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La valeur perçue dans l'alimentation santé : conceptualisation et mesure dans une perspective expérientielle

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Academic year: 2021

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Texte intégral

(1)

Université Panthéon-Assas

Ecole doctorale de Sciences économiques et de gestion, Sciences de l'information et de la communication

Thèse de doctorat en Sciences de Gestion

soutenue le 3 octobre 2012

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ONCEPTUALISATION ET

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ESURE DANS UNE

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ERSPECTIVE

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XPERIENTIELLE

Aina RAVONIARISON

Sous la direction de

Monsieur Pierre-Louis DUBOIS

Professeur à l’Université de Montpellier

Madame Nathalie GUIBERT

Professeur à l’Université Paris II

Membres du jury :

Rapporteurs

Madame JoAnne LABRECQUE

Professeur à HEC Montréal

Madame Lucie SIRIEIX

Professeur à Montpellier SupAgro

Suffragant

Madame

Mathilde GOLLETY

(2)

Avertissement

La Faculté n’entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans cette thèse ; ces opinions doivent être considérées comme propres à leur auteur.

(3)

Remerciements

Au terme de cette expérience unique, je souhaiterais consacrer un moment pour adresser mes remerciements à toutes les personnes qui, de près ou de loin, étaient présentes durant ce véritable parcours de vie.

En tout premier lieu, je tiens à exprimer ma profonde gratitude à mes chers directeurs de thèse, le Professeur Pierre-Louis Dubois et le Professeur Nathalie Guibert. Professeur Dubois, merci de votre écoute, de votre confiance et de l’inspiration que vous m’avez données tout au long de cette aventure gratifiante. Professeur Guibert, je vous remercie chaleureusement de m’avoir guidée sur cette voie ; c’est grâce à votre attention et à votre soutien que je suis arrivée à ce stade aujourd’hui.

J’aimerais également adresser mes plus vifs remerciements aux membres du jury, les Professeurs JoAnne Labrecque, Lucie Sirieix et Mathilde Gollety, pour m’avoir fait l’honneur d’accepter d’évaluer ma thèse et d’exprimer, de cette manière, l’intérêt qu’elles portent à mon travail.

Mes remerciements vont également à mon comité d’experts composé de chercheurs en sciences de gestion, qui m’ont éclairé de leurs conseils et de leurs recommandations durant la phase de validation de mon échelle de mesure de la valeur. Un grand merci, donc, à François Lenglet, Rémi Mencarelli, Bertrand Belvaux (merci pour les discussions sur les méandres de l’analyse factorielle confirmatoire !), Gilles N’Goala, Aurélie Merle, Maurice Doyon, Patricia Gurviez, et de nouveau, JoAnne Labrecque et Lucie Sirieix.

Je suis très reconnaissante envers la petite équipe du Largepa, et surtout à Elodie Fioc et Gaëlle Gloppe d’avoir atténué, grâce à leur disponibilité, les désagréments de réaliser une thèse à distance de son laboratoire de recherche.

Je souhaiterais saluer mes « supporters » du groupe Norprotex, qui m’ont aidé à trouver un terrain pour la collecte de données. Merci pour votre soutien, votre bonne humeur et votre amitié durant toutes ces années.

Je ne saurais oublier ma famille qui, bien que déroutée parfois par les mystères de la recherche doctorale, a toujours manifesté de la fierté envers leur petite doctorante. Je veux dédier ce travail à mon père et à ma mère pour leurs encouragements en toutes circonstances.

Bien évidemment, je ne saurais clore ce moment sans une pensée particulière à mon petit « auxiliaire de recherche » qui a investi non seulement son affection mais également ses compétences techniques et toute sa personne dans cette aventure. Merci d’avoir partagé mes joies et mon combat de doctorante, chaque

(4)

Résumé :

L’objet de cette recherche correspond aux aliments santé à orientation fonctionnelle (ASOF), définis comme des produits courants qui, au-delà de leur valeur nutritive de base, ciblent un effet positif sur une fonction spécifique de l’organisme, via des composants additionnels. Les travaux en matière de consommation nutrition-santé (CNS) démontrent la prédominance de l’approche cognitiviste, érigeant le raisonnement analytique et l’attitude en tant que régulateurs principaux du processus décisionnel du consommateur. Toutefois, une exploration conceptuelle préliminaire (revue documentaire pluridisciplinaire et étude qualitative multi-méthodes) suggère que le postulat de rationalité des consommateurs, s’il n’est pas sans fondement, peut paraître restrictif et ne rend pas totalement compte du caractère multidimensionnel de la consommation des ASOF (fonctionnelle, hédonique et symbolique). A ce titre, la recherche s’inscrit dans une perspective expérientielle, en positionnant la valeur perçue de la consommation en tant que clé d’analyse. Afin de mettre à jour les mécanismes à l’œuvre dans la perception d’une valeur de la CNS, une validation empirique de la mesure du concept est établie, dans l’objectif d’en proposer un cadre explicatif intégrateur éclairant la dynamique qui anime la perception de la valeur, ses déterminants, ses modérateurs et ses conséquences (intention de réachat). L’application du cadre d’analyse expérientiel à la CNS montre qu’il semble tout à fait approprié pour appréhender la facette affective de la consommation. Le processus met ainsi en jeu une interaction consommateur-produit, soumise à la force modératrice de traits de personnalité durables.

