• Aucun résultat trouvé

Le culte des citoyens bienfaiteurs dans les cités grecques d'Asie Mineure au 1er siècle a. C : fondements cultuels et sociopolitiques

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "Le culte des citoyens bienfaiteurs dans les cités grecques d'Asie Mineure au 1er siècle a. C : fondements cultuels et sociopolitiques"

Copied!
159
0
0

Texte intégral

(1)

Le culte des citoyens bienfaiteurs dans les cités

grecques d’Asie Mineure au I

er

siècle a.C.

Fondements cultuels et sociopolitiques

Mémoire

Isabelle-Sandra Fraser

Maîtrise en Études anciennes

Maître ès arts (M.A.)

Québec, Canada

(2)

               

Le culte des citoyens bienfaiteurs dans les cités

grecques d’Asie Mineure au I

er

siècle a.C.

Fondements cultuels et sociopolitiques

Mémoire

Isabelle-Sandra Fraser

Sous la direction de :

Patrick Baker

(3)

  iii   Résumé  

Le mémoire propose l’étude du culte civique des citoyens bienfaiteurs, dont l’apogée se situe au Ier siècle a.C., particulièrement en Asie Mineure, et d’en établir les fondements

cultuels et sociopolitiques. Il ressort de l’étude que l’émergence de cette pratique a été rendue possible grâce à des éléments déjà établis par la longue tradition religieuse grecque. Le culte incorporait des éléments du culte des héros fondateurs (hérôon, titre de ktistès, sépulture privilégiée), du culte des dieux (temple, autel, sacrifices, prêtrise), et du culte des souverains (jour sacré, association à un dieu, isothéoi timai). Du point de vue politique, le déclin des royaumes hellénistiques a permis la montée d’une élite locale, qui reprenait alors les charges de l’euergésia royale. Dans les tourmentes du Ier siècle — guerres mithridatiques, invasion parthe sous Labiénus, guerre civile romaine —, ce groupe de citoyens apparut graduellement comme un outil essentiel de négociation avec le nouveau pouvoir de Rome. En devenant amici des imperatores, parfois même citoyens romains et grands-prêtres du culte impérial, les grands évergètes obtenaient des bienfaits extraordinaires pour leur patrie, comme l’obtention de la liberté. C’est en leur qualité d’euergétai, pour les bienfaits octroyés, que les membres de cette élite étaient honorés d’un culte par leur cité. C’est également en raison de leur euergésia héréditaire qu’ils avaient le pouvoir d’intercéder auprès des Romains et d’obtenir d’eux des privilèges exceptionnels au bénéfice des cités. Dans le contexte de l’Asie au Ier siècle, encore plus critique qu’en Grèce, le besoin des cités envers les actes d’évergétisme devenait de plus en plus grand. Par conséquent, la reconnaissance envers cette euergésia y était plus marquée. À des bienfaits hors du commun devaient correspondre des honneurs tout aussi grands, et c’est ainsi qu’au culte des souverains succéda le culte des citoyens évergètes.

(4)

TABLE DES MATIÈRES

Résumé...iii

Table des matières ...iv

Remerciements...vii

Introduction ... 1

Contexte, corpus et visée ... 1

État de la question... 7

a) Évergétisme et culte des évergètes ... 7

b) La question de la religiosité ... 9

Intérêt du sujet et méthodologie ... 13

Chapitre I : Présentation du corpus ... 15

1Α : Extrait d’un décret honorifique de retour d’ambassade : prescriptions pour le culte de Diodôros Pasparos de Pergame (85-73 a.C.) ... 15

1Β : Extrait d’un décret pour la gymnasiarchie de Diodôros Pasparos : honneurs pour Héroïdès de Pergame (première moitié du Ier siècle, après 69 a.C.)... 16

1C : Extrait d’un décret relatif à la gymnasiarchie de Diodôros et aux Nikephoria : sacrifices auprès de son agalma (première moitié du Ier siècle, après 69 a.C.) ... 17

1D : Extrait du décret de sortie de gymnasiarchie de Diodôros Pasparos : sacrifices à l’agalma de Diodôros, auprès de l’agalma de Philétairos (première moitié du Ier siècle, après 69 a.C.)... 18

1E : Extraits d’un décret concernant la gymnasiarchie de Diodôros Pasparos : prescriptions cultuelles (première moitié du Ier siècle, après 69 a.C.)... 19

2 : Honneurs pour Iollas de Sardes (entre 50 a.C. et 25 a.C.) ... 27

3A : Caelestes honores pour Théophane de Mytilène : Tacite, Annales, VI, 18 ... 30

3B : Dédicace triple en l’honneur de Pompée, Théophane et Potamôn (milieu du Ier siècle a.C.-début du Ier siècle p.C.)... 31

3C : Monnaies portant l’effigie de Théophane (règne de Tibère) ... 32

4 : Honneurs cultuels pour Potamôn de Mytilène (fin du Ier siècle a.C.-début du Ier siècle p.C.) ... 35

5 : Honneurs cultuels pour Artémidôros de Knide (sous Auguste)... 38

6 : Honneurs à Cyzique pour Asklépiadès, Oiniadès et Démétrios (entre 15 a.C. et 15 p.C.)... 44

7A : Dédicace pour le Milésien Gaios Ioulios Apollônios II (fin du Ier siècle a.C.) ... 48

7B : Dédicace pour le Milésien Gaios Ioulios Épikratès II (fin du Ier siècle a.C.) ... 49

8 : Honneurs cultuels pour Euthydème et Hybréas de Mylasa (fin du Ier siècle a.C.)... 54

9 : Honneurs cultuels pour Athénodôros de Tarse (Pseudo-Lucien, Makrobioi, 21)... 60

10 : Honneurs cultuels pour Xénon de Thyatire (sous Auguste, peut-être 5 a.C.) ... 62

11 : Honneurs cultuels pour Mènogénès de Sardes (fin du Ier siècle a.C.-début du Ier siècle p.C.) ... 65

Conclusion ... 66

Chapitre II : Fondements cultuels ... 68

Remarques préliminaires : les isothéoi timai... 68

I. Contexte cultuel d’émergence... 74

a) Le culte des héros ... 74

b) Le culte des souverains ... 78

(5)

  v  

a) Origines et premières formes... 85

b) Forme concrète du culte ... 90

Conclusion ... 106

Chapitre III : Contexte sociopolitique d’émergence ... 111

I. De l’évergétisme des rois à celui des grands citoyens bienfaiteurs ... 111

a) Les prémices : déclin des royaumes et montée en puissance de Rome... 111

b) L’émergence d’une élite locale ... 114

II. L’enjeu d’être ami avec Rome... 118

a) Des amis des rois aux amis des Romains ... 118

b) Les privilèges de l’amitié avec Rome ... 121

c) L’exercice de la prêtrise du culte impérial ... 124

Conclusion ... 126

Conclusion générale... 129

(6)

«  Zeus est mort » La mort de Paul Desmarais n’est pas seulement celle d’un homme riche, d’un milliardaire comme les autres. Il régnait sur un empire financier tentaculaire, mais c’est son influence politique, d’une portée considérable, qui l’avait placé dans la mythologie canadienne. C’était l’homme le plus puissant du Québec. L’un des plus influents au Canada.

Michel Hébert Journal de Québec

(7)

  vii  

REMERCIEMENTS  

Je tiens tout d’abord à remercier mon directeur de recherche, M. Patrick Baker, qui fut le premier à me donner le goût de l’épigraphie grâce à son enthousiasme contagieux. Ses conseils et sa rigueur méthodologique furent de précieux outils tout au long de mon cheminement. Je lui suis particulièrement reconnaissante pour son soutien et pour la grande confiance qu’il a témoignée à mon égard. Il m’a semblé qu’il avait souvent plus foi en moi, que moi-même. Merci de m’avoir encouragée, pour les diverses opportunités que vous m’avez offertes, pour votre humour qui m’a souvent permis de faire redescendre la pression, et pour bien plus encore. Εὐχαριστῶ περὶ πάντων !

Ma gratitude va également à M. Alban Baudou qui, par ses remarques éclairées, a su m’accompagner lors de l’étape cruciale de l’élaboration du projet de mémoire. Ma reconnaissance va aussi à M. Gaétan Thériault de l’UQÀM, qui a accepté d’être mon prélecteur et membre du jury. Son point de vue enrichissant sur le sujet et ses conseils quant à l’établissement du corpus et à la religiosité furent plus que bienvenus. Merci à M. Léopold Migeotte, membre du jury, avec qui j’ai eu le privilège de collaborer et qui m’a inculqué de nombreuses notions d’édition. Merci également à Mme. Anne-France Morand, pour ses suggestions quant à l’approche de la religion grecque.

