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Évaluation agroenvironnementale et économique intégrée de scénarios de pratiques de gestion bénéfiques

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Academic year: 2021

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ÉVALUATION AGROENVIRONNEMENTALE ET ÉCONOMIQUE INTÉGRÉE DE SCÉNARIOS DE PRATIQUES DE GESTION BÉNÉFIQUES

Mémoire

JORNETTE CHRISTELLE DANGBEDJI

Maîtrise en économie rurale

Maître ès sciences (M. Sc.)

Québec, Canada

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RÉSUMÉ

’agriculture est la principale source des sédiments, phosphore et azote présents dans les rivières. La présente étude s’intéresse aux bénéfices perçus par les agriculteurs et autres résidents ruraux découlant de la mise en œuvre, par les agriculteurs, des pratiques de gestion bénéfiques à l’environnement. On s’intéresse principalement aux bassins des ri-vières Chaudière et Etchemin. L’évaluation des biens non marchands (ici la qualité de l’eau) est un exercice complexe qui nécessite la caractérisation des préférences des indivi-dus. Un sondage portant sur la méthode des préférences déclarées, plus précisément celle des choix expérimentaux, a été réalisé. Nous avons cherché à connaitre le consentement à payer pour l’amélioration de la qualité de l’eau. Les résultats démontrent que les agricul-teurs n’aiment pas se faire imposer des charges supplémentaires, mais ils n’aiment pas non plus que les contribuables soient taxés. Les résidents voient d’un bon œil que les contri-buables soient sollicités davantage.

Mots clés : PGB, Qualité de l’eau, Agriculture, Choix expérimentaux, Logit à pa-ramètres aléatoires, Logit à classes latentes

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ABSTRACT

griculture is the main source of sediment, phosphorus and nitrogen in rivers and wetland. When there are in high concentrations, these elements significantly deteriorate the quality of water. This study focuses on the benefits perceived by farmers and non-farm ru-ral residents from the implementation, by farmers, of best management practices (BMP). It focuses primarily on the Chaudière and Etchemin watersheds. Non-market valuation pro-cesses are complex and require the characterization of preferences of individuals. A survey designed to elicit stated preferences through stated choice experiments was conducted. The results uncovered considerable heterogeneity in preferences with some respondents show-ing risk aversion, some beshow-ing risk neutral or risk-lovshow-ing. We estimated farmers’ and non-farm rural residents’ willingness to pay for improvements in water quality. Our results show that farmers do not like to be taxed or to shift the burden to taxpayers while rural res-idents derive utility from greater contributions from taxpayers.

Keywords: BMP, Water quality, Agriculture, Choice experiment, Random parame-ter logit model, Latent class model

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TABLE DES MATIÈRES

RESUME ... III ABSTRACT ... V TABLE DES MATIERES ...VII LISTE DES TABLEAUX ... IX LISTE DES GRAPHIQUES ... IX REMERCIEMENTS ... XIII

CHAPITRE 1. INTRODUCTION ... 1

1.1. PROBLEMATIQUE... 1

1.2. OBJECTIFS DE RECHERCHE ... 3

CHAPITRE 2. REVUE DE LITTERATURE ... 5

2.1. LES PGB ET LA QUALITE DE L’EAU ... 5

2.1.1. LA QUALITE DE L’EAU ET L’AGRICULTURE ... 5

2.1.2. LES PRATIQUES DE GESTION BENEFIQUES ET LA QUALITE DE L’EAU... 6

2.1.3. LES DETERMINANTS DE L’ADOPTION DES PGB ... 8

2.1.4. LES AVANTAGES TIRES DE L’AMELIORATION DE LA QUALITE DE L’EAU ... 11

2.2. LES METHODES D’EVALUATION DES BIENS ENVIRONNEMENTAUX ... 12

2.2.1. LES METHODES DE PREFERENCES REVELEES ... 13

2.2.1.1 La méthode des coûts de déplacement ... 13

2.2.1.2 La méthode de dépenses d'évitement et de coûts évités ... 13

2.2.1.3 Le modèle de prix hédonique ... 14

2.2.2 LES METHODES DES PREFERENCES DECLAREES ... 14

2.2.2.1 La méthode de l’évaluation contingente ... 15

2.2.2.2 La méthode de l’analyse conjointe ... 16

2.2.2.3 La méthode des choix expérimentaux ... 16

2.2.3 CHOIX DE LA METHODE D’EVALUATION ... 18

CHAPITRE 3. METHODOLOGIE ... 23

3.1. LA MÉTHODE DES CHOIX EXPÉRIMENTAUX (CE) ... 23

3.1.1. CONSTRUCTION DU DESIGN EXPÉRIMENTAL ... 23

3.1.2. IDENTIFICATION DES ALTERNATIVES ET SÉLECTION DES ATTRIBUTS... 25

3.1.3. PRÉ-TEST ... 28

3.2. ÉLABORATION DES QUESTIONNAIRES ET COLLECTE DE DONNÉES ... 29

3.3. METHODES STATISTIQUES (ESTIMATEURS ECONOMETRIQUES)... 31

3.3.1. LE MODELE DE L’UTILITE ALEATOIRE ... 32

3.3.2. APPROCHES D’ESTIMATION ... 33

3.3.2.1. Brève revue de littérature sur les approches d’estimation ... 33

3.3.2.2. Logit à paramètres aléatoires ... 35

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3.3.2.4. Calcul du consentement à payer ... 37

CHAPITRE 4. RESULTATS ... 39

4.1. CARACTERISTIQUES SOCIODEMOGRAPHIQUES DES REPONDANTS ... 39

4.2. PERCEPTIONS DES REPONDANTS ... 43

4.2.1. LES FREINS A L’ADOPTION SELON LES AGRICULTEURS SONDES ... 45

4.2.2. QUI DOIT PAYER? ... 46

4.3. RESULTATS ECONOMETRIQUES ... 48

4.3.1. ESTIMATIONS DU LOGIT MULTINOMIAL ET DU LOGIT A PARAMETRES ALEATOIRES ... 48

4.3.2. ESTIMATION DU LOGIT A CLASSES LATENTES ... 55

4.3.3. CALCUL DU CONSENTEMENT A PAYER ... 59

CHAPITRE 5. DISCUSSION ET CONCLUSION ... 65

BIBLIOGRAPHIE ... 69

ANNEXES ... 77

ANNEXE 1 : LES BASSINS HYDROGRAPHIQUES DE LA RIVIERE BRAS D'HENRI ET DU RUISSEAU FOURCHETTE ... 77

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LISTE DES TABLEAUX

Tableau 1 : Les variables expliquant l’adoption des PGB ... 10

Tableau 2 : Les attributs et leurs niveaux ... 28

Tableau 3: Efficacité des PGB (% d’émissions polluantes évitées) et coût annuel moyen ($/acre/an) ... 38

Tableau 4 : Représentativité des échantillons ... 42

Tableau 5 : Description des variables ... 48

Tableau 6: Estimations _ agriculteurs ... 49

Tableau 7 : Estimations _ résidents ... 52

Tableau 8 : Estimation du modèle à deux classes latentes (agriculteurs) ... 57

Tableau 9 : Estimation du modèle à deux classes latentes (résidents) ... 57

Tableau 10 : Consentement à payer _ agriculteurs ... 60

Tableau 11 : Consentement à payer _ résidents ... 62

LISTE DES GRAPHIQUES Graphique1 : Catégories communes de PGB financées dans le cadre des Programmes nationaux de PGB par région, du 31 mars, 2007 ... 7

Graphique 2 : Distribution du niveau d’éducation pour les agriculteurs et les résidents ruraux. ... 40

Graphique 3: Distribution du revenu annuel pour les agriculteurs et les résidents ruraux ... 41

Graphique 4 : Fréquentation des lacs et des rivières en été ... 43

Graphique 5 : Connaissance générale de la qualité de l’eau ... 44

Graphique 6 : Perception des agriculteurs par rapport aux coûts de l’adoption des PGB ... 46

Graphique 7 : Perception des citoyens non-agriculteurs ... 47

Graphique 8 : Consentement des agriculteurs à payer pour la réduction de phosphore, azote, sédiments ... 61

Graphique 9 : Consentement des agriculteurs à payer pour la réduction de coliformes ... 61

Graphique 10 : Consentement des résidents à payer pour la réduction de phosphore ... 63

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DÉDICACES

À mes parents Célestin et Jeanne DANGBEDJI,

Un merci spécial pour m’avoir inculqué très tôt le goût du travail bien fait. Que ce travail soit la rétribution de tant de peines et de sacrifices.

