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Expériences pré-migratoires et projets de vie socioprofessionnelle des femmes immigrantes ouest-africaines à Québec

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Academic year: 2021

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EXPÉRIENCES PRÉ-MIGRATOIRES ET PROJETS DE VIE

SOCIOPROFESSIONNELLE DES FEMMES IMMIGRANTES OUEST-AFRICAINES À

QUÉBEC.

MÉMOIRE

ROSALIE DEMOSSE SENE

Maitrise en service social

Maitre en service social (M.Serv.Soc.)

Québec, Canada

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RÉSUMÉ

Le présent mémoire a pour objectif de mieux comprendre, à travers les expériences pré-migratoires, le processus d‘insertion socioprofessionnelle des femmes immigrantes provenant de l‘Afrique de l‘Ouest francophone. Dans cette étude, un portrait sur le vécu de femmes hautement qualifiées provenant de la région ouest-africaine francophone est dressé avec les données sociodémographiques. Ce portrait retrace ainsi leur vécu respectif avant, pendant et après le processus d‘immigration ainsi que celui de leur intégration professionnelle dans la province québécoise, plus précisément dans la capitale nationale. Cette étude se veut descriptive et qualitative. Le choix du sujet de recherche est justifié non seulement par la complexité de la situation socioprofessionnelle des femmes immigrantes ouest-africaines hautement qualifiées, mais aussi par le fait que cette population appartenant à la minorité visible ne fait pas souvent l‘objet d‘études.

L‘approche théorique dans laquelle nous nous inscrivons s'appuie sur l'interactionnisme symbolique. Il a permis d‘analyser l'intégration professionnelle des femmes immigrantes comme un phénomène social résultant d'une interaction de ces femmes avec la société d'accueil. Cette théorie est complétée en cela par la théorie de capital humain qui résume en général l‘ensemble des capacités et compétences de la personne immigrante.

L'analyse des données issues des dix entrevues semi-dirigées que nous avons réalisées met en exergue le capital socio-professionnel pré-migratoire de ces femmes, leur vécu post-migratoire ainsi que l‘influence de celui-ci dans leurs projets d‘avenir et leur intégration socio professionnelle. Les résultats obtenus démontrent que l‘expérience socio-professionnelle pré-migratoire des femmes ouest-africaines n‘a pas souvent d‘impact sur l‘intégration de ces femmes mais qu‘elle pourrait s‘avérer utile en cas de reprise des études académiques.

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ABSTRACT

This research addresses the question of socio-professional insertion of immigrant women coming from the French-speaking West Africa, considered through their pre-migration experiences. This study describes precisely the reality of skilled (or qualified) immigrant women before, during and after the process of immigration and their socio-professional integration in Quebec City. Socio-demographic characteristics were used to collect information on participants and complete the portrait of their reality.

This study is meant to be descriptive and qualitative. The topic of this research was selected for study in view of completing a lack of work on visible minority, particularly immigrant women from the French-speaking West Africa. Above all, it was an opportunity to explore the complexity of their socio-professional integration.

This qualitative descriptive study using a symbolic interactionism perspective was employed in order to analyse the social phenomena of the immigrant women‘s socio-professional integration. Moreover, this view allows to underline the interaction of the women with the host society. The human capital theory is added to give an overview about their abilities and skills.

After ten semi-structured interviews, the results of this research conclude and highlight the socio-professional capital of women coming from the French-speaking West-Africa before landing to Canada, their post-migration experience and finally the impact of it as a factor on their future projects and socio-professional integration. Nonetheless, the pre-migration experience does not appear as having an influence on their social integration but could be useful in the case of resumption of academic studies.

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TABLE DES MATIÈRES

RÉSUMÉ ---iii

ABSTRACT ---v

TABLE DES MATIÈRES --- vii

SIGLES--- xv DÉDICACES --- xvii REMERCIEMENTS --- xix INTRODUCTION ---1 PREMIERE PARTIE ---4 Chapitre I: Problématique ---4 1. 1. Contexte socio-historique ---4

1.1.1. La migration internationale : un phénomène ancien en pleine croissance --- 4

1.1.2. Les migrations en Afrique de l‘Ouest --- 6

1.2. Féminisation des flux migratoires ---7

1.2.1. Les facteurs explicatifs de la migration féminine--- 9

1.2.2. Caractéristiques principales des femmes immigrantes au Québec --- 10

1.3. Les objectifs de la recherche --- 13

1.4. La Recension des écrits --- 14

1.4. 1. L‘expérience pré-migratoire --- 14

1.4.1.1. L‘expérience professionnelle --- 14

1.4.1.2. Les compétences linguistiques --- 15

1.4.2. Intégration des femmes immigrantes ouest-africaines --- 17

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1.4.2.2. Les facteurs défavorables à l‘intégration --- 22