Je souhaite aussi remercier le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada et la Faculté des lettres et des sciences humaines de l’Université Laval, grâce auxquels j’ai pu bénéficier d’un soutien financier afin de me concentrer sur ma recherche, de même que les professeurs qui m’ont appuyé dans le processus des demandes de bourses.

Enfin, un grand merci du plus profond de mon cœur à ma famille et mes amis qui, même s’ils ne comprenaient pas toujours ce que je faisais, ont su m’encourager et être présents dans les moments les plus difficiles. Un dernier clin d’œil tout spécial à mes collègues de bureau avec qui il faisait bon se défouler en groupe lorsque les nerfs nous lâchaient.

(8)

INTRODUCTION Contexte, corpus et visée

Dans l’un de ses comptes rendus de cours (1948-1949), L. Robert écrivait qu’ils avaient fait revivre, ses étudiants et lui, une destinée typique des IIe et Ier siècles a.C. : « le grand bienfaiteur, souvent rhéteur ou littérateur, qui s’entremet auprès des autorités romaines (Sénat, Pompée, César, Auguste) pour obtenir la liberté de sa patrie, qui reçoit de Rome le droit de cité et qui est honoré dans sa patrie, comme un "nouveau fondateur", avec un culte et avec une sépulture dans l’intérieur de la ville, à l’agora ou au gymnase ». Le savant posait ainsi les éléments essentiels à l’étude du culte du citoyen bienfaiteur dans les cités grecques 1.

L’émergence de ce phénomène, dont l’apogée est à situer au Ier siècle a.C.,

particulièrement en Asie Mineure, fut rendue possible par la conjoncture de plusieurs facteurs et évènements de la fin du IIe siècle et du Ier siècle. Au IIe siècle, les Séleucides contrôlaient presque tout le territoire d’Asie occidentale, jusqu’à ce que Rome entre en jeu. Celle-ci vainquit tout d’abord les Antigonides, en 197 a.C., puis vint la campagne contre Antiochos III. En 191 a.C., Rhodes se déclara contre celui-ci pour appuyer Rome, qui avait prévenu le roi de ne pas intervenir en Europe, sous peine de s’opposer à lui pour la liberté des Grecs. Malgré cet avertissement, Antiochos débarqua en Grèce et la guerre éclata. Elle se conclut, en 188 a.C, par le traité d’Apamée, imposant au Séleucide de se retirer hors de l’Asie Mineure, au-delà du Taurus 2. Au lendemain de la Paix d’Apamée s’ouvrit une période, de 188 à 133, qu’A. Bresson nomme le « siècle d’or » et qu’il qualifie de « particulièrement faste »3. Selon J.-L. Ferrary, le IIe siècle fut témoin d’une importante transformation qu’il explique en ces mots : « au polycentrisme de l’époque des grandes                                                                                                                

1 L. Robert, Hellenica VIII, p. 96.

2 Pour la succession des évènements majeurs, voir J.-L. Ferrary, « Rome et les cités grecques », p. 93-106.

Pour les conséquences du traité d’Apamée, voir S. M. Burstein, AJAH, 5, 1980, p. 1-12. Pour une étude comparant les troubles du IIIe siècle au « siècle d’or », voir A. Bresson, « La conjoncture du IIe siècle a.C. »,

p. 11-16. Voir également, G. Le Rider, « Sur un aspect du comportement monétaire », p. 37-62 à propos de la reprise de la frappe de monnaie lors de cette période, et K. Sion-Jenkins, « La disparition du mercenariat », p. 19-35, sur le disparition du mercenariat en Asie Mineure occidentale au IIe siècle a.C. 3 A. Bresson, « La conjoncture du IIe siècle a.C. », p. 13.

(9)

  2  

monarchies hellénistiques a succédé un système politique nouveau, avec une seule superpuissance, Rome, qui hésite à s’engager militairement, mais dont il est toujours risqué de braver les ordres, parce qu’elle est en mesure, si elle le veut, de les imposer par la force » 4. Après plusieurs conflits dans la seconde moitié du IIe siècle, — guerre contre Persée, révolte des Galates, dépossession des pouvoirs de Rhodes et de Pergame — Rome n’affirmait plus de manière discrète, mais bien nette, son pouvoir. En 133 a.C., lorsqu’Attale III décéda et légua le royaume de Pergame à Rome, celle-ci entra en guerre une dernière fois, contre Aristonikos qui contestait le choix d’Attale III, et la guerre se conclut avec la création de la Province d’Asie 5.

La première organisation de la Province d’Asie est mal connue, on sait toutefois qu’elle mena à une distinction entre cités libres et cités provinciales 6. En 123 a.C., C. Gracchus transforma le système de prélèvement du tribut, réglementé par la lex Sempronia, à la fois des cités libres et sujettes. Ce système permit à Rome de s’enrichir, mais le résultat pour l’économie des provinces s’avéra désastreux en raison des abus fréquents des gouverneurs 7. Ces réformes donnèrent toutefois aux Romains les moyens financiers de lutter contre la piraterie, qui était un réel problème en Méditerranée orientale, de plus, le culte de la déesse Rome fut rapidement ajouté par les cités parmi leurs cultes civiques 8. Il n’en demeure pas moins que les cités n’étaient plus capables de se libérer de leurs dettes, et c’est pourquoi plusieurs d’entre elles accueillirent comme une belle opportunité l’initiative de Mithridate VI Eupatôr de marcher contre Rome, en 88 a.C. En effet, Mithridate rejeta

                                                                                                               

4 J.-L. Ferrary, « Rome et les cités grecques », p. 93. 5 Ibid., p. 94-98.

6 Pour une étude sur la définition des cités libres dans le cadre de la domination romaine, voir J.-L. Ferrary,

« Le statut des cités libres », CRAI, 135, 1991, p. 557-577. Pour l’organisation de la Province d’Asie à la suite de la guerre contre Aristonikos, voir R. M. Kallet-Marx, Hegemony to Empire, p. 109-122.

7 Selon la lex Sempronia, le montant à verser était fixé à Rome tous les cinq ans. Éd. Will, Histoire politique,

p. 462-463; D. Magie, RRAM, p. 164 et 1056. Voir également R. M. Kallet-Marx, Hegemony to Empire, p. 125-153 pour l’administration proconsulaire de l’Asie de 148-89 a.C.

8 Sur la lutte des Romains contre les pirates entre 102 et 88 a.C., voir Cl. Nicolet, Rome et la conquête du monde méditerranéen, p. 780-781. À Mytilène, par exemple, Potamôn joua un rôle important dans l’instauration du culte de la déesse Rome et du culte impérial, voir R. W. Parker, ZPE, 85, 1991, p. 115-129; IG XII, 2, 272. Xénon de Thyatire fut également grand-prêtre de la déesse, infra nº 10, l. 6-7.

(10)

l’ordre de Rome qui lui interdisait de s’attaquer à Ariobarzane et Nicomède IV, à la suite de quoi le conflit éclata.9

L’armée pontique se fit des alliés parmi les pirates, mais surtout parmi les populations des cités d’Asie Mineure sous domination romaine qui voyaient en Mithridate l’occasion de se défaire du joug romain. Cependant, les cités réalisèrent peu à peu qu’elles avaient tout simplement changé de maître; Mithridate installa des tyrans à sa solde et des garnisons en plusieurs endroits sur le territoire. Son règne s’avérait alors pire que celui des Romains. Dans la période d’entre-deux-guerres, Mithridate, menacé par la conquête de la Bithynie du général Fimbria, conclut avec Sylla, en 85 a.C., la paix de Dardanos 10. Les années suivantes furent marquées par les provocations de L. Licinius Murena, qui tenta d’envahir le Pont, et par la conquête de la Cappadoce par Mithridate. En 74 a.C., Nicomède IV de Bithynie mourut, léguant son royaume à Rome : l’événement provoqua la troisième et dernière guerre mithridatique, qui se conclut, après plusieurs interventions romaines de Lucullus et de Pompée, par le suicide de Mithridate en 63 a.C.

