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L'affaire Casault-Langevin

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Academic year: 2021

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Texte intégral

(1)

PRESENTEE

A L'ECOLE DES GRADUES

DE L'UNIVERSITE LAVAL

POUR OBTENIR

LE DIPLOME D'ETUDES SUPERIEURES EN HISTOIRE

par

Béatrice Chassé

Licenciée ès lettres (Histoire-Géographie)

L'affaire Casault-Langevin

(2)

A * A

L’intérêt suscité par la cause de Bonaventure pro­ vient du fait que c’était la première fois au Québec que l’on donnait une telle interprétation â la loi électorale de 1875.

Le procès de Charlevoix avait bien attiré l’atten­ tion des Québécois pendant l’été de 1878, mais en première instance la cause avait été jugée de façon à donner raison aux curés qui s’étaient servis de leur influence sur leurs paroissiens au détriment du parti libéral. Le rôle du ju­ ge Casault et de ses deux collègues dans l’affaire de Bo­ naventure fut de renverser le jugement de Charlevoix, et

cela au Québec même, au milieu de la population et du cler­ gé catholique. Les trois juges dans la cause de Bonaventu­ re étaient tous les trois catholiques et conservateurs. A l'inverse de la cause de Charlevoix qui aboutit en Cour su­

(3)

prême, le procès de Bonaventure fut jugé à la Cour de révi­ sion de Québec. Les trois magistrats, Casault, Maguire et McCord qui eurent à rendre leur décision n’étaient pas ve­

nus en contact avec des collègues d’un autre milieu.

Il fallait donc que les abus d’influence soient criants pour que des individus du milieu en soient révol­ tés. Si nous semblons être allée trop loin dans la des­ cription de ces abus, il faudra se rappeler les paroles de Léon XIII: "La première loi de l’Histoire, c’est de ne pas mentir; la seconde, c'est de ne pas craindre de dire la vé­

rité" (1) .

Au cours de l’élaboration de ce travail, nous avons contracté une dette de reconnaissance. Nos remerciements s'adressent à toutes les personnes qui nous ont aidée de leurs conseils, facilité les recherches et donné des ren­ seignements personnels appréciés.

Notre gratitude va de droit à notre distingué pro­ fesseur, Monsieur Jean Hamelin de l'Université Laval, qui a accepté de relire ce texte, suggérant quelques judicieu­ ses rectifications.

1. Léon XIII, lettre Saepe numéro, 18 août 1883, cité par Arthur Savaète, Vers 1'Abîme, III; page couverture.

(4)

Nous voulons aussi, noter l’accueil du bibliothécai­ re de l'Université Laval, M. André Beaulieu, dont la bien­ veillance nous a favorisée en nous fournissant toute la do­

cumentation nécessaire à notre entreprise.

Egalement, notre reconnaissance est acquise, et de­ puis longtemps, aux abbés Voisine et Bélanger, professeurs au séminaire de Rimouski, qui nous ont guidée et initiée à la méthode historique.

(5)

Page AVANT-PROPOS ... I

TABLE DES MATIERES... IV

SÏGLES ET ABREVIATIONS ... VII

BIBLIOGRAPHIE ... VIII

INTRODUCTION: Les élections provinciales de 1875 1

Charles de Boucherville et l’élection de 1875» Les thèmes électoraux: l’irréligion des rouges, l’amnistie, les écoles du Nouveau-Brunswick. L'élection de Bonaventure. Les deux candidats. Résultats pour Bonaventure et résultats géné­ raux. L’alliance libérale-protestante. Contes­ tation probable.

CHAPITRE PREMIER: La contestation de l’élection de

(6)

Attitude de Mgr Langevin et de ses curés pendant la campagne. Conseils de Mgr Langevin aux curés après l’élection. Compte-rendu du procès de New-

Carlisle.

CHAPITRE II : Le jugement Casault... 2?

Biographie du juge Casault. Ses origines. Sa couleur politique. Jugement Casault. Comparai­ son avec le jugement Routhier. Mgr Langevin de­ mande la tête du professeur Casault. Casault

offre sa démission.

CHAPITRE III: Le Mandement du 15 janvier... 1|3

Les propositions condamnées par Mgr Langevin. Mgr Taschereau étudie les propositions et envoie

ses conclusions à Rome. Les évêques appuient Mgr Langevin et ensuite ils changent d’opinion.

La réaction anglo-protestante du Canada. Les ultramontains volent au secours de Mgr Langevin.

CHAPITRE IV: Le jugement Casault et son influence

sur la Cour Suprême... 69

Le jugement Casault et le Mandement qui l’a sui­ vi ont-ils influencé la Cour Suprême? Réaction des évêques à l’énoncé de la Cour Suprême. On demande un amendement à la loi électorale. Tarte promet de faire amender la loi électorale et est élu à Bonaventure.

CHAPITRE V: La décision de Mgr Conroy au sujet du

(7)

Les évêques s'adressent au Saint-Siège pour avoir des éclaircissements sur leurs droits et devoirs vis-à-vis 1'Université. Rome envoie un Délégué apostolique. Décision Conroy au su­ jet du juge Casault. La décision sera-t-elle publiée?

CHAPITRE VI: Le juge Maguire demande justice au Délégué apostolique ...

Le juge Maguire et Mgr Langevin avant la venue du Délégué. Le juge s'adresse au Délégué et de­ mande une réparation publique de la part de Mgr Langevin. Mgr Langevin et le juge McCord.

CHAoITRE VII: Mgr Langevin et le juge Casault

116

135

A- M^r l'évêque Jean Langevin; sa réaction après la décision Casault. Les évêques écrivent à Rome. Mgr Langevin après le départ de Mgr Conroy. La rumeur au sujet de la résignation de Mgr Langevin.

B- Son Honneur le juge Napoléon Casault. Son voyage en Angleterre. Sa résignation comme professeur de 1'Université Laval. Sa vie mon­ daine. Sa mort.

CONCLUSION ...

Le juge Napoléon Casault a-t-il contribué à dimi­ nuer l’influence indue du clergé dans les électi­ ons? Quand cette influence devenait-elle abusive?

(8)

AAR

APQ

ASQ

A S TR

CS CR

Archives de l’Archevêché de Rimouski

Archives de la Province de Québec

Archives du Séminaire de Québec

Archives du Séminaire des Trois-Rivières

(9)

I - SOURCES

A. Sources manuscrites

a- Archives de 1‘Archevêché de Rimouski

Registres A à H inclusivement. Ces registres con­ tiennent la correspondance de Mgr Langevin avec les curés du diocèse pour la période de 1867 à 1882:

Registre A. Avril 1867 à septembre 1868. 362 numéros, 32.£cm.

Registre B. Octobre 1868 à juillet 1870, £92 numéros, 32.£cm.

Registre C. Juillet 1870 à octobre 1871. 707 numéros, 32.£cm.

Registre D. Octobre 1871 à juin 1872. £o£ nu­ méros, £2.£cm.

(10)

Registre B. Juin 1872 à septembre 1873» numéros, 32.5cm.

720

Registre F. Septembre 1873 à septembre 1875» 1110 numéros, 38.5cm.

Registre G. Septembre 1875 à juin 1878. >57P* 38.5cm.

Registre H. Juin 1678 à juin 1882. 673p» 38.5cm.

Deux cahiers cartonnés contiennent les correspon­ dances de Mgr Langevin, la plupart avec les évê­ ques. Le premier cahier couvre la période de 1871+ a 1877; le deuxième celle de 1877 à 1681. Comme

ces cahiers n'avaient pas de titre, nous les avons intitulés Correspondances :

Correspondances. Décembre 1873 à septembre 1877. 258 numéros, 32.5cm.

Correspondances. Mars 1877 à mars 1881. 1+&5P 32.5cm.

Une boîte marquée: Question de l'influence indue. On y trouve les documents suivants:

1. Une brochure à couverture bleue où sont collés des articles de journaux sous le titre: Arti­

(11)

du Jugement dans l'élection contestée de Bona­ venture et le Mandement de l’évêque de Rimous-

ki. 2I4 cm.

2. Une brochure à couverture beige où sont collés des articles sous le titre:

Les libéraux catholiques. 30cm.

3. Une brochure bleue, avec articles de journaux, intitulée :

Rétribution. 21|.. 5 cm .

Une brochure beige, avec articles de journaux, intitulée :

Libéralisme - l'Eglise et l’Etat. Influence indue. 22.£cm.

5. Une brochure bleue, avec articles de journaux, intitulée :

Discussion sur la Question de l'influence indue. 66p. (feuille 65-66 manque), 31cm.

6. Une brochure, avec articles de journaux, intitu­ lée :

Extraits. 30.5cm.

7. Lettre circulaire de Mgr Langevin aux évêques de la province:

Lettre circulaire (imprimée) aux évêques de la province. 29 septembre 1877* 7p« 32cm.

(12)

8. Correspondance entre le juge McCord et Mgr Lan­ gevin:

Juge McCord à Mgr Langevin. 23 février 1877» 2p. Juge McCord à Mgr Langevin. 9 mars 1877. 2p.