Descripteurs : valeur perçue - aliments fonctionnels - courant expérientiel – nutrition-santé

The perceived value of health-enhancing food: conceptualization and

operationalization through an experiential perspective

Abstract:

Functional foods are conventional products that contain additional bioactive compound targeting physiological benefits beyond basic nutritional value. Previous research regarding the health nutrition consumption widely focused on the cognitive features of reasoned decisional process to explain consumer acceptance. Bearing on experiential perspective, the purpose of the present study is to provide an in-depth analysis of functional food consumption by exploring the multidimensional approach of consumer perceived value (utilitarian, hedonistic and symbolic). A primary literature review allowed determining the factors which might affect consumption experience (typology of value components, variables related to consumer, product characteristics and personality traits). An exploratory qualitative survey which mixed interviews with diary and questionnaire was carried out in order to verify research proposals. Finally, following an empirical validation of a perceived value scale, an integrative conceptual model was elaborated and tested through a quantitative survey. This explanatory frame highlighted the underlying relationships between the perceived value of functional food consumption, its predictors, its moderators and its effects (repurchasing intention). Results showed that experiential framework gives a relevant insight into the affective pattern of functional food consumption that emerges from an interaction between the consumer and the product.

(5)

Principales abréviations

ACP analyse en composantes principales AFC analyse factorielle confirmatoire AFE analyse factorielle exploratoire AGFI Adjusted goodness of fit index Amsoi amélioration de l’image de soi ANOVA analyse de variance univariée

ASOF aliment(s) santé à orientation fonctionnelle CFI Comparative Fit Index

CNS consommation nutrition-santé corr2 corrélation au carré

DC désir de contrôle Ddl degré de liberté Defego Défense de l’ego Dsoc désirabilité sociale EFCO Effort cognitif

EFSA Autorité européenne de sécurité des aliments (European Food Safety Authority)

Emo émotionnelle

EVG Evaluation globale Fonc fonctionnelle GFI Goodness of fit index

HBM Croyances relatives à la santé (Health Belief Model) Inno Innovativité

KMO indice Kaiser-Meyer-Olkin MANOVA analyse de variance multivariée OBSV Obligation d’observance

OCHA Observatoire Cniel des Habitudes Alimentaires

Opt Optimisme

PAPM Processus d'adoption du comportement de protection (Precaution Adoption Process Model) PMT Motivation à la protection (Protection Motivation Theory)

PrSc Conscience de soi privée PuSc Conscience de soi publique

PX Prix

Q-Q plot graphique quantile-quantile (quantile-quantile plot) RMSEA Root Mean Square Error of Approximation Senso sensorielle

SMC carré des corrélations multiples (squared multiple correlation) Symb symbolique

TLI Tucker Lewis Index

TOL Tolérance

TPB Théorie du comportement planifié (Theory of Planned Behavior) TRA Théorie de l'action raisonnée (Theory of Reasoned Action) VFONC valeur fonctionnelle

VGP valeur globale perçue VIF Variance Inflation Factor VSENSO valeur sensorielle VSYMB valeur symbolique

(6)

Sommaire

Introduction générale

...

1

1. Le contexte de l’étude ... 1

2. Problématique et objectifs de recherche ... 4

3. Contributions attendues de la recherche ... 7

4. Démarche et structure de la thèse ... 10

PARTIE I - CADRE DE LA RECHERCHE : VERS UNE APPROCHE EXPERIENTIELLE DE LA CONSOMMATION NUTRITION-SANTE CHAPITRE 1.L’ALIMENTATION SANTE A ORIENTATION FONCTIONNELLE : FONDEMENTS THEORIQUES ... 15

Section 1. La dimension santé dans la consommation alimentaire : une approche pluridisciplinaire en sciences humaines et sociales ... 16

