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Le langage de Giono dans ses premières oeuvres.

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Academic year: 2021

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Texte intégral

(1)

TITLE :

LE LANGAGE D:r~ GIONO DANS SES PRlDr.lIERES OEUVRES.

Name of Author

(2)

LE LANGAGE DE GIONO

DANS SES PREMIERES--OEUVRES

Pagis

I}e.('olim~t.o;-fa!"' t.he degr8E: ûf lilas ter :Jf'i\.rts.

Departrr..en t of Frencb I.J;mgu.2.ge and Literature,

McGill 1Jniv€rsity,

Montreal.

~ Pagis Gero1imatos 1967

(3)

TABLE DES MATIERES Introduction

.

.

1

l - LA MORPHOLOGIE L'article

7

Le Substantif

.

12

Le l\Tom Pronre

14

L'Adjectif Qualificatif

15

La Transposition

.

21

Le Verbe

.

. .

. ·

23

L'Adverbe

27

Le Démonstratif

. .

29

Lea Possessifs

.

30

La Conjonction "que"

. .

· .

31

Les Diminutifs

33

Les Augmentatifs

35

II - LE VOCABULAIRE Les Végétaux

.

38

Les Travaux Agricoles

40

.~

La Toponymie

.

43

Les Archaïsmes

. . .

.

.

. .

.

44

Le Vocabulaire Argotique

·

47

Les Vocables Campagnards

·

. . ·

50

Le Vocabulaire Provençal

·

.

.

. .

52

(4)

)

III - LA SYNTAXE La Prononciation La Négation Les Explétifs

. . .

L'Interjection Les Onomatopées La Méthode d'Intensification •• L'Accumulation. Le Chésisme

.

. .

. .

.

.

L'Interrogation IV - L'IMAGE La Concrétisation de l'Abstrait Les Comparaisons • • • • •

. . . .

.

.

. .

.

56

60

62

63

64

66

69 71 61 82 74

Les Images de la Natul1e(~et les Personnifications 77

(5)
(6)

l

Jean Giono naquit en

1895

à Manosque, dans les Basses-Alpes. Son grand-père paternel, Jean-Baptiste Giono, était un anarchiste piémontais - un Carbonaro - qui avait fui l'Italie pour échapper

à

une condamnation politique. Antoine-Jean Giono, le père de l'autf'lUr, avait hérité des idées libérales du Carbonaro, sans toutefois être porté à la violence; bien au contraire, d'une douceur et d'un altruisme quasi évangéliques, il hébergeait, con-seillait et aidait les réfugiés politiques et tous ceux qui se présentaient à sa porte en quête de secours. Sa femme Pauline, Picarde d'origine, discrète et dévouée, partagea sa grande affec-tion entre son mari et sor- fils unique Jean.

Giono fut un enfant de vieillesse. Quand il naquit, son père avait dépassé la cinquantaine. Depuis sa naissance sa famille habitait, en location, une maison

à

Manosque "immense, humide et noire ••• les vieilles poutres gémissaient à longueur de

jour et de nuit". Sa mère gagnait trente à quarante francs par mois avec son ateli,er de repassage. Son père en gagnait à peu près autant

à

faire des souliers et à les raccommoder, usant patiemment ses dernières forces pour subvenir aux besoins de sa famille. C'est pourquoi, à seize ans, quoique très doué pour les études, Giono quitta le collège pour entrer au Comptoir National

d'Es-compte de Manosque en qualité de commis-chasseur. Il devait rester employé fidèle de la banque pendant dix-sept ans. Durant cette

(7)

2

période Giono partit pour la guerre, se maria, eut un enfant et publia sous un pseudonyme ses premiers vers intitulés "Accompa-gnés de la flûte".

Giono doit sa première éducation littéraire à son père qui lui lisait la Bible tous les soirs, beaucoup moins comme un livre sacré que comme un magnifique poême. Quant à sa seconde

éducation littéraire, il semble la devoir à sa pauvreté. En effet, son salaire dérisoire limita le choix de ses lectures. Par la force des choses, il dut laisser à l'écart les auteurs en vogue de son époque - Gide et Proust en particulier - et se contenter des Classiques ••• à cinquante centimes ••• dans les petites éditions Garnier. Ceux qui l'ont donc formé s'appellèrit Homère, Stendhal, Virgile, Shakespeare, Dostoievski, Kipling. A vingt ans il possédait déjà une collection classique de plus de cent volumes, bibliothèque impressionnante pour Manosque.

Ce n'est que vers la trentaine que Jean Giono composa son premier roman "Naissance de l'Odyssée" malicieuse fantaisie mythologique Ott l'auteur ressuscite, sans jamais pla-gier, "l'atmosphère de la vieille légende". Bien que ce premier ouvrage eût été rejeté par l'éditeur Grasset, Giono ne se décou-ragea pas. Quelques mois plus tard, la revue Commerce acceptait de publier son second roman "Colline" qui connut un succès im-médiat, surtout grâce à la critique élogieuse de Gide qui

"-)

(8)

3

annonça par tout Paris qU'un "nouveau Virgile en prose" venait de naître. Cette oeuvre assure d'ores et déjà à Giono une place d'honneur dans la littérature française. Soixante-quatre autres ouvrages majeurs allaient suivre durant le cours des années.

A soixante-douze ans, Giono continue d'écrire activement. En Janvier

1967,

quelques semaines seulement avant l'achèvement de cette étude, le Figaro Littéraire publiait un remarquable petit article intitulé "Sommeil" où l'auteur de Colline illustre, une fois de plus, ses conceptions de la vie et de la nature, telles qu'il les exprimait dans ses premiers romans.

La joie ne devrait pas être une espèce de compen-sation pour les malheurs et les injustices de la vie; elle devrait être le synonyme même de la vie

"Depuis qu'on a commencé à bâtir des maisons et des villes et à inventer la roue, on n'a pas avancé d'un pas vers le bon-heur" dit Francisque Odripano. (1)

Les paysans ont quitté leurs champs pour chercher dans les villes une vie plus aisée, plus remplie de plaisirs fa-ciles et sont devenus les esclaves moroses d'un monde technique; voilà, selon Giono, le grand défaut de notre civilisation. L'hom-me doit donc retourner aux sources vives de la nature pour retrou-ver la paix et la joie de vivre. C'est cette idée qu'exprime Amédée, le vieux conteur de "Un de B aumugnes" quand il nous dit:

"Ce soir j'ai compris combien de place peut tenir dans notre (1) Jean le Bleu - p.

295

(9)

)

4

dedans cette rosse de terre, si dure d'ongle et si belle de poils. Je ne suis pas de ces pays-ci; je dis toujours: je suis de partout. Non, dans le vrai fond, je suis de la terre, de celle-là comme Marigrate lourde de blés, avec des cyprès con-tre des bastidettes, avec des touffes de chênes-verts, avec de l'herbe roussie de soleil et des ruisseaux vides où coule, à

la place de l'eau, le bruit des charrett,es, le parfum du thym et le rire des gardeuses de chèvres.

"Si je ne suis pas d'ici, en tous cas c'est cette terre qui m'a fait, moi, ma façon de penser, et j'en suis fier. Pourquoi?

Faîtes ce que je fais, battez-vous avec elle que les bras vous en pètent et vous le verrez." (1)

Ainsi Giono est plus que poête de la nature, il est poê~e de la vie; mais pour lui la vie de l'homme est liée inex-tricablement à son habitat. Lui-même ne fait pas exception à cette règle. Son nom est à jamais lié à sa terre natale, cette Provence qu'il aime et qu'il n'a pas quittée, car son bonheur est de s'y enraciner. Il l'évoque tout au long de son -oeuvre. Des contreforts des Alpes qui entourent Manosque jusqu'à l'Italie, en passant par la vallée de la Durance, cette géographie n'a pour lui rien d'abs-trait. Ses souvenirs l'animent, la transforment, la recréent. S'il n'aime pas la plaine, on peut dire que la montagne est sa "mère".

