• Aucun résultat trouvé

Élections fédérales 2004 Qu’en est-il des promesses fiscales ?

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "Élections fédérales 2004 Qu’en est-il des promesses fiscales ?"

Copied!
15
0
0

Texte intégral

(1)

Élections fédérales 2004

Qu’en est-il des promesses fiscales ?

Luc GODBOUT

Document de travail 2004/03

(2)

promesses fiscales ?

Luc Godbout* Professeur Chaire en fiscalité et en finances publiques del’Université de Sherbrooke†

Cetexte a été rédigé dansle cadre d’un petit déjeuner-causerie surles enjeux fiscaux, tenule 10juin 2004à Longueuil, organisé par la Chaireenfiscalitéetenfinances publiques de l’Université de Sherbrooke en collaboration avec l’Association de planification fiscale et financière,l’Association des économistes québécois etla Chambre de commerce et d’industrie dela Rive-Sud.

*L’auteur veut exprimer sa profonde reconnaissance à Marcelin Joanis et Jean-Claude Lefebvre pour

leurs observations utiles. Bienentendu,les opinionsexprimées n’engagent quel’auteur,ilassume l’entière responsabilité des commentaires et desinterprétations figurant dansla présente étude.

Pour plus details surla Chaire en fiscali et en finances publiques, vous pouvez consulter son site

officiel àl’adresse suivante: http://www.usherbrooke.ca/adm/recherche/chairefiscalite/.

(3)

Table des matières

Mise en contexte...4

Encore des baisses detaux d’imposition...4

Des réductions d’impôt ciblées àla famille...6

Favoriserl’épargne-retraite...7

Accroîtrelataxation dela richesse...8

Résoudrele déséquilibre fiscal...10

Réduirel’application dela TPS...11

Revoirl’assurance-emploi...12

Augmenterl’impôt des sociétés...13

Lutter contreles pratiques fiscales abusives... 13

Conclusion...13

(4)

Mise en contexte

La panoplie de promesses fiscales répertoriées dans les différents programmes électoraux offre l’opportunité de débattre sur l’état des lieux du système fiscal canadien, en analysant les enjeux fiscaux entourant la présente campagne électorale. D’entrée dejeu,ilfaut préciser que l’analyse selimite aux promesses ayant un caractèrefiscal,ainsi nous necommentons pasla portée générale des programmes électoraux.

Encore des baisses de taux d’imposition

Lors dela campagne électorale 2000,les engagementsfiscaux portaient sur des baisses massives d’impôt. La défunte Alliance canadienne proposait la mise en place d’unimpôt àtaux unique alors quele Partilibéral dans un Énoncé économique, présenté quatrejours avantle déclenchement des élections, promettait queles baisses d’impôt atteindraient 100 milliards $ sur cinq ans. Depuislors,les baisses d’impôt se sont matérialisées.

Encore aujourd’hui, dans le cadre de la présente campagne, les Libéraux ont signifié ques’ilssontréélus, ilestraisonnable des’attendre àce qu’ilseffectuent d’autres baisses d’impôt au cours du prochain mandat, sans en préciserla forme oul’ampleur dansleur programme électoral. De son côté,le Bloc Québécois préconise un principe général voulant queles baisses d’impôt s’appliquent en premierlieu à soulager financièrement les contribuables à revenus faibles et moyens, sans toutefois indiquer les moyens à prendre pour le réaliser. Seuls les Conservateurs proposent encore une baissesignificative del’impôt des particuliers. Letaux d’imposition promisserait progressivement ramené à 16 % pour tout revenu inférieur à 70 000 $, alors qu’actuellement, le taux d’imposition de 16 % existe, mais il s’applique uniquement surla premièretranche de revenus de 35 000 $. Cet allègement fiscal aurait pour effet de réduire de 22 % à 16 %letaux d’imposition surles revenus se situant entre 35 000 et 70 000 $. Les Conservateursciblent donc lescontribuablesà revenus moyens ou élevés puisque seulsles contribuables dont le revenu excède 35 000 $ bénéficieraient de la baisse du taux d’imposition. Enfin, le NPD propose de soustraire de l’impositionles contribuables gagnant moins de 15 000 $,tout en augmentantletaux d’imposition maximal de 29 % à 32,5 % surles revenus excédant 250 000 $.

