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La confiance dans les équipes virtuelles : formes et mécanismes de développement

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Academic year: 2021

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LA CONFIANCE DANS LES EQUIPES

VIRTUELLES : FORMES ET MECANISMES DE

DEVELOPPEMENT

Nabila JAWADI

Université de Paris Dauphine – Centre de recherche CREPA Tél. : 00 33 1 44 05 44 05

Fax : 00 33 1 44 05 49 49 nabila.jawadi@laposte.net

Résumé : Les études faites sur la confiance dans les équipes virtuelles tendent à admettre que sa nature est analogue à celle qui se développe dans les systèmes temporaires présentiels. Elle est qualifiée « d’instantanée » étant donné que la durée de vie de l’équipe est courte et que les membres n’ont pas d’expériences passées partagées. Cependant, cette propriété n’est pas valable pour tous les types d’équipes dans la mesure où certaines peuvent avoir des caractéristiques similaires aux équipes traditionnelles. L’objectif de cette recherche est de montrer que la nature de la confiance dans les équipes virtuelles varie en fonction des caractéristiques de l’équipe. Mots clés : équipes virtuelles, typologies, équipes virtuelles pures, équipes virtuelles hybride, confiance instantanée.

Abstract: Researches investigating the topic of trust in virtual teams tend to assume that its nature is comparable to trust that develops in face-to-face temporary systems. It is qualified as swift trust given the limited duration of teams and the absence of shared past work experience between members. However, this characteristic is not available in all virtual teams configurations, since some virtual teams might have similar characteristics than traditional settings. The purpose of this paper is to demonstrate that trust’s nature and development in virtual teams differ according to teams’ properties.

Key words: virtual teams, typologies, pure virtual teams, hybrid virtual

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INTRODUCTION

« Virtual teams are here and they are here to stay » (Bell et Kozlowski, 2002 : p. 45). Les équipes virtuelles sont rapidement devenues une réalité à laquelle le contexte économique et les managers n’étaient pas assez préparés. Le développement des équipes virtuelles a été impulsé par les avancées réalisées dans le domaine des technologies de l’information. Ces technologies peuvent désormais, à travers leurs fonctionnalités, réduire les distances et mettre en contact des individus situés même dans les deux extrémités du globe terrestre. Il devient, de ce fait, plus facile de constituer des équipes de travail avec des individus dispersés géographiquement mais détenant les compétences nécessaires à la réalisation du travail requis (Cascio, 2000 ; Townsend et al., 1998 ; Warkentin et al., 1997). En plus, ces nouvelles formes d’organisation du travail permettent aux organisations une meilleure réactivité et une meilleure adaptation aux contraintes environnementales (Descantis et Monge, 1999). Sur le plan individuel, le travail dans les équipes virtuelles augmente la motivation des membres et améliore leur satisfaction par rapport aux processus de prise de décision (Baillette et Labraty, 2002).

Dès lors, l’étude et l’analyse des équipes virtuelles s’imposent et deviennent une nécessité permettant une meilleure appréhension de leurs aspects et des problèmes liés à leur management. En effet, étant données leurs spécificités, les modèles de gestion mis en place pour les équipes traditionnelles deviennent inopérants et requièrent des innovations afin de tenir compte des nouveaux paramètres introduits par le contexte virtuel. Les pratiques managériales doivent être adaptées à un environnement caractérisé par la séparation physique des membres, la courte durée de vie et l’utilisation intensive des technologies de l’information et de la communication (TIC). La littérature en système d’information a enregistré depuis peu de temps un intérêt de plus en plus grandissant envers les équipes virtuelles. A l’exception de quelques recherches (Ariss et al., 2002 ; Holton, 2001 ; Jarvenpaa et Leidner, 1999), ces travaux se sont limités à la définition et l’identification des caractéristiques des équipes virtuelles et la signalisation des problèmes sans traitement approfondi et sans une réelle valeur ajoutée. Ces faiblesses peuvent expliquer l’absence d’un corps théorique englobant les recherches sur les équipes virtuelles.

Néanmoins, de plus en plus d’études commencent à s’intéresser à des aspects plus problématiques dans l’objectif d’améliorer la mise en place, le fonctionnement et la performance de ces nouvelles formes d’organisation du travail. Dans ce cadre, on peut noter des recherches théoriques et empiriques

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sur la prise de décision (Henderson et McAdam, 2001 ; O’Sullivan, 2003), la supervision et le contrôle (Fairweather, 1999 ; Grensing-Pophal, 1999 ; Langevin et Picq, 2001), la communication et la coordination (Montoya-Weiss et al., 2001) et le leadership (Avolio et al., 2000, Cascio et Shurygailo, 2000 ; Zigurs, 2003). Par ailleurs, le thème de la confiance constitue le volet qui a suscité le plus important intérêt et le plus grand nombre de recherche. Ceci s’explique par la prépondérance du rôle de cette variable dans la performance et le succès des équipes virtuelles. Selon Kanawattanachai et Yoo (2002), « One of the fundamental factors that are believed to be

important in determining success and failure of virtual teams is trust. […] This is because trust functions like the glue that holds and links virtual teams together » (p. 188).

