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L'influence de la distance entre marqueurs statiques sur les jugements temporels

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Academic year: 2021

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(1)

ISABELLE GUAY

L’INFLUENCE DE LA DISTANCE ENTRE MARQUEURS STATIQUES SUR LES JUGEMENTS TEMPORELS

Mémoire présenté

à la Faculté des études supérieures de l’Université Laval

pour l’obtention

du grade de maître en psychologie (M. Ps.)

Département de psychologie FACULTÉ DES SCIENCES SOCIALES

UNIVERSITÉ LAVAL

SEPTEMBRE 2000

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de la distance entre marqueurs statiques sur les jugements temporels. Trois stimuli lumineux sont disposés selon un plan vertical (Haut, Milieu, Bas). Seulement deux marqueurs délimitent l’intervalle temporel à estimer pour chaque essai. Les intervalles temporels sont présentés de façon ascendante (B-M, B-H ou M-H) ou descendante (H-M, H-B ou M-B). Les résultats de cette étude montrent que plus il y a d’espace entre les marqueurs, plus l’intervalle temporel est jugé court, ce qui va à l’encontre de ce que stipule l’effet kappa. Selon cet effet, une augmentation de la distance entre les signaux entraîne une augmentation de la durée perçue. Dans cette étude, il est possible que les participants jugent de la vitesse plutôt que du temps.

Simon Grondin Directeur de thèse Isabelle Guay

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Je tiens tout d’abord à remercier M. Simon Grondin, mon directeur de thèse. Simon, un grand merci pour ta disponibilité et pour le support apporté tout au long de la rédaction cette thèse. Merci aussi pour toutes les connaissances et l’expérience que j’ai pu acquérir à ton contact.

Je souhaite aussi remercier mes parents, Hélène et Marcellin, qui m’ont sans cesse encouragé et appuyé tout au long de mes études. Maman, merci pour avoir enduré toutes mes sautes d’humeur avec la patience que seule une mère peut avoir envers son enfant. Papa, merci de m’avoir appris à terminer ce que l’on entreprend peu importe le temps que ça prend et les efforts qu’il faut mettre pour y parvenir. C’est ce principe qui m’a permis de m’accrocher lorsque j’avais le goût de tout laisser tomber.

Merci aussi à mes ami(e)s, Mélanie, Christian, Julie et Lobna. Mélanie, merci pour le temps passé à lire, relire, corriger et recorriger. Ensemble nous avons bûché, mais finalement nous y sommes parvenus. Je dois t’avouer que sans toi je n’y serais jamais arrivée. Christian, merci pour y avoir cru même lorsque moi je n’y croyais plus. Merci pour les encouragements et le support, particulièrement lors des stats. Julie et Lobna, mille mercis pour m’avoir remonté le moral dans des moments vraiment difficiles. Vous avez été les rayons de soleil qui ont balayé les nuages qui planaient au-dessus de ma tête.

Un grand merci aussi à tous ceux et celles qui n’ont pas été nommé(e)s (la liste aurait été incroyablement longue), mais qui m’ont apporté leur soutien à un moment ou à un autre durant mes années d’étude. J’espère que vous saurez vous reconnaître.

Des remerciements sont également offerts aux personnes qui ont participé aux expériences. Sans vous, ce mémoire n’aurait pu être réalisé. Enfin, merci au Conseil de Recherche en Science Naturelles et Génie (CRSNG) pour la bourse qui m’a permis de me consacrer entièrement à mes études.

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gages RÉSUMÉ...H AVANT-PROPOS... m TABLE DES MATIÈRES...IV LISTE DES TABLEAUX...VI LISTE DES FIGURES...VH

INTRODUCTION GÉNÉRALE... 1

CONTEXTE THÉORIQUE... 2

La perception de l’espace... 2

L’influence des indices de profondeur... 2

Hypothèse de l’erreur de la bissection... 3

La perception du temps... 4

Loi de Weber... 4

Localisation des marqueurs...4

Interaction espace-temps... 5

Effets kappa et tau... 5

Explications de l’effet kappa... 11

Hypothèse de l’illusion contextuelle...11

Hypothèse du mouvement induit... 13

LA PRÉSENTE ÉTUDE... 15 Hypothèses...15 MÉTHODE...16 Participants...16 Matériel...17 Procédure... 17 RÉSULTATS...19 DISCUSSION... 21

EC pour les séquences ascendantes...21

EC pour les séquences descendantes...23

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Seuil différentiel pour les séquences ascendantes... 25

Seuil différentiel pour les séquences descendantes... .26

Recommandations...27

CONCLUSION GÉNÉRALE...28

RÉFÉRENCES... 29

ANNEXE A : TABLEAUX... 33

ANNEXE B : FIGURES...36

ANNEXE C : FORMULAIRE DE CONSENTEMENT... 41

ANNEXE D : TABLEAUX DES ANALYSES DE LA VARIANCE...43

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Tableau 1. Moyenne (M) et erreur-type (ET) des erreurs constantes (ms) à 160 et à 320 ms en fonction de la hauteur des marqueurs B-M, B-H et M-H

Tableau 2. Moyenne (M) et erreur-type (ET) des erreurs constantes (ms) à 160 et à 320 ms en fonction de la hauteur des marqueurs H-M, H-B et M-B

Tableau 3. Moyenne (M) et erreur-type (ET) des seuils différentiels (ms) à 160 et à 320 ms en fonction de la hauteur des marqueurs B-M, B-H et M-H

Tableau 4. Moyenne (M) et erreur-type (ET) des seuils différentiels (ms) à 160 et à 320 ms en fonction de la hauteur des marqueurs H-M, H-B et M-B

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Figure 1. Moyenne des erreurs constantes (ms) en fonction de la durée (160 et 320 ms) et de la hauteur des marqueurs (B-M, H-M et M-H)

Figure 2. Moyenne des seuils différentiels (ms) en fonction de la durée (160 et 320 ms) et de la hauteur des marqueurs (B-M, B-H et M-H)

Figure 3. Moyenne des erreurs constantes (ms) en fonction de la durée (160 et 320 ms) et de la hauteur des marqueurs (H-M, H-B et M-B)

Figure 4. Moyenne des seuils différentiels (ms) en fonction de la durée (160 et 320 ms) et de la hauteur des marqueurs (H-M, H-B et M-B)

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INTRODUCTION GÉNÉRALE

Les êtres humains doivent constamment s’ajuster au temps car certaines conditions de !’environnement ou encore certains facteurs internes viennent perturber leur perception temporelle. Parmi ces conditions de !’environnement, il y a la perception de la profondeur, appelée aussi perception de l’espace ou de la distance. La profondeur est une dimension qui est inférée sur la base d’indices par l’individu car la rétine ne peut recevoir de !’information que sur la base de deux dimensions, soit la hauteur et la largeur. Ces indices sont utilisés de façon automatique par le cerveau. L’estimation de la profondeur peut être biaisée

notamment par une erreur dans le décodage ou une mauvaise interprétation d’un indice. La présente recherche propose d’intégrer des notions de la perception de l’espace dans l’étude de la perception du temps. Le but général est de vérifier de quelle manière la distance entre les stimuli influence les jugements temporels lorsque les signaux visuels délimitant les intervalles sont statiques.

L’influence de l’espace sur les jugements temporels est appelée l’effet kappa. Cet effet a surtout été étudié avec des stimuli disposés selon un plan horizontal. Généralement, ces études utilisent trois signaux qui forment deux intervalles temporels. La distance entre deux des stimuli varie d’un essai à l’autre. Les résultats obtenus démontrent qu’une

augmentation de la distance entre les signaux entraîne une augmentation de la durée perçue (Bill & Tefl, 1969; Cohen, Hansel & Sylvester, 1953; Collyer, 1977; Huang & Jones, 1982; Lebensfeld & Wapner, 1968). La présente expérience vérifie si l’effet s’applique également lorsque les stimuli sont présentés dans le plan vertical. Contrairement aux études

précédentes sur l’effet kappa, les intervalles temporels à estimer sont délimités par deux signaux seulement et la distance physique entre les marqueurs demeure constante tout au long de l’étude. L’impression de profondeur est plutôt créée en situant un intervalle plus haut dans le champ visuel (hauteur relative).

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CONTEXTE THÉORIQUE

Dans cette recherche, deux dimensions sont à l’étude, soit l’espace et le temps. Tout d’abord, les notions propres à la perception spatiale sont rapportées. Par la suite, les données concernant la perception temporelle sont présentées. Enfin, les expériences intégrant ces deux dimensions sont décrites.