1.5. Les limites des recherches --- 26

1.6. La pertinence scientifique et sociale --- 28

1.6.1. La pertinence scientifique --- 28

1.6.2 La pertinence sociale --- 29

CHAPITRE II : Cadre théorique et conceptuel --- 30

2.1. Cadre théorique --- 30

2.1.1. L‘interactionnisme symbolique --- 30

2.1.1.1. Origine et définition --- 30

2.1.1.2. La vision interactionniste symbolique dans une démarche migratoire --- 32

2.1.2. La théorie du capital humain --- 33

2.1.2.1. Définition --- 33

2.1.2.2. La théorie du capital humain dans une vision migratoire --- 34

2.2. Le cadre conceptuel --- 36

2.2.1. L‘insertion socioprofessionnelle--- 36

2.2.2. Femme immigrante --- 36

2.2.3 L‘expérience pré-migratoire --- 37

CHAPITRE III : La Méthodologie --- 38

3.1. Le type de recherche utilisé --- 38

3.2. La démarche d‘analyse --- 39

3.3. La population à l‘étude et critère de sélection --- 39

3.4. Le choix de l‘échantillonnage et la taille de l‘échantillon --- 40

3.5. Le mode de recrutement --- 41

3.6. Le mode de collecte des données et les instruments envisagés --- 41

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ix

3.6.2. Les instruments utilisés --- 43

3.7. Les méthodes d‘analyse des données recueillies --- 43

3.7.1. La transcription des données --- 43

3.7.2. Codage et classification des données --- 44

3.8. L’Éthique de la recherche --- 45

3.9. Difficultés rencontrées --- 45

DEUXIÈME PARTIE --- 47

CHAPITRE IV : Analyse et interprétation des données --- 47

4.1. Profil sociodémographique des enquêtées --- 47

4.2. Présentation des participantes --- 50

4.2.1. Description du profil individuel des participantes --- 50

4.2.2. Les caractéristiques socio-démographiques --- 53

4.2.2.1. L‘âge --- 53

4.2.2.2. Situation matrimoniale --- 53

4.2.2.3. Appartenance religieuse --- 55

CHAPITRE V : Le vécu pré-migratoire --- 56

5.1. Le niveau d‘étude et la profession occupée avant l‘immigration --- 56

5.2. La situation financière et sociale avant immigration --- 58

5.2.1. Sur le plan financier --- 58

5.2.2. Sur le plan social --- 59

5.3. Les soubassements de l‘immigration : Pourquoi tout quitter? --- 61

5.3.1. Situation sociopolitique du pays d‘origine --- 62

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x

5.3.1.2. Le contexte politique du pays d‘origine --- 63

5.3.2. Offrir un meilleur avenir aux enfants --- 65

5.4. Les moyens financiers mobilisés et les différentes étapes de l‘immigration --- 68

5.4.1. Les moyens financiers mobilisés --- 68

5.4.2. Les différentes étapes de l‘immigration --- 69

5.5. La langue française : un paramètre déterminant dans le choix --- 70

5.6. Pourquoi le choix du Canada et du Québec : la publicité --- 70

CHAPITRE VI : La période d’installation --- 72

6.1. La recherche de logement --- 72

6.2. Les différents services communautaires utilisés --- 73

6.3. Le dépaysement --- 74

6.4. Le réseau social du pays d‘origine --- 74

6.5. Le processus d‘intégration professionnelle et sociale --- 77

6.5.1. L‘utilisation des services gouvernementaux et communautaires --- 77

6.5.2. Le réseau social ou club d‘amis --- 79

6.5.3. Médias et internet --- 79

6.6. Les difficultés liées à l‘intégration professionnelle des immigrantes --- 81

6.6.1. Reconnaissance des diplômes et acquis professionnels --- 81

6.6.2. L‘expérience québécoise ou canadienne de travail --- 83

6.6.3. Le sentiment de discrimination --- 84

6.6.4. Le facteur culturel --- 86

6.6.5. La conciliation travail-famille --- 87

6.7. L‘influence des expériences pré-migratoires dans un contexte migratoire --- 88

6.7.1. L‘influence professionnelle pré-migratoire au niveau des études --- 88

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xi

6.7. 3. Les perspectives d‘avenir --- 91

6.7.3.1. L‘avenir professionnel et social --- 91

6.7.3.2. La question du retour --- 92

CHAPITRE VII : Discussion --- 93

7.1. Le vécu pré-migratoire --- 93

7.2. Le parcours post-migratoire --- 96

7.2.1. La reconnaissance des diplômes obtenus à l‘extérieur du Canada et du Québec --- 96

7.2.2. Les réseaux sociaux du pays d‘accueil --- 98

7.2.3. La discrimination --- 99

7.2.4. Les perspectives d‘avenir en terre d‘accueil --- 102

7.5. L‘influence du vécu pré-migratoire sur les projets vie des femmes. --- 103

CONCLUSION --- 106

BIBLIOGRAPHIE --- 109

ANNEXES --- 120

Annexes I : Formulaire de consentement --- 121

Annexe II : Annonce de recrutement --- 126

Annexe III : Grille d’entrevue --- 128

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LISTE DES TABLEAUX

Tableau I. Récapitulatif du profil des répondantes………48 Tableau II. Récapitulatif du vécu pré-migratoire : parcours scolaire et professionnel………57 Tableau III. Récapitulatif du vécu pré-migratoire : raison de départ ……….67

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SIGLES

AFD : Agence Française de Développement

MICC : Ministère de l‘Immigration et des Communautés Culturelles OCDE : Organisation de Coopération et de Développement Économique OIM : Organisation Internationale de la Migration

OIT : Organisation Internationale du Travail ONU : Organisation des Nations Unies

SOIIT : Service d'Orientation et d'Intégration des Immigrants au Travail UEMOA : Union Économique et Monétaire Ouest-Africaine

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DÉDICACES

Je dédie ce travail :

À mon père Henry Jean André Latyr SENE À ma mère Mauricette Aïda FAYE

C‘est le seigneur qui a donné, c‘est le Seigneur qui a repris, que son nom soit béni à jamais par ce travail et que tous les efforts que vous avez consentis pour mon éducation, ma réussite et ma santé soient récompensés au centuple au plus haut du ciel. Que la terre vous soit légère et que Dieu vous accueille au paradis. Amen.

À ma fille Anne Marie Agathe Baitene Sambou et à ma nièce Bintou Marone qui ont eu à supporter mes nombreuses absences, je vous demande pardon. À ma fille Anne, je dis que dans la vie, l‘espoir est toujours permis, il suffit d‘y croire. Trouve ici l‘expression de tout l‘amour que je te porte.

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REMERCIEMENTS

Je remercie :

 Dieu le Tout-Puissant qui m‘a donné la chance de réaliser ce travail.

 La Sainte Vierge Marie pour son assistance maternelle en tout temps et tout lieu.

 Ma directrice de mémoire, Madame Stéphanie Arsenault, pour avoir accepté de diriger ce travail, pour son soutien moral infaillible et pour son esprit d‘ouverture, ses conseils, sa disponibilité et son abnégation. Trouvez ici, chère madame, l‘expression de mes remerciements les plus sincères. Que le Bon Dieu vous comble et vous le rende au centuple.

 Tout le corps professoral de l‘École de Service social de l‘Université Laval pour sa disponibilité et son soutien.

 Mes sœurs Marie Hélène Fatou N‘diaye, Anna Diouma Sène, Virginie Bouguine Sène, et Aïssatou Badiane pour leur soutien et leur compréhension. Merci de m‘avoir aidé à réussir, car sans vous je n‘y serai pas arrivée.

 Mes remerciements également à l‘endroit d‘une personne très spéciale pour moi qui m‘a tendu la main, m‘a soutenue et surtout a su croire en moi et m‘a donné une seconde chance pour réussir. Je veux nommer Abbé Ambroise Tine, je te dis merci infiniment. Sans toi, je n‘y serais pas arrivée.

 Mon papa spirituel, le frère Jean Marie Rousseau. Pour tes prières, ton soutien, ta disponibilité et ton sens de l‘écoute, je te dis merci papa.

 Mes amies Henriette Marthe Diatta, Fatou Gaye, Fatou Senghor, vous avez facilité mon intégration à Québec et avec vous je n‘ai pas senti l‘isolement : vous êtes les meilleures.  Un remerciement très particulier à Bienvenu Noumon qui a pris le soin de lire et relire ce

travail à plusieurs reprises, je te dis merci beaucoup, ton temps et ton soutien m‘ont été très précieux.

 Toutes les femmes ouest-africaines qui ont répondu à notre entrevue. Grâce à votre collaboration, ce travail a pu être réalisé. Je vous dis merci tout en vous exhortant à toujours persévérer, il reste du chemin à faire. Il n‘y a pas de place pour le découragement.

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xx

 Merci à René Vaillancourt et à toute sa famille, à tata Jeanne d‘Arc pour ses petits plats bien québécois.

 À tous mes amis et compagnons d‘enfance avec qui j‘ai grandi à Grand Thialy, merci pour vos encouragements, car difficile a été le chemin.

 Je ne saurais terminer sans évoquer la fondation FORD qui m‘a permis de réaliser ce rêve, ce vœu, en m‘accordant un soutien financier très apprécié. Merci aussi à toute la famille fordienne, avec une mention spéciale à madame Clotilde Sène pour ses conseils et son soutien.

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1

INTRODUCTION

L‘histoire de l‘humanité est intrinsèquement liée à des mouvements migratoires. L‘exode rural, la fuite des zones de conflits et le nomadisme ne sont pas des exclusivités du XXe et du XXIe siècle. Depuis toujours, l‘être humain s‘est déplacé à la recherche d‘un meilleur lendemain. Pour l‘ONU, « Bien que l‘humanité ait toujours été migrante, les grandes migrations intercontinentales ont commencé au XVIe siècle, à l‘ère de l‘expansion européenne. L‘établissement des colonies a entraîné le déplacement d‘un nombre important de sujets des puissances coloniales » (ONU, 2004, p. 3).

Aujourd‘hui, face à une mondialisation où la concurrence économique et sociale est de mise, le phénomène de l‘immigration occupe de plus en plus une place déterminante tout en engendrant son lot de défis.

L‘Afrique subsaharienne, plus précisément la zone ouest-africaine, a souvent été le foyer d‘importants déplacements de populations dont une des conséquences est l‘établissement de sa population dans ce territoire (Cissé et Fall, 2007). Cependant, différentes formes de mouvements de populations ouest-africaines ne datent pas d‘aujourd‘hui : « La forme de mobilité la plus ancienne est celle liée à la recherche de nouvelles terres de cultures ou de pâturage » (Cissé et Fall, 2007, p. 10), et Sow (2006) de rajouter que :

les migrations de population ne sont pas des mouvements d‘une histoire récente dans le monde. L‘Afrique en a sa part. Son histoire abonde en exemples de courants migratoires qui ont, avec le temps, façonné son visage actuel, avec le redéploiement constant de ses populations, la création et la recréation non moins constantes de ses frontières politiques, économiques et culturelles. Chaque époque a ses modèles migratoires façonnés par des facteurs liés à des contextes propres autant qu‘à des phénomènes ou des évènements partagés… D‘où la complexité des questions contemporaines de la migration qui posent en filigrane à la fois le choc des économies, celui des civilisations, des sociétés, des systèmes sociaux autant que des circonstances géopolitiques (p. 1).

