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Dérapages, suivi de, Vers une définition du roman de la route

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(2)
(3)

suivide

Versunedéfinition du roman de la route

par

MarcAntoine GODIN

Mémoiredemaitrise soumis à la

Faculté des étudessupérieures et de la recherche en vue del'obtention du diplômede

Maitrise ès Lettres

Départementdelangue et littérature françaises Université McGill

Montréal, Québec

Mars 1999

(4)

1+1

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The author

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(5)

Résumé

Le présent travail regroupe sept nouvelles de création réunies, saufexception, par le motif dela route et les références culturellesquil'accompagnent Le recueilest suivi d'un essai

de définition du romandela route en tant que

seme

nord-américain du X~ème siècle ayant héritédes influences littérairesdu Bi/dungsroman, du picaresque etdu récitdevoyage, et caractérisé par la quête d'identité personnelle et collective d'un héros, sous l'influence du mythe américain. Ce travail met en relief d'une part le auactère sacré de la route et,

d'autrepart,en cequiconœme le romandela routequébécois,l'influencedel'américanité etde la dichotomiesédentaire-nomadedansla démarchedu héros.

Abstract

The present tbesis gathers seven original shon storiesjo~withone exception. by tbeir sharedsubscriptiontothe road motifandthecultural references linkedto it The creative coUection is foUowed by an attempt of definition of the road Dovel as a North-american, Twentieth-century genre that bas inberited literary basics of the Bildungsroman, the picaresqueand travel Iiterature, and which is cbaracterized by the hem's personal and collective quest for identity, under the influence ofthe American myth. On the oneband, this work focuses on the sacred nature of the road and, on the other band, regarding the Quebecois road novel, the influence ofamericanilyandthe sedentary-nomad dichotomyin the hero's search..

(6)

Remerciements

Au tenne de la rédaction de ce mémoire, je désire remercier, pour ses judicieux conseils et le souci du détail qu'il a su m'inculquer, M. Yvon Rivard, Directeur de

mémoire de la portion création. Je lui saisgrédem'avoir montré à en diredavantage en moinsdemots et d'avoir respecté l'atmosphère que je souhaitais donneràmes nouvelles.

Je remercie tout aussi sinœrement M. Normand Doiron pour son appui dans la

rédaction du volet théorique. SesexceUentes corrections m'ont été d'un précieux recours, autant sur la rigueurde la présentation que sur celle du contenu. Je le remercieégalement pour sa compréhension et sa disponibilité,ayant fait en sorte que mon mémoire puisse

rencontrer les délaisprescrits.

Merciàma famille etàmes collèguesdu 1328 pour leur appui.

Marc Antoine Godin

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TABLE DES MATIÈRES Résumé-Abstract

Remerciements Tables des matières DÉRAPAGES

La Descente

Quarante degrésdelassitude Congé sans solde

Nez rouge

Golgotha ou LaPassion d'Orel Hershiser Come de brume

Pointdefuite

VERS UNE DÉFINITIONDUROMANDEUROUTE

A. Genèse duromandelaroute 1.Introduction

2. LeBildungsroman:récolter les fruits del'expérience 3. L'influence de l'anti-héros picaresque

4.La fictiondevoyage: une conquêtedel'espace S.À la recherche d'une identité déchirée

6.Brève psychanalyse du rêve américain 7.La pand-mute: espace sacré

8.Lereversdelaroute

B. Le roman delaroute québécois 1. L'héritagedeJack Kerouac 2. L'américanité: l'échodel'Autre

3. Lesédentaire et le nomade, vus duQuébec 4. Conclusion Bibliographie 2 3 4 5 6 14 18 29 34 39 43

5%

S3

76 90

(8)

DÉRAPAGES

Recueil de nouvelles

(9)

LA DESCENTE

Mon train routier est rempli de bois Goodfellow que je dois laisser à Rouyn-Noranda. À partirdel, m'aditPic, je doisdenouveau charger le camionetle mener à Toronto. Toronto... Ça veut dire traverser les limbes du nord de l'Ontario. L'enfer du voyageur.

Je passeGrandRemous vers onze heures, onze heures trente.

n

me restedeux

wake-ups. J'aperçois un homme sur le bord de la route, sans bagage ni rien, se tenant droit comme un chêne. Comme s'il avait toujours été là.

n

n'a pas le pouce tendu et

pourtantje ralentis. Je ne voudrais pas le laisseràsonsort:àcette heure-Ià, et surtout à l'entrée du Parc de la Vérendrye, les occasions seront rares de se faire embarquer. Je connais trop de camionneurs qui m'ont dit: «Après dix heures, je prends plus personne»).

Jem'immobilise'sa hauteuretouvre laponedu passager.

- Voussavezque vous n'êtespas àla bonne place au bon moment pour«pouce,.»..•

- Je ne poucepas, répond-il en prenant son élan pour entrer dans le camion. Etpuis..•

c'est le bonmoment puisque vous êtes là.

Je reprends ma route et reste muet quelque temps. fobserve mon passager. On en apprend beaucoup sur un homme dans les premières minutes d'une rencontre. Voir s'il parle,dequoi ilparle, ou s'ilsaitsoutenir le silence. Comment il s'asso~ s'ilregarde la route devant lui ou sur le côté, s'il inspecte l'intérieur du camion ou si c'est un habitué...Je suis tout de suite frappé parle fait qu'ilest parfumé. Les routards ne se

parfumentpu. Peut-être aprèstoutqu'il n'enestpasUIL•• fi est bien babillé,mais sans trop de manières: veston, col roulé noir. On n'a pas dl le regarder trop de travers à

GrandRemous.

L'hommejoutebien le silence.

n

le manie avec adresse, même qu'ilest detaille à afftonter un spécialiste comme moi. Àvrai dire,il n'aricn de commun avec Icshuma

que j'amène normalement Ce n'est pas que je lecraipe mais il me laisse sur le qui-vive; il me

déraD&e..

Je luidemandeoùils'en va:

-leiet là. Pmu le moment. je vais à Toronto.

(10)

le ne suis pas encore nerveux mais jejette un coup d'oeil réflexe aucotTre à gantoù dorttoujours mon revolver.

• Comment vous appelez-vous '1

- On ne m'appellepas,répond-il sèchement. Puis, toutdesuite, avecun sourire,ilajoute:

- Don't cali us, we'll cali you!

Son clin d'oeil m'énerve mais rien ne justifie encore une protection armée. En tirant de sa veste une cigarette etun briquet, il fait un signe de tête vers la femme nue accrochéeà mon rétroviseur:

- Si vousrestez avecmoiassezlongtemps, vousen ve"ezbeaucoup.

Secondclin d'oeil, nettement plus complice. J'oublie le revolver.

7

Letemps roule un peu.ledemandeà mon passager ce qu'ilfaitdanslavie.

n

dit

préparer un gros coup pour la veille de l'an 2000.

n

voudrait me raconter son plan mais je ne veux pas me mêlerde ses magouilles. Nous restons ensuite silencieux un bon moment Puis nous faisons le jeu de la valise et de l'tle déserte. Je dis, après y avoir réfléchi pendant quelques minutes, que j'apporterais la Bible et il se metà rire. Lui ce seraitun miroir.

La routeestescarpéeet nous promet la mortàchaque tournant. Lanuit, seuls les poids lourds la suivent à plus de 100 kmIh. Ce sont des chauffeurs qui en ont vu d'autresetqui ne freinerontpas pour un renard au milieu de la voie. Lapartrassurante

de cette vie, c'est peut-être la stature imposante de nos fourgons et l'impression réconfottantc que les convois unissent les camionneursdans une confrérie particulière. On échange des informations sur la route et les policiers~ on se raconte des blagues grivoises sur nos radios.Ona toujours le sentiment d'êtreépaulé. Sur les autoroutes du Sud, on attaque les voiesdefront, commedeschevaliers en

armure.

avecde~ parfois troiscamions roulantcôteàcôte.Onouvrela

marche.

onestdeséclaireurs.

Je pense aux camionneurs queje rencontre dans les truck.stops~ ceux qui me taquinentetquim'appellent Ti-Gars ou le Beau Jeune.Après quatreIDSdanscemétier~

(11)

les plus vieux m'abordent encore avec un sourire, comme si j'étais un nouveau, comme si je ne faisais pas tout à fait partie de la bande. C'est nonnal. J'ai déjà été autre chose qu'un camionneur. Je les aime bien mais j'upire • plus. Etça,ils le savent

Cette nuit-ci est plus tranquille qu'à l'ordinaire dans le Parc La Vérendrye. Les heures s'égrènent alon qu'on file sans problème sur la 117. Bull - c'est ainsi, dit-il, qu'on le surnomme - semble plus éveillé que moi.

You're innocent... whenyou dream J"~chantonne BulL L'imitationde Tom Waits est parfaite.

Vers une heure du matin, entreDorvaletLouvicourt, j'aperçoisà la sortie d'un virage un grand bâtiment dont les contours sont illuminés par un néon rouge. Aucune enseigne ne baptise l'endroit. Ce bar vient d'ouvrir ou alon je n'y ai simplement jamais prêté attention. Je devais rêvasser...