La perception de l’espace

L’espace étant perçu grâce à des inférences faites par le cerveau à partir d’indices, une mauvaise interprétation d’un indice de profondeur peut provoquer une estimation spatiale erronée.

L’influence des indices de profondeur. L’influence des indices de profondeur sur la perception de l’espace est notamment étudiée avec l’illusion de l’horizontale-verticale. La forme la plus classique de cette illusion consiste en une ligne verticale dont le début est situé au point milieu d’une ligne horizontale de même longueur (_L). Lorsque les

participants doivent juger de la longueur relative des deux lignes, ils surestiment la longueur de la ligne verticale.

Von Collani (1985) présente aux participants de son étude deux photographies dans lesquelles l’illusion de !’horizontale-verticale est incluse. La première photographie

comporte les indices de profondeur suivants : perspective linéaire (effet de profondeur créé par des lignes qui tendent à se rejoindre) et texture (l’espace entre les éléments verticaux de même que le nombre d’éléments diminuent graduellement vers le haut de l’image, ce qui crée une impression de profondeur). La deuxième photographie est exempte d’indices de profondeur. Les participants doivent indiquer laquelle des deux lignes (horizontale ou verticale) leur paraît la plus longue. Les résultats obtenus montrent que l’illusion est considérablement amplifiée lorsque des indices de profondeur sont présents. Dans une seconde étude, l’illusion ne contient aucune interruption de l’horizontale par la verticale (l’illusion a la forme du L plutôt que du T inversé). Les résultats obtenus confirment ceux de la première étude et indiquent que la magnitude de l’illusion augmente avec la présence d’indices de profondeur (Von Collani, 1985).

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Hypothèse de l’erreur de la bissection. Girgus et Coren (1975) ont élaboré une

hypothèse pour expliquer la surestimation de la verticale sur l’horizontale dans l’illusion de l’horizontale-verticale. Selon ces auteurs, lorsque les participants doivent séparer une ligne verticale en deux segments, ils sous-estiment la longueur de la portion la plus basse dans le champ visuel comparativement à la plus haute. Ceci ne s’applique pas pour l’horizontale. Cette sous-estimation de la portion la plus basse de la verticale par rapport à la plus haute peut s’expliquer comme suit: il est bien connu dans le domaine de la perception spatiale que les objets situés plus haut dans le champ visuel sont généralement perçus comme étant plus loin (effet de la hauteur relative). La hauteur étant un indice de profondeur qui

influence la perception du participant, ceci l’amènerait à juger la portion supérieure plus longue que celle du bas puisqu’il la perçoit comme étant plus loin.

L’étude de Girgus et Coren (1975) vérifie d’une part si l’erreur de la bissection existe et d’autre part si la hauteur relative est l’indice de profondeur qui provoque cette erreur. Ces auteurs présentent aux participants des lignes verticales d’une longueur de 6, 8, 10 ou 12 cm selon les essais. L’inclinaison des lignes varie de l’horizontale à la verticale selon les angles suivant : 0°, 30°, 60° et 90°. La tâche des participants est de diviser chaque ligne en deux segments égaux. Selon Girgus et Coren (1975), si la hauteur relative est l’indice déterminant, l’erreur de la bissection devrait être presque inexistante lorsque la ligne est présentée horizontalement (0°) et augmenter proportionnellement à l’angle d’inclinaison. Les résultats obtenus démontrent que l’erreur de la bissection est pratiquement inexistante lorsque la ligne est présentée dans le plan horizontal et qu’une augmentation de l’angle d’inclinaison entraîne une amplification de l’erreur de la bissection, ce qui confirme

l’hypothèse. Les résultats montrent également qu’un allongement de la longueur de la ligne verticale présentée entraîne effectivement une amplification de l’erreur de la bissection. Girgus et Coren (1975) concluent à l’existence de l’erreur de la bissection, ce qui signifie que les participants surestiment la longueur du segment le plus haut comparativement au plus bas lorsqu’ils doivent diviser une ligne verticale en deux segments qui leur paraissent égaux. Selon ces chercheurs, la hauteur relative est l’indice de profondeur responsable de cette erreur.

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La perception du temps

Suite à la présentation des notions propres à l’étude de la perception de l’espace, il est pertinent de rapporter celles concernant la perception du temps. Selon Grondin (1998), il existe une variabilité entre le temps perçu et le temps réel. Ainsi, il s’avère important pour les chercheurs d’étudier cette relation afin de mieux comprendre les mécanismes impliqués dans l’estimation temporelle. La loi de Weber est souvent utilisée pour rendre compte de cette variabilité.

Loi de Weber. Selon cette loi, le seuil différentiel (Δφ) augmente proportionnellement à l’intensité des stimuli (φ): Δφ = Κφ où K est le rapport obtenu. Certaines études montrent que la fraction n’est pas constante comme le prédit la loi, le rapport étant plus élevé pour les valeurs extrêmes (plus courtes) d’un continuum sensoriel (Allan & Kristofferson, 1974; Killeen & Weiss, 1987; Grondin, sous presse). Sa reformulation, la loi de Weber

généralisée, tient compte du bruit associé à !’utilisation de signaux sensoriels par l’ajout d’une constante, a : Δφ = Κφ + a. Selon Getty (1975), lorsque la forme généralisée est appliquée à la psychophysique du temps, elle s’avère juste pour des durées allant de 50 à 2000 ms.

Certains facteurs propres aux conditions environnementales, comme la localisation des marqueurs, sont susceptibles d’influencer les jugements temporels. Un marqueur est un signal sensoriel qui délimite l’étendue d’un intervalle temporel. Comme le montre la loi de Weber, les durées plus courtes sont les plus affectées.

Localisation des marqueurs. Certaines études rapportent que le fait de placer les signaux à différents endroits dans le champ visuel affecte la perception temporelle (Grondin, 1997; 1998; Grondin & Rousseau, 1991). Dans l’expérience 1 de Grondin et Rousseau (1991) les intervalles temporels sont initiés par des marqueurs qui sont soit distancés dans l’espace, à la fovéa (F) et à 20 0 à gauche du champ visuel (G), soit au même endroit (FF, GG). La tâche des participants est de catégoriser la durée de l’intervalle temporel présenté comme étant courte ou longue. Les résultats obtenus montrent que les intervalles temporels délimités par des stimuli situés au même endroit (FF et GG) sont plus facilement

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discriminés que les intervalles délimités par un stimulus présenté à la fovéa suivi d’un second présenté en périphérie (FG). De plus, la performance des participants est supérieure lorsque les intervalles temporels sont délimités par deux signaux visuels présentés à la fovéa (FF) plutôt qu’en périphérie (GG).

Dans l’expérience 2 de Grondin (1998), trois stimuli lumineux sont disposés face aux participants selon un plan horizontal. Le stimulus au centre est situé à la fovéa alors que les deux autres marqueurs sont à 18 0 à gauche et à droite du champ visuel. Grondin (1998) conclut, lui aussi, que la discrimination est plus facile lorsque les marqueurs sont situés au même endroit. La performance des participants est supérieure lorsque les stimuli sont présentés à la fovéa plutôt qu’en périphérie. Cependant, selon Grondin (1997), l’effet de la sensibilité à la localisation des marqueurs dépend de la magnitude de la distance entre les signaux visuels. Les résultats de l’expérience 2 de Grondin (1997) montrent que la discrimination des intervalles temporels n’est pas meilleure lorsque les deux marqueurs sont situés à la fovéa (FF) plutôt qu’un premier à la fovéa suivi d’un second présenté à 5° dans le champ visuel gauche (FG). D’après Grondin (1998), il est possible que les

participants considèrent l’espace dans le champ visuel comme indice pour effectuer leur jugement temporel.

Interaction espace-temps

Plusieurs études rapportent que la perception de l’espace et la perception du temps sont interdépendantes (Bill & Teft, 1969; Cohen et al., 1953; 1955; Collyer, 1977; Huang & Jones, 1982; Helson & King, 1931; Lechelt & Bochert, 1977; Price-Williams, 1954). Cette interaction entre l’espace et le temps est représentée par les effets kappa et tau. Ainsi, l’effet kappa décrit l’influence de l’espace sur les jugements temporels et l’effet tau l’impact des conditions temporelles sur les jugements spatiaux.