Il • • • ,de Manosque à Vachères, c'est colline après colline, on

monte d'un côté, on descend de l'autre, mais chaque fois on descend un peu moins que ce qu'on a monté. Ainsi, peu à peu la terre,voùs hausse sans faire semblant. Ceux qui ont déjà fait le voyage deux ou trois fois s'en aperçoivent par ce qu'à un moment donné il n'y a plus de champs de légumes, puis, parce que le blé est de plus en plus court, puis, parce qu'on passe sous les premiers Châtaigniers, puis, parce qu'on traverse à

gu~ des torrents d'une eau couleur d'herbe et luisante comme l'huile, puis, parce que,enfin, parait la tige bleue du clo-cher de Vachères" et que ça c'est la borne." ••• "Puis, on va être si haut qu'on recevra sur les épaules comme des coups d'ailes en même temps qu'on entendra le ronflement du

(10)

5

toujours." (1)

C'est dans cette Haute-Provence qu'il affectionne tout particulièrement, que se situe l'action de ses premiers ro-mans : Colline, Un de Baumugnes, Regain (qui composent la Trilogie de Pmi), Le Grand Troupeau, Jean le B leu, Le Serpent d'Etoiles, Le Chant du Monde, Que ma joie demeure, Le Poids du Ciel. Ecrits entre 1928 et 1938, ces romans illustrent ce que l'on appelle la "Première Manière" de Giono: le "Lyrisme Paysan".

Notre but n'est pas ici d'étudier les thêmes ma-jeurs de ces romans, encore moins d'essayer de définir par quels caractères ils diffèrent des romans "Stendhaliensll de la deuxième

manière Gionienne. Nous nous limiterons à l'étude des caractéris-tiques de la langue employée par Giono et

à

la façon dont cette langue peut exprimer les attitudes et les caractèrb,"t des person-nages.

Sous les titres de "Morphologie" et IISyn'\,,:xetl nous

envisagerons un inventaire des formes grammaticales qui app~ 'f;mtent la langue paysanne employée par Giono au français courant. Nos

exemples seront plus particulièrement tirés de la Trilogme.

Nous étudierons également certains aspects du voca-bulaire et de l'image chez Giono.

Partant des données de cette étude, nous tente-rons enfin de dégager les traits essentiels du style de l'auteur.

(11)
(12)

)

7

L'ARTICLE

A la façon crunpagnarde Giono se complaît à confondre les différents articles. On trouve l'article défini alors que la règle grammaticale exigerait l'indéfini ou vice-versa. Souvent l'article est omis là où nous en mettrions un.

1) L'article défini au lieu de l'article indéfini

"Et alors, vous allez boire le coup 1" (1) Dans la langue courante on dit: boire un coup.

"Qui gagnera 1 Nous. Pas l'ombre du dou.te." (2)

O~ dit le plus souvent: pas l'ombre d'un doute.

"Ils boivent!. 'absinthe." (3 )

On dit généralement: boire une absinthe.

"Une femme qui allait faire le petit." (4) Il serait. plus courant de dire: un petit.

2) L'article défini au lieu du partitif

"La seule chose qui doit donner le regret."

(5)

au lieu de: du regret.

Le vieil exemple de Maupas: "d'excellents hommes et des hommes excellentstl n'est pas suivi, comme

l'indiquent les exemples suivants:

(1) Regain - !J.' 114 (2) Colline - p.

66

f3) Colline - p. 188

(4)

Regain - p. 12

(13)

8

"Elle a trouvé aussi des vieux corsages." "Des grosses boîtes."

:(~)

(2) "Il Y avait de tout: des vieilles tripes, des pieds de boeuf écorches raides ."

Œ)

Mais on trouve également le de partitif employé à la manière habituelle :

"Elle a fait bouillir de vieilles, des grosses, de

toutes. " - - - (4)

Giono donne plus de naturel au langage par l'alternance de des et de de.

3) Le partitif au lieu de l'indéfini

"Il avait de la belle moustache

...

"

(5)

au lieu de: une.

"Si tu as encore du restant d'omelette

"

(6)

au lieu de: un.

"C'est de belle eau

...

"

( 7) au lieu de: une.

4) Confusion entre l'article et la préposition 'Ide"

Dans certains cas l'article est omis alors que nous en emploierions un :

"Sitôt après le détour ~'hôpital." (8) Si le nom est précédé d'un adjectif on emploie invariablement du, de la, des

(1) Regain - p. 108 (2) Regain - p. 107 (3) Regai~ - p. 81 (4) Regain - p. 41

(5)

Regain - p. 18

(6)

Colline - p.

146

(7) Colline - p. 81 (8) Regain - p.

5

(14)

- 9

-"des grosses boîtes'

...

"

(1)

Avec les adverbes' de quantité, on emploie inva-riablement du, de la, des :

"Un peu de l'eau de ton puits." (2) A des est employé à la place de aux "Ça fait attention à des choses." (3)

5)

Article superflu

"Il est blanc jusqu'à la perte des yeux." (4)

(à perte de vue)

--C'est une forme rénovée et concrétisée du cliché habituel. "Depuis la mi-nuit."

L'article est superflu. De plus, le mot· s'écrit sans trait d'union depuis la fin du XVllème siècle, et est masculin. Nous avons à faire à un archaïsme.

"Le Saturnin", "~ 'Adolphe", "Le Panturle", ••• Les prénoms sont précédés de l'article défini le ou la qui prend ici.une.valeur de familiarité.

6) Omission de l'article:

"C'est pas méfianc e • " (6)

"Ça me tirait tellement soueL" (7) "Janet. a rébarbative allure ce soir." (8) (1) Regain - p. 107 (2) Un de Baumugnes - p.

52

(3)

Regain - p.

142

(4)

Regain - p. 62

(5)

Colline - p. 68 (6) Un de Baumugnes - p. 70

(7)

Un de Baumugnes - p.

165

(8) Colline - p. 29

(15)

10

"Faut que ce soit méchantes gens son père et sa mère." (1) ·7) L'article indéfini "un" remplace souvent le pronom indéfini

ou le pronom démonstratif (quelqu'un ou celui), surtout pour indiquer l'origine d'un personnage:

"Un de Baumugnes", "Un d'Aix". 8) L'article indéfini à valeur de possessif

"C'est des choses du temps de la femme." (2) "On me dit Angèle comme la maman." (3)

"Il a dételé le mulet."

(4)

C'est la première fois qu'on mE?ntj_onne le mulet d'Arbaud; son

" ,-mulet serait plus approprié.

"Tu as mis la belle veste."

(5)

C'est un trait caractéristique de la l.angue française de renoncer à l'emploi du possessif quand l'arti-cIe s'avère un déterminant assez fort. Cette tendance s'est atténuée dans la langue moderne et les exemples précités constituent en fait des archa!smes.

Un autre exemple de l'emploi archa!que de la préposition

"à"

au lieu de l'article défini nous est donné dans les citations suivantes :

"C'est la ferme

!

Barbaroux." (6)

(7) "La fille

.!

J aume, c'est laid."

(1) Un de Baumugnes - p. 103 (2) Regain - p. 24 (3) Un de Baumugnes - p. 182

(4)

Regain - p. 23

(5)

Regain - p. 23 (6) Un de Baumugnes - p. 83 (7) Colline - p. 97

(16)

)

- I l

"L'équipe! Casimir." (1)

Ainsi que dans la vieille chanson "Joli Tambour" : "La fille au roi était à sa fenêtre ••• ", et signifie la fille du roi. La possession est ici exprimée par la préposition !.