(5)

De prime abord, la proposition des Conservateurs et celle du Bloc de concentrer les réductions fiscales aux contribuables dela classe moyenne peuvent difficilement être critiquées. C’est bien connu,la classe moyenne canadienne est plus durement frappée parl’impôtsurlerevenu. Danscecontexte,ilest normal quelescontribuablesen faisant partie soientles premiers bénéficiaires d’éventuelles réductions fiscales.

En ce qui concernela proposition du NPD visant à releverle seuil d’assujettissement àl’impôt,ellesembleaussiappropriée,et ce mêmesile poids del’impôtsurle revenu des contribuables à faibles revenus est peu élevé. En effet, une comparaison du régime fiscal canadien avec celui des États-Unis montre que 50 % de l’ensemble descontribuables,ceuxayantlesrevenusles plusfaibles, ne paient, danschaque régime, que 4 % dutotal del’impôt. Malgrétout,l’imposition du revenu débute plus rapidementau Canada que danslesautres pays du G7, oùl’imposition débuteen moyenne à 33 % du salaire moyen d’un ouvrier alors qu’ici, avec un crédit personnel de base d’environ 8 000 $, ce ratio n’est que de 19 %. Pour atteindre la moyenne du G7,ilfaudrait queleseuil d’assujettissement passeà un peu plus de 12 500 $. Le NPDa doncraison de vouloir hausserleseuil d’assujettissement, maisle niveau proposé(15 000 $)estsans doutetropélevé. L’autre promesse du NPDen matière d’impôt surlerevenu, celle visant à accroîtreletaux maximum d’imposition à 32,5 %, serait difficile à mettre en œuvre, sauf dans un contexte de « remodulation » du barème d’imposition. Une avenue possible serait la modification du barème d’imposition (certainstaux àla baisse et d’autres àla hausse) enlimitantla portée des baisses d’impôt aux contribuables dela classe moyenne.

Barème

fédéral actuel ConservateurBarème BarèmeNPD Tranche de revenus Taux Taux Taux

0 à 8 012 $ 0 % 0 % 0 % 8 012 à 15 000 $ 16 % 16 % 0 % 15 000 à 35 000 $ 16 % 16 % 16 % 35 000 à 70 000 $ 22 % 16 % 22 % 70 000 à 113 804 $ 26 % 26 % 26 % 113 804 $ à 250 000 $ 29 % 29 % 29 % 250 000 $ et plus 29 % 29 % 32 %

(6)