En dépit de son importance, la confiance dans les équipes virtuelles revêt un caractère paradoxal. D’une part, elle est indispensable pour le succès, la performance de l’équipe et le développement des relations entre les membres. D’autre part, les conditions nécessaires à son développement, telles que la proximité physique, les interactions et les échanges face-à-face, font défaut dans la plupart des équipes virtuelles. Ce paradoxe donne naissance à une interrogation que le présent travail essaye d’élucider : Comment la confiance émerge et se développe-t-elle dans les équipes virtuelles ? Cette interrogation est également légitimée par la multitude d’équipes virtuelles découlant de la variabilité de leurs caractéristiques. En effet, une idée émergente dans la littérature sur les équipes virtuelles consiste à réfuter l’hypothèse de leur unicité et à admettre l’existence de plusieurs formes possédant des propriétés différentes et pouvant même être contradictoires.

L’objectif de cette recherche est de montrer que la nature et le développement de la confiance dans les équipes virtuelles varient selon leurs types et par conséquent selon leurs caractéristiques. Pour ce faire, notre travail sera organisé autour de trois sections. Dans un premier temps, nous élaborons une revue critique de la littérature ayant traité des problématiques liées à la définition des équipes virtuelles. Dans un deuxième temps, nous identifions les configurations possibles des équipes virtuelles par le biais des typologies. Dans la troisième section, nous analysons les impacts des configurations élaborées sur la confiance et ses mécanismes de développement. Nous nous intéressons plus particulièrement à la confiance qui se développe dans les équipes virtuelles pures et hybrides. Enfin, nous concluons avec un récapitulatif des résultats des analyses effectuées. Tout au long des développements, un corps de propositions théoriques sera formulé et nécessiterait la validation empirique.

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1. VERS UNE MEILLEURE COMPREHENSION DES EQUIPES VIRTUELLES

Une revue critique des recherches effectuées sur les équipes virtuelles a été effectuée dans l’ambition d’identifier les différentes définitions utilisées. Ce travail a révélé un manque d’approfondissement des définitions utilisées qui appauvrie le concept et ne rend pas compte de sa complexité. Ce constat est également corroboré par la confusion qui règne sur ces travaux et qui consiste à assimiler les équipes virtuelles à d’autres formes de travail virtuel ainsi que la divergence de leurs résultats. A titre d’illustration, nous avons noté que plusieurs recherches reprennent la définition de Townsend et al., (1998) qui stipule que « les équipes virtuelles sont des groupes de

travailleurs, géographiquement et/ou organisationnellement dispersés et qui sont réunis en utilisant une combinaison des technologies de télécommunications et d’information pour accomplir une tâche organisationnelle »i (p. 18). Par conséquent, aucune valeur ajoutée ne peut être enregistrée concernant cet aspect (Bell et Kozlowski, 2002 ; Montoya-Weiss et al., 2000). D’autres chercheurs ont opté pour la définition des équipes virtuelles à partir de leurs caractéristiques issues de la définition précédente. Ils ont ainsi mis l’accent sur l’utilisation des TIC, la séparation géographique, la courte durée de vie et la diversité culturelle des membres (Jarvenpaa et Leidner, 1999 ; Langevin et Picq, 2001 ; Lurey et Raisinghani, 2001). La confusion peut aussi être notée dans les travaux assimilant les équipes virtuelles aux organisations virtuelles (Bencheikh et Su, 2000 ; Cascio, 2000 ; Larsen et McInerney, 2002).

Par ailleurs, la majorité de ces travaux s’intègre dans une approche unidimensionnelle consistant à considérer les équipes virtuelles comme un type unique, certes différent des équipes traditionnelles mais possédant des caractéristiques propres à une seule forme possible. Or, certaines études ont montré qu’il existe plusieurs configurations des équipes virtuelles étant donné que leurs caractéristiques ne sont pas figées mais varient en fonction de plusieurs facteurs (Bell et Kozlowki, 2002 ; Dubé et Paré, 2002). D’où la nécessité d’adopter une grille multidimensionnelle dans l’étude des équipes virtuelles. Ces développements nous conduisent à considérer les équipes virtuelles comme étant un ensemble d’individus, interdépendants, pouvant être séparés dans l’espace et le temps et utilisant essentiellement ou exclusivement les TIC pour accomplir un travail généralement de courte durée. Cette définition énonce non seulement les propriétés distinguant les équipes virtuelles des équipes traditionnelles mais aussi des autres formes de travail virtuel.

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1.1. Equipes virtuelles et équipes traditionnelles

Comparant les équipes virtuelles aux équipes traditionnelles, plusieurs chercheurs affirment que la mission, la coopération et les mécanismes de coordination et de collaboration sont identiques pour les deux formes (Dubé et Paré, 2002 ; Townsend et al., 1998). Cependant, la différence réside dans le fait que les équipes virtuelles se basent exclusivement sur les TIC dans l’exécution de leur travail, alors que les équipes traditionnelles opèrent en face-à-face selon le mode présentiel. Ainsi, la principale dimension conférant le caractère virtuel aux équipes virtuelles est l’utilisation des TIC. Cet aspect constitue une dimension primordiale dans la définition de la virtualité selon Coat et Favier (2000).

Par ailleurs, en prenant en considération l’importance de cette dimension, on peut justifier l’utilisation du terme « virtuelles » au lieu du terme « à distance » ou « distantes » à l’instar d’autres chercheurs (Langevin et Picq, 2001 ; Parot, 2004). En effet, admettre que la distance est la caractéristique exclusive des équipes virtuelle contredit la réalité dans la mesure où certaines équipes peuvent être constituées par des membres localisés dans un même lieu mais préfèrent utiliser les TIC pour coordonner et effectuer le travail (Bell et Kozlowski, 2002 ; Dubé et Paré, 2002). En outre, l’utilisation du terme « virtuel » ne doit pas être opposée au « réel » mais acceptée en tant que caractéristique signifiant l’utilisation des TIC dans des situations asynchrones et délocalisées (Coat et Favier, 2000)ii.