À mon frère Jurin et à mes sœurs Élodie et Forneille DANGBEDJI

Pour votre amour et votre soutien inconditionnels. Puisse Dieu, nous garder toujours unis et solidaires.

À Brice et Essénam GBAFFONOU

Pour tout le réconfort et l’affection. Merci d’être là.

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REMERCIEMENTS

Je tiens à remercier Bruno Larue, Gale West et Lota D. Tamini, professeurs au départe-ment d’Économie Agroalidéparte-mentaire et des sciences de la Consommation. Vous m’avez soute-nue et encouragée tout au long de ces années d’études. J’ai particulièrement été impressionnée et motivée par votre expertise et votre rigueur dans le travail de recherche. Le processus entourant la rédaction de ce mémoire fut un exercice d’apprentissage, de formation personnelle et professionnelle. Je ressors de cette expérience avec plusieurs acquis et outils. Je vous exprime ici ma profonde gratitude.

Je remercie tous mes amis qui m’ont soutenue de près ou de loin, notamment ceux du CRÉATE (Centre de Recherche en économie de l’Environnement, de l’Agroalimentaire, des Transports et de l’Énergie), pour les encouragements et le partage de connaissances et d’expériences.

Mes remerciements vont également à Agriculture et Agroalimentaire Canada qui a financé cette recherche par le biais du programme WEB’s (Watershed Evaluation Of Beneficial Management Practices).

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Chapitre 1. Introduction 1.1. Problématique

Les préoccupations environnementales actuelles (ex., changements climatiques, perte de biodiversité, pollution de l’eau) font que la population s'intéresse de plus en plus aux interactions entre les activités humaines et la nature. La protection de l’environnement est donc devenue un enjeu majeur de développement durable pour tous les secteurs partici-pant à la vie économique d’un pays. Le secteur agricole n’est pas en reste. En effet, comme le souligne le Plan d’action1 concerté sur l’agroenvironnement et la cohabitation harmo-nieuse 2007-2010, du Gouvernement québécois, la production agricole est interpellée, chaque jour, dans plusieurs de ses réalités telles que la protection de l’environnement et la cohabitation harmonieuse de l’agriculture dans l’espace rural. Il est donc devenu urgent et nécessaire pour les agriculteurs d’adopter des pratiques de gestion bénéfiques (PGB) à l’environnement (best management practices ou BMP en anglais).

L’Institut canadien des engrais (2005) définit une pratique de gestion bénéfique comme une méthode agricole qui permet de réduire les risques pour l’environnement sans pour autant nuire à la productivité. Plus précisément, il s’agit d’une combinaison de pra-tiques considérées comme moyen efficace et pratique (compte tenu des aspects technolo-giques, économiques et institutionnels) de maitrise des sources ponctuelles et diffuses de pollution dans une mesure compatible avec les objectifs de qualité de l’environnement (SWCS, 1982). Les PGB sont souvent utilisées par les gouvernements pour contrôler la pollution et assurer le développement durable.

Pour le MAPAQ (2013), ces pratiques concernent plus particulièrement :

 l’amélioration, la diffusion et la mise à profit des connaissances en matière d’agroenvironnement et de lutte contre les changements climatiques;

1 Plan d’action réalisé conjointement en 2007 par le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ), le ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs (MDDEP) et l’Union des producteurs agricoles (UPA). Document disponible en ligne http://www.agrireseau.qc.ca/agroenvironnement/documents/PlanDActionConcerte.pdf. Page consultée le 21 janvier 2014.

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 la gestion de la biomasse et des résidus agricoles;

 l’efficacité énergétique et la production d’énergie;

 l'utilisation et la gestion des fumiers et des pesticides, notamment sur les plans agronomique et environnemental;

la conservation des sols, de l’air et de l’eau.

De toutes, les préoccupations environnementales liées à l’agriculture, la pollution de l'eau reste un défi. Les décisions humaines affectant de plus en plus la qualité des eaux, leur conservation reçoivent de plus en plus d’attention au niveau des décideurs (Lasley, Wallize, & Glanville, 1984). La qualité de l’eau est, en fait, un indicateur relativement fiable d’autres incidences environnementales, par exemple l’état du sol, la qualité de l’air ou la biodiversité (AAC, 2010).

En 2002, la politique nationale de l’eau2 du gouvernement du Québec retient la ges-tion intégrée de l’eau par bassin versant comme approche à privilégier afin de favoriser la mise en œuvre de solutions plus efficaces et concertées. Cette gestion intégrée à l’échelle des bassins versants, fixe des objectifs à chacun des acteurs dont les agriculteurs.3 Ces ob-jectifs peuvent en général être atteints à travers la mise en œuvre de PGB. Or, la mise en œuvre de ces pratiques engendre des coûts additionnels pour le producteur agricole. Il s’agit donc de trouver un bon équilibre entre des objectifs de développement économique, envi-ronnemental et social.

La présente étude se fait dans le cadre de l’évaluation des pratiques de gestion béné-fiques à l'échelle des bassins hydrographiques (EPBH). Il s’agit d’un programme d’Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) qui vise à mesurer l'incidence écono-mique4 de certaines pratiques de gestion bénéfiques (PGB) et leurs répercussions sur la

2Le Gouvernement du Québec a mis en place sa Politique nationale de l’eau en 2002. Elle s’intitule « L’eau. La vie. L’avenir ». Document disponible au http://www.mddep.gouv.qc.ca/eau/politique/politique-integral.pdf. Page consultée le 19 février 2011.

3 Voir des détails sur la gestion de l’eau par bassins versants à l’adresse

http://www.mddefp.gouv.qc.ca/eau/bassinversant/ Page consultée le 25 janvier 2014.

4 Les activités de recherche à l’échelle des bassins versants ont également des composantes non écono-miques : pédologie, hydrologie, nutrition. Les activités de recherche dans le domaine économique sont réali-sées en étroite collaboration avec ces autres composantes.

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qualité de l'eau dans sept bassins hydrographiques canadiens (AAC, 2007). Ce programme existe depuis 2004 et plusieurs organismes canadiens y participent. Au Québec, les bassins hydrographiques5 ciblés sont la Rivière Bras d'Henri et le ruisseau Fourchette (voir an-nexe 1). Ceux-ci font partie du bassin versant de la rivière Chaudière (voir anan-nexe 2).

Dans notre cas spécifique, il s’agira d’établir un lien entre l’adoption des PGB et les avantages sur l’amélioration de la qualité de l’eau. Plus précisément, il s’agit d’évaluer la performance environnementale et économique des PGB à l’échelle des bassins hydrogra-phiques (AAC, 2010). Pour les bassins du Québec concernés par le projet, seulement quelques pratiques ont été retenues pour des fins d’évaluation : la gestion du fumier, la ro-tation des cultures, l’utilisation réduite d’herbicides, et le contrôle du ruissellement de sur-face.

1.2. Objectifs de recherche

La présente étude a pour but de mesurer les bénéfices perçus par les agriculteurs et les résidents ruraux, suite à des améliorations dans la qualité de l’eau.

Les objectifs spécifiques de cette recherche sont :

 évaluer la perception des agriculteurs et des résidents ruraux6 sur la place et les responsabilités de l’agriculture dans le contrôle de la pollution des eaux;

 évaluer les bénéfices perçus par les agriculteurs et les résidents ruraux suite à l’adoption des PGB et par conséquent, l’amélioration de la qualité de l’eau;

 évaluer comment le risque entourant la performance des PGB influence l’adoption des PGB;

5 « Un bassin hydrographique est une portion de terre qui draine l'eau et la matière organique et qui dissout les nutriments et les sédiments dans un lac ou un ruisseau; il s'agit de la ligne de division topographique à partir de laquelle les eaux de surface s'écoulent dans deux directions différentes. Chaque bassin hydrogra-phique peut être subdivisé en sous-bassins hydrograhydrogra-phiques (ou micro-bassins) » (AAC, 2007).

6 On s’intéresse également aux résidents, car la qualité de l’eau affecte les activités récréatives et la consom-mation d’eau des municipalités.

