ia
transformation du discours didactique dans sonrapport ave; le
di8c~~rs narr~tif
1t~~rs
quelques exemples pertinents detextes de nouvelles. Du XVe au XVIe sii\cle, elle se saisira dans S(lO
chan-'" ,
1 'in~érieur d'un
gement de fonction à système sémiotique qui sous l'appa,:ence
du M"'eme découvre le Différent. i>
"
~. ...,
...
~_ ...__
."'---_.-"
..
_
..."-$
1
1 1--,>.
5. r"~ ..,;',yLa méthode que nOU$ utilisons dans notre étude sur la moralité finale
au XVe et au XVIe siècles se caractérise, nous ne-éraignons pas de le dire,
....
-1
PJ1r une sort~ de pragmatisme. Comme le texte obs.ervé demeure notr~
préoccu-pation primordiale, nous n'hésitons pas à faire appel tour à tour, ~ même
II.
~i~ultanément, à des approches structuralistes, aémiotiques ou normatives.
Pour ce~er le plus 'adéquatement et le plus compréhensivement possible lé
~
sens de cette moralité finale, nous essayons de tirer profit des travaux de
.,
th~or~e rêeents, sans en faire toutefois on. but en soi. n'autre part, quand
, • • 'Il
nqps le jugeons à-propos, nous puisons dans le fonds de la critique
tradition-,f
nelle,· refus,ant ainsi I-~e nous pntonnér d~~ un seul point de vue. Cependant,
nous sommes particulièrement
redev~ble
à la~numentale
étude de Paul" ~ ,;"
Zumthor, Essai de poétique médiévale. (~aris: Seuil, 1972) qui constitue une
.
.
". '
ndrpe d' infonnatiôns précieuses sur le discours du Moy~n-A8e; de même nous.. '
) 0 ~ ' _ 0 13 .. ,: l'''~
pro~lamons notre dette envers les travaux de Julia Kr1steva, qui,npus ont
init~ée'à l'analyse sémiotique d'un texte.
Avant de procéder à l'a~alyse de la moralité~fina1e dans le texte des
nouvelles, nous jugeons néce8sair~~ d'up pO,int de vue opératoire, de donner i,:
quelques délinitions-axiomes'et de justifier le choix de notre c~rpus.
/
.0.1.1.
r
,R'Cit...
. moralité finale~ ~ cr~
est générique:"
Olle - Qu'est-ce que la moralité finale 1
1
,.
'discours et œta-discours - En commun avec la
"
la
de l~ ~ouvelle est un discours. En fait, çe terme de discours
1
il embrasse tous les mod~s du l~n~age et y accueille toutes
... 1 ~1i
les formes. " La différence entre la nouvelle et la moralité finale s'accuse
1
6.
antinomie générique. La nouvelle constitue un mode particulier, restrictif
de discours, qui comprend un argument--une logique d'événements, une syntaxe de personnages--et cet argument est assume dans ses aspects et ses modes
. !
opar un discours •. Ce qui en r.ess):t c'est que "le discours peut raconter
sans cesser d'être discours", mais "le récit ne peut 'discour~r' sans
'so;tir' de lui-même.
,,14~~
Quant à la moralité finale, elle se d~termine comme une forme
parti-culière de .discours elle aussi. Elle est 'discours sur le discours de la ,. ,
nouvelle, méta-discours qui tire ses prémisses du discours-objet; rattachée
à lui, dépendante de lui, mais qui par une opération abstraite, l'immobilise
en objet de
S~énonciation.
Des ressemblances et des différencess'établis-'sent alors: d'une ~art, le méta-discours instaure des rapports qui tendent
______ ",,'1,
~flét~r
le discours premier·so~t
,par des agentsanaphor~ques.
soit parla l"êprise de syntagmes qui y jouent le rôle de citations. soit par la
recu-peration d1un signifie de la nouvelle; d'autre part, il se dissocie de lui
en faisant ~e redistribution des éléments·' qu'il puise dans le discours
premier. Et dans ce sens la moralité finale reproduit l'opération specifique
\ . 15
du langage qui est "destructivo-constructive" et "distributo-intégrabive": i le lD~ta-d1scours se re;mémore le discours de la nouvelle et"le transforme dans
son propre discours. I l produit son sens e'n détruisant le premier discours
et en le reconstruisant.
"
n'un
autre point de yue, le discours de la:rooral1t~
.
finale tend àprendre ses distances par rapport. à la nouvelle. L'énonciation se déchire
pour révéler le locuteur, moins dans SOn rapport avec le premier discours " qu'avec l'allocutaire de la moralité finale. Pétrifié sous le regard du
1
1
7.
\
commentateur, le discours de la nouvelle est alors soumis à une motivation,
\
pli~ à un schème qui ~e subordonne à son dessein, celui qui garde en vue le
destinataire du texte.
(
Ainsi, le méta-discours qui suit la narration, apparait comme une'deuxi~me
conclusion qui ses~rajo~te
à la conciusion événementielle du 'l ,
récit. qui la répète sous une autre forme, selon un point de vue différent. , (
Une prem1~re définition de la moralité finale commente afors à prendre corps:
c'est un~ conclusion appendice de la clôture 'événementielle et discursive, de
la nouvelle, qui se détermine comme le lieu privilégié du recul, une prise de position dominant la narration, une vision rétrospective; en somme, un discours au deuxième degré par rapport ,au discours de la nouvelle.