Des réductions d’impôt ciblées à la famille

Aulieu de procéder à des baisses générales d’imposition, ou complémentaires à celles-ci, certains préfèrentréaliser des baisses d’impôt ciblées auxfamilles. Au Québec, c’estle choix quele ministre Séguin afait danssonrécent budget. La reconnaissance de la situation familiale au sein du système d’imposition existe lorsquelefardeaufiscal d’un contribuableestréduit pour prendreencompteles personnes qu’il a à sa charge. À cet égard, il y a une certaine convergence entre les différents programmes électoraux. Tant le Bloc Québécois que le Parti conservateur etle NPD proposent uneréduction d’impôt en bonifiantla priseencompte dela situation familiale. Le Parti conservateur promet d’introduire une nouvelle déduction fiscale pourenfants. Le Bloc Québécois proposel’instauration d’uncrédit d’impôt remboursable pour enfants. De son côté,leNPD souhaite bonifierla prestation fiscale pour enfants. Mis à partla promesse de doubler la valeur du créditrelatif àla prise en compte des dépenses des aidants naturels, dontle coût reste marginal,les Libéraux ne proposent aucune mesure fiscaleliée àla prise en compte dela situation familiale. Bien que le gouvernement fédéral accorde à certaines familles à revenus modestes et moyens la prestation fiscale canadienne pour enfants, il faut toutefois noter que cette mesure d’aide à la famille n’est pas universelle. Aussi, l’absence de mesures fiscales danslesystème d’impositionfédéral(crédit d’impôt, déductionfiscale,etc.)faiten sorte quecertainesfamillesavecenfants paient unechargefiscaleidentiqueàcelle d’un couple sans enfant ayant un revenu équivalent. Or, ils n’ont évidemment pas la même capacité contributive. Ce constat soulève une lacune de l’impôt sur le revenu fédéral en vigueur. À cetitre, bien que généreuse,la proposition du NPD ne possède pas de minimum garanti et elle ne corrige donc pasla situation. Par contre,l’adoption dela déduction du Parti conservateur ou du crédit d’impôt du Bloc Québécois garantirait que deux familles n’ayant pasla même capacité contributive ne paient pas le mêmeimpôt. On ne peut quesaluerces correctifs. Sansentrer danslatechnique fiscale, notre préférence va au crédit d’impôt remboursable pour trois raisons. Premièrement,lefait quelecrédit d’impôtsoitremboursableassure que mêmeles contribuables nonimposables peuventen bénéficier,ce quis’apparente,enterme d’effet, àla majoration dela prestation fiscale pour enfants,tout en s’assurant qu’une partie des chargesinhérentes aux enfants est prise en comptelors dela production de la déclaration fiscale. Deuxièmement,l’économie d’impôtliée aux crédits d’impôt est uniforme sans égard au revenu du contribuable alors que l’économie d’impôt rattachée à une déduction fiscale augmente en fonction du revenu imposable. Troisièmement, depuis la réforme fiscale des Conservateurs de 1988, les déductions fiscales personnelles onttoutes été converties en crédits d’impôt.

(7)

Économie d’impôt pour une famille québécoise ayant deux enfants à charge Salaire CrédQuébécoit d’impôis de 3t du 730 Bloc $ Déducconservationteurfisca dele du 2 000 Par $ti

15 000 $ 997 $ 0 $

35 000 $ 997 $ 534 $

75 000 $ 997 $ 868 $

125 000 $ 997 $ 969 $

Favoriser l’épargne-retraite

Les programmes électoraux des Conservateurs et des Libéraux sontles seuls à aborderla question del’épargne-retraite. Du côté des Libéraux,la promesse n’est pas trèsétayée,elleselimiteà dire qu’ils développeront desfaçons plusefficaces de favoriser une plus grande épargne parl’entremise du système d’imposition. Les Conservateurs, quant à eux, font une proposition précise. Ils promettent d’instaurer un régime d’épargne complémentaire au REÉR: le régime enregistré d’épargne viagère (REEV). Contrairementau REÉR, danscerégime,lescotisations neseraient pas déductiblesetleséventuelsretraits neseraient plusimposables. Le REEVsemble moins généreux au moment des contributions puisqu’il n’affecte pas l’impôt à payer du cotisant, par contre, au moment du retrait, nile capital cotisé, ni son rendement ne sont imposables. Ainsi, il en ressort que les rendementsdu REEV ne seraient jamais imposés. Il faut noter que des régimes similaires existent aux États-Unis et au Royaume-Uni. D’ailleurs, dans son dernier budget (2004), le fédéral a déjà annoncé qu’il poursuivait ses consultations sur la pertinence de mettre en place un tel régime. Selonles Conservateurs, cerégimeserait conçu pourles contribuables àrevenus faibles et moyens puisqueles sommes reçues du REEV n’affectent plus àla baisseles autres prestations fédérales telles les pensions de sécurité de la vieillesse. Toutefois, pourles contribuables àrevenus modestes et moyens,leremboursement d’impôt découlant des contributions au REER constitue l’un des attraits déterminant de l’épargne REÉR. De plus,lesstatistiques fiscales montrent quecescontribuables n’ont pas unecapacité d’épargnesuffisante pour pleinementcontribuerau REÉR, cela demeura vrai avec le REEV. Il y a donc fort à parier que ce sont les contribuables à revenus élevés qui bénéficieront davantage de la mise en place d’un REEV,cela n’est pas nécessairement mauvaisensoi, maisil nefaut pas prétendre qu’il servira aux contribuables à faibles revenus.