9. Une lettre du Révérend Napoléon Thivierge â Mgr Langevin:

Révérend Thivierge à Mgr Langevin. 27 septembre 1877. 5p.

b- Archives de la Province de Québec

Collection Chapais: Papiers Langevin: Louis-Honoré Huot à Sir Hector Langevin, 1868 à 1886. Corres­ pondance de Louis-Honoré Huot à Sir Hector Langë^ vin. I4.7 lettres. ~

Collection Chapais: Papiers Langevin: Thomas Cha- pais. Esquisse Biographique sur Charles Langelier. 1HW

Collection Chapais: Papiers Langevin: Louis-Honoré Huot à Sir Hector Langevin, 18 janvier I88I4. Mé­ moire a Sir Hector Langevin.

c— Archives du Séminaire de Québec

Boite marquée Univ. 116, contient plusieurs lettres sur l’affaire Casault-Langevin:

(13)

Univ. 116-BI. 4 .janvier 1877» Mgr Jean Lan­ gevin a Mgr E.-A, Taschereau, Demande que le juge Casault cesse d'etre professeur a l'Uni- versite.

Univ, 116-BN. 9 janvier 1877», Mgr Taschereau au juge Casault. Transmet la lettre du Recteur

et demande des explications au juge Casault.

Univ» 118-BO. 9 janvier 1877» Mgr T.-E. Ha­ mel au .juge Casault. Lui écrit de ne pas re­ pondre a Mgr Taschereau avant de l'avoir vu.

Univ.^116-BV. 12 janvier 1877» Mgr Tasche­ reau à Mgr B. Paquet. Tous les suffragants,

sauf Mgr Racine veulent la condamnation du juge.

Univ. 116-BW. 12 janvier 1877. Mgr T.-E. Hamel a Mgr B. Paquet. Histoire de l'affaire Casault jusqu'à date.

Univ. 116-BT, 12 janvier 1877. Juge Casault a Mgr Taschereau. Devra resigner comme profes­ seur si l'on exige des explications.

Univ. 116-BR. 12 janvier 1877» ^Juge Casault a Mgr T.-E. Hamel. Ne répondra a 1'Archevêque qu'apres avoir vu M. Hamel.

Univ. 116-BS. 12 janvier 1877» Juge Casault a Mgr T.-E. Hamel. Resigne comme professeur.

(14)

Univ. 116-CB. 15 .janvier 1877» Mgr Taschereau au .jupe Casault. Lui écrit gu* il a déclaré être incompétent dans 1* espece et que le .juge peut garder sa chaire.

Univ. 116-CO. 19 .janvier 1877» Mgr Taschereau a Mgr Antoine Racine. Au sujet de l’affaire Ca

sault.

Univ. 116-CF. 19 janvier 1877» Mer T.-E. Hamel a Mgr B. Paquet. Au sujet de l’affaire Casault.

Univ. 116-CK. Janvier.1877. Etude faite par Mgr Taschereau (incognito) sur l’affaire Lange-

vin-Casault, le édition.

Univ. 116-CL. Janvier 1877» Etude (2e édition envoyée à Rome) par Mgr Taschereau (incognito) sur l'affaire Langevin-Casault.

ooite marquée Univ. 117, contient les documents sui­ vants :

Univ. 117-A. 26 janvier 1877» Mgr T.-E. Hamel à krr D. Taquet. Le juge Ôasault et l'es "évêques suffrarants.

Univ. 117-C. 28 janvier 1877». Mgr Paquet au Ré­ vérend Bolduc. Le juge Casault et Mgr Langevin.

(15)

Univ. 117-H. 31 janvier 1877. Remarques de Mer Taschereau sur les •propositions condamnées

par Mgr Langevin dans son jugement re Bonaven- ture «

Univ. 117-V. 10 février 1877» Rév, J. Auclair a Mgr B, Pâquet. Conduite de Mgr Langevin à l'egard des juges Casault, Maguire et McCord,

Univ, 117-Y, 15 février 1877» Mgr Taschereau à Mgr B, Pâquet. Le juge Casault et l'influen

ce indue.

Boîte marquée Univ. 119 contient les lettres sui­ vantes :

Univ, 119-AK, 12 août 1677. Mgr B, Pâquet â Mgr T.-B, Hamel.

Univ. 119 CH, 29 septembre 1377» Circulaire de Mgr Jean Langevin aux Evêques de la Province au sujet~de l'appel du juge Maguire.

Boîte marquée Univ, 120 contient les lettres sui­ vantes :

Univ, 120-D, 13 octobre 1877. Mgr Conroy â Mgr Taschereau. Décision de la Propagande in re Langevin-Casault en faveur de ce dernier.

(16)

Boite marquée Univ. 122 contient la lettre sui­ vante :

Univ. 122-B. 21i décembre 1877» Lettre de re­ commandation donnée au .juge Casault par Mgr Ha mel pour le présenter au Recteur de l'Universi

te de Londres.

Boîte marquée Univ» 151 contient la lettre suivan te :

Univ. 151» 15 juin 1871» Mgr B» Paquet au juge Casault. Refuse sa démission comme pro­ fesseur a 1'Université.

Boite marquée Univ. 152 contient les lettres sui­ vantes :

Univ. 152» 12 juin 1891. Juge Casault^à Mgr B. Pâquet. Démission comme professeur a l'Uni versite.

Univ. 152» 26 juin 1891. Juge Casault au Rév Laflamme. Refuse le titre de professeur hono- raire.

(17)

Boite marquée Lettres, Carton P. No 191 à 207 contient :

No 195» 1881;. Louis-Honoré Huot, Nos dissen­ sions religieuses sont des dissensions politi­ ques »

B. Sources imprimées

a) Sources juridiques et documents épiscopaux

Controverted Election of the County of the County of Charlevo'ix; '11;5 a 235, dans Canada Suprême Court Reports » Toronto, Butterworth and Co. (Canada), 1925» 7U6p. 23cm. Nous citons ces rapports sous le sigle: CSCR.

Jugement des .jupes Casault, Maguire et McCord: 75 a 93? dans Quebec Law Reports, 111. Québec, Dawson and Co. 1877 • l;06p. 21; 55 cm.

Jugement du jupe Routhier: 323 à 373? dans Québec Law Reports, 11. Québec, Dawson and Co., 18'7'6'.

396p. 21;. 5 cm.

L’acte électoral de Québec: 2b à 100, dans Statuts de Québec, 58 Vict. 1875» 517p. 23.5cm.

Loi des élections contestées; 100 à 120, dans Sta­ tuts de Québec, 38 Vict. 1875. 5Ï7P. 2 3.5cm.

(18)

Mandements, Lettres pastorales, Circulaires et autres documents publies dans le diocese de Mont­ real depuis son érection. Tome VII: Montréal, J.-A.

Plinquet, 1887. 35Up

«

21.5cm.

Mandements, Lettres pastorales et Circulaires des eveques de Québec publies par Mgr H. Têtu et l’~âbbé C.-O. Gagnon (Nouvelle série). Son Eminence le Cardinal Taschereau. Québec, Imprimerie générale A. Coté et Cie, 1889. Vol. 1: 1871-1876; 570p.

22cm. Vol. 11: 1877-1887; 826p. 22cm.

Mandements, Lettres pastorales et Circulaires de Mgr Jean Langevin, 1867-1870• Rimouski, A.-G. Di­

on, 187 ô. 638p. 19.5cm.

Rapport sur les élections générales de 1875• Qué­ bec, typographie du Canadien, 1875* 11;3P• 23.5cm.

Recensement du Canada 1870-1871, vol. 1.

Savaète, Arthur. Voix Canadiennes. Vers 1 * abîme. Paris, édition par l’auteur. Vol. 11T: 3^1p» 22.5cm.

b) Brochures et pamphlets

Coup d’oeil sur le libéralisme européen et sur le libéralisme canadien. Montreal, le Franc-Parleur, lo76. 79p. 22cm.

(19)

Galt, Alexander T., Church and State. Montréal, Dawson Brothers, 187^7 l|lp. 21 .£cÊï•

Taché, Mgr Alexandre-Antonin, Encore l’Amnistie. Saint-Boniface, Imprimerie du journal Le Métis, 1675* Lj-lp. 21. 5cm.

c) Les journaux

L’Action Sociale. Québec, 1908. Organe officieux du cierge québécois.

Nous avons consulté les journaux suivants pour la période de 1875 à 1878.

Le Canadien. Imprimé à Québec, dirigé par Tarte qui favorisait alors les conservateurs.

Le Courrier du Canada. Imprimé à Québec. Ultramon- tain, inspiré par Hector Langevin.

u’Evénement. Imprimé à Québec. Journal d’Hector Fabre. Libéral.

La Gazette. Imprimé à Montréal. Journal conserva­ teur anglais et protestant.

(20)

Le Journal de Québec. Imprimé à Québec. Libéral.

Le Journal des Trois-Rivières. Sous l'inspiration de Mgr Laflèche. Ultramontain.

La Minerve. Imprimé à Montréal. Journal conser­ vateur.

The Morning Chronicle. Imprimé à Québec. Organe de la bourgeoisie protestante de Québec.

Le Nouveau-Monde. Imprimé à Montréal. Ultramon­ tain. Organe de Mgr Bourget.