Pompée organisa l’Anatolie en trois provinces : l’Asie, la Bithynie-Pont et la Cilicie. Ainsi, pour la première fois, l’Anatolie tout entière était sous la tutelle de Rome 11. La paix semblait rétablie, mais les cités d’Asie Mineure allaient se trouver une fois de plus au centre des conflits romains. Lors de la guerre civile, le territoire se trouva sous la tutelle des

imperatores qui se partageaient le pouvoir, soit Pompée, César, Brutus et Cassius, ainsi

qu’Antoine. Dans ce contexte, les cités grecques comprirent la nécessité d’établir des liens                                                                                                                

9 Les détails de la politique d’expansion de Mithridate et le récit des trois guerres se trouvent chez Éd. Will, Histoire politique, p. 472-498; R. M. Kallet-Marx, Hegemony to Empire, p. 261-304. Voir également l’étude de Fr. de Callataÿ, L’histoire des guerres mithridatiques, p. 281-388, qui propose un récit détaillé fondé sur l’étude du monnayage.

10 D’après le récit de Plutarque, Sylla, 22, 8-10, le roi pontique dut se plier aux conditions suivantes : « [il]

devait renoncer à l’Asie et à la Paphlagonie, restituer la Bithynie à Nicomède et la Cappadoce à Ariobarzane, verser aux Romains deux mille talents et leur livrer soixante-dix vaisseaux cuirassés avec l’équipement approprié; de son côté, Sylla [lui] garantirait ses autres États et lui ferait accorder le titre d’allié des Romains ». Texte établi et traduit par R. Flacelière et É. Chambry, Paris, Les Belles Lettres, 2003, 350 p., en partie doubles.

11 Pour l’organisation pompéienne de l’Asie Mineure, voir Éd. Will, Histoire politique, p. 499-517; D. Magie, RRAM, p. 351-378; R. M. Kallet-Marx, Hegemony to Empire, p. 311-334 et C. Eilers, « A Roman East : Pompey’s settlement », p. 90-102.

(11)

  4  

avec les dirigeants romains, et un système de clientèle entre les riches notables et les

imperatores s’est alors formé. Sous Pompée, l’Anatolie demeura assez stable pendant une

quinzaine d’années, puis après sa défaite et son assassinat, en 48 a.C., elle tomba sous le contrôle de César, qui maintint en place l’essentiel des hommes de Pompée, tout en taxant ceux qui avaient soutenu son adversaire. Il instaura une politique de fondation de colonies, il allégea la dîme d’Asie, octroya la liberté à certaines cités, comme Knide, et abolit le système de perception par les sociétés fermières 12.

Après l’assassinat de César aux Ides de Mars, la guerre recommença en Asie et, en 43 a.C., les assassins de l’imperator, Cassius et Brutus, exigèrent des cités un tribut de dix ans, payable en deux temps 13. Les « Libérateurs » furent impitoyables envers les cités qui leur résistaient en leur imposant des amendes, et certaines cités, comme Xanthos, furent détruites. Même après la mort de Cassius et Brutus lors de la bataille de Philippes en 42 a.C, les cités n’étaient pas sorties d’affaire. Q. Labienus, un général mis en place par les « Libérateurs », alla chercher du soutien chez les Parthes pour marcher contre la Carie 14. Prenant conscience du danger que représentaient les Parthes, plusieurs notables locaux, comme Hybréas de Mylasa, incitèrent leur cité à la résistance. Si certaines cités s’en sortirent, d’autres, comme Mylasa, furent complètement dévastées 15. De 39 à 31 a.C., ce fut au tour d’Antoine d’être le maître de l’Orient. Lors de cette période de paix, il réorganisa le territoire en implantant un système politique de clientèle qui plaçait ses hommes à la tête des gouvernements des différentes cités, mais le financement de ses nombreuses campagnes militaires coûta cher aux cités dont les finances étaient précaires 16.

Ainsi, après une période de prospérité à la fin du IIe siècle, les cités d’Asie Mineure, au Ier siècle, furent successivement ravagées par les publicains romains, les troupes de                                                                                                                

12 Pour la Guerre civile, voir D. Magie, RRAM, p. 405-426; C. Eilers, « A Roman East : Pompey’s

settlement », p. 90-102.

13 Appien, Guerre civile, V, 2 et 5.

14 Dion Cassius, XLVIII, 24-27 et 39-40. Le problème des Parthes est également étudié chez Éd. Will, Histoire Politique, p. 539-543.

15 F. Canali de Rossi, EA, 32, 2000, p. 172 et 178; F. Delrieux et M.-C. Ferriès, REA, 106, 2004, p. 500-504. 16 Pour plus de détails sur l’organisation antonine de l’Orient, voir Éd. Will, Histoire politique, p. 543-553;

(12)

Mithridate et de Fimbria, puis par les différents imperatores lors de la guerre civile qui eut des retombées jusqu’en Asie. Plusieurs cités furent dévastées et leur endettement ne cessait d’augmenter 17. Dans ce contexte de crise, et ne pouvant plus compter sur l’aide des souverains en raison du déclin progressif des royaumes à partir du IIe siècle, les cités devinrent de plus en plus dépendantes à l’égard de leurs riches citoyens pour assumer les grandes dépenses publiques. L’arrivée des Romains avait aussi modifié la dynamique qu’entretenaient les cités avec le pouvoir en place : Rome établit graduellement un réseau de clientèle formé de l’élite civique des cités, qui devenait alors le lien entre leur patrie et Rome. Par leur générosité et leur influence auprès des imperatores, les riches notables amis des Romains obtinrent parfois des privilèges exceptionnels pour leur cité, comme la liberté et l'autonomie, tout en assurant fidélité à Rome. En retour, signe manifeste de reconnaissance envers ces grands citoyens et nouveaux membres de la nobilitas, les cités votaient des honneurs cultuels : au culte des souverains succéda bientôt le culte des évergètes 18.

Tous les bienfaiteurs n’obtinrent pas les mêmes honneurs, mais quelques éléments semblent ressortir. Tout d’abord, la pratique du culte est caractérisée par la diversité. L’identité des bienfaiteurs, quant à elle, apparaît assez constante : tous étaient des notables proches du pouvoir romain. Dans la présente étude, il s’agira alors d’établir les fondements cultuels de ce phénomène, à partir de la longue tradition religieuse qui le précède, mais aussi d’identifier les éléments du contexte sociopolitique local qui ont pu contribuer à son émergence, et ce, lors de son apogée qui est à situer au Ier siècle a.C., particulièrement dans

la région de l’Asie Mineure.

                                                                                                               

17 Plusieurs documents épigraphiques et littéraires témoignent de l’endettement des cités : tribut de dix ans

imposé par Cassius et Brutus , Appien, Guerre civile, V, 2 et 5; mise en gage de bâtiments importants, Guerre de Mithridate, IX, 63; R. K. Sherk, Rome and the Greek East, 95; I. Kyme 17; Strabon; XIII, 3,6. Tentative de reporter le remboursement de la dette, Cicéron, Fam., XIII, 56,1 et 3,1; L. Migeotte, Emprunt public, nº 106.

18 Ph. Gauthier, Bienfaiteurs. Le culte lui-même est plus précisément traité aux pages 60-66. Les cités firent

également appel à l’aide de magistrats romains, ainsi, parallèlement au culte des évergètes, se constitua un culte des magistrats romains, étudié par G. Thériault, « Remarques sur le culte des magistrats romains », p. 85-95 et « Culte des évergètes », p. 377-388.

(13)

  6  

Ce culte est connu en majeure partie par les sources épigraphiques, et quelques témoignages littéraires, archéologiques et numismatiques. En dehors de l’Asie Mineure, des honneurs cultuels pour des citoyens sont déjà attestés depuis la deuxième moitié du IIIe siècle, mais de façon sporadique. Il est alors difficile d’en déterminer les origines et les modalités 19. Au IIe siècle, les honneurs cultuels étaient presque tous reçus du vivant de l’évergète, pour des bienfaits concernant surtout la construction ou la reconstruction du gymnase, ou toute autre activité en lien avec cette institution centrale dans la vie du corps civique. Les néoi ou la cité leur accordaient ainsi statues, autels, proédrie, funérailles publiques, sacrifices, concours et processions 20. Au Ier siècle, surtout en Asie Mineure et à partir des années 50, les honneurs octroyés étaient semblables, mais le contexte et les bienfaits désormais différents. Les bienfaiteurs usaient de leur influence auprès des autorités romaines afin d’obtenir pour leur cité des privilèges qui dépassaient souvent le cadre de la seule institution du gymnase. Notre corpus se concentrera alors sur les cas du Ier siècle en Asie Mineure, puisque c’est à ce moment que le culte atteint son apogée, en lien avec le contexte difficile de cette époque et la présence romaine forte en Orient.