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 identifier les meilleurs mécanismes de politiques à adopter pour faciliter ou encourager l’adoption des PGB dans le but d’améliorer la qualité de l’eau.

Les données sont collectées à l’aide d’un questionnaire d’enquête adressé aux agri-culteurs et aux résidents ruraux non agricoles. Les informations sur les préférences des agriculteurs et non-agriculteurs résidant en milieu rural permettront l’élaboration de poli-tiques et de mécanismes efficaces pour inciter les producteurs agricoles à adopter les PGB.

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Chapitre 2. Revue de littérature

2.1. Les PGB et la qualité de l’eau

2.1.1. La qualité de l’eau et l’agriculture

Il n’est pas possible de donner une définition formelle de la qualité de l’eau conve-nant à tous les usages qu’on en fait. Généralement, quand on parle de la qualité de l’eau, on se réfère aux aspects liés à la santé, à l’hygiène. C’est dire que l’eau doit répondre à des normes physico-chimiques et bactériologiques précises. La qualité de l’eau est mesurée à partir de l’indice bactériologique et physico-chimique de l’eau (IQBP), qui intègre les neuf indicateurs suivants : azote ammoniacal, chlorophylle a, coliformes fécaux, demande bio-chimique en oxygène, matières en suspension, nitrites et nitrates, phosphore total, satura-tion en oxygène et turbidité. Martin-Ortega, Brouwer, & Berbel (2009) fournissent une dé-finition simple:

Une eau est de qualité modérée lorsqu’elle peut servir à des fins telles que l’irrigation; Une eau de bonne qualité est celle idéale pour les loisirs (ex : natation et pêche, etc.) et la qualité de l'eau est très bonne si elle peut être bue (eau potable). (p. 4)

En milieu agricole, la qualité de l’eau se perçoit à travers la qualité de l’eau des lacs ou des rivières selon les régions. La qualité de l’eau d’une rivière ou d’un lac est directe-ment liée aux activités qui ont lieu dans son bassin hydrographique (MDDEP, 2000). Géné-ralement, la détérioration (s’il y a lieu) est le résultat d’un ensemble de petites actions qui, considérées séparément, semblent inoffensives, mais qui, collectivement, peuvent avoir un impact considérable (MDDEP, 2007).

Dans la région de Chaudière-Appalaches où se situent les micro-bassins de notre étude, le secteur primaire (agriculture, forêt et mines) occupe une place importante dans la structure économique (MDDEP, 2000).

Les contaminants qui atteignent le milieu aquatique, suite à des activités humaines ou non, constituent un problème environnemental majeur. En effet, à une certaine concen-tration, les contaminants peuvent devenir toxiques pour la vie aquatique (MDDEP, 2009).

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De plus, ces activités (entre autres l’agriculture) modifient l’écoulement de l’eau dans le bassin, ce qui peut entraîner l’érosion et la sédimentation dans les cours d’eau et un apport accru en éléments nutritifs et en polluants (MDDEP, 2007).

Les principaux polluants de l'eau, issus de l'agriculture, sont l'azote et le phosphore produits par le fumier et les engrais, les sédiments, les bactéries produites par le fumier, et les pesticides (BVG, 2001). La pollution agricole apparaît comme la forme la plus difficile à prévenir et à nettoyer (Boutin, 2005). Ceci est dû au fait qu'il s’agit de sources de pollu-tion diffuse qui implique de nombreuses exploitapollu-tions agricoles qui utilisent des pratiques très diverses. La pollution diffuse d’origine agricole constitue un problème important sur-tout dans les secteurs où l’élevage du porc est dominant. La dégradation ou l’absence de bandes riveraines, souvent liée aux activités agricoles, constitue également une source de dégradation de la qualité de l’eau (matières nutritives, matières en suspension et coliformes fécaux) et des habitats (MDDEP, 2000).

Pour empêcher cette contamination des cours d’eau, il est suggéré de mettre en place des PGB. Il s’agit d’actions préventives pour préserver ou restaurer l’écosystème la-custre (MDDEP, 2007).

2.1.2. Les pratiques de gestion bénéfiques et la qualité de l’eau

Une pratique de gestion bénéfique (PGB) se définit comme une méthode agricole permettant de réduire les risques d'effets environnementaux sans nuire à la productivité économique (AAC, 2007). Les PGB sont donc reconnues et recommandées aux agricul-teurs afin de limiter les impacts de leurs activités sur l’environnement. Les PGBagricoles peuvent être structurales (exemple : les terrasses, les bassins de retenue, les clôtures, etc.) ou non structurales (filtres de conservation du sol et bandes riveraines, etc.) (Park, Mostaghimi, Cooke, & McClellan, 1994). Les plus connues sont : réduction d'herbicide, gestion du fumier, contrôle des eaux de ruissellement, gestion des rives, rotation des cul-tures.

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Les pratiques de conservation du sol permettent d’augmenter l'infiltration, de ré-duire considérablement le ruissellement, l'érosion et d’améliorer le rendement des éléments nutritifs (Loehr, Jewell, Novak, Clarkson, & Freidman, 1979). Les zones tampons filtrent les polluants et contribuent à ralentir le ruissellement, à réduire les inondations en aval et à stabiliser les berges (Sharp, 2001). Ainsi, bien installées et entretenues, ces zones ont la capacité d'éliminer 50 % ou plus des éléments nutritifs et de pesticides, 60 % des agents pathogènes, et 75 % de sédiments provenant du ruissellement de surface. L'application de ces pratiques permet donc de réduire considérablement le potentiel de pollution des eaux superficielles et souterraines.

Le graphique ci-dessous présente un aperçu des PGB les plus utilisées au Québec en 2007.

Graphique1 : Catégories communes de PGB financées dans le cadre des Programmes na-tionaux de PGB par région, du 31 mars, 2007

Source : Snell, 2007

Wu, Yu, & Zou (2006) ont développé une approche axée sur la qualité des eaux et l’adoption des PGB à l'échelle des bassins versants pour atteindre un contrôle efficace de la pollution diffuse.

Gestion des zones riveraines Épandage du fumier Installation de brise vent Autres

Structures de lutte contre l'érosion (non riveraine)

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Park, Mostaghimi, Cooke, & McClellan (1994) ont évalué l'efficacité de la mise en œuvre des PGB à l’échelle des bassins versants sur les pertes liées à la pollution diffuse. Les paramètres considérés lors de l'évaluation de l'efficacité des PGB sont : l’hydrologie, les concentrations des sédiments et des rendements, les concentrations des éléments nutri-tifs et les rendements. Les PGB mises en œuvre sur le bassin versant incluaient la culture sans labour, une couverture végétale permanente sur les domaines critiques, la protection des terres de pâturage, les détournements, et l’installation d’une structure de rétention des sédiments. Il en est ressorti que la concentration en sédiments pré-PGB et post-PGB était significativement différente. Plus précisément, la concentration en sédiments après l’adoption des PGB a diminué de 20 %. Les PGB ont également réduit significativement la concentration en nutriments tels que le phosphore total et l’azote. Par exemple la concentra-tion moyenne en phosphore a diminué de 35 %. La concentraconcentra-tion maximale en phosphore total quant à elle a diminué de 50 % passant de 18 mg/L À 9 mg/L. Tout ceci vient confir-mer que les pratiques de conservation lorsque bien appliquées permettent de limiter les pertes en éléments nutritifs.

2.1.3. Les déterminants de l’adoption des PGB

Plusieurs études ont analysé les caractéristiques des exploitations et exploitants agricoles afin de déterminer leur influence sur l'adoption de PGB. Knowler & Bradshaw (2007) présentent une revue de littérature sur les facteurs influençant l’adoption de bonnes pratiques de gestion à la ferme. Ghazalian, Larue, & West (2009) ont trouvé que l’éducation, l’âge, le sexe et la résidence sur la ferme ont des effets significatifs sur l’adoption des PGB. Dans le même ordre d’idées, les agriculteurs ayant des niveaux plus élevés d'éducation, les grandes fermes, les fermes ayant des niveaux plus élevés de ventes brutes, et les producteurs qui ont gagné un revenu hors ferme sont généralement les plus susceptibles d'adopter des PGB (Serman & Filson, 1999).