II - ETUDES

Bélanger , abbé Noël. Une introduction au problème de 1*in­ fluence indue, illustrée par la contestation de l'élection de 1876 dans' le comté de Charlevoix. Thèse manuscrite présentée à l’Université Laval, décembre I960. XVIII-153p» 29cm.

Guay, abbé Charles. Chronique _de Rimouski. Québec, Delis- le, 1873. 254p.... 20.3cm.

Hamelin-Hamelin-Letarte. Les élections provinciales dans le Québec, dans Cahiers de C-eographie de Quebec, IV, (7 octobre 1959-mars I960): 3-207.

(21)

Hamelin, Jean. Voir: Hamelin-Hamelin-Letarte.

Hamelin, Marcel. Voir: Hamelin-Hamelin-Letarte.

Lapierre, Laurier L. Joseph Israël Tarte: Relations bet- ween the French Canadian Episcopacy and a French

Canadian Polltician (1874-1896), dans The Canadian Catholic Historical Association. Report

(section anglaise):23-28.

Letarte, Jacques. Voir: Hamelin-Hamelin-Letarte.

III - OUVRAGES GENERAUX

Creighton, Donald. A History of Canada. Boston, Houghton Mifflin Co., 1958. IX-619p. ïll. 22cm.

Langelier, Charles. Souvenirs politiques. Québec, Proulx et Dussault, 1909.

1. De 1878 à 1890. IX-272p. 19.5cm.

Latreille, André. Histoire du Catholicisme en France. Paris, Spes.

III. La Période contemporaine. 1962.

693

p» 23cm

Leroy, Alfred. La civilisation française du XIXème siècle. Belgique~, Casterman, 1963. 4 3^4 P • 20cm.

(22)

Bernard Valiquette, 1?1}.O"1941 • 19 «.J? cm• George-Etienne Cartier.

Le "coup d^tat".

Rumilly, Robert. Histoire de la Province de Québec. Mont­ réal, ” I. II. III. IV. Chapleau. Les Cas tors n

--- Mgr Laflèche et son temps. Montréal, Les éditions du Zodiaque, 193&» U21|p. 17 • 5 cm.

Trudel, Marcel. Chiniquy. Trois-Rivières, Editions du Bien Public, 1955, 2e édition. XXXVIII-339p. ill. 22.5cm.

Wade, Mason. The french Canadians, 1760-19^5» Toronto, Macmillan, 195>6• XVI-113bp. 21.5cm.

IV - INVENTAIRES et GUIDE

Album des anciens du Séminaire de Rimouski. Rimouski,

Imprimerie Gilbert, 191|1» XXXIII- 3 9 G -15 9p • 27.5cm.

Canadian Parliamentary Companion, 1867 à 1896.

Roy, Pierre-Georges. Les Juges de la Province de Québec. Québec, Redempti Paradis. 1933• 5Sôp. partrs. 27 cm.

(23)

A A A

L’affaire Casault-Langevin débuta à l’occasion des élections provinciales de 1875» Cette année-là, le comté de Bonaventure ayant élu un candidat conservateur, les li­ béraux accusèrent leurs adversaires d’avoir mis à leur pro­ fit l’influence des curés du comté et profèrent le cas de­ vant les tribunaux. Mgr Langevin, dans le diocèse duquel se trouvait le comté de Bonaventure, dut défendre l’attitu­ de de ses curés; il le fit avec d’autant plus de zèle que son frère, Hector Langevin, avait brigué les suffrages des électeurs de Charlevoix avec l’alliance non dissimulée du clergé catholique (1).

1. Abbé Noël Bélanger, Une introduction au problème de l’influence indue, the3e manuscrite présentée à l’Uni- versité Laval, décembre I960.

(24)

De part et d’autre, la campagne avait été ardente. Au fédéral, Alexander Mackenzie et les libéraux avaient ré­ ussi à accéder au pouvoir, grâce au scandale du Pacifique dont le parti conservateur devait porter le poids pour quel­ ques années. Les libéraux provinciaux croyaient donc leur heure venue de remporter la victoire, eux qui se trouvaient dans l'opposition depuis la Confédération.

Les plus brillants orateurs de l’époque se réunirent

à la grande assemblée de Sainte-Croix de Lotbinière. La rencontre était due â l’initiative de Joly de Lotbinière,

chef libéral de la province de Québec. Charles de Boucher­ ville, premier ministre conservateur, en fonction depuis un an, avait accepté l’invitation de Joly de Lotbinière de le rencontrer en assemblée contradictoire. Aussi, le 5 juin 1875>, les deux chefs provinciaux, accompagnés de leurs meil­ leurs lieutenants, durent soutenir la position de leur par­ ti (2).

La plupart des questions débattues étaient du do­ maine fédéral. L’abolition du double mandat était trop

récente pour que les provinces aient pu se dégager de l’em­ prise du fédéral. Laurier, député à Ottawa, accouru au

(25)

cours de ses amis, faisait dire à La Minerve:

Ces hommes, muets comme des huîtres à Ottawa, pour la défense de nos droits, ces hommes inertes en face des envahisse­ ments de M. Mackenzie, sont devenus ici

d'une activité dévorante, comme s'ils tou­ chaient yTOOO.OO par année pour s'occuper exclusivement des élections locales (3)»

"Les envahissements de M. Mackenzie" faisaient al­ lusion à la question de 1'Amnistie dont les échos furent entendus sur toutes les estrades. Par crainte des orangis- tes d'Ontario, le gouvernement fédéral n'avait osé accorder l'Amnistie totale qui avait été promise à Mgr Taché. Aus­ si, le parti libéral fut accusé par les conservateurs de faiblesse, sinon de trahison, d'avoir accepté le compromis proposé par Mackenzie: une amnistie pour tous, sauf pour Riel et Lépine qui furent condamnés à cinq ans d'exil. Du

côté libéral, on trouvait l'arrangement fort acceptable et L'Evénement ne se gênait pas de proclamer:

Une dépêche reçue de Manitoba annonce que Lépine refuse le pardon conditionnel qui lui est offert et qu'il restera en pri­

son jusqu'à l'expiration des deux années.

["..J II est évident que sa cellule

transformée par ses admirateurs en un gîte

(26)

agréable lui paraît un bon endroit pour attendre la fin du châtiment illusoire qu’il subit (!|).

Mais, Mgr Taché qui avait négocié l'arrangement avec le gouvernement fédéral, n’était pas du tout satisfait du résultat obtenu. La haute personnalité du prélat jouis­ sait d’un énorme prestige dans la province de Québec et la publication de sa brochure, Encore l’Amnistie, peu avant les élections de 1875>, contribua à faire pencher la balan­ ce du côté des conservateurs. L’opinion de Mgr Taché était catégorique :

Si le Gouvernement Canadien avait pris la responsabilité de demander l’Amnistie pure et simple, il l’aurait obtenue comme il a obtenu l’Amnistie partielle (5>) .

Si la question de l’Amnistie était encore vivace, la question des écoles du Nouveau-Brunswick ne l'était pas moins et le parti libéral dut encore porter le poids de

l'échec subi par les Acadiens. On accusa les ministres canadiens-français d’avoir consenti à des concessions hon­ teuses pour garder le pouvoir. On en fit même une question de conscience et Mgr Jean Langevin, évêque de Rimouski, fut

I4. L’Evénement, 7 mai 1875»

(27)

consulté sur le sujet par le député fédéral de Bonaventure, 1'Honorable Théodore Robitaille. Mgr Langevin ne voit pas que la conscience d'un catholique soit engagée dans cette affaire et il en fait une question libre au point de vue religieux :

L'à-propos de provoquer l'intervention du Gouvernement Impérial ou du Gouverne­ ment Fédéral sont du nombre des questions

libres au point de vue de la conscience et, nos législateurs catholiques pouvaient sans blesser les principes religieux, vo­ ter dans un sens ou dans l'autre (6).

Par cette réponse, Mgr Langevin, consciemment ou inconsciemment, défendait l'attitude de son frère Hector Langevin, qui s'était montré solidaire du gouvernement Cartier-Macdonald dans l'affaire des écoles du Nouveau- Brunswick. Tant que les conservateurs avaient été au pou­ voir, on les avait accusés d'être la cause de l'infortune des Acadiens. Maintenant, c'étaient les libéraux qui su­ bissaient les mêmes accusations.

De plus, les libéraux étaient tenus responsables de la crise économique qui sévissait cette année-là. On s'en prenait à la politique libre-échangiste du

gouverne-6. Mgr Langevin à l'Honorable Robitaille, 30 janvier 1S71|, AAR, Registre F, No 169.

(28)

ment fédéral et cela devait inévitablement rejaillir sur les libéraux provinciaux. Plusieurs usines avaient dû fer­ mer leurs portes et La Minerve est heureuse de décrire la

situation:

Tous conviennent que c’est le tarif du gouvernement fédéral qui est la cause du malaise et de la souffrance, car il per­ met aux Américains de venir lutter avec de

grands avantages contre nos manufacturiers, et d’en réduire plusieurs aux plus sérieux embarras (7)•

C’est toujours périlleux pour un parti au pouvoir d’entreprendre des élections dans une atmosphère de malai­ se économique. En plus, il y avait un autre péril pour les libéraux; c’était la question religieuse. Les événe­ ments européens, telles les agressions de Garibaldi contre

le pouvoir temporel et les violences anticléricales de la Commune parisienne avaient un grand retentissement au Cana­ da. Les troupes rouges de Garibaldi étaient représentées comme les forces du mal déchaînées contre le catholicisme. Et les journaux conservateurs ne manquaient pas de repré­

senter que le rouglsme du Québec et le rougisme de

(29)

di étaient bel et bien de la même nuance.