- Arrêtons-nous ici, me ditBull. Je n'aime pas son tondevoix mais il a raison: après toutes ces heures de conduite, un verre et un bon repas ne me feront pas detort

Je ralentis puis mon train routier entre en gare. Je préfère laisser mon blouson de chasse sur mon siège. Et pourquoi pas ma casquette. Bull ne m'attend pas et entre immédiatementdans l'établissement. Je me passe la main dans les cheveux - ils sont

sales, commed'habitude. Mais cette nuit,S8DS raison particulière, je me souciedemon

apparence.

Dehors la nuit s'estrécbautTée. L'airesthumide et moite, mais en même temps étrangementcool. Je ne suispas pressé d'entrer, sachant de toute façon que c'est là que jevais. Je me senspresqueétourdiparcettepetitefolie qui n'étaitpasau programme. Je marche lentement venlaporte d'entrée avec l'impression légère de flotter au-dessusde terre. Je mets la main sur la poignée, la tourne tout douœment puis à ce moment un camion passe. Ayantw le mien stationné, le camionneur klaxonne. Je me retourne et envoie au hasard ungestede la main.

L'endroit est bondé. Un contraste à couper le souftle. Que font tous ces gens ici 1 On ouvre ce genre de club en ville, on choisit les meilleures artères, on attire les branchés... mais lBS ici l Le décor hésite entre lerétroetle dernier cri. Les murs jaune moutarde sont éclairés parde hautes lampes sur pied dont les abat-jours cylindriques

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sont en vene bleuté. Un grand tapis persan installé au milieu de l'immense pièce

absorbe une partie de la fumée des cigares. Des fauteuils en vinyle (oranges~ vertst

bleus) sont dispersés dans l'espace. Tous occupés. Je parie que les gens usent de

tactiquessubtiles pour se les approprier.

Je remarque les femmes.

n y

a longtemps que je n'en ai pas vu autant en une même place. Elles ont pour la plupart la coiffure Jackie Kennedy. Bracelets, maquillage et vêtements sont clairementà la modedes années60. Ce n'estpourtantpas une soirée costumée... Les gens circulent à leur aise dans cette ambiance pastel feutrée où toute une clique mondaine semble s'être donné rendez-vous. Tout cela est insensé.

Insensément imposSIble. J'aperçoisBull~ debout près du bar, en train de parler au gérant. Ça doit être le gérant puce que tous les gérants se ressemblent Bull poursuit sa conversation tout en se prenant une bière dans un réfrigérateur.

Une femme vêtue d'unerobemoulante en velours bleu tourne les yeux ven moi. Elle me sourit Mesjoues prennent la teinte de ses lèvres et je baisse les yeux. Mes bottes auraient besoin d'un cirage. Je ne suis décidément pas babillé pour ce geme d'endroit. La femme me regarde toujours, intensément Elle choisit de nepas voir mon accoutrement. Elle fait glisser la paume de sa main le long de sa hanche puis eUe se retourne et reprend une conversation laissée en suspens. Mes pieds restent cloués au sol. Tout autourdenous lamusique faitpartiedu décor.EUeplanedansl'air,prêteà être saisie) comme unparfum sonore. Une musique bizarre et futuriste sur un rythme jazz langoureux. Labasserésonne dans ma poitrineetles percussions me rappellent les films de détective. Puis il y a les odeun. Sunout cene odeur. Légèrement épicée, vapementétoutTante~

,la

fois dense et légère. Coco Chamel.Lasalle en est imprégDée bien plus que les femmes qui l'occupent. Tout d'abord elle m'étourdit, comme le faisait l'encens quand mesparentsm'emmenaient à l'église. Mais elle finit doucement par me mettre à mon aise, remplaçant l'hôte' l'entrée. Une odeurquime sert la main et qui me prendmon manteau.«Bienvenue. Sentez-vous ici chez vous.»)

Je vois Bull s'éloigner en parlant au téléphone cellulaire. Cest un habitué. Je

COIlUlleDCe •

renoncer

à

mon souper

lorsqu'un Bloody Mory atterrit dansma main. La

serveuse a le même sourire que la femme de velours. Elle pointe gracieusement en diœction deBull. Toujours au télépbone~ il mereprdeet me fait avec

JIéIligence

le salutmilitaire.Laserveuse s'éloipe lentement, au rythme dela musique. Ses lonpes

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boucles rousses lui martèlent le dosà chaque pas. La fermeture éclair de sa robe està

peine descendue, juste assez pour qu'on puisse distinguer un grain de beauté dans la courbe de son omoplate.

Je me sens fondre dans le décor. Personnen'a prisgardeàmaprésence. On m'a sûrement vu mais on ne dit pas : «Regarde, l, le camionneur»). Je peux boire mon

Bloody Marytranquille et observer. Je sens qu'ils y sont allés fort sur le poivre et le Tabasco. Une timide gorgée, puis deux, et j'enfile le reste en une lampée. Je dépose ensuite mon verre sur une table en vitte sur laquelle se croisent des traces liquides laissées par le dessousdes verres. Soulignés par la lumière, les cercles rouges, violets, jaunes, prouvent lavariété descocktailsofferts parla maison. Un coupd'oeilautour:je ne vois plus Bull. Je mouille mon index et le fait glisser sur la table, question de récupérer les restes. Je me trouve un peu ridiculemaistant pis, personne ne me regarde. Il n'y a eu que mon reflet quand je me suis penché au-dessus delatable.

Un fauteuil s'est libéré. Vite. Je m'y assois confortablement, allongeant mes bras sur les côtés. Je ferme les yeux un instant. Une courte sieste sur la voie de service. Je sens un courant d'air sur mafigure mais ce doit êtrele passage rapide des gens devant moi. Cela me fait penserà une vieille publicitédans laquelle un homme se cramponneà son divan pour résister au volume de son haut-parleur. Qui donc faisait cettepub•.. Je me sens m'engourdir. Ce sera très difficile à présent de retourner au camion età ma livraison. J'ai l'enivrante sensation de déraper, de sortir de route sans crainte de me faire mal, S8DS me soucier du matériel que je traDspone. Je fais signe à la serveuse rousse.

Lamusiqueestdevenue plus agressive, plus lascive et voici la serveusequis'approche d'un pas plus rapide. Elle se penche vers moi, les mains sur les genoux. Je dois me contenir pour nepasla regarder ailleurs quedansles yeux.

- Apporte-moiceque tu as de meilleur.

Un sourire,cesourire, et elle repart.

Mabouche s'est asséchée. Je me replonge profondément dans mon siège. Tous mes sens sont en alerte. Le décor s'est légèrement embrouillé depuis mon arrivée. Je ne croispasque ce soit l'alcool mais seulement monreprdqui s'est voilé comme tout le reste. Soudain jesensun creuxàcôtédemon épaule: une fesse vient de s'appuyer sur le dessus rembourré du fauteuil.

ny

atant degens, si peude place,je dois partager. le

(14)

n'ose pas bouger, pas même tourner la tête pour voir qui a pris cette aisance. Je fixe l'immense tapis et attends le moment oùilva s'envoler.

Ma tête est lowde, immobile. Je n'ai pas vu la serveuse revenir vers moi. Elle dépose un Pe"Dquetdans mamain droite toujours appuyée sur le bras du fauteuil. Je ramène le verre sur mon ventre. Elle est là, à côté de moi. Si je me retourne, je ne pourrai pas résister à ses lèvres. Je commence à craindre pour ma vie. Je l'entends respirerdansmon oreille.

... Maxe/l, mechuchote-t--elle. ... P... pardon?

.. Lapublicité que vous cherchiez,répond-elle.

Et je ferme les yeux un instant Son odeur est corsée, excitante. Je la sens roussedans tous lesporesdesa peau. Je vois du coin de l'oeil qu'ellese redresse. Elle va me quitter ànouveau. Je ne veux pas rater le grainde beautédans sondosetmatête déploie un effort douloureuxpourne pas manquercespectacle.

Une goutte de sueur coule sur mon visage. Elle suit le tracé creusé par les précédentes. Elleglisse jusquesous mon menton. Je l'entends tomber comme une bille dans mon verre. Je la vois traverser les quatre étages, les quatre couleurs opaques de mon cocktail. Je medisqu'on peut se passer d'une livraisondeGoodfellow sans que la Terre ne cesse pour autant de tourner. Je prends donc une première gorgée. Mon nez est plongé dans un bouquet fruité que je retrouve tout de suite dans ma bouche. Les couleurssemélangent, les saveurs aussi. Le sucrédela crèmede menthe me chatouille derrière l'oreille. Je bois mal, je crois en échapper sur ma chemise. Puis en un instant

toutchavire. Quelqu'un s'est misà me caresser les cheveux.C'estvrai, lapressionsurle dossier du fauteuil, la fesse... Vite, le tapis, la brume.u Mon regard se fixe à nouveau, en pleine extase. Bouche bée. Ce serail unemaind'homme queçan'y changerait rien. Je

nevis plus quepources doigts qui sillonnent le dessusdematête, quifrôlen~ touchent" chiffonnentNe medemandezplus monnomniquelâgej'avais en entrant ici.