0.1.2. -
La moralité finale: s stème de si,
,/
transfor-mation du discours de la nouvelle en meta-discours de la moralité finale se
,16 "
détermine dans le cadre d'une analyse sémiologique, comme 'une opération
o
complexe. A la base, nous avons le signe, qui da~a la terminologie saussu-'
rienne est compo8~ par un,signifié et un signifiant, ou encore un concept
et une iJll8ge acoustique (p. 105). "Le 8ignif1~ n'est pas une ' chose' • mais
une représentation psychique decla 'chose'" (p. 107), et le signifiant est le médiateur par lequel.le signe se montre (p. 109). Signifié et signifiant sônt tous les deux des relata du signe,o Dans la perspe'ctive de
L. Hjelmslev (p. 13Q) les signifié et signifiant s'articulen sur deux
plans:, le E.lan de l' expresàion. cel9i des sisni~( lan du contenu,
"-'
c~lui des signifiés. La signification, vue comme un procès, se dévoile alors
co~e un acte qui en unissant le signifié et le signifiant, produit le, signe.
..
.t
'·-1
"·
' y8,/
,H~elmslev en a donné une
R représente la relation
représentation graphiqu~ qui s'éerit ainsi: E R ~.
entre le
p~an
og,
expressi'on CE') et~
plan de contenu~
'(C). Donc la signification co!ncide avec 1a relation CR) des deux plans: E'R C.
" '
", Or, la nouvelle, considérée du point de,vue sémiologique est un système
de si~on. Mais, en même temps, vu qu'elle est littérature, elle
est' loin d'être ~e pratique sémiQtique simple. En fait, elle est au moins "deux systèmes de signification imbriqués l'un dans l'autre, mais aussi décrochés l'un par rapport à l'autre" (p. 130).
Elle est constituée par un premier système E R C qui à son tour devient
l'
le ~lan de l'expression d'un second système extensif, au premier'. Ce qui '
s'écd..ra1t comme s,ult:
"
2 E R C1
~
E R Cou encore (E R C~ R C. " Le premier sy'stème est ce ~u'on appelle le pl~ de
1
dénotation, ·tan4;ls que le' second système est le plan de connotatJ,on. La nouvelle se définit alors comme un "système connoté", cfest-à-dire un "système dont le' plan d'expression est constitué lui-même par un système de signification" (p. 130). Le système dénoté serait celui qui relèverait de la simple communication verbale, alors que la connota'tion, système lui-même formé ,de signifiés, de signifiants et üe la signification qui unit les uns aux autres, dénoté sans s'appréhenderait comme <.,., toutefois le supprimer. v
un sens obligue qui doublerait ~e sens "Les si,gnifiants de connotition, que
' r
-Iron appellera des connotateurs son~ con_~titués par Ides signes (signifiants et signifiés réunis) du syst~e déno~~ ,'. • •
[ilS}
sont touj.ours finalement.'
1
, ,
.'
9. "
des signes discontinus, 'erratiques', naturalisés 'par le message::4~not'é qui
les véhicule. Quant au signifié de connotation, il a un caractère à la fois
général, global'et diffus: c'est si l'on veut, un fragment d'idéologie il[s] c01Illllunique(nt] 'étroitement avec la culture, le savoir, l'histoire,
c'~st
par~~i],
• • • que le 'monde pénètre le système;l'~déologie
serait en somme la forme (au sens hjelmslevien) des signifiés de connotation,cependant que la rhétorique serai~, la forme des connotateurs."(p. 131).
Or, comment opère la~moralité finale par rapport à la narration?
En tant que discours sur le di;cours narratif, la moralité finale
1 u
entre dans la rubrique ''métalangage''. Partant, le processus qui la
carac-CI
térise est à l'opposé de celuî du système connoté. Ici le décrochage se
fait de la manière suivante: " "le premier système (E R C), devient, non le
plan d'expression, comme dans la conn~tation, mais le plan'de contenu ou
signifié du second système:
"
2 E R •c
1
~'
ou encore E R (E R C)."(p. 130) En d'autres te~s, le système de
8igni-./
f1cation de la narration devient l'objet d'analyse d'un autre système' de
significAtion. Le discours de la nouvelle proprement dite est interpr~té,
comment~~' expliqué par' celui de la moralité finale; bref, il en consti tue
l'objet de description.
Mais s~multanément, la moralité finale n'est pas un pur dénoté. Elle
est aussi une connotation. Et nous avons affaire alors dans le texte de la
nouvelle à une organisation complexe où le "langage, à son niveau dénoté,
est métalangage, ~s où ce métalangage est à son tour saisi dans un procès
,1
\
\10.
0.1. 3. - Le signifié idéologique - Toutefois, au risque d'une tautologie.
il faut relever que la moralité finale est un discours moral. Or, qui ~
i"
dit "moralll sort du domaine du dénoté pour pénétrer dans celui de
l'''idéolo-gieo
tl
• Et comme nous l'avons vu plus haut,cette notion est justement
l'apa-nage,des signifiés de connotation. En fait, la moralité finale par sa
fonction même est vouee à être un métalangage restrictif. Du d~cours
premier--la narration--~ont elle fait son signiflé~ elle prélèv~ra de la
masse des signes qu'elle observe, un signe particulier: ce sign:l.fié
idéolo-gique, moral, connoté par le signifiant narratif de la nouvelle. En d'autres
termes, ce n'est pas tout le système sémiotique de la narration qui est
retenu par le métalangage, mais cet "idéologème,,17
~oral
qui fugue comme unsignifié oblique du système de connotation que constitue le plan de
l'ex-pression de la narration. Diffus, dilué dans le discours. de la narration,
cet "idéologème" va se "matérialiser" si 1 t on peut dire dans le discours de
la moralité finale puisqu'elle en fait son signifié.