(17)

)

12

LE SUBSTANTIF

Nombreux sont les cas où nous constatons que le ,':. substantif est employé d1une manière qui diffère du français traditionnel.

1) Des noms généralement masculins sont employés au féminin

• la fÉ.nière désigne le fenil (bâtiment dans lequel on ernmaga-sine le foin. Le mot fénière est plus répandu dans le Midi.

• la paillère est une hauta meule de paille. Dans les autres régions on désigne par le mot pailler (masculin) la cour ou le grenier qui reçoit la paille.

• la guette : le guet.

liA la guette du renard, Panturle a rencontré le vent."

(1)

• ouvrage: dans les régions rurales, ce mot masculin est sou-vent employé au féminin.

IIDe llouvrage vite faite.1I Î'

2) Influence du Provençal sur certains mots • la serp: mot provençal qui désigne le serpent.

• l'espère qui désigne l 1 affût. En Provençal espérer signifie attendre. "T'espere; au sanctus.1I (Je t1attends au tournant)

• paroque désigne le perroquet. (IIUne plume de paroque.lI )

Ces deux derniers mots (espère et paroque) sont féminins.

(1)

Regain - p. 76

:' r) "

(18)

)

- 13

3) Certains mots sont employés au masculin ou au féminin • le tail : "Un tail de jambon." (1)

• la taillade (le suffixe "ade" est typiquement provençal)

4)

On note des pluriels qui ont pour effet dlannuler les lignes nettes que prendraient les objets ou les idées :

"Un ciment qui tiendra dur jusqulau bout de nos

ha-leines." (2)

"Le plus terrible, clest que ça commence dans les cervelles, dans les cervelles où personne ne voit

rien.1I (3)

Il Y a approximation dans :

tlIl est dans les onze heures du matin." (4)"

On nIa pas de montre. On.interprète la posi-tian du soleil. De même, le paysan qui parle dlun mal qùi "commence dans les cervelles". Comment savoir tout ce que contient un cerveau. Clest bien compliqué. Le pluriel marque son ignorance. Dans certains cas, le pluriel a donc une va-leur expressive.

(1) Colline - p. 44

(2) Un de Baumugnes - p.

145

(3) Colline - p. 107

(19)

14

LE NOM PROPRE

A la campagne où les gens !l'ont affaire qu'avec ceux qu'ils connaissent, il est normal que l'emploi du prénom se substitue presque complètement à celui du nom. Dans le cha-pitre de "L'Article", nous avons vu que ces prénoms sont pré-cédés d,l.un article : L'Albin, la Marguerite, •••

Les prénoms des personnages de la Trilogie sont pour la plupart inusités ou archaiques :

Angèle, Arsule, Gondran, Janet, Panturle, Clarius, Clodomir, Onésime, Pancrace, etc •••

La tendance populaire à employer extensivement des diminutifs et des augmentatifs se retrouve dans l'emploi des prénoms : Etiennette Marguerite Elisabeth Claire Antoine Jean devient

...

Tiennette Gritte Babette Clairette Tony ou Toine Janet

Certains noms et prénoms sont typiquement mé-ridionaux :

Batistin est une forme de Baptiste

Albin . . . .. Aubin

(20)

')

- 15

L'ADJECTIF QUALIFICATIF

'On peut distinguer deux grandes catégories d'ad-jectifs :

1) L'adjectif qualificatif qui exprime une valeur de sens géné-ral. Ce type d'adjectif est généralement placé devant le subs-tantif et lui est si intimement lié que l'union des deux mots semble indissoluble.

Exemples: une belle fille, un jeune homme, un ignoble individu.

2) L'adjectif déterminatif, par contre, suit habituellement le substantif et le verbe, et énonce une particularité qui sert

à

car~ctériser un objet.

F~emples: la vie marine, la flotte royale, le ciel est rouge.

Giono a résisté à la tentation d'employer l'ad-jectif comme moyen de caractérisation, et en cela il se range aux côtés des modernes qui évitent, dans la mesure du possible, l'abus des épithètes. En effet, la multiplication des épithètes est rarement un moyen efficace de renforcer une impression; au contraire, elle risque de détourner l'attention du lecteur. A ce sujet Voltaire disait: "Le nom et l'adjectif sont ennemis mortels."

Tout en ayant pratiquement éliminé de ses écrits les adjectifs déterminatifs qu'il a remplacéspar la comparaison et ses dérivés (images et métaphores), Giono fait ample usage de l'adjectif de sens général dont la simplicité est en har-monie avec le langage familier qu'il emploie. En particulier,

(21)

>

-

16

ses romans reflètent la tendance méridionale qui est d'employer intensivement les épithètes "beau", "bon", "brave" et "gros".

Beau

"Elle est partie un beau soir." (1)

"Monsieur Astruc se penche encore sur la belle graine." (2)

Bon

"C'est du beau blé." (3) "Mon bel hommelet." (4)

"Mauras regarde le beau pain."

(5)

" ••• et de belle eau."

(6)

"La bonne lune rouge du gros visage se lève: deux bons yeux ronds bleus."

(7)

"Il est de bonne race celui-là." (8)

"Et surtout cette bonne soupe de choux et de pommes

de terre qui tient au ventre et fait du bon sang net." (9) • B-rave : (qui n'a évidemment pas le sens de bravoure mais de

complaisance)

"C'est brave. d'@tre ensemble."

(10)

"Tu es une brave personne." (11)

"Elle marchait toujours bravette."

(12)

Gros

(1 )

(2 )

(3)

(4)

(5)

(6 )

(7)

"Un homme si gros que ça ••• " (13) "On est de gros malheureux."

(14)

Re~ain - p.

125

(8)

Regain - p.

126

Regain - p.

149

(9)

Colline - p.

72

Regain - p.

149

(10)

Regain - p.

184

Colline - p.

118

(11)

Un de Baumugnes Colline - p.

150

(12)

Un de Baumu~nes Colline - p.

81

(1.3)

Regain - p.

17

Colline - p.

146

(14)

Un de Baumu~nes - p.

67

- p.

174

- p.

67

(22)

)

- 17

"C'est la grosse habitude." (1)

" ••• de ce gros homme, mal d'aplomb, et qui parlait." (2) "Ça laissait prévoir de la grosse pluie, grosse et

iongue." (3)

Lorsque Giono emploie un adjectif déterminatif, il le complète généralement par une comparaison concrète. Nous relevons les exemples suivants dans le texte :

"Les dalles sont couvertes d'un jour qui est là, épais comme de la paille d'étable." (4)

"Il n'est pas las de fatigue, il est las comme si on avait fait des trous dans ses bras."

(5)

"L'heure est fleurie comme un pré d'Avril." (6) "Je me sentais net et sec comme une avoine." (7)

Il est remarquable de constater, dans la des-cription suivante, avec quelle dextérité Giono évite les ad-jectifs alourdissants :

"A travers sa peau on voit le feu qui la dévore, flamber autour de ses os. Elle est étendue, maigre comme un Jésus; elle ne peut même pas lever la main pour chasser les mouches, elle les laisse se prome-ner sur sa figure; quand elles arrivent près de l'oeil, elle bouge un peu les paupières." (8)

Par l'emploi judicieux du verbe et du subs-tantif, Giono fait jaillir spontanément l'image dans 1'es-prit du lecteur sans exiger d'effort analytique.

(1) Regain - p. 77 (2) Un de Baumugnes - p.

145

(3) Un de Baunmgnes - p. 88

(4)

Regain - p.

28

---.-.---..

_--_._----(5)

Regain - p.

43

(6)

Colline - p.

156

(7) Un de Baumugnes - p. 72 (8) Colline - p. 101

(23)

)

- 18

LA PREPOSITION

Dans le langage des campagnes les prépositions sont polyvalentes et instables, c'est à dire qu'une seule peut, selon les cas, en remplacer plusieurs autres.