I l

Je ne sais pas combiende temps s'estécouléavant queBull neme tire dema

(15)

bar.Matêteestàboutdeforce, étourdieetdétraquée, maismon corps répond toujours et en redemande encore. Les deux poings sur le bar, un dry martini açhève de me

redresser.La musiqueestdevenue hard et les clients se déhanchenttrèslentement C'est ce qui leur fallait pour commencer à réagir, àdanser presque. Debout devant le zinc,

Bull

a son

bras autourdemonépaule. fiftune un DavidotTettandisque je le regarde, il

me fait un clin d'oeil. Il saitque je viens de penser au camion, et même au revolverdans le coffre àpnt, maisçane vaut plus lapeinede riendire. Le filmva mal finir.

Le barman, éreinté par sa soirée, arque le dos. Il dit qu'il va profiter de l'accalmie pour prendre une pause. Je propose spontaDément deprendrele relais.

- Vous vousyconnaissez7

- J'en ai se",i autant que j'en ai bu.

La réponse sort d'elle-même mais le barman ne s'en formalise pas. Bull me tapote l'épauleetregardeles danseurs.

n

estdécidément plus qu'unhabituéde l'endroit.

Je mets un linge sur mon épaule, comme dans le temps. Ilya des années que je n'ai pas

w

les bouteilles de ce côté-ci du comptoir. Mais les vieilles habitudes reviennent vite. Le bannan a pris mon tabouret et me regarde travailler. «Si lu as

besoin d'aidepoUl'les receltes..•») Je travaille lentement mais en ayant toujours l'air de

savoir ce que je fais. Je prends un malin plaisir à me déplacer derrière le rade. J'ai le sentiment decontrôlerla situationetd'êtreau-dessusdece qui sepassedans lebar. Je m'incruste dans toutce qui existe autour de moi: dans le décor, dans les miroirs, dans les bijoux des femmes, dans les retlets de lumière, dans la guitare électrique

assourdissante...

J'aperçois Bull et la serveuse rousse s'avancer vers moi. Je m'arrête. Un coup d'oeil au bannanqui suspend sa gorgée, comme s'il anticipe que quelque chose va se

produire. Je continue un cocktail mais à présent je suis distrait La splendide rousse vient se laver les mainsdansl'évier dubar. Sacuisse touche à la mienne. JefeiDS d'être concentré mais je verse trop degrenadinedans le verre. Labelle se relève~avant que je n'aie puréagir, elle me donne unbaiser sur la joue. Longetchaud. Elledoity avoir laissé la sigaature de

ses

lèvres. Bull est devant mo~

m'observe avec une once

de suspicion:

(16)

- Dis-moi. silu leretrouvais surune iledéserte, qu'est-ceque tu auraisdansla valise ?

Ah no~ pas encore... Le temps suspend son vol en attente de ma réponse. Je lève la bouteilledans ma main droite et indique de l'autre main le baiser sur ma joue. Bull~ la serveuse et le barman rient de bon coeur.Lapression est relâchée.

Au moment précis où je viens de signifier que je suis comblé~ je me rends compte de ce qui m'arrive~ je vois où m'a mené tout ce cirque. Ma propre image se reflète dans les yeuxde Bull. Du feu dans les yeux. Je sais trop bien que je ne pourrai jamais sortir d'ici. Des cubes de glace fondent trop vite dans ma main alors que la

serveusemurmure~ en hochant la tête:

- En tout cas, avecloutce bois, onaura de quoi se chaujJèr cel hiver...

(17)

QUARANTE DEGRÉS DE LASSITUDE

Seven Sisters est un obscur village situé à65 milles à l'ouest de Corpus Christi.

On Y passeparhasard,sinonparmalchance. Hal's Gas& Goodies~unedeses seules baraques~ a été érigée à une époque où l'on croyait encore que le désert américain se développerait. À la fois pompiste et tenancier du magasin général~ Hal semble avoir toujoursété là.Le doyendenullepart.

S'il n'a jamais eu le physique pour faire de grosses manoeuvres, la chaleur du désert l'a cependant endurci avec les années et lui a donné une résistance exceptionnelle. Son visage émacié~ sa moustache grise et ses traits crispés lui donnent unairaustère et résigné.

n

s'obstine à reprder le désert autourdelui avec les yeux du conquérant.fiabeauêtre courtetfrêle, reste qu'il est seul à occuper le territoire et cela le grandit. fiaimeraitdire:«En 40 ans, j'en ai vu passer de toules les sortes»~ mais ce ne serait pasvrai. Les gens ne s'arrêtentpasà Seven Sisters. Ils préfèrent continuer sur la S9 et filer droit jusqu'àLaredo. Bien sûr, Ha/'s Gas & Goodies devient de temps à autre un phare, un relais. Quelques-uns s'mêtent prendre de l'essence; dtautres~ moins nombreux encore, se risquentdansla vieille cambuse de bois. Halles sert toujours avec empathie:

- Courage, il vous reste à peine plus d'une heure avanllafrontière.

Et quand ils viennent en sens inverse:

-Biell11enido en America, salaud.

Maiscematin,comme tous les matins, c'est le silence. Le sien comme celui du paysage qui l'entoure. Le silence d'un magasin général qui, faute de clients, a depuis longtemps cessé d'otJrirdes aliments fiais. À l'intérieur du commerce, Hal retarde le moment où il va ôter la pelliculedepoussière sur les étagères et épousseter les boitesde conserves, les friandises et les pièces d'autos usagées.

n

veut simplement se garder du travail pour plus tarel. Sans compter qu'il s'oblige chaque jour à balayer le rail de chemin de fer au cas où, à touthasard,untraindéciderait de passer.

Debon, sachant trop bien que personne ne le voit, Hal s'amuse à marcher comme un cow-boy en dégainant la pompe à essence. fiobserve son ombre sur le solet sesent accompapé.

n

se rend comptequeson coeurbat.Soudainilcroit distinguer au

(18)

loin le moteur d'une Mustang..

n

reste immobile pour bien saisir lebrui~ pour le laisser veniràlui. Mais lesonse perd dans le sable et Hal raccroche la pompe à son support.

Même s'ilaégarésamontre, le vieux Texan sait qu'ilserabientôt midi..Le soleil ne brûle pas encore àoutrance. Hal en profite pourréparer une Porsche Boxter qu'un jeune homme lui a laisséeily a longtemps. EUe estdans unétat lamentable.

n

pourrait tout aussi bien travailler sur sa propre camionnette. Qu'il s'agisse de la mécanique ou biende la radio dont l'aiguilleestcoincée depuis toujours à un poste mexicain, ily a toujours quelque chose à ananger.. Cela le distrait et lui donne tout son temps pour

penserà de nouvelles histoires. Merde, le tournevis, le tournevis, est-ce que... Un

jour, ose-t-il espérer, quelqu'un va s'mêter et lui demander d'où vient le nom «Seven

Sisters». Mais, évidemmen~ les voyageurs éviteront par politesse de demander comment onapu avoir l'idée de donnerunnomàunbled aussi perdu...

Le vent se lève à présen~ moment enivrant de la journée où Dieu signale sa présence,où Hal sentsamission réitérée, moment où l'illusion renait etoùl'attenteade nouveauun seDS.Halgrimpealors sur le distributeurde glaceetva se perchersur le toit de la cambuse. Ses genoux craquent mais c'est l'âge. Il reste là longtemps, debout, casquette en ~à se laisser caresser les cheveuxetà regarder au loin les éoliennes s'étourdir. Il aime sentir le vent qui érode ses joues comme il sculpte tout ce qu'il y a autour. Le vent dudésert l'insèredans le décor, luidonneune place parmi le sable, les

rocheset les herbes mortes.Leventquiassècheto~même les lannes.

Versdeux heures, le soleil plombe tellement que cela pourrait mettre le feu à la baraque. Hal continue pourtant à monter la garde devant le magasin.

n

faut bien montrer que l'endroit n'est pas complètement abandonné.

n

se berce en tenantdans sa

mainune balle de baseball aUlapée lors desa seulevisiteàl'Asttodome de Houston. Ce jour.~ il s'en souvient, il n'avait jamais vu de savie autant de gens rassemblés. Des milliers de personnes avaient suivi cette balle des yeux mais aujourd'hui c'est lui qui la tient Une vulgaire balle, n'ayant vécu que deux ou trois lancers, et qui était à peine marquée lorsqu'elle a atterri dans ses mains. fi ne l'avait même pas demandée. Fausse balle du basarcL Depuis ce jour, les IODgues heures d'attente l'ont usée: elle a été

égratignée, triturée,effrangée, mais Halcontinue às'acharner surelle distraitement. Et il seberce. En faisant claquer une gomme sous sa langue, le vieux guette le moindre

(19)

son, la moindre espérance de voir surgir quelqu'un. C'est inespéré. Tout est si mort autour qu'on entendrait une mouche s'écraser sous la chaleur.

Soudain Hal cesse son balancement La chaise cesse de craquer, ses genoux aussi. Un galop,uncri d'indien, quelque chose lui vientàl'oreille.Ilbondit desachaise. Une vague déferlantedeteneetde poussière prend forme au loin et se rapproche. Un pare-brise de voiture miroite dans le soleil et Hal sent un noeud serrer sa gorge. Un moteur annonceunhomme. Bientôt cela ne fait plus aucun doute: cetteauto-Iàestpour lui. Il trépigne, ne sait plus où se placer.

n

devraêtre à la hauteur.