1.2. Equipes virtuelles et autres formes de travail virtuel

La confusion qui règne dans les recherches sur les équipes virtuelles, consistant à assimiler ces dernières à d’autres formes de travail virtuel, peut entraver la compréhension de leur fonctionnement et de leurs mécanismes organisationnels. Les équipes virtuelles constituent un mode singulier d’organisation du travail possédant ses propres spécificités qui le distinguent des groupes virtuels, des communautés virtuelles, de l’organisation virtuelle et du télétravail (Dubé et Paré, 2002 ; Matmati, 2003). Le point commun à toutes ces formes est l’utilisation des TIC. Cependant, l’examen approfondi de chaque mode permet d’identifier des caractéristiques propres qui le distinguent des autres modes. Ainsi, pour pouvoir déterminer les spécificités des équipes virtuelles, nous nous référons à la définition de la notion d’équipe selon Katzenback et Smith (1993) : « un petit nombre d’individu

avec des compétences complémentaires, cherchant à atteindre un objectif commun et un ensemble de buts de performance et qui sont mutuellement responsables » (p. 112). Les dimensions d’une équipe selon cette définition

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sont la taille, les compétences complémentaires, l’objectif commun, les objectifs de performance, la responsabilité partagée et l’interdépendance. En nous basant sur ces propriétés, nous pouvons montrer que les équipes virtuelles se distinguent des groupes virtuels. En effet, les groupes virtuels sont constitués par des individus travaillant ensemble mais indépendamment l’un de l’autre. En outre, chaque membre cherche à réaliser ses propres objectifs de performance puisqu’il n’y a pas d’objectifs communs. « Dans

les groupes virtuels, l’évaluation de la performance et de la responsabilité se situe au niveau individuel et la majorité des interactions s’effectue avec le manager » (Fusrt et al., 1999). Par ailleurs, les équipes virtuelles se

distinguent également des communautés virtuelles. Ces dernières sont constituées par des individus partageant des intérêts et des objectifs communs. Toutefois, l’appartenance à ces communautés et la participation à leurs activités ne sont ni obligatoires, ni rémunérées contrairement aux équipes virtuelles. Une troisième distinction doit être faite entre les équipes virtuelles et l’organisation virtuelle. L’unité d’analyse est différente dans les deux cas. L’organisation virtuelle est plus importante en taille que l’équipe et peut être constituée par plusieurs équipes. En outre, les rapports dans une organisation virtuelle sont focalisés sur les partenaires externes alors que dans une équipe virtuelle, ils se situent entre les membres. Enfin, une équipe virtuelle ne doit pas être confondue avec le télétravail qui n’implique qu’un seul individu travaillant à domicile ou dans un centre spécialisé. La dimension collective des équipes virtuelles est alors omise ainsi que l’atteinte des objectifs communs. La performance est aussi évaluée au niveau individuel. Toutefois, un télétravailleur peut faire partie d’une équipe virtuelle.

Les analyses précédentes avaient pour objectif de dresser une revue critique des travaux effectués sur les équipes virtuelles montrant le floue et la confusion qui règnent sur leur définition. Pour palier à ces lacunes, nous avons essayé d’apporter quelques éclairages à la notion en identifiant les spécificités qui la distinguent des équipes traditionnelles ainsi que d’autres formes de travail virtuel. Dans la section suivante, nous allons nous focaliser sur les équipes virtuelles afin de déterminer les caractéristiques permettant d’en identifier les différentes configurations possibles.

2. LES CONFIGURATIONS DES EQUIPES VIRTUELLES

Afin de mieux cerner le concept d’équipes virtuelles, certains auteurs ont utilisé les typologies (Bell et Kozlowski, 2002 ; Casio et Shurygailo, 2003 ; Dubé et Paré, 2002 ; Jarvenpaa et al.,1998). Le recours aux typologies peut être justifié par la pertinence de leur application à des domaines récents, peu

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explorés et comportant de nombreux phénomènes reliés. Les typologies aident, en outre, à classer, organiser et comprendre des phénomènes complexes. Les auteurs de ces typologies admettent que la variabilité des caractéristiques des équipes virtuelles donne naissance à plusieurs configurations. Chaque configuration a ses propres caractéristiques qui déterminent le fonctionnement de l’équipe et la nature de ses mécanismes organisationnels. Dans ce qui suit, nous allons présenter deux typologies qui nous ont parues les plus pertinentes et complètes. Ensuite, nous proposons notre propre grille qui nous servira de base dans l’analyse de la nature de confiance qui se construit dans chaque type d’équipe virtuelle.

2.1. La typologie de Bell et Kozlowski (2002)

Dans cette typologie, les auteurs fixent quatre critères pour déterminer les différents types d’équipes virtuelles. Il s’agit du cycle de vie (long ou court), la distribution temporelle (et par conséquent la distribution géographique), les frontières organisationnelles, fonctionnelles et culturelles de l’équipe (multiples ou uniques) et les rôles des membres (chaque membre a un seul rôle ou des rôles multiples). Ils introduisent, également, la complexité de la tâche effectuée comme variable déterminante de la nature de l’équipe dans la mesure où elle influence et façonne tous les autres critères. A titre d’exemple, « lorsque les tâches assignées à une équipe virtuelle sont

complexes et défiantes, l’équipe est attendue à maintenir des relations stables entre les membres et de développer un cycle de vie continu. Cependant, lorsque les tâches sont moins complexes et défiantes, une équipe virtuelle est capable de travailler efficacement avec des relations dynamiques entre les membres et un cycle de vie plus discret »iii (Bell et Kozlowski, 2002 : p. 34).