Effets kappa et tau. L’effet kappa stipule qu’une augmentation de la distance entre deux signaux qui s’illumine successivement pour délimiter un intervalle temporel entraîne une augmentation de la durée perçue. Un même intervalle temporel sera jugé plus long si la distance entre les signaux qui délimitent cet intervalle est plus grande. L’inverse est aussi

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vrai. Si les participants doivent effectuer des jugements sur la distance entre les marqueurs plutôt que sur le temps, une variation de la durée entre les signaux influencera leurs jugements spatiaux. En conséquence, si un participant a pour tâche d’estimer la distance

entre trois signaux équidistants et que l’intervalle de temps entre deux des marqueurs est plus long, il estimera la distance entre ces marqueurs plus longue et ce¡ même si elle est physiquement égale. Cette influence des conditions temporelles sur les jugements spatiaux est appelée l’effet tau.

L’existence des effets kappa et tau a été vérifiée dans les modalités tactile (Helson & King, 1931; Lechelt & Bochert, 1977; Suto, 1955) et visuelle (Bill & Left, 1969; Cohen et al., 1953; Collyer, 1977; Huang & Jones, 1982; Lebensfeld & Wapner, 1968; Newman & Lee, 1972; Price-Williams, 1954). Pour le mode tactile, l’expérience de Helson et King (1931) sur l’effet tau consiste à stimuler trois points sur l’avant-bras tout en respectant une plus grande distance entre le deuxième et le troisième point qu’entre le premier et le

deuxième. Ainsi, deux intervalles temporels de même durée sont présentés aux participants et leur tâche consiste à comparer le deuxième intervalle spatial au premier. Les stimuli sont présentés horizontalement, verticalement et en diagonal alors que la durée des intervalles temporels varie entre 600 et 900 ms. La distance entre le premier et le troisième marqueur est au maximum de 33 cm lorsque les signaux tactiles sont présentés horizontalement et de 30 cm dans les plans vertical et diagonal. Les résultats obtenus démontrent que la distance perçue entre le deuxième et le troisième point augmente de façon exponentielle avec l’intervalle temporel. Ainsi, plus l’intervalle temporel est long, plus la distance entre les marqueurs est perçue par les participants comme étant grande, ce qui indique que la perception spatiale est dépendante des facteurs temporels.

Lechelt et Bochert (1977) effectuent une expérience similaire. Cependant, l’intervalle standard est présenté sur un avant-bras et l’intervalle de comparaison sur l’autre. Les résultats obtenus montrent qu’un allongement de la durée entre deux signaux entraîne une augmentation de la distance apparente entre ces signaux. Ces résultats confirment ceux de Helson et King (1931) et démontrent que les jugements sur la distance sont davantage

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dépendants des relations temporelles entre les intervalles que des séparations spatiales entre les stimuli.

Suto (1955) effectue une expérience semblable sur l’effet kappa. Dans cette étude, les participants doivent effectuer des jugements temporels les yeux fermés. Les résultats de

Suto (1955) démontrent que !’interaction espace-temps pour la perception tactile est directement liée à la perception visuelle de l’espace. Il propose que la comparaison d’intervalles temporels les yeux fermés s’accompagne d’images visuelles. Suto (1955) a refait la même étude, mais avec des participants ayant perdu la vue tôt dans l’enfance. Les résultats obtenus montrent que l’effet kappa n’est pas présent chez ces participants. Il conclut que l’effet kappa dans la modalité tactile est directement lié à la perception visuelle de l’espace.

Pour la modalité visuelle, la plupart des études portant sur les effets tau et kappa ont été effectuées avec trois signaux lumineux disposés face aux participants selon un plan

horizontal. Ces trois stimuli s’allument successivement afin de former soit deux intervalles temporels, soit deux intervalles spatiaux. Cohen et al. (1953) ont testé l’hypothèse émise par Helson et King (1931) stipulant que les jugements temporels sont dépendants de la relation spatiale entre les marqueurs. Ils demandent à leurs participants d’ajuster le deuxième intervalle temporel pour qu’il soit égal au premier. À chaque essai, la distance séparant les signaux lumineux varie. Les résultats obtenus démontrent que les jugements comparatifs de deux intervalles temporels successifs délimités par des marqueurs visuels sont influencés par les relations spatiales entre les signaux. Selon Cohen et al. (1953), l’effet est tel qu’un participant qui ajuste les intervalles temporels pour qu’ils lui

apparaissent égaux, produit l’intervalle entre les deux marqueurs les plus espacés plus court que celui entre les signaux les plus près. Un phénomène émerge de cette étude : quand trois signaux lumineux sont présentés successivement et sont séparés par des intervalles

temporels égaux, une augmentation de la distance entre les signaux entraîne une augmentation de la durée perçue. Cohen et al. (1953) ont aussi remarqué, qu’avec des intervalles temporels de 0.6 à 6.4 s, une augmentation de la durée entraîne une diminution

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de l’effet, ce qui confirme l’hypothèse de !’interdépendance entre les composantes temporelles et spatiales.

Price-Williams (1954) vérifie lui aussi !’interdépendance entre les informations temporelles et spatiales. Cependant, il a utilisé un seul intervalle temporel délimité par deux signaux visuels, soit un situé dans le champ visuel gauche et l’autre au centre. À chaque essai, le stimulus situé au centre change de position et la tâche des participants consiste à reproduire l’intervalle temporel présenté. La durée de l’intervalle temporel varie de 7 à 11 s. Dans une étude subséquente, Price-Williams dispose les deux signaux

lumineux selon un plan vertical et les participants reçoivent la consigne de fixer le point milieu entre les stimuli, afin de minimiser les mouvements des yeux. Les résultats de ces deux expériences confirment ceux de Cohen et al. (1953) et démontrent qu’un intervalle temporel délimité par deux signaux visuels successifs paraît plus long avec une

augmentation de la distance entre ces signaux et ce, peu importe l’orientation des marqueurs.

Bill et Teft (1969) présentent à leurs participants un intervalle standard (4 s) et un intervalle de comparaison (1 à 7 s) en leur demandant d’ajuster la distance entre les marqueurs de l’intervalle de comparaison jusqu’à ce que les deux durées leur paraissent égales. Les résultats de cette étude démontrent qu’un intervalle de comparaison plus court qu’un intervalle standard amène les participants à estimer la distance entre les marqueurs délimitant l’intervalle de comparaison plus petite que la distance entre les marqueurs délimitant l’intervalle standard. À l’inverse, les participants estiment la distance entre les marqueurs de l’intervalle de comparaison plus grande que celle entre les marqueurs de l’intervalle standard lorsque l’intervalle de comparaison est plus grand. Lorsque les durées de l’intervalle standard et de l’intervalle de comparaison sont égales, l’estimation de la distance entre les stimuli délimitant chacun des deux intervalles est presque identique. Bill et Teft (1969) concluent que les facteurs temps et espace sont interdépendants.

Dans son étude, Collyer (1977) vérifie si les jugements temporels et spatiaux sont effectués indépendamment. Les participants doivent fixer ce qu’ils considèrent le milieu

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d’une série de signaux lumineux qui servent de point de fixation. À chaque essai, la position du stimulus central varie, ce qui a pour effet de changer la distance entre les marqueurs. La durée des intervalles est différente d’essais en essais, mais la durée totale des deux intervalles (durée du premier intervalle additionnée à celle du deuxième) est toujours de 160 ms. L’angle visuel total (l’angle visuel du premier intervalle additionné à celui du second) est de 4°. La tâche des participants consiste à déterminer si le deuxième intervalle temporel présenté est plus court ou plus long que le premier pour la condition temporelle. Pour les jugements sur la distance, les participants doivent estimer si la

distance entre le stimulus central et le stimulus de droite est plus grande ou plus courte que la distance entre le stimulus de gauche et le stimulus central. Les résultats obtenus

démontrent que les facteurs temps et espace ne sont pas jugés indépendamment l’un de l’autre. Collyer (1977) effectue une seconde expérience où la différence de durées entre les deux intervalles, temporels ou spatiaux, est plus grande, tout en conservant une durée totale de 160 ms et un angle visuel total de 4°. Les résultats de cette expérience confirment ceux de la première étude. Les jugements spatiaux ne sont pas indépendants des relations temporelles entre les stimuli et les jugements temporels ne sont pas indépendants des relations spatiales entre les marqueurs. Cependant, les effets tau et kappa ne sont pas observés systématiquement chez tous les participants. Ceci suggère que ces derniers utilisent des stratégies différentes pour combiner les informations temporelles et spatiales et que ces effets apparaissent seulement à l’intérieur d’une certaine étendue de durées.