Par ailleurs, la migration féminine de manière générale a toujours été un phénomène invisible. En effet, la littérature décrivant les phénomènes de cette migration de population a souvent ignoré la participation des femmes dans ce processus migratoire. Cette invisibilité

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2

de la migration des femmes pourrait être liée à l‘organisation sociale, surtout dans les sociétés dites patriarcales comme c‘est le cas en Afrique (Oso, 2000).

La présente recherche, portant sur les expériences pré-migratoires et les projets de vie des femmes immigrantes de l‘Afrique de l‘Ouest, vise à mieux comprendre le processus migratoire par lequel ces femmes ouest-africaines qualifiées et ayant déjà une expérience professionnelle consistante ont décidé de quitter leur pays d‘origine. La compréhension de ce processus d‘expériences pré-migratoires et de projet de vie professionnelle sera un point important dans la réflexion sur la manière dont ces femmes africaines ayant déjà exercé un emploi arrivent à s‘insérer et à s‘adapter dans leur pays d‘accueil.

La question générale de la recherche se présente comme suit : « Quelles influences peuvent

avoir les expériences pré-migratoires des femmes ouest-africaines sur leurs projets d’insertion socioprofessionnelle à Québec? » L‘objectif de ce questionnement est de voir

comment les expériences socioprofessionnelles pré-migratoires des femmes ouest-africaines facilitent ou non leur intégration dans la société québécoise.

Cette étude est divisée en deux grandes parties. La première partie décrit la problématique en situant le phénomène de l‘immigration et exposant des travaux sur l‘immigration féminine. Une recension des écrits sur les expériences pré-migratoires et les facteurs d‘intégration professionnelle y est également présentée. L‘identification des limites méthodologiques dans les études consultées ainsi que la pertinence scientifique et sociale sur la question de l‘immigration des femmes est aussi abordée. Le cadre théorique et conceptuel comprenant le paradigme épistémologique et la perspective théorique complète cette première partie.

Dans celle-ci, la méthodologie, qui constitue le dernier chapitre, décrit la démarche utilisée pour effectuer la recherche. Elle comprend l‘approche privilégiée, le type de recherche, la population étudiée, l‘échantillonnage, le mode de collecte des données et les instruments envisagés.

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3 Dans la deuxième partie de cette recherche, qui regroupe quatre chapitres, nous retrouvons la présentation des résultats, de l‘analyse et de la discussion, suivie d‘une conclusion qui reprend les principaux éléments présentés dans le cadre de cette étude en guise de synthèse.

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PREMIERE PARTIE

Chapitre I: Problématique

1. 1. Contexte socio-historique

1.1.1. La migration internationale : un phénomène ancien en pleine croissance

Dans l‘histoire de l‘humanité, la migration est un fait qui a toujours marqué le quotidien de l‘Homme qui se déplace pour différentes raisons et selon ses besoins. Aujourd‘hui, la migration ou les mouvements de population demeurent un phénomène indissociable dans les rapports entre les personnes, mais aussi entre les pays. Cette ampleur des mouvements de populations a atteint un sommet historique, ce qui entraine des conséquences tant pour les zones d‘origine que pour les zones d‘accueil. Cette ampleur de la migration peut s‘expliquer par un certain nombre de phénomènes, comme la mondialisation, qui a pris beaucoup de place dans les rapports entre les hommes et les pays, ce qui explique le déplacement de la main d‘œuvre des pays sous-développés vers les pays industrialisés, mouvement favorisé par l‘interdépendance et aussi par les grandes inégalités socio-économiques entre ces pays (Fonds des Nations Unies pour la population (UNFPA), 2006). De plus, la migration est souvent influencée par la situation politique et économique précaire qui sévit dans certains pays du Sud.

Selon l‘Organisation des Nations Unies (ONU), « entre 2005 et 2010, le nombre total de migrants internationaux devrait augmenter de 10 pour cent, ce qui porterait, en 2010, le nombre total de migrants internationaux dans le monde à 214 millions. » (ONU, 2008, p. 1 Traduction libre). Le mouvement des populations, soit à l‘intérieur ou à l‘extérieur d‘un continent, d‘un pays ou d‘une région, a été provoqué entre autres par les phénomènes comme les conflits armés (qui ont sévi dans certaines zones), les sécheresses, les famines ou bien même par la traite négrière et la colonisation qu‘a connu le continent africain. Avec cette mondialisation croissante, l‘image actuelle du monde tend vers une diversité culturelle où les mouvements de populations peuvent être analysés sous plusieurs angles.

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5 Les déplacements de populations ne se font plus seulement des pays du Sud vers ceux du Nord, ni entre les pays du Sud. On assiste de nos jours à une tendance migratoire entre pays du Nord. Autrement dit :

Si la décision d‘émigrer n‘est pas accessible à tous, la migration n‘est toutefois pas l‘apanage des pays du Sud. La scène politico-médiatique n‘hésite pourtant pas à mettre en exergue le schéma simpliste qui consiste à réduire la migration internationale à un déplacement du sud vers le nord, schéma qui alimente de fait le mythe de l‘invasion des pays développés par les populations issues du tiers-monde désireuses de fuir une pauvreté endémique. La réalité est autrement plus complexe et la tendance à la mondialisation des flux s‘exerce non seulement dans tous les grands pays d‘immigration au Nord et ses principaux bassins d‘emploi, mais aussi dans des pays émergents au Sud (Minvielle, 2010, p.3).

Ces forts mouvements de population ont engendré le déplacement d‘au moins 53 millions de personnes entre pays du Nord, 61 millions entre pays du Sud et 62 millions entre pays du Sud et ceux du Nord (Agence Française pour le Développement (AFD), 2010).

Les migrations mondiales sont très variées et peuvent dépendre de plusieurs facteurs, par exemple la motivation de la personne qui décide de partir. C‘est un phénomène qui concerne aussi bien les pays riches que les pays pauvres, ainsi que toutes les couches sociales de la population. C‘est ce qui explique qu‘à l‘intérieur d‘un même pays ou entre pays limitrophes, les déplacements de populations sont très importants et récurrents, « des zones rurales pauvres vers les [zones] plus prospères » surtout dans certains pays d‘Afrique de l‘Ouest (Tandian, 2007, p. 5).

Cependant, l‘aspect économique des migrations, comme les salaires très bas et le niveau de vie faible, peut être à l‘origine des déplacements des populations en quête d‘un mieux-être économique et social. Les migrations internationales prennent la plupart du temps racine dans les inégalités entre pays, régions et continents. Sous cet angle, le rapport de l‘Organisation Internationale des Migrations (OIM) soutient que les mouvements de populations sont devenus une nécessité dans la quête de ce mieux-être, que ce soit à l‘intérieur ou à l‘extérieur des pays (OIM, 2009).

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6

Cette quête du mieux-être est due à la croissance économique de certains pays qui attirent les habitants des pays sous-développés et dépourvus d‘emplois pour les personnes actives, emplois qui devraient permettre d‘accéder à un niveau de vie acceptable et à de bonnes conditions sociales.

Cependant, chacun semble trouver son compte dans le phénomène de l‘immigration, du moment que les pays développés ont de plus en plus besoin de main d‘œuvre et que les pays sous-développés, réservoirs abondant de main d‘œuvre extrêmement mobile, sont en quête de ressources financières (UNFPA, 2005). D‘après une étude de la division de la population des Nations Unies de 2008, on estimait le stock des migrants internationaux à 3,1 % de la population mondiale pour l‘année 2010.

1.1.2. Les migrations en Afrique de l’Ouest

Les mouvements de population ont toujours marqué l‘histoire de l‘Afrique de l‘Ouest, c‘est ce qui explique en partie sa composition démographique actuelle (Cissé et Fall, 2007). Les populations ouest-africaines se déplaçaient à l‘origine pour la « recherche de nouvelles terres de culture ou de pâturage » (Cissé et Fall, 2007, p.10). Par ailleurs, avec sa « colonisation » et sa « décolonisation » (Sow, 2006, p. 1), la région ouest-africaine a connu une nouvelle forme de migration basée essentiellement sur l‘économie et la conquête territoriale (Ndiaye et Robin, 2010). Mais, en ce qui concerne les migrations internationales au niveau de l‘Afrique de l‘Ouest, c‘est-à-dire migrations entre pays ou entre continents, celles-ci sont souvent l‘objet d‘« une dynamique de régionalisation aux réseaux multiples qui, sans perdre leur ancrage local, se rattachent à la mondialisation des circulations migratoires contemporaines » (Ndiaye et Robin, 2010, p. 49).