L’adoption des PGB partant généralement d’une prise de conscience, l’interaction et les discussions des agriculteurs avec leurs connaissances (voisins, amis, parents, collègues, etc.) ainsi que leur participation à des activités de vulgarisation auront un effet considérable

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sur la prise de décision. Ceci est confirmé par Tamini (2011) qui a trouvé que les activités de vulgarisation etles clubs-conseilsontun impactpositif etstatistiquement significatif sur la probabilitéd’adoption des PGB. L’accent est donc de plus en plus mis sur les activités de vulgarisation à caractère agroenvironnementale. Ceci en raison de leur capacité à améliorer les performances des producteurs dans la fourniture de biens et services écologiques (Tamini, 2011).

Dans leur article, Prokopy, Floress, Klotthor-Weinkauf, & Baumgart-Getz (2008) présentent une revue de littérature des déterminants de l’adoption des PGB. Le tableau 1 montre les variables indépendantes utilisées dans les différentes études recensées. Les va-riables sont classées en quatre catégories : capacité, attitude, conscience environnementale et caractéristiques de la ferme.

Entres autres auteurs, Traore, Landry, & Amara (1998), Hindsley (2002), Le & Beaulieu (2005) font également une analyse des facteurs qui influencent l’adoption des PGB.

Rodriguez, Molnar, Fazio, Sydnor, & Lowe (2008), présentent des barrières à l’adoption des pratiques de conservation. Ces auteurs ont trouvé comme principaux obs-tacles : les moyens financiers (coût de transition, risques, incertitudes), l’éducation et la formation, la résistance aux changements, le manque de temps, le contexte social, le manque d’infrastructure pour encadrer le développement de l’agriculture durable, les carac-téristiques personnelles.

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Tableau 1 : Les variables expliquant l’adoption des PGB Catégories Sous catégories Significatif

(positif) Significatif (négatif) Non significatif Total Capacité Acres Âge Capital Diversité Éducation Expérience à la ferme Revenu Information Travail Réseau Agence D’affaires Locales Type de propriété Tenure 37 (21) 5(4) 23(8) 22(6) 46(21) 3(2) 33(14) 15(12) 24(15) 50(17) 35(11) 3(2) 12(7) 5(3) 9(8) 16(7) 13(11) 8(4) 3(2) 9(7) 8(4) 14(10) 1(1) 5(3) 5(3) 4(3) — 1(1) 5(4) 12(8) 57(21) 91(18) 150(19) 44(8) 113(31) 47(19) 109(24) 30(13) 98(19) 149(15) 107(11) 21(2) 20(8) 39(8) 95(19) 110(34) 109(26) 181(24) 69(8) 168(42) 58(22) 156(34) 46(20) 127(28) 204(22) 146(18) 24(3) 33(12) 49(11) 116(26)

Attitude Attitude générale Paiements d’adoption Environnementale Rentabilité des pratiques Héritage Qualité de l’environnement Risques 50(17) 15(4) 16(6) 4(3) 5(5) 2(2) 8(6) 14(5) 3(2) — 2(1) 2(1) — 7(4) 265(20) 25(7) 64(7) 15(4) 70(9) 8(1) 83(9) 329(26) 43(9) 80(10) 21(6) 77(11) 10(2) 98(13) Conscience envi-ronnementale Prise de conscience géné-rale Cause Conséquence Connaissance Programme 25(10) 9(5) — 5(4) 12(4) 5(3) 2(2) — — 3(1) 127(10) 25(5) 16(4) 40(3) 47(7) 157(16) 36(9) 16(4) 45(5) 62(8) Caractéristiques de la ferme Animaux Grain Sexe de l’opérateur Autre Rivières Pente Qualité du sol 7(5) 19(6) 1(1) 4(1) 10(3) 21(7) 21(12) 14(7) 9(2) — 2(2) 3(2) 7(4) 14(10) 66(10) 5(2) 30(2) 16(4) 73(4) 24(6) 61(11) 87(14) 33(6) 31(2) 22(7) 86(4) 52(11) 96(22) Notes : - α=0,05

- Les nombres entre parenthèses indiquent combien d’études ont obtenu ce résultat. Par exemple, dans la première colonne, le nombre d’acres a été trouvé positif avec 37 différents modèles utilisés dans 21 études. Générale-ment, lorsque plusieurs modèles sont utilisés dans une étude, ils s’appliquent sur la même base de données.

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2.1.4. Les avantages tirés de l’amélioration de la qualité de l’eau

L’évaluation de la qualité de l'eau est une tâche complexe et multidimensionnelle (Magat, Huber, & Viscusi, 2000). En effet, il est difficile d'assigner une valeur à l'améliora-tion de la qualité des eaux. Pour mesurer l'importance des pratiques agricoles sur la qualité de l'eau, il faut mesurer les avantages et les coûts pour la société. Ces mesures sont correc-tement exprimées en termes de changements dans le bien-être social. Il s’agit de la varia-tion nette des surplus des consommateurs et des producteurs (Ribaudo & Hellerstein, 1992). Il faut donc assumer une relation entre la fonction d'utilité des résidents et la qualité de l'eau ambiante au sein de leurs bassins versants (Poor, Pessagno, & Paul, 2007). Afin d’établir les meilleures politiques possible, il faut donc avoir plus d’informations sur les préférences de la population. De plus, il faut connaitre leur consentement à payer (CAP) ou leur consentement à recevoir (CAR) selon le cas. Le calcul de ce prix implicite permettra d’estimer la valeur d’une politique agroenvironnementale en évaluant son impact en ma-tière de pourcentage d’amélioration des critères de qualité de l’eau (Magat, Huber, & Viscusi, 2000).

Weber et Stewart (2009) ont trouvé que la population accorde une valeur élevée à la restauration. Ceci offre des justifications économiques pour la gestion intensive des rives.

Travisi et Nijkamp. (2008) ont trouvé que le consentement à payer dépend du profil socio-économique des répondants, tel que l'âge et du niveau de préoccupation concernant les risques des pesticides.

Comme le soutient Tamini et al. (2012), la façon dont les PGB peuvent avoir une incidence sur l'efficacité et sur d'autres aspects de la performance économique a d'impor-tantesimplications sur les politiques publiques.

Dans leur étude, Lasley, Wallize, & Glanville (1984) ont trouvé suite à un sondage qu'une proportion importante des agriculteurs est favorable à un soutien accru dans la servation. Ils ont conclu qu’en général, les agriculteurs voient l’investissement dans la con-servation comme étant un contributeur important au développement rural, et bénéfique pour les agriculteurs et les zones rurales dans leur ensemble. La majorité pense que le

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finance-12

ment public pour la protection et la valorisation des terres, des eaux et de la faune devrait être augmenté (Lasley, Wallize, & Glanville, 1984).

La mise en œuvre de la mesure des bénéfices fondés sur le consentement de la so-ciété à payer pour la qualité de l’eau exige que l'on tienne compte de la structure des me-sures de qualité de l'eau devant être évaluée (Viscusi, Huber, & Bell, 2008). La section sui-vante présente les différentes méthodes pouvant être utilisées dans le cadre de l’évaluation économique de l’amélioration de la qualité de l’eau.

2.2. Les méthodes d’évaluation des biens environnementaux

Les bénéfices ou coûts des externalités environnementales générées par les pra-tiques agricoles (utilisation de pesticides, d’herbicides, gestion du fumier, etc.) et leur im-pact sur la qualité de l’eau ne sont pas directement mesurables sur un marché. Il sera donc nécessaire d’appliquer des méthodes non marchandes pour leur évaluation.

Il existe deux principales approches de détermination de la valeur des biens envi-ronnementaux (voir (Boyer & Polasky, 2004) et (Birol, Karousakis, & Koundouri, 2006a) :

Les méthodes directes ou méthodes de préférences déclarées (stated prefe-rence methods en anglais). Il s’agit de l’évaluation contingente (CV), des choix expérimen-taux (CE), de l’analyse conjointe ou de l’analyse de pondération.

Les méthodes indirectes ou méthodes de préférences révélées (revealed pre-ference methods en anglais). Il s’agit entre autres de : la méthode des coûts de déplacement, les modèles de prix hédoniques, les méthodes de réponses à des doses, de dépenses d'évi-tement et de coûts évités, la valeur des risques sur la vie et la santé et les modèles de choix public.

Dans les sections suivantes, nous revenons en détail sur la description de ces princi-pales approches d’estimation et leur utilisation dans le cadre de la problématique de la qua-lité de l’eau.