Cependant, du point de vue signifiant, la moralité finale visualise
elle-même un système de connotation. Si l'idéologème moral de la narration
constitue une sorte d'''isotipie dénotative,,18 de
so~
disc:ours, un signifiélogique qu' .elle s'approprie, le plan de l' eJtpression qui prend en charge çe
signifié est un l~ngage enFobant un autre langage. Et les signifiés de
connotations qui en irradient ren.voient à "Idéologie". Mais en .même temps,
à travers ce concept général, différentes unités d'idéologie se laissent
percevoir: tradition, modèle d'écriture, échos de l'histoire, parodie.
etc. • • Et dans ces énoncés culturels' t historiq~es t religieux, sociàux qui
se croisent dans le texte et se lisent à sa surface, la moralité finale se
,
.
•
"
•
11 •
dévoile dans sa totalité comme un idéologème (puisque sQn signifié e~t un
idéologème et que son signifian~ dévoile ~ans son' dé~rocheme~t divers
idéo-logèmes). La question qui se pos~ à nous dès maintenant est la suivante:
dans quelle mesure le signifié moral de la moralité finale est-il affecté
o par'les idéologèmes signifies de son système connoté? Dans la
confron-tation du ,signifié logique et du signifiant rhétorique réside semble-t-il
La véritable signification de la moralité finale de la nouvelle.
0.1. 3.1. - L' idéologème du 'BZ,I!1bole - cepend!nt. si l' on
considère~'"les
coo,x--1 .,1
données historiques, culturelles et sociales de la moralité finale de la nou-
.
, ,v
velle en la replaçant dans l'idéologie m~diéva1e, on peut dire q~ielle
.
) ,,'relève d'un type de discours dit symbolique. Or, qu'est-ce que le symbole?
Par rapport au signe, le symbole est un terme à la fois affinitaire et
dissemblable. L'élement commun de ces deux termes, c'est qu'ils renvoient
tous deux "nécessairement
a:
une relation entre deuxr~lata.
,,19 Ce que ces 0.
mots de saint Apgustin mo~trent,bien: "Un signe est pne chose qui, outrj!
l'espèce ingérée
autre chos~. ,,20
par ,les sens, ,fait venir d'elle-même à la pensée' quelque
,1
1.
Cependant, ce qui caractérise le symbole. c'est qu' "il , n'est jamais tout à fait arbitraire; il n'est' pas vide, il y a un rudiment
ft.,
de lien naturel entre le signifiant et le signifié. ,,21 Ils~bl,e
qu'il Y ait une sorte de loi qui préside, à la représentation du symbolisé par lesymbolisant. La relati8n qui unit les deux termes es't non-nécessaire,
puisque le symbolisant
et
parfois-même le symbolisé ~stent tndépendamm~ntl'un de l'autre; par conséquent" elle est motivée, non-conventionnelie et non-arbitraire. En somme." "dans le symbole, la représentation est
pnalo-,
giqu~. et inadéquate (le christianisme 'déborde' la croix), face au s;1sne
/
12.
dans lequel la relation est immotivée et exacte (pas d'analogie entre le
, \ - -0 ' - - ~ 22
mot boeuf et l'image, €lui est parfai t é~tmt recouverte par son relatum.)"
- - - l ~'''m .
Jusqu'au XIIIe !}:ii,ècle, la pensée du Moyen-Age est immergée dans le
symbole. Et la pratique signifiante qu'elle actualise dans sa-littérature
et dans son art dévoile au niveau de sa structure les particularités
symbo-liques. D'une part, les unités signifiantes évoquent, ou plus pr~cis~ment,
invoquent le plan de la transcendance, de l'ineffable et de l'universel;
'\
elles pointent vers le concept et renvoient vers un Tout "principiel" et
divin. "Le symbole assume le symbolisé (les universaux) comme irréductible
~u'symbolisant (les marques). La pensée mythique qui tourne dans l'orbite
,
du symbole • • • opère avec des unités symboliques qui sont des UNITES DEf\
RESTRICTIO<R' par rapport aux universaux symbolises (l' ''h~rofsme'', ''le courage",
.
23
"la noblesse", "la vertu", "la peur", "la trahison", etc ••• )." D'autre
part, dans l'articulation des unités :signJfiantes entre elles, la fonction
~'t "' .. " f <,
du symbole est celle de la
"disjallC~~oi1< ex~ius1ve"
ou la non-conjonctton:,
-le bien et -le mal, la vie et la m9rt, -le vice et la vertu sont incompatib-les
.
'
, et demeurent toùjours ~rrêconciliables. Ainsi, la contradiction est.résolue
\
,pat un type de connexion qu~ écarte fe paradoxe en assurant l'exclusion d~s~
oppositi "La clé ~e la pratique sémiotique symbolique est donnée dès le'
~début
dudiSCOU~
symbolique: le'traj~t
du développementsêmiotiqu~ e~t
une bo cIe 'dont la fi'n ,est progra~ée, donnée en germe, dans le début (dont
la fin EST le début), puisque la fonction du symbole (son idéologeme)
pré-existe à l'énoncé symbolique lUi-même/ ,
céci
implique les particularitéa-1
\
~ ,générales de la pratique s~miotiquè symbolique: "LIMITATION QUANTITATfVÈ"
_deB-.symholea,--la RÉP-ÉTITION'
des
'symboles, et leur~actère
général."2r ..
,.JO ...
\
,,---- ,/-
;:1;-
...
~
.
- Il' i I_~\;
\/~
\
" \ ?
-~
\," v
(, T---o - ---' .. --F"-' -- ,. -. ---- \~
~--"
/.' '-,!':-."-""" ~\.
..
'C'"
\.-
;13.