Huang et Jones (1982) ont mené une expérience visant à établir les limites temporelles pour les effets tau et kappa. La tâche des participants est de déterminer lequel des deux intervalles présentés est le plus court. Selon les essais, les participants effectuent des jugements sur le temps ou sur la distance. Pour la première expérience, la durée totale des

deux intervalles temporels est de 160 ms et l’angle visuel total est de 4° comme dans l’étude de Collyer (1977). Les résultats obtenus révèlent que les effets tau et kappa ne sont pas observés de façon systématique chez tous les participants lorsque la durée totale des intervalles temporels est relativement brève (160 ms), ce qui appuie les résultats de Collyer (1977). De plus, Huang et Jones (1982) notent que les participants ont tendance à

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(effet tau). Dans la seconde expérience, la durée totale varie entre 160 et 1500 ms à chaque essai alors que l’angle visuel total est de 8°. Huang et Jones (1982) supposent que les jugements temporels sont plus faciles lorsque la durée totale augmente et que, par

conséquent, l’effet kappa devient de moins en moins marqué. Les résultats obtenus démontrent qu’une augmentation de la durée totale de deux intervalles temporels entraîne effectivement une diminution de la magnitude de l’effet kappa.

Lebensfeld et Wapner (1968) étudient les effets tau et kappa à l’aide de l’illusion de Muller-Lyer. Cette illusion consiste en la présentation de deux flèches, soit une avec des angles intérieurs (< >) et l’autre avec des angles extérieurs (> <). À valeurs égales, les participants jugent généralement la flèche avec des angles extérieurs plus longue que celle avec des angles intérieurs. Dans l’expérience de Lebensfeld et Wapner (1968), les deux flèches sont disposées côte à côte et trois signaux lumineux sont fixés sur les apex. Pour la moitié des essais, les participants doivent indiquer quelle distance est la plus longue, celle entre le premier et le second apex ou celle entre le deuxième et le troisième apex. Pour l’autre moitié des essais, les participants doivent indiquer lequel des deux intervalles temporels est le plus long. L’intervalle standard est d’une durée de 400 ms alors que la durée de l’intervalle de comparaison varie de 100 à 700 ms. Les résultats obtenus indiquent qu’il y a une interdépendance entre les facteurs temporels et spatiaux. Les résultats de cette étude démontrent aussi que l’opération simultanée des facteurs temporels et spatiaux affecte la distance apparente et la durée perçue.

L’étude 3 de Newman et Lee (1972) vérifie si la distance perçue par les participants est un facteur déterminant de l’effet kappa lorsque la distance physique entre les signaux demeure constante. Les participants sont placés en condition de vision monoculaire et trois stimuli lumineux sont disposés face à eux selon un plan horizontal. Le fait de placer les participants en condition de vision monoculaire réduit leur perception des indices de profondeur. Le premier signal lumineux est situé à proximité du participant alors que le troisième est éloigné. Un marqueur de bissection est placé à côté du second signal situé au centre. Deux surfaces sont utilisées, soit un fond blanc et un fond dont la texture est

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(effet de perspective linéaire). Les participants doivent effectuer des jugements sur la distance et sur le temps. Pour les jugements sur la distance, ils doivent déplacer le

marqueur de bissection à l’endroit qu’ils jugent être le point milieu physique entre le signal qui est près d’eux et celui qui est le plus éloigné. Pour les jugements sur le temps, leur tâche consiste à reproduire l’intervalle temporel présenté (9 à 10 s). Les résultats obtenus indiquent que les jugements temporels et spatiaux sont plus difficiles lorsqu’ils sont effectués sur le fond constitué de lignes. De même, !’utilisation de la perspective linéaire amplifie l’effet kappa. Ces résultats suggèrent que cet effet puisse être basé sur la distance apparente plutôt que sur la distance réelle entre les stimuli, ce qui appuie les résultats obtenus par Lebensfeld et Wapner (1968).

En résumé, les études citées rapportent que les effets tau et kappa sont des phénomènes qui ont été observés à plusieurs reprises et dans des conditions très variées. Selon Jones et Huang (1982), ces effets ne sont pas des artefacts dus à des méthodes psychophysiques particulières puisqu’ils ont été observés avec des jugements relatifs, catégoriels et avec des procédures de reproduction. Toutefois, il faut une durée d’au moins 160 ms pour qu’ils apparaissent et un intervalle de temps trop long masque ces effets.

Explications de l’effet kappa

Les résultats des études rapportées précédemment démontrent que la perception spatiale et la perception temporelle sont interreliées dans les modalités tactiles et visuelles. Les participants prennent en considération l’espace pour effectuer leurs jugements temporels et le temps pour estimer la distance entre les marqueurs. Certains auteurs (Cohen, Hansel & Sylvester, 1955; Huang & Jones, 1982; Myatani, 1984-85; Newman & Lee, 1972; Price- Williams, 1954) ont élaboré des hypothèses pour tenter d’expliquer l’effet kappa, c’est-à- dire l’influence de la composante spatiale sur les jugements temporels. L’hypothèse de l’illusion contextuelle et celle du mouvement induit sont présentées.

Hypothèse de l’illusion contextuelle. Les auteurs qui adoptent cette hypothèse

définissent l’effet kappa comme étant une illusion issue de la dépendance des jugements temporels sur !’information spatiale (particulièrement la distance) lorsque !’information

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temporelle est difficile à discriminer (Jones & Huang, 1982; Myatani, 1984-85). Selon cette perspective, le contexte est constitué des conditions temporelles et spatiales dans lesquelles les stimuli sont présentés (Myatani, 1984-85). Pour les jugements temporels, P information primaire est P information temporelle alors que P information secondaire est P information spatiale. Ainsi, la saillance du contexte dépend de la facilité avec laquelle P information primaire peut être discriminée lorsque les participants effectuent des jugements temporels (Jones & Huang, 1982). Selon Huang et Jones (1982), l’effet kappa

devrait être plus marqué lorsque la discrimination des indices primaires est plus difficile et que les participants doivent se baser presque uniquement sur P information secondaire pour effectuer leur estimation temporelle. Allan (1979) rapporte, en sa basant sur !’augmentation des fractions de Weber observées pour les courtes durées, que typiquement les jugements temporels sont plus difficiles lorsque les intervalles temporels à estimer sont de courts. Huang et Jones (1982) observent qu’une augmentation de la durée totale des deux intervalles temporels présentés entraîne une diminution de l’effet. Ce résultat appuie l’hypothèse de l’illusion contextuelle puisqu’une durée totale brève rend le contexte temporel moins apparent, ce qui oblige les participants à s’en remettre à !’information secondaire, soit les indices spatiaux, pour effectuer leurs jugements sur le temps. Toutefois, selon ces auteurs, une durée trop courte (moins de 160 ms) masque l’effet. Ceci signifie que si la durée totale des deux intervalles temporels est trop brève, l’effet kappa n’apparaît pas.

Myatani (1984-85) effectue une expérience similaire à celle de Huang et Jones (1982) afin de vérifier si effectivement les effets tau et kappa sont des illusions qui surviennent lorsque les jugements temporels et spatiaux basés sur Γinformation primaire sont difficiles. Myatani (1984-85) conclut que l’effet kappa est plus marqué lorsque la discrimination des informations primaires est difficile et que les participants doivent s’en remettre à

!’information secondaire pour effectuer leur jugement sur le temps. Par contre, l’effet tau n’est pas dépendant de la difficulté à discriminer !’information spatiale.

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Hypothèse du mouvement induit. Pour expliquer l’effet kappa, Price-Williams (1954) suggère que les participants induisent un mouvement à des stimuli statiques. Selon Jones et Huang (1982), le mouvement induit signifie que les participants basent leur décision sur la relation familière entre la distance, le temps et la vélocité moyenne lorsqu’ils doivent effectuer des intervalles temporels ou spatiaux ambigus.

Cohen et al. (1955) ont aussi avancé cette hypothèse pour expliquer leurs résultats. Ces derniers apportent une distinction lorsqu’ils utilisent le terme mouvement induit. Selon ces auteurs, l’expérience quotidienne fait en sorte que les objets préservent leur identité s’ils sont déplacés d’un endroit à un autre et ce, même si les indices visuels sont intermittents. Ainsi, si un objet est déplacé dans l’obscurité selon un plan horizontal et qu’il devient visible à trois endroits différents par l’observateur, il sera perçu, selon l’expérience commune, comme étant un seul objet qui se déplace et non pas comme étant différents objets ayant chacun leur propre existence. D’après Cohen et al. (1955), ce phénomène se produit aussi pour les stimuli lumineux présentés en laboratoire. Les participants perçoivent un seul objet se déplaçant dans l’espace plutôt que trois signaux visuels différents. Jones et Huang (1982) abondent dans le même sens. Selon ces auteurs, en imputant un mouvement uniforme à une exposition discontinue, les participants peuvent se former une attente du temps requis par l’objet pour traverser une distance fixe ou encore une attente de la distance que cet objet peut franchir en un temps donné.