Devant l’avalanche des accusations, les libéraux en étaient réduits à une position défensive. Les uns, comme l’avaient fait Laurier et Joly de Lotbinière à l’as­ semblée de Sainte-Croix, attaquaient l'obstacle de front. Laurier s’efforça de séparer la cause de son parti de cel­

le des libéraux européens. Joly de Lotbinière réclama pour son parti "la même loyauté, le même respect pour la religion que les conservateurs'’ (8). Les autres, comme Louis-Amable Jetté, avaient essayé de détourner les foudres

de Mgr Bourget par la fondation d’un parti national, mais ce parti contenait de nombreuses célébrités de l'ancien parti rouge et l'astuce ne trompa personne:

Les événements, comme nous l'avons dit avant-hier, se sont chargés de démon­ trer que la prétendue création du parti national n'avait été qu’une ignoble far­

ce montée pour tromper le peuple, esca­ moter le pouvoir. De prétendus nationards

sent venus avouer de plus qu’il n'y avait qu'un seul parti et qu'ils étaient des rouges comme M.M. Fournier, Laflamme et Geoffrion (9).

Mgr Langevin, "abstraction faite de prédilections

8. Le Canadien, 8 juin 187^. 9. La Minerve, 22 mai 1875 •

(30)

personnelles'* se chargea de démontrer à Mgr Taschereau des tendances révolutionnaires du parti dit national:

Quant aux affaires politiques, abs­ tractions faites de prédilections person­ nelles, j’avouerai à V. G. que je suis effrayé de voir une partie du clergé de la province de Québec favoriser le parti dit national, je suis intimement convain­ cu qu’entre ses mains, nos institutions nationales et religieuses courent et sur­

tout courront un extrême danger. Tôt ou tard, ces anciens rouges viendront à se démasquer et alors le clergé ouvrira les yeux, mais peut-être trop tard. Avant la révolution française, d’honnêtes gens

dans le clergé et la noblesse se faisaient aussi illusion sur les vrais projets des prétendus patriotes! Ils ont été les pre­ mières victimes. Puissé-je être un faux

prophète (10).

Ayant averti bien confidentiellement Mgr Tasche­ reau qu’il pourrait être une des premières victimes du parti libéral, soi-disant national, Mgr Jean Langevin vou­ lut élever la voix ouvertement pour tous ses fidèles. En pleine campagne électorale, il fit ses recommandations à scs ouailles en vue des élections à venir. Par la Lettre Pastorale du 28 mai 1875, l’évêque de Rimouski énumère les règles à suivre le jour de la votation:

10. Mgr Langevin à Mgr Taschereau, 9 janvier 1874, AAR, Correspondance, No 2.

(31)

Ainsl, vous ne pouvez voter en faveur de ceux qui prétendent, entre autres cho­ ses :

lo - Qu’il est dangereux d’introduire les principes religieux dans la po­ litique .

2o - Qu’il faut que la législature inter­ dise aux Pasteurs de 1’Eglise de donner au peuple une direction de conscience en matière d’élection. 3° " £***7

Lto

-6o - Qu’il serait désirable d’avoir des écoles mixtes où l’on enseignât

aucune religion aux enfants, et d’en­ lever au clergé tout contrôle sur 1’enseignement.

Et ne nous dites pas, N.T.C.F., que l’on voit parmi les partisans de ces doctrines dangereuses, dites libérales, des hommes honorables, paisibles, exemplaires! Ce

sont les dupes de ceux qui les mènent (11).

Mgr Langevin défendait donc à ses fidèles de voter pour les partisans de "ces doctrines dangereuses dites li­ bérales". Et à ses yeux, aucun libéral ne pouvait trouver grâce, car même si un individu paraissait exemplaire, il

11. Mgr Jean Langevin, Lettre Pastorale du 26 mai 1875>, dan s Mandement, Lettr es Pastora 1 es, Circulaires, 2ÎL|. s s .

(32)

était tenu responsable des doctrines professées par ses chefs.

Dans toute la province, le clergé s’était jeté ou­ vertement dans la lutte électorale. Les journaux libéraux

étaient unanimes à se plaindre de la conduite des Pasteurs de l'Eglise catholique (12). Bien que les Anglo-protes­ tants aient fait l’alliance avec les libéraux (13), le ré­ sultat des scrutins donna une éclatante victoire au parti

conservateur. Le nouveau Parlement se composait de qua­ rante-cinq députés conservateurs et de vingt libéraux (11|). Charles de Boucherville demeurait premier ministre pour un nouveau terme. De tendances ultramontaines, il n'eut pas l'heur de plaire aux Anglo-protestants. Le Witness l'ap­ pelait un Jésuite laie (15)• Le Morning Chronicle se mon­

tra mécontent du résultat général des élections:

12. Le Journal des Trois-Rivières, cité par La Minerve, 22 juillet 1875.

13. Le Canadien, 10 juillet 1875. Le Canadien, alors con­ servateur, décrit ainsi la tendance du vote anglo-pro­ testant: "Nos concitoyens d'origine anglaise et de croyance protestante ont donné un appui presqu'unani­ me au parti libéral dans la contestation qui vient de

se terminer. Leurs journaux, sauf Le Montreal Gazette qui a noblement fait son devoir, ont regorgé d'appels aux plus tristes préjugés. A Québec, ils ont été ins­ pirés et dirigés par l'Hon. M. Irvine".

lli. Hamelin, Hamelin et Letarte, Les élections provincia­ les dans le Québec, 17•

(33)

We cannot say that the resuit of the general élections of wednesday is satisfactory. We counted upon a majo- rity against the Boucherville Gcvern- ment, and we had a right to expect much more support from the people than we

received (16).

Dans certains comtés, l’alliance libérale-protes­ tante fut évidente. Ainsi dans le comté de Terrebonne, les conservateurs se plaignirent de ce qu’on avait excité les protestants contre leur candidat, M. Adolphe Chapleau. La Minerve se fait l'interpète de leurs griefs:

Ce n’est pas le seul endroit où

l’on ait à exciter les protestants con­ tre nos amis. Ainsi, dans le comté de Terrebonne, pas un seul protestant du Nord du comté n’a voté pour M. Chapleau

(17).

Cependant, dans le diocèse de Trois-Rivières, la vigilance de Mgr Laflèche obtint un plein succès; pas un seul député libéral ne réussit à se faire élire dans la région trifluvienne (18).

Dans le comté de Bonaventure, le siège restait au député conservateur, Pierre-Clovis Beauchesne.

Celui-16. The Morning Chronicle, 10 juillet 1875. 17* La Minerve, 10 juillet 1875'.

(34)

ci n’était pas un nouveau venu dans l’enceinte parlemen­ taire. Il avait été élu un an auparavant et faisait par­ tie de l’équipe du premier ministre de Boucherville depuis I87I4. A cette date, l'Honorable Robitaille qui avait cu­ mulé les deux sièges de Bonaventure, dut opter pour le fé­ déral après l’abolition du double mandat. C’est alors que Pierre-Clovis Beauchesne se présenta au siège vacant et fut élu une première fois contre son adversaire libé­ ral, John Robinson Hamilton. Le nouveau député avait rem­ porté la victoire avec une marge confortable; sa majorité

s’élevait à cent soixante-trois voix, mais son adversaire avait mené une belle lutte en s’assurant près de quatre- vingt pour cent des votes. Mgr Langevin ne fut pas content du résultat du scrutin. Il ne tolérait pas qu’un candidat protestant (Hamilton) ait obtenu un si grand nombre de voix. Il en fait le reproche à l’abbé Napoléon Thivierge, curé de Bonaventure:

Je vous avoue que j’ai vu avec étonne­ ment et regret l’état des poils dans l’é­

lection qui vient d’avoir lieu pour la chambre locale. Je ne comprends pas com­ ment un si grand nombre de vos catholiques peuvent avoir voté pour confier à un pro­ testant leurs intérêts les plus chers (19)•

19. Mgr Langevin à M. l’abbé Napoléon Thivierge, 12 août 187ù, AAR, Registre F, No 43fî.

(35)

L'année suivante, à l'élection générale de 1875>, le siège de Bonaventure est encore disputé par les deux mêmes adversaires. Nous avons vu que le candidat conser­

vateur, Pierre-Clovis Beauchesne avait été élu mais sa majorité était réduite de cent soixante-neuf à soixante-

dix voix, en dépit des remontrances de Mgr Langevin. Ha- milton et ses amis crurent le moment bien choisi de recou­ rir à la contestation devant les tribunaux. Le motif in­ voqué était que les curés avaient ouvertement favorisé le parti conservateur. Le curé de Bonaventure, M. Thivierge, voulant justifier sa conduite, envoie à Mgr Langevin l'ex­ trait d'un de ses sermons, prononcé avant les élections:

Mais à présent que vous connaissez les mauvais principes et les mauvaises tendances de ces hommes qui s'appellent libéraux, vous ne pouvez en conscience les supporter ni voter pour eux.