1) Dans peut remplaoer :

,

• a : "dans mon avantage Il

vers "dans le Midi"

"Dans 1 es six heures. Il (1 )

en "dans moill

au IIdans le milieull

2)

!

peut remplacer:

• par : "à des momentsll (par moments)

• en train de : "Elle est à compter ses canards." (2) "Elle va doucement à maigrir." (3)

(Elle est en train de maigrir lentement) • comme : "Il a oublié de tirer sur le tuyau de terre, à son habitude."

(4)

• chez: "Je monte à Gaubert." (5)

drers') liA la nuit, ils se sont barricadés." (6)

3) De peut remplacer :

,

• a : "Ça sert de rien." (7)

"Il commence de grogner." (8) (1) Un de Baumugnes - p.

42

(2) Regain - p. 119 (3) Colline - p. 101

(4)

Colline - p.

59

(5)

Regain - p. 23 (6) Colline - p. 66 (7) Regain - p. 140 (8) Regain - p. 150

(24)

)

19

(En bon français, on dit: il commence à grogner et il fini.t de grogner)

• à cause de : "Clarius qui grognait de son bras."

• à partir de ; "8i on commence de ce soir à faire compagnie." • par : "Ce n'est pas de méchanceté."

"Ce n'est pas de fierté." • vers "Il s'avance d'elle."

pour "Heureusement de toi."

L'emploi nominal de l'infinitif s'accompagne toujours de "dell.

"Les jeunes, ça aime d'être ensemble."

En

!::le restraignant presque exclusivement à l'emploi de trois prépositions - à, de et dans - la langue populaire renonce aux subtilités que les autres prépositions introduisent dans la langue lettrée.

Le renforcement des prépositions : Les pré-positions faibles sont remplacées et renforcées par des prépositions fortes, ainsi :

• dans et en devienneht dedans • sur devient dessus

• sous devient dessous:

"Ça m'a enlevé un poids de dessus la poitrine." "La peau de dessous le tronc, toute moisie."

(25)

)

)

20

"Elle est dedans leur cervelle comme une grande fleur de tournesol."

Les substitutions que nous venons de mentionner sont encore des formes d'insistance ou de concrétisation.

(26)

)

21

LA TRANSPOSITION

La transposition est le changement d'emploi d'un mot qui lui permet d'entrer dans des relations grammaticales

dif-férentes de celles que l'usage lui confère.

Ainsi un adjectif peut être employé comme subs-tantif: le blanc de la neige, le vrai, le beau, etc ••• Le substantif peut être employé comme adjectif: une étoffe citron, un homme bête, •••

Il en est de même pour certains participes, ver-bes, adverbes et prépositions qui peuvent être nominalisés ou verbalisés.

Alors que le français classique contrale, fil-tre ou n'accepte ces néologismes qu'après un long stage, le français populaire multiplie sans vergogne ce genre de forma-tions. Dans le texte nous relevons :

1) Des adjectifs employés comme noms

"Le vrai (la vérité) c'est qu'il semble partir en

promenadè." (1)

"C'est une affaire de temps aussi, ce chaud (de chal eur ) • "

"Je fais vite du chaud."

temps de (2 )

(3)

"Il débouche sur l'autre bord à quarante mètres de

haut (de hauteur)." (4)

(1)

Un de Baumugnes - p.

41

(2) Regain - p.

98

(3)

Regain - p.

99

(27)

)

- 22

"Arsule est dans le plein du souci (rempl:ie de soucis)." (1) "Je te vais tout prendre le bon de la toile raide." (2) Les adjectifs substantisés par l'ellipse du nom sont également

très fréquents :

"Tu es un fier." "C'est la noire."

2) Des participes employés comme noms

"C'est le parlé qui fait le parlé."

"Quelque chose qu'on aurait dit être le glapi

(gla-pissement) du renard."

(4)

"Ça ne me plaît guère à moi de coucher comme ça au

vu .~à la vue) de tout." (5)

"La née du malheur s'avance, et c'est fini!" (6)

3) Des verbes substantisés

(1) (2 ) (3)

(4)

(5) (6) (7)

"Son dire sentait son monsieur plutôt dur sur le

mors." (7)

"Elle connaissait mon taper." "Pour faire le va-et-vient

"

(8) (9) "Au hasard du parler." (10) "Autrement dit, du manger pour quatre jours." (11) "Le penser comme les paroles." (12) "Ça semblait comme le geindre d'un nourrisson." (13)

Regain - p' 105 (8) Colline - p. 27 Rega~n - p. 109 (9) Colline - p. 95 Regain - p. 65 (10) Regain - p. 25 Regain -'p.

43

(11) Regain - p. 54 Regain - p. 109 (12) Un de Baumu~nes - p. Un de Baumugnes - p. 121 (13) Un de Baumugnes - p. Un de Baumu~nes - p. 17 68 86

(28)

)

23

LE VERBE

L'homme des champs souligne souvent du geste la phrase que son vocabulaire rudimentaire ne suffit pas à rendre explicite. Il est donc normal que les verbes qui sont las mots les plus faciles à mimer, occupent Une très grande place dans la langue de Jean Giono.

Les temps employés dans les dialogues sont pres-que exclusivement des temps simples: le présent, l'imparfait et le passé composé de l'indicatif.

1) Confusion des auxiliaires

Le Français emploie l'auxiliaire avoir pour conjuguer tous les verbes transitifs et la majorité des verbes intransitifs.

Exemples: Il a chanté, nous avons acheté.

On emploie l'auxiliaire ~tre pour conjuguer tous les verbes pronominaux et dix-sept verbes intransitifs.

Exemples: Je me suis caché, il est venu.

Les gens du peuple confondent les deux formes. Nous relevons les exemples suivants dans le texte :

"Il m'a resté seize sous." (1) "Je m'avais fait mal." (2)

(1)

Regain - p.

155

(29)

)

2) Forme pronominal e

L'emploi erroné de la forme pronominale est un autre trait du parler méridional. Nous notons dans la Trilogie

"Je te le prends, comme un pantin." (1)

"Je ~ pensais." (2)

3) Le duratif :

Pour exprimer une action qui dure, le méridio-nal a tendance

à

employer

"à"

(en train de) suivi d'un infinitif

"J e suis à chercher du travail." (3 )

"La Belline, elle est dans le clos canards."

à compter ses

(4)

"La voilà qui va à faire rev-lvre sa vie."

(5)

4)

L'emploi du passé surcomposé

Dans la langue courante, le passé simple a fait place au passé composé. Pour marquer l'antériorité, la

langue familière doit donc employer le passé surcomposé à la place du passé antérieur. Dans le texte :

"Quand elle a été partie, il s'est redressé." (6) "Quand ils l'ont eu fait mourir, ils se sont mis

à partir." (7) ~) ) J J; ~ :i.u , I I . '-.. ~ 1

(1)

Un de Baumugnes - p.

66

(2 )

Colline - p.

34

(3) Un de Baumugnes - p.

52

(4)

Regain - p.

119

(5)

Un de Baumugnes - p.

154

(6)

Un de Baumu~nes - p.

14

(7) Regain - p.