Traditionnellement, la migration était surtout l‘affaire des hommes africains marqués par des sociétés patriarcales qui quittaient le plus souvent pour voyager et chercher de quoi ramener chez eux, car les femmes étaient considérées « comme des membres de la famille ne produisant pas de revenus monétaires, et donc […] n‘étant pas concernées par la migration (synonyme de migration de travail) » (Rodet, 2009, p. 18).

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7 Aujourd‘hui, près d'un migrant sur deux (47 %) est une femme en Afrique. La croissance du nombre de femmes migrantes se fait toujours sentir au niveau des sous-régions d'Afrique de l'Ouest et de l'Est. Les femmes migrantes se tournent également vers les pays du Nord, en moindre proportion cependant que les hommes (UNFPA, 2006).

Par exemple, pour Blanchet, Keith et Shackleton (2006), quelque vingt mille infirmières, sages-femmes et médecins africains alimentent chaque année le phénomène de fuite des cerveaux. En 2000, les infirmières déclarées diplômées au Ghana ont préféré prendre le chemin de l‘immigration malgré la forte demande du secteur de la santé dans le pays (UNFPA, 2006).

1.2. Féminisation des flux migratoires

Comme nous venons de le mentionner, dans le passé, les migrations et surtout les migrations internationales de travail semblaient être principalement le propre des hommes. Même si la migration des femmes existait, elle était classée dans le lot des « mobilités d‘accompagnement » en ce sens que les femmes migraient dans le cadre du mariage, d‘une migration familiale ou encore du regroupement familial.

Selon la perception commune, les migrants sont majoritairement des hommes. Et pourtant d‘après les statistiques mondiales de la migration :

Les femmes migrantes ont été presque aussi nombreuses que les hommes migrants. Déjà en 1960, les femmes migrantes ont représenté près de 47 sur 100 migrants vivant hors de leur pays de naissance. Depuis lors, la part des femmes migrantes parmi tous les migrants internationaux a augmenté régulièrement pour atteindre 48 pour cent en 1990 et près de 49 pour cent en 2000. En 2000, les femmes migrantes constituaient près de 51 pour cent de tous les migrants dans les pays développés du monde et environ 46 pour cent de tous les migrants dans les pays en développement (traduction libre, OIT, 2003, p. 9 dans Piper, 2005, p. 3).

Pour Fankhauser et Kofler (2009), le phénomène de la féminisation de la migration n‘est donc pas nouveau, mais ce sont plutôt les schémas ou les formes de la migration des femmes qui ont changé. Ce qui a fait qu‘au cours des dernières décennies, on a assisté à l‘émergence des recherches sur la « féminisation de la migration » (Fankhauser et Kofler,

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8

2009, p, 6), qui jusque-là était considérée comme un « phénomène asexué », c‘est-à-dire exclusivement réservé aux hommes (Fankhauser et Kofler, 2009, p. 6).

Pour des auteurs comme Sow (2006), ce qui change dans le visage de la migration actuellement c‘est non seulement les « modèles migratoires », mais aussi :

La présence accrue des femmes [et] la qualité de leur participation, comme « actrices », à ces flux locaux, régionaux et internationaux. C‘est aussi la prise en compte de plus en plus significative de leur présence et les analyses d‘impact sur leurs conditions personnelles, sur les rapports sociaux de sexe dans la famille, leur position dans la communauté et la société globale. Intégrer le genre dans les études sur les migrations, y compris internationales, s‘impose aujourd‘hui (Sow, 2006, p. 1).

D‘après le rapport annuel de l‘UNFPA en 2006, la communauté internationale n‘a commencé que récemment à saisir l‘importance de tout ce que les femmes migrantes ont à offrir dans le cadre du développement, mais aussi des risques et des défis qu‘elles ont à relever quand elles partent vers d‘autres pays. Car, selon la Fédération Internationale des Droits Hommes (FIDH) (2007), à travers leur migration, les femmes disposent désormais de beaucoup plus de ressources et assument de nouvelles responsabilités qui leur permettent d‘accéder à une certaine autonomie financière; ce qui pourrait contribuer à changer la perception de la société quant au rôle de la femme, surtout dans les pays en voie de développement.

Les femmes, mariées ou célibataires, migrent de plus en plus de manière autonome pour de nombreuses raisons parfois identiques à celles des hommes : rechercher de meilleures conditions de vie, fuir les conflits dans les milieux d‘origine, échapper aux problèmes familiaux, etc. Le fait d‘accéder de plus en plus à de hautes études pourrait contribuer à influencer le fait de l‘autonomie de la migration des femmes ouest-africaines, mais aussi contribuer à l‘émancipation de la femme africaine sur le rapport de pouvoir dans les relations sociales entre les hommes et les femmes (Comoé, 2005).

Mais aujourd‘hui, pour des auteurs comme Fankhauser et Kofler (2009), les femmes migrent de plus en plus pour diverses raisons qui sont souvent indépendantes de « leurs familles » : elles sont en quête de plus d‘équilibre social, de plus de parité salariale et

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9 d‘émancipation, ce qu‘elles n‘ont pas toujours eu dans leurs sociétés d‘origine dominées par le système patriarcal instauré dans la majorité de ces sociétés.

Dans les mouvements migratoires, la « féminisation des départs » peut être à l‘origine aussi de la « féminisation de la main d‘œuvre » dans le pays d‘accueil, ce qui favorise activement l‘augmentation des envois de fonds émigrants dans le pays de provenance (Fall, 2002). Avec la féminisation des flux migratoires et des mouvements chez les femmes immigrantes, on assiste de plus en plus à la création de nouvelles perspectives de leadership et d‘entreprenariat (Fall, 2002).

1.2.1. Les facteurs explicatifs de la migration féminine

D‘après l‘Agence Française de Développement (AFD) (2010), « les mobilités humaines sont le produit d'une variété de facteurs économiques, sociaux, culturels, conflictuels, environnementaux ou sanitaires. Il n'existe donc pas de cause unique à ces phénomènes » (p. 12).

Toutefois, selon l‘Organisation Internationale du Travail (1999), la mobilité féminine englobe de nouveaux aspects :

Les femmes ne migrent pas aujourd‘hui pour rejoindre un conjoint, mais sont à la recherche d‘emplois mieux rémunérés et répondant à leurs qualifications académiques ou professionnelles. On estime que les femmes migrantes représentent presque la moitié des travailleurs migrants dans le monde d'aujourd‘hui. Cette féminisation est parfois caractérisée par une surreprésentation des femmes dans les migrations internationales (Traduction libre OIT, 1999, p. 245).

Cependant, la migration de cette main-d'œuvre féminine, comme cela a été mentionnée plus haut, peut être déclenchée par plusieurs facteurs. Elle peut être soit volontaire, soit forcée, par exemple pour les réfugiés. Mais toujours est-il que la plupart de ces femmes quittent leur pays pour travailler, retrouver leur famille ou même se marier.

Les causes dites économiques, dues à la conjoncture mondiale actuelle, touchent non seulement les hommes, mais aussi les femmes. Ce qui signifie que, tout comme les

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hommes, les femmes recherchent une situation économique plus confortable, des sources de revenus plus importantes pour elles, pour leurs familles ou même pour leur communauté (OCDE (2008); IOM (2009) cités dans AFD, 2010). Cependant, ces causes économiques peuvent venir du fait que les femmes deviennent plus actives et qu‘elles ont plus de responsabilités en raison de la croissance du nombre de femmes «chef de ménage » dans le monde. Mais elles constituent également une main d‘œuvre de choix dans les pays d‘accueil et un soutien financier pour les familles restées dans le pays d‘origine (Oso, 2000). En Afrique, cette migration féminine s‘est surtout accentuée lors de la crise économique qui a affecté une partie de l‘Afrique de l‘Ouest avec la dévaluation du franc CFA survenue dans les années 1990 et les programmes d‘ajustement structurel dans les années 1980 (Tandian, 2007). Toutefois, les départs peuvent être motivés par d‘autres raisons comme les systèmes politiques ou sociaux nouvellement instaurés dans certains pays sous-développés (absence de démocratie, changements dans les coutumes, etc.) de même que par les guerres qui peuvent y sévir.