Le corpus se limitera également aux bienfaiteurs citoyens, car les cultes des magistrats romains ou des tyrans nécessitent, selon nous, une étude à part 21. Ainsi, nous traiterons les cas d’Héroïdès de Pergame, de son fils Diodôros Pasparos, d’Iollas de Sardes, de Théophane et Potamôn de Mytilène, d’Artémidôros de Knide, d’Asklépiadès de Cyzique, d’Apollônios II et son fils Épikratès II de Milet, d’Euthydème et Hybréas de Mylasa, d’Athénodôros de Tarse, de Xénon de Thyatire et de Mènogénès de Sardes. La sélection s’inspire de celle de J. H. M. Strubbe, qui se limite aux cas qui sont, selon lui, clairs et                                                                                                                

19 Ph. Gauthier, Bienfaiteurs, p. 63-66. Ces cas seront discutés plus en détails à l’intérieur du deuxième

chapitre.

20 Ces éléments ressortent du résumé effectué par J. H. M. Strubbe, « Cultic Honours », p. 315-320. Il

présente les cas de Lysôn de Xanthos, vers 197-193 a.C. (Ph. Gauthier, REG, 109, 1996, p. 1-27 avec traduction, commentaire et photographie; J. Ma, Antiochos III, p. 325-327, 24 avec traduction); Anticharis de Kyaneai, IIe siècle a.C. (R. Heberdey et E. Kalinka, Denkschriften der Österreichische Akademie, 1897, p. 28-29, 28; L. Robert, Études anatoliennes, p. 399-405 avec restitutions); Parasitas de Knide, vers le IIe-Ier siècles a.C. (I. Knidos 606; A. Chaniotis, EBGR, 1992, 25); le fils anonyme de Drakon de Kéramos,

basse époque hellénistique (I. Keramos 9; Ph. Gauthier, BE, 1988, 21).

21 Parmi les tyrans de cette époque, Nikias de Kos fut honoré à titre de théos patrôos et de hèrôs dans une

vingtaine de documents, soit sur de petits autels soit sur de minces plaques. La liste complète se retrouve chez K. Buraselis, Kos Between Hellenism and Rome, p. 154-155.

(14)

assurés 22. Toutefois, nous avons tenu à ajouter l’un des cas que ce dernier avait rejeté, celui de Mènogénès de Sardes, en l’appréhendant sous un nouveau jour. Une étude récente sur Asklépiadès de Cyzique a aussi permis de revoir le cas de ce citoyen qui n’avait pas totalement convaincu J. H. M. Strubbe, mais à qui ce dernier réserva tout de même une entrée dans son article 23. Trois autres cas, ceux d’Iollas de Sardes, de Potamôn de Mytilène et d’Athénodôros de Sardes, ne figurent pas dans la liste de J. H. M. Strubbe, mais présentent des éléments intéressants pour l’étude de ce culte 24.

État de la question

a) Évergétisme et culte des évergètes

L’évergétisme dans les cités grecques représente un domaine de recherche vaste, qui a fait l’objet de nombreuses études, dont les excellentes synthèses de P. Veyne (1978) et de Ph. Gauthier (1985) 25. Le premier favorisait une approche sociologique tout en opposant les époques classique et hellénistique, tandis que le second proposait une analyse fine de la question des honneurs civiques, en tenant compte des différences entre haute et basse époque hellénistique. En outre, les articles de L. Migeotte et P. Fröhlich pour les aspects économiques et politiques, ainsi que ceux de J. L. Ferrary pour les conséquences de la conquête romaine permettent d’avoir une vue d’ensemble du phénomène et de mieux comprendre le rôle de l’évergétisme dans les cités grecques 26.

                                                                                                               

22 J. H. M. Strubbe, « Cultic Honours », p. 315-316.

23 L’étude en question est celle d’É. Chiricat, « Funérailles publiques », p. 207-223. J. H. M. Strubbe traite

rapidement d’Asklépiadès dans son « Cultic Honours », p. 324-325 pour conclure en écrivant : « Personally, I wonder whether these games, organized in gratitude, are a sufficent indication of cult ». Pour Mènogénès de Sardes, il le rejette en p. 316, n. 4, en le plaçant dans les cas qui sont, selon lui, douteux.

24 Nous tenons à remercier Gaétan Thériault pour ses conseils éclairés quant à la constitution du présent

corpus, particulièrement pour les cas d’Héroïdès de Pergame, d’Euthydème de Mylasa, d’Iollas de Sardes, d’Athénôdoros de Tarse et de Mènogénès de Sardes.

25 P. Veyne, Le pain et le cirque; Ph. Gauthier, Bienfaiteurs.

26 L. Migeotte, « L’évergétisme des citoyens », p. 183-196; J.-L. Ferrary, « De l'évergétisme hellénistique à

l'évergétisme romain », p. 199-212; P. Fröhlich, « Dépenses publiques et évergétisme », p. 225-256. Ceux-ci prennent également tous en considération les différences qui existent entre la haute et la basse époque hellénistique.

(15)

  8  

Les quelques recherches qui mentionnent le culte des évergètes à l’époque hellénistique le présentent en général comme le successeur du culte des héros et de celui des souverains, et comme prédécesseur du culte impérial, sans approfondir sur le culte en lui-même. En ce qui concerne de façon plus directe le culte des évergètes, quelques spécialistes, tels H. Hepding et L. Robert, avaient certes rassemblé une masse de documents épigraphiques qui témoignaient de ce culte dans le but d’analyser le phénomène dans son ensemble, mais aucun de ces projets n’a été mené à terme. Leur contribution à la question, bien que significative, prend donc la forme de commentaires épars à travers leurs ouvrages. Dans sa monographie, Ph. Gauthier fournissait une brève synthèse de six pages des acquis jusqu’alors et il en profitait pour exprimer le souhait d’une étude d’ensemble, souhait plus récemment repris par L. Migeotte 27.

Quant aux inscriptions, l’état des recherches est variable. Certaines furent seulement publiées dans des corpus épigraphiques géographiques, tandis que d’autres, à propos de Diodôros Pasparos, d’Hybréas de Mylasa, ou de Théophane de Mytilène, ont suscité et suscitent encore plus d’intérêt, et font donc l’objet de commentaires développés 28. Récemment, G. Thériault est revenu sur le cas de Théophane de Mytilène afin d’éclairer celui de son compatriote, Potamôn, et il a également publié une analyse détaillée de la famille knidienne d’Artémidôros 29.

Très peu de travaux, outre les notes éparses de L. Robert, traitent directement du culte des bienfaiteurs. J. H. M. Strubbe et G. Thériault sont parmi les seuls à avoir réfléchi à la question. En 2004, Strubbe étudia dans un court article les cas les plus connus de culte des évergètes en Asie Mineure, dont la plus grande part est consacrée aux cas du IIe siècle et, pour le Ier siècle, à Diodôros Pasparos. Les autres bienfaiteurs, quant à eux, sont présentés chacun dans un bref paragraphe. Ce survol des cas principaux a pour avantage de donner                                                                                                                

27 Ph. Gauthier, Bienfaiteurs, p. 60-66 et n. 179; L. Migeotte, ibid.

28 Pour Diodôros Pasparos, voir l’étude récente de C. P. Jones, Chiron, 30, 2000, p. 1-14; pour Hybréas de

Mylasa, celle de F. Delrieux et M.-C. Ferriès, REA, 106, 2004, p. 49-71; 499-515; pour Théophane, G. Thériault, CEA Suppl. 1, 2011, p. 55-64.

(16)

une bonne vue d’ensemble du phénomène, mais se confine à la surface du problème 30. Les études de cas de G. Thériault demeurent les plus complètes à ce jour, car elles abordent ces personnages en fonction du culte qui leur a été accordé. Les autres travaux de ce chercheur portent plutôt sur le culte des magistrats romains, à même époque, dans lesquels il est quelquefois fait mention du culte des bienfaiteurs grecs 31.

b) La question de la religiosité

À partir de la seconde moitié du XXe siècle, l’étude des pratiques religieuses de la Grèce antique a suscité un intérêt croissant 32. Dans les années 1950, l’étude d’E. R. Dodds, The

Greeks and the Irrational, marquait la tendance à aborder la religion grecque en terme de

rationalisme et d’irrationalisme. L’ouvrage a connu un tel succès que cette méthode persiste encore. Il devient alors aujourd’hui nécessaire de reconsidérer le réel apport de l’approche du rationalisme grec. Quelques années plus tard, le chercheur M. Nilsson — qui dominait la discipline dans la première moitié du XXe siècle avec son approche comparative focalisée sur le rituel — affirmait que tous les outils conceptuels de base à l’étude de la religion grecque avaient été forgés de 1875 à 1900, et qu’ils n’avaient pas changé depuis 33. Les années 1960-1970 allaient contredire Nilsson avec l’arrivée des chercheurs de l’École de Paris. Tous reliés à l’École des hautes études, J.-P. Vernant, M. Detienne et P. Vidal-Naquet innovent en adaptant la méthode d’anthropologie structuraliste de C. Levi-Strauss à l’étude de la religion grecque. P. Bonnechère, dans sa revue bibliographique du périodique Kernos en 2012, explique bien le phénomène qui s’est produit autour de ce trio de savants qui ont influencé toute une génération.