31

(30)

- 25

S) La formation de verbes au moyen d'un préfixe

Dans le langage moderne, nous avons pris l'habi-tude de créer des mots à l'aide de termes existants, auxquels nous donnons un sens nouveau par l'addition de préfixes: Exemples: anti-social, pro-allemand, superviser, etc •••

Une autre tendance est celle de l'emnloi abusif du préfixe "re" pour forger des verbes

Exemples: refaire, reforger, remanier, repoudrer, etc ••• Cette même tendance se retrouve dans le langage familier de la Trilogie

"Quand on a réarrangé la route." (1)

"Mais elle n'avait pas le temps de rarranger, ça

pressait." (2)

Une forme de néologismes particulière à la langue des campagnes est la création de verbes à l'aide du préfixe "de" pour suppléer à l'ignorance du verbe antonymique approprié

a~

(3)

(4)

(5)

(6 )

"Vous déparlez, dit-il." (3) (vous déraisonnez, vous divaguez)

"C'est lui en bas qui se désennuie en jouant de sa musique." (qui se distrait) (4)

"Marguerite départage les ramées d'olivier." (S) (Marguerite sépare)

"Tu as désappris la bonté."

(Tu as oublié) Un de Baumu~nes Regain - p. 108 - p.

So

Colline - p. 31 Un de Baumu~nes - p. 106 Un de Baumugnes - p.

52

Un de Baumugnes - p.

S2

(6)

(31)

26

Ces maladresses du parler dialectal constituent un procédé d'intensification et leur lourdeur est en accord avec les personnages de la Trilogie.

(32)

-

27

-L'ADVERBE

Une des caractéristiques du langage familier est de transformer les mots et expressions soit par des substitu-tions, soit en employant certains termes d'une manière erronée.

Ceci s'applique en particulier aux adverbes.

"On a entendu tout par un coup (tout à coup), en bas, comme une noix qu'on écrase entre les dents."

(1)

"Comme ça, il est arrivé sur la ferme de l'Amoureux,

tout par un coup." (2)

"Tout soudain, Panturle s'arrête et jette son sac." (3) "Le vent est tout bien froid jusqu'au fond." (4) "Je vais et je reviens; toi, tu gardes les sacs(~)n­

dant (pendant ce temps)."

"Il l'a laissé là pas mal de temps (longtemps), de

jour ou de nuit." (6)

"On a pas mal (beaucoup) été secoué." (7) "Il Y a une petite femme jeune et pas mal (assez)

jolie." (8)

" Ça fait pas mal d'imbéciles." (9)

"Il arrive

à

Aubagne avec guère (peu) de sous."

(10)

"C'était plus guère tenable."

(11)

"Tant (tellement) qU'elle a dû partir pour y aller.'1

(12)

"Des fois (parfois), il monte au village."

(13)

"Vous prenez du monde? - Des fois."

(14)

(1)

Regain - p.

12

(2) Regain - po

113

(3)

Regain - p.

130

(4)

Regain - p.

40

(5)

Regain - p.

129

(6)

Regain - p.

19

(7)

Colline - p.

169

(8)

Regain - p.

149

(9)

Regain - p.

139

(10) Regain - p. 12

(11)

Colline - p.

145

(12)

Regain - p.

132

(13)

Regain - p.

18

(14)

Un de Baumugnes - p.

10

(33)

verbes

28

Nous trouvons des adjectifs employés comme

ad-"Des harmonicas qu'ils enfonçaient profond dans leurs bouches." (1)

"Elle se gratte le ventre longtemps et dur avec ses ongles." (2)

(1) Un de Baumugnes - p.

24

(2) Colline - p.

143

(34)

)

')

- 29

LES DEMONSTRATIFS

Les gens du peuple, et en particulier les Méri-dionaux,ont tendance à ponctuer leurs discours de gestes expres~ sifs. Il est donc normal que dans la Trilogie, les démonstratifs aient une valeur particulière d'insistance et de familiarité. Nous en relevons les exemples suivants :

IIVoilà, c'est d'abord nour celle-là. Il montre Caro-line ••• " (1) .

IIMa.is où elle est, celle-là qui voudrait venir ici?" (2) "Qui aur ai t dit ça, qu'elle parte aussi, celle-là." (3)

Le démonstratif employé dans un sens péjoratif est assez peu fréquent. Cependant, nous relevons les exemples suivants

IICette cochonnerie de travail ••• "

(4)

"Cet homme-là, c'était comme une gale qui le rongeait." (.5)

Il est à noter que l'opposition entre l'éloignement et la proximité: celui-ci/celui-là, ceci/cela, n'est pas observée. La forme "-cill est omise au profit de la forme "-là".

Le démonstratif "çall qui est une forme très

usitée par Giono, sera étudiée dans un autre chapitre intitulé "Le Chésisme". (1) Regain - p. 115 (2 ) Re~ain - p.

37

(3) Be~ain - p.

47

(4)

Un de Baumugnes - p. 19 (5) Un de Baumu~nes - p. 112

(35)

- 30 LES POSSESSIFS

Dans la langue familière le possessif ne se li-mite pas au sens de possession. Il peut aussi èxprimer une

nu-ance d'intensification. Dans le texte nous notons:

"-Bien bu? Le père Janet? C'était peut-être pas un gros buveur, mais il sifflait ses six litres tous les jours. Il (1)

Ici, le possessif souligne la quantité de vin absorbée par Janet. Il peut également exprimer une nuance de fami-liarité ou d'ironie, comme les exemples suivants tirés du texte en font preuve :

"C'était pas le coup de faire ~ Michel l'hardie" (2) "Quand le mulet s'endormait, mon Saturnin prenait la longe et le réveillait d'une chatouille. Il (J)

"Va te faire foutre qu'elle siffle, et mon Gagou

lève le nez." (4)

-"Son dire sentait son Monsieur plutôt dur sur le mors ••• "

(5)

"C'est pas le moment de faire du bruit, mon gars." (6)

(1) Colline - p.

24

(2) Un de Baumugnes - p.

155

(3) Un de Baurnugnes - p. 65

(4)

Colline - p.

96

(5)

Un de Baumugnes - p. 17 (6) Colline - p. 92

(36)

)

31

LA CONJONOTION "QUE;"

En

français ancien la conjonction "que" est em-ployée comme corrélative universelle. Les deux citations suivan-tes tirées de la "Cantilène de Sainte-Eulalie" (IXème siècle), illustrent ce phénomène :

"Elle non eskolet les mal conselliers,

qu'elle deo raneiet, chi maent sus en ciel." Elle n'écoute pas les mauvais conseils, de sort.e qu'elle ne renie pas Dieu qui réside dans le ciel.

"Ell' ent a.dunet 10 suon element melz sostendreit les empedemetz, qu'elle perdisse sa virgini tet • "

Elle, elle ne change pas sa croyance, elle préfère subir les pires tourments plutôt que de perdre sa virginité.

Par la suite, la langue va créer progressive-ment une série de conjonctions spécialisées (concesslves, fina-les, causafina-les, ••• ) qui permettront d'expliciter la nature de la relation qu'on veut exPrimer. Or, dans la langue familière "que" continue à assumer le rôle de conjonction universelle et remplace le plus souvent dans le texte "où" ou "alors que":

"Une nuit que j'étais à l'espère du lièvre." (1) "Pour le matin qu'on a campo." (2)

"A ••• se grattait la lavande que les ongles en pétaient." (J)

(1) Colline - p. 132

(2) Un de Baumugnes - p. 26 (3) Colline - p. 38

(37)

)

1

)

32

Dans ce dernier exemple "que" exprime "au point que".

Signalons enfin le "que" narratif très fréquent dans le dialogue paysan ou populaire ("que" accompagné d'un pro-nom sujet et d'un v8rbe).

"De la belle peau, qu'il fait, le Louis." (1) "Bon qu'il dit à la fin, ça va." (2)

"Laisse tomber que je réponds." (3) "Oui que je rigole." (4)

"Tu as raison, qu'il dit." (S)

La conjonction "que" devient un corrélatif polyvalent dans la langue paysanne. Il est donc normal que cette forme soit re-flètée extensivement dans les textes de Giono.

(1 ) Un de Baumugnes - p. 29 (2 ) Un de Baumugnes - p.