1. L’approche en socio-anthropologie de l’alimentation ... 16

1.1. La prévalence de la dimension santé dans la modernité alimentaire ... 18

1.2. La superposition de la pensée imaginaire et de la pensée rationnelle ... 22

1.3. La dimension santé dans la perspective de la rationalité magique ... 24

2. L’approche en psychologie de la santé et de la nutrition ... 28

2.1. Les théories fondées sur la cognition sociale ... 28

2.2. Les théories dites de « stades de changement » ... 38

3. L’approche en marketing et en science du consommateur... 45

3.1. Un ancrage dans les sciences économiques ... 45

3.2. La dimension santé sous l’angle du produit ... 47

3.3. La dimension santé du point de vue du consommateur ... 52

Section 2. La spécificité de la consommation nutrition-santé : délimitation des frontières du concept ... 58

1. Définition du concept d’aliments santé à orientation fonctionnelle ... 58

1.1. Panorama des principales terminologies ... 58

1.2. Concept d’aliment santé adopté pour la recherche ... 60

2. Positionnement au sein des produits alimentaires à bonne image nutritionnelle ... 64

2.1. Aliments fonctionnels et aliments conventionnels ... 64

2.2. Aliments fonctionnels et aliment diététiques ... 66

2.3. Aliments fonctionnels et compléments alimentaires ... 67

2.4. Aliments fonctionnels et produits biologiques ... 67

3. Quelques aspects scientifiques autour de l’alimentation fonctionnelle ... 70

3.1. Le composé bioactif, au cœur du concept de fonctionnalité ... 70

3.2. La combinaison aliment de base / ingrédient fonctionnel ... 75

(7)

Section 3. Les déterminants de l’acceptabilité des aliments santé à orientation

fonctionnelle: état des recherches ... 82

1. Les variables socio-économiques et démographiques ... 82

1.1. Le facteur genre ... 82

1.2. La variable de l’âge ... 84

1.3. Statut socioéconomique, éducation et revenu ... 85

1.4. En conclusion, des décalages dus aux facteurs socioculturels de l’étude ? ... 87

2. Les principaux facteurs de choix liés au produit ... 88

3. Les variables psychologiques et perceptuelles du consommateur ... 91

3.1. Des facteurs issus de la psychologie sociale ... 91

3.2. Des concepts construits par la recherche marketing ... 93

4. Synthèse : la prédominance de la démarche cognitiviste... 98

Conclusion au chapitre 1 ... 102

CHAPITRE 2.THEORIES DU MARKETING EXPERIENTIEL ET VALEUR PERCUE : APPORTS POUR LA CONSOMMATION NUTRITION-SANTE ... 104

Section 1. Concepts du courant expérientiel et valeur perçue ... 105

1. Evolution des recherches dans la théorie de la valeur de consommation ... 106

1.1. L’approche expérientielle de la valeur ... 107

1.2. Pour une approche dite « intégrative » du concept de valeur perçue ... 111

1.3. La place de la valeur perçue dans la relation consommateur ↔ produit ... 114

2. L’expérience de consommation, créatrice de valeur: clarification du concept ... 117

2.1. La dualité de la nature de l’expérience ... 117

2.2. Recherche d’expériences versus Production d’expériences ... 120

2.3. Synthèse : les apports du modèle expérientiel ... 122

Section 2. L’acte alimentaire en tant qu’expérience de consommation ... 124

1. Manger : un acte expérientiel à fort contenu symbolique ... 124

1.1. La multidimensionnalité de l’acte alimentaire ... 124

1.2. Le mangeur hypermoderne : un consommateur éclectique ... 126

1.3. La tendance à l’esthétisation et au réenchantement de l’acte alimentaire ... 127

2. Les composantes expérientielles de la CNS ... 128

2.1. Une vision holistique, la quête du bien-être par la nutrition-santé ... 129

2.2. La valorisation des dimensions hédoniques et émotionnelles ... 131

2.3. Les associations symboliques attachées à la nutrition-santé ... 134

(8)

CHAPITRE 3. PROPOSITION D’UNE MODELISATION DE LA CONSOMMATION

NUTRITION-SANTE DANS UNE PERSPECTIVE EXPERIENTIELLE ... 142

Section 1. Essai de modélisation : exploration bibliographique des variables du modèle de recherche ... 143