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2.2.1. Les méthodes de préférences révélées

Les méthodes de préférences révélées sont aussi connues sous le nom de méthodes d’évaluation indirecte. Ici, l’analyse s’appuie généralement sur le comportement actuel des répondants par rapport à des produits ou des situations déjà existantes.

2.2.1.1 La méthode des coûts de déplacement

C’est une méthode proposée par Hotelling (1949). Il s’agit de trouver comment la mesure dans laquelle un individu est prêt à passer du temps et à engager des frais de voyage à un site de loisirs peut-être prise pour en déduire une évaluation (Turner, 1991). La méthode de coût de déplacement est surtout utilisée pour estimer la valeur d’usage active d’un bien environnemental. Elle permet d’estimer les valeurs d’usage associées à certains biens environnementaux. Il s’agit par exemple d’évaluer les coûts ou les bénéfices décou-lant d’un changement de la qualité de l’eau. Ceci permet de déterminer le consentement à payer pour accéder au site.Plusieurs études ont utilisé cette méthode pour évaluer la valeur de la qualité de l’eau. Ces études se sont surtout intéressées aux sites de loisirs situés aux alentours des lacs et rivières.

Dans le cadre du « Clean Water Act of 1978 », Desvousges & Smyth (1984) ont uti-lisé les coûts de déplacement pour comparer des approches alternatives et ainsi estimer les avantages de loisirs liés à des améliorations dans la qualité de l'eau aux États-Unis. Par exemple, pour les utilisateurs de la rivière Monongahela, le modèle a prédit un bénéfice de 83 $ par an si la dégradation de la qualité de l’eau est évitée. L’amélioration de la qualité de l’eau de la rivière à un niveau acceptable pour la nage a été estimée à 15 $/utilisateur par an (dollars de 1981).

2.2.1.2 La méthode de dépenses d'évitement et de coûts évités

Cette méthode suggère que les dépenses effectuées par les ménages dépendent de la valeur implicite qu’ils accordent à l’environnement (Bergeron & Romain, 2004). On peut

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citer par exemple l’achat de produits cultivés biologiquement, l’utilisation des savons sans phosphates (pour préserver la qualité de l’eau de leur municipalité) ou encore l’adoption des PGB par les agriculteurs pour limiter la pollution.

2.2.1.3 Le modèle de prix hédonique

La méthode de prix hédonique exige de trouver un marché de biens ou de services qui est influencé par un bien non marchand (Turner, 1991). Et, une des caractéristiques de ces biens (par exemple une maison ou des terres) peut être la qualité de l’eau. Une détério-ration de la qualité d’un lac peut ainsi entraîner une baisse de la valeur des propriétés qui sont situées autour de lui. Poor, Pessagno, & Paul (2007) ont utilisé ce modèle pour analy-ser la qualité de l’eau ambiante dans le bassin versant de la rivière St-Mary aux États-Unis. La qualité de l’eau est mesurée essentiellement à partir des sources de pollution diffuse. Les données de surveillance dans le bassin versant permettent de déterminer les valeurs margi-nales que les résidents attribuent à la qualité de l’eau dans leur région. Les auteurs ont trou-vé que les résidents démontrent un intérêt envers la qualité de l’eau dans leur région; ceux-ci sont notamment prêts à payer annuellement pour améliorer la qualité de l’eau. Cette étude a trouvé qu’une augmentation d’une unité (mg/L) des solides en suspension dans la rivière à un impact négatif de -1,086 $ sur le prix des maisons. La concentration en azote inorganique (contribuant à l’eutrophisation) a, quant à elle, un impact négatif de -17,642 $ sur le prix des maisons. Notons que Brown & Mendelsohn (1984) ont développé des mé-thodes combinant la méthode des prix hédoniques et des coûts de transport. Ces auteurs proposent, dans une première étape, d’estimer des coûts de déplacement. Dans une deu-xième étape, les sites sont repartis selon leurs coûts de déplacement et pour chacun des groupes les prix hédoniques sont estimés.

2.2.2 Les méthodes des préférences déclarées

Dans les méthodes des préférences déclarées, il est demandé aux consommateurs ce qu’ils seraient prêts à payer ou à accepter pour un changement de la qualité de l’environnement.

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2.2.2.1 La méthode de l’évaluation contingente

Le type d’étude le plus utilisé pour les préférences déclarées est l’évaluation contin-gente (EC). Elle permet de déterminer les préférences des individus, en termes monétaires, pour obtenir un changement dans la qualité de l’environnement, par exemple, ou pour évi-ter un scénario donné.

Des scénarios hypothétiques sont présentés à un échantillon d’individus qui décla-rent leur consentement maximal à payer ou le minimum de compensation qu’ils sont prêts à accepter pour l’amélioration de la qualité de l’environnement (Birol, Karousakis, & Koundouri, 2006b). Carson (2004) présente une riche bibliographie sur l’évaluation contin-gente. L’évaluation contingente a été évaluée et comparée à d'autres méthodes des préfé-rences déclarées dans plusieurs études et articles. [Voir (Boxall, Adamowicz, Swait, Williams, & Louviere, 1996) (Colombo, Calatrava-Requena, & Hanley, 2006), (Hanley, et al., 1998)].

L’EC a été utilisée pour déterminer la valeur attribuée à la qualité de l’eau. Citons par exemple, (Atkins, Burdon, & Allen, 2007) et (Nallathiga & Paravasthu, 2010). Imandoust & Gadam (2007) ont utilisé l’EC pour déterminer si les habitants proches de la rivière de Pavana en Inde étaient prêts à payer pour améliorer la qualité de l’eau.

Birol, Karousakis, & Koundouri (2006a) ont également utilisé l’évaluation contin-gente pour estimer la valeur de l’amélioration de la qualité de l’eau de la rivière Cheimadi-tida en Grèce. Les attributs utilisés sont : la biodiversité, l’étendue des sources d’eau (km2), la recherche et l’éducation, la formation des habitants en matière d’environnement et un moyen de paiement. Pour cette expérience, trois scénarios de gestion : niveau bas (détério-ration) et niveau élevé (amélio(détério-ration) et un statu quo (aucune gestion) ont été proposés à des individus représentatifs de la population grecque et âgée de plus de 18 ans. Il ressort de cette étude que 84,4 % des répondants ont un CAP positif (22,3 €) pour passer du scénario A (aucune gestion) au scénario B (maintenir les conditions actuelles); 86 % ont un CAP positif (34,9 €) pour passer du scénario A au C (améliorer les conditions actuelles).

Certaines études ont identifié des limites à cette méthode et questionné la validité des résultats obtenus. En effet, le fait de répondre par « oui ou non » peut entraîner un biais

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dans la mesure où le répondant peut répondre « oui » à la protection de l’environnement pour ne pas être mal vu. Puisqu’il s’agit de situations hypothétiques, le consentement à payer peut donc être exagéré par rapport à la situation réelle. Le panel de la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) a émis des recommandations afin que ce type d’évaluation soit plus crédible (voir [Bergeron & Romain, 2004]).

2.2.2.2 La méthode de l’analyse conjointe

L’analyse conjointe est une autre méthode de préférences déclarées où l'on demande aux répondants de ranger sur une échelle ou de choisir (en fonction de leurs préférences) entre des produits qui sont décrits par plusieurs attributs. Si l’un des attributs est un prix, les valeurs peuvent alors être déduites à partir des notations (Freeman, 2003). Cette méthode est généralement utilisée en marketing. Alriksson et Öberg (2008) présentent une revue de 84 études qui ont utilisé l’analyse conjointe pour évaluer des biens environnementaux. Bien que cette méthode soit encore très peu utilisée dans le domaine environnemental, les au-teurs pensent que la tendance à la promotion des biens et services écologiques (verts) fera augmenter l’utilisation de cette méthode dans les années à venir.

2.2.2.3 La méthode des choix expérimentaux

La méthode des choix expérimentaux (CE) permet de déduire les préférences des gens pour un ensemble d'attributs pertinents (Louviere, Hensher, & Swait, 2000). Au dé-part, cette méthode était surtout utilisée pour des biens de consommation tels que les voi-tures, les savons, les moyens de transport. C’est-à-dire des biens pour lesquels le répondant avait déjà eu l’occasion de prendre une décision (Smyth, Watzin, & Manning, 2009). Mais de plus en plus, ce modèle est appliqué à des biens non marchands comme l’environnement, l’écosystème. Adamowicz, Louviere, & Williams (1994) sont les pre-miers à avoir appliqué les CE pour l’évaluation de biens non marchands. Et depuis, le nombre d’études ne cesse d’augmenter.