41

(3) Un de Baumugnes - p. Il

(4) Un de Baumugnes - p. 102

(38)

33

LES DIMINUTIFS

Pour la pensée des simples, tout est comparaison; les choses sont un peu plus grandes ou un peu plus petites que nature.

1) Les diminutifs en flet" - "ette" :

"La Durance qui fait sa risette blanche." (1) "La placette." (2)

"Olivette," (3) amusette, ruisselet, enfantelet, dou-cette, posette."

"Hommelet," (4)"marmousset". "Ça c'est plutôt drôlet."

"Un petit serpentelet de sourire."

2) Les diminutifs en "otfl - notte'l :

"Deux petits vautrés comme des chiennots."

(5)

fiLe grand marché remplit la villotte."

(6)

"Il se demande dans sa jugeote." (7) fi Lapinot , petiot, jeunot, marmot, ••• "

3) Les diminutifs en "on" :

La terminaison fion" est typiquement provençale.

"Le fenestron du clocher, branchillons, bridon, ci-galon, ••• 11 (1) Un de Baumugnes - p.

45

(2) Colline - p. 121 (3) Colline - p. 115

(4)

Colline - p. 118

(5)

Regain - p. 33 (6) Regain - p. 142 (l) Colline - p.

40

(39)

)

34

-4)

Les diminutifs par expression HUn petit gars." (1)

(40)

)

35

LES AUGMENTATIFS

Dans le langage parlé aussi bien que dans le lan-gage écrit, nous éprou.vons le besoin constant d'intensifier notre expressivité à l'aide de superlatifs ou d'expressions quantitati .. c ves appropriées dont "beaucoup" est la plus usitée. A ce sujet, nous c5tons un passage de J. Marouzeau

"Mais comme cet intenèif "beaucoup" ne suffit pas enco-re à notre besoin d'exagérer, nous essayons d'autres substituts: bien des, nombre de, quantité de, une mul-titude de ••• , et le parler populaire va plus loin enco-re avec une masse de, des tas de, et des synonymes ar-gotiques: une foultitude, une tapée, une ~_oppée ••• De même, l'intensif "très" a fait son temps ••• et nous avons recours à tout à fait, grandement, eXèessivement, énormément; la langue vulgaire va jusqu'à rudement, follement, bougrement, et l'argot plus loin encore. Les mots négatifs, vu la propension à nier qui carac-térise la mentalité de bien des gens, appellent sans cesse de nouveaux renforcements: rien du tout, rien de rien, jamais de la vie, personne au monde, ne ••• point, ne ••• goutte, etc ••• " (1)

Toutes ces expressions se retrouvent plus ou moins

fréqueminent:"ëhe~ Giono, mais ce qui est intéressant à noter, parce que typique chez l'auteur, c'est l'emploi très fréquent des suf-fixes augmentatifs à tendance dépréciative : -asse et -aille.

1) Le suffixe "asse" :

"Voilà sa campagne qui sonne l'angélus avec la voix d'une clochasse de bouc." (2)

"Je faisais -=.ta bonasse avec toute ma gueule." (3)

"Ils se sont couchés par terre sur des paillasses."

(4)

(1) Précis de Stylistique Française - p. 104 (2) Regain - p.

5

(3) Un de Baumugnes - p. 50

(41)

36

Le suffixe "assell est aussi fréquemment employé dans la

forma-tion de jurons très péjoratifs bestiasse, capouanasse, etc •••

2) Le suffixe "aillell :

"Une vague odeur de poulaille.1I (1)

"Elle fatsait paître sa troupaille." (2)

Il est à noter que tous les mots se terminant en lIaillell n'ont pas un sens péjoratif, comme l'indiquent les

exemples qui suivent :

IIÇa faisait cormne un troupeau; le bruit et les son-nailles ." (3)

"En

finissant de herser le champ pr~t aux semailles."

(4)

3) Le suffixe "ade" :'

Ce dernier suffixe est particulièrement employé da.ns le Midi. C'est une création provençale. Le français et l'argot ont emprunté de nombreux mots en "ade" à ce dialecte, tels que: salade, baignade, glissade, marinade, gallopa:tle, etc Dans le texte nous relevons

"Une taillade de jambon."

(5)

"C'est fini la rigolade."

(6)

L'emploi intensif des suffixes est un des moyens dont Giono se sert pour refléter le langage familier de ses per-sonnages ruraux. (1)

~2 ~

(f)

(5)

(6) Un de Baumugnes - p. 104 Un de Baumugnes - p. 181 OoIb.ne - p. 62 Un de Baumugnes - p. 134 Colline - p.

4h

Un de Baumugnes - p. 30

(42)

)

(43)

38

LES VEGETAUX

Giono a une connaissance extraordinaire de la végétation sauvage du Midi. Non seulement il nous présente une liste quasi complète de la flore provençale, mais encore il il-lustre l'ample usage que les gens du pays font des herbes et du bois de leurs collines. Ce sont:

• l'aspic (du provençal espic) épi désigne aussi la lavande -• la bourrache (du provençal bourrigo)

• la ciboulette (du provençal ciboula) est employée dans l'as-saisonnement des mets.

• la luzerne (du provençal luzerno)

• le thym qui est une plante très commune dans les plaines et les montagnes du Midi.

le chêne-vert, la bruyère, l'ortie, la menthe poivrée, le genêt, les ginestes, etc ••• tous communs dans la garrigue. • l'olivier, le mûrier, le frêne, l'aulne, le pin, le platane,

le figuier, sont des arbres méditerranéens.

• l'armoise est une herbe aromatique qui sert à la préparation de l'absinthe et du "pastis".

"C'est l'absinthe qu'il fait lui-même avec l'armoise de la

colline, l'anis qu'il commande au facteur et son vieux marc." (1) • l'aubépine, le sureau, la clématite, le chèvrefeuille, sont

des buissons fleuris.

(44)

39

• la saladelle, la chicorée, sont des plantes comestibles. • la bardane, les ronces, sont des plantes épineuses. • des plantes médicinales

"Malgré l'escudé et les tisanes de bourrache, Marie est tou-jours malade." (1)

"La camomille, la mauve, la sauge, le thym, 1 'hysope, 1 'ai-graimoine, l'aspic, l'artémise la santé de sa fille est dans ces fleurs." (2)

• des plantes nocives ou dangereuses :

"Il était mort depuis longtemps. On a su, parce qu'il en avait encore des brins dans sa petite main, qu'il avait mangé de la cigUe." (3)

"Elle (la Mamèche) a de vieux grains d'avoine et les fait bouillir avec de la rue et des. capsules de datura. Puis elle épand son grain devant la porte. Les moineaux mangent et ils meurent." (4)

Utilisation

"Pendant qu'il était lui

à

se reposer sur son lit de thym sec."

(5)

"Le feu d'olivier c'est bon parce que ça prend vite, juste comme un poulain."

(6)

"Quand il voulait faire une charrue, il prenait une grande pièce de frêne." (7) (1) Colline - p. 101 (2) Colline - p. 102

(3)

Regain - p.

14

(4)

Regain - p. 38

(5)

Un de Baumugnes - p. 137

(6)

Regain - p. 21 (7) Regain - p. 19

(45)

ho

LES TRAVAUX AGRICOLES

Les occupations des personnages de Giono sont essentiellement agraires. Giono observe les travaux des champs. Aucune opération, aucun outil ne lui est étranger. Le vocabu-laire agricole est donc fréquent dans ses oeuvres:

• le labour : la charrue

le coutre (du latin culter): fer de la charrue coupant la terre verticalement.

le coutre d'araire: l'araire est une charrue sans avant-train.

la glèbe (du latin gleba motte de terre) • les instruments : la hache

la serpe la faucille le semoir le rouleau la herse l'aire

"C'était tout rangé en cercle de barrique sur l'aire: les gerbes, le ventoir, les draps, les sacs pour le grain, tout prêts pour la bataille, avec, comme soldats, le mulet et moi." (1)

le battage la batteuse

le tarare pour vanner et nettoyer le grain. le poussier: poussière de blé.