Une Cadillac blanche s'immobilise devant la pompe à essence. Un hommeest

là, à quelques pouces de lui. Surtout ne rien laisser paraitre. Ne pas toucher. Le conducteur, l'air noncbalant, demande le plein. fi a des lunettes fumées si grandes qu'elles lui cachent une bonne partie du visage. Ses longs favoris rappellent à Hal une photo qu'il a déjà vue. Tremblant, le vieux garagiste peine à insérer le goulot de la pompedansla voiture.Il fait chaud.

n

est certain d'avoir déjàvuce visage quelquepan.

MaisHal doit oublier la présence humaine un instant s'il veut réussirà la soutenir.

n

cherche autre chose àse mettre sous les yeux et va redorer la plaque immatriculée du Tennessee. D caresse ensuite la carrosserie de la Cadillac, gracieuse et féline, mais brûlante comme tout le reste. Elle a trop fière allure pour appartenir à n'importe quel quidam. Halle sait, il enavu des autos. 0enadéjàvu.

- Hé, dude. pourquoi ils ont appelé ça Seven Sisters ? Lesoleilestdevenu insupportable.

- C'est.... c'est que..• dans les environs, il y a très longtemps, il y avait une famille dont les sept soeurs ont quitté le village en même temps.1/s'est trouvé à manquer de fémmes àmarier. Alors. peu àpeu. lajeune génération a déserté. C'est vrai, je vous jure.

Le conducteur se satisfait de l'explication ou alors il s'en fout et voulait simplementêtre gentil. 0 tend unbillet de vingt dollars. Hals'éclipse d'un pas rapide dans lacambuse.À son retour, le contraste entre l'obscurité du magasin et l'éclat doré de l'extérieur l'éblouit. Comme si on lui lançait de la lumière en pleine figure. La

Cadillac ondule sous ses yeux comme lacbaleur au-dessus de l'asphalte. Le vieux a peur de rêver.fi hésite, il sent qu'il doit faire quelque chose, qu'ilestpeut-êtredéjàtrop

tard. Aton, d'un geste brusque et sans rien dire, il tend la balle de baseball au conducteur.

(20)

- Vous voulez que je la signe?,demande l'inconnu.

- Non. Non, gardez-la, elle est pour vous. Il s'appelle Cesar Cedeno le type qui l'a frappé.

Les deux hommesrestentsilencieux un moment et regardent une traînée de sable valser sur le pare-brise de la Cadillac. Le vent siftle un refrain connu.

- Courage, dans une heure vous serezàlafrontière. - Thank ya. Gad blessya.

Puis l'auto redémarreets'éloigne aussi vite qu'elle étaitapparue. Hal presse son ventre d'une main. Il a dû avaler le noeuddans sa gorge caril le sent à présentdans le creux de son estomac.

n

retourne péniblementà sa chaiseberçanteen hochant latête:

- J'aurais dû le faire signer, alors j'aurais su son nom. j'aurais...

Trop tardmaintenan~ le tempsestpassé. Une autre gaffeà oublier.

(21)

CONGÉ SANS SOLDE

Je n'ai pas pris de vacances depuis plus d'un an, exception faite des trois jours au congé·de Noel. Combien de fois Gisèle m'a-t-elle reproché mon obsession pour le travail. Elle m'a regardé me détruire à petit feu mais je n'ai rien voulu entendre. Le

boulot d'abord, les loisirs ensuite.

rai

laissé les choses aller, laissé la fatigue s'accumuler en me disant que mon portefeuil1e9 lui, s'en porterait mieux. Mais bientôt

l'épuisement l'a emporté sur mes économies etj'aidû me résoudreàun congé.

Cela nous mène au milieu du mois de mai. L'ardeur du printemps est censé donnerà tous un second souftle. J'ai trois semaines de répit et quinze livres en trop devant moi. Trois semaines. Cela signifie dix-huit jours de travail à raison d'une moyenne deonze heures par jour. Cette inactivité va donc me soulagerdeplusde5000 dollars... Mieux vaut trouver une distraction intéressante pour éviter que je ne pense sans cesseà cetargentperdu. (Je sais, Gisèle, ce n'estpudel'argent perdu). Une fois les gouttières nettoyées9 "entrée de voiture arrosée et la pelouse râtelée pour la première

fois delasaison, que faire" Je ne sais plus vraiment cequ'est passer le temps. Et la paperasse qui s'entasse sur mon burea~ qui n'attend que..., bon Dieu qu'est-ce que je fais ici"

rai

si peurdenepas pouvoir me garder occupé.

Debout devant la piscine, la perche de nettoyage en main, j'observe ma silhouettedans l'eau verte. Mes pantalonest usé, j'arbore un ridicule bonnetde plage comme si j'étais déjàen juillet Je n'aime pas le reflet proposé. Mais ai-je vraiment l'air

moiDs misérable avec mon completgriset mes deux cravates ?

La main de ma femme sur mon épaule. Unemain de mère~ protectrice, douce,

sans

arrière-pensée.

- Pie"e. te rappelles-tu de Myrtle Beach?

railes idéesdans le creux de la piscine. L'eauest trouble; jedevrai tàire démarrer le filtre.

- Tilsais Pierre, dans le temps, pourlesrondes de golfavec le bureau ?

Etla voibi repartie. Munie d\me brochure touristique,Gisèle me décrit les plus récentes attnctioDS de la Caroline du Sud. le gratte le rond de la piscine avec mon

filet.

(22)

paragraphes sur Myrtle Beach.De lamusiquedans ma tête. Un chant qui me berce. Je sens mes jambes lourdes et j'appuie la perche de nettoyage sur mon épaule. Je ferme les yeux.

Partir... Oublier le chien, les impôts, Monsieur Savard, et se laisser lentement éroder par le sel de la mer... Se noyer dans un bain de soleil et vivre en dilettante.

Serait~ possible'1

• Quand est-ce qu'on part, Gisèle ?

Ma réponse, inespérée, la fait trépigner comme une gagnante de la loterie. Je la vois

hésiter pendant une fraction de seconde: si eUe avait été plus folle, eUe se seraitjetéeà l'eau. Mais elle ne le fait pas. C'est Gisèle.

19

Lesjoursqui suivent me rappellentnotre retourdelunedemiel. Je retrouve une

nouvelle jeunesse dans son regardetprends un réel plaisiràce qu'elle me trouve jovial et entreprenant Je crois comprendre les couplesqui vont se retrouver, se ressourcer en voyage. Vouloir du soleil, c'est vouloir revivre l'amour. C'est retrouver la chaleur, la moiteur, les nuits torrides, l'alcool. Mais je ne pars pas en vacances pour retrouver Gisèle. Nous n'avonspasde problèmeàrégler;nous n'en n'avons jamais eu.Jem'en vais me détendre, essayerdeme convaincre qu'il y a autre chose danslavie quedescontrats d'imprimerie.

Sortir les cannes à pêche du placard, choisir d'oublier les bâtons de

golt:

retrouver les serviettesde plage enfouies dans des bottes au sous-sol, s'interroger pour

une rare fois sur ce qu'on a enviedeponer,voirsa femme préparer des sandwiches pour

la route, s'entendre avec le voisin pour le courrier, laisser le chien chez Jeannine et partirle lendemain aupetitjour.

20 mai.

n

n'est pas

encore

huit heures et le matin est couvert de rosée. Ma respiration se condensedansl'air. Àpareille heure demain, elle ne le fera pas. Gisèleet moi prenons placedanslaBuick.. J'ai acheté cette voituredeux.semaines' peine après .voir reçule chèque soulignant mesvingtansàlacompagnie. Le concessionnaire me l'a vendue en me vantant son grandespace de rangement. Elle a du coffre.

rai

bien fait d'acheter.

(23)

Gisèle insiste pour que je fasse undétour au lave-auto. Je ne dis rien pour éviter les confrontations inutiles mais je trouve cela ridicule. La Buick n'est pas sale et nous n'allonspas faire une parade. Sitôt en route vers les douanes américaines, elle remet le nez dans son dépliant. Elle me souligne certains détails dont elle ne m'avait pas fait mention:

- Te rends-lu compte, ils ont une ville qui s'appelle Florence...

Oubien:

- II Yade l'architecture française à voiràCharleston... Je me demande si c'est là qu'ils ont inventé le charleston...

Heureusement l'approcbe des frontières me donne congé de ces informations sans importance. Gisèle s'anime toujours quand vient le temps de passer les douanes. S'entretenir avec un douanier des États-Unis, lui dire où l'on va et pour combien de temps, voilà ce qui rend notre voyage officiel. C'est fixé, c'estdans les registres. C'està ce moment précis que nous pouvons vraiment nous considérer partis. J'aime l'idée même si, en ce qui me concerne, les douaniers ont toujours eu la désagréable faculté de me culpabilisersansraison.

Je trouve étrange que Gisèle regarde l'état de New-York avec des yeux de touriste. Comme si le simple fait de franchir une ligne imaginaire allait modifier le paysageet changer les coutumes. Gisèle bondit sur son siège, regardeparla vitre desa portière en me montrant du doigt des maisons, des arbres. Il lui est tout naturel de trouver intéressantes des choses qui, quelques minutes plus tôt, n'avaient même pas attiré son attention; bien sûr te nombre de drapeaux étoilés et l'asphalte de meilleure qualité...