Voilà, d'après mes notes ce que j'ai dit au sujet des élections. C'est cette annonce du refus des sacrements qui a fait crier nos ennemis. Je n'ai jamais nommé le nom des candidats à l'église. Je me suis toujours servi du mot libéral et du mot conservateur (20).

20. Rev. Napoléon Thivierge à Mgr Langevin, 27 septembre 1877j AAR, boîte: Question de l'influence indue.

(36)

Le curé Thivierge n’était pas le seul à avoir pris des notes. En fait, on s’attendait si bien à voir cette élection traînée devant les tribunaux, que plusieurs té­ moins avaient écrit leurs commentaires quelques jours a-

près l’élection en vue de la contestation probable.

Après délibérations, les libéraux crurent leurs griefs fondés et décidèrent de contester l’élection de Pierre-Clovis Beauchesne, alléguant pour motif l’influen­ ce indue des curés du comté.

(37)

A à A

Mgr Langevin avait élevé la voix "dans l’intérêt de la Religion et de la Patrie” (1), par la lettre pasto­ rale du 23 mai 1875» Il y donne ses conseils aux élec­ teurs sur la conduite à tenir le jour de la votation. On se souvient que Mgr Langevin n’avait nommé ni le parti li­ béral ni le parti conservateur lorsqu’il s’adressait à ses diocésains. Dans les lettres qu'il adressait à ses curés et que nous avons retrouvées aux archives de l’archevêché de Rimouski, nous pouvons suivre de plus près la pensée de Mgr Langevin.

1. Mgr Langevin, Mandements, Lettres Pastorales, Circulai­ res, ASQ, 211.

(38)

Sn 1370, c'est-à-dire cinq ans avant la contesta­ tion de Bonaventure, Mgr Langevin donne son opinion au su­ jet d’un candidat protestant qui parcourt le comté de Té- miscouata. Nous retraçons les opinions de Mgr Langevin

par l'intermédiaire du Grand-Vicaire Edmond Langevin, frère de l’évêque de Rimouski et fidèle écho des idées de son grand frère. S’adressant au curé des Trois-Bis- toles, le Grand-Vicaire Langevin lui fait cette confiden­

ce

J’apprends par voie détournée que l’on fera bientôt des efforts pour introduire dans le comté de Témiscouata un candidat protestant.

Il est bien évident qu’un comté catho­ lique ne doit élire que des catholiques.

C’est le sentiment de Mgr qui voit en tout cela une question d'ordre public, d’intérêt religieux, non de politique (2).

Nous n'avons pas réussi à identifier le candidat en question. Mais sur ce sujet, la pensée de Mgr Lange­ vin est claire: "un comté catholique ne doit élire que des catholiques" (3). Et personne, à l’époque, n’aurait

2. Le Grand-Vicaire E. Langevin à M. Gagnon, curé des Trois-Pistoles, 27 octobre 1870, AAR, Registre C. No. 17.

(39)

osé contester à l’évêque et aux curés le droit de donner un tel avis, tant qu’il n’y avait pas de menaces de peines

spirituelles.

A la veille des élections de 1871, Mgr Langevin donne de nouveau son avis à un certain P.--3. Beauchesne de Carleton. Nous n’avons pu retrouver la lettre de Beau­ chesne mais nous pouvons vraisemblablement supposer que P.-E. Beauchesne demandait à son évêque de se prononcer en faveur du candidat conservateur de Bonaventure, Théodo­ re Robitaille.

P.-E. Beauchesne, le partisan de Robitaille, ayant tenté de ternir la réputation du candidat adverse, un cer­ tain Monsieur Meagher, Mgr Langevin lui fait répondre par le Grand-Vicaire:

Je répète en finissant qu’il est loin de ma pensée d’intervenir dans l’élection entre M. Robitaille et H. Meagher, puisque je ne savais même pas avant de recevoir votre lettre que le premier fût sur les rangs. Je ne me mêle pas de politique et

si j’étais obligé d’exprimer mon opinion dans l’intérêt de la religion (ce n’est pas le cas en ce moment) je me garderais bien de me prononcer entre deux catholi­ ques estimables (U).

Û. Le Grand-Vicaire E. Langevin à P.-E. Beauchesne, 9 mai 1871, AAR, Registre C.

(40)

C'est toujours la même idée qui revient et qui est exprimée ici par le C-rand-Vicaire. Mgr Langevin se défend de soutenir un parti politique lorsque l'intérêt de la religion n'est pas menacé. Dans le cas qui lui est

soumis ici par P.-E. Beauchesne, Mgr ne voit pas que l'in­ térêt de la religion soit en jeu et il s'abstient de pren­ dre position entre "deux catholiques estimables”. Ce qui laisse supposer que si les deux candidats n'avaient pas

été catholiques, la réponse aurait été différente. Et l'évêque de Rimouski donne ce conseil aux curés de la Gas- pésie, titulaires de paroisses où les Canadiens français avaient de fréquents contacts avec les Anglo-protestants.

En général, les prêtres de la Gaspésie devraient suivre les familles de leurs pa­ roisses de plus près dans leurs relations

journalières, afin de prévenir autant que possible le danger de perversion auquel les exposent leurs rapports si fréquents avec les Protestants (5)»

A l’approche des élections de 187b, Mgr de Rimous­ ki ayant été informé qu'un marchand protestant se porte

candidat dans Bonaventure décide d'intervenir dans la cam­ pagne électorale; nous supposons qu'il croyait les intérêts

5. Mgr Langevin à P. Saucier, curé de Grande-Rivière, 13 avril 1875, AAR, Registre F.

(41)

de la religion menacés puisqu’il avait affirmé à plusieurs reprises que c’était le seul motif qui pouvait le faire intervenir dans la politique. Mgr Langevin s’adresse au Révérend Blouin, archiprêtre et curé de Carleton:

J’apprends qu’un certain protestant parcourt le comté de Bonaventure comme candidat pour la chambre locale. Il me semble que nos intérêts les plus chers, surtout nos intérêts religieux seraient bien mal placés entre ses mains.

Je compte donc que la juste influen­ ce du clergé s’exercera avec prudence et activité de manière à empecher la re­ présentation du comté d’être confiée à une telle individualité.

Veuillez donc vous entendre avec vos confrères de votre archiprêtré là-dessus, mais aussi secrètement que possible (6).

Pourquoi ce secret? Mgr Langevin avait-il mau­ vaise conscience? La loi interdisant tous genres d’inti­ midation avait bien été passée à la session de 1675, mais

aucun tribunal n’avait encore statué que l'ordre spirituel était concerné.

Bous avons encore retrouvé deux lettres de Mgr Lan­ gevin à deux curés de la Baie des Chaleurs; l'évêque répète

6. Mgr Langevin au Rév. Blouin, curé de Carleton 6 avril 1875, AAR, Registre F, No. 851|.

(42)

presque mot pour mot les instructions données dans la let­ tre ci-haut citée (7).

Aux deux Révérends curés, il renouvelle les con­ seils de prudence et de discrétion. Il demande également aux deux curés de s’entendre là-dessus avec leurs confrè­ res et de lui donner des nouvelles du résultat de leurs démarches. Les deux prêtres impliqués dans le procès, c'est-à-dire le Révérend Thivierge, curé de Bonaventure, et le Révérend Gagné, curé de New-Richmond, n’ont pas re­ çu de lettre de leur évêque à cette occasion; en tous cas nous ne les avons pas retrouvées aux archives de l’arche­ vêché, mais il est certain qu’ils étaient au courant des instructions de leur évêque et, en appuyant le candidat conservateur, ils ont répondu aux instructions de leur su­ périeur; sauf, peut-être, en ce qui concerne les conseils de prudence et de discrétion.

Une fois les élections terminées, Mgr Langevin est consulté par les curés du comté de Bonaventure au sujet de

7. Mgr Langevin au Rév. Gagné, curé de Cascapédia, 13 a- vril 187h, AAR, Registre F, No 865.

Mgr Langevin au Rev. curé Saucier, curé de Grande Rivi­ ère, 13 avril 1875, AAR, Registre F, No. 863.

(43)

la conduite à tenir vis-à-vis les pénitents. L’évêché fait alors parvenir les éclaircissements que voici:

Pour ce qui regarde les voteurs dans la dernière élection, n’en parlez pas en chaire mais au confessionnal, refu­ sez d’absoudre ceux qui ont voté pour le candidat en question, à cause des cir­ constances particulières que vous menti- onnez à moins qu’ils ne serepentent et promettent d’agir mieux une autre fois

(8).

Quelles sont ces circonstances particulières qui privent le pénitent des bienfaits de l'absolution? Le Révérend Thivierge, dont il sera question au procès, se fait préciser quelques points obscurs:

Quant au confessionnal, agissez selon que le demandera chaque cas particulier. Voyez quel motif animait le pénitent quand il a voté, s'il était de bonne foi ou non, s'il a vendu sa voix ou s'il n'a considéré que son intérêt personnel, s'il était con­ vaincu que le candidat pour lequel il a vo­ té était digne d'être élu (9).