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Figure 1 : Typologie des équipes virtuelles

Source : Bell et Kozlowski, 2002 : p. 30

Selon ces deux auteurs, une équipe virtuelle peut être définie par une quelconque combinaison de ces quatre critères. La nature de l’équipe varie dans un continuum et est fortement influencée par le degré de complexité du travail effectué. Dans leur grille, Bell et Kozlowski (2002) présentent les deux cas extrêmes d’équipes et affirment que leur nature peut varier entre ces deux cas extrêmes par la combinaison des critères sus-indiqués :

- D’un côté, les équipes à courte durée de vie, franchissant plusieurs frontières (fonctionnelles, organisationnelles et culturelles), dont les membres ont plusieurs rôles et géographiquement dispersés (la communication est généralement, asynchrone utilisant les TIC).

- D’un autre côté, les équipes virtuelles relativement permanentes, avec des frontières uniques et stables, dont chaque membre a un rôle unique et géographiquement proches (la communication se fait généralement en temps réel).

La pertinence de cette typologie réside dans le fait qu’elle montre la variété des équipes virtuelles et qu’elle introduit l’existence d’équipes virtuelles permanentes (dont la durée de vie est longue) et dont les caractéristiques sont similaires aux équipes traditionnelles, contrairement à ce qui est généralement admis dans les définitions.

2.2. La typologie de Dubé et Paré (2002)

Les auteurs ne présentent pas une typologie au sens strict du terme. Ils admettent comme Bell et Kozlowski (2002) que les équipes virtuelles

Rôles des membres Multiples Cycle de vie

Court

Distribution temporelle Zones temporelles multiples

Frontières Multiples

Rôles des membres Uniques Cycle de vie Permanent Distribution temporelle Communication synchrone Frontières Uniques Complexité de la tâche Equipes virtuelles

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varient dans un continuum et qu’il en existe deux cas « extrêmes ». Ils décrivent, en outre, ces deux cas à partir de l’étude empirique qu’ils ont menée sur des étudiants en MBA en précisant les modalités de leur fonctionnement et de développement des relations entre les membres. L’apport de cette recherche réside dans l’éclairage qu’elle a fourni au niveau des caractéristiques des équipes virtuelles. En effet, les auteurs ont montré qu’il existe deux groupes de caractéristiques : premièrement, celles communes à toutes les équipes (degré d’utilisation des TIC, leur disponibilité et leur maîtrise par les membres) et deuxièmement, les caractéristiques distinguant les différents types d’équipes virtuelles. Il s’agit de la taille, la dispersion géographique, la durée de la tâche, l’expérience antérieure partagée, les rôles des membres, la nature de la relation entre eux, l’interdépendance des activités et la diversité culturelle. Toutes ces caractéristiques ont des degrés de complexité différents allant d’un niveau faible à un niveau élevé et c’est la variabilité des niveaux de complexité qui donnent naissance à plusieurs types d’équipes virtuelles (Dubé et Paré, 2002 : p. 16).

Tableau 1 : Les caractéristiques clés des équipes virtuelles

Degré de complexité Faible Elevé

Degré d’utilisation des TIC Faible Elevé

Disponibilité des TIC Faible Elevée

Caractéristiques communes

à toutes les équipes virtuelles Maîtrise des TIC par les

membres

Faible Elevée

Taille de l’équipe Petite Grande

Dispersion géographique Local Global

Durée du projet ou de la tâche Long terme Court terme Expérience antérieure

partagée

Importante Non existante

Rôles des membres Temps complet Temps

partiel

Relation entre les membres Stable Fluide

Interdépendance des activités Faible Elevée

Caractéristiques distinguant les différents types d’équipes

virtuelles

Diversité culturelle Homogène Hétérogène

Source :Dubé et Paré, 2002 : p. 14

Une critique peut être adressée à cette typologie réside dans le fait qu’elle ne fournit aucune explication sur les autres configurations possibles d’équipes virtuelles résultant de la combinaison de ces critères. Les auteurs se sont limités à la présentation et la description de deux types extrêmes d’équipes issus de leur étude empirique.

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2.3. Proposition de typologie des équipes virtuelles

En nous inspirant des deux précédentes typologies, nous nous proposons d’en élaborer une, découlant de leur confrontation. Les caractéristiques que nous avons retenues sont : la distribution géographique, la durée de vie, l’interdépendance et l’expérience antérieure partagée. A travers ces caractéristiques, nous avons essayé de regrouper celles qui ont des points communs dans les deux typologies précédemment présentées. En outre, notre choix a été guidé par le rôle que joue chacune de ces variables dans la détermination du design de l’équipe virtuelle et de leurs impacts sur la nature et le développement de la confiance. En effet, et à titre d’illustration, selon Meyerson et al., (1996), l’interdépendance constitue un facteur déterminant les niveaux de vulnérabilité et d’incertitude fortement liés au niveau de confiance. L’histoire des relations passées relative aux expériences de travail commun permet d’avoir une équipe dont les membres possèdent assez d’informations les uns sur les autres et par conséquent facilite ou inhibe l’instauration de la confiance selon la nature de ces informations (Jarvenpaa et Leidner, 1999 ; Kanawattanachai et Yoo, 2002).