Dans ce sens, ~e discoùrs symbolique médiéval se détermine comme une
structure fermée où les choses se solutionnent de l'intérieur même du
système. Car, pour l'homme du Moyen-Age~ l'univers est une vaste mé~aphore
qu'il suffit d'aborder à partir du principe que les formes sont le "reflet
, 25
direct du spécifique, du, générique et du transcendantal." Les choses s' en-.
gendrent, se répètent et s'la ré,pondent en fonction d'un Tout, qui il SOn tour
se mire dans chacune de ses parties. Des lois peuvent alors se déterminer
de l'organisation générale: princi~es de similitude qui se ramènent à {a
"convenance"~ à l' "analogie", à l' "émulation" et au "j eu de sympathies" et
qui ont joué un rôle bâtisseur dans le Savoir de
l~
culture médiévale. 26- OJ;', la moralité finale de la nouvelle au XV~ et au XVIe si~c1es s'
éclai-re ,à la lumière de ce symbolisme médiéval. A l'origine, d'~ne part c'est·
un~ parole qui renvoie verti~alement à une entité supérieure et rappelle
implicitement un impératif théologal! Dieu, pr~ipe universel, source des
IOOts et des choses J se aetache dans l'arrière-plan du discours. Celui-ci
d'~illeurs apparatt comme une imitation du discours divtn~ une parole
'tauto-logique du Verbe éternel. Le symbolisant dans s6n rapport avec le symbolisé
, ~
trahit la "fonction de restrictiont' du symbole: il représente un attribut
• .J.<
unique, restreint et. singulier ge l'uqiversel. D'autr~ part, sur le plan
\
horizo~tal des unités 1Egnifiantes, le d1~~ours didactique n'admet p~
l'ambigurté, ou du moins la récupère-t-il dins un ordre établi une fois pour
"
toutes, où Bien et Mal se proclament dans leur incompatibilité et leur
",
oPPo,sition.
\
D'un autre point <fe vue, la morfi:té' finale s'appréhèn~e co,mme un
disc~rs
typiquement médiéval dans la mesure où c'est unepa~erpréta-~~~,-~,~
\
:; ,~ 1 ;"
J
.,1
14.
tive qui cherche à degager un sens de l'univers des signes. Elle actualise
.1 27
ce "commentaire" qui est une ê'pistémé de la culture du Moyen-Age. Et dans sa perspective, le monde représent~ p~r la narration est parsemé de figures qu'il !aut déchiffrer. En un ~e~s,e elle manifeste dans un autre contexte
(celui de la nouvelle) ce principe sous-jacent ~ la theorie de l'allégorisme que le Moyen-Age vit se développer; théorie "selon laquelle la
Sainte-Ecri-, ' f i ?
ture (puis par extension. la poésie et l~s arts figuratifs) peut être inter-pretée suivant <tUBtre sens différents: littéral', ,allégorique, moral, ana-gogique. ,,28 Ainsi,' la con_clusion morale qui fait suite à la narration trahit cette herméneutique médiévale. L'oeuvre narrative dans son espace ne déploie pas seulement une économie de l ' "argument";
gnification) laquelle constitue SOn "intégumènt".29
elle -est enrobée de s1- ___
----r.
---
J
1 - - - ~Le commerttâire moral
___ r~
----est perçu alors' comme l'éclaircissement de ce sens caché dans la narration, 1<1' révélation de cette "sapientia" inhérente aux événements.
, ' 0
0.1.3.2. - Le passage du symbole au sigqe - Cependant, dans la période qui 'va du XIIIe au XVe siècle, un assiste à une mise en question du symbole, ou
~)
du moins à son atténuation. Une phase, de transition s'instaure, au cours de laquelle le sl&ne assimile subtilement le symbole. L'unité
transcendan-, t:Jl.~e qui fonde celui-ci s'estompe. Une "matérialité" s'installe au coeur
, 1
des unités signifiantes et tend à faire oublie~.l~origine divine du Verbe~·
-' / "
.• ~ sens n'est plus alors quelqu: chose de préexistant il la parole, mais i l
"
.
.est ':Le produit de la" c:otnbinalson des unites signifiantes entre elles. En
"
d'autr:'Il·.termes: "l'unité signifiante n'est plus renvoyée il l'"idée" qui
( .
se profile~ait â ·tra~rs.elle dans son immensité; l'unité signifiante, par
contre, dèvient opaque, s'identifie à el.l.e-même, se ''matérial.isetl
, sa
;
1
J, ,.
15. o..
'
' . ." " \sion verticale commence a perdre ,de 1 intensité, et c'est'sa possibilité
fi 1) 0 ot.'" ~ ,
. ' . \ 30
d'articulatiop. avec d' autr~s un:l,tés. signifiantes qui s' acceritue. "
, \ , , ' 31
C'est sous l'impulsion -du nominalisme de Guillaume~ d tOccatrl que le C> l . . . ?
'F • ",' ' t . . . 0. ... discours médiéval passe d' un,e opr.1t:tq'Ue~ releva.nt du symbole à;~ne prat1~ue.
, "
... ü I j o ' "
soumise, au signe. 'Ainsi r
el" refusant toute tpdstJffice réelle aux universauX, ,
./ \ '
chi~·±-:re" l ' organisatton symbolique en la lésant -de
.
.
la thèse occamiste fait
.
.
son foyer _____ , ___ -__ ,_ .. ~ieu est un conocep~ mais qu'on ne peut atteindre
1 . ) . . (> - , . ; Il
nominale. Entre le -aoncept'et le terme qui le fait
.1 '1 •
'-j~~ , '
connaitre en le représentant, uneodistinction est donc nécessaire. I l
s'ensuit que chaque chose est singulière; du fait qu'ellé est un terme, un nom; et partant elle ne peut être universell~, puisqué l'universe). n'est
.'