La migration est donc devenue, pour de nombreuses femmes des pays en développement, une stratégie pour assurer la survie du ménage, échapper aux répressions familiales et culturelles (mariage forcé) et ainsi acquérir plus de liberté d‘expression et d‘autonomie. Dans cet ordre d‘idées, pour certaines femmes africaines, la migration constitue une échappatoire aux pressions sociales et culturelles de certaines sociétés, d‘un point de vue religieux ou traditionnel. Pour d‘autres, emprunter cette voie est l‘espoir de trouver une meilleure autonomie financière.

1.2.2. Caractéristiques principales des femmes immigrantes au Québec

En 2007, la province de Québec a enregistré l‘arrivée de 45 200 immigrants sur son territoire. Ceci témoigne d‘une augmentation par rapport aux années précédentes, à savoir 2006 et 2005 qui totalisent respectivement 44 700 et 43 300 immigrants (Girard, 2008). Le taux de Québécois d‘origine étrangère a ainsi atteint 11,5 % soit 851 560 immigrants, une nette progression depuis 1951 (5,6 %) (Statistique Canada 2006, Girard 2008). Entre 2002 et 2006, 57 484 (55,2 %) des femmes immigrantes admises au Québec ont été sélectionnées

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11 dans la catégorie de l‘immigration économique, 28 923 (27,8 %) dans le cadre du regroupement familial alors que 16 460 (15,8 %) ont été acceptées avec le statut de réfugié (Ministère de l‘Immigration et des Communautés Culturelles (MICC), 2006).

Les femmes immigrantes qui traversent les frontières canadiennes et québécoises sont le plus souvent très scolarisées et détiennent fréquemment un grade universitaire; leur nombre s‘élève à 98 080, soit 24,4 % de la population féminine hautement scolarisée (Statistique Canada, 2006). Ce pourcentage dépasse de 8,0 % la population féminine québécoise hautement scolarisée. Ces femmes immigrantes hautement qualifiées sont admises le plus souvent dans la catégorie des « travailleuses qualifiées » de l‘immigration économique. Les données du recensement de 2006 révèlent que 47 % des femmes immigrées au Québec appartiennent à une minorité visible (Statistique Canada, 2006).

D‘après une étude réalisée par Sweetman et McBride (2004), les femmes immigrantes diplômées possèdent en moyenne quatre ans d‘études de plus que les natives et six ans et demi de plus que les autres immigrantes scolarisées au Canada. Selon les données du MICC (2009), entre 2004 et 2008, les femmes issues de l‘immigration ayant totalisé au moins 17 ans de scolarité représentent 36,1 % du total. Ce niveau académique est beaucoup plus élevé que celui de la population native de la même catégorie. Selon Beaudoin (2011), en comparaison avec les autres femmes immigrantes, les femmes provenant de l‘Afrique détiennent un niveau de scolarité des plus satisfaisants avec 15 ans et plus de scolarité, car au moins « 32,4 % ont un grade universitaire, ce qui donne un écart de 8 points de pourcentage par rapport à l‘ensemble des femmes immigrantes dont le taux est de 24,4 % » (p. 12).

Cependant, Beaudoin (2011) souligne l‘existence de disparités entre les immigrantes provenant de différentes zones de l‘Afrique, car les femmes les plus diplômées proviennent surtout de l‘Afrique du Nord et de l‘Afrique Méridionale. Et plus d‘un tiers des femmes nées en Afrique subsaharienne ont étudié dans le domaine de la gestion ou de l‘administration publique tandis que celles nées en Afrique du Nord sont plutôt spécialisées dans les domaines scientifiques. Le taux d‘activité des femmes provenant de l‘Afrique se classe, selon Beaudoin (2011), comme suit pour ce qui est des immigrantes scolarisées au

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Canada : 68,9 % pour l‘Afrique de l‘Ouest, 64,3 %, pour l‘Afrique Orientale et 61,9 % pour l‘Afrique Centrale. Durant cette dernière décennie, les femmes provenant de l‘Afrique sont de plus en plus nombreuses au Québec. Ceci n‘est pas forcément le cas pour l‘Afrique de l‘Ouest : en 2006, le nombre de femmes immigrantes originaires de l‘Afrique Occidentale était estimé à 4 635 au Québec, constituant ainsi 1,0 % de la population immigrante (Beaudoin, 2011).

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1.3. Les objectifs de la recherche

La question de recherche se présente comme suit : « Quelles influences peuvent avoir les

expériences pré-migratoires des femmes ouest-africaines sur leurs projets d’insertion socioprofessionnelle à Québec?

Ce travail a pour objectif principal de cerner l’influence des expériences pré-migratoires

dans le processus d’immigration et d’insertion socioprofessionnelle des femmes provenant de l’Afrique de l’Ouest.

Les objectifs spécifiques visés dans cette recherche sont les suivants :

 Identifier et décrire les facteurs du parcours pré-migratoire qui ont influencé l‘immigration des femmes ouest-africaines.

 Décrire les stratégies d‘intégration professionnelle des femmes immigrantes à leur terre d‘accueil.

 Déterminer l‘influence de l‘expérience pré-migratoire dans le processus d‘intégration socio-professionnelle des femmes ouest-africaines.

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1.4. La Recension des écrits

Dans le cadre de cette recherche sur les influences que peuvent avoir les expériences pré-migratoires des femmes ouest-africaines sur leurs projets de vie et d‘insertion professionnelles à Québec, deux grandes phases seront distinguées dans la recension des écrits : la période pré-migratoire et l‘insertion socioprofessionnelle avec les facteurs qui l‘influencent.

1.4. 1. L’expérience pré-migratoire 1.4.1.1. L’expérience professionnelle

Les causes premières de leur migration étant diverses, les immigrants qui arrivent au Canada ont des acquis et des expériences professionnelles pré-migratoires différentes. Les immigrants sélectionnés ne viennent pas au Québec dépourvu de qualifications, ils ont pour la plupart un niveau scolaire et professionnel assez appréciable. Selon Bastien et Bélanger (2010), l‘immigrant quitte une carrière précaire ou plus ou moins prometteuse dans l‘espoir de voir sa position économique et sociale s‘améliorer dans son pays d‘accueil. Dans leurs travaux respectifs, les auteurs comme Freiberg (2000), Green et Worswick (2002), Ferrer, Green et Craig Riddell (2004), Aydemir et Skuterud (2004) font état d‘un écart assez positif important entre le revenu perçu durant la période de l‘expérience professionnelle pré-migratoire et celui que l‘immigrant perçoit une fois intégrée dans le cadre d‘une expérience de travail réglementaire.

Mahut (2012), dans son étude sur les « Bamakois diplômés », définit l‘expérience pré-migratoire des immigrants comme étant « l‘ensemble des ressources dont dispose un individu et qui sont le résultat de sa socialisation avant son émigration. » (Mahut 2012, p. 9). L‘auteur poursuit en précisant que pour définir cette expérience, « plusieurs critères peuvent être pris en considération : l‘origine sociale et familiale, l‘origine géographique (urbaine ou rurale), le genre (homme ou femme), l‘origine ethnique [...], le degré de scolarité ou encore la religion » (Mahut 2012, p. 9).

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15 Par ailleurs, certains immigrants sont choisis en fonction de leur parcours académique et de leurs compétences professionnelles. Il s‘agit de la catégorie des travailleurs qualifiés. Ils ont des motivations différentes de ceux qui viennent retrouver des membres de leurs familles (regroupement familial) ou qui arrivent en tant que réfugiés, ayant été souvent forcés de quitter leur pays d‘origine (Statistique Canada, 2005).