Dans ce qui suit, nous allons donner un aperçu sur chaque caractéristique ainsi que les modalités de sa variation dans l’objectif de fournir d’amples explications de la figure 2 représentant les types d’équipes virtuelles auxquels notre travail a abouti.

- La distribution géographique : Cette propriété regroupe la dispersion géographique et la diversité culturelle de Dubé et Paré (2002) ainsi que la distribution temporelle et les frontières de Bell et Kozlowski (2002). Elle fait référence à la distance pouvant exister entre les membres d’une équipe virtuelle. La distance peut être plus ou moins importante selon le degré d’éloignement des membres. En d’autres termes, les membres d’une équipe virtuelle peuvent être co-localisés dans un même endroit mais aussi ils peuvent être situés dans différentes zones géographiques. Dans le premier cas, l’équipe est relativement homogène puisqu’il existe une similarité culturelle entre les membres issus d’une même zone géographique. Toutefois, dans le second cas, la séparation des membres induit également la séparation temporelle dans la mesure où les différentes zones géographiques peuvent ne pas appartenir aux mêmes zones horaires. De même, dans ce cas, les équipes sont caractérisées par la diversité culturelle étant donné que les membres peuvent avoir des cultures nationales, organisationnelles et professionnelles différentes. La distribution géographique génère des obligations quant aux moyens de communications à déployer. En effet, plus la distance est grande plus il est impératif de mettre en place des

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technologies riches et permettant de meilleurs échanges et la constitution du contexte social virtuel. En outre, il est très important pour ces circonstances d’organiser des réunions régulières en face-à-face entre les membres dans l’objectif de favoriser la confiance.

- La durée de vie de l’équipe : Contrairement à ce qui généralement admis, les équipes virtuelles ne sont pas toujours temporaires. Elles peuvent aussi être permanentes et avoir un cycle de vie discret (Townsend et al., 1998). La durée de vie d’une équipe dépend, en effet, de ses objectifs et de la nature du travail effectué. Le plus souvent, une équipe virtuelle est constituée pour accomplir une tâche urgente et limitée dans le temps. Dans d’autres cas, les équipes virtuelles sont mobilisées pour des fonctions habituelles et régulières telles que le recrutement, la recherche et développement,…

- L’interdépendance : Dans tout type d’équipe, l’interdépendance entre les membres est une variable déterminante. Dans le cadre des équipes virtuelles, cette variable est aussi importante dans la détermination de leur configuration ainsi que dans le développement de la confiance. Elle est fortement liée au degré de complexité du travail et elle dicte, de ce fait, la nature des TIC à déployer et les mécanismes de coordination à mettre en place. Ainsi, une activité complexe requiert une interdépendance élevée et ne peut être effectuée qu’en utilisant des moyens de communication riches et facilitant les échanges et l’interaction entre les membres.

- L’expérience antérieure partagée : Bien que cette dimension n’a pas beaucoup attiré l’attention des chercheurs, elle revêt une importance considérable (Jarvenpaa et Leidner, 1999). L’absence d’histoire passée de relation entre les membres rend plus difficile le développement de l’équipe et impose une période d’adaptation (ou d’intégration) pour expliquer les règles de fonctionnement aux membres et générer leur fédération à ces règles. Ce travail éviterait à l’équipe les conflits pouvant entraver son fonctionnement. Dans le cas inverse, les membres d’une équipe se connaissent et intègrent l’équipe avec des normes et des routines qu’ils ont déjà développées dans leurs expériences passées.

Les développements précédents nous ont amenés à dresser la grille suivante permettant de schématiser les différentes configurations possibles des équipes virtuelles :

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Figure 2 : Une typologie des équipes virtuelles

A l’instar de Bell et Kozlowski (2002), nous admettons qu’une équipe virtuelle peut être constituée par une quelconque combinaison de ces critères et que ces derniers varient dans un continuum. Cette hypothèse a pour conséquence l’existence de plusieurs types d’équipes virtuelles dont les deux bornes forment les deux configurations extrêmes. La figure 2 schématise les trois cas représentatifs des configurations possibles des équipes virtuelles : - EV 1 : Il s’agit des équipes virtuelles pures dont les membres sont dispersés géographiquement, ne se connaissent pas et ne se rencontrent jamais en face-à-face. Dans ce type d’équipe, l’interdépendance est forte et la durée de vie est courte. Etant données ces caractéristiques, c’est ce type qui remet en cause les modèles de gestion actuels et requiert des innovations managériales.

- EV 2 : Le deuxième type peut être appelé équipe virtuelle traditionnelle dans la mesure où ses caractéristiques sont comparables à celles des équipes traditionnelles. Les membres d’une telle équipe travaillent dans un même lieu, ont déjà travaillé ensemble dans le passé et ont une longue période pour accomplir la tâche qui leur est assignée. Les pratiques

F o rt e L a d is p e rs io n g é o g ra p h iq u e L a d u e d e vi e L’interdépendance L’expérience antérieure partagée

Forte Faible Faible Forte C o u rt e L o n g u e F ai b le EV 1 EV 2 EV3

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de gestion restent valables et les mécanismes organisationnels gardent leurs modes habituels de développement.

- EV 3 : Ce troisième type considéré comme hybride ou mixte regroupe les caractéristiques des deux premiers types. Les membres dans une telle configuration combinent les deux modes de communication (en face-à-face et par l’utilisation des TIC), peuvent avoir des expériences passées de travail en commun et n’ont pas de contraintes de temps pour l’exécution du travail. Certaines recherches montrent que c’est ce dernier type qui domine le plus souvent en pratique (Poulin, 2003).