                                                                                                               

30 J.H.M Strubbe, « Cultic Honours », p. 315-330.

31 G. Thériault, « Remarques sur le culte des magistrats romains », p. 85-95 et « Culte des évergètes »,

p. 377-388.

32 Pour le bilan historiographique et le résumé des concepts de la tendance actuelle, voir

notamment : I. Gradel, Emperor Worship, p. 1-8; l’épilogue d’ A. Erskine dans Gods of Ancient Greece, p. 505-510; R. Parker, On Greek Religion, p. vii-xiii; H. S. Versnel, Coping With the Gods; A. S. Chankowski, « Le culte des souverains », p. 1-14; P. Iossif et C. Lorber, « More Than Men, Less Than Gods », p. 691-710; S. G. Caneva, Kernos, 25, 2012, p. 75-78; P. Bonnechère, Kernos, 25, 2012, p. 304-317.

(17)

  10  

Pendant longtemps, de l’extérieur, Paris semblait héberger un centre de recherches très homogène, avec et autour de ses trois maîtres, J.-P. Vernant et M. Detienne inséparables, et P. Vidal-Naquet distinct des deux autres (voir par exemple La cuisine du sacrifice en pays grec en 1979). À cause de l’isolement des chercheurs en fonction de leur obédience intellectuelle, l’image réelle et évidemment plus nuancée, au début inaccessible, mit du temps à s’imposer 34.

À pareille époque, l’approche moderne d’enquêtes ethnologiques sur le sacrifice grec de W. Burkert est également à considérer parmi les nouvelles méthodes en matière de recherche. Aujourd’hui, la tendance est à la nuance et à la prise de recul par rapport aux maîtres fondateurs du domaine, dont les théories peuvent parfois être qualifiées de « radicales » et les conclusions de « généralisations hâtives ». Leurs contributions demeurent toutefois inestimables, puisqu’ils « sont les géants qui nous portent sur leurs épaules » 35.

L’une des avancées par rapport aux générations antérieures concerne le supposé pouvoir de sanction de la cité sur les pratiques marginales, comme la magie, les cultes à mystère et l’orphisme. Sous l’influence du Rameau d’or de J. G. Frazer, les études tendaient alors à distinguer ces pratiques de la religion de la cité et de la médecine. Les premières, parce qu’elles se trouvaient à l’écart de la religion de la cité, étaient condamnables par l’État 36. Cette vision influencée par le christianisme a de quoi rendre sceptique. Aujourd’hui, on considère que la religion de la cité « était tout sauf un ensemble de rites et de croyances qu’il serait impératif de respecter […] Collective et dynamique, la religion de la cité n’exclut en rien la piété réelle et ses nombreux échelons de religiosité individuelle, puisque l’une et l’autre procèdent de la tradition que protège la polis et sont, pour l’essentiel irrémédiablement intégrées » 37. Les pratiques privées ne faisaient en réalité l’objet de restrictions que par les conventions sociales, ou lorsqu’elles risquaient de déstabiliser la paix des dieux.

                                                                                                               

34 P. Bonnechère, Kernos, 25, 2012, p. 306, n. 2.

35 Les trois expressions sont empruntées à P. Bonnechère, mentionné ci-dessus. Parmi les « maîtres sacrés », il

compte « W. Robertson Smith, J. G. Frazer, M. Nilsson, E. R. Dodds, W. Burkert, J. Girard, J. Rudhardt, M. Detienne et autres Vernant ».

36 Sur l’influence de J. G. Frazer dans le traitement de ces pratiques, notamment la magie, voir Fritz Graf, La magie dans l’Antiquité gréco-romaine, p. 17-29.

(18)

Une autre tendance marquée était de se concentrer sur la religion à l’époque classique, à Athènes, en posant cette période comme la norme. Il en résulta une vision déformante de la religion grecque, puisque l’on considérait tout ce qui suivait Alexandre comme une dégénérescence de la religion traditionnelle. Les études plus récentes traitent toutefois de la période hellénistique, non pas comme d’un déclin, mais comme une période de transformations. En effet, l’une des caractéristiques principales de cette époque est l’interaction entre des éléments de continuité et d’autres aspects qui ont évolué pour donner place à de nouvelles formes. À l’intérieur même de la cité, les structures religieuses de base demeuraient quant à elles essentiellement inchangées. Il est vrai qu’après Alexandre, l’apparition de nouvelles pratiques et de nouveaux dieux se fit plus marquée, mais nous aurions tort de voir en cela un signe de déclin ou une nouveauté significative en matière de religion, puisque la cité grecque a toujours eu la capacité d’accueillir de nouveaux dieux. Plus encore, le concept grec du dieu a toujours eu le potentiel d’inclure un mortel, si le contexte s’y prêtait. Ainsi, toute la tradition cultuelle antérieure, de pair avec le nouveau contexte d’expansion sociopolitique, a permis de modeler un contexte qui se prêtait à une pratique plus prononcée de la divinité mortelle 38.

L’un des plus grands dangers guettant l’historien moderne qui tente de reconstruire les détails des rites religieux de l’Antiquité est de se laisser influencer par la vision du christianisme sur ces pratiques 39. Il existe pourtant des différences fondamentales à ne pas négliger. Alors que le christianisme imposait des limites au monde divin, les Grecs naviguaient dans un système ouvert à des milliers de possibilités. D’ailleurs, on devrait plutôt parler « des religions grecques » plutôt que de « la religion grecque »; leur monde divin comportait autant des pratiques communes que des diversités locales. La vie des Grecs était « guidée non par un texte révélé qui leur di[sait] quoi faire, mais par une tradition qui leur montr[ait] le chemin » 40.

                                                                                                               

38 D. Potter, « Hellenistic Religion », p. 407-408 et 426; A. Erskine, dans son épilogue de Gods of Ancient Greece, p. 505-510; S. G. Caneva, Kernos, 25, 2012, p. 75-78.

39 I. Gradel, Emperor Worship, p. 3.

(19)

  12  

La définition de la religion en elle-même pose problème, car aujourd’hui encore, les historiens de la religion ne s’entendent pas sur laquelle adopter. En ce qui concerne les pratiques païennes, il nous semble que la définition avancée par I. Gradel est celle qui convienne le mieux, si l’on demeure à l’affût des pièges qu’elle est susceptible de tendre.

The most useful definition, in my view, interprets the concept of « religion » as defined by action of dialogue — sacrifice, prayer, or other forms of establishing and constructing dialogue — between humans and what they perceive as « another world », opposed to and different from the everyday sphere in which men function. Typically, this « other world » is a realm of gods or God. […] Such a view of « religion » recommends itself, I believe, to the study of pagan practice : it stresses the action as constituing factor, and avoids christianizing concepts such as « belief » or « emotion » as déterminants 41.

Bien que cette définition évite les pièges de la foi, de la croyance et des émotions, la distinction entre les « deux mondes », l’un pour les dieux et l’autre pour les hommes, reste problématique. Cette dichotomie, logique à première vue, est une création moderne largement influencée par le christianisme. Le culte des souverains hellénistiques, par exemple, a fait couler beaucoup d’encre parce que le phénomène de la divinité mortelle, à mi-chemin entre le monde des dieux et des hommes, ne se fondait pas dans le moule de cette dichotomie 42.