,que dans le ~oncept. La réalitéOapparaif alors dans
s~ s~ngul~rité:
un ensemble de ~ermes indépendants d'une ~ource préexistante, d'une clause\-- f }
"
extrinsèque. Ùne fois cètte idéé nominaliste procl~ , . ... dÜf~sée-, la voie est désormais ouverte ù une pratique signifiante, qui, coupée de _son support transcendantal, n'opère plus avec des symbo;Les mais avec des noms. c' est-à-dire des signes. \
,
0.1.3.3. - Particularités du signe - Par rapport au symbole qu'il relaie et
supplante, le signe manifeste des ressemb1ances et des différences. Comme îùi,-il-proclame l'irréductiÈil~~é __ des termes de la relation: le dualism~,
---~--d'une part entre le référent et le signif:té, d'autre
~artentre-res1gn±fié
1
et le Signifiant, répète dans Bon aBsertion la séparation ~u symbolisé ~t ~~
symbolisant. De même la hiérarchie entre les dewÇ pôles de la signification est maintenue. Cependant, "dans sa fonction verticale, 1e signe renvoie à des entités moins vastes, plus concrétisées que le symbole--ce sont des
(
,
.
'--WX 77
\
~, $ ' j l6~ ,universaux réifiés, devenus objets au sens fort du mot; or, 'relationnée
dan~ une structure de signe, le' entité en question (le phénom~ne ou le
personnage) ,:-s!:-" dû' coup, transcendant)üisée, él~vée au rang d'une unité D ,
---
-
~
--~---th~ologique. La pratique sémiotique ~ signe assimile ainsi la démarche
métaphysique du sYmbole et la projette Sur 'l'immédiatement perceptible'; ainsi valorisé, 'l'immédiatement perceptible' ,se transforme en'objectivité' ,qui sera la loi maîtresse du discours de la civilisation du signe. ,,32
Q~~t à la fonction horizontale du signe, ou l'articulation des unités
si-,
gnifiantes entre elles, ell~ se saisit comme une prolifération d'écarts qui
"
toutefois se résolvent dans l'ultime signification à laquelle ils sont soumis
depuis le début. Le discours dans les différentes combinatoires qu'il
actua-lise se montre comme une infinitisation, une génération multipliée. Libéré
de l' "i'dée" transcendantale, quoique soumis à un (lignifié. il est le champ
d'une transformation continue. Èt cette permutation apportée
par,l'idéolo-l" J
gème du signe qui multiplie les signifiantn, se sienifie en fin de comp~e
comme l'édulcoration d'un Benn monovalent par la pluralite des significations.
Or, le discours de la nouvelle proprement dite, c'est-à-dire~e:~i$cours
o .., > "'..
;:.
.
~narratif, en contraste avec cèlui de la moralité finale, se ré~lame d'une
pra-tique sémiopra-tique du signe. Le sens (ou les sens) qu'il actualise est le
résultat dl une combinatoire de signes. En outre, il ne pointe pas v~rs une·
réalité 'unique et transcendantale, mais tend à représenter et à évoquer le
réel par un faisceau d'images contigugo. Le "réalisme" ,SIue l K. , Kasprzyk \
considère comme le deuxième aspect de la nouvelle au XVIe s~ècle est en fait
" ,
cette loi d'''objectivité'' qu'instaure l'idéologème du -oigne. La nouvelle
apparaît comme une coupe transversale dans la réalité, une tranche de vie,
un univers de 1 J signes qui 1 1
imite le reel; en somme, un "vraisemblable". \
1
17.
\
Mis en rapport l'un ùvec l'autre. le discours narratif et le discours
de ~d moralité finale s'accusent comme une pratique du signe opposée à une
pratique du symbole. On y retrouve cette distinction relevée par R.
. 33
Jakobson entre diScours de type métaphorique et discours de type
méto-<)
nymique. Dans le prelDier. c'est 1 "'ordre. du systè!'le'r qui domine.
L'opé-ration du sens se fait par la "sélection d'
uni~és similaires"~
c'est-à-direpar analogie ou 'métaphore". Sans le second
r
le transfert du sens se fait ft~ \ /",
par la combinaison d'unités contigul!s"; c ~est l! lIordre du syntagme" ou
"métonymie"." On peut cn inférer le point de départ de notre étude sur la
moralité finale dans la nou11elle au XVe e~ au XVIe siècles: le discours
narratif de la nouvelle est un discours à dominance métonymique, une pra~
\
tique sign:Ùiante qui relève, davantage du signe; tandis que dans la moralité \"
finale, le discours montre davantage un ordre métaphorique et rappell~'ùne
pratique à structure symbolique. ,
.
0.2'.:_ Le choix du corEus
-c'est donc en fonct~on de ces considérat~ons géfiérales sur le discours
de la moralité finale dans ses rapports avec celui de la narration dans le
texte de la 'nouvelle au XVe et au XVIe siècles, que notre corpus se
déter-mine. Et c'est dans les écarts du modèle posé qu'on pourra saisir les
trans-';i
formations de cette moralité finale.
Pour mon~rer le fonctionnement de ces deux pratiques signifiantes, celle
du symbole et celle du signe, dans leur i~teraction et dans leur particulari-.
té, nous choisissons ~e objet de notre premier chapitre un texte à la
charnière? du didactique et du narratif, le Réconfort de Madame du Fresne
J..