L’existence de plusieurs types d’équipes virtuelles a des implications sur les analyses concernant leur fonctionnement et les processus organisationnels qui s’y développent. En effet, un trait dominant dans les travaux effectués sur les équipes virtuelles consiste à considérer qu’elles constituent un seul type différent des équipes traditionnelles ; ce qui appauvrie ces analyses, fausse la généralisation des résultats trouvés et réduit leurs richesse et apports. Cependant, admettre l’existence de plusieurs types d’équipes virtuelles et la variabilité de leurs caractéristiques revient à assumer que leur fonctionnement et leurs mécanismes organisationnels diffèrent selon leurs caractéristiques. Ce constat concerne, entre autres, la confiance, sa nature et son développement, que nous traiterons dans la section suivante, et nous permet de formuler la proposition suivante :

Proposition 1 : La variabilité des caractéristiques des équipes virtuelles

donne lieu à plusieurs configurations de ces équipes. Les cas les plus représentatifs sont les équipes virtuelles pures, les équipes virtuelles hybrides et les équipes virtuelles traditionnelles.

3. LA CONFIANCE DANS LES EQUIPES VIRTUELLES

« Facteur clé de réussite des interactions, la confiance permet de dépasser les intérêts égoïstes et de produire des bénéfices importants dans le cadre de relations coopératives entre acteurs économiques » (Baillette et Lebraty,

2002 : p.2). Cette citation met en relief l’importance de la notion de confiance dans la construction et le maintien des relations interpersonnelles. La confiance constitue un moyen pour faire face à la complexité et l’incertitude dans des contextes où l’interdépendance et l’interaction entre les acteurs atteignent des niveaux élevés. Elle permet d’instaurer un climat de coopération et d’entente que se soit aux niveaux interindividuel et collectif, de favoriser les comportements citoyens et d’atteindre une bonne qualité des décisions prises (Kanawattanachai et Yoo, 2000 ; Ring et Van de Ven, 1992, 1994).

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La confiance peut être rationnelle, institutionnelle ou interpersonnelle. Cette dernière se définit comme étant « la volonté délibérée d’une partie d’être

vulnérable aux actions d’une autre partie basées sur les attentes que celle-ci accomplira une action importante pour la partie qui accorde sa confiance indépendamment de sa capacité à surveiller ou contrôler l’autre partie »iv

(Mayer et al., 1996 : p. 712). La confiance interpersonnelle est un concept multidimensionnel se développant sur deux bases. La première est cognitive et fait référence à des dimensions objectives telles que l’intégrité, l’honnêteté, la fiabilité, la compétence et l’histoire des relations (Jarvenpaa et al., 1998 ; Lepers, 2003). La deuxième est affective et se réfère aux sentiments et émotions. Elle se développe surtout dans les relations familiales.

Qu’elle soit cognitive ou affective, la confiance nécessite certaines conditions pour s’instaurer et se développer. Handy (1995) met l’accent sur l’importance de la proximité physique pour l’émergence et le développement de la confiancev. C’est, en effet, à travers les interactions directes et les échanges mutuels d’informations entre les parties qu’un climat de confiance peut s’instaurer. La deuxième condition indispensable est le temps. La nature dynamique de la confiance a pour conséquence l’évolution de ses dimensions à travers le temps dans le sens de l’affaiblissement ou de l’intensification. Le temps permet aux membres de collecter les informations nécessaires affectant les déterminants de la confiance (Meyerson et al., 1996). Le contexte social partagé, les valeurs communes et les cultures similaires sont également des facteurs favorisant l’existence et le développement de la confiance.

Par ailleurs, si on se réfère au contexte des équipes virtuelles, ces conditions font parfois défaut. En effet, la confiance dans les équipes virtuelles a été jusque là considérée comme paradoxale. D’un côté, elle occupe une place centrale pour réduire la complexité et l’incertitude inhérentes à l’interdépendance accrue entre les membres et leur dispersion ainsi que pour favoriser des comportements coopératifs (Cohen, 1997 ; Platt, 1999). D’un autre côté, l’absence de proximité physique et d’un contexte social partagé et la durée de vie limitée des équipes virtuelles constituent des freins au développement de la confiance (Baillette et Lebraty, 2002 ; Handy, 1995 ; Hummels et Roosendaal, 2001 ; Townsend et al., 1998). L’hypothèse qui sous-tend ces résultats est l’unicité des équipes virtuelles. Or, d’après la typologie que nous avons précédemment dressée, ces résultats ne peuvent pas être généralisés à tous les types d’équipes virtuelles. C’est en ce sens que nous admettons que la variabilité des caractéristiques des équipes virtuelles génère la variation de la nature de la confiance et les mécanismes de son développement. D’où la proposition suivante :

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Proposition 2 : La nature et le développement de la confiance dans les

équipes virtuelles varient en fonction de la configuration en question, c’est-à-dire en fonction des propriétés de l’équipe.

Ainsi dans les équipes appartenant à la deuxième catégorie (les équipes virtuelles traditionnelles), les conditions nécessaires à la construction de la confiance (le temps, les similarités culturelles, la proximité physique et les interactions

présentielles) sont vérifiées. De ce fait, il devient difficile de confirmer le paradoxe de la confiance dans ces équipes. Au contraire, il semble que la confiance dans ces équipes revêt une forme traditionnelle dans la mesure où elle retrouve tous les déterminants contribuant à son développement à travers le temps.