Selon Cohen et al. (1955), les participants se basent sur leur expérience quotidienne lorsqu’ils doivent effectuer des jugements sur la distance et sur le temps. Les indices de gravité, appris tôt dans l’existence, amènent les individus à s’attendre à ce que les objets qui descendent accélèrent et ceux qui montent décélèrent. Suivant cette logique, l’effet kappa devrait être amplifié lorsque les stimuli sont présentés de haut en bas, diminuer lorsqu’ils sont présentés de bas en haut et être intermédiaire dans le plan horizontal (Cohen et al., 1955; Fraisse, 1963; Macar, 1980). Dans l’expérience de Cohen et al. (1955), les participants sont placés dans l’obscurité. Trois signaux lumineux s’allument

successivement l’un après l’autre. La tâche des participants est d’ajuster la durée du stimulus central de façon à ce que la durée de l’intervalle temporel formé par le premier et

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le deuxième stimulus apparaisse égale à celle de Γ intervalle de temps formé par le deuxième et le troisième stimulus. Dépendamment des essais, les signaux sont présentés verticalement ou horizontalement. La distance entre les stimuli varie d’essais en essais. Les résultats obtenus confirment l’hypothèse et montrent que l’effet kappa est moindre lorsque les stimuli sont présentés de bas en haut, maximum lorsqu’ils sont présentés de haut en bas et intermédiaire dans le plan horizontal.

L’étude 2 de Newman et Lee (1972) vérifie si l’effet kappa est amplifié lorsque les participants peuvent anticiper la séquence de présentation des stimuli. Ces auteurs étudient aussi l’influence de l’ordre de présentation des séquences. Ils présentent aux participants un intervalle temporel délimité par deux signaux visuels, soit dans le plan horizontal, soit dans le plan vertical. Les séquences sont présentées de gauche à droite, de droite à gauche, de bas en haut ou de haut en bas. La tâche des participants est de reproduire l’intervalle temporel (9 à 10 s) qui leur est présenté. Pour la moitié des essais, 1 ’ expérimentateur indique aux participants dans quel ordre seront présentés les signaux lumineux délimitant l’intervalle temporel à reproduire. Suivant les indices de gravité, les séquences présentées de haut en bas devraient être perçues plus rapides (plus courtes) par les participants que celles présentées de bas en haut. Les résultats obtenus démontrent que l’effet kappa est amplifié lorsque les participants peuvent anticiper l’ordre dans lequel les marqueurs vont être présentés, ce qui indique qu’avec des stimuli statiques, en l’absence de véritables indices de vélocité, la distance perçue est le facteur sur lequel les participants se basent pour effectuer leurs jugements temporels. De plus, les séquences descendantes (haut en bas) sont jugées plus courtes, c’est-à-dire plus rapides, que les séquences ascendantes (bas en haut), ce qui confirme l’hypothèse de l’expérience quotidienne émise par Cohen et al. (1955). Newman et Lee (1972) concluent que l’effet kappa est influencé essentiellement par des variables phénoménologiques et subjectives. Ces variables sont d’autant plus importantes quand les participants doivent effectuer des jugements sur le temps et que les indices objectifs sont limités.

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LA PRÉSENTE ÉTUDE

Le but général de cette recherche est de vérifier quelle est l’influence de la distance entre les marqueurs sur les jugements temporels lorsque les stimuli délimitant les intervalles sont statiques.

Dans cette expérience, trois signaux lumineux équidistants (Haut, Milieu, Bas) sont disposés face aux participants selon un plan vertical. Cependant, seulement des séquences de deux stimuli déterminent la durée des intervalles. L’étude se divise en deux parties. Dans la première partie, les participants doivent estimer la durée d’intervalles temporels présentés selon des séquences ascendantes (B-M, B-H et M-H). Dans la seconde partie, des séquences descendantes (M-B, H-B et H-M) sont présentées aux participants. Deux durées cibles sont utilisées, soit 160 et 320 ms.

Hypothèses

Plusieurs recherches indiquent qu’une augmentation de la distance entre les signaux entraîne une augmentation de la durée perçue (Cohen et al., 1953; Collyer, 1977; Helson & King, 1931; Lebensfeld &Wapner, 1968; Price-Williams, 1954). Dans cette étude, la distance entre les marqueurs du bas et du haut est le double de celle entre les autres marqueurs. Ainsi, pour les séries ascendantes, la durée des séquences B-H devrait être perçue plus longue que celle des séquences B-M et M-H. Cependant, bien que l’espace entre les signaux visuels soit le même pour les séquences B-H et H-B, les séquences H-B devraient être estimées plus courtes que les séquences H-M et M-B considérant l’influence de l’expérience quotidienne comme le rapportent Cohen et al. (1955) et Newman et Lee (1972). Ces auteurs concluent que les indices de gravité entraînent une augmentation de l’effet kappa lorsque les stimuli sont présentés suivant une séquence descendante (haut en bas) et une diminution lorsque les séquences sont ascendantes (bas en haut).

Selon Girgus et Coren (1975), la hauteur relative est l’indice de profondeur responsable de l’erreur de la bissection. Les résultats de leur étude démontrent que les participants surestiment la longueur du segment le plus bas comparativement à celle du plus haut lorsqu’ils doivent diviser une ligne verticale en deux segments qui leur paraissent égaux.

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L’effet est presque inexistant lorsque la ligne à diviser est présentée horizontalement et augmente proportionnellement à l’angle d’inclinaison. De plus, une augmentation de la longueur de la ligne à diviser provoque une amplification de l’erreur de la bissection. Ainsi, dans la présente étude, les séquences situées plus haut dans le champ visuel devraient être jugées plus longues que celles situées plus bas et ce, tant pour les séries ascendantes que pour les séries descendantes. Par conséquent, !’utilisation des séquences M-H et H-M devrait résulter en une plus longue durée perçue que !’utilisation des séquences B-M et M- B respectivement.

Certains auteurs définissent l’effet kappa comme étant une illusion issue de la dépendance des jugements temporels sur !’information spatiale lorsque !’information temporelle est difficilement discriminable (Huang & Jones, 1982; Jones & Huang, 1982, Myatani, 1984-85). L’information primaire est !’information temporelle et !’information secondaire est !’information spatiale. Selon cette perspective, l’effet kappa devrait être plus marqué lorsque la discrimination de !’information primaire est plus difficile et que les participants doivent baser leurs jugements presque exclusivement sur !’information secondaire (spatiale). L’information primaire devrait être plus difficile à discriminer et à interpréter lorsque la durée de l’intervalle est courte. Dans la présente étude, la prise en compte de l’espace devrait avoir plus d’impact à 160 qu’à 320 ms et ce, tant pour les séquences ascendantes que pour les séquences descendantes. Les participants devraient aussi obtenir une meilleure performance pour les intervalles de l’ordre de 320 ms que pour ceux de 160 ms.

MÉTHODE Participants

Vingt-quatre participants, âgés de 20 à 36 ans (moyenne = 23.21 ans), participent à l’expérience. Il s’agit d’étudiants volontaires de l’Université Laval. L’étude comporte quatre sessions d’environ 20 minutes pour une durée totale de 80 minutes. Les participants reçoivent une compensation monétaire de 5$ par session.

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Matériel

Le participant est assis dans une salle expérimentale où la lumière est tamisée. Une boîte reliée à l’ordinateur et contenant deux boutons est placée sur un bureau face à lui. Le bouton de gauche est utilisé pour répondre «court» et celui de droite pour répondre «long». Une lumière s’allume du côté de la bonne réponse pour donner une rétroaction au

participant 200 ms après chaque réponse. Des diodes circulaires rouges (LEDs : Radio- Shack # 276-088) sont utilisées pour délimiter les intervalles temporels. Les stimuli

s’allument pendant 20 ms et sont placés à environ 1 m du participant selon un plan vertical. Les signaux sont distancés de 25 cm entre eux et le stimulus du centre est placé face au participant, à la hauteur de ses yeux. L’angle visuel entre le participant et le marqueur central est de 0,57° alors que celui entre le participant et les stimuli du haut et du bas est de

14°. Les intervalles temporels à juger sont contrôlés par un ordinateur IBM.