Au bout d'uneheure~elle finitparse calmer. Nous en avons encore pour quinze heures de route avant Myrtle Beach; rien ne sert de tout souligner. Elle se détend, met de la musique. C'est dans ces moments que j'apprécie te plus sa compagnie. Ces Périodes de relâchement où elle choisit d'aimer en silence~où je n'ai pas l'impression que les mots veulent combler un vide. Elle s'abandonne au son de la musique, aux rayons du soleil qui dévient dans le pare-brise. Je la trouve belle quand sa tête est appuyée sur le dossierde labanquetteet qu'elle se berce entre le rêve et l'éveiL Elle s'endortàla hauteurdeLake Placid.

(24)

lepense à mon auto. Cela fait maintenant trois ans que jel'aietils'agit ce matin de sa première véritable sortie. Auparavantilyavait eu le voyage aux Chutes Niagara avec maLe Baron, mes foisprécédentesà Myrtle Beach avec leMtuquetle et ma seule

visite en Floride avec monCorvair. Çaremonte. Cela me suffit pour avoir l'impression quemaBuicksentànouveau l'autoneuve. ledescends un peu mafenêtre etpèsesurle briquet. J'ai arrêtédefumerilya longtemps mais certains réflexes ne se perdent jamais.

Un jourçame passera..Gisèledortmaisj'ai faim.

21

Nous pique-niquons dans les Monts Catskill et reprenons ensuite notre route vers New-York. J'ai eu amplement le tempsdedessiner letrajetdansma

tete

etje sais que Ion du transfertdel'autoroute &7 vers la95 nous ne verrous pu les gratte-cielde

Manhattan. J'appréhende les plaintes du copilote (Gisèle est forte sur ce genre de protestation) mais, àdéfaut decommentairesdésobligeants, j'ai droità unemoue. EUe ne manquerapas, lorsqueles panneauxindiqueront New-York, d'étirer le coudanstous les sens pour voir poindre l'Empire State BuildiDgà l'horizon. Deux ou trois fois elle lance: «Oui!Ça yest,je le vois )), mais se dédit l'instant d'après.

Àl'heure du souper nous arrivons à WilmingtoD, Delaware. Cestici que nous trouverons refuge pour lanuit Laville nousdonne un choix intéressantde motels bon marché. Je suis exténué mais satisfait de ma conduite.

n y

a longtemps que j'avais couvert autant de distance en une seule journée. Nous garons la voilure dans le stationnementd'un Joumey's End. À l'intérieur il y aura un bar et une bière froide m'attendra. Nous aurons une chambre bien décoréeetl'impression d'eue ailleun. Cette nuit je dormiraiserrécontre Gisèle en nous revoyant plus jeunes.

En sortant de la voiture, eUe me dit avec conviction qu'elle voit une différence dechaleurentreMontréalet le Delaware. Je souris à peine. Siça lui fait plaisirde le croire...

Ladeuxième journéederoute me puaitplus coUde. J'aipris un bon rythme de croisièreetjeDe suis plus aussi pressécfuriverà destination. Latravenée se faiten eaux calmes. Ois6le me parledepIqeetdesouvenirsd'enfance, decerfs-volantsetde

(25)

conversation dévie vers les moeurs de l'époque, vers nos vies de famille que l'on compare et soupèse. Des histoires déjà entendues mais qu'il fait bon ressasser quand on veut se croire heureux.

Je doisarrêter fairele plein. Nous sommes au beau milieudelaVirginieetles vallons me paraissentêtre des vagues, des courbes de femme que l'on caresserait du boutdesdoigts.Cet espaceestàcepointpaisiblequerespirer devient presque superflu.

fi n'y a qu'à vivre et se laisser flotter. J'ai devant moi, tout autour de la station-service, l'idéequeje me suis toujours fiùtede lacampagne. Une fresque champêtre, unenature

morte mais quand même extraordinairement vivante. C'est bête, mais si je devais

trouver un élément qui jure dus ce décor, ce serait moi.

Moi et mon char. Pour que l'image soit vraiment belle, complète et sans anicroche, il

faudraitque nous n'ysoyonspu.

J'abreuve la Bllick, les yeux sur le compteur, en me félicitant d'avoir fait

attention au poidsdes baNes. Lorsque je me rends au convenience store pour payer

l'essence, je suis accueillipartrois hommes,troisarmoiresàglaceaccoudéesdechaque

côtédu comptoir. Deux d'entre eux portent une casquetteetune vesteàcarreaux sans manche. L'autre, un moustachu entre deux âges, arbore une chemise en jeans. Au moment où j'entre dans le magasin, je sens mon malaise flotter dans l'air avec les derniers motsdeleur conversation. Au premier reprd ils ont vu que j'étais l'un d'eta, un autre Yankee venu troubler leur quiétude. Je dois puer le Nord. Os sont hostilesetne se fontpIS prier pour mele faire comprendre. Sur la caisse enregistreuse un coDantdit «Gad, guns & gula: let'a keepitlhatway». Les trois hommes

ne

répondent pas • mon

brefsourire mais je m'avaoce tout de même ven eux. Le moustachu, visiblement le tenancier dumapsin, reprend la place qu'occupait son copain derrière le comptoir~ 0

me fait un rapide geste de la tête et me rappelle le prix • payer~ En une fraction de

seconde je suis de retouràl'auto. J'ai eu ce que je voulais: du dépaysement

Gisèle se plaint d'un solidemaldetête.

n

nousresteencore toutelaCaroline du Nord à traverser; cinq heuresderoute avant Myrtle Beach. Je cherche à lui changer les

idées et lui raconte mon aventure de la station-service. Je lui explique en riant que quelques miDutes de plus auraient suffi pour que je me fasse casser les cieux jambes.

(26)

Mon histoire n'obtient manifestement pas le résultat espéré car Gisèle.latêteappuyée sur sa fenêtre, ne me fait qu'un souriredepolitesse.

23

Peut-être qu'elle n'a pas assez mangé ou qu'elle soutTre des trop longues heures en auto. Peut-être est-ce simplement la fébrilité d'arriver à destination. Une choseest

certaine, j'espère la revoir en fonne bientôt sinon les vacances seront bien mal

amorcées. Je veux bienDl'otTrir pour aller acheterdesmédicaments si elle le veut mais je n'aipasfaitquinze heuresderoute pour m'improviser infirmier !

Nous anivans à Myrtle Beach ven 18h30. EDe me demande d'aller voir lamer tout de suite mais je refuse; elle doit d'abord manger et prendredes forces. La santé avant tout. Au restauraDt eUe cueille quelques bouchées de salade avec ses maiDset touche à peine à son poulet Je ne veux pas la brusquer carça ne ferait qu'empirer la situation. Je garde donc mes remarques pour moi, me disant qu'il faut toujours être

conciliant

au

débutd'unvoyage.

Nous quittons le restaurant. L'air est frais et le temps nuageux en ce début de soirée. Le long des artères commerciales, dejeunes couples se promènent bras dessus bras dessousets'arrêtent devant les vitrines.

- Pierre, emmène-moi vo;r la mer, demande à nouveau Gisèle.

- Tunepréfèrest'installer d'abord à l'hôtel, qu'onydéposenos choses?

• Non. Lesoleilvabientôt se coucher etjevoudrais110irson reflet dans l'eau. Et puisje

voudmis me coucher tôtfJOII'êtreenfo~detrlQilL

Nous marchons en directiondelaplage,latêteremplie d'une quiétude qui ne ressemble à rien.. Mon nez se laisse channerparl'odeur sauvagedesmarais salants. Accrochée à

mon

bns,Gisèle

marche

lentemellt

comme une jeuae amoureuse, les

yeux baissésetle

visase

calme. Je réalise qu'elle avait autant besoin que moi de venir se reposer au soleil. Enarrivant à la plage, nous ôtons nos souliers comme à l'accoutumée. Je tiens mes souliers d'une main et la main librede Gisèle del'autre. Elle me dit qu'elle ne s'était

jamais

sentie aussi

bien avec moidepuisles~en moisdenotremariage.Jerépoads «c'estvrai»pour la forme mais, intérieurement, je me dis que nous avons sOrement eu biCll d'autresmolllCldSprivilégiés.

(27)

n

n'y apresqueplus personne àlaplage~ No~c'est l'heuretristede lajournée où l'on décidederemettreçaau lendemain. Je vois au loindesenfants qui courent et je sens que Gisèle les regarde aussi. Nous pensons la même chose mais il est trop tard

maintenantNos pieds tracentdansle sable mouillédesempreintes que l'on voudrait ne

jamaisvoirs'etTacer.

Que

lesolpuissegarder cela enmémoire.

Je prends de grandes bouffées d'airetencourage Gisèle • faire de même. L'air salinde l'océan me réconcilie avec les longs hiven de chez nous; nous les subissons

longtemps mais ce n'est que pour mieux savourerla douceurde l'été. Tous deux assis sur unebuttedesable, nous regardons GalameauDOUS faire ses adieuxetnous donner

rendez-vous demain pour la prochaine représentation. Je me sens curieusement émupar ce spectacle quej'aitoujours trouvé futile.