Lors de CE, plusieurs scénarios hypothétiques sont présentés. Pour chaque scénario, l’individu est invité à choisir son alternative préférée parmi les options présentées. Chaque

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alternative présentée comporte un certain nombre d’attributs dont un ‘monétaire’. En fai-sant leur choix entre les différents scénarios, un compromis implicite est fait entre les ni-veaux des attributs des alternatives présentées [(Alpízar, Carlsson, & Martinsson, 2001); (Morrison, Bennett, & Blamey, 1999)]. La méthode des choix expérimentaux donne la va-leur d’un bien en évaluant séparément les préférences des individus pour les attributs spéci-fiques qui le caractérisent (Alpízar, Carlsson, & Martinsson, 2001). (Louviere, Hensher, & Swait, 2000) présentent une discussion sur les méthodes de préférences déclarées et sur les choix expérimentaux.

Plusieurs études ont utilisé les CE pour évaluer la qualité de l’eau. Morrison, Bennett, & Blamey (1999) utilisent la méthode des CE pour estimer la valeur attribuée à la gestion des sources d’eau. Plus précisément, ils ont estimé les valeurs de non usage attri-buées aux zones humides en Australie.

Plus récemment, Smyth, Watzin, & Manning (2009) ont conduit une enquête basée sur les choix expérimentaux. Ils ont ainsi obtenu de l’information sur les préférences so-ciales pour les caractéristiques du Lac Champlain7. Les auteurs investiguaient entres autres les cinq attributs suivants (comportant chacun trois niveaux) : la clarté de l’eau, la proliféra-tion des algues bleues, la consommaproliféra-tion de poisson, la fermeture des plages, l’utilisaproliféra-tion de la terre ainsi que l’invasion par la châtaigne d’eau.

Dans le cadre de l’European Water Framework Directive initiée en 2000, Poirier et Fleuret (2010) ont utilisé la méthode des CE pour évaluer les préférences des résidents pour la gestion de la qualité de l’eau sur quatre sites récréatifs appartenant à un bassin spécifique de la Normandie, en France. En choisissant cette méthode, les auteures voulaient estimer la valeur d’une amélioration de la qualité de l’eau au niveau de la Côte Fleurie, de la Touques, de la Dives et de la Vie. Quatre attributs spécifiques aux sites possédant chacun deux ni-veaux et un statu quo ont été utilisés. Il s’agit de sites d’activités récréatives aquatiques. L’attribut monétaire avait quatre niveaux (10 €, 20 €, 30 €, 40 €) et le statu quo (0 €). Ils ont trouvé une contribution annuelle variant selon le modèle d’estimation utilisé : 4,94 € à

7 Lac situé entre New York et Vermont.

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21,95 € pour le Logit à Paramètres aléatoires et 9,76 € à 22,06 € dans le cas du Logit Con-ditionnel.

Birol et al. (2006 b) ont également utilisé les CE pour estimer la valeur de l’amélioration de la qualité de l’eau. L’étude a été réalisée avec la même population que celle mentionnée plus haut dans Birol et al. (2006a) et comprenait donc les mêmes attributs. Les répondants ont un consentement à payer positif pour tous les attributs. Ces estimations indiquent : un CAP pour la biodiversité variant de 15.10 € à 15.62 € selon le modèle d’estimation utilisé, 9.86 € à 11.02 € pour l’augmentation des sources d'eau, 8.69 € à 10.79 € pour l’amélioration de la recherche et de l’éducation. La volonté de contribuer à la formation, en environnement, de quelques habitants de la région varie de 12 cents à 15 cents.

En utilisant le CE, Travisi et Nijkamp (2008) ont déterminé la valeur économique que les ménages italiens attribuent à la réduction de l’utilisation des pesticides en agricul-ture. En moyenne, le répondant moyen consentirait à payer pour la biodiversité, les eaux souterraines et la santé un montant respectif de 3.87 €, 2.27 €, 0.15 €/mois.

Kosenius (2010) a utilisé les choix expérimentaux pour déterminer les préférences du public en ce qui a trait à certains attributs de la qualité de l’eau. Ces attributs sont la clar-té de l’eau, la prolifération des algues bleu-vert, l’état de la population des fucus, le nombre de cyprinidés dans le golfe de Finlande. Ceci dans le but de déterminer les consentements à payer pour l’amélioration de la qualité de l’eau.

2.2.3 Choix de la méthode d’évaluation

Selon Bergeron & Romain (2004), les méthodes directes permettent d’estimer une mesure exacte pour le changement de bien-être. Adamowicz, Louviere, & Williams (1994) soulignent que le design statistique des méthodes de préférences déclarées fait que la coli-néarité possible entre les différents attributs est éliminée, ce qui est souvent un problème dans le cas des préférences révélées. De plus, celles-ci sont difficiles à appliquer à l'évalua-tion des problèmes environnementaux, puisque de nombreuses situal'évalua-tions ne peuvent être

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étudiées directement (Alriksson & Öberg, 2008). D’un autre côté, les méthodes directes sont qualifiées d’expérimentales et sont donc souvent critiquées à cause de la nature hypo-thétique des questions posées et du fait que le comportement des répondants n’est pas ob-servé (Adamowicz, Louviere, & Williams, 1994).

Plusieurs études ont également comparé les méthodes des préférences déclarées (no-tamment l’EC et les CE) entre elles. Le test de « validité convergente » est généralement utilisé pour estimer la différence de mesure entre les deux méthodes. Le consentement à payer (CAP) est l’une des principales mesures de comparaison entre les deux méthodes. Il ressort souvent que le CAP est plus élevé avec l' EC qu’avec les CE.

Par exemple, Boxall, Adamowicz, Swait, Williams, & Louviere (1996), ont trouvé que les bénéfices retirés de l’amélioration de la qualité de l’environnement en utilisant la méthode EC étaient 20 fois supérieurs aux résultats des CE. Les auteurs suspectent que les répondants n’ont pas tenu compte des substitutions possibles en faisant leur choix. La prin-cipale critique faite à la méthode de l’EC est que ses résultats dépendent de l’exactitude des informations fournies. Par contre, les résultats des CE dépendent moins de la description fournie sur le bien qui est évalué, mais davantage de l’exactitude des caractéristiques et des attributs utilisés pour décrire le bien (Boxall et al. 1996). De plus, les CE permettent de questionner le répondant sur plusieurs scénarios possibles; ce qui n’est pas le cas dans l’EC standard. L’utilisation des choix expérimentaux est donc plus avantageuse.

Birol, Karousakis, & Koundouri (2006a) ont trouvé des résultats différents pour le CAP. La volonté de payer dans le cas des choix expérimentaux est de loin inférieure à celle obtenue en réalisant une évaluation contingente. Ceci vient confirmer les résultats de Boxall, Adamowicz, Swait, Williams, & Louviere (1996).

Il faut toutefois noter que quelques rares études ont trouvé des résultats différents. Hanley, et al., (1998) et Weber & Stewart (2009), entre autres, ont trouvé que les résultats du CE étaient supérieurs aux résultats de l’EC. Weber et Stewart (2009) ont pour EC un CAP de 46,80 $ par ménage par an pour la restauration complète du Middle Rio Grande,

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tandis que le CE indique un CAP de 156,60 $. Weber et Stewart expliquent ceci par le fait qu’il y avait les deux types de méthode sur le questionnaire; le répondant ayant déjà choisi une option pour le CE, ne voulait pas dépenser plus pour l’EC.

Dans la littérature, certains auteurs combinent les préférences révélées et déclarées bénéficiant ainsi de l’avantage des unes et des autres méthodes. Par exemple, Adamowicz, Louviere, & Williams (1994) ont utilisé conjointement les deux méthodes et il en est de même dans l’étude de Revelt & Train (1998) sur la valorisation de l’économie d’énergie associée à certains appareils électroménagers.