Procédure

La procédure utilisée est celle du stimulus unique. Chaque essai consiste en la présentation d’un intervalle temporel délimité par deux diodes qui s’allument

successivement. La tâche du participant est de catégoriser l’intervalle temporel qui lui est présenté comme étant »court» ou «long» en appuyant sur le bouton approprié. Les

séquences qui sont présentées au participant sont les suivantes : B-M, B-H et M-H pour les séquences ascendantes et M-B, H-B et H-M pour les séquences descendantes. Les

marqueurs sont présentés sur un fond blanc uniforme pour empêcher que des indices de profondeur supplémentaires viennent perturber la performance des participants. Ces derniers sont placés en condition de vision binoculaire. Au début de l’expérience, les participants reçoivent la consigne de fixer la lumière au centre et de ne pas bouger les yeux.

Les durées de bases utilisées sont de l’ordre de 160 et de 320 ms. Pour la gamme de durées de 160 ms, les intervalles temporels sont d’une durée de 100, 124 et 148 ms pour la catégorie «court» et de 172, 196 et 220 ms pour la catégorie «long». Pour la gamme de durées de 320 ms, les intervalles sont de 200, 248 et 296 ms pour la catégorie «court» et de 344, 392 et 440 ms pour la catégorie «long». Une session expérimentale est divisée en quatre blocs. Le premier bloc consiste en 18 essais d’entraînement. Chaque durée est présentée trois fois aux participants. Après le bloc de pratique, trois blocs de 72 essais sont

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présentés aux participants pour un total de 234 essais par session. Les six conditions de hauteurs des marqueurs sont répétées 24 fois chacune. Entre chaque bloc, il y a une pause de 30 s. Les participants effectuent quatre sessions expérimentales, soit une séquence ascendante et une séquence descendante pour chacune des deux gammes de durées. Les conditions expérimentales sont contrebalancées entre les participants, c’est-à-dire que 12 participants débutent avec la gamme de durées de 160 ms et 12 avec celle de 320 ms. Parmi les 12 participants qui débutent avec la durée de 160 ms, six effectuent les jugements temporels sur les séquences ascendantes en premier alors que les six autres débutent avec les séquences descendantes. La même technique est utilisée pour les 12 participants qui commencent l’étude avec les durées de 320 ms.

Pour chaque participant et pour chacune des six hauteurs des marqueurs, une fonction psychométrique à six points est tracée. L’axe des « x » comporte les durées, de 100 à 220 ms pour la catégorie «court» et de 200 à 440 ms pour la catégorie «long», alors que l’axe des « y » indique le pourcentage de réponses «long». La fonction normale cumulative est ajustée à la courbe obtenue. Deux variables dépendantes sont extraites de chaque fonction, soit une pour la durée perçue et une pour le niveau de performance.

La présence d’un biais de réponse (tendance à répondre plus souvent «long») est mesurée à partir du point d’égalité subjective (PES). Le PES permet de calculer l’erreur constante (EC) qui représente la déviation de la durée estimée par le participant par rapport à la durée moyenne des gammes de durées utilisées dans l’étude. L’EC se calcule en soustrayant la durée temporelle perçue par le participant de la durée moyenne de la gamme de durées présentées. Ainsi, une EC positive indique que le participant perçoit les

intervalles temporels comme étant plus courts que leurs durées réelles. A l’inverse, une erreur constante négative signifie que le participant surestime la durée des intervalles temporels. La deuxième variable dépendante est le seuil différentiel qui est la plus petite différence nécessaire à la discrimination de deux intervalles temporels. Le seuil différentiel permet de mesurer la performance des participants. Plus le seuil différentiel est petit, meilleure est la performance du participant. Les variables indépendantes à l’étude sont l’ordre de durées (160 et 320 ms) et la distance entre les marqueurs (B-M, B-H, M-H, M-B, H-B et H-M).

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RÉSULTATS

Les résultats sont analysés séparément pour les séquences ascendantes et descendantes. La moyenne et T erreur-type de TEC pour chacune des trois hauteurs des marqueurs et les deux durées sont présentées au tableau 1 pour les séquences ascendantes et au tableau 2 pour séquences descendantes. La moyenne et l’erreur-type du seuil différentiel pour les trois hauteurs des marqueurs et les deux durées sont présentées au tableau 3 pour les séquences ascendantes et au tableau 4 pour les séquences descendantes.

Insérer tableaux 1 à 4

Pour les séquences ascendantes, les données sont analysées à l’aide de deux ANOVA 2

X 3 à mesures répétées, soit une pour TEC et une pour le seuil différentiel. Pour l’EC, VANOVA montre un effet significatif de la durée F(l,23) = 6.99, p_< .05, ce qui indique que la moyenne des EC est plus grande pour les durées de l’ordre 160 ms que pour celles de 320 ms. L’effet principal de la hauteur des marqueurs est significatif aussi F(2,46) = 6.72, p_< .01. L’interaction entre la durée et la hauteur des marqueurs n’est pas significative F(2,46) = 1.38, p_= .26. Un test a posteriori de Tukey montre que les séquences B-H sont jugés significativement plus courtes que les séquences B-M et M-H. Les moyennes des EC

des séquences B-M et M-H ne sont pas significativement différentes. La figure 1 illustre ces résultats.

Insérer figure 1

Pour le seuil différentiel, VANOVA ne démontre aucun effet significatif de la durée F( 1,23) = 0.51, p_= .48 et de la hauteur des marqueurs F(2,46) = 0.40, p_= .67. Une analyse visuelle de la figure 2 suggère une interaction entre les séquences M-H et B-H et entre les séquences M-H et B-M, mais cette interaction n’est pas significative F(2,46) = 1.60, p_=

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Les fractions de Weber obtenues sont de 43% pour la gamme de durées de 160 ms et de 23% pour celle de 320 ms. Ces résultats sont conformes à ce qui est prédit par la forme généralisée de la loi de Weber.

Pour les séquences descendantes, les données sont également analysées à l’aide de deux ANOVA 2 X 3 à mesures répétées, soit une pour l’EC et une pour le seuil différentiel. Pour l’EC, l’ANOVA montre un effet principal significatif pour la durée F(1,23) = 32.43, p_< .01, ce qui indique que la moyenne des EC est plus grande pour la gamme de durées de 160 ms que pour celle de 320 ms. L’effet principal de la hauteur des marqueurs est aussi

significatif F(2,46) = 15.14, p_< .01. L’interaction entre la durée et la hauteur des

marqueurs n’est pas significative F(2,46) =1.14, p_= .33. Une analyse a posteriori de Tukey indique que les intervalles H-B sont jugés plus courts que les intervalles H-M et M-B. Les moyennes des EC des séquences H-M et M-B ne sont pas significativement différentes. La figure 3 illustre ces résultats.

Insérer figure 3

Pour le seuil différentiel, VANOVA montre un effet principal significatif pour la durée F(l,23) = 7.15, p_< .05, ce qui indique que les participants obtiennent une meilleure performance lorsqu’ils estiment les durées de l’ordre de 160 ms comparativement à celles de 320 ms. L’effet principal de la hauteur des marqueurs est significatif aussi F(2,46) = 6.08, p < .01. Les fractions de Weber obtenues sont de 37% pour les durées de l’ordre de 160 ms et de 22% pour celles de 320 ms. Comme pour les séquences ascendantes, les fractions sont conformes à ce qui est prédit par la loi de Weber généralisée. L’interaction entre la durée et la hauteur des marqueurs n’est pas significative F(2,46) = 1.75, p = .19. Un test a posteriori de Tukey montre que les séquences M-B sont plus facilement discriminées que les séquences H-M. La figure 4 illustre ces résultats.

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DISCUSSION

Le but de cette étude est de vérifier quelle est l’influence de la distance entre les marqueurs sur les jugements temporels lorsque les stimuli délimitant les intervalles sont statiques.

EC pour les séquences ascendantes

Plusieurs études rapportent qu’une augmentation de la distance entre les marqueurs entraîne une augmentation de la durée perçue (Bill & Teft, 1969; Cohen et al., 1953; Collyer, 1977; Helson & King, 1931; Lebensfeld & Wapner, 1968; Newman & Lee, 1972; Price-Williams, 1954). Il est attendu dans cette expérience que !’utilisation des séquences B-H résulte en une durée perçue plus longue que !’utilisation des séquences M-H et B-M puisque la distance entre les marqueurs du bas et du haut est le double de celle entre les marqueurs des autres séquences. Les résultats obtenus indiquent que les séquences B-H sont jugées plus courtes que les séquences B-M et M-H, ce qui est en contradiction avec l’hypothèse de départ.