Les libéraux crièrent à "l'influence indue” et à l'automne de 1876, la cause de J.-R. Hamilton contre son adversaire P.-C. Beauchesne était instruite à New-Carlisle

8. Mgr Langevin à F. Gagné, curé de Cascapédia, 31 juil­ let 1875, AAR, Registre F. No. IOI4J4.

9. Mgr Langevin à M. Thivierge, curé de Bonaventure, 13 septembre 1875, AAR, Registre F, No. 1099*

(44)

devant le juge McCord. Comme nous l’avons signalé plus haut, les journaux font très peu mention de cet événement, mais Le Canadien, alors sous l’inspiration de Tarte, com­ mente pour ses lecteurs le déroulement de la contestation:

Nous avons été en position d’étudi­ er la cause de Bonaventure; on y est allé plus loin qu'à Charlevoix. Z7-V

A Charlevoix, on n’a pas osé se ren­

dre au confessionnal; il fallait garder des bornes, observer les règles de la pruden­ ce libérale. A Bonaventure, on ne s’est pas gêné, comme l’on voit. Et l’on a fait devant le tribunal qui s’y est prêté, une preuve que si elle est définitivement ad­ mise, constituera les tribunaux civils

juges des actes du prêtre au confessionnal. Attendons-nous à voir MM. Mérédith, Stuart, Dorion, Ramsay, Mondelet, Casault, McCord, Maguire, etc., donner l'absolution à ceux

qui n'auront pu l’obtenir de leur curé (10).

Les témoignages entendus à 1'instruction de New-Carlisle furent reproduits sans commentaires dans 1’Evéne- ment des 17, 16, et 19 octobre. Nous avons renoncé à trou ver au greffe de New-Carlisle le compte rendu original du procès de Bonaventure.

Monsieur William Cyr, interrogé comme témoin, n'a

(45)

pas pris de notes au moment de la campagne, mais il dé­ clare se souvenir des paroles de son curé, non pas mot pour mot, mais il dit avoir retenu l’idée générale des sermons prononcés à l’occasion de l’élection. Monsieur Cyr était maire de New-Richmond, mais il s’exprime assez lourdement; son niveau d’instruction ne paraît pas très élevé. C’était un fermier, âgé de 3U ans. L'instruction eut lieu en automne 1876, soit un peu plus d'un an après la campagne électorale (11).

D’après les réponses du maire Cyr, monsieur le cu­ ré François Gagné de New-Richmond s'est adressé aux parois­ siens pendant le sermon â la messe du dimanche précédant l'élection. Les deux candidats étaient présents à la mes­ se. Le curé a dit: "qu'il fallait ne point voter pour des protestants en aucun cas, jamais” (12). Les témoins s'en­ tendent sur ce fait: le nom de Monsieur Hamilton ne fut pas prononcé. On questionna de nouveau Monsieur Cyr pour savoir s'il y avait eu des menaces. Sa réponse fut claire: "Il a fait des menaces à ceux qui ne voteraient pas comme il a dit.”

11. L'événement, 17 octobre 1876. 12. Loc. cit.

(46)

Le témoin déclare ensuite n'avoir jamais été ques­ tionné au confessionnal sur la façon dont il avait voté.

Puis le maire est invité à se prononcer sur le ré­ sultat du sermon dans l'esprit des électeurs. D’après lui, plusieurs se sont abstenus de voter plutôt que de déplaire au curé. Comme les questions deviennent plus serrées, le maire nomme Raymond Bcurdages, Xavier Bourdages et Caje-

teau Leblanc qui n'ont pas voté. Répondant à l’avocat de Beauchesne, le maire Cyr répond qu’il a voté lui-même pour Monsieur Hamilton car il savait bien que le curé ne rempli­

rait pas ses menaces de peines spirituelles.

Comme l'avocat demandait si une personne d'une in­ telligence moyenne pouvait croire la parole du curé, le témoin répond sans ambiguïté: "Il y en a plusieurs qui l'ont cru" ( 11|) .

François Poirier, cultivateur de 61 ans, a pris

13» Locn cit» 11}.. Loc. cit.

(47)

des notes au moment de la campagne électorale. Il lit sur sa feuille avant de répondre aux questions des avo­ cats :

Il [M. le curé Thivierge] a dit qu’il avait reçu des nouvelles de Rimouski et que Mgr refuserait les sacrements à tou­ tes personnes qui voteraient pour le par­ ti rouge (15)•

Le témoin déclare que, au sortir de la messe, ses amis ont tenu une petite consultation pour décider s'ils resteraient fidèles au candidat libéral. Ils ont décidé de ne point voter car "on ne votant point on commettait un péché, mais en votant libéral, on en commettait un bi­

en plus grand encore" (16).

Le témoin Edouard Bacon n'a pas de notes, mais il s'exprime dans un français très correct; il paraît a- voir un bon niveau d'instruction. C'est un jeune marchand de New-Richmond. A la fin de sa déposition, il confesse être franc-maçon. Au procès, il explique comment le curé Gagné espérait se soustraire à la loi du scrutin secret.

15. Ibid., 18 octobre 1876.

16. Ibid., 19 octobre 1876. Extrait du témoignage d'E­ douard-Joseph Bacon.

(48)

Voici son témoignage:

Le Révérend Gagné a dit aussi qu’il ne saurait point pour qui les gens vote­ raient, mais qu’il leur demanderait au

confessionnal et que là, ils seraient obligés de lui dire et s’ils avaient vo­ té pour le parti libéral, les sacrements de l'Eglise leur seraient refusés (17).

Tous les témoins ayant été entendus, il fallait maintenant attendre la décision de la Cour de Révision

qui devait se réunir à Québec, en ce même automne de 1876.

(49)

A A A

La Cour supérieure, siégeant en révision, fut ap­ pelée à se prononcer sur la contestation de l’élection de Bonaventure. Le juge Louis-Napoléon Casault était a- lors président de ce tribunal, assisté par ses deux collè­ gues, Maguire et McCord. Ce dernier avait présidé à l’ins­ truction et à l'audition des témoins à New-Carlisle et

dut également prononcer la sentence sur le banc de la Cour supérieure.

Le jugement fut rendu le 19 décembre 1876. La Cour décidait d'annuler l'élection du député conservateur P.-C. Beauchesne. Les deux candidats furent disqualifiés pour sept ans et les deux partis durent payer leurs frais

(50)

P.-C. Beauchesne fut disqualifié pour absence de quali­ fication foncière et influence cléricale "indue". J.-R. Hamilton avait payé à boire le jour de la votation et fut

disqualifié pour cette raison.

Le juge Maguire différait d’opinion avec ses col­ lègues, Il ne pouvait admettre que le député Beauchesne ait son élection annulée pour influence cléricale. D’a­ près lui, le député méritait la disqualification, mais seulement pour manque de qualification foncière (1). Il n’encourut pas moins la fureur de Mgr Langevin.

Le juge Casault, président du tribunal, donnait ses motifs par écrit étant donné l'importance de la cau­ se. Il devait se prononcer peu après le juge Routhier qui venait de rendre jugement dans la cause de Charlevoix

(2). Le juge Routhier était de tendances ultramontaines et déclara que la loi de 1875 interdisant l’intimidation ne concernait pas le pouvoir spirituel et que le prêtre pouvait exercer librement son influence du haut de la chai re.

1. Le Canadien, 19 décembre 1876.

2. Abbé Noël Bélanger, Une introduction au problème de l’influence indue, 96.

(51)

Louis-Napoléon Casault était un conservateur, ad­ mirateur de MacDonald qu’il considérait comme "le plus grand homme qu’ait eu la puissance du Canada" (3). Il avait représenté le comté de Montmagny au Parlement du Canada-Uni de 1854 à 1857; de 1867 à 1870, il était dépu­ té de Bellechasse à la Chambre des Communes (4)«

De 1858 à 1891, le professeur L.-N. Casault donne le cours de droit commercial et maritime à l’Université Laval (5)» En 1872, c’est-à-dire quatre ans avant le ju­ gement de Bonaventure, il suggère au recteur, Mgr T.-E. Hamel, Thomas McCord comme professeur de droit à l’Univer­ sité (6). De là, on peut conclure que Casault avait quel­ ques liens d’amitié avec le juge McCord.

En décembre 1876, le juge Casault doit rendre ju­ gement dans l’affaire de Bonaventure. Avec ses collègues les juges Maguire et McCord, il contredit le jugement de Charlevoix et annule l’élection du député conservateur à

3. L.-N. Casault, à G.-B. Paquet, 12 juin 1891, ASQ, Univ, 152.

4. P.-G. Roy, Les juges de la province de Québec, 103» 5. Loc. cit.

6. L.-N. Casault à Mgr Hamel, 12 août 1872, ASQ, Universi­ té 117, No. 12.

(52)

cause de l’influence indue du clergé catholique.

Le juge Routhier avait basé son argumentation sur le fait que le clergé avait été "le grand élément social et civilisateur du peuple canadien" (7).

Il ne voulait pas que l'on mette "des entraves à la liberté de la prédication chrétienne"(8). Enfin, il lui semblait que les tentatives faites par les libéraux pour empêcher les curés d’user de leur influence étaient des actes de mauvais catholiques et de mauvais citoyens (9).