L’une des façons de contourner cet obstacle ontologique serait de repenser notre compréhension de ce que les Grecs considéraient comme cet « autre monde ». Dans son épilogue du collectif Gods of Ancient Greece, A. Erskine proposait déjà de réviser le concept grec du dieu 43. La contribution d’A. Henrichs, dans le même collectif, relevait les trois caractéristiques principales du dieu grec : l’immortalité, l’anthropomorphisme et le pouvoir. Ainsi, à première vue, le souverain hellénistique, en tant que mortel, n’était pas un                                                                                                                

41 I. Gradel, Emperor Worship, p. 5. 42 Ibid., p. 5-8.

(20)

dieu puisqu’il ne remplissait pas toutes les conditions 44. Cependant, selon A. Chaniotis, une autre caractéristique pourrait jouer un rôle important dans la définition du dieu grec, encore plus essentielle que l’immortalité : la capacité de répondre aux prières et d’être une source de bienfaits 45. L’étude du culte des souverains, selon A. Erskine, représente alors un potentiel certain pour redéfinir le concept du dieu grec. Dans le même esprit, nous ajouterions que l’étude des autres cultes divins accordés aux mortels, comme celui des bienfaiteurs entourant la cour du roi (officiels, généraux, philoi), et après la chute des royaumes, des citoyens évergètes et des généraux et empereurs romains, serait également bénéfique à la compréhension de cet « autre monde » grec. Il faut en permanence garder à l’esprit que pour les anciens, la démarcation entre dieux et hommes n’était pas aussi tranchée que nous le pensons actuellement 46.

Même s’il semble aujourd’hui permis de rationaliser les comportements religieux grecs en une série de décisions humaines qui font de l’instauration de nouveaux cultes un phénomène politique plutôt que religieux, cela constitue à notre avis une erreur 47. D’abord parce que dans le monde grec, politique et religion formaient un tout 48. Puis, comme l’illustre bien la définition d’I. Gradel, parce que c’était l’expérience qui comptait vraiment, la relation entre l’honoré et l’honorant. Toutefois, le culte étant aussi le produit de la société qui le vit, il faut se garder de négliger le contexte sociopolitique dans lequel il fut forgé et trouver le juste milieu entre une explication purement politique et rationnelle, et une explication qui ne considère que la religiosité grecque 49.

Intérêt du sujet et méthodologie

Jusqu’à maintenant, la tendance en recherche fut de mentionner le culte des évergètes comme le successeur ou le prédécesseur d’un autre, par nature mieux documenté; on s’y                                                                                                                

44 A. Henrichs, « What is a Greek God ? », p. 19-39. 45 A. Chaniotis, « Divinity of Hellenistic Rulers », p. 432. 46 A. D. Nock, Essays I, p. 145.

47 D. Potter, « Hellenistic Religion », p. 412. 48 I. Gradel, Emperor Worship, p. 4.

(21)

  14  

réfère souvent, certes, mais à titre comparatif. Les bienfaiteurs, lorsqu’ils font l’objet d’études de cas, ne sont que très peu traités sous l’angle cultuel. Il est vrai que l’étude de J. H. M. Strubbe représente à cet effet une assise solide, mais elle écarte parfois trop rapidement des cas qui pourraient s’avérer essentiels à la compréhension globale du phénomène. Afin de pousser les recherches plus loin, il apparaît alors pertinent de traiter de ces cas, mais aussi d’aborder le culte des bienfaiteurs comme un phénomène en-soi, résultat d’une longue tradition cultuelle adaptée pour répondre aux besoins du nouveau contexte sociopolitique, qui en a favorisé l’émergence. En ce qui concerne les documents formant le corpus, plusieurs d’entre eux ne possèdent pas, à ce jour, de traduction française. Il s’avère dès lors nécessaire d’en offrir une, qui favorisera la diffusion du corpus vers un plus large public d’historien généraliste, par exemple.

Le premier chapitre présente le corpus, formé des documents ou des extraits de documents concernant le culte des bienfaiteurs sélectionnés pour l’étude; il comporte des documents épigraphiques, littéraires et numismatiques, classés en ordre chronologique. Les textes sont proposés en langue originale, avec une traduction française et un commentaire 50. Les inscriptions, comme il se doit, sont accompagnées d’un lemme et d’un apparat critique. Le second chapitre s’intéresse au contexte cultuel d’émergence du culte des bienfaiteurs, à savoir le culte des héros et le culte des souverains. Il se concentre ensuite sur la forme concrète du culte, dont la présentation s’inspire du traitement par Ch. Habicht du culte civique des rois hellénistiques 51. Le dernier chapitre étudie le contexte sociopolitique d’émergence, avec les prémices du IIe siècle et la période trouble du Ier siècle. Les questions du déclin des monarchies, de la montée de l’évergétisme civique et de la nécessaire amitié à l’égard des Romains sont également abordées.

                                                                                                               

50 À moins d’indication contraire, les traductions françaises sont de l’auteure. Les références au corpus se

feront en gras, en chiffrse arabes précédés de l’abréviation nº.

(22)

CHAPITRE I :PRÉSENTATION DU CORPUS

1Α : Extrait d’un décret honorifique de retour d’ambassade : prescriptions pour le culte de Diodôros Pasparos de Pergame (85-73 a.C.)

Support :

Deux fragments de marbre bleu formant une stèle, découverts dans le gymnase de Pergame. Hauteur : 0.63 m. Largeur : 0.56 m. Épaisseur : 0.15 m. Hauteur des lettres : 0.007 m.

Éd. :

H. von Prott et W. Kolbe, MDAI(A), 1902, 68, pour le plus petit fragment; H. Hepding, MDAI(A), 1907, 4, photographie (IGR IV, 292; L. Robert, Études anatoliennes, 1970, 45-50, commentaire et restitutions; ISE III, 190, trad. italienne).

Cf. :

A. Wilhelm, SAWW, 1932, 21-40; Pour l’hypothèse de la célébration posthume du culte, F. Taeger,

Charisma, 1957, 368 et B. Virgilio, Gli Attalidi di Pergamo, 1993, 85 et « Fama », 1994, 156-157;

Pour la datation, D. Kienast, RE, suppl. XII, 1970, 224-232; C. P. Jones, Chiron, 4, 1974, 185-205; B. Virgilio, Athenaeum, 82, 1994, 299-314; A. S. Chankowski, BCH, 122, 1998, 159-199; D. Musti,

RFIC, 126, 1998, 5-40; C. P. Jones, Chiron, 30, 2000, 1-12; Traduction française des lignes 37-39,

Ph. Gauthier, Bienfaiteurs, 1985, 63; Pour les honneurs cultuels, Ph. Gauthier, Bienfaiteurs, 1985, 62-63; F. Canali de Rossi, EA, 31, 1999, 83-86; J. H. M. Strubbe, « Cultic Honours », 2004, 320-323.



36 6g=2: 5} ;2D = k45„8= D?– S@?<<I=‚?E μ8=ƒB d6A{=, T= Š@6A K@ƒ D’B

[@A6C36‚[2B] 6cB D = @„<:= 6cC’<96=  46=~C92: 5} ;2 FE< = 2rD?– T@ˆ=Eμ?= CE446=:; =

@A?C-[84]?A‚2= [VG?EC2= *2C@2A8‚52  ;29‚CD2C92: 5} 2rD?– ;2 d6A~2 T= D2•B KAG2:A6C‚2:B, oD2= ;2 ?d O<<?: d6A6•B D›= 6r6A46D›=, ;2 T@:4A|F6C92: T@ D›= CE=GA8μ2D:7?μ~=I= μ6D{

40 Dƒ= &2=‚?E d6A~2, FE<2CC?μ~=8B ;2 D2†D8B D’B D:μ’B 6cB Dƒ= P@2=D2 GA„=?=  K=6•=2: 5}]

2rD?– ;2 D6μ~=?B T= /:<6D2:A6‚2:, k=?μ|C2=D2B :?5ˆ5IA6:?=, T= z: ;2D2C;6E2C9’=2:]

=2ƒ= <‚9?E <6E;?–, 6cB m= K=2D69’=2: Dƒ O42<μ2  T= Š 5’O= \μ~A2: 4‚=8D2: \ ;29:~AIC:B]

2rD?– CD2<’=2: @?μ@ = T; D?– @AED2=6‚?E 6cB Dƒ D~μ6=?B 2rD?– @?μ@6E„=DI= D?– D6]

44 @AED|=6IB ;2 DI= d6A~I= ;2 32C:<~I= ;2 D?– 4Eμ=2C:|AG?E μ6D{ D?– r@?4Eμ=2C:-]

[|AG?E ;2 D›= TF€3I= ;2 D›= @2:5?=„μI= μ6D{ D›= @2‚5I=, CE=@?μ@6E„=DI= 5}]

[;2 :?5ˆA?E ;2 ou μ6D{ D›= @2‚5I=, @2A2CD296‚C8B 9EC‚2B xB ;2<<‚CD8B T@ D?– 3Iμ?– (?)] [s@? D?– 5€μ?E, D69’=2: K4›=2B @2‚5I= D6 ;2 TF€3I= ;2 K=5A›=, D?•B 56 ⎯⎯