Selon Huang et Jones (1982), les participants utilisent des stratégies individuelles différentes pour intégrer les informations temporelles et spatiales. Macar (1980) abonde dans le même sens. Selon Macar (1980), la vitesse doit être ajoutée à !’interaction espace- temps car ces trois facteurs sont interdépendants. Il n’y aurait pas de facteur prépondérant. L’importance de chaque facteur varie selon le contexte et selon les individus car certains participants accordent plus de poids à la durée, d’autres à la distance et d’autres à la vitesse Les mécanismes qui guident ces choix perceptifs sont encore méconnus. Dans cette étude, il est possible que !’interaction espace-temps-vitesse influence les jugements des

participants. Les intervalles temporels à estimer sont courts, ce qui peut amener les participants à percevoir l’intervalle de temps comme étant très rapide. Brown (1931) rapporte que plus la vitesse apparente entre les stimuli est grande, plus le temps paraît court. Dans la présente expérience, les participants voient les deux marqueurs s’allumer successivement, mais ne perçoivent peut-être pas l’intervalle temporel entre la fin de l’émission du premier signal et le début du second. De plus, la distance entre les marqueurs de la séquence B-H (50 cm) est plus grande que celle entre les signaux des séquences B-M

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et M-H (25 cm). Les participants sont conscients que les marqueurs B-H sont plus distancés dans l’espace. Ainsi, ils jugeraient de la vitesse plutôt que du temps et compenseraient pour la plus grande distance entre les signaux de la séquence B-H en jugeant l’intervalle plus court. Jones et Huang (1982) rapportent que les participants

peuvent se former une attente du temps requis par un objet pour traverser une distance fixe. Au rapport verbal, certains participants rapportaient faire un plus grand nombre d’erreurs lors de la présentation des intervalles temporels délimités par les stimuli du haut et du bas. Selon ces participants, l’intervalle de temps entre les signaux paraissait court puisque les deux signaux s’allumaient successivement alors que la distance entre les marqueurs était grande.

Les processus attentionnels impliqués dans le traitement temporel pourraient aussi expliquer ces résultats. Grondin et Macar (1992) et Macar, Grondin et Casini (1994) rapportent que la durée, lors d’une tâche de discrimination temporelle, est estimée plus courte par les participants lorsque !’attention est détournée du temps par une tâche non temporelle devant être accomplie en parallèle. Ces auteurs proposent une explication de leurs résultats basée sur le fonctionnement d’une l’horloge interne. L’hypothèse de l’existence d’une horloge interne permettant d’estimer le temps est généralement admise dans le domaine de la psychophysique du temps (Allan, 1979; Allan & Kristofferson, 1974; Fetterman & Killeen, 1990; Grondin, 1992; 1993; 1998; sous presse; Grondin & Macar,

1992; Macar et al., 1994; Rammsayer, 1994). Cette horloge comporte un émetteur, un interrupteur et un accumulateur. L’émetteur produit des pulsations et le nombre de pulsations emmagasinées dans l’accumulateur permet d’estimer la durée. Lors de la présentation d’un intervalle temporel, l’interrupteur détermine le taux de transmission des pulsations de l’émetteur à l’accumulateur. Plus le nombre de pulsations dans

l’accumulateur est grand, plus longue est la durée perçue. Le fonctionnement de

l’interrupteur est sous le contrôle de !’attention. Selon Grondin et Macar (1992) et Macar et al. (1994), il y a une perte de pulsations lorsque moins d’attention est accordée à

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Dans la présente étude, les participants doivent fixer le stimulus central. Les marqueurs délimitant les intervalles B-H et H-B sont situés aux extrémités inférieures et supérieures du champ visuel. Les participants ignorent l’ordre de présentation des séquences

temporelles. L’utilisation des séquences délimitées par les stimuli du haut et du bas a pu occasionner un plus grand déplacement de !’attention comparativement aux séquences délimitées par les stimuli du centre et du bas. Or, un plus grand déplacement de !’attention d’un signal sensoriel à un autre diminue probablement !’attention accordée au temps. Ceci résulterait en une perte de pulsations lors de la présentation d’un intervalle donné, d’où une durée perçue plus courte.

EC pour les séquences descendantes

L’influence de la distance entre les signaux ne devrait pas s’appliquer pour les séquences H-B considérant l’impact de l’expérience quotidienne sur l’effet kappa. Les indices de gravité, appris tôt dans l’enfance, amènent les individus à s’attendre à une accélération des objets qui descendent et à une décélération de ceux qui montent (Cohen et al., 1955; Fraisse, 1963; Macar, 1980; Newman & Lee, 1972). Ces auteurs rapportent que l’effet kappa est maximum avec des séquences descendantes et minimum avec des

séquences ascendantes. Les résultats de Newman et Lee (1972) démontrent que la loi de la gravité peut s’appliquer à l’effet kappa. Par conséquent, dans la présente étude, les

séquences H-B devraient être estimées plus courtes que les séquences H-M et M-B. Les résultats obtenus confirment cette hypothèse.

L’hypothèse de l’expérience quotidienne peut expliquer les résultats seulement pour les séquences descendantes. Les résultats obtenus dans cette expérience montrent que plus il y a d’espace entre les marqueurs, plus la durée de l’intervalle temporel est perçue courte par les participants avec des gammes de durées de 160 et de 320 ms. Cependant, les séquences ascendantes et descendantes n’ont pas été comparées entre elles, ce qui limite

!’interprétation des résultats. Newman et Lee (1972) observent qu’avec des intervalles de 9 à 10 s, les séquences descendantes sont jugées plus courtes que les séquences ascendantes. Les gammes de durées utilisées diffèrent considérablement entre les deux études. Il serait intéressant dans une étude subséquente de comparer ces séquences entre elles. Une étendue

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de durées à l’intérieur de laquelle il n’y a pas de différences de durées perçues entre les séquences ascendantes et descendantes pourrait exister. De plus, l’hypothèse de

l’expérience quotidienne pourrait être valide seulement pour des gammes de durées que les participants utilisent dans leur vie de tous les jours et avec lesquelles ils sont familiers, telles les secondes.

EC pour la hauteur relative

La hauteur relative est un phénomène perceptif bien connu selon lequel les objets situés plus haut dans le champ visuel sont perçus comme étant plus loin. Ainsi, la hauteur relative est un indice de profondeur qui influence la perception des participants. Girgus et Coren (1975) rapportent que les participants surestiment la longueur du segment le plus haut dans le champ visuel par rapport au plus bas lorsqu’ils divisent une ligne verticale en deux segments qui leur paraissent égaux. Il est attendu dans cette étude que les séquences qui sont situées plus haut dans le champ visuel soient perçues plus longues. Pour les séries ascendantes, les séquences M-H devraient être perçues plus longues que les séquences B- M. Pour séries descendantes, !’utilisation des séquences H-M devrait résulter en une plus longue durée perçue que !’utilisation des séquences M-B.

Les résultats de la présente étude montrent que les séquences M-H et H-M ne sont pas perçues comme étant plus longues que les séquences B-M et M-B respectivement. L’effet très fort observé pour les séquences B-H et H-B a pu masquer l’impact de la hauteur relative. Ainsi, il est possible que les participants, étant tellement centrés sur l’impact de la distance entre les stimuli, aient été moins influencés par la hauteur relative. La condition de vision binoculaire dans laquelle les participants sont placés peut aussi expliquer ces

résultats. Une vision binoculaire augmente la précision de la perception des indices de profondeur. Les participants disposent ainsi d’indices supplémentaires, comme la convergence binoculaire, pour estimer la distance à laquelle se trouvent les stimuli. Prinzmetal et Gettleman (1993) observent que la magnitude de l’illusion de l’horizontale- verticale et de celle de Muller-Lyer est considérablement réduite lorsque les participants doivent effectuer leurs jugements en condition de vision binoculaire. Le fait d’effectuer des

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jugements temporels avec les deux yeux plutôt qu’avec un seul oeil a pu amener les participants à ne pas être influencés par la hauteur relative.

EC en fonction de la durée

Il est attendu dans cette étude que la prise en compte de la distance ait plus d’impact à 160 qu’à 320 ms puisque les jugements temporels sont plus difficiles avec des durées plus courtes. Les résultats obtenus confirment l’hypothèse. L’effet de la prise en compte de la distance est plus marqué à 160 qu’à 320 ms et ce, tant pour les séquences ascendantes que pour les séquences descendantes. Ces résultats convergent avec ceux obtenus par Huang et Jones (1982) qui montrent qu’une augmentation de la durée entraîne une diminution de l’effet kappa. De plus, ces auteurs ont observé un effet kappa plus marqué à 160 ms. À 160 ms, la durée est courte et les participants perçoivent peut-être plus difficilement l’intervalle temporel entre l’illumination successive des deux signaux, ce qui les amène à se fier

presque exclusivement à !’information spatiale pour effectuer leurs jugements. Les fractions de Weber obtenues montrent que la variabilité entre le temps perçu et le temps réel est plus grande à 160 ms (43% pour les séquences ascendantes et 37% pour les séquences descendantes) qu’à 320 ms (23% pour les séquences ascendantes et 22% pour les séquences descendantes). Par contre, à 320 ms, la pause entre les deux signaux lumineux est plus facilement perceptible. Par conséquent, à 320 ms, les participants peuvent effectuer leurs jugements temporels en prenant en considération !’information spatiale et !’information temporelle qui est plus facilement discriminable comme le stipule l’hypothèse de l’illusion contextuelle (Huang & Jones, 1982; Jones & Huang, 1982; Myatani, 1984-85).