Monsieur le juge Routhier soumet ensuite son ju­ gement à Mgr Langevin pour savoir s’il ne contenait pas quelques erreurs au point de vue doctrinal. L’évêque de Rimouski se montre très satisfait du jugement en général

et très heureux de l’issue du procès. Cependant, l’évêque réserve quelques remarques au sujet des principes religi­ eux. Le juge, ayant dû aborder certaines questions déli­ cates comme le problème des immunités ecclésiastiques, l’évêque de Rimouski fait savoir au juge:

7. Jugement du juge Routhier dans The Quebec Law Reports, novembre 1876, II: 372.

8. Loc. cit. 9. Loc. cit.

(53)

Mais il me semble difficile de jus­ tifier Votre Honneur d’avoir permis la preuve sur des sermons etc., des curés, puisque vous vous déclarez incompétent

(et à bon droit) à décider s’ils ont été trop loin. (10)

Mais le juge Routhier avait décidé que la loi ne visait que l'intimidation "temporelle". Il ne pouvait être question de l'intimidation dans l'ordre spirituel. Le juge Casault s'appuyant sur le texte de la loi, s'op­ pose à cette interprétation. D'après Routhier, ce n'était pas dans l'intention des législateurs de viser l'influen­ ce cléricale. Casault répond à cela qu'il s'est écoulé

deux sessions "depuis que les pétitionnaires se sont plaints de cette infraction aux franchises électorales" (11). Et on n’avait pas essayé au Parlement d'expliciter la loi ou de l'amender. Il n’y avait pas non plus un seul membre de l'épiscopat qui en avait demandé le rappel (12).

Routhier avait déclaré dans son jugement de Char- levoix que restreindre la liberté du culte catholique

é-10. Mgr Langevin au juge Routhier, 3 décembre 1876, AAR, Correspondance de Mgr Langevin, No. 203.

11. Jugement du juge Casault dans The Quebec Law Reports, 29 décembre 1876, III: 81.

(54)

tait contraire au traité par lequel la France avait cédé le Canada (13)» En 1763, la France avait demandé la li­ berté religieuse pour les Canadiens et cette liberté fut accordée, mais "en tant que le permettent les lois de la Grande-Bretagne”. Casault s’était surtout appuyé sur cet­ te dernière partie de l’article IV du traité de Paris. Il invoqua plusieurs cas identiques en Angleterre et en Irlande où la loi anglaise interdisait précisément ce gen­ re d’intimidation par le clergé catholique.

Casault enchaînait que, si la loi avait pour ef­ fet de restreindre la liberté du culte catholique (et lui- même ne partageait pas cette opinion), il n’était pas li­ bre d’en refuser l’application. Car le juge a pour missi­ on de faire appliquer la loi, mais non de se prononcer sur la justice ou l’injustice des lois. Il n’est pas un législateur, mais il doit faire respecter les lois telles que faites par le législateur. Si sa conscience croit qu’une loi est mauvaise, il doit plutôt quitter le banc qu’il occupe et non "tranquiliser sa conscience en violant son serment d’office” (lÀp) .

13. Jugement du Juge Routhier dans The Quebec Law Reports, 29 décembre 1876, III: 81.

(55)

Le juge Casault examine ensuite la déposition de chacun des témoins et conclut sur la valeur des preuves apportées devant le tribunal. Des pêcheurs illettrés, re­ latant des événements un an après qu’ils se sont écoulés peuvent avoir une version incomplète et même inexacte. Mais la plupart des témoins s’entendent sur les faits es­

sentiels. Et comme le défendeur n’a pas produit de preu­ ves attaquant la crédibilité des témoins, bien qu’il les

crût mal disposés, le juge accepte ces témoignages comme concluants (1£).

Le juge avoue avoir beaucoup étudié sur la question des immunités ecclésiastiques. Cependant, il ne croit

pas nécessaire d’exposer le résultat de ses recherches puisque les deux prêtres, Thivierge et Gagné, n’étaient pas mis en cause.

En effet, on avait parlé des curés Thivierge et Gagné à l’instruction, mais on ne les visait pas person­ nellement; on ne les visait que comme les agents de Beau-

chesne. Et c’est Beauchesne qui est tenu responsable de les avoir acceptés comme agents. Pour le juge Casault,

(56)

chesne sort de l’église, fait un discours sur la place publique et déclare être "le candidat du clergé et que,

sans le clergé, il ne serait jamais venu de l’avant" (16). En définitive, c’est Beauchesne qui est accusé d’avoir mis à son profit les menaces proférées par le curé. Et le

juge n’en veut qu’aux menaces; il ne veut pas examiner la doctrine que les prêtres ont exposée à leurs ouailles, même au sujet des élections. Par exemple, le prêtre a

droit d'expliquer à ses fidèles comment voter, s’ils doi­ vent voter, et même pour qui ils doivent voter (si jamais

il le juge à propos, mais c’est discutable). Là où l'ac­ tion du prêtre devient abusive, c’est lorsqu’il y joint des menaces de peines spirituelles, comme le refus des sa­

crements ou de la sépulture ecclésiastique (17). A ce mo- ment-lâ, il y a intimidation dans l’ordre spirituel et non persuasion, car c’est la crainte qui empêche de voter pour

tel ou tel candidat.

16. Ibid., 8^. 17. Ibid.,

(57)

Le Journal de Québec publie le jugement en entier et sans commentaire, le 26 décembre 1876. Les libéraux tenaient la contre-partie du jugement de Charlevoix. La Minerve réplique aux journaux libéraux:

Le National va trop vite quand il dit que cet arrêt établit la jurispru­ dence sur la question en litige de la prétendue influence indue cléricale. Cette décision n’a assurément pas plus d’autorité que celle qui est intervenue dans le cas de Charlevoix (18).

Mgr Langevin qualifie le jugement de "plus qu’é­ trange" (19). Dans une lettre adressée à Mgr Laflèche, il informe celui-ci qu’il a l’intention d’obtenir du Chan­ celier apostolique la condamnation du juge Casault. Ce­ pendant, il ajoute que ses réclamations auraient beaucoup plus de succès si tous les évêques consentaient à l’appuy­

er. En cas d'échec auprès du Chancelier apostolique, Mgr Langevin est prêt à référer la cause au Souverain Pontife lui-même (20).

Le Chancelier apostolique Mgr Taschereau était

é-18. La Minerve, 21 décembre 1878.

19. Mgr Langevin à Napoléon Thivierge, curé de Bonaventu- ï*©, 5 janvier 1877, AAR, Correspondance, No. 205»

20. Mgr Langevin à Mgr Laflèche, 29 décembre 1876, AAR, Correspondance, No. 207»

(58)

galement Visiteur de l’Université Laval; Mgr Langevin s’a­ dresse à lui afin que le juge Casault soit privé de sa

chaire à l’Université:

Ce n’est pas le juge, je vous prie de le remarquer, mais le Professeur que je

cite à votre tribunal. Z7.v Je demande qu’il soit privé de sa chaire dans l’in­ térêt de la jeunesse et pour l’honneur de l’Université (21).

Mgr Taschereau, il est facile de le constater, ne savait que faire du cas Casault. Il transmet la lettre de Mgr Langevin au recteur de l’Université, Mgr T.-E. Hamel.

Il la transmet également au juge Casault lui-même, en de­ mandant les explications que le juge trouvera "convenables

et utiles" (22).

Mgr Taschereau s'attendait â de petites explicati­ ons faciles qui pourraient satisfaire à la fois Mgr Lan­ gevin et le juge. Il allait bientôt s’apercevoir de son erreur.

Comme la question devait être également soumise

21. Mgr Langevin à Mgr Taschereau, U janvier 1877, ASQ, Université 116-BI.

22. Mgr Taschereau à Mgr Hamel, 9 janvier 1877, AAQ, Uni­ versité 116-BN.

(59)

au Souverain Pontife, Mgr Hamel donne son point de vue à Mgr Benjamen Pâouet alors à Rome. Le recteur de l’Uni- versité attache énormément d’importance à l’affaire Ca­

sault et il va même jusqu’à prévoir que la démission du juge amènera l’Union législative de toute l’Amérique du Nord! Comment Mgr Hamel en arrive-t-il là? D'après lui, le Conseil Privé d'Angleterre viendrait à poursuivre l'U- niversité Laval ”à cause de l’obligation que 1'Université imposerait aux juges du Canada de juger contrairement aux lois du pays” (23). Et le recteur d’ajouter:

Mais, ce n'est pas tout; jusqu’à pré­ sent, notre neutralité a maintenu une cer­ taine aisance, surtout dans le Gouverne­ ment Fédéral, et nous tenons de source

certaine qu'on nous en sait gré (21±).

Mgr Hamel appelle ''neutralité” l’attitude de l'U- niversité Laval envers les libéraux et les ultramontains. Mais les témoins de l'époque savaient tous que c'était une neutralité bienveillante à l’égard des libéraux et Mgr Taschereau était connu pour ses sympathies libérales.

Cela se passait au moment où le gouvernement de

Boucher-23. Mgr Hamel à Mgr B. Paquet, 12 janvier 1877, ASQ, Uni­ versité 116-BW.