'\
/ y 1
/
18. ,-d'Anto~ne de la Salle. A la lumière
q'un
MOyen-Age f~nissant, où un ancienordre prépare un nouveau, et Qù l'idéologème du symbole et celui du signe
"""'
S,' affrontent et se, répondent, l'ouvrage d' Àntoine de la Salle apparaît commé,
,
l'exemple privilégié d'un discours médiéval. Le moral y assume, surplombe
êt contrôle le narratif. Et la moralit~ finale s'appréhen~e comme une
actualisation et une stylisation de ce discours.' Par conséquent, elle ne
tire toute sa signification qu'à partir du texte dans sa tota~ité.
~
Dans le deux1tème chapitre, nous analysons" la moralité finale dans ~
'1
~
. '.xv.
Joies de mariage: un texte significatif du point deovue transforma-/.
""'
...;' "11
) ;
I~
tion de la pratique 'signi'Hante. ,Là aussi nous.avons' àffaire à une oeuvre
qw, chevauche entre les sent.es .
t~ahit ~ so~ a~im1lat"i1m~a;
lemoralisant et, narratif, mais le symbole y signè, à travers un jeu de l'écriture qui asserte le discours didactique tout en lé contestant. Ainsi, la moralité
f .. inà1e, s \alignant sur
la
même figure, visualise une exaspêration de ses ,.'procédés, dans sa double fac~ de raffinement et 1e parodie. Mais comme
pour le Réeonfort~ elle ne dévoile sa (ses) signification(s) qu'à partir
de tout le texte auq,uel elle participe et se soumet.
Quant aU troisième 'chapitre, nous y obserevçns la transformation de la
, l
moralité finale--du point de vue fonction et pratique sign~fiante--à travers
quelques textes de nouvelles que nous avons jugés caractéristiqùes. On
notera au passage, que le discours didactique s'estompe au profit du
dis~ours narratif, que'la pratique du signe l'emporte sur ,la pratiqUr du symoole. ,La nouvelle en tant que genre a acquis sa forme particulière, ,
iJ\
--~rechercnee et clôturée. Nous considérerons tour à tour Les Cent Nouvelles
Nouvelles--ou'l'~boulement des valeurs, confirmé par la moralit~ finàle--,
\ " " ,
.
, ~""'''''''··_-'~~~Q''<.·~''''''-''-~_~4iiil'iM~_ if.~l'?""'"1
,
"-
..
,
1- _ -., , ,~.
" ... ~.
("-•
\.
- 19 • ~ "les Joyeux Devis de Bonaventure Des
Pé~i:rs--la
'moralité finale.visualisa-tion du Personnage du narrateur--, les Comptes amoureux de Jeanne Flore--ou
la moralité finale hors de son ['contexte ruiturel-et, enfin, L 'Heptamé~~ de
Mar~uerite
de Navarre-ou la moralité finale dialoguée et"d~alog1qUe".34
1
c
'1.'
o ..l •\
.... -J , .\
l
\ '/'
\,
, .....
~(,
t.\
t
~ ~ \ 1 ci
~,
i
CHAPITRE l0/
J
1LA STYLISATION DE LA MORALITE FINALE
"
DU RECONFORT DE MADAME DU FRESNE
/
u.'
...
'.
'V' •
---" " '.-~.1. - Les coordonnées didactiques,
, ç
"
Achevé le "xiUj jour de dessembre, l'an milquatrecens et cincquante
'!'
et • • • 11,1 le Réconfort de l1adame du Fresne se définit dans la prose
2
narrative du XVe siècle comme un ouvrage ~i-narratif, mi-didactique.
En effet, le recueil est constitué par deux nouvelles-exemples enchâssées
dans un cadre moralisateur. A cet
ég'~d,
le dessein de l'ouvrage s'aligne _sur celui des autres oeuvres d'Antoine de ~a Salle: la ~ (1451), manuel
de récits et d'impressions de voyages, qui est soutenu par l'intention
d'éduquer les fils,de Louis de Luxembourg; la Salade (1442) qui Se réclame
'~ar
une réunion de texteS historiques, ju'r1diques et
J"-éthiques, aBns lesquels l'auteur conseille au roi la tolérance et le
ménag~-.
(
ment du peuple; le Petit Jehan de Salntré (1456), où la programmation
ini-tiale et finale est codée dans la perspective didactique du
Moyen-~ge;3
ler
Traité des anciens tournois et faits d'armes (1459), s~rte d'essai
scienti-fique et technique de l'époque.
Nourri de culture médiévale, Antoine de la Salle, -écrivain, semble
impri-mer le sceau du di4actisme à toutes ses oeuvres.
Le texte du Réconfort s'insère dans le moUle de la tradition médiévale,
~ Q
qui lui sert de "modèle analogique" et où aucune matière ne semble échapper
\
1
22.
~établis
par les théoriciens des Arts poétiques de l'antiquitéS et quipour-suit son chemin tout le long du Moyen-Age, comme un "arsenal de recettes
d'écriture,,6 dans lequel l'écrivain puise pour traiter de tout: sujet,
a~ssi
bien scientifique que narratif. Dans cette tradition'médiévale, le di dac- J
tisme est un postulat et toute oeuvre qui se réclame'de cette tradition tire
du motif d'enseign~me~t sa raison d'être et sa justification •. fartant, le
didaëti~me qui s'y affiche révèle sa double postulation, morale et formelle .
.
Dans Kle Réconfort de Madame du Fresne. du
Î
Chastel" et la "dl\lme du Portugall l sont désignés terme
uexemple" dans l'énonc~. Et en fait, c'est dans l'irradiation des
signifi-cations de ce mot que le texte 5 '.appréhende, se dépl"ê5'ie et se boucle sur
lui-même. Antoine de la Sale le mentionne cinq fois: une première fois,
pour introduire l'anecdote illuFtrative qui figure dans le Prologue 1
(p. l04)--celle de la femme inconsolée de la mort de son fils, mais qui sous le coup de révélation d'un rêve où il lui apparaît, remplace les larmes sté-riles par la prière réconfortante--, les quatre autres mentio"ns d'" éXempl e'" encadrent les nouvelles sur Madame du Chastel et la dame du Portugal.'