48 ⎯⎯⎯μ6A:C9~=DI= 6cB D{ V@29<2 D›= K@ƒ D’B 9EC‚2B ⎯⎯ ⎯⎯⎯;29’ W;2CD?= T=:2EDƒ= T= D’: 2rD’: \μ~A2:, oD2= ⎯⎯ ⎯⎯⎯⎯6r4€AIB D?…B 5:256>2μ~=?EB ⎯⎯ ⎯⎯⎯⎯:2= K@?<:@‡= 6cB Dƒ GA6‡= μ6D2<<|>8:⎯⎯

52 ⎯⎯⎯T= D“ T= /:<6D2:A6‚2: K4?AŒ: T{μ ⎯⎯⎯ ⎯⎯⎯⎯D’B T@:4A2F’B oD: l 5’μ?B TD‚μ8C6= :„5IA?= bAˆ:5?E ⎯⎯⎯⎯D = K=24„A6EC:= ⎯⎯⎯ ⎯⎯⎯⎯464?=ƒB ⎯⎯⎯ 

(23)

 "

Apparat critique :

L. 45-46 : restitution de L. Robert. Pour lui, la double mention des @2•56B (mentionnés juste avant)

est illogique; la répétition de CE=@?μ@6E„=DI= montre bien la présence d’un groupe de participants distincts de ceux déjà énumérés. Il serait alors préférable d’y voir Diodôros et ses enfants, comme c’est le cas à Milet pour Eudémos et son fils. Selon lui, on pourrait retrouver, entre :?5ˆA?E et D›=

@2‚5I=, autant ;2 que μ6D{. Hepding CE=@?μ@6E„=DI= . . . ] DI= @2‚5I=. Lafaye

CE=@?μ@6E„=DI= D›= @?<:D›= ;2] D›= @2‚5I=. Canali de Rossi CE=@?μ@6E„=DI= D›= @?<:D›=

μ6D{ D›= @]2‚5I=. L. 51 : restitution de L. Robert qui fait référence, selon lui, à la mort de Diodôros. Il arrive à cette conclusion en rapprochant ce texte d’une inscription de Kymè, CIG, 3524, et d’un décret de Delphes sur des honneurs funèbres, Fouilles de Delphes, III 1, 466. La restitution a également été adoptée par F. Canali de Rossi. Hepding et Lafaye GA6‡[= . . . T= D“ }= /:<]6D2:A6‚2. L. 53 : restitution de F. Canali de Rossi. Hepding, Lafaye et Robert l 5’μ?B TD‚μ8C6=

. . . ] D = K=24„A6EC:=].

Traduction :

…et que le huitième jour du mois d’Apollônios soit sacré, celui-là même où il (Diodôros) entra dans la cité, revenant de son ambassade; que soit créée sa propre tribu éponyme, ayant le nom de

Pasparéide; que soit désigné pour lui un prêtre dans les Assemblées électorales, lorsque le sont

également les autres prêtres des bienfaiteurs, et que son nom soit inscrit après celui du prêtre de Manius, cet honneur lui étant préservé pour toujours; que soit érigé pour lui un téménos dans le district de la Philétaireia, qu’ils appellent (ce téménos) Diodôreion, dans lequel doit être construit un temple de marbre blanc, dans lequel une statue cultuelle sera consacrée. Lorsque le jour de la consécration a lieu, qu’une procession religieuse soit envoyée du prytanée jusqu’à son téménos, dans laquelle marchent le prytane, les prêtres, les magistrats, le gymnasiarque avec le sous-gymnasiarque, les éphèbes, les enseignants avec les enfants, et marchant dans la procession avec eux, les citoyens avec leurs enfants. Que le sacrifice le plus beau possible soit offert sur l’autel par le peuple et que soient organisés des concours de jeunes gens, d’éphèbes et d’adultes, et aux […] étant divisées en vue des prix des (?) venant du sacrifice […] et à chaque année, le même jour, lorsque […] qui jouit d’une belle vieillesse, chez ceux qui ont reçu […] partant vers l’inévitable […] dans l’Agora de la Philétaireia […] de l’inscription que le peuple a honoré Diodôros, fils d’Héroïdès […] la proclamation publique […] a été […]

1Β : Extrait d’un décret pour la gymnasiarchie de Diodôros Pasparos : honneurs pour Héroïdès de Pergame (première moitié du Ier siècle, après 69 a.C.)



Support :

Trois fragments de stèle se raccordant ensemble. Le premier a été découvert dans le gymnase des

néoi, et les deux autres dans les secteurs 8 et 9 des thermes Est. Hauteur : 0.30 m.

(24)

Éd. :

L’un des trois fragment avait déjà été publié par H. Hepding, MDAI(A), 1907, 9; H. Hepding, MDAI(A), 1910, 3, pour les trois fragments réunis (A. S. Chankowski, BCH, 122, 1998, 162-163, II et édition des lignes 17-20, 190 n. 122).

Cf. :

Pour la chronologie du décret, D. Kienast, RE suppl. XII, 1970, 224; Sur le culte d’Héroïdès, Ph. Gauthier, Bienfaiteurs, 1985, 63; A. S. Chankowski, BCH, 122, 1998, 190; J. H. M. Strubbe, « Cultic Honours », 2004, 321. [τῆι] τε ἕκτῃ ἀπιόντος τοῦ Δ[εί]ου µηνὸς ἐν τῇ ψηφισθίσῃ ἡµέρᾳ ῾Ηρώιδου [τοῦ πατρὸς αὐτοῦ] [παραστήσας θυσίας ὡς καλλίστας ἐκ τοῦ ἰδίου παρὰ τῷ κ]αθιδρυµένωι αὐτοῦ ἀγάλµατι ἐν τῶι 20 γυµνασίωι ἐπετέλεσεν γυµν[ικὸν ἀγῶνα καὶ διαδροµὰς παίδων τε καὶ ἐφήβων καὶ ἀνδρῶν καὶ] [τὰς λ]αµπάδας Apparat critique :

L. 17-20 : Restitutions de H. Hepding. L. 20 : A. S. Chankowski, BCH, 122, 1998, p. 190, n. 122 omet le τὰς, on lit alors : ἀνδρῶν καὶ λ]αµπάδας.

Traduction :

… et le 26 du mois Dios, au jour décrété pour son père Héroïdès, lui ayant offert les plus beaux sacrifices possible à ses frais auprès de son agalma érigé dans le gymnase, où il a organisé des concours gymniques et des courses aux flambeaux de paides, d’éphèbes et d’andres…

1C : Extrait d’un décret relatif à la gymnasiarchie de Diodôros et aux Nikephoria : sacrifices auprès de son agalma (première moitié du Ier siècle, après 69 a.C.)

Support :

Fragment d’une stèle de marbre blanc, trouvé au près de la stoa nord du temple d’Athéna. L’inscription est très endommagée sur les côtés droit et gauche et les lettres sont très petites. Hauteur : 0.39 m. Largeur : 0.22 m. Épaisseur : 0.015 m.

Éd. :

I. Pergamon 256, dessin; A. S. Chankowsi, BCH, 122, 1998, 171-175. Cf. :

Pour l’identification du nom « Pasparos », H. Hepding, MDAI(A), 1907, 243, 4; Pour la chronologie, D. Kienast, RE, suppl. XII, 1970, 224, III et A. S. Chankowski, BCH, 122, 1998, 163 et 195; Pour les sacrifices et l’agalma, J. H. M. Strubbe, « Cultic Honours », 2004, 322.