1. La valeur de CNS : composantes de la valeur et coûts perçus potentiels ... 143

1.1. Les composantes de la valeur attendues ... 143

1.2. Les coûts perçus potentiels ... 145

2. Les variables explicatives de la valeur de CNS ... 146

3.1. Antécédents liés à l’objet ... 147

3.2. Variables individuelles ... 148

3. Les variables modératrices : le rôle potentiel des traits de personnalité ... 151

4.1. Le désir de contrôle ... 152

4.2. L’attrait pour la nouveauté ... 153

4.3. Le besoin d’approbation sociale ... 153

Section 2. Méthodologie qualitative exploratoire: une introspection guidée ... 156

1. L’échantillon retenu ... 156

2. Méthode de recueil de données ... 157

2.1. Entretiens semi-directifs en mode contextuel ... 158

2.2. Journal de bord consommateur en mode principal ... 159

2.3. Questionnaire en mode complémentaire ... 160

3. Procédure d’analyse des données qualitatives ... 161

3.1. La réalisation de l’analyse de contenu thématique ... 162

3.2. L’analyse lexicale en vue de l’élaboration ultérieure des mesures ... 163

4. La qualité de l’étude qualitative exploratoire ... 164

4.1. L’examen de la fiabilité de l’étude qualitative... 164

4.2. La validité de l’analyse qualitative ... 168

Section 3. Résultats de l’analyse qualitative ... 170

1. Les composantes de la valeur de CNS identifiées ... 170

1.1. Valeur fonctionnelle ... 170

1.2. Valeur hédonique ... 172

1.3. Valeur émotionnelle ... 173

1.4. Valeur d’amélioration de l’image de soi ... 174

1.5. Valeur de défense de l’ego ... 175

2. Les coûts perçus identifiés ... 177

3. Les variables individuelles de la valeur de CNS ... 178

3.1. La conscience santé ... 178

3.2. L’implication dans la catégorie de produit ... 179

3.3. Le risque perçu ... 179

3.4. L’expertise perçue dans la catégorie de produit ... 180

(9)

4. Les traits de personnalité, variables modératrices ... 183

4.1. Le désir de contrôle ... 184

4.2. L’innovativité ... 185

4.3. La conscience de soi privée et publique... 185

4.4. La disposition à l’optimisme ... 188

Conclusion au chapitre 3 ... 190

PARTIE II. OPERATIONNALISATION ET TEST DU MODELE EXPLICATIF GLOBAL DE LA VALEUR PERCUE DE CNS : PHASE EMPIRIQUE CHAPITRE 4.HYPOTHESES DE RECHERCHE ET PROCEDURE DE COLLECTE DES DONNEES QUANTITATIVES ... 193

Section 1. Hypothèses de recherche : valeur de CNS et antécédents ... 194

1. Hypothèses centrales : valeur de CNS, satisfaction et intention d’achat ... 194

1.1. Les hypothèses relatives à la formation de la valeur globale perçue ... 194

1.2. Les relations unissant les composantes de la valeur ... 196

1.3. Les relations entre valeur perçue, satisfaction et intention de réachat ... 198

2. Les relations entre la valeur perçue et ses antécédents ... 199

2.1. La question du statut de la dimension sensorielle ... 200

2.2. Influence des caractéristiques liées au produit ... 203

2.3. Influence des variables psychologiques du consommateur ... 208

Section 2. Propositions de recherche : influence des variables de personnalité modératrices ... 220

1.L’effet modérateur du désir de contrôle ... 220

2.L’effet modérateur de la conscience de soi ... 221

2.1. La fonction modératrice de la conscience de soi privée ... 222

2.2. La fonction modératrice de la conscience de soi publique ... 223

3.L’effet modérateur de l’innovativité ... 224

4.L’effet modérateur de la disposition à l’optimisme ... 225

Section 3. Procédure de collecte des données - Phase quantitative ... 228

1. Le choix de l’administration de l’enquête via un site Internet... 229

2. Modalités de collecte pour les deux phases ... 230

2.1. Cadre de réalisation de la première collecte - phase exploratoire (n=234) ... 230

2.2. Procédure de la deuxième collecte – phase confirmatoire (n=664) ... 232

2.3. Caractéristiques de l’échantillon ... 233

3. Conception des questionnaires de l’enquête ... 236

3.1. Validation de l’objet effectif de l’étude : les aliments santé à orientation fonctionnelle ... 236

(10)