(8)

Accroître la taxation de la richesse

Le NPDestleseul partià vouloirtaxer davantagelarichesse parla miseen place d’un impôt sur les héritages et par l’inclusion complète des gains en capital dans les revenus des contribuables. Ces propositions sont éminemment politiques. Essentiellement, il s’agit de donner un signal visant à accroître l’apparence d’équité du système d’imposition.

À première vue, on ne peut qu’être surpris parla stratégie du NPD de vouloir hausser lafiscalité en période de surplus budgétaire. Or, précisons que ces propositions s’inspirent, en partie du moins, du système d’imposition américain. Le principal mérite des propositions du NPDsur unetaxationaccrue delarichesse netient pas tant àleur éventuellefaisabilité d’application à moyen oulongterme, mais àla réflexion qu’ellessuscitententerme d’utilisation diversifiée des outilsfiscaux dont disposele gouvernement.

Premièrement, il propose, à l’instar de l’impôt américain, de réintroduire au Canada un impôt sur les héritages. Ce nouvel impôt s’appliquerait uniquement sur les héritages dontla valeurexcède un million $.Ilfaut noter qu’en 1972,les Libéraux ont procédéà une vasteréformefiscaleet que depuislesystèmefiscalcanadien n’impose plus les héritages. Cependant, le système fiscal canadien impose les gains en capital courus au moment du décès d’un particulier. De son côté,le système fiscal américain n’a pas de dispositions semblables. À la place, un impôt s’applique sur la valeur delasuccession. Quoi qu’ilensoit, parmiles pays membres del’OCDE,le Canada fait figure d’exception, puisque 26 des 30 pays membres imposent les héritages. Toutefois,la part, dansletotal des recettes fiscales,liée auximpôts surles transferts de fortune représente moins de 1,5 % dans chacun de ces pays. De l’aveu même du NPD,cetimpôtrapporterait moins que 2 % dutotal desrecettesfiscales canadiennes. Malgréla faiblesse des recettes fiscales générées, cetype detaxation est toujours controversé. D’un côté, il y a ses défenseurs qui soulèvent qu’un impôt sur lestransferts defortuneluttecontrela mauvaiserépartition delarichesse dansla société, et de l’autre, il y a ses détracteurs qui évoquent que cette forme de taxation estinjuste, compliquée,inefficace et comporte des coûts de conformité élevés.

Si une telle proposition devait être retenue, les réticences seraient nombreuses. Dans le contexte de surplus budgétaire qui prévaut actuellement, nous pouvons douter dela faisabilité politique desa miseen place. Laseulechance deréussiteserait dans un contexte oùles nouvellesrecettes générées iraient entièrement àlaréduction de l’impôt sur le revenu. Ainsi, l’argumentaire pour créer ce nouvel impôt ne serait pas

(9)

l’augmentation desrecettesfiscales, mais plutôtlaréduction dela dépendance par rapport à l’impôt sur le revenu, puisque plus de la moitié de l’ensemble des recettes fiscalesfédérales provient deceseul impôt. Qu’onsoit pour oucontrece nouvel impôt, une analyse plus approfondie surles effets de son application,tant enterme de coût de gestion que de coût de conformité, doit être réalisée avant d’aller de l’avant. Ce n’est qu’après que nous pourrons nous prononcer surla pertinence d’implanter un impôt sur les héritages. D’ici là, nous devons rester prudents avant l’instauration de toute nouvelleforme d’impositionet nous demandersilejeuen vaut vraimentla chandelle.