• Es-tu bien. Pierre ? Je rêve à ce moment-ci depuis tellement longtemps. poll1'quoi faut-il queJe n'aiespasloute lafônne pour l'apprécier?

Je sens que prononcer chaque mot lui demande un etTon. Ses sourcils froncés lui dorment unairsévère qu'elle ne souhaitait sûrementpas~

• C'est injuste. Il ny a qu'une an'ivée en voyage. pas deux. On pourrait revenir ici demain mais ce ne seraitpaspareil. C'est ce soir qu'on arrille. Tu vois. le coucher de soleil qu'il y a lànese répétera plus. Il ny ajamaisdeuxcouchers de soleil semblables. Demain ce sera unautre tableau. Beau, sûrement, mais différent. C'est triste quand on

ypense. C'est peut-être pour cela qu'on ny pense jamais.

Je regarde l'eau s'avancer tranquillement vers nous. Je me demande jusqu'où il faudra aller pour masquer la nostalgiedansson regard. Dans sa voix

sOuffrante

quicherche à comprendre.

Je mèDe ensuite Gisèleà l'hôtel. Jepensebien que mesidéessur notre première nuitdevacances sont foutues. Elle a si mal à la tête qu'elle se couche quelques minutes seulement après que nous nous soyons installés dans notre chambre. Elle n'a pu l'habitude de se plaindre mais ce soirelledoittaireune douleurtemble.

Je me lève le lendemaindebon matin, selon mon habitude, et prends bien soin deDepISréveiller monépouse.Jedevaisatrebienfatipémoi aussi puisquej'aifilé ma nuitd'unseul trait, SUISme réveillerni faire de

raves

bizarres. Je crois qu'elle ne fait

(28)

quedormir très profondément et que le traDsport l'a affectée encore plus que je me l'étais imaginé. Je vais prendre une marche, question d'épier les allers et venues des lève-tôl À mon retour, toutefois, je constate que Gisèlen'a pu bougé. Je reste là un

moment, attendantun signede vie.. le m'avance lentement.. l'appelant«Gigi»et«ma

chérie». Mais mes appels répétitifs s'évanouissent dans le creux de ma gorge et

m'étoutl'ent. Mes mains tremblent. réchappe le journal du matin sur lamoquette. Son corps est blême, encore chaud. Je reste assis sur le rebord du lit, les coudes sur les genoux. Çane servirait à riendecriermais

fai

enviedetoutdéfoncer. Je reste figé un

long moment, souffrantdetous mes membres. Je voudrais pleurermaisjen'en aipas la force. Les tleUlS delatapisserie se fanentsous mesyeux.Je me sensétJaDglé,attaché,

écrasé, serré. Mon corps ne supporte plus son équilibre.

n

veut tomber; je n'offre aucunerésistance.

n

s'atTaissesurletapisdelachambreetlesmiettesde moi-mimequi

subsistent se rassemblenten unpetit paquet raichaud,j'ai froid,je ne comprends pas que cela puisseitre vivre.. Les yeux ven le plafond, j'implore Gisèle dedire quelque chose mais seul le bruit duventilateurme répond, me nugue, semoquede moi.

Un c~ un seul, un gros, pour sortir ce qui ne plunait sortir d'aucune autre façon. Qu'importe si cela alerte les gensdu motel... En fait DOn. Personne ne doitêtre

mis au coUlBlltde cequisepasse.Repartir.Ravalersonenviedevomir et repartir.. Fuir pour éviter les autorités américaines, les hôpitaux et la police. le ne veux pasquema Gisèletombeentreleurs salespattes.. EUe nedoitpasêtreenterréedansce

trou perdu. Ici ce n'est pas elle. Penser, penservite,etsurtout retrouver mon sang-tioid queje viensdeperdre pour lapremièrefois. Je dois faireçapour Gisèle, la ramener à la maison où elle se sentait bien. Chez elle.

Je

suffoque.

Je n'aijamais

connu une

telle

chaleur

àMyrtleBeach.Jeprends le corps inertedemL..oh... je la prendsetlabalance sur mon épaule.

n

n'y a qu'à espérer que personnedans le motel ne m'interceptera. Je ne veux voirper5ODDe,je n'ai besoin del'aidedeper5OllDe.Je veuxlagarderprèsde moi, ne jamais m'en séparer.

J'iDstalleGisèle à SOIlsiègede passager. J'attache sa ceinture. Je la Peigne. Sa

tete

retombe vers l'avant Je l'aime. Maisje ne~urraipIS la ramener ainsiauQuébec

SIDSmourir • montour. Jenepourraisupporterrodeuret surtoutl'image. (EUeétaitlà,

pourtant, ily

a

toutjustequelquesbe~ elle me parlaiten souriantcIe.n) Laseule solutionplausible m'apparaîtêtrele cot1ie. JestatÎOIUIelaBuickdans une rueœtiIéeet

(29)

en profite pour déplacer tous lesbagagesdu coffre verslabanquettearrière..

ny

aura ..-dedanssuffisamment d'espace pour que je l'allonge et qu'il ne lui arrive rien. Mais il me faudradela glace..

Me voici de nouveau sur l'autoroute qu'bier • peine je prenais en sens inverse.. Mon pied droit ne s'est jamais senti aussi lo~ aussi déterminé • enfoncer l'accélérateur.. Je suis le plus rapide sur la route mais cela m'estégal. Il suffirait d'un geste brusque sur mon volant pour que j'aille rejoindre Gisèle.. Plus vite rendu... Je double les automobiles lesUDeSaprès les autres.. Tassez-voust Je roulerai sansarrêt,de

jouret denuit, pourlaramenerlioù ene doitêtre. EUe seramiseenterreau cillletièle de 8oisbri~on lui fera une belle cérémonie, ob oui une belle messe que Mgr

Bécbard

prononcera

et

on

louera

sa

bontéet

sa

dévotion

au bonheur

des

autres..

On... À présentles pleurs se mêlent à la sueur et riment ensemble sur mes joues. Les lannes nefont qu'éclaircir ma vision du malheur. Os ne libèrent

rien

sinon la haine que je me potte. Au milieudes railleries etdespensées désobligeantes, je l'aimais.. Je n'ai peut-être pas sucommentle lui dire mais plusle tempspassaitmoinsjem'ensentais le courage. Je perdais le tourde lui exprimer ce que j'appréciais chez elle. Je le pensais mais le gardais pour moi.. Pourquoi ne pas lui avoir dit que j'aimais sa manie de me toucher leboutdu nezaprèsm'avoir embrassé'1Qu'àmes yeux le temps n'avait jamais altérésabeauté? Tantdechoses que j'auraisp~quej'auraisdi lui dire....

J'ai roulé comme jamais mais la nuit a réussi • me

calmer

quelque peu.. Mon coeur ne me presse plus d'exploser et je peux à présent tenir mon volant sans trop trembler.. Cela a pris du temps mais j'ai pu enfin me concentrer sur ma conduite. Revenu sur la 87, je mule à food, toujours grisé par la mort La sueur continue de creuser des canyons sous machemise.Je recommence lentementàpenser,àcalculer. à prévoir, mais je n'ai la

tete

à rien.

n

n'y a ,que les douanes qui me revieanent périodiquementà l'esprit pour me rappelerquetout n'estpuencore joué. Mais j'ai si peuà pereire... L'idéede traIDerGisèleà l'arrière. de m'atmaneté deux foisdéjàpour

(30)

Mais oublier cela, penseràlaconduite. LaSuick ne me causepude soucis: il ne pleutpas, le pleinestfai~le niveau d'huile est boa Quand l'occasion se présentera, je devrai simplement vider le cendrier.Cesera faciledeme rappeler à quel moment j'ai recommencéàfumer. Le 23 mai. Si tout va bien, je serai • Boisbriand ven cinq heures dumatin. Mais à quoi bon dire "si tout va bien". Je repense à Gisèle, à ce qu'elle me

disaitavant de mourir - et surtout à ce qu'elle ne m'a pasdit Je voudrais comprendre

cette nuit' MyrtleBeach.Je repasse les événementsdans matête maisrien n'indique que j'ai failli. ma tache, que je pouvais savoiret prévenir ce qui s'estproduitCela s'est simplementproduit Les signesdeprésagedevaient

etre

trop bien cachésetje n'ai rien

w.

Son corps git maintenant dans la voiture et retient les secrets de sa disparition: arythmiecardiaque, ruptured'anévrisme,je nesais pIS. Celane changerien. Jedevrai bien finir par mangertôtou tard. Aussi bien le faire maintenant Detoute façon dans

deuxjoun je n'auraipas plus faim.

n

s'agitjustede Jll8D8Cr pour tenir le coup. Prèsde lasonie setrouve un restaurant ouvert 24 heures. Je stationne la Buick à l'arrière du

restauran~ loindes regards indiscrets.