1.4.1.2. Les compétences linguistiques

Certaines études tentent de mettre en exergue l‘importance des « capacités linguistiques des immigrants dans le capital humain » (Blaser 2006, p.108). Les auteurs comme Godin et Renaud (2005) soulignent que les futurs immigrants de la province de Québec sont surtout sélectionnés selon leur capital humain, à savoir le niveau de scolarité, l‘expérience professionnelle, mais aussi les compétences linguistiques. Le niveau de connaissance linguistique constitue un élément très important dans le processus de la migration; c‘est dans ce sens que, selon Bastien et Bélanger (2010), l‘immigrant doit pouvoir communiquer dans au moins une des langues officielles du Canada pour faciliter son insertion professionnelle au Québec.

Dans le même ordre d‘idées, Lalonde (2003), dans le cadre de ses travaux, propose trois axes d‘insertion : l‘insertion économique, l‘insertion socioculturelle et l‘insertion linguistique.

En ce qui concerne l‘insertion linguistique, Lalonde (2003) affirme que le choix des immigrants francophones de s‘installer dans la province de Québec n‘est pas souvent fortuit : « Car c‘est sur la base du français, comme langue commune, que les immigrants misent pour s‘insérer rapidement sur plusieurs plans » (Lalonde, 2003.p. 63-64).

Pour renforcer cet axe proposé par Lalonde (2003), Blaser (2006) souligne que : « la connaissance des langues principales utilisées à Montréal devrait améliorer leur situation économique, car elle augmente la compétence de communication de manière directe et le transfert du capital humain acquis au pays d‘origine de manière indirecte » (Blaser, 2006, p. 3). Mais il semble judicieux de noter que, dans l‘étude de Blaser, même si le fait de

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parler français peut faciliter une insertion socioculturelle, une majorité de répondants a exprimé comme difficulté la compréhension du français québécois.

Toujours est-il que le deuxième aspect souligné par Lalonde (2003) porte sur l‘insertion économique avec comme effet les transitions des immigrants qui quittent un emploi pour un autre. Mais dans la dernière analyse de Lalonde (2003) sur l‘insertion socioculturelle, les réseaux jouent pour beaucoup dans l‘insertion des Maliens et leur inexistence ou leur faiblesse crée chez eux un sentiment d‘isolement. De ce fait, pour les immigrants Maliens établis dans la province de Québec :

le fait d‘avoir de la famille ou des amis établis ici offre une possibilité d‘aide et nous semble être un facteur prépondérant dans le choix d‘établissement. Celui-ci est souvent combiné au fait de maîtriser la langue d‘usage de la soCelui-ciété d‘accueil; ainsi il serait difficile de les départager tant les deux sont liés dans le discours (Lalonde, 2003, p. 83).

L'insertion culturelle dans le pays d'accueil peut parfois entraîner des modifications profondes sur le plan identitaire chez les personnes immigrantes. Pour certaines femmes, l'immigration peut entraîner une rupture parfois radicale par rapport aux valeurs culturelles habituelles, ce qui peut fortement influencer leur insertion sociale et professionnelle : leurs relations avec les autres se transforment (Bertot et Jacob, 1991).

Cependant les auteurs Cardu et Sanschagrin (2002) pensent que les femmes immigrantes : peuvent vivre des phases d'isolement, elles intègrent des statuts nouveaux et font face à la dévalorisation de statuts anciens (par exemple, le rôle de mère à la maison), elles subissent souvent une perte criante de capital social lorsqu‘elles sont issues de sociétés plus traditionalistes (dont les sociétés africaines, et plus précisément musulmanes) tout en étant placées, lors de leur processus d'insertion sur le marché du travail et dans les lieux de recherche d‘un emploi, devant un contact interculturel nouveau (Cardu et Sanschagrin, 2002, p. 91).

Mais en 2005, Godin et Renaud, en se basant sur une étude longitudinale réalisée auprès de 429 nouveaux immigrants établis à Montréal, démontrent que :

La connaissance pré-migratoire du français constituerait un facteur explicatif de la participation au marché du travail pour la première année d‘établissement si les caractéristiques des répondants sont prises en considération […]. En effet,

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17 pour cet épisode d‘établissement, les répondants connaissant le français à leur arrivée ont plus de chances d‘être en emploi que ceux qui ne le connaissent pas (Godin et Renaud, 2005, p. 160).

Plus loin dans l‘analyse de leurs résultats, Godin et Renaud soulignent que « la connaissance pré-migratoire des langues d‘usage du Québec n‘a pas d‘incidence sur la participation au marché du travail au fil des ans » (Godin et Renaud, 2005, p. 160).

Mais en analysant les travaux de Lebeau (1995) et de Lebeau et Renaud (2002, on découvre une toute autre vision à l‘effet que la connaissance du français favoriserait une plus grande mobilité et une meilleure insertion des immigrants dans le domaine professionnel dans la province de Québec.

En plus des facteurs linguistiques, selon une étude de Renaud et Martin (2006), la reconnaissance des diplômes, des acquis et du capital humain au moment de la migration peut faciliter l‘accès à un premier emploi et ainsi permettre une meilleure insertion.

1.4.2. Intégration des femmes immigrantes ouest-africaines

L‘intégration professionnelle pourrait être vue, selon Fournier et Monette (2000), comme un cheminement permanent où les acteurs sont en perpétuelle quête de « l‘afflux des occasions pour s‘améliorer et se développer (…) dans un tel contexte, le concept d‘insertion socioprofessionnelle dépasse largement le processus d‘accès à l‘emploi rémunéré » (p. 15). Laflamme (1993) catégorise l‘insertion professionnelle selon trois niveaux : la formation professionnelle, la transition professionnelle et l‘intégration professionnelle. Le premier niveau est celui de la formation professionnelle d‘un individu, c'est-à-dire son parcours académique, ainsi que toutes les aptitudes et connaissances requises, une formation professionnelle où l‘obtention d‘un diplôme pourrait constituer une porte d‘entrée dans le marché du travail. Pour Fournier et Monette (2000), cette « formation scolaire [est] dorénavant une condition minimale et non plus une garantie de succès » (p. 23). La transition professionnelle qui constitue le deuxième niveau, selon Laflamme, peut être considérée comme étant la manière dont fonctionne « l‘organisation du marché de l‘emploi » (p. 100). Cette transition professionnelle pourrait être observée chez les

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personnes immigrantes « par des retours à l‘école pour obtenir ou bonifier un diplôme » (p. 92). Le dernier niveau développé par Laflamme (1993) est celui de l‘intégration professionnelle qui peut être analysé à travers deux points de vue, à savoir « l‘intégration par la socialisation et l‘intégration selon la conjoncture » (p. 108-111).

Rappelons que les femmes immigrantes ouest-africaines sont pour plusieurs hautement qualifiées et ont immigré, pour bon nombre d‘entre elles, afin d‘offrir un meilleur cadre de vie à leur progéniture. Cependant, pour pouvoir réaliser ce rêve, il faut qu‘elles arrivent à une intégration réussie. Quoi qu‘il en soit, il est évident que tout nouvel arrivant dans une société, peu importe le motif de sa migration, ressent le besoin de s‘intégrer et de participer pleinement à la vie économique, sociale ou culturelle de sa société d‘accueil.

C‘est pour cela que l‘Organisation de Coopération et de Développement Économique donne sa vision de l‘intégration en notant que :

De tout temps et en tout lieu, les immigrés ont dû s‘adapter au pays d‘accueil. La nature du processus d‘intégration varie selon les pays et les époques, les antécédents migratoires du pays, les caractéristiques des nouveaux arrivants, les politiques générales en matière d‘immigration, les programmes d‘assistance aux immigrés existants et selon la situation socio-économique générale des pays hôtes (OCDE, 2007, p. 35).

