• Aucun résultat trouvé

ARTheque - STEF - ENS Cachan | La prévention des risques professionnels, quels apprentissages ? À partir d'un exemple de situation professionnelle : la traite d'un troupeau de vaches laitières

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "ARTheque - STEF - ENS Cachan | La prévention des risques professionnels, quels apprentissages ? À partir d'un exemple de situation professionnelle : la traite d'un troupeau de vaches laitières"

Copied!
6
0
0

Texte intégral

(1)

LA PRÉVENTION DES RISQUES PROFESSIONNELS,

QUELS APPRENTISSAGES ? À PARTIR D’UN EXEMPLE DE

SITUATION PROFESSIONNELLE :

LA TRAITE D’UN TROUPEAU DE VACHES LAITIÈRES

Joëlle BAZILE

Établissement National d’Enseignement Supérieur Agronomique de Dijon

MOTSCLÉS : DIDACTIQUE PROFESSIONNELLE RISQUE SANITAIRE

AGRICULTURE

RÉSUMÉ : La prévention des risques oriente les activités des agriculteurs producteurs laitiers au moment de la traite. Leur conceptualisation permet aux agriculteurs de traiter les différentes informations prises en situation de travail et de prendre les décisions d’actions pour les neutraliser. L’apprentissage de cette activité professionnelle relève, comme dans la majorité des cas dans le secteur agricole, de l’apprentissage de la gestion d’environnements dynamiques vivants.

SUMMARY : Risk prevention is a need to organize milk-producers’activities. As for other such cases, knowledge and skills concerning these professionnal activities have to do with knowledge and skills concerning management and control of dynamic living environment.

(2)

1. INTRODUCTION

Un professionnel, quel qu’il soit, est en permanence dans une perspective de gestion de risques professionnels. Il doit éviter des dérives préjudiciables, et éventuellement irrécupérables, des situations dont il est responsable. Il doit maintenir, souvent dans l’urgence, la situation qu’il gère dans un espace tolérable car « la priorité doit être donnée au contrôle à court terme de la situation » (Hoc et Amalberti, 1999). De façon générale, la question de ce type d’apprentissage est posée en formation. Dans les secteurs de l’agriculture, ce problème est d’autant plus crucial que les professionnels ont à gérer un environnement dynamique complexe. Par « environnement dynamique complexe », on entend un environnement qui change indépendamment des actions propres du sujet (Samurçay, 1992). Le lieu privilégié où l’élève peut être en contact avec ce type de démarche est le milieu professionnel, au contact de professionnels. Nous avons choisi comme exemple la traite des vaches laitières car cette tâche présente pour l’éleveur plusieurs types de risques. De plus, elle occupe une place centrale dans bon nombre d’exploitations agricoles aussi bien en termes économiques qu’en termes de temps passé.

2. UNE FORMATION ORIENTÉE VERS LA PRÉVENTION DES RISQUES

En formation, la nécessité d’exécuter les différentes opérations de la traite, celles prescrites notamment aux élèves sur l’exploitation du lycée, est justifiée par l’existence de buts de neutralisation de risques associés aux conséquences d’un non respect de ces pratiques. Ces risques sont de différente nature : risques liés à la consommation des produits laitiers ou à leur transformation, risques liés à la santé des animaux, risques financiers pour l’exploitation (liés aux précédents), risques pour l’opérateur. Citons quelques exemples (Tableau 1). Des mammites répétées et mal soignées peuvent conduire à l’élimination d’animaux, à une diminution de la production, à des pénalisations au niveau du paiement du lait collecté. Le risque immédiat de mammites (risques pour un animal particulier et pour le troupeau dans son ensemble) se traduit donc par des risques économiques.

L’introduction de différents concepts scientifiques et technologiques est destinée à permettre un raisonnement des pratiques professionnelles. À chaque règle d’action préconisée en formation, voire prescrite sur l’exploitation du lycée, est associé un ou des risques dont l’anticipation repose sur une base de connaissances : « Si … alors…, car … ». L’enseignant offre aux élèves l’occasion de produire, de façon immédiate ou différée, une conduite adaptée.