Le Fr;endlyts de Shenectady m'accueille avec ses odeurs de friture et de café

vieilli.Les clients medévisagen~ ayant sûrement noté leteint livideet l'air désespéré. Laserveuse me sertuncafé avantmêmeque je l'aie demandé. Elle connaîtses clients. Elle s'etTorce de me servir avec empathie, avec autant de compassion qu'un regard d'inconnu peut générer. Elle fait ce qu'elle peut pour pâlir le noir de ma journée; pourtant eUedevras'y résoudre,

c'est

peineperdue. Elle en aw

"autres,

certes.maisje suis assurément son premier client à traDsporter son épouse décédée dans un cotfre d'auto. Maiselle n'en saura rien.

J'avale un club saodwich et laisse un pourboire substantiel àlaserveuse pour lui montrer que j'ai remarqué ses efforts. Je sors sans réaliseràquel point la nuitestfroide. Je n'ai pu eu le temps de m'habituer à la chaleurdu Sud. Du Delaware, penserait Gisèle. Où sont mes clés? Je ne les ai pourtant pas sorties de ma poche dans le restauraIllEUes ne sontpastombées.je l'auraisva..Je fenne lesyeux. Si j'ai laissé les

clés

dans

le contact, ce ne sera

que la suite logiqued'unejournée démente au

cours

de laquelle noft pu une tuile, mais un dallaae au complet m'est tombé sur la

tete.

Je

m'insulte

à haute

voix en parcourant le

stationnement

n

n'y a

que

moi pour...

Je m'ardte

sec •

rendroit où j'aigaréla

voiture. Je

suis

en manches courtes, un

ventglacé

(31)

me traverse. Des morceauxde vitre provenantde laBuick sont étalés sur l'espace de

stationnement vide. Vide. Mes genoux tombent ensemble: des morceaux de moi sur le pavé. Elleestpartie sans mol.Ellem'aquitté.

(32)

NEZ ROUGE

Ce vendredi était

consacré

«journée officielle des party! de bureau»). Celui organisé par le mien m'emmerdait profondément. A chaqueannée,lamême résolution:

Cette [Ois-ci je

ny

vaispas. Et, àchaque année, la même insistancedespatrons de la boitequilouvoient pour que tout le monde soitprésent J'étais donc, cettelDIléeencote, contraint de regarder mes confrères éméchés s'échanger de poignants témoignages

d'atTection. Avec

leur cravate dénouée et

leur

pathétique petitchapeau de mte, je ne pouvais m'empêcherdeles regarderdehaut

J'étais debout devant unefeBtre etreprdais laDeige tomber. Je n'avais pIS la tête aux confettis. En voyant des dizaines d'autres tours à bureaux dont les lumières étaient allumées, je m'amusais • penser que dans chacun de ces édifices un homme devaitégalement s'ennuyeretregarder dehors. Je me suis senti observé. Puis j'ai pensé à Louise, • sonparty à Saint-Sauveur, au fait qu'elle avait gardé l'auto... J'ai ftamé une autre cigarette, le temps de me convaincre que je pouvais échapper aux patrons. Puis je suis allé m'informer auprès des rares employés encore sobres si l'un ou l'autre allait repartir en direction de la Rive-Sud.

- J'aurais bien voulu, Jacques, mais•..

ComplotdeLavallois. J'ai réussi à tenir le coup pendant une autre heure mais je me suis finalement esquivé après m'être brièvement excusé auprès deM. Ruskin. J'ai fait acte

deprésence, comme Louise me l'avaitsugéré, maisDOn,je n'ai.pas réussi à m'amuser

en

bout deligne.

J'ai ensuite muché longtemps dans la nuit d'hiver à la recherche d'un taxi. Comme bien d'autres choses, ils ne sont jamais là quand il le faut. Fen étais à me demander si j'allais un jour rentrer chez moi quand j'ai remarqué, sous la lueur d'un réverbère, une voiture immobilisée dont les phares étaient allumés. Lesvitresembuées laissaient croire que quelqu'un se trouvait • l'intérieur. Tout de suite j'ai pensé aux lIIIDées folles où je faisais l'amour dans une voiture et je me suis approché subrepticementSaasitre

crun

naturel voyeur,je prenais un malin plaisir à m'i_uer qu'il puisse s ' . d'un collègue en trainde s'envoyer en l'air avec sa secrétaire. Mais,

plut6t quede surpœndreun couple au milieudeses~j'aidécouvertunhomme,la

(33)

soixantaine bien sentie, assoupi àlaplaceduconducteur. Satêtereposait sur sa ceinture de sécurité. Monlift.

Deux coups dans la vitre n'ont pu suffi pas à le réveiller. Je l'ai vu bouger vaguement les lèvres mais il n'a fait que replacer son corpsdansune nouvelle position. J'ai alors ouvert laporte.

L'intérieurdel'auto puait l'alcool etle renfermé. Le sapin odoriférant accroché au rétroviseur ne suffisait manifestementpasà la demande.

.. Monsieur. Monsieur! Réveillez-vous!

L'homme a levé un sourcil pour confirmer qu'il m'avait entendu maisilétait trop fatble pour se redresser.

n

m'a fait pitié tant son ivresse le rendait miDable. Sans compter que l'affreux complet beige dont il était affublé ajoutait .. comme si c'était nécessaire .. une touchededésolationà sonapparence. Levieux devait

atre

undeces voyageurs de commercequi sillonnentles routes du Québec pour vendre des bricoles inutilesetqui, le temps des Fêtes venu, font le voeudecbangerdevie.Oudumoitisde marchandise. Ce soir~ il avait di prendre une cuite en réalisant que son sort était immuable.

Je me suislancéimpulsivement sur une piste imprévue:

Je suis Jacques Séguin. d'Opération Nez Rouge, lui dis-je pour le mettre en

confiance.

On nous a appelé: il paraît que vous

avez

besoin de nous?

L'homme a répondu par un siane indistinct de la tête.

n.

s'est ensuite déplacé très péniblement vers le siège du passager. La manoeuvre a bien dB lui prendre trente secondes.

n

gardait les yeux fermés, probablement trop concentré à calmer ses étourdissements. Puis j'ai pris place dans l'auto sanstropme poserdequestions.

- Et vous, comment vous appelez-vous?

- Aa.•• Aa.•.Âa... Savoix perdait l'équilibre. L'homme a soupiré longuement, frustréde

nepISmâne pouvoir prononcer son nom.

.. ArthurMiliaire.est-ilparvenu àrépondre.L'hommeétaitconfus et exténué.

- Il va bien fallo;rqllevous medisiezoùvoushabitez,M. Miliaire..• Un petitefJôrt! L'iwopea balbutié quelques indicationsDébule~et,aumilieudeson délire, j'aipu

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Les rues étaientdégagéeset une neige fineet cristalline tombait sur MonUéal. J'ai ouvert la radioetsuis tombé sur un morceaudejazz. Je remarquais que le bruit des

essuie-11ace surlepare-brise battaitlerythmedelamusique. Cela aétésuffisant pour

m'égayer. Detemps à autre, je lançais quelques banalités pour rappeler àM. Miliaire que j'étais toujours là et qu'il n'avait pas à s'inquiéter.

.. Je vais ouvrir la fenêtre untoulpetitpeu. Vous allez voir, l'air frais vavous/aire du

bien.

Je me suis ainsi donné la permission de changer l'odeur répugnante de brandy qui flottait encoredansla voitureetdu même coupdem'allumer une cigarette.

.. Vous imaginez-lIOlIS. M. Miliaire. je roule t.iDns votre voitureà une heuredu mati" pendalll que ma jé",me est en tro;n de folâtrer dans les Laurentides avec un autre

homme. Parlez-moi d'un NolI•..

- TaUles des salopes, a réponduMiliaireen marmonnant

n

avait dû répéter cela mille fois dans sa vie.

- Elle s'an'angepourpasserdu vrai bon temps des Fêles, ai-je continué. Si je m'étais permisla mêmechoseàmonpartydebureau...

- NezRougefaitdespartys debureau?

Sa question m'a déstabilisé. Je l'ai fixé un moment pour voir s'il donnerait d'autres signesque la brume se dissipait. Peut-être n'était-ilpuaussi ivre que je l'avais d'abord cru. rai voulu mesortirdu guêpier:

.. Euh... oui. Dili. Le seul problème, c'est qu'il

ny

a personne pour nous reconduire e1lS1litet

Monrire,c'étaitévident,sollD8itfaux.

Une étrange enviede vengeance me trottaitdans la tete depuis que j'avais pris place dans la Cavalierd'Arthur Miliaire. Une envie de faire le con,de me payerune

bêtise pour

Noet

Aussi~ au moment précis où j'ai entendu le premier ronflement de Miliaire, j'ai donné un solide coupde volant et changédedirection. Je me suis dit: le

vieux dort, je suis seul et j'ai la nuit devant moi. rai donc fait demi-tour, étant nullementpresséd'aller meperdredansPointe-a~..Trembles. Etpuisje nesuis pas un

taxi.

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J'ai profité de l'asphalte sèche sur l'autoroute ViUe-Marie pour voir à quelle vitesse pouvait galoper la Cavalie,.. La voiture répondait bien. J'aurais volontiers

coursé..Bifurquantensuite surlarueAtwater. j'aiprislaCôte-des-Neiges..

- Belle victoi,.e des Canadiens, ce so;,., M.Milla;,.e.. Voua auriez dûvol,ça..., lui dis-je pourlaforme.Mais l'homme dormait profondément.