(25)

  18   16 20 [ - - - ca 61-63 - - - παρὰ δὲ το ἄ]γαλµα παρασταθῆναι [θ]υσίαν αὐτῶ[ι - - ca 4-6 - - ] [ - - ca 37-40 - - ποιεῖσθαι δὲ µετάδοσιν ἀπὸ θυσίας π]άσης ὑπό τε τοῦ γυµνασιάρχου καὶ τοῦ ὑ[πογυµνα-] [σιάρχου εἰς ἔπαθλα τοῖς τε ἐφήβοις καὶ νέοις εἴς τε διαδροµὰς καὶ τοὺς τῶν ὅπλων ἀγωνας (?)] I (?) καὶ καθ’ ἕκαστον µῆνα τῆι αὐτῆι ἡµ[έραι] [ - - - ca 68-71 - - - α]ὐτοῦ τοῦ ἀγάλµατος ἅµα τοῖς λοιποῖς [ἀ-] [γάλµασιν - - - ca 22-25 - - - ταινιοῦσθαι δὲ αὐτοῦ τὸ ἄγαλµα ὅταν τὰ ἄλλα ἀγ]άλµατα ταινιῶνται · στεφανοῦσθαι [δὲ] [αὐτοῦ τὸ ἄγαλµα ὅταν τὰ ἄλλα ἀγάλµατα στεφανῶνται · στεφανοῦσθαι δὲ καὶ αὐτὸν ἐν το]ῖς Ἐ[ρµ]αίοις τῶι ἀριστείωι καὶ ἀϊδίωι σ[τεφά-] [νωι - - - ca 68-70 - - - -]ΝΙ µετὰ Ἡρῷδην τὸν πατέρα αὐτοῦ, κ[αὶ] Apparat critique :

Le premier éditeur avait lu comme nom du destinataire un certain ᾿Υ[π]άσ[τ]αρος, mais en publiant de nouveaux décrets pour Diodôros, H. Hepding réalisa qu’il s’agissait plutôt de [Π]άσ[π]αρος. Comme le texte fut publié avant la découverte des autres décrets, les restitutions de l’editio princeps ne tiennent plus, c’est donc plutôt l’édition d’A. S. Chankowski qui est présentée ici. H. Hepding avait remarqué que l’inscription honorifique MDAI(A), 1907, 313, 36 était citée à l’intérieur de ce décret, mais n’a pas proposé de nouveau texte pour I. Pergamon 256. A. S. Chankowski fonde ainsi ses restitutions sur les remarques de H. Hepding et sur la comparaison des autres décrets publiés en l’honneur de Diodôros Pasparos. L. 15-16 : πά]σης Frankël; π]άσης Chankowski, mais sur le dessin de l’editio princeps, le Α est bien visible. La tournure proposée par A. S. Chankowski revient à plusieurs reprises dans les autres décrets : IGR IV, 294, l. 23-24; 29, avec les corrections de L. Robert, Études anatoliennes, p. 48 et MDAI(A), 1910, 409-411, 3, l. 15; 20; 23. L. 16 : si M. Frankël a bien vu un I au début du texte conservé à la ligne 16, il devrait y avoir un autre mot entre ἀγωνας et καὶ. Cependant, selon A. S. Chankowski, la ligne est trop courte pour la restitution ἐπιµεληθηνα[ι de Frankël. Ansi, il se pourrait que l’auteur du décret ait seulement écrit τοῖς νέοις. Traduction :

[...] qu’un sacrifice (soit offert) auprès de l’agalma qui a été érigé, avec ceux […]; que la distribution de tous (les morceaux) venant du sacrifice soit faite par le gymnasiarque et le sous-gymnasiarque, en vue des prix aux éphèbes et aux néoi, et en vue des diadromai et des concours d’armes (?) I (?); et à chaque mois, lors du jour (en son honneur) […] de son agalma, en même temps qu’au reste des agalmata […]; que son agalma soit paré de rubans, lorsque le sont aussi les autres agalmata; que son agalma soit couronné, lorsque le sont aussi les autres agalmata; que celui-ci (Diodôros) soit couronné lors des Hermaia de la couronne perpétuelle de la valeur […]NI avec son père Héroïdès et…

1D : Extrait du décret de sortie de gymnasiarchie de Diodôros Pasparos : sacrifices à l’agalma de Diodôros, auprès de l’agalma de Philétairos (première moitié du Ier siècle,

après 69 a.C.)

Support :

Fragment d’une dalle de marbre blanc découvert au gymnase des néoi, dans l’une des pièces du côté Nord de la cour. Hauteur : 0.51 m. Largeur : 0.51 m., Hauteur des lettres : 0.013 m.

(26)

Éd :

W. Kolbe, MDAI(A), 1904, 1, photographie (OGIS 764; IGR IV, 294; F. Canalli de Rossi,

Ambascerie, 1997, 347, l. 30;H. Kotsidu, Erhungen, 2000, *352, restitution et trad. allemande l. 35 et suiv.

Cf. :

Sur la référence aux 29e Nikèphoria aux lignes 12 et 26, L. Robert, BCH, 54, 1930, 337 (= OMS I,

156); Restitutions à la ligne 35, L. Robert, Études anatoliennes, 1970, 68; Sur les lignes 56-57, P. Jacobsthal, MDAI(A), 1908, 383; Sur les lignes 9 et 33, J. Delorme, Gymnasion, 1960, 180 n. 3 et 183 n. 5 et 7; Pour la chronologie, D. Kienast, RE, suppl. XII, 1970, 224, I et A. S. Chankowski,

BCH, 122, 1998, 162, 173 n. 49 et 195; Sur les sacrifices et l’agalma, S. R. F. Price, Rituals and Power, 1984, 48 et J. H. M. Strubbe, « Cultic Honours », 2004, 322 n. 28 et 29.

36 (…) ;29:5AE;„DI= Dƒ H8F:C9}= s@’ 2rD›= O42<μ2 T= D’: T>~5A2: T= a: Dƒ D?– /:<6D2‚A?[E] [O42<μ2 ;29‚5AED2: ⎯ ⎯ ⎯ ⎯ T@6E>|μ6=?B@2A‚C-]

D2C92: μ}= s@’ 2rD?– ;2 s@ƒ Dƒ= D’B K=29~C6IB ;2:Aƒ= 9EC‚2= xB ;2<<‚CD8=, D69~=D?B 5} D?– K4|<μ2D?B (…)

Apparat critique :

L. 36 : T@6E>|μ6=?B, restitution de Kotsidu. L. 37 : D = ;2<<‚CD8= Schröder et Lafaye, xB

;2<<‚CD8= Kotsidu.

Traduction :

(… les néoi) ayant érigé l’agalma qu’ils lui avaient voté, dans l’exèdre, là où l’agalma de Philétairos a été érigé (….) s’étant engagé d’offrir par ses soins, et au moment de la consécration, le plus beau sacrifice possible, une fois l’agalma érigé.

1E : Extraits d’un décret concernant la gymnasiarchie de Diodôros Pasparos : prescriptions cultuelles (première moitié du Ier siècle, après 69 a.C.) Support :

Colonne (« Säule ») de marbre blanc conservée en quatre fragments (a, b, c, d), découverts dans le sous-sol du stade, environ 8 m. à l’ouest du coin Sud-Est du Gymnase. Les décrets sont disposés en deux colonnes. L’extrait présenté ci-dessous appartient au fragment « a », col. II, l. 1-42. A. S. Chankowski, BCH, 122, 1998, p. 164 illustre bien la façon dont les décrets étaient placés sur la colonne et identifie chacun des fragments avec le numéro correspondant à la chronologie de Kienast, en ajoutant une lettre pour les distinguer. Il attribue au présent fragment le nº VI4. Il existait un deuxième exemplaire de ce décret, dont trois fragments furent publiés par H. Hepding,

MDAI(A), 1910, 5. Fragment « a » : Hauteur : 0.89 m. Diamètre : 0.60 m. Hauteur des

lettres : 0.008 m.

Éd. :

H. Hepding, MDAI(A), 1907, 8 (IGR IV, 293; F. Canali de Rossi, Ambascerie, 347; F. Canali de Rossi, ISE III, 191, trad. italienne)

Références

Documents relatifs

Le contrôle est la dernière étape que la réglementation algérienne organisée via le Décret exécutif N° 92-286 du 6 juillet 1992relatif à l’information médicale et

La victoire de Bismarck sur la France, c’est aussi la victoire du protestantisme sur les catholiques ; à peine la guerre terminée, lui-même donne le signal de

Appel à communication pour un colloque international organisé par l’Association régionale des cités-jardins d’Ile-de-France, en partenariat avec l’Ecole nationale

B VIIIe siècle

Le syntagme haimati kai luthrôi est intéressant en ce qu’il précise en quel sens le sang est cause de la souillure, ce n’est pas le contact avec le sang en lui même,

II oppose les liens de syngeneia, selon lui legendaires, aux liens de parente, bien reels ceux-lä, entre metropoles et colonies ou entre colonies issues d'une meme metropole definis

Aristo- boulos leur a demandé alors des garanties (p¤stin d¢ toÊtv[n]. doËnai), ce qu'ils ont fait, à la suite de quoi Aristoboulos leur a ‘concédé cela' (§pexvrÆyh).

Peut-on proposer des pistes d’explication aux différences de pratiques entre pro- vinces? L’histoire des différents koina semble avoir un poids important. Parmi eux, le koinon