Comme deuxième façon d’accroîtrelataxation dela richesse,le NPD propose d’éliminerletraitement préférentielrattachéaux gainsencapitalafin qu’ilssoient pleinement inclus dans les revenus d’un contribuable comme le sont les salaires, les intérêts oules profits d’entreprises. En 2000, Paul Martin,alors qu’ilétait ministre des Finances,aréduità 50 %la portion d’un gainencapital devantêtreinclusau revenu. La pleineinclusion proposée des gainsencapital découle dufait qu’ilest reconnu queleurconcentration estliéeàlarichesse ducontribuable quileréalise. Encore unefois,ils’agit d’un débatfiscal controversé. Selon quel’onsoit pour ou contre,lesargumentstournentessentiellementautour, d’une part, del’effet positif que cela auraitsurl’investissement et, d’autre part, del’effet disproportionné en terme de baisse d’impôt pourlescontribuablesles mieux nantis. Quoi qu'ilensoit, une comparaison internationale montre que le traitement fiscal du gain en capital est loin d’être uniforme. Alors que nos partenaires économiques,telsl’Australie,les États-Unis etle Royaume-Uni,traitent normalementle gain en capital des sociétés et offrent untraitement différencié du gainen capital desindividusselonla durée de détention, le Canada maintient toujours un traitement préférentiel aux gains en capital, sans égard au statut du contribuable, ni àla durée de détention. Parmiles pays comparés, le traitement différencié selon la durée de détention distingue les gains en capitalréalisés parlesindividusàcourtterme, quieux, sont pleinementinclusaux revenus alors qu’ilsfontl’objet d’untraitement préférentielseulementlors d’une disposition àlongterme.

Ilestimprobable quel’intégrationcomplète des gainsencapital danslesrevenus, comme il a été proposé par le NPD, se concrétise. Cela ne signifie pas que les gains en capital purement spéculatifs, réalisés àl’intérieur d’une périodeinférieure à 12 ou 24 mois, méritent un traitement fiscal préférentiel. À ce titre, le prochain gouvernement devrait se pencher sur la faisabilité d’établir un traitement fiscal différencié des gainsencapital basésur la durée de détentiontel quecelaexiste ailleurs.

(10)

Résoudre le déséquilibre fiscal

L’analyse des programmes électoraux ne peut faire fi du déséquilibre fiscal. Pour la Commission sur le déséquilibre fiscal sa définition était liée à la fois à l’importance del’écartentrelesrevenusautonomeset les dépenses des provinces,l’insuffisance destransfertsfédéraux pourcomblercetécartetauxcaractéristiques même deces transferts fédéraux. Une partie du déséquilibre fiscal aurait donc pris naissance dans les difficultés delimiterla croissance de certaines dépenses dejuridiction provinciale, plus particulièrementlescoûts desanté, pendant quelestransfertsfédéraux,eux, subissaient des compressions ou augmentaient à unrythmeinférieur aux charges qu’ils sont censés combler.

Pour corrigerle déséquilibre fiscal,le Bloc Québécois reprendle consensus autour de la question et propose l’application de la principale recommandation de la Commission surle déséquilibre fiscal, à savoir: quele gouvernement fédéral cède au gouvernement du Québeclesrecettes dela TPS, enlieu et place destransferts fédéraux autitre dela santé et des programmes sociaux. Les Conservateurs etle NPD reconnaissent, eux aussi,le déséquilibrefiscal et proposent principalement dele résoudre par une majoration du financement fédéral dela santé.

Les Libéraux fédéraux n’ont jamais reconnu le déséquilibre fiscal. Le déni a atteint son point culminant dans unelettre envoyée au président del’Assemblée nationale en mai dernier, où Paul Martin soulignait que « Les provinces canadiennesjouissent des pouvoirs(…) prévus parla Constitution pourfaireleurs propreschoixconcernant les impôts, les dépenses et la dette. Les provinces disposent de la marge de manoeuvre voulue pourfaire en sorte queleurs recettes correspondent àleurs responsabilités en matière de dépenses ». Dit autrement, cela implique que les provinces n’ont qu’àaugmenterleurimpôt pourfinancerles dépensesauxquelles elles font face.