La qualité de l’eau n’est pas un bien marchand. Pour estimer le consentement à payer pour l’amélioration de sa qualité suite à l’adoption des PGB, la méthode des préfé-rences déclarées est celle qui convient le plus. Plus précisément, la méthode des CE semble être la plus appropriée aux objectifs de la présente étude qui en rappel sont :

 évaluer la perception des agriculteurs et des résidents ruraux sur la place et les responsabilités de l’agriculture dans le contrôle de la pollution des eaux;

 analyser les attitudes des répondants par rapport à l’incertitude entourant l’effet des PGB sur la qualité de l’eau;

 évaluer les bénéfices perçus par les agriculteurs et les résidents ruraux suite à l’adoption des PGB et par conséquent, l’amélioration de la qualité de l’eau;  calculer le consentement à payer (recevoir) pour une eau de meilleure qua-lité;

 identifier les meilleurs mécanismes de politiques à adopter pour faciliter ou encourager l’adoption des PGB dans le but d’améliorer la qualité de l’eau.

En effet, l'approche des CE est plus souple en ce qui a trait à la « modélisation des arbitrages entre attributs » (Adamowicz, Louviere, & Williams, 1994). Par ailleurs, cette

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méthode permet d’utiliser aussi bien des attributs quantitatifs que qualitatifs. On peut donc combiner des attributs de diverses natures en élaborant les scénarios.

De plus, Poirier et Fleuret (2010) suggèrent que si nous désirons estimer une valeur pour chacun des attributs spécifiques, la décision d'utiliser un CE au lieu d'une méthode d'évaluation contingente est bien justifiée. En effet, selon ces mêmes auteurs, l’EC produit une valeur unique pour un changement de qualité de l'environnement tandis qu’un cadre CE génère des valeurs indépendantes pour les attributs individuels d'un programme environ-nemental. Les taux marginaux de substitution entre les attributs non monétaires peuvent également être obtenus [(Alpízar, Carlsson, & Martinsson, 2001); (Carlsson, Frykblom, & Liljenstolpe, 2003)]. Ces avantages sont importants étant donné les objectifs de la présente étude qui portent à la fois sur les bénéfices perçus et les meilleures options de politique permettant d’atteindre des objectifs d’adoption des PGB et, in fine, d’amélioration de la qualité de l’eau.

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Chapitre 3. Méthodologie

3.1. La méthode des choix expérimentaux (CE)

Selon Alpizar et al. (2001), l’élaboration d’un CE se fait en quatre étapes :

 définition des attributs et de leurs niveaux;  construction du design expérimental;

 contexte expérimental et élaboration du questionnaire;  choix de l'échantillon et de la stratégie d'échantillonnage.

Les auteurs mentionnent également que ces quatre étapes doivent être considérées comme un processus dynamique. En effet, les étapes peuvent être reprises plusieurs fois en incorporant de nouvelles informations s’il y a lieu.

3.1.1. Construction du design expérimental

Le design orthogonal est celui couramment utilisé dans la littérature. « L’orthogonalité est satisfaite lorsque les niveaux de chaque attribut varient indépendam-ment les uns des autres » (Huber et Zwerina, 1996). Ce type de design tend à minimiser la corrélation dans les données.

Une autre façon de créer un design est d’utiliser la méthode du design efficace. Elle permet de mesurer l’efficacité des designs (Ferrini & Scarpa, 2007). Cette méthode se base sur la matrice de variance covariance pour trouver la combinaison qui donne des para-mètres précis et fiables (Choice Metrics, 2010). Il s’agit donc de minimiser le déterminant de cette matrice; la matrice étant l’inverse de la matrice d’information de Fisher (Train, 2003). Cette méthode requiert un certain nombre d’informations. En effet, deux contraintes se posent :

 On ne peut connaitre la matrice sans avoir estimé au préalable les para-mètres;

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 On ne peut connaitre les paramètres sans avoir recueilli les données auprès de la population cible. Il faut donc établir des a priori8 sur la valeur des paramètres (Huber & Zwerina, 1996); (Choice Metrics, 2010).

La méthode du design efficace a été retenue afin d’améliorer la précision avec la-quelle les paramètres sont estimés. Le logiciel NGENE9 1.0.2 est utilisé pour la construc-tion du design expérimental. Il nous permettra de nous assurer que les propriétés théoriques des choix expérimentaux sont respectées.

Pour construire le design expérimental, les étapes suivantes sont suivies :

 Déterminer les alternatives à étudier;  Identifier les attributs;

 Déterminer si les paramètres sont spécifiques à l’alternative ou génériques;  Spécifier la fonction d’utilité;

 Déterminer une valeur a priori pour chacun des paramètres;  Choisir les niveaux des attributs, le nombre de scénarios;

 Après plusieurs itérations, retenir le design qui minimise le déterminant de la matrice variance-covariance des paramètres estimés. La matrice de variance covariance est en fait la négative de l’espérance de la matrice d’information de Fischer. Il existe plusieurs critères pour faire ce choix. Celui utilisé par le logiciel NGENE est l’erreur-D.

 Le design ayant la plus petite erreur D est celui retenu.

L’erreur D est une mesure agrégée obtenue à partir des variances et covariances des paramètres de la fonction d’utilité. Elle est définie dans Scarpa & Rose (2008) comme suit :

Erreur D = [Det((β, xsj)]1/K

8 Il s’agit de donner des valeurs approximatives aux paramètres selon la littérature existante sur le sujet, et selon le signe attendu. Ces valeurs ne sont pas toujours exactes, mais restent le plus près possible de la réalité. 9 Il s’agit d’un logiciel distribué par ChoiceMetrics. www.choice-metrics.com

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où  est la matrice de variance-covariance asymptotique des variables (xsj), β est le coeffi-cient de la fonction d’utilité, s désigne l’alternative et j désigne le choix, et K est le nombre de coefficients estimés. L’erreur D est générée automatiquement par le logiciel Ngene.

3.1.2. Identification des alternatives et sélection des attributs

L’ensemble de choix doit présenter trois caractéristiques. Comme suggérées, par Train (2003 : p.15),les alternatives doivent être mutuellement exclusives dans la perspec-tive du décideur. Ainsi, le choix d'une alternaperspec-tive implique nécessairement ne pas choi-sir les autres alternatives. Deuxièmement, l'ensemble des choix doit être exhaustif,

c’est-à-dire que toutes les alternatives possibles doivent être

présen-tées. Le décideur choisit alors une des solutions de rechange. Troisièmement, le nombre d'alternatives peut être élevé, mais ne peut pas être infini.

Pour la présente étude, trois alternatives ont été retenues. Comme le recommande Adamowicz, Louvière, & Swait (1998), un statu quo a été introduit dans les choix. En effet, ces auteurs insistent sur le fait qu’on devrait créer les choix expérimentaux de façon à per-mettre aux répondants d’opter ou non pour les différentes alternatives proposées. Ceci im-plique une utilité de réservation non nulle. Autrement dit, l’argent qui n’est pas investi dans l’une des deux options PGB peut être investi ailleurs et peut se procurer un niveau d’utilité strictement positif.

Comme abordés au chapitre 2, du fait des activités agricoles, des sédiments sont dé-placés de leur point d’origine puis déposés ailleurs sur la terre ou dans les cours d'eau. Il s’agit d’un processus naturel, mais les activités humaines peuvent exacerber le processus et contribuer à augmenter la charge de sédiments. Le niveau de phosphore est l’une des prin-cipales problématiques des cours d’eau au Québec. Un excès en éléments nutritifs entraîne la multiplication des végétaux aquatiques et peut conduire à une eutrophisation des cours d’eau et à la prolifération des algues bleu-vert.

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En fonction de la revue de littérature effectuée, les deux éléments suivants ont été retenus parmi tant d’autres comme indicateurs de la qualité de l’eau :

- La réduction combinée de la quantité de phosphore total, d’azote et de sédi-ments présents dans le bassin versant;

- La réduction de la présence de coliformes dans les cours d’eau.

Selon la topographie, la qualité du sol, les variations climatiques et le mode d’application, le niveau d’efficacité d’une ou de plusieurs combinaisons de PGB varie d’une ferme à l’autre. Une même combinaison de pratiques pourrait donc entrainer 15 %, 30 % ou 45 % de réduction des résidus nuisibles à la qualité de l’eau. On ne peut donc pré-voir avec précision l’effet de l’adoption de ces pratiques sur l’amélioration de la qualité de l’eau.