Diverses connotations se superposent et se décrochent à traver~
l'appel-lation "exemple", dans le contex~e du Moyen-Age, et par analogie, dans le
texte du Réconfort.. "Exemple" en tant qu:illustration, dont le rôle est de
"renforcer l'adhésion à une règle connue et admise,,7,per l'appel à des cas
~
par~icu1iers qui éclairent l'énoncé général et augmentent sa présence dans.
la conscience. "Exemple" en tant que chaînon d'une argumentation, dont il
est ancillaire, mais qu'~l éclaire obliquement et qu'il corrobô~e
23.
en oeuvre du discours, qui est manière d~ passer de l'implicite à
l'expli-~ ....
-cite. "Exemple" comme palier d'une interprétation figurale "qui établit un
va-et-vient' incessant de la valeur concrète à la valeur abstraite,8 qui
jette un pont entre la créature et Dieu, entre l'être humain e~ l'Etre
par-fait. "Exemple" OÙ l'''anedotto aspira a fissarsi nella categoria dell'
'ideale,,9 et où l'histoire vient à l'appui d'un exposé doctrinal, religieux
(>
ou moral. "Exemple" dans le sens de témoignage, peu importe qu'il soit r
10
réellement arrivé, l'essentiel est qu'il soit transmis comme preuve; en
tout cas, un événement enregistré par l'expérience qui vaut comme parad~gme
du réel et peut toujours se projeter dans l'avenir, un exemple de vie à
valeur éternelle. 11
'~lorale
en action,,12 en même temps que modèle à imiter,1
l'''exemple'' dévoile le spirituel sous l'écorce du réel. "Ex pIe" aussi dans son historicité: écho, rw.,1,[ciiscence de ces recueils
ont fleuri au Moyen-Age, aidant d'une part le prédicateur à onstruire son
sermon et servant d'autre part à augmenter l'attention et le zèle des P~
13
tents. "Exemple". en somme, comme
élém~n't
d'une pratique" la foisintel-lectuelle, morale et technique. Bref, selon la rema~que de . Battaglia,
"exemple" dans son intention essentiellement éducative, t?-0n
.
eulement et non'
pas tant par la moralité qu'il veut proposer ou souligner. m 18 surtout
parce qu'il répète et réalise en forme.canonique~ ie sens av' c lequel le
Moyen-Age èonsid~rait la vie et en interprétait les signes, et dont il
cons-14 titue le sigle et le symbole.
Or, dans un texte qui charrie ces différentes significations d'exemple,
la moralité finale ne p~ut se confiner à l'appendice conclusif. Dans les
nouvelles du Réconfort, conçues comme exempla. enclos.es et englobées par un
\
\
j
1
24.
discours qui les plie à un schème didactique,
la~iti~n
opératoire quenous avions proposée dans notre introduction, à savoir, la ~oralité finale
est une conclusion de caractère moral ou idéologique, qui se surajoute à
la clôture événementielle de la narration. ap~arait en deça des faits, voire
même incomplète. Le message idéologique ne figure pa~ seulement 'dans la
conclusion de chaque nouvelle, ~ais il imprègne autant et également les
unités signifiantes du cadre qui enrobe les nouvèlles et le. discours qui
.:l
assume les récits-exemples. Par conséquent, la moralité finale, objectif de
notre enquête, se détermine comme une motivation didactique qui soutient le
discours et qui se réalise à travers ces connotations qui jaillissent
obli-i,
quement de l'énoncé; orchèstrées à tel point qu'elles se perçoivent comme son
15
isotopie. Dans ce sens, la moralité finale serait entendué comme un
objec-tif général du discours, recherché et atteint. Toutefois, considéré la ligne
de démarcation qui sépare les nouvelles proprement dites et le discours qui ,
les encercle •. il ne serait pas vain de concevoir la moralité f:Lna'le dans le
sens d'aboutissement: dernière instance discursive dans l'espace et le' temps
de l'énonciation du texte, oÙ,le message moral atteint son point~ulminant,
~,
.
son étoffement définitif; confirmation du processus didactique; lieu où se o
déversent et s'entrecroisent les différents niveaux de sens qui sillonnent' ~e
message moral. Tel1~ se présente la conclusion du texte du Réconfort dont
nous feron~ le champ d'apalyse de la moralité finale des nouvelres du recueil;
'\
en tenant compte, bien sûr, des re1ations~ des-analogies qui s'établissent
dans le discours, à travers les différentes composantes
nû
texte--prologue,..
\
nouvelles à proprement p~rler, conclusions. A,cet égard, notre approche ne
~,
peut être systématique. 'Cependant, nous garderons en vue trois moments
déci-• ,r
c
25.
sifs de l'enquête: cerner le signifié moral du discours; démêler les
sig~fi-cations qui fuguent du' signifiant rhétorique; décquvrir les problèmes de
l'é-o
nonciation,qui s'y rattachent.