Moins d’un mois plustard, nous voilà en pleine campagne électorale, devantla réaction d’intervenants québécois,la positionlibérale s’est quelque peu adoucie. Certes,le parti de Paul Martin nereconnaît pasle déséquilibrefiscal, maisil a récemmentsouligné qu’il est prêt à discuter avecles provinces pourles aider à trouver «des solutions aux pressions financières réelles » qu’elles subissent. Cependant, leur plate-forme électorale ne fait pas référence au déséquilibre fiscal, ni aux pressions financières réelles des provinces. Pourtant, certaines de leurs

(11)

propositions participentàréduirel’ampleur du déséquilibrefiscal. Àl’égard dela santé, ce n’est pastantl’augmentation dutransfert de 3 milliards $ sur deux ans qui a une portéesignificative quel’engagement de développer uneformule d’indexation des transferts. Sans l’ombre d’un doute, les grandes fluctuations annuelles des paiements detransfert complexifientla prévisibilité de revenus des provinces, et à ce titre, l’absence de financement stable qu’elles occasionnent constitue clairement une source de déséquilibrefiscal. Ilfaut donc accroîtrela prévisibilité destransferts fédéraux, la mise en place d’une formule d’indexation ne peut que constituer la base de cette stabilisation destransferts.

Qu’onreconnaisse ou nonle déséquilibrefiscal,il ya unanimitésur un point:le partage d’une partie des recettes découlant de lataxe fédérale surl’essence. En effet, les quatre partis politiques fédéraux en proposent sa répartition partielle pour aider au financement d’activités ou d’infrastructures municipales. Nous pouvonsconsidérer cette proposition comme une piste de solution au déséquilibre fiscal puisqu’elle partage une ressource fiscale fédérale avecles provinces oules municipalités.

Réduire l’application de la TPS

La détaxation de certains produits et services à la TPS et à la TVQ est une nouvelle tendance qui semble prendre de l’ampleur en matière de taxation de la consommation. Dansle dernier budgetfédéral,le ministre des Financesaannoncé que dorénavantles villes ont droitau pleinremboursement dela TPS qu’elles ont payé dans le cadre de leurs activités. Yves Séguin, de son côté, a annoncé dans son plus récent budget la détaxation des couches pour enfants et des articles d’allaitement. A priori,il est difficile de s’opposer à cesinitiatives.

Cette nouvelle propension des gouvernements àréduirelechamp d’application des taxes àla consommation a été entendue parles partis politiques qui y ont vu l’opportunité deréclamer desréductionsspécifiques de TPS. Outrelatraditionnelle demande d’abolirla TPSsurleslivres, le Bloc Québécois propose quelefédéral étendesonrécentremboursementintégral dela TPSaux municipalitésàtousles établissements publics d’enseignementet desanté. De plus,le Bloc propose quele fédéral harmonise sa TPS à la TVQ quant à la détaxation récente des couches pour enfantset des produits pour nouveaux-nés. Desoncôté,le NPD veut supprimerla TPSsurles produits de base pourlesfamilles, notammentles vêtements. Àcela s’ajoutela promesse du NPD d’offrir de généreuxremboursements de TPS aux acheteurs de voitures « vertes », basés surle rendement énergétique. Deleur côté,les

(12)

Conservateurss’engagent à éliminerl’application dela TPSsurlataxe d’accise fédérale sur l’essence, qu’ils considèrent comme « une taxe sur la taxe ». Ils proposentaussi quela portion du prix del’essenceexcédant 85cents nesoit pas assujetti àla TPS.

Lesignal donné parles décisionsrécentes des ministres des Finances d’enlever du champ d’application dela TPS et dela TVQ certaines activités, produits ou services, commele montrentlesrécentes promesses des partis politiques,risque d’ouvrirla porteà unesérie dereprésentations. Cela nesignifie pas queces propositions ne soient paslégitimes, mais àtermeleur propagation aura des effets surla neutralité de la TPS.Ilfaut doncagiravec modération. Le « succès » dela TPSreposesursa relative neutralité.

À l’origine, au lieu de mettre en place des exonérations spécifiques de TPS sur des activités, produits ou services, un crédit pour TPS a été instauré.Il permet aux contribuables à faibles ou moyens revenus d’obtenir une prestation gouvernementale en espèces pour compenserla TPS qu’ils paient surleurs achatstaxables. Pourle bon fonctionnement dela TPS,il semble plus approprié de majorerle crédit que de réduirele champ d’application dela TPS. Mêmesi commeles autres partis,les promesses conservatrices réduisent le champ d’application de la TPS, les Conservateurs sont les seuls à annoncer leur intention de majorer de 25 % la valeur du crédit pour TPS.