Afin d’internaliser l’incertitude par rapport aux réductions de résidus et de bactéries, nous présentons trois niveaux de réduction probable aux répondants. Ceci est une façon d’introduire la notion d’écarts types comme attribut. Plusieurs modèles de comportement en situation d’incertitude sont basés sur la moyenne et l’écart-type des gains (Chavas, 2004). L’avantage de présenter une distribution symétrique de trois niveaux de réduction est que la différence entre les bornes inférieures et supérieures par rapport à la moyenne, le deuxième niveau de réduction, est l’écart-type. Nous n’avons pas à définir le concept aux répondants.

Afin de minimiser le nombre de choix à présenter aux répondants, le design généré a été divisé en deux blocs aléatoires de six scénarios chacun. En effet, la fiabilité des ré-ponses du sondage dépend aussi du nombre de scénarios présentés. Il faut limiter les attri-buts et les combinaisons afin de faciliter la tâche aux répondants (Magat, Huber, & Viscusi, 2000).

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27 Le coût de la politique environnementale

Pour Mitchell et Carson (1989), le point de référence pertinent pour l’évaluation des politiques environnementales est celui où les bénéfices sont mesurés relativement à l’état

initial de bien-être des agents. Un attribut monétaire a été associé au niveau de réduction

des émissions afin de mesurer le consentement à payer. Le consentement à payer est sou-vent préféré au consentement à accepter/recevoir une compensation dans la mesure où il correspond à une estimation plus prudente (Arrow et al., 1993). Toutefois, comme il est possible qu’une fraction non-négligeable de la population visée ait besoin d’une compensa-tion pour adopter une PGB et que l’adopcompensa-tion de PGB pourrait faire augmenter les profits des agriculteurs dans certains cas, les valeurs de notre attribut monétaire impliquent des coûts et des profits.

Les différents niveaux, c’est-à-dire les montants hypothétiques utilisés doivent être choisis de façon à ce que 80- 90 % des répondants votent pour le programme proposé au plus bas coût, 50 % aux coûts moyens et 10 – 20 % au coût le plus élevé. Ces montants sont validés lors du pré-test (Roy-Vigneault, 2009).

Afin de mesurer ceci, deux attributs monétaires ont été ajoutés au design :  Coût ou profit de l’agriculteur suite à l’adoption des pratiques;

 Augmentation de taxe pour chaque contribuable pour subventionner l’adoption des PGB par les agriculteurs.

En tout, quatre attributs génériques ont été présentés aux répondants dont deux pre-nant en compte l’incertitude et deux qui sont monétaires.

Un texte explicatif est présenté aux répondants. Le tableau 2 présente un exemple de scénarios proposés aux répondants.

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Tableau 2 : Les attributs et leurs niveaux

1er scénario pour améliorer l’eau Adopter la pratique #1 Adopter la pratique #2 Aucune des deux

Réductions probables de

coli-formes 25 % ou 35 % ou 45 % 20 % ou 25 % ou 30 %

Maintenir la situation

ac-tuelle.

Réductions probables de

phosphore, d’azote et de sédiments 0 % ou 20 % ou 40 % 25 % ou 40 % ou 55 % Votre coût net ou profit net Profit de 5 $/acre Coût de 10 $/acre

Augmentation de taxe pour chaque contribuable

2 $/an 18 $/an

Cochez l’option que vous préférez.

3.1.3. Pré-test

Comme suggéré par Smyth, Watzin, & Manning (2009), la meilleure façon de ré-duire les difficultés dans les choix est de prétester l'instrument d'enquête au moyen d'entre-vues, groupes de discussion et de mise en œuvre d’enquête pilote. Un prétest a donc été réalisé pour chacune des deux versions de questionnaires décrits plus bas.

Une première série de choix a été générée pour le prétest. Les « a priori » ont été choisis en fonction des signes attendus et de l'importance relative attendue des différentes variables.

La tâche dans un groupe de discussion est de déterminer le nombre d'attributs, les niveaux d'attributs, et les valeurs réelles des attributs. Ceci est important pour connaitre le niveau minimum et maximum de chacun des attributs à inclure, de façon à être crédible (Alpízar, Carlsson, & Martinsson, 2001).

Les participants au prétest ont reçu chacun 50 $. L’estimation des données collec-tées a permis de réviser les « a priori ». Ces nouvelles informations ont permis de générer une nouvelle série de choix à présenter à la population cible.

(43)

29

3.2. Élaboration des questionnaires et collecte de données

Aux fins de l’étude, deux questionnaires ont été produits : un destiné aux produc-teurs agricoles dans la région de Chaudière-Appalaches et le deuxième destiné à des rési-dents ruraux non agriculteurs. L’année de référence du questionnaire est 2011 et le sondage a eu lieu entre les mois de mars et juin 2012. Le questionnaire destiné aux agriculteurs est de type postal. Celui destiné aux résidents a été mené à l’aide d’un sondage par internet.

Des questions utilisant les choix expérimentaux (méthode de préférence déclarée) ont été incluses dans les questionnaires. Le questionnaire des agriculteurs est subdivisé en six parties qui sont :

 Partie A : Questions générales par rapport à l’environnement

 Partie B : Questions par rapport aux pratiques agricoles et l’environnement  Partie C : Questions par rapport aux pratiques agricoles et l’eau

 Partie D : Opinions par rapport aux PGB pour l’eau (incluant 6 scénarios ex-périmentaux)

 Partie E : Questions par rapport aux clubs-conseils

 Partie F : Questions par rapport à l’agriculteur et à son exploitation agricole

L’enquête pour les résidents ruraux a été menée par internet par la firme de sondage SOM. Il comportait les parties suivantes :

 Partie A : Questions générales par rapport à l’environnement;

 Partie B : Questions par rapport aux pratiques agricoles et l’environnement;  Partie C : Questions par rapport aux pratiques agricoles et l’eau;

 Partie D : Opinions par rapport à l’adoption des pratiques agricoles béné-fiques (incluant six scénarios expérimentaux);

 Partie E : Questions par rapport aux répondants (caractéristiques sociodémo-graphiques).

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30

Ces différentes questions permettent d’avoir de l’information sur les perceptions des répondants par rapport à la qualité de l’eau et d’évaluer les bénéfices découlant de l’amélioration de deux facteurs définissant la qualité. La partie D permet d’évaluer les di-vers compromis que les répondants sont prêts à accepter pour sécuriser l’augmentation es-pérée d’amélioration de la qualité ou une diminution de la variabilité dans l’amélioration de la qualité. L’inclusion des choix expérimentaux dans le questionnaire permet de mesurer comment des variations dans les attributs impactent l’utilité des répondants. On obtient ainsi de l’information sur les consentements à payer ou à recevoir. Il est alors possible de comparer les producteurs agricoles et les résidents dans leur aptitude à promouvoir les pra-tiques de conservation.

La dernière partie du questionnaire est réservée à des questions d’ordre sociodémo-graphique pour avoir plus d’informations sur les répondants et leur mode de vie. Selon Dillman (2007), le fait de mettre les questions sociodémographiques à la fin du question-naire est stratégique. En effet, les répondants sont ainsi moins enclins à éviter de remplir le questionnaire.

L’ensemble du questionnaire a été soumis à l’approbation du Comité éthique de la recherche avec des êtres humains de l’Université Laval (CERUL).

Le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation (MAPAQ) a fourni les adresses des producteurs agricoles exerçant dans le bassin de la rivière Chaudière et Etchemin suite à un avis positif de la Commission d’Accès à l’Information du Québec. Le questionnaire a été envoyé aux agriculteurs par la poste. Selon Trochim (2006), il y a plu-sieurs avantages à utiliser la poste, comparée à d’autres méthodes. Plus spécifiquement, le coût est relativement faible et on peut joindre une plus grande quantité de répondants en milieu rural, pourvu que les adresses obtenues soient à jour. Aussi, les répondants peuvent remplir le questionnaire à leur propre rythme. Cependant, le principal inconvénient de ce type d’enquête est que les taux de réponse sont généralement plus faibles. Il faut donc en-voyer un grand nombre de questionnaires pour espérer avoir un certain pourcentage de

Figure

Tableau 1 : Les variables expliquant l’adoption des PGB
Tableau 2 : Les attributs et leurs niveaux
Tableau 3: Efficacité des PGB (% d’émissions polluantes évitées) et coût annuel  moyen ($/acre/an)
Graphique 2 : Distribution du niveau d’éducation pour les agriculteurs et les résidents  ruraux
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Références

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