1. 2. - La "morale nat've"du récit
Dans la première nouvelle'du Réconfort de ~~dame du Fresne, l'auteur
relate une '~istoire'~>qu 'il entendit liu temps de sa jeunesse. Le seigneur
du Chastel est
te
défenseu;ide la ville de Breth, assiégée'par le puissantprince de Galles. A co'urJ"de vivres, démuni de renfo1;'ts, il se trouve dans
'l'~bligation'~e
conclure un pacte avec t'ennemi pour empêcher la reddition"
de la ville: li l'agresseu.r, i11~vre en otage son propre fils, âgé de treize
ans, à la condition q:ti"'il,lui seràlt
ren~u,
si le lendemain i l recevait dusecours.
la ville,
" ,
Et en effet, la clause est
re~\lie
et la menace est fevêe de dessuspar l'arrivée opportune d'une nave c~argée de provisions. Le
\
seigneur du Chastel envoi~ alo~s quérir son fils,\~ais le prince de Galles,
furieux de voir ses plans de conquête contrecar~és par le secours inattendu
que reçoit le défenseur de la ville, transgresse sa promesse et refuse de
rendre l'otage. Même plus, il menace d'exécuter l'enfant, si le père ne lui
1
livre pas la ville. Le seigneur du Chastel se trouve acculé au 'pied du mur; ou bien sacrifier son propre fils, ce qui revient à un infanticide, ou bien
\
rendre la place> ce qui ternît son honneur. Accablé par le poids de ce
dilemme, il se confie à sa
,
femme~ à la mère de son enfant. Après de~délibé-rations déchirantes, Madame du Chastel supplie son époux 'de placer son
o
,
--devoir et son honneur au-dessus de toute autre considération. Ainsi, le seigneur du Chastel refuse de céder aux menaces du prince et ne .livrepas
r
26.
la ville. L'enfant est exéc~té. Une transformation s'opère alors: . le
seigneur du Chastel dresse une embus
~
auxfo~ces
'ennemies qui y succombent.rade
i
"
(JVictorieux, il tire sa yengeance en, tuant un grand nombre de gens d'armes du
, ,
prince de Galles. Et pour plus de raffinement! i l renvoie le restant des
i '
prisonniers à leur maitre, après avoir pris sdin d~ leur crever les yeux
et de leur couper les mains et les oreilles. ;' Defait, le prince de Galles ordonne de lever le siège et la ville est enfffn libérée.
~
Dans la nouvelle sur la. "dame du Portuga.l", l' aute,ur rapporte des evê-,
1
nements dont il a été témoin. Durant la con/quête de la cité de Cepte par
1
les Portugais, le troisième fils du roi t0mge dans une embuscade dressée par ,les Sarrasins. Il risque de succomber sous leurs coups,lorsqu'il est sauvé par son sèrviteur et instructeur.
< Celui-ci ,
1
paye de sa vie. Le prince est accablé de douleur et porte grand deuil de l'ami e!t s'erviteur qui
1
mourut pour le sauver. Entre-temps, les forces portugaises l'emportent et c'est la retraite de l'ennemi.
A l'arrivée du Roy du Portugal et de'sa suite à
la-~~ur,
la mère du"vaillant" chevalier accourt et s ,'enquiert de son fils. \ Don Henry allant
?
à sa rencontre pour la saluer, laisse éclater son chagrin et se retire en
pleur~. Le roi lui ;innOnce alors le trépas d'e son fils et elle s'évanouit.
Une fois remise, le mli>narquè lui dit que le chevalier est mort pour "saulver
•
la vie à son fils et maître". "Et quand la bonne dame, qui de plourer ne
cessoit, entend que son fils au service de Dieu est mort, et qu'il avait son seigneur ainsy saulvé, lors, comme par grâce de Dieu especia1e, fust son
cuer de toute joie enluminé."(p. 152). Elle demande à voir don Henry, qui en
.'
la voyant, ,ne peut retenir ses larmes. Elle le console en lui montrant par
)
,
,
, 27.l'exemple de sa fermeté, qu'il doit abandonner ~on deuil et tenir son'rang.
,
non
Henry ré'affirme sa grati tudeenve~s
son serviteur. La dame se retranche\\
du monde en se plongeant dans la méditation et la prière, et fait dire des
messes pour l'âme de ,son fils. Don Henry, aussi, :{:ait faiie un rervice
solennel à son serviteur héror~ fait fonder Ui\.e messe perpétuelle
pour Son salut.
""
Comme on le vort à travers ce rappel du thème des deux exemple~, une
combinatoire narrative se dégage: les actions s'engendrent et se déroulent
"
,selon un processus, soit d'amélioration, soit de dégradation, considéré la
o 16
sphère d'action de chaque personnage-acteur. A cet égard, les nouvelles
.
'----..
du Reconfort, dans leur armature, peuvent se prêter à une analyse
structu-~ .
raIe du récit. Analyse qui fut codifiée et formalisée"par les travaux de
17 .
y.
Propp sur le conte, par des recherches sur la struc1ure du récit' aeR. Barthes, de A.J. ~eimas, de T. Todorov, de C. Brémond, de G. Genette,
' 1 8 ~
pour ne nommer que quelques-uns. Ainsi, il fut démontré que le récit
ré-(
pond à un "système implicit;e d'unités et de règles",l9. une typologie! actan-· _//
~"1- '
tielle qui relie les actions à un projet humain et une syntaxe narrative.
En fait, les deux nouvelles que nous avons sous les yeux peuvent se
déter-miner 'selon troi, niveaux de description, tels que proposes, par art es: ~ B h 20
21
fondements ,et que
le,,),niveau~Àes' ffnctions, ~ont Propp a jeté les
"~ ,
C. B-rémond a mis au point; \2,2 le n:l:veau des tlactions l' (au s1.DS que
,e
motrevêt chez A.J;/Greimas,
l~rSqU'il défi~it
lespër8~nages
comme des actants,~
comme des~éS
sémantiquks#de l'armature du récit)j23~t
le niveau de la" \ "narr at ion./ (dans l ' oppos i