• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE VI : La période d’installation

6.5. Le processus d‘intégration professionnelle et sociale

Le fait d‘avoir un emploi rémunéré dans le pays d‘accueil peut contribuer à faciliter l‘insertion et l‘intégration socioéconomique de la personne immigrante en quête d‘un avenir et d‘un cadre de vie meilleurs pour elle-même ou pour sa famille. Pour réussir leur intégration dans la société d‘accueil, les immigrants cherchent ou utilisent plusieurs réseaux ou ressources disponibles. À la question de savoir quelles sont les stratégies utilisées pour la recherche d‘emploi, plusieurs réponses apparaissent telles que les services communautaires et gouvernementaux et le réseau d‘amis au niveau de la population d‘accueil.

6.5.1. L’utilisation des services gouvernementaux et communautaires

Même si parallèlement, elles utilisent d‘autres réseaux pour chercher du travail, toutes nos répondantes reconnaissent avoir utilisé au moins une fois les services communautaires et gouvernementaux dans leur recherche d‘emploi.

Les services vers lesquels elles sont souvent orientées sont : le Service d‘Orientation et d‘Intégration des Immigrants au Travail (SOIIT), Emploi-Québec, les carrefours jeunesse emploi de la Vieille Capitale, sans oublier le Centre local d‘emploi. Ces différents services ont été mis en place par des organismes communautaires et par le gouvernement pour faciliter l‘intégration des personnes immigrantes au niveau du marché du travail.

Euh, tu sais, il me fallait vite trouver du travail, car j‘avais pensé que nos économies ne supporteraient pas les nombreuses dépenses engagées à notre arrivée. J‘ai dû rencontrer tous les intervenants capables de m‘aider à trouver un emploi. Finalement en plus de mes études, je travaille (Ngoné).

Tout comme Ngoné, Aurélie, Yasmine, Asmao, Virginie, et Claudia sont entrées en contact, dès leurs premières semaines en terre d‘accueil, avec le carrefour jeunesse emploi,

78

le centre local d‘emploi et tant d‘autres services. L‘utilisation de ces services par les répondantes n‘a pas toujours abouti aux résultats escomptés. Pour certaines d‘entre elles comme Alicia, Dienaba Yasmine, Claudia, Aurélie et Aissatou, la disqualification de leurs diplômes et l‘impossibilité d‘intégrer, dès leur arrivée, leurs ordres professionnels respectifs ne leur ont pas permis de décrocher un emploi. C‘est ce qu‘Aissatou dit en ces termes : « J‘ai reçu de ces services plus d‘informations pratiques pour mieux m‘orienter que d‘offres d‘emploi ». Mais il est à noter que l‘utilisation des services a au moins permis à certaines femmes de décrocher un premier emploi en terre d‘accueil, même si celui-ci ne correspond pas toujours à leurs propres aspirations. C‘est ce que souligne Yasmine : « Grâce à cet organisme, j‘ai pu avoir mon premier emploi en tant que vendeuse à temps partiel en attendant de terminer mes études et de trouver mieux ». Et Aurélie de renchérir que « c‘est grâce à une des conseillères [en emploi rencontré dans une de ces structures] que j‘ai pu avoir du travail dans un service d‘entretien ménager ».

79

6.5.2. Le réseau social ou club d’amis

Pour pouvoir mieux intégrer la société d‘accueil, les femmes immigrantes déploient plusieurs stratégies et mettent à contribution tous les réseaux mis en place par les gouvernements ou les organismes dans la société d‘accueil pour les aider à trouver rapidement un travail. Ces réseaux, comme nous l‘avons tantôt mentionné, peuvent aussi comprendre la communauté composée des immigrants provenant du pays d‘origine ou le réseau d‘amis que les immigrants se font dans la société d‘accueil. Ce qui fut le cas pour l‘une d‘entre elles :

Quand je suis arrivée à Québec, la première chose que l‘on m‘a dite est : ici pour trouver du travail, il faut avoir un bon réseau. L‘impression ressentie est qu‘ici les emplois se trouvent de bouche à oreille. Donc c‘est à partir de cela que j‘ai commencé à me faire des amis au sein de la société québécoise et cette démarche m‘a permis de trouver du travail, même si cela n‘est pas dans mon domaine (Aurélie).