(60)

ville, de tendances ultramontaines, tenait les rênes du pouvoir à Québec. A Ottawa, Mackenzie régnait avec ses acolytes et le "on nous en sait gré” de Mgr Hamel concer­ ne bien les libéraux d'Ottawa. En d'autres termes, l’Uni- versité Laval était Intéressée à garder les bonnes grâces du Gouvernement fédéral et le recteur craint même la rési­ liation de la charte de 1'Université (2£). Et Mgr Hamel continue de broyer du noir:

Le renvoi du juge Casault â cause de son j’ugement /7._27 mettrait le pays en feu, surexcitant le fanatisme protestant contre la prétendue tyrannie des évêques et du clergé. La conséquence serait d’accélérer l’arrivée de l’Union législative de toute l’Amérique du Nord. Alors vous connaissez les conséquences (26).

Le recteur est persuadé que la réponse du j’uge devant les demandes d'explications de Mgr Taschereau sera de donner sa démission. Il profite de toutes ses rencon­ tres avec 1'Archevêque ”pour lui donner la chair de poule” (27), afin que celui-ci retire sa lettre. On voit que

2£. Loc. cit. 26. Loc. cit. 27. Loc. cit.

(61)

1’entente entre Mgr Hamel et Mgr Taschereau n’est pas toujours cordiale. Le recteur va même confier que doré­ navant il veut exiger de Mgr Taschereau que celui-ci trans­ mette au conseil universitaire toutes les plaintes contre

qui que ce soit et "nous (le conseil universitaire), nous consulterions les règles de la prudence” (28).

En dépit de toutes les explications de Mgr Hamel, le juge ne voit qu’une réponse à donner et envoie sa dé­ mission:

Si une chaire de droit à 1‘Université Laval expose le juge qui l’occupe à être appelé par l’autorité universitaire à

expliquer ses jugements ou les motifs sur lesquels il les appuie, les deux positi­ ons sont incompatibles et il doit renon­ cer à une des deux: (29).

Le juge va remettre sa lettre au recteur lui-même "en pleurant à chaudes larmes” (30)» Il confesse que cet­ te affaire l’a brisé plus que son voyage à la Rivière-du-Loup où il était allé assister aux funérailles d’une de ses soeurs. Le recteur fait alors valoir toute son

élo-28. Loc. cit.

29. Juge Casault à Mgr Taschereau, 12 janvier 1877, ASQ, Université 116-BT.

30. Mgr Hamel â Mgr B. Paquet, 12 janvier 1877, ASQ, Uni­ versité 116-BW.

(62)

fesseur Casault réfléchit, avoue qu’il n'a pas pensé à tout cela, mais sa réponse reste la même. Un juge ne peut rien ajouter, même sous forme de commentaires à un juge­ ment rendu sur le banc. C’est pour le juge Casault, une

question de devoir, même si beaucoup de liens le retien­ nent attaché à 1'Université. Mgr Hamel ne voit plus qu’u­ ne solution: c'est que Mgr Taschereau retire la lettre dans laquelle il demande des explications sur le jugement de Bonaventure. D’après le recteur, cette lettre serait res­ tée secrète entre 1'Archevêque et le juge. Si Mgr Tas­ chereau retire sa lettre, personne ne saura jamais rien, le juge n'aura aucune explication à donner et consentira à poursuivre ses cours en attendant la réponse de Rome. Casault se laisse convaincre et attend que Mgr l’Archevê- que retire sa lettre après 1'intervention de Mgr Hamel. Mais voilà où l'affaire se gâte. Mgr Taschereau a déjà

écrit à Mgr Langevin pour lui demander d’attendre patiem­ ment les explications du juge qui ne devraient pas tarder.

(63)

de de faire savoir à Mgr Langevin qu’il est incompétent dans cette cause et que tous gagneraient à attendre les avis de Rome. L’Archevêque en arrive là après le bril­ lant raisonnement que voici:

Considérant 1° que Mgr l’évêque de Rimouski déclare formellement n’avoir pas

l’intention de citer devant moi le Juge, mais le professeur; 2° que je n’ai devant moi aucune plainte tendant à vous accuser

d’avoir, en votre qualité de professeur, enseigné ou soutenu les sept propositions incriminées ou l’une d’elles:

J’ai dû déclarer à Mgr l'évêque de Ri­ mouski qu’en ma qualité de Visiteur et de

Chancelier apostolique de l’Université Laval, je suis incompétent dans la cause

dont il s’agit.

En conséquence, je ne vois rien qui exige que vous donniez votre démission

comme professeur de droit à l’Université Laval (33)•

Ces explications donnèrent enfin satisfaction au

juge qui consentit à retirer sa démission comme professeur(34)•

32. Loc. cit.

33» Mgr Taschereau au juge Casault, 15 janvier 1877, ASQ, Université, 116-CB.

34» Juge Casault à Mgr Hamel, 18 janvier 1877, ASQ, Univer­ sité, 116-CD.

(64)

Mgr Taschereau et Mgr Hamel s’étaient bien tirés d’une circonstance épineuse. Mais on a vu que Mgr Langevin é- tait décidé à reporter l'affaire jusqu'à Rome. En atten­ dant, il entendait bien faire respecter la liberté religi­ euse, au moins dans son diocèse. Par son Mandement du 1£ janvier 1877> il condamne certaines propositions contenues dans le jugement Casault, ainsi que toute personne qui soutiendrait ces propositions (35?) •

35. Mgr Langevin, Mandements, Lettres Pastorales, Circu­ laires, 4^-5ss.

(65)

A A â

Lorsque Mgr Langevin avait écrit à 1‘Archevêque de Québec, le L|. janvier 1877, pour lui demander la condam­ nation du juge Casault, il avait également énoncé dans la même lettre sept propositions extraites du jugement Ca­

sault. Les principes étaient jugés par l’évêque de Ri­ mouski comme "dangereux et scandaleux chez l'un des pro­ fesseurs d’une université catholique" (1). Pour appuyer ses dires, Mgr Langevin se contente de rappeler à Mgr Tas­ chereau la Lettre collective des évêques du 22 septembre 1875, où la hiérarchie catholique du Québec avait fait le

1. Mgr Langevin à Mgr Taschereau, janvier 1877, ASQ, Université, 116-BI.

(66)

ces propositions la vérité catholique; car il me faudrait citer notre lettre collective toute /siç7 entière (3).

L'Archevêque avait signé cette Lettre collective avec ses évêques diocésains et l'évêque de Rimouski veut bien qu'il s'en souvienne. Les évêques s'étaient montrés alors assez sévères envers le libéralisme, et, surtout, certains organisateurs du parti bleu s'étaient servis de la lettre collective du 22 septembre comme épouvantail devant les libéraux.

Dans le Mandement du 1£ janvier 1677, Mgr Langevin reprend les sept propositions soumises à Mgr Taschereau, mais il les codifie cette fois en cinq sentences plus

courtes, pouvant être plus facilement comprises par les prêtres et les fidèles. L'évêque de Rimouski n'y va pas par quatre chemins:

Nous déclarons indignes des sacre­ ments ceux qui soutiendraient ces

propo-2. Mandements des Evêques de Québec, V: 339ss.

3. Mgr Langevin à Mgr Taschereau, 4 janvier 1877, ASQ, Université, 116-BI.

(67)

Mgr Taschereau pour une étude approfondie. Son travail, manuscrit d’une trentaine de pages grand format, fut en­

voyé à Rome afin d’éclairer les cardinaux sur les affaire rimouskoises. Voici comment Mgr Langevin énonce les pro positions :

1. Le Parlement est omnipotent et com­ pétent à porter toute loi, même op­ posée à l'exercice de la religion. 2. La liberté des électeurs doit être

absolue.

3» C’est aux cours civiles à réprimer les abus qui peuvent se glisser dans la prédication et le refus des sa­ crements .

1|. La menace du refus des sacrements à propos des élections par les Pasteurs de l'Eglise est une influence indue, une manoeuvre tellement frauduleuse dont les cours civiles ont à prendre connaissance.

b. Il faut observer un serment injuste (5)•

Mgr Langevin voulait refuser les sacrements à tous ceux qui soutiendraient ces propositions. Mgr

Tas-I4. Mgr Langevin, Mandements, Lettres pastorales, Circu­ laires, 14.63»

(68)

chereau, de son côté, veut les soumettre à la Cour de Rome, mais il entend donner son point de vue sous le

couvert de l’incognito.

Le premier reproche que Mgr Taschereau fait â Mgr Langevin, c’est d’avoir choisi dans le texte du juge­ ment Casault des phrases isolées et ensuite de leur avoir

donné un sens absolu. En rappelant les paroles de Benoit XIV, 1'Archevêque soutient que le censeur doit replacer

les phrases dans leur contexte. Ensuite, il passe â l’ex­ amen de chacune des propositions.

Mgr Langevin avait déclaré indignes des sacrements tous ceux qui, à la suite du juge Casault, soutiendraient "qu'il faut observer un serment injuste" (6). D’abord, on ne retrouve pas dans le texte du juge Casault la pro­ position telle qu'énoncée par Mgr Langevin. Le juge s'é­ tait exprimé ainsi:

/Te juge7 appelé à faire l'application

d’une loi, si sa conscience s'y refuse, il doit laisser le banc qu'il occupe de

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