Ce que signifie cette citation de l‘OCDE, c‘est le fait que toute personne immigrante a le devoir de s‘intégrer dans sa société d‘accueil selon les lois et règlements en vigueur. Par exemple, en ce qui concerne la politique mise en place en matière d‘immigration dans la province de Québec, il a été mentionné que :

Le succès de la politique d‘immigration est étroitement lié au succès de l‘intégration. Aussi, l‘exercice de planification doit-il prendre en compte les défis qui se posent à la société d‘accueil, en particulier relativement à l‘intégration des immigrants au marché du travail, à la francisation, à la régionalisation, au maintien du consensus social et à la capacité organisationnelle, ainsi qu‘à la gestion de la diversité. (MICC, 2010, p. 8). Certains auteurs, comme Arsenault et Giroux, donnent une définition plus large de l‘intégration des personnes immigrantes en soulignant dans leur étude que :

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19 L‘intégration est un processus qui développe la capacité de participer à la société sur tous les plans. Il s‘agit d‘un processus graduel et continu qui se déroule dans les différentes sphères de la vie de la personne (personnelle, familiale, professionnelle, religieuse, politique, etc.) et de la société qui implique autant la personne immigrante que la société en général dans laquelle elle s‘insère (Arsenault et Giroux, 2009, p. 42).

L‘étude de Gagnon, réalisée en 2009 auprès de onze sages-femmes d‘origine étrangère, souligne que pour une intégration professionnelle réussie, une utilisation adéquate des compétences professionnelles antérieures doit être prise en compte tout en ne rejetant pas les compétences acquises dans un contexte différent de celui dans lequel elles ont toujours évolué avant de migrer. Cette intégration ne saurait être complète sans une combinaison ou une prise en compte des attentes des sages-femmes par la société québécoise.

Par ailleurs, Gagnon (2009) précise que « l'intégration doit se faire dans un processus de réciprocité où le milieu d'accueil se montre ouvert à partager sa pratique et où la nouvelle arrivante s'engage activement dans son processus d'intégration. » (Gagnon, 2009, p. 166). Cependant, il est à noter que cette intégration des femmes immigrantes n‘est pas toujours chose aisée, surtout pour celles d‘origine africaine. Renaud (2005), dans son étude, déplore le fait que les immigrants d‘origine africaine ont plus de défis à s‘intégrer puisque leur accès à l‘emploi relève souvent du parcours du combattant et ceci malgré le fait que la plupart d‘entre eux ont un niveau de scolarité très appréciable.

Nikuze (2011) souligne dans sa recherche que l‘intégration des femmes immigrantes ouest-africaines dans la société québécoise passe par différents niveaux ou diverses stratégies propres à chaque femme immigrante subsaharienne, selon sa propre histoire de vie. Selon les résultats de sa recherche, certaines de ces femmes ont pu trouver du travail qui, soulignons-le au passage, ne correspond pas, pour la plupart, à leurs qualifications; en plus, elles sont souvent sous-payées par rapport aux natifs et cette réalité crée chez elles une situation de non-satisfaction qui peut bloquer leur intégration.

De nombreux auteurs comme Piché et Bélanger (1995) soulignent dans leurs travaux que, pour une intégration réussie des personnes immigrantes, plusieurs critères doivent être pris en compte, dont l‘âge et le niveau de connaissances linguistiques avant la migration. En ce

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qui concerne l‘âge, les auteurs, dans leurs travaux respectifs, soulignent que plus la personne immigrante est jeune, plus son intégration est facile (Monnier, 1993, cité dans Piché et Bélanger 1995). Le manque de connaissances linguistiques, selon les travaux de certains auteurs, peut constituer un frein. C‘est ce qu‘expliquent Chung et Yim (1993) dans une étude réalisée auprès d‘immigrants coréens à Montréal : « La barrière linguistique constitue un des principaux freins à l‘intégration de ces communautés à la société québécoise » (cité dans Piché et Bélanger, 1995 p. 17).

Pour Chicha et Charest (2008), les difficultés que rencontrent les immigrés dans la recherche d‘une insertion socioprofessionnelle conforme à leurs compétences peuvent avoir des conséquences négatives sur eux-mêmes, mais aussi sur la société d‘accueil. À cet effet, ils écrivent que :

La pauvreté touche des immigrés qui sont pourtant très qualifiés. Nous observons que le fait de connaître le chômage ou d‘occuper des emplois au salaire minimum engendre une frustration chez les immigrants. Ils sont relégués dans des métiers de manœuvres ou de vendeurs, alors qu‘ils détiennent des diplômes d‘ingénieur ou de médecin. Ceci peut créer de nouveaux groupes d‘exclus et malheureusement avoir une influence très dommageable sur la cohésion d‘une société (Chicha et Charest, 2008, p. 3).

L‘insertion socioprofessionnelle est un facteur déterminant dans le processus d‘immigration. Mais il est à noter que tout au long de son processus d‘insertion, l‘immigrant peut être confronté à plusieurs facteurs favorables ou défavorables.

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1.4.2.1. Les facteurs favorables à l’intégration : La reconnaissance des diplômes et des acquis

En matière d‘immigration, l‘insertion socioprofessionnelle occupe une place très importante. Les immigrants, quittant leur pays d‘origine et vivant souvent une situation de doute, éprouvent un sentiment d‘insécurité face à leur avenir lors de leur phase d‘adaptation dans leur nouveau pays d‘accueil.

Les immigrants de la catégorie des travailleurs qualifiés ont tous été sélectionnés sur la base de leur potentiel académique et social. Une fois ces immigrants installés sur leur terre d‘accueil, la reconnaissance de leurs compétences peut jouer un rôle déterminant dans leur processus d‘insertion. Selon Statistique Canada (2005), la reconnaissance des titres de compétences reste le moyen pour aboutir à une intégration réussie de la population immigrante, afin que celle-ci continue de participer pleinement à l‘évolution de la société d‘accueil. Cette reconnaissance des diplômes pourrait contribuer à réduire la sous-utilisation ou le gaspillage de cette main-d‘œuvre immigrante qualifiée (Hawthorne, 2008; Boudarbat et Chernoff, 2009). L‘analyse faite sur une étude longitudinale par les auteurs Bélanger, Bingoly-Liworo et Ledent, en 2010, démontre que la reconnaissance des diplômes obtenus à l‘extérieur pose beaucoup plus de problèmes pour les immigrants au Québec comparativement à ceux établis en Colombie-Britannique et en Ontario. La plupart du temps, ces immigrants détiennent un diplôme universitaire et d‘après Houle et Lahouria (2010), en 2008, le nombre de nouveaux immigrants au Canada ayant un diplôme universitaire avait doublé dans un intervalle de 14 ans, soit un taux de 45 % par rapport aux Canadiens de souche ayant un diplôme universitaire. Par ailleurs, toujours selon la même étude, dans la catégorie des travailleurs qualifiés :

72 % avaient un diplôme universitaire, de même que 41 % des conjoints et des personnes à charge. En outre, 33 % des immigrants de la catégorie du regroupement familial étaient titulaires d‘un diplôme universitaire. Quatorze ans plus tôt, les chiffres correspondants se situaient à 39 %, à 21 %, et à 12 % respectivement (Citoyenneté et Immigration Canada, 2004 et 2009 cités dans Houle et Lahouria, 2010, p, 19).

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1.4.2.2. Les facteurs défavorables à l’intégration

Plusieurs facteurs contribuent à freiner l‘insertion professionnelle et sociale des immigrants. Le processus d'insertion socioprofessionnelle fait partie des étapes les plus stressantes pour l'immigrant, car ce dernier peut rencontrer des barrières auxquelles il n'avait pas songé. Ces barrières à l‘insertion professionnelle peuvent être de nature sociale, historique ou culturelle en raison des caractéristiques propres à la société d‘accueil. D‘après Gagnon (2009), les obstacles à vaincre pour assurer une bonne insertion des personnes immigrantes sont souvent dus « à la faiblesse des réseaux de contacts et d'informations » (Gagnon, 2009, p. 33) ou à l‘existence d‘une discrimination ethnique.