(46)

)

41

le groussan grain grossier (orge, avoine, sei-gle) •

"Ah ! Le blé à Marigrate. Vingt tarares à vous pouffer du poussier dans la figure, la batteuse qui mange ses botte-lées à pleine gueule, et se démener ùans cette odeur de paille, de sueur et de pain. Il (1)

" ••• C'est du beau blé et tout le monde le sait. C'est pas battu à la machine." (2)

Il est intéressant de remarquer que le blé battu à la main est supérieur à celui qui est décortiqué méca-niquement.

"Moi voyez-vous, s~ Je suis ici, dans cette maison, c'est que j'ai baissé en grade. Notre bat on de maréchal, à nous autres, c'est le travail du blé, mais on ne l'a que quand on est jeune. Je suis trop vieux. Maintenant je fais les haricots, les lemtilles. Je suis allé jusqu'à me louer pour ramasser des pastèques. Même, je vous le dis à vous, un jour de la semaine dernière j'ai trié des pommes d'a-mour chez un revendeur espagnol." (3)

Hiérarchie dans le travail agricole. la meule de paille,

le foin, le silo, • les vendanges : le foulage

le semoustat (surmoût): vin tiré de la cuve avant que la fermentation soit opérée.

la bonde: trou rond pratiqué dans l'une des douves d'un tonneau pour y verser le liquide; bouchon qui ferme le trou.

D.J)

Un de Baumugnes - p. 180

T2

Regain - p.

149

(47)

)

42

la barrique

le faisceau de tine

"Vous savez ce que c'est? C'est un fagot de tiges d'asperges sauvages qu'on met dans la cuve, devant la bonde, pour que le marc ne bouche pas le robinet." (1)

la blanche: l'eau de vie.

Giono n'a jamais été laboureur ni vigneron, mais il n'a pas besoin d'avoir régulièrement pratiqué les travaux des champs pour les connaître à fond.

(1) Un de Baumugnes - p. 90

(48)

)

43

LA TOPONYMIE

En

parcourant une carte géographique nous repé-rons la plupart des noms de lieux qui figurent dans la Trilogie.

Aubignane Banon Vachères • Rousset • Saumane Niozelles Ganagobie Villeneuve Villedieu Aix Valensole Le Thor Peyruis

département du Vaucluse - al'rondissement de Carpentras.

Il des Basses-Alpes - Il Forcalquier.

Il

"

"

"

commune de Reillane.

départe~ent des Hautes-Alpes - arrondissement de Gap

commune de Chorges.

département des Basses-Alpes - arrondissement de Forcalquier commune de Banon.

département des Basses-Alpes - arrondissement de Forcalquier

"

"

"

"

commune de Peyruis.

département des Basses-Alpes - arrondissement de Forcalquier.

Il du Vaucluse Il Carpentras.

Il des Bouches-du-Rhône.

Il Basses-Alpes - arrondissement de Digne.

"

du Vaucluse - commune de l'Isle-de-Sorgue.

"

des Basses-Alpes --arrondissement de Forcalquier. Cette énumération de noms de lieux,

quoiqu'in-complète, indique que Giono ne s'intéresse qu'~ la région arro-sée par la Durance et dominée par la montagne du Lure, c'est-~­

dire le coeur de la Provence (en particulier le département des Basses-Alpes).

(49)

44

LES &~CHAISMES

Le langage évolue sans cesse. En même temps que nous créons des mots nouveaux, nous cessons d'utiliser certains autres mots dans la langue courante. Ces mots deviennent des archaismes. A ce sujet J. Marouzeau écrit :

"Ce qui s'observe plus aisément, 0'est, si l'on peut dire, l'espèce de stage que font parfois les mots avant de sombrer dans l'oubli.

D'abord, ils peuvent bénéficier d'un certain préju-gé favorable que leur accordent les raffinés du lan-gage: cueillir dans un texte ancien un mot hors d'u-sage, est une preuve de culture; d'où la survie oc-casionnelle et prétentieuse de "souvenance", "déduit", "devers", "emmi". Le prestige du désuet conduit par-fois les archa"ismes

à

s'attarder dans la poésie du type traditionnel, où la forêt se fait "sylvé", où le nuage est "nue", etc ••• On voit ici comment l'ar-chaisme devient procédé de style."

Chez Giono, certains mots qui comportent le suffigre "ance" sont intentionnellement employés pour donner un petit air vieillot et pittoresque au langage :

"Ça se couvre de couleur, de fleurance et de bruits." (1) "Dans le grand méli-mélO de leurs souvenances." (2) "Pour toi, unique, à ton usance,sans fin." (3) "Ça avait la luisance d'une faux." (4)

Par contre, un grand nombre d'archaïsmes sont authentiques en ce sens que ce sont des mots qui font encore partie du vocabulajre des paysans provençaux

(1) Un de Baumugnes - p. 126 (2) Un de Baurnugnes - p. 13l

(3) Colline - p. III

(50)

)

-

45

-"Les avettes (abeilles) dansent autour des bouleaux

gluants de sève douce.1I (l)

"Elle tirait sa moue d'un empan." (2) (L'empan est une ancienne mesure de longuemn)

"C'est l'us" (l'usage, la coutume). (3) "Ores (maintenant, alors), c'est trop tard."

(4)

"C'est d'abord tout mussé (dissimulé), comme de

honte, derrière des barrières."

(5)

"Sieurs" (pour messieurs) (6)

J. Marouzeau, dans son livre "Précis de St y-listique Française", admet qu'il ignore les lois qui gouver-nent le vieillissement des mots. Cependant, nous croyons pou-voir constater que les mots,et en particulier les verbes, commençant par la voyelle A, ont une prédisposition à la désuétude:

"Elle s'est alourdie, elle s'est alentie" (du ver-be alentir).

"Ça qui fait que le coeur tremble de joie ou s'a-lentit, adoloré, de ce que le bruit, le parfum ou la couleur porte en plus de sa chose propre." "Enfin, alassé, il est venu au lit qui est fait." "Il me suffit de la voir comme toute ajeunie par cet arrangement."

(7)

(6)

(9) "Comme des lèvres qui s'appointent."

"J'appointais mes oreilles tant que je pouvais." "Je me suis accoité dans l'ombre du pigeonnier." "Gagou accoté à son pilier regarde."

(10) (11) (12) (1 ) Colline - p. 9 (7) Un de Baumu~nes - p. 26 (2 ) Colline - p. 39 (8) Regain - p. 131 (3) Regain - p. 17 (9) Un de Baumugnes - p. 67

(4)

Colline - p. 83 (10) Colline - p.

63

(5) Un de Baumugnes - p. 61 (11) Colline - p. 58 (6 ) Regain - p. 9 (12 ) Colline - p. 68

(51)

1+ 6

D'autres verbes peuvent également être considérés comme archaïques

"Il va fouir son olivaie." (1)

En langage moderne, on dirait cultiver.

"Marguerite fouaille le fourneau à grands coups de ti-sonnier pour hâter le café." (2)

En langage moderne, on dirait secoue.

(1)

Colline - p.

43

(52)

- 4

7

LE VOCABULAIRE ARGOTIQUE

Il existe en français deux formes d'argot: l'ar-got "du milieu" qui est le langage cryptique de la pègre, et l'argot populaire qui est employé dans une certaine mesure par la plus grande partie de la population afin de suppléer au man-que d'expressivité de la langue courante. C'est cette seconde forme d'argot universel qu'emploie Giono.