6.5.3. Médias et internet

Si les deux premiers réseaux (communauté et réseau d‘amis) n‘ont pas été d‘une grande utilité pour toutes les femmes pour trouver un emploi, elles ont toutes eu recours à d‘autres réseaux sociaux comme les médias (journaux, annonces) et l‘internet.

J‘ai tellement envoyé de CV sur les sites des services gouvernementaux, pris des rendez-vous, passé des entrevues que j‘ai fini par me décourager. À ce jour, je cherche, par l‘entremise d‘internet et du Journal de Québec, diverses offres emplois en attendant de pouvoir trouver dans mon domaine de formation. J‘ai trouvé du travail grâce au journal du Québec (Claudia).

Pour trouver un emploi, les femmes ont eu recours à plusieurs stratégies, en mettant à contribution toutes leurs connaissances. Si elles ont pu trouver un emploi grâce aux différents réseaux, le travail trouvé ne correspond pas forcément à leurs compétences. Seules deux d‘entre elles, Mbouba et Ngoné, ont pu trouver un emploi correspondant à leurs aptitudes. La situation d‘urgence des autres femmes, comme Claudia et Virginie (leurs économies s‘épuisant de plus en plus), a fait qu‘elles ont accepté des emplois bien en deçà de leurs aptitudes. Cependant, Aissatou, Dienaba et Alicia n‘avaient pas réellement débuté la recherche d‘emploi. Par exemple, comme le dit Dienaba : « Je n‘ai pas encore

80

trouvé, je veux travailler dans mon domaine et en réalité je n‘ai pas trop cherché, car je ne voulais pas d‘un travail alimentaire 7».

6.5.4. Formation additionnelle ou retour aux études

L‘intégration sur le marché du travail peut nécessiter un certain nombre de « sacrifices » de la part des postulantes. L‘espoir et l‘ambition de nos répondantes font que certaines d‘entre elles, du fait de la non-reconnaissance de leurs diplômes ou aptitudes professionnelles, sont prêtes à reprendre leurs études pour avoir des diplômes pouvant leur permettre de s‘insérer plus facilement dans le monde professionnel que si elles postulent sur la base des diplômes obtenus dans leur pays d‘origine.

Je ne souhaite pas exercer dans un domaine autre que le mien, car ayant obtenu une bourse d‘excellence, j‘ai trouvé la motivation nécessaire pour continuer dans ce domaine. Mais, depuis que j‘ai fait un retour aux études, c‘est dur. Cependant, j‘aurai un diplôme canadien (Dienaba).

Actuellement, si certaines de nos répondantes ont opté pour un retour à l‘école afin de trouver un travail correspondant à leurs aptitudes, d'autres ont choisi de favoriser simplement l‘intégration professionnelle dans leur nouveau pays d‘accueil.

Je n‘avais pas le choix de recommencer mes études, car le système éducatif québécois est différent des nôtres en Afrique et j‘attends toujours la réponse de la commission scolaire pour un poste d‘enseignement pour lequel je m‘étais présentée. Dans l‘attente, je me suis inscrite à des formations et pour quelques cours à l‘université (Asmao).

Le retour aux études est possible chez les femmes qui ont eu une situation financière pas trop alarmante. Et dans ce cas, c‘est parce que les femmes disposent encore d‘économies assez importantes qui leur permettent un retour aux études. Cependant, lorsqu‘elles sont obligées de trouver un emploi parce qu‘elles vivent des conditions financières difficiles, certaines femmes sont obligées de saisir toute opportunité qui se présente.

7 Payé au salaire minimum

81 En plus du problème avec les diplômes, les femmes jugent que leur intégration dans le monde professionnel est encore plus difficile à cause de leur situation de femmes immigrantes et de leur appartenance à une minorité visible.

Les réalités de l‘emploi des femmes immigrantes, surtout celles issues de la minorité visible, m‘ont incitée à ne pas reprendre les études. Je ne me sentais plus la force de tout refaire et surtout après avoir passé une partie de ma jeunesse à l‘université. Je suis restée un temps à m‘occuper de mon enfant et désormais je travaille à temps partiel comme téléphoniste. Peut-être, un jour, quand mon fils sera grand, je reprendrais les études, mais pour le moment c‘est encore inimaginable (Claudia).