(3)

Tableau 1 Opération

Nettoyer l’extrémité des trayons avec une lavette par vache

Éliminer les premiers jets de lait dans un

bol à fond noir

Sous but Éviter les contaminations d’infections mammaires d’une vache à l’autre Détecter rapidement une mammite, éliminer

les premiers jets riches en micro-organismes Risque (s) Risques de mammites : Contamination de l’ensemble du troupeau en cas de lavettes collectives Collecter un lait riche en

micro-organismes

3. DES OBSERVATIONS EN SITUATIONS DE STAGE

La tâche prescrite par l’éleveur au stagiaire est différente de celle prescrite à ce même élève en centre de formation. Les pratiques sont multiples, et rares sont les exploitations où la prescription de l’agriculteur est identique à la prescription définie en centre de formation. De plus, la tâche prescrite par l’agriculteur, telle qu’elle est définie de façon générique par celui-ci, en début de stage notamment, est souvent différente de la tâche qu’il accomplit effectivement du fait de la particularité de chaque situation rencontrée. Nous aborderons successivement ces deux points. Les choix de l’agriculteur peuvent porter sur la réalisation ou non de certaines opérations, par exemple le tirage des premiers jets : « on n'a pas tout sous la main » (PM ), « il ne faut pas non plus

chercher la petite bête » (ML) , « il faut que ça aille vite » (MD, maire de sa commune). Les choix

peuvent aussi porter sur des variables continues : temps de nettoyage, niveau d’exigence : « on a

des vaches qui sont sur aire paillée qui est très courte alors on est assez maniaques » (PL). La

définition, par l’éleveur, des différentes opérations qu’il conduit, résulte donc de choix raisonnés en fonction de ses contraintes, de ses buts, de ses moyens, de ses connaissances ou de ses valeurs. D’autre part, des microdécisions sont prises au coup par coup en fonction de prises d’informations très contextualisées : « y en a (des vaches) pour qui ça n'inquiétera pas parce que ça lui arrive de

temps en temps et ça se résout tout seul (PM) ». L’agriculteur dispose d’un répertoire d’actions

qu’il peut moduler en fonction des risques qu’il perçoit. Il choisit, dans ce répertoire d’actions, celle qui lui semble adéquate dans la situation qu’il identifie en même temps à un moment donné, (dimension synchronique), et dans une perspective d’évolution dans le temps (dimension diachronique).

(4)

Tout se passe comme s’il existait un espace d’exécution tolérable (Rasmussen in Hoc, 1999) avec des conditions limites, cet espace reflétant les capacités adaptatives de la situation incluant l’opérateur et son environnement technique et circonstanciel. Le problème, sur un plan didactique, tient en ce que, dans tous les cas, les résultats en matière de qualité du lait, d’état sanitaire du troupeau sont satisfaisants malgré cette grande variabilité des pratiques. Les observations des élèves peuvent alors les conduire à une négation des risques induits par des pratiques « différentes » de celles enseignées, et donc une remise en question de la validité de leurs concepts fondateurs.

Pour un élève, la compréhension de la pertinence des pratiques dans une exploitation et des écarts à la norme exige que pratiques et écarts soient resitués dans cet environnement technique, circonstanciel et humain. Dans un espace d’exécution tolérable, quels sont les facteurs de réduction du risque, quels sont ses facteurs d’augmentation, qui permettent de comprendre les décisions de l’agriculteur et ses résultats en matière de production laitière ? Pourquoi cet espace tolérable est-il plus ou moins large dans différentes exploitations ? Quels sont les facteurs qui amènent l’agriculteur à rehausser ou à abaisser son niveau d’exigences ? Quels sont les éléments qui lui permettent de « transgresser » certaines règles tout en limitant les risques ?

L’analyse de la situation de traite dans une exploitation renvoie vers des dimensions temporelles et spatiales très larges : le raisonnement, par l’agriculteur, de ses choix met en jeu des éléments d’orientation (Savoyant, 1996) qui guident son activité, et qui débordent largement du seul moment de la traite. La focalisation tacite traditionnelle sur l’ exécution conduit à négliger ces éléments qui organisent l’action et notamment les prises d’informations avant, pendant, après celle-ci. Or ceci est capital pour la compréhension de l’activité. Elles permettent de prendre en compte les particularités de chaque situation : particularités dues à la singularité de chaque troupeau, de chaque animal, des facteurs saisonniers, des changements d’alimentation…

Notre hypothèse est que l’analyse de l’activité du professionnel par les élèves, dans ses trois dimensions d’orientation, d’exécution et de contrôle, peut constituer un point d’entrée pour la compréhension de la complexité d’un système d’exploitation.

4. L’ANALYSE DES DYSFONCTIONNEMENTS : UN POINT D’ENTRÉE ?

Les épisodes où il y a eu un dysfonctionnement sont en même temps des objets et des moyens d’analyse de l’activité. Nous prendrons comme exemple l’existence d’une modification d’un indicateur de qualité, le taux de cellules dans le lait : si le taux de cellules augmente, le risque pour l’agriculteur est celui d’une pénalisation au niveau du paiement du lait et, au-delà d’un certain seuil, le lait peut même ne plus être collecté. L’existence de modifications de cet indicateur renvoie à

(5)

différents champs : celui des pratiques au moment de la traite, celui du matériel utilisé au cours de la traite. Ces différents éléments sont l’objet de contrôles souvent effectués de façon difficilement perceptible, automatisée, du fait du caractère répétitif de l’activité. Ils portent sur des observables (bruits, couleurs, indicateurs tactiles, temps …) non quantifiés. Ils ne sont pas verbalisés par l’agriculteur et néanmoins caractéristiques de la compétence de celui-ci. Ici aussi, la focalisation sur l’exécution conduit à négliger cet aspect pourtant fondamental.