Revoir l’assurance-emploi

Le Bloc Québécois et le NPD demandent la création d’une caisse autonome d’assurance-emploi à l’extérieur du fonds consolidé du Gouvernement. Nous comprenons que ces deux partis souhaitent que s’arrête l’accumulation de surplus de cotisations qui actuellement se fondent dansles recettes globales du gouvernement. À cejour,lesurplusaccumulé àla caisse del’assurance-emploireprésente environ 45 milliards $. Le Bloc va plusloin et propose un plan de remboursement dela caisse sur dix ans. Deleur côté,les Conservateurs promettent d’éliminerle surplus actuariel de la caisse d’assurance-emploi par une diminution du taux de cotisation. Les Libéraux, quant à eux, ont choisi de demeurer silencieux surle sujet.

(13)

Augmenter l’impôt des sociétés

Seul le NPD propose d’augmenter l’impôt des sociétés, en rétablissant le taux d’imposition à 24 % plutôt que de conserverletaux de 21 % actuellement en vigueur. Àl’inverse,les Conservateurs proposent deréduirel’imposition del’ensemble des entreprises, à partir des économies réalisées par la réduction des subventions gouvernementales dont elles bénéficient. De leur côté, le Bloc et les Libéraux demeurent silencieux sur le sujet. Cette convergence entre les Libéraux et les Bloquistes doit-elle êtreinterprétée comme un signal quel’imposition des entreprises est adaptée et qu’elle ne mérite pas de modifications majeures ?

Lutter contre les pratiques fiscales abusives

L’occasion était trop belle pour le Bloc et le NPD pour critiquer l’approche de Paul Martin dans la gestion des conventions fiscales. Leurs propositions portent essentiellement surl’élimination des conventions fiscales avec des pays possédantles caractéristiques d’un paradis fiscal et sur la lutte aux stratagèmes fiscaux permettant le rapatriement des bénéfices libre d’impôt. Les Conservateurs et les Libéraux n’abordent pasla question.

Conclusion

Le contraste apparent entre les programmes électoraux met en exerguele rôle queles partis politiques accordent à l’interventionnisme fiscal ainsi que la place qu’ils entendentlui fairejouer au cours des quatre prochaines années. Du côté des Libéraux, leur programme en matière defiscalitéreprésente davantage un bilan des années passées qu’un plan pourles années à venir. Nous en concluons que pour euxla fiscalité actuelle est adéquate et que celle-ci n’occuperait pas une placeimportante au cours d’un prochain mandat. À bien deségards,la vision durôle delafiscalité du NPD et des Conservateurs est diamétralement opposée. Les Conservateurs proposent de réduire les impôts simultanément à une réduction des subventions gouvernementales. Du côté du NPD, il souhaite accroître l’imposition de la richesse par de nouvelles formes d’imposition, des modifications detaux et désire modifierle comportement des contribuables en matière environnementale par de nouvelles mesuresfiscalesincitatives. Desoncôté, le Bloca plutôt privilégié uneapproche

(14)

thématique (famille, déséquilibre fiscal etlutte aux paradis fiscaux). Enfin, est-il utile de préciser que rien dans les propositions des partis politiques ne vise à simplifier le système fiscal.

Lescommentairesetcritiquescontenus dansle présentexposé ne doivent pasêtre interprétéscomme unrejet des programmesfiscaux des partis politiques.Ils’agit plutôt àtravers une approche non partisane de faire ressortirlesinitiatives fiscales qui méritent d’êtreretenuesetcelles qui peuventêtrerejetées,à moins qu’unexamen plus approfondi n’en démontrela pertinence.

À partir des promesses retenues de chacun des partis politiques, pouvons-nous bâtir un programme fiscalintéressant et cohérent ?

Qu’en est-il finalement des baisses d’impôt ?

Lorsqu’on prend en compteles baisses d’impôt des cinq dernières années, nous devons nous questionner sur l’à-propos de réduire encore les impôts. Certes, l’urgence de réduire les impôts a manifestement diminué, ce qui ne signifie pas pour autant queles partis politiques fassent erreur en voulant réduirela charge fiscale dela classe moyenne. Danscecas, que penser des modifications proposéesau barème d’imposition, est-il préférable de procéder à la baisse d’impôt conservatrice ou sommes-nous mieux de procéder auréajustementfiscal du NPD ? Sommes-nous mieux de procéder à des baisses d’impôt générales ou deréaliser desréductions ciblées aux familles ? Tout demeure une question de dosage.