Seuil différentiel pour les séquences ascendantes

Il est attendu dans cette expérience que les participants obtiennent une meilleure performance à 320 ms qu’à 160 ms considérant l’hypothèse de l’illusion contextuelle (Huang & Jones, 1982; Myatani, 1984-85). Les résultats obtenus n’indiquent aucune différence significative entre la moyenne des seuils différentiels pour les trois distances entre les marqueurs et ce, tant à 160 qu’à 320 ms. Ceci indique que les participants ont le

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même niveau de performance pour les trois séquences présentées (B-M, B-H et M-H) peu importe la durée.

Les fractions de Weber obtenus sont de 43% pour les durées de l'ordre de 160 ms et de 23% pour celles de 320 ms, ce qui montre que la loi de Weber dans sa forme simple ne s’applique pas. Ces résultats sont plutôt en accord avec la forme généralisée de la loi de Weber qui a été confirmée à plusieurs reprises (Allan & Kristofferson, 1974; Killeen & Weiss, 1987). Ces fractions sont conformes avec celles généralement obtenues dans la modalité visuelle avec le même type d’intervalle (Grondin, 1993; Rousseau, Poirier & Lemyre, 1983) et en condition d’intermodalité (Grondin, 1996; Grondin, Ivry, Franz, Perreault & Metthé, 1996). Une condition d’intermodalité implique que les deux stimuli utilisés pour délimiter les intervalles temporels à estimer font appel à des modalités

sensorielles différentes. Le fait de présenter les signaux lumineux à différents endroits dans le champ visuel, comme c’est le cas dans la présente étude, requiert probablement un déplacement de !’attention qui rappelle celui qui est sans doute requis en condition

d’intermodalité. Ainsi, à 50 ms Grondin (1993) rapporte des fractions de 22,6%. Pour une gamme de durées de 250 ms, les fractions obtenues sont de 22,6% (Grondin, 1993), 25,2% (Grondin et al., 1996), 28,8% (Grondin, 1996) et de 22,9% (Rousseau, Poirier & Lemyre, 1983). Les fractions de Weber obtenues dans cette étude apportent un appui supplémentaire à la supériorité de la loi de Weber généralisée sur la forme simple.

Seuil différentiel pour les séquences descendantes

Dans cette étude, la performance de discrimination temporelle des participants devrait être supérieure à 320 ms qu’à 160 ms. Les résultats obtenus montrent que les participants obtiennent une meilleure performance à 160 ms qu’à 320 ms, ce qui est en contradiction avec l’hypothèse. Les fractions de Weber obtenues sont de 37% pour la gamme de durées de 160 ms et de 22% pour celle de 320 ms. Ces rapports sont semblables à ceux rapportés pour les séquences ascendantes et sont conformes à ce qui est prédit par la loi de Weber généralisée. De plus, les fractions obtenues convergent avec ce que les auteurs observent généralement avec ce type de présentation d’intervalles dans la modalité visuelle et en condition d’intermodalité (Grondin, 1993; 1996; Grondin et al., 1996; Rousseau et al., 1983).

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Les résultats obtenus démontrent aussi que les participants obtiennent une meilleure performance lorsqu’ils doivent estimer la durée des séquences M-B plutôt que celle des séquences H-M. Ces résultats indiquent que les participants estiment avec plus de difficulté ce qui est plus haut dans le champ visuel. Encore une fois, les processus attentionnels impliqués dans le traitement temporel peuvent possiblement expliquer ces résultats. Selon Grondin et Macar (1992) et Macar et al. (1994) les participants discriminent avec moins d’exactitude les intervalles de temps lorsque !’attention est déviée de la tâche temporelle à accomplir. Au début de chaque essai, les participants devant fixer le stimulus central, un déplacement attentionnel plus important se produit pour les séquences H-M que pour les séquences M-B. Lors de la présentation des séquences H-M, !’attention est dirigée vers le stimulus du haut lorsqu’il s’allume puis revient vers le bas lorsque le second stimulus s’illumine. Pour les séquences M-B le déplacement attentionnel se produit seulement lors de la présentation du deuxième signal lumineux car les participants fixent déjà le stimulus central au début de la séquence.

Recommandations

Dans une étude subséquente, la distance physique entre les stimuli devrait varier tout en gardant les mêmes gammes de durées. Ceci permettrait de vérifier si un allongement de la distance réelle entre les stimuli entraîne une augmentation de la durée perçue comme le stipule l’effet kappa avec des stimuli disposés selon un plan vertical. Il serait aussi

intéressant d’inclure une condition de vision monoculaire, ce qui réduirait la précision de la perception des indices visuels de profondeur des participants et permettrait ainsi

d’augmenter l’effet de la distance entre les stimuli et celui de la hauteur relative.

D’autres études devraient aussi créer une impression de profondeur plus marquée afin de vérifier jusqu’à quel point cet indice affecte les jugements temporels. Π est possible de créer des impressions de profondeur en décalant le marqueur du milieu de celui du bas et en décalant encore plus celui du haut de celui du milieu. De plus, lors de certains essais, des paysages représentant des scènes naturelles pourraient constituer le fond du champ visuel, ce qui augmenterait l’impression de profondeur créée par l’éloignement des stimuli.

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La force de l’effet des séquences B-H et H-B a pu masquer l’impact de la hauteur relative. Ainsi, une prochaine étude devrait étudier l’impact de la hauteur relative en comparant seulement les séquences M-H et H-M avec les séquences B-M et M-B

respectivement. Il serait aussi pertinent d’effectuer une étude en comparant les séquences B-H et H-B, afin de vérifier si les résultats obtenus par Newman et Lee (1972), avec des durées familières aux participants (9 à 10 s), s’applique aussi aux durées de moins d’une seconde. Les résultats obtenus par ces auteurs indiquent que les séquences descendantes sont perçues plus courtes que les séquences ascendantes, ce qui confirme l’hypothèse de l’expérience quotidienne émise par Cohen et al. (1955).

Ces améliorations pourraient amener les chercheurs à mieux comprendre !’influence de la troisième dimension, soit la profondeur, sur l’estimation temporelle et permettre de délimiter des bornes temporelles à l’intérieur desquelles la prise en compte de l’espace influence davantage les jugements sur le temps.

CONCLUSION GÉNÉRALE

Cette recherche a permis d’étudier de quelle est l’influence de la distance entre les marqueurs sur les jugements temporels lorsque les stimuli délimitant les intervalles temporels sont statiques. Les résultats obtenus montrent que plus il y a d’espace entre les marqueurs, plus l’intervalle temporel est jugé court, ce qui est contraire à l’effet kappa. Généralement, les expériences sur cet effet rapportent qu’une augmentation de la distance entre les signaux entraîne une augmentation de la durée perçue (Bill & Tefi, 1969; Cohen et al., 1953; Collyer, 1977; Helson & King, 1931; Huang & Jones, 1982; Lechelt &

Bochert, 1977; Lebensfeld & Wapner, 1968; Newman & Lee, 1972; Price-Williams, 1954; Suto, 1955). Il est possible que les participants jugent de la vitesse plutôt que du temps. L’hypothèse de l’expérience quotidienne (Cohen et al, 1955; Newman et Lee, 1972) peut expliquer les résultats obtenus pour les séquences descendantes seulement. De plus, l’impact de la hauteur relative a pu être amoindri par l’effet très fort observé pour les séquences B-H et H-B et par la condition de vision binoculaire. Des études subséquentes devraient utiliser seulement les séquences M-H, B-M, H-M et M-B et placer les

Figure

Figure 2. Moyenne des seuils différentiels (ms) en fonction de la durée (160 et 320 ms) et de la hauteur des marqueurs (B-M, B-H et  M-H)Seuildifférentiel(ms)
Figure 3. Moyenne des erreurs constantes (ms) en fonction de la durée (160 et 320 ms) et de la hauteur des marqueurs (H-M H-B et

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