Dans la même vision que Gagnon, les résultats de l‘étude de Charles (2011) démontrent que certains comportements discriminatoires à l‘endroit des infirmières issues de la minorité visible affectent leur processus d‘intégration professionnelle, comportements auxquels s‘ajoute l‘impact des différences culturelles dans la pratique en soins infirmiers. Toujours à la suite des observations de Gagnon, un autre facteur défavorable à l‘insertion professionnelle et sociale des immigrantes peut être souligné : il s‘agit de l‘origine ethnique des immigrants qui peut constituer un facteur négatif. Les auteurs Renaud, Piché et Godin (2003) s‘accordent, sur la base des résultats de leurs études longitudinales réalisées sur l‘origine nationale et l‘insertion économique des immigrants, pour démontrer les niveaux de difficulté d‘intégration que connaissent certains groupes ethniques par rapport à d‘autres. Les résultats de ces études démontrent qu‘après dix-huit mois d‘installation au Québec, le lieu de provenance des immigrants constitue un facteur assez important dans leur insertion. Renaud et Martin (2006) soulignent que quatre situations peuvent être soulignées pour mieux comprendre l‘effet de l‘origine ethnique sur l‘insertion des immigrants de diverses provenances.

La première situation concerne les immigrants provenant de l‘Europe de l‘Ouest et des États-Unis, souvent appelés « catégorie de référence » (p.34), qui sont mieux intégrés que les autres groupes ethniques. Cette catégorie dite de référence réussit mieux à s‘intégrer sur le marché du travail que les autres immigrants.

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23 En second lieu viennent les immigrants originaires du Maghreb dont la situation socio professionnelle est assez précaire durant la première année. Mais celle-ci tend à s‘améliorer au cours de la deuxième année et des années subséquentes, sans toutefois parvenir à rejoindre la situation du premier groupe.

En troisième position, on retrouve les immigrants venant de l‘Europe de l‘Est, comme ceux de l‘ex-URSS et du Moyen-Orient qui, selon les auteurs précités, ont une situation post-migratoire stagnante, ce qui renforce la thèse selon laquelle l‘origine ethnique est déterminante dans le processus d‘intégration socio professionnelle.

La quatrième situation concerne les immigrants provenant de l‘Amérique du Sud et de l‘Afrique subsaharienne qui constituent le groupe ethnique le plus défavorisé dans le marché du travail, surtout lors de la première année d‘installation. Cette situation ne semble pas connaître de changements même si des ajustements sont apportés. La « situation [de ces derniers] tend à se détériorer durant les années subséquentes » (p. 35), ce qui sous-entend que le lieu de provenance des immigrants peut avoir un effet négatif sur leur insertion dans le pays d‘accueil. En s‘appuyant sur ces quatre situations, les auteurs s‘accordent sur le fait que « l‘hypothèse de la discrimination » (p. 35) au niveau de l‘insertion des immigrants « ne peut donc pas être rejetée » (p. 35).

C‘est en ce sens que Piché, Renaud et Gingras (2002) soulignent que « les immigrants en provenance d'Afrique subsaharienne sont ceux qui s'insèrent le moins bien dans le marché de l'emploi : près de 38 % sont restés sans emploi au bout de trois ans et le temps d'entrée est pour les autres assez long (23 semaines) » (Piché, Renaud et Gingras, 2002, p. 78). C‘est pour cela que dans son étude portant sur « L'intégration sur le marché du travail. Limites de l'accès à l'emploi et intégration des immigrants au Québec. », Renaud souligne que :

Seuls les immigrants originaires de l'Afrique subsaharienne éprouvent de plus grandes difficultés à accéder au travail même si de nombreux facteurs sont contrôlés par ailleurs. Cela est d'autant plus frappant que ce groupe comporte la plus forte proportion parmi la cohorte de personnes ayant 17 ans et plus de scolarité (Renaud, 2005, p. 114).

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Toutefois, en ce qui concerne l‘origine ethnique, il serait important de noter que, dans les travaux de Boy et Schellenberg (2007), les diplômés dans le domaine des sciences, comme les ingénieurs diplômés dans les pays autres que les États-Unis, l‘Europe Occidentale (France, Angleterre, Australie, Chine, etc.), rencontrent des « obstacles dus au réagrément professionnel » (p, 7). Cela est dû au fait que, dans le cas de pays comme ceux de l‘Afrique ou de l‘Asie du Sud) où sont diplômés ces ingénieurs, on n‘a pas conclu d‘« ententes de réciprocités avec le Conseil canadien des ingénieurs, reconnaissant les programmes agrées d‘ingénierie » de ces pays (p, 7). Cependant, Pendakur et Pendakur (1998) vont plus loin dans leur étude sur les différences de revenu et démontrent à travers leurs résultats que le fait que certains immigrants appartiennent à la minorité visible est en lien avec les différences de salaire qu‘on peut noter entre eux et les natifs canadiens ou québécois.

Selon Gagnon, « d'autres obstacles sont de nature plutôt psychosociologique. Il peut s'agir de familles fragilisées, d'un positionnement identitaire de type réactif occasionnant un important stress acculturatif, de pessimisme angoissé ou d'une attitude anticipative de rejet » (Gagnon, 2009, p. 33).

Dans certaines études, l‘âge de l‘immigrant au moment de la migration peut constituer un facteur bloquant, surtout si celui-ci dépasse 35 ans. Mais il n‘y a pas que l‘âge qui soit un facteur déterminant, il y a aussi le sexe de celui qui immigre. D‘autres études québécoises menées par des auteurs comme Guyon (2003), Piché (2004), Renaud, Piché et Godin (2003), Renaud et al. (2001) et Piché et Bélanger (1995) mentionnent que le fait d‘être une femme immigrante ou appartenant à une minorité visible réduit souvent les chances d‘une bonne intégration au marché du travail.

Dans un contexte d'immigration, l'insertion socioprofessionnelle concerne tout d'abord l'immigrant qui doit s'approprier les normes et les valeurs de sa nouvelle société, eu égard aux différences culturelles énormes entre le pays d'origine et le pays d'accueil (Nzobonimpa 2008). L'insertion peut être définie comme étant une des étapes qui va conduire un individu

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25 à trouver sa place au sein de l'institution sociale, au sein d'une sphère sociale particulière qui présente des différences souvent considérables avec sa société d‘origine.

La lecture des différents auteurs qui ont eu à se prononcer sur cette question nous amène d‘ores et déjà à noter comme facteurs défavorables à l‘insertion quatre (4) éléments essentiels : la non-reconnaissance des compétences professionnelles et des diplômes étrangers, une maîtrise insuffisante du français ou de l‘anglais, un manque d‘expérience sur le marché du travail canadien et un autre facteur prépondérant, soit l‘origine ethnique des immigrants.

Plus spécifiquement, les immigrants sont confrontés à des problèmes de reconnaissance ou de disqualification de leurs diplômes obtenus dans leurs pays d‘origine. Ainsi, les auteurs comme Bastien et Bélanger (2010) affirment que :

Les nouveaux arrivants entrent donc sur le marché du travail canadien privés d‘une grande partie de leur capital humain parce qu‘il n‘est pas reconnu alors que c‘est ce même capital humain qui leur a ouvert les portes à l‘immigration au pays. Dans le cas où l‘expérience et les études sont reconnues, il est fréquent que le processus de reconnaissance soit long et qu‘au bout du compte, la personne subisse une réelle déqualification du fait qu‘elle n‘a pas pu pratiquer son métier pendant une certaine période (Bastien et Bélanger, 2010, p. 7).

Le manque de reconnaissance des titres de compétences acquis à l‘étranger par les employeurs canadiens est l‘une des causes souvent citées pour expliquer l‘augmentation de la disparité salariale entre immigrant et non-immigrant au Canada (Girard, Smith et Renaud, 2008). La non-reconnaissance des diplômes universitaires obtenus dans un pays étranger pose également un problème en raison d‘un système éducatif différent de celui du pays d‘accueil. Lorsque l‘expérience professionnelle étrangère n‘est pas reconnue au Canada, c‘est surtout parce qu‘il y a un manque d‘informations et de ressources pour comparer l‘expérience étrangère à celle de la société d‘accueil (Boudarbat et Boulet, 2007). La maitrise insuffisante du français ou de l‘anglais chez les immigrants peut poser un certain nombre de problèmes d‘insertion étant donné l‘importance des capacités linguistiques écrites et orales dans un monde de travail où le bilinguisme est de plus en plus recherché. Le fait que les personnes immigrantes soient à l‘aise de s‘exprimer, selon

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