Par ailleurs, concernant les deux autres types (les équipes virtuelles pures et hybrides) un récent courant de recherche introduit une forme particulière de confiance qui s’y développe. Il s’agit de la confiance instantanéevi développée par Meyerson et al., (1996) pour expliquer les comportements des membres des systèmes temporaires. L’analogie effectuée entre les équipes virtuelles et les systèmes temporaires découle des ressemblances entre les deux notions. En effet, les systèmes temporaires sont représentés par « un ensemble d’individus avec diverses compétences travaillant

ensemble pour l’accomplissement d’une tâche complexe durant une courte période » (Meyerson et al., 1996 : p. 168). Les membres d’un système

temporaire ne se connaissent pas, n’ont pas travaillé ensemble dans le passé et n’espèrent pas le faire dans le future, l’interdépendance entre eux est forte et la durée de vie est limitée à l’accomplissement du travail. A la différence des équipes virtuelles, les membres d’un système temporaire communiquent selon le mode présentiel en face-à-face.

Ces ressemblances ont poussé certains chercheurs à considérer que la confiance qui règne dans les équipes virtuelles est une confiance instantanée (Baillette et Lebraty, 2002 ; Jarvenpaa et al., 1998 ; Kanawatanachai et Yoo, 2002). Elle se définit comme suit : « Accorder sa confiance et être digne de

confiance dans le cadre des systèmes temporaires signifie que les membres doivent s’impliquer dans des relations de confiance sans attendre que l’expérience montre graduellement qui mérite cette confiance. La confiance est présumée ex ante »vii (Meyerson et al., 1996 : p. 177). Ces développements nous amènent à formuler la proposition suivante :

Proposition 3 : Dans les équipes virtuelles traditionnelles (EV 2), la

confiance n’est pas remise en cause. Elle garde sa forme traditionnelle ainsi que ses mécanismes de développement à travers le temps. Cependant, dans les équipes virtuelles pures et hybrides (EV1 et EV3) la confiance est qualifiée d’instantanée et a ses propres caractéristiques distinctives.

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La notion de confiance instantanée dans les équipes virtuelles est peu explorée. L’état de la recherche à ce niveau est embryonnaire de part le nombre limité de travaux et le manque d’opérationnalisation empirique. Cependant, à partir des quelques études jusque là effectuées, on peut identifier les caractéristiques de la confiance instantanée et les facteurs influençant son développement.

A partir de sa définition, la confiance instantanée est une confiance supposée dès le départ. En effet, dans les équipes virtuelles pures ou hybrides, les membres n’ont pas assez d’informations les uns sur les autres. En plus, ils n’ont pas le temps pour collecter les informations leurs permettant de former un jugement sur les comportements des autres membres. Pour cette raison, ils présument que les autres membres sont dignes de confiance afin de limiter les incertitudes et les risques inhérents à l’hypothèse contraire (Meyerson et al., 1996).

Concernant ses déterminant, une étude menée par Jarvenpaa et al., (1998) a montré que la confiance instantanée possède les mêmes antécédents que la confiance traditionnelle. Toutefois, ces antécédents ne suivent pas la même évolution dans les deux cas. A cet effet, dans le contexte virtuel la compétence et l’intégrité ont une plus forte intensité que la bienveillance durant les premières phases de constitution de l’équipe. La bienveillance peut être importante lors des phases ultérieures du travail. Ces variables peuvent s’intensifier ou s’affaiblir au fur et à mesure de l’avancement du travail en fonction des informations collectées par les membres. Meyerson et al., (1996) ont également qualifié la confiance instantanée de « forme

d’action dépersonnalisée » pour expliquer la prédominance de la dimension

cognitive sur la dimension affective. En effet, elle se développe sous l’effet des actions et des réalisations plutôt que les sentiments. « Les sentiments,

l’engagement et les échanges sont moins importants que les actions et l’accomplissement des tâches du travail » (Meyerson et al., 1996 : p. 180).

Jarvenpaa et al., (1998) ont, par ailleurs, identifié dans leur étude précédemment mentionnée les stratégies et les comportements favorisant la construction de la confiance au sein des équipes virtuelles. Il s’agit, des styles d’action proactifs, les interactions focalisées sur le travail, un esprit d’équipe optimiste, un leadership dynamique, des objectifs et des rôles claires, des interactions fréquentes et régulières et un feedback immédiat (p. 53). En plus de ces facteurs la confiance instantanée agit par l’intermédiaire de mécanismes sociaux et des processus psychologiques et cognitifs de catégorisation et de création de stéréotypes importés de situations de travail similaires (Jarvenpaa et Leidner, 1999 ;Meyerson et al., 1996). La proposition 4 découle des analyses précédentes :

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Proposition 4 : La confiance instantanée dans les équipes virtuelles pures et

hybrides est une confiance présumée entre les membres dès la constitution de l’équipe. Elle se nourrit et se développe par les actions et les comportements sous l’effet de mécanismes sociaux et psychologiques.

Concernant, également, le développement de la confiance instantanée, Kanawatanachai et Yoo (2002) notent qu’elle n’existe que pendant les premières phases de constitution de l’équipe. Elle se transforme par la suite en confiance traditionnelle. Les auteurs expliquent qu’avec le temps, les membres d’une équipe arrivent à collecter et accumuler les informations les uns sur les autres et peuvent par conséquent distinguer ceux qui méritent la confiance de ceux qui ne la méritent pas. Ce résultat est à nuancer, surtout si on se réfère au contexte des équipes pures avec une courte durée de vie et où les échanges sont plus focalisés sur le travail à effectuer que sur les échanges sociaux.