Je me suis ensuitefait plaisiretme suis engagé surlavoie Camilien-Houde qui

nous hisse au sommet du Mont-Royal. Je chevauchais alon à 110 kmIh.. Grisé pu la

vitesse, éblouiparles lumièresdelavillequi,duhautdela montagne, célébraient Noel departout,j'ai amorcé une réconciliation avec l'hiver. Une sorte d'armistice avec cette saisontoujours trop longue que nos chantres nationaux ne cessent de glorifier. Cette

promenade mefaisait oublierlesmatinsoùl'auto restecoincée daDslaneige;j'oubliais les pannesd'électricité qui dérèglent le radioréveil, la gadoue qui tache les pantalons,

les partys de bureau.... Mais je ne parvenais pu à oublier ma femme qui n'allait

sûrementpas rentrer coucher... Etun coupd'accélérateurpour Louise! J'ai interrompu

mon envolée avec le freinà brasetj'ai laissé glisserl'auto surlaneige surune

vinBtaine

demètres. Je suis entréde la sorte dans le stationnement du belvédère. Miliaire n'apas fait miDe d'être malade, n'a même pas bronché.. Morphée devait simplement le bercer d'une drôle de façon. Je suis sorti dehors le temps de fumer une ciprette mais

déœmbreétaitdécidément trop frisquet. Denouveauengoutfrédansl'auto. j'ai remis le moteur en Dl8fÇhe.À la radio, Dave Brubeck avait laissé placeà une vieille cbaDsonde Beau Dommage. Cela m'a doDDé l'idée d'aller voir à quoi pouvait bien ressembler le

6760 St-Vallier. Montréal. Je suisdolIC reparti en directiondeRosemont.. La neige et les réverbères rendaient la nuit lumineuse. presque éclatante.Oneût ditqueje roulaisà

une heure du jour qui n'exis1ait pu. Le long des rues du centre-ville, un curieux sentiment d'apaisement, de sérénité retrouvée. Je me rendais service autant qu'à ce

.-uvretype.Est-cedoncvraiquefairelebien c'est sefairedu bien'1 Etétait-cecertain

qu'à ce moment précis Louise s'amusait plus que moi?

J'ai stationné la voiture devant le 6760 St-Vallier, un appartement anodin commeilen existedesdizainesàMODtréaI.. Un troisième étale vétustedontl'entréeest abritéepifun vieil auventdeplastiquevert.raigrimpéfescalier en serpentin

et.

parle

minuscule carré de fenêtre dans la porte, j'ai voulu voir l'intérieur de ce lopment

(36)

ce soit d'intéressant j'étais au moins heureux d'avoir répondu sur-le-champ à ma curiosité. Louise me parlaitdeliberté....

La nuit s'avançait etje n'ai pu réprimer un biillement. C'était probablement l'heure d'être raisotmable. Arthur Miliaire dormait toujours comme une épave. La

fébrilité toute juvénile qui stétait emparée de moi plus tôt faisait un soubresaut. Un dernier tour de piste avant de rentrer. Je sautillais sur mon siège et me trouvais fou d'agirainsi.. Je pêcbais par malice. Si MilIaire avaitétépleinement conscient,ilaurait regrettédem'avoir fait confiance. Maisilétaitivre mort et ne se souciait guère de mon attitude. J'ai repris la route et guidé la Cavalier ven le Pont Victoria. U n'y avait penonne quand je l'ai traversé. Le moteur vrombissait sous mon pied, m'implorant d'augmenter la cadence..

rétais

désormais

convaiDcu

d'avoir sauvé

ma soirée. rai

appuyé surl'accélérateur etaugmentéle volumedela radio.

Quelquesminutes plus~ le véhiculeétait fiDalement immobilisé. J'ai fermé ma fenêtre, éteins la radio, puis le contact.Lesclés étaientglacéespar le froidquiavait pénétréàl'intérieurdel'auto. Arthur Miliaire,voyageurdebon commerce, blotti contre sa ceinture de sécurité, avait un sourirebéat imprimé sur la figure. Le réveiller eûtété indécent. Irrespectueux!

Cette automobile sentait la liberté etje regrettais à présent de la quittèr. J'ai refenné délicatement laportière denière moiet,après avoir plongé la main gauche dans ma poche,

Jai

débarrémaporteetsuis rentrédormir.

(37)

GOLGOTHA

ou

LA PASSION D'OREL HERSmSER

Le match d'bier s'est terminé tard. Quatorze manches. Le gérant adû utiliser tous ses releveurs. Je savais qu'en arrivant au Comiskey Park aujourd'hui, Hargrove allait s'approcher de mo~ mettre son bras autour de mon épaule et marcher tranquillement dans l'abri des joueurs en m'expliquant que je devais lui donner au moins septbonDesmanches.

Dès mon arrivée à L'bôte~ j'ai téléphoné à maman pour la sécuriser et pour

meubler un peu sa solitude. Elle m'aditqu'elle allait prier pour moi etj'ai souri. Elle m'a de nouveau rappelé combien mon père serait fier de moi. J'ai fermé Les yeux quelquesinstantspour chasser sonimage.À côtédemoi, Kevinétaitcouché surSOftlit,

deux sacs de glace sur les genoux.

n

changeait distraitement les postes de la télé et

tDaIJIIéait

contre ses mauvaisélansdelajournée.

Je me suis couché peude temps après. Un mal de tête latent n'attendait qu'un mouvement brusque ou une mauvaise nouvelle pour se déclarer. En rabattant lesdraps sur moi, je me suis ditque je devais dormir vite ~ bien. Mais toute laDuit je n'ai fait que regarder défiler les joueurs des White Sox. Je répétais ma leçon, je repassais la stratégie • des balles courbes àVen~ lancerhautà Durham, rester à l'intérieur avec Guillen...

J'ai mal dormi.

Dérangé parces quelques heuresde mauvais sommeil, j'ai déjeuné enboudant Le buffet de l'hôtel était exécrable marne si le soigneur de l'équipe s'empiffrait alIè1fement. Je L'observais du coinde l'oeil enlisant les cbroniqueun sportifs spéculer

sur la santédemon bras.lairessenti une raideuràl'épauledusimple fait d'en entendre parlerdans lejournal. lai fait mine de me lever pour aller en parler à Doc mais ce dernier se vautrait avee trop de complaisance dans le bacon et les saucisses. Ça me dégoQIait. Parfois je medemandes'il ne suit pu "équipe seulement pourprofiter des hatelsetdesbuffets.

(38)

En prenant letaxiquime menait vers le ComiskeyParket vers le match décisif:

j'ai tenté de me convaincre que j'étais en pleine fonne. Mais affalé sur la banquette arrière, j'avais plutat l'impression d'avoir la gueule de bois. Le chauffeur de taxi m'a visiblement reconnu et m'a confronté du regard. Du coupj'ai compris toute la haine partisane quim'attendaitau matchdece soir.

Je me suis habillé tranquillement L'instructeur des frappeurs s'est approché de

moiet, en mettant deux doigts sur majoue,a froncé le sourcils etmladitque je n'avais pasbonnemine. Merci bien. Puis je suis allé faire mapetitepromenade avec lecoach.

Je m'iDquiète parfois devoir, quel point Hargrove a confiaDceCDmoi. Je saisque ses nombreux «Orel, t'es mon homme)) ont irrité certains coéquipiers. Je crois qu'il sanctifie daDgereusement mes treize lIUlées d'expériencedanslaGrandeLiguemaisce serait injustedem'en plaindre.

La clameurde la foule s'élève comme la marée. C'est le dixième joueur. Les gens aftluent aux tourniquets, plusieurs ont apporté leurs crécelles et des pancartes disant «Scalp the Indians»). Dans le vestiaire, Kevin a recommencé à se ronger les ongles. Dave s'approche de moi et me glisse un mot d'encouragement • l'oreille.

«Amen», dis-je pour le remercier. Le gérant prend ensuite la parole pour un court instaDt. C'est un ancien joueur et ilsaitqu'il nefautputrop en dire.

Dèsle débutdumatch, l'arbitre s'impatientedu nombrede nouvelles balles que je luidemande.Cest qu'cnes meparaissenttoutes molles, inconfortables. Je n'ai aucune emprise sur elles. Même après toutes ces années, je ressens encore cette sensation

grisantequand jegrimpesur le monticule. Onsesenten altitude, on manqued'airun

moment. Une fine brumeesttombée sur Chicagoetelle danse autourdemoi commeun

esprit ensorceleur. Quelque chose de bizarre, de nouveau m'habite ce soir-là, une curieuse vibration logée quelquepartdans ma poitrineetreliéeà ma tête.

Notrearrêt-courtm'a donné une marge de manoeuwe dès la première manche en claquant un circuit de deux points contre Navarro. Mais le vent tourbillonne dans le

s1Ideet fait des

spirales.

n

medaarçoDDe,

me40nae

des chaleurs. Surtout nepIS se laisser déranger par des éléments extérieurs. Au début de la

semaine, •

Cleveland, j'étais conaelé mais cela ne m'a pIS empkbé d'accomplir le boulot. Alon cesse de

penser,Orel,etfaiston boulot

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