L’existence de modifications de l’indicateur « taux de cellules » renvoie à d’autres champs plus éloignés de l’action immédiate de traite : celui de la génétique du troupeau, celui de l’alimentation du troupeau, celui du bâtiment dans sa conception. On peut considérer ces différents champs comme différents sous-systèmes en interrelations, chacun possédant une dynamique propre. L’ensemble constituant un environnement dynamique au sein duquel s’exerce l’activité de traite. Chaque élève n’a à sa disposition, si tant est qu’il ait questionné le professionnel, qu’une vision partielle de la situation. En effet, chaque diagnostic est organisé autour d’événements qui ont semblé à l’agriculteur de nature à déstabiliser son système. La particularité de la situation le conduit à privilégier, dans la représentation fonctionnelle (Leplat, 1995) qu’il s’en est construit, et telle qu’il la présente à un moment donné, certains éléments saillants dans cette situation. Les délais de réponse sont quelquefois longs : ce n’est qu’après plusieurs jours, voire quelques semaines que certains problèmes vont s’amplifier ou au contraire disparaître. Ceci est aussi une caractéristique des environnements dynamiques.

Un travail collectif, en centre de formation, à partir des situations particulières permet, en repartant des épisodes de dysfonctionnements relatés, de reconstruire une suite causale : on passe d’une relation de signification décrite par les éleveurs à une relation de détermination basée sur des concepts qui sont introduits ou qui ont déjà été introduits en cours auparavant. L’utilisation de situations précises permet de reconstruire les concepts scientifiques avec une dimension nouvelle : il s’agit de transformer des connaissances théoriques préalablement acquises en organisateurs de l’activité. Tout leur potentiel explicatif et d’anticipation de différents risques se développe dans et à partir de l’action.

L’ensemble du travail peut aboutir à la construction, par tous les élèves, de la structure conceptuelle de la situation (Pastré, 1999) commune à la classe de situations rencontrées. Dès lors que cette structure conceptuelle est construite, il est possible de passer d’une attitude de recherche des dysfonctionnements, source de risques, observés sur une exploitation donnée, à une attitude de recherche des points positifs, source de réduction des risques sur une autre exploitation.

(6)

5. CONCLUSION

La gestion des risques professionnels, dans une situation donnée, constitue une part importante de la compétence. Elle conditionne l’activité des professionnels. Une analyse précise par les élèves de cette activité, aussi bien par l’analyse des déterminants de celle-ci (prise d’informations, contrôles) que par l’analyse des dysfonctionnements, permet d’accéder aux raisonnements de choix en matière de gestion des risques par l’éleveur. Cela suppose que les élèves mais aussi les professionnels soient formés à cette forme particulière d’explicitation de l’activité.

BIBLIOGRAPHIE

HOC J.-M., AMALBERTI R., Analyse des activités cognitives en situation dynamique : d’un cadre théorique à une méthode, Travail humain, 1999, 2, 97-129.

LEPLAT J., Les représentations fonctionnelles dans le travail, Psychologie française, 1995, 30

-3/4, 269-275.

PASTRÉ P., Comprendre après coup grâce à la simulation, Éducation permanente, 1999, 139

-supplément, 15-28.

SAMURÇAY R., Formation aux activités de gestion d’environnements dynamiques : concepts et méthodes, Éducation permanente, 1992, 111, 227-242.

Figure

Tableau 1 Opération

Références

Documents relatifs

L’ACP a permis d’identifier d’une part, les composantes de mesure de la performance des hôpitaux publics, et d’autre part, à construire un indice performance

D’après le théorème précédent, par hypothèse, GalpL{Kq est fini, ainsi, tout H P H est fini, et on peut donc lui appliquer le corollaire du théorème d’Artin pour obtenir H

Les suites Su correspondantes seront telles que u nth ^e nj n (mod.. PisoT: La répartition modula l et les nombres algébriques 13 Application à une suite S dépendant d'un

[r]

It would seem that the history of accounting standard-setting in Great Britain begins only in 1970 with the creation by the institutes of chartered accountants of a

Les déterminants de la dynamique de mobilité sont estimés par un modèle logit multinomial dynamique à effets aléatoires, sur un panel de données administratives sur les

(b) s’améliorer d’un point en orthographe entre les deux évaluations sur la plate-forme Projet Voltaire implique au seuil de 1% une augmentation de 0,569 point de la note