Sile nouveau gouvernementjugeapproprié de procéder,avec modérationetsans dogme, à de nouvelles baisses d’impôt, autant qu’elles soient bien faites. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, unejuxtaposition adaptée des propositions du Bloc, des Conservateurset du NPD pourrait donner desrésultats intéressants. Nous retenons donc comme combinaisonintéressante:

o La baisse dutaux d’impositionsurlesrevenussesituant danslatranche moyenne etle relèvement des paliers d’imposition (Conservateurs);

o Le relèvement du seuil d’assujettissement à l’impôt et la majoration du taux maximal d’imposition (NPD);

o Le crédit d’impôt remboursable pour enfants (Bloc).

En gardant unimpactfinanciercomparable au planconservateur,lecrédit d’impôt remboursable pourenfants de 3 250 $ pourrait être progressivementinstauré(plutôt que 3 730 $ commele suggèrele Bloc),le seuil d’assujettissement pourrait être progressivement relevé de 8 000 $ à 10 500 $ (plutôt qu’à 15 000 $ comme le

(15)

préconisele NPD),letaux d’imposition surlesrevenusentre 35 000 $et 70 000 $ pourrait êtreréduit de 22 % à 18 %(plutôt qu’à 16 % commele promettentles Conservateurs) alors qu’un nouveau taux d’imposition sur le revenu excédant 250 000 $ pourraitêtreintroduità 30 %(plutôt qu’à 32,5 %commelesouhaitele NPD). Ainsi,tousles contribuables bénéficieraient d’uneréduction dela charge fiscale associée à l’impôt sur le revenu, mais avec une concentration sur les familles dela classe moyenne.

Qu’en est-il finalement du déséquilibre fiscal ?

Les propositions de tous les partis politiques participent à sa résorption. Nous retenonsla proposition du Bloc quireprendla principalerecommandation dela Commission sur le déséquilibre fiscal. Même si les Libéraux ne veulent pas reconnaîtrele déséquilibre fiscal,leur proposition mettant en place une formule d’indexation pourlestransferts en santé doit également être retenue puisqu’elle aurait le mérite d’assurer unfinancement plus stableaux provinces. Enfin,leconsensus entretousles partis politiques surla remise parle gouvernement fédéral d’une partie desataxesurl’essenceconstitueégalement unesolution partielleau déséquilibre fiscal, puisqu’elle partage une ressource fiscale fédérale.

Références

Documents relatifs

Dans le principe du brut, avec la consommation propre, la rentabilité est légèrement réduite par l’imposition sur la vente d’électricité, mais elle est tout de même

la loi du 10 février 2004 modifiant la loi d’application du code civil suisse pour le canton de Fribourg (obligation d’entretien) la loi du 12 février 2004 modifiant la

Mais le principal moteur de la baisse du chômage réside dans la progression de l’emploi à temps partiel : ce dernier concerne actuellement près de 30 % des salariés allemands,

Diriez-vous... Dans l'ensemble, quelle est votre évaluation de la performance de Gilles Duceppe? Diriez-vous : ...excellente ... Dans l'ensemble, quelle est votre évaluation de

Considérant qu’il était opportun de prendre les dispositions afin de permettre aux travailleurs occupés dans le secteur des entreprises de travail adapté de voter valablement et

relance économique (PCRE) : Le gouvernement fédéral a annoncé 500 dollars par semaine pendant un maximum de 26 semaines aux travailleurs autonomes ou à ceux qui ne sont

Dans leur document d’information: La COVID-19, la petite enfance et la santé mentale : favoriser le changement systémique et la résilience, la Commission de la santé mentale du

Après les élections fédérales du 10 juin 2007 et les réunions d’évaluation nécessaires avec les bureaux électoraux principaux et le SPF Affaires étrangères, tous les