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Recension Debuyst, Frédéric, L'entrée en liturgie. Introduction à l'oeuvre liturgique de Romano Guardini (Paris, Cerf, 2008, 126 p.)

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Texte intégral

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1 Recension

Bulletin de Littérature Ecclésiastique, 111/4 (2010), p.445-446

Frédéric Debuyst, L’Entrée en liturgie. Introduction à l’œuvre liturgique de Romano Guardini, Paris, Cerf, 2008, 127 p.

Qu’est que la célébration des Saints Mystères ? Quelle est la valeur des signes sacrés ? La liturgie n’est pas l’organisme très nécessaire par ailleurs des rubriques et des moyens techniques de leur mise en œuvre, elle est la prière publique d’un peuple sacerdotal. Elle est la célébration d’un échange où le Dieu paternel touche l’homme fraternel par l’Homme filial. La liturgie est au sens large un culte public, au sens chrétien, un acte de la Trinité dans lequel prend corps l’humanité assumée. Par la liturgie, le développement humain ne se conçoit que dans le mouvement de son mystère, et ce mouvement est une unification non plus seulement individuelle, mais personnelle, non plus seulement personnelle mais mystique. Non seulement elle m’identifie, mais encore elle me construit, et ce faisant, en m’unissant à Dieu, en me faisant participer à Sa vie. En écrivant Vom Geist der Liturgie, paru à Pâques de l’année 1918, le jeune Romano Guardini (1885-1968) éprouvait frontalement la logique de l’humanisme athée où se jouait le destin de l’Europe, bien plus qu’il ne dénonçait la sclérose incontestable des rites antiques de l’Eglise. Il fut surpris par le succès immédiat de son opuscule, qui, à l’origine, n’était pas destiné à être publié, rassemblant quelques réflexions sur la liturgie sous une forme épistolaire. Le Père Molhberg, bénédictin de l’abbaye de Maria Laach, touché par ces lettres, les avait transmises à l’Abbé, le Père Herwegen qui, enthousiaste, avait décidé d’en faire le premier volume d’une série d’études sur la liturgie que l’abbaye, devenue à cette époque le centre du Mouvement liturgique, projetait de publier (Ecclesia Orans).

La pensée de Romano Guardini est indissociable de ce Mouvement liturgique inauguré par les travaux de Dom Prosper Guéranger commencés en 1833 puis diffusés dans le monde des abbayes bénédictines avant de sortir du cloître au début du XXe siècle. Ce livre aussi remarquable

que bref du Père Debuyst montre le détour de la pensée liturgique par les mouvements de jeunesse. Il fallut attendre l’œuvre des Papes, saint Pie X d’abord, Pie XII avec l’encyclique Mediator Dei (1947) et la réforme de la Semaine Sainte, Jean XXIII avec la constitution sur la liturgie Sacrosanctum Concilium (1962) et Paul VI avec la réforme des livres liturgiques, pour que trente à quarante ans plus tard, dans un contexte culturel et spirituel différent, les expériences de l’entre-deux-Guerres pussent gagner les paroisses sous une forme encore inédite. Ce livre raconte l’aventure humaine d’un maître spirituel et d’un pasteur d’âmes au service de la jeunesse.

Les temps requéraient un recentrement, un retour du christianisme sur lui-même, à sa phénoménalité première qu’est sa prière, lorsque des Chrétiens représentent, constitués en corps mystique, l’âme collective de l’Eglise dans leurs âmes. Il s’agissait de s’éloigner d’un culte abstrait rendu à un Dieu lointain, de retrouver l’expérience de Sa présence à travers la représentation des choses saintes et de se laisser sanctifier par Lui à travers elles. Romano Guardini a vulgarisé par l’écrit ce dont il s’est fait le pasteur et le maître d’œuvre. Elles sont émouvantes les pages que le Père Debuyst consacre à Rothenfels et au Quickborn au point qu’on aurait aimé partager ces moments et ces espoirs interrompus par les Nazis en 1939 lorsqu’ils fermèrent le château. Comment ne pas y saisir plein de reconnaissance la coprésence qui s’y éprouve entre le temps et l’éternité et percevoir dans ces mots de Guardini la véritable mesure de la liturgie : « La vie du Seigneur est « aeviéternelle », c’est-à-dire coexistente à l’histoire de tous les temps » (p. 79) ?

A la lecture de ce récit et de cette aventure humaine et pastorale, on est persuadé que si la chose se tient par-delà le mot, l’Esprit se tient sous la chose, et que la liturgie, avant que de mots, est affaire d’Esprit. Il n’est pas ce qui s’oppose à la lettre, il est ce qu’on oppose au corps comme

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2 matérialité sans vie. L’Esprit est une propriété de la lettre par laquelle elle renvoie à une expérience authentique, à une totalité concrète. Comme l’écrit le cardinal Ratzinger dans l’avant-propos à son Esprit de la Liturgie paru en l’an 2000, Guardini « ouvrit le chemin à une célébration de la liturgie « plus substantielle », pour reprendre une expression chère à Guardini. Grâce à une meilleure compréhension de sa forme intérieure et de ses exigences, on réapprit à voir dans la liturgie la prière de l’Eglise, mue et dirigée par le Saint-Esprit lui-même, prière dans laquelle le Christ nous est rendu présent, de façon constante et renouvelée, et par laquelle il entre dans notre vie. » (Joseph Ratizinger, L’Esprit de la litrugie, Genève, Ad Solem, 2001, p.9).

Son caractère plus descriptif et narratif que systématique ne nuit pas à cette introduction du Père Debuyst. Elle met au jour de merveilleuses archives qui redonnent toute sa saveur et toutes ses couleurs à son sujet, elle lui rend une forme concrète, en montrant que la réforme liturgique ne se tient pas seulement en une réforme positiviste des livres sacrés, mais qu’elle est née d’une redécouverte et d’une expérience collective, de ce que le Père de Montcheuil aurait appelé un « rapport intérieur » à l’Eglise. Ce livre n’a pas seulement un intérêt historique en nous permettant de revenir aux sources expérimentales du Mouvement liturgique, il a un intérêt actuel, en nous montrant que les querelles liturgiques présentes s’intéressent peu aux fondamentaux et beaucoup aux accessoires et négligent à la fois la corporéité des signes et la spiritualité des significations. Les uns vivent la liturgie comme une mécanique du moindre effort qui exonère de la nécessité de se dépasser soi-même et de disparaître dans l’édification d’une âme et d’un corps collectifs, les autres imposent des genres et des beautés factices à la façon dont les sectes organisent l’auto-célébration du groupe. Ce livre invite à retrouver le caractère simple de la sanctification sans lequel il n’y a ni fidélité ni progrès.

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