En dépit de l’importance des résultats présentés, la notion de confiance instantanée demeure ambiguë. Beaucoup de travail reste à réaliser à ce niveau afin d’apporter des éclairages permettant de mieux la cerner, de la distinguer de la confiance traditionnelle et d’identifier les relations qu’elle entretient avec d’autres concepts.

CONCLUSION

Le thème des équipes virtuelles est un champ peu exploré où les chercheurs appellent à plus d’études et d’analyse (Bell et Kozlowski, 2002). L’appréhension des facteurs de succès de ces nouvelles formes de travail passe inéluctablement par une meilleure compréhension d’une part, des différentes facettes qui leurs sont rattachées et d’autre part, des comportements de leurs membres et de leurs mécanismes organisationnels. Afin de servir le premier objectif, nous avons essayé dans ce travail de rejeter l’hypothèse dominante dans la littérature d’unicité des équipes virtuelles et d’en identifier les différentes configurations possibles. Pour cette fin, nous nous sommes insérés dans une perspective multidimensionnelle en recourrant aux typologies basées sur la détermination des caractéristiques des équipes virtuelles et leur variation. A ce titre, nous avons pu tracer une grille schématisant les trois types représentatifs d’équipes à savoir les équipes virtuelles traditionnelles, hybrides et pures. Leurs propriétés diffèrent et génèrent la variation de la nature et du développement de la confiance.

Ainsi, dans le premier type, la confiance est traditionnelle et garde ses modes habituels de développement. Cependant, dans les deux autres types, la

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confiance revêt une forme particulière et est qualifiée d’instantanée. Il s’agit d’une confiance présumée dès la constitution de l’équipe, importée d’autres situations ou expériences de travail et se développant plus sur des bases cognitives à travers les actions et les réalisations que sur des bases affectives. La confiance instantanée émerge dans les équipes virtuelles pures et hybrides étant donnés l’éloignement des membres, les rencontres en face-à-face limitées ou inexistantes, la courte durée de vie de l’équipe et le manque d’information que chaque membre dispose sur les autres.

Cette recherche a permis d’éviter les biais de l’hypothèse d’unicité des équipes virtuelles et par conséquent l’unicité du type de confiance qui s’y développe. Elle a, en outre introduit, une grille multidimensionnelle assez pertinente pur l’étude des équipes virtuelles. Néanmoins, certaines limites sont à signaler. Premièrement, les caractéristiques retenues pour élaborer la typologie pourraient ne pas refléter toutes les facettes reliées à la définition des équipes virtuelles. Leur choix, parmi tant d’autres, a été guidé par leur variabilité et ses impacts aussi bien sur les designs des équipes que sur la confiance. Deuxièmement, certaines contraintes ont empêché la validation empirique des résultats théoriques effectués. Les propositions formulées restent d’ordre conceptuel. A cet égard, il serait intéressant lors d’éventuels prolongements de ce travail de confronter ces propositions au terrain pour les confirmer ou les réfuter.

D’autres pistes sont également envisageables pour des extensions futures de ce travail. Il serait intéressant de mieux cerner la notion de confiance instantanée en approfondissant les facteurs et les comportements influençant son développement. A ce titre, on pourrait se demander sur le rôle joué par les technologies de l’information et de la communication dans le développement de la confiance. Plus précisément, il serait question de l’impact de la richesse des médias utilisés, au sens de Daft et Lengel (1986), sur la dynamique d’évolution de la confiance instantanée. Une deuxième piste serait d’investiguer l’impact de la présence ou l’absence d’un leadership dans la détermination du niveau de confiance établie au sein de l’équipe. Cette piste est à encourager si on se réfère au résultat de Kayworth et Leidner (2001/2002) qui ont détecté une relation significative entre le leadership et ses styles et le niveau de confiance dans les équipes virtuelles.

Endnotes

i « Virtual teams are groups of geographically and/or organizationally dispersed co-workers

that are assembled using a combination of telecommunications and information technologies to accomplish an organizational task » (Townsend et al., 1998: p. 18).

ii «[…]Un autre facteur majeur contribue au développement de la virtualité. Il s’agit de

l’évolution constante des nouvelles technologies de l’information et de la communication. en effet, la virtualité s’appuie sur des technologies telles que les messageries électroniques, les

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ordinateurs portables, les téléphones mobiles et autres logiciels informatiques tels que les groupware et Internet » (Coat et Favier, 2000 : p.1).

iii « When the tasks a virtual team performs are complex and challenging, the team is expected

to be more likely to maintain a stable membership and to develop a more continuous lifecycle. When tasks are less complex and challenging, however, a virtual team is expected to be able to function effectively with a dynamic team membership and a more discrete lifecycle » (Bell et Kozlowski, 2002 : p. 34).

iv « The willingness of a party to be vulnerable to the action of another party based on the

expectation that the other will perform a particular action important to the trustor irrespective of the ability to monitor or control that other party » (Mayer et al., 1996: p. 712).

v « Trust needs touch » (Handy, 1995).

vi « Swift trust ».

vii « To trust and to be trustworthy within the limits of a temporary system means that people

have to wade in on trust rather than wait while experience gradually shows who can be trusted and with what. Trust must be conferred presumptively or ex ante » (Meyerson et al., 1996: p. 177).

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Figure

Figure 1 : Typologie des équipes virtuelles
Tableau 1 : Les caractéristiques clés des équipes virtuelles
Figure 2 : Une typologie des équipes virtuelles

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