1) Les verbes si;t:fler rigoler cavaler trimbaler gueuler se planter décamper ermnerder 2) Les adjectifà blousé ermnielé remballé 3) Les expressions boir~'en_vites~~~ rire. courir.

traîner derrière soi. crier ou se plaindre. rester debout. s'en aller. ennuyer. trompé. ennuyé. remis à sa place. "Porc de temps." (1) (1) Colline - p. 36

(53)

- 48

"Et jet' en fous." (1 ) "Fan dé pute!·" (2)

"L'homme s'est foutu un coup de fusil dans la garnache." (.3)

"Tu peux te fouiller, me dit Saturnin." (4)

"Non et ta soeur 1"

(5)

"Tous les coups en vache."

(6)

"J e lui tannerai les fesses." (7)

Certaines expressions vulgaires sont typiquement provençales "Bonne Mère Ut

"Christou. "

"Capon de tron de Dieu." "Troun de l'air."

"Vé, vé, çui-là 1"

Parfois, des italianismes s'y mè1ent "Ah ! Porca 1"

"Bellissima."

"Ou:i:!,c!!=!st"sûr,,:'et puis, basta." (assez) (8) Une des tendances vulgaires et p~ysannes est de rapprocher les formes humaines des formes animales. Dans les textes, nous notons les substitutions suivantes:

la peau couenne.

les jambes pattes •

• la bouche gueule, naseaux, bec. (1) Colline - p. 38 (2) Colline - p.

134

(3) Un de Baumugnes - p.

15

(4)

Un de Baurrmgnes - p.

71

(5)

Un de Baumugnes - p. 82

(6)

Un de Baumugnes - p.

157

(7) Colline - p. 19 (8) Colline - p.

177

(54)

49

• la chair : viande, carne •

"Ça me faisait drôle de me coucher dans les draps chaulflfés pa.r une autre viand e. " (1) • 1 'estomac : gésier •

"Faut jamais s'en souvenir avec du vin dans le gésier." (2) • la tête est toujours suivie d'un adjectif péjoratif

tête de courge, tête de navet, tête de lard ou encore toupin (vase à deux anses).

Parfois, le contraire se produit:

"J'arrivais en tirant l'attelage par la figure." (Il s'agit ici. du mulet de Clarius)

Toutes ces expressions ajoutent au pittoresque du récit.

(1) Un de Baumugnes - p. 101 (2) Un de Baumugnes - p. Il (3) Un de Baumugnes - p.

69

(55)

)

,

)

- So

LES VOCABLES CAi\llPAGNARDS

Pour demander son nom à une personne, on dit "Comment qu'on y dit 1"; et l'on répond de même.

"- Et comment on te di t 1

- On me dit: Angèle, comme la maman." (1) "On y dit Panturle. Son nom c'est Bridaine." (2) "Il Y en a une qu'on y dit: la Piémontaise." (3)

La plupart des appellations ont un sens diffé-rent à1a campagne :

• En provençal, l'enfant veut dire le fils:

"Je pars. L'enfant me l'a fait dire hier."

(4)

"Alors, comme ça, l'enfant te réclame 1"

(5)

"Il vient de partir. Et pour où ? Chez l'enfant." (6)

• Le jeune homme désigne le petit garçon:

"Elle portait le jeune homme dans un sac."

(7)

• Monsieur est employé pour un bébé:

"Monsieur Pancrace chante "acri bibi"." (8) "Monsieur Pancrace mâchait la fleur du sein comme

un éperdu." (9)

• Le mot fille(sans l'adjectif jeune) n'a pas de sens péjo-ratif et signifie "ma fille" avec une nuance d'affection.

"Pas de mal, père? Non, fille." (10)

(1 ) Un de Baumu~nes - p. 182 (6 ) Regain - p~ 29 (2 ) Regain - p. 152 (7) Regain - p. 13

(3) Re~ain - p. 10 (8) Un de Baumu~nes - p. 176

(4)

Regain - p. 23 (9 ) Un de Baumugnes - p. 166

(56)

51

"Fille, c'est tant de choses qu'il y a à dire que mieux vaut dire: "Fille", puis rester là." (1) • Demoiselle est employé pour Mademoiselle. C'est un terme de politesse.

"Vous n'avez pas froid, demoiselle 1" (2 )

"Demoiselle, vous le saviez que je devais venir '1" (3) "Et alors, la demoiselle, vous venez de là ?

Elle devait avoir cinq ans." (J.I.) • Sieurs est employé pour Messieurs.

"Sieurs Dames, pour soulager les chevaux 11 (5)

Gars

"Mon gars, mon pauvre gars, c'est à refaire."

(6)

(1) Regain - p. 183 (2 ) Un de Baumugnes - p. 167 (3) Un de Baumugnes - p. 113

(4)

Un de Baumugnes - p. 181

(5)

Regain - p. 9 (6) Un de Baumugnes - p. 170

(57)

LE VOCABULAIRE PROVENÇAL

Le nomure des mots provençaux rencontrés dans les oeuvres de Giono est restreint, ce qui indique que l'auteu.r ne s'intéresse pas outre mesure au félibrige.

chambron, chambroun, cambroun cigalon, cigaloun

fenestron, fenestroun

petite chambre. petite cigale. petite fenêtre.

fourchon, fourchoun, fourcoun branche d'une fourche ou d'une fourchette. Petit rateau à deux ou trois dents servant

à

écarter les feuilles pour découvrir les châtaignes •

• santon, santoun : petite statue sainte en

argile qU'on trouve communément dans les foires.

bourras, borras étoffe de laine grossière.

bastide, bastido petite maison de campagne.

calan (du latin calena) sorte de tasse. campana, campana coufin dourgue, dourc draille, drajo troupeaux. • escudet

l'on applique sur l'estomac.

cloche.

cabas, panier.

vase pour conserver la graisse. passage utilisé par les

(58)

53

espère

galavard, galabard (languedo-cien) • garrigues attente vorace, fai.néant boyau farci. aussi

sol calcaire recouvert, de chênes-verts ou de taillis peu épais.

mas (du latin mansus) maison de callpagne ou ferme. matagot, matagoun singe, G~<alement chat

sor-cier qui enrichit ceux qui prennent soin de lui selon une croyance populaire.

• mistral : grand vent du !)ord-0ues"t qui

prend naissance dans la vallée du Rhône.

plan plan., plateau.

semoustat, soumoustat vin tiré de la cuve avant que la fermentation soit achevée.

• ser serpe, nom féminin pour

serpent.

• taillole (vient de taille) : bande de lainage dont les paysans méridionaux se servent pour tenir leur pantalon.

• viedese : nigaud, dr81e.

Certaines appellations sont dialectales : sauvagine esquirol paroque • aspic sanglier. écureuil. perroquet. lavande.

(59)

Mises à part les particularités lexicographiques provençales que nous avons énumérées, il est impossible de déga-ger ce qui est caractéristique du langage du Midi pour la bOlIDe raison que les particularités du dit langage se retrouvent d'une façon plus ou moins marquée dans la langue familière des quatre

coins de la France et aussi nartout ailleurs où existe la fran-conhonie. Ainsi

• les confusions de l'article,

• 1 es confusions entre la préposition et l'article, • les transpositions grammaticales,

• l'emploi polyvalent de la conjonction "que",

• les confusions entre les verbes être et. avoir, etc

sont communes au chauffeur dEl taxi montréalais et au pêcheur

haïtien.

C'est donc davantage par le lexique et la topo-nymie que l'on reconnaît l'influence provençale chez Giono.

(60)

III -

LA

SYNTAXE

Figure

TABLE  DES  MATIERES  Introduction  .  .  1  l  - LA  MORPHOLOGIE  L'article  7  Le  Substantif

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