CHAPITRE 5. OPERATIONNALISATION DES VARIABLES DE LA RECHERCHE .. 243

Section 1. La mesure des composantes de la valeur de CNS ... 244

1. Proposition d’une échelle des composantes de la valeur de CNS ... 245

1.1. Génération des items de l’échelle ... 245

1.2. Soumission de l’échelle à un panel d’experts ... 246

1.3. Pré-test qualitatif auprès de consommateurs ... 249

2. Première collecte: analyse factorielle exploratoire et étude de la dimensionnalité (n=109) .... 251

2.1. Conditions préalables à la factorisation des données ... 252

2.2. Tests de dimensionnalité et épuration des items ... 252

2.3. Interprétation des facteurs et profil de normalité ... 253

3. Contrôle du biais de désirabilité sociale ... 256

4. Deuxième collecte: analyse factorielle confirmatoire et examen de la validité de l’échelle (n=664) ... 257

4.1. Réplication de l’analyse factorielle exploratoire sur la 2è collecte ... 258

4.2. Vérification des conditions de l’analyse factorielle confirmatoire ... 260

4.3. Qualité d’ajustement du modèle et respécification ... 261

4.4. Estimation des paramètres du modèle retenu... 264

4.5. Fiabilité et validité de l’échelle des composantes de la valeur ... 266

Section 2. La mesure de la valeur globale perçue de CNS ... 269

1. Construction de l’échelle de la valeur globale perçue ... 269

2. Les analyses factorielles exploratoires (1è et 2è collecte) ... 271

3. L’analyse factorielle confirmatoire sur la 2è collecte: examen de la validité de l’échelle ... 273

3.1. Test de la normalité de l’échelle « valeur globale perçue » ... 273

3.2. Une analyse concomitante avec l’attitude vis-à-vis de la marque ... 274

4. Distinction entre composantes de la valeur et valeur globale perçue ... 275

Section 3. Opérationnalisation et validité des autres construits ... 279

1. La mesure des antécédents liés à l’objet ... 279

1.1. Propriété fonctionnelle perçue ... 280

1.2. Crédibilité de l'information sur le produit ... 281

2. La mesure des variables psychologiques ... 282

2.1. Conscience santé ... 282

2.2. Sentiment d’auto-efficacité dans la CNS ... 284

2.3. Implication dans la catégorie de produits ... 286

2.4. Risque perçu dans la catégorie de produits ... 287

3. La mesure des traits de personnalité modérateurs ... 289

3.1. Le désir de contrôle personnel ... 289

3.2. La conscience de soi... 291

3.3. La tendance à l’innovativité ... 295

(11)

4.1. Satisfaction générale perçue ... 298

4.2. Intention de réachat ... 299

Conclusion au chapitre 5 ... 302

CHAPITRE 6.RESULTATS DU TEST DES HYPOTHESES ET DISCUSSIONS ... 306

Section 1. Choix des méthodes statistiques pour le test des hypothèses ... 307

1. La combinaison des analyses de régression et des équations structurelles ... 307

1.1. Les conditions de mise en œuvre de la régression linéaire ... 307

1.2. Interprétation des analyses de régression ... 309

1.3. Interprétation des résultats des équations structurelles ... 309

2. Méthodologie de la recherche des effets de médiation ... 310

3. Méthodologie de tests des effets de modération ... 312

Section 2. Résultats du test des hypothèses ... 315

1. Test des hypothèses centrales : les relations entre valeur de CNS, satisfaction et intention de réachat ... 315

1.1. Test du modèle global : comparaison des modèles alternatifs ... 315

1.2. Les relations entre composantes de la valeur et valeur globale perçue (H1 et H3) ... 318

1.3. Les relations entre valeur globale perçue, satisfaction et intention comportementale (H4 à H6) ... 323

2. Les relations entre la valeur perçue et ses antécédents ... 326

2.1. Influence des caractéristiques liées au produit ... 327

2.2. Influence des variables psychologiques du consommateur ... 330

3. Influence des variables individuelles modératrices ... 339

3.1. L’effet modérateur du désir de contrôle ... 340

3.2. L’effet modérateur de la conscience de soi ... 342

3.3. L’effet modérateur de l’innovativité ... 346

3.4. L’effet modérateur de la disposition à l’optimisme ... 348

4. Evaluation de l’impact des variables de contrôle ... 350

Section 3. Discussions des principaux résultats et mise en perspective ... 354

1. La perception de la valeur de la CNS et ses conséquences ... 354

1.1. La dynamique au cœur de la valorisation de la CNS ... 354

1.2. La prise en compte simultanée de la valeur globale perçue et de la satisfaction sur l’explication de l’intention de réachat ... 359

2. Les facteurs déterminants dans la formation de la valeur de CNS ... 360

2.1. L’effet des antécédents liés à l’objet ... 360

2.2. L’effet des antécédents individuels ... 363

(12)

3. Les traits de personnalité, modérateurs de la formation de la valeur de CNS ... 380

3.1. La conscience de soi privée, caractéristique décisive ... 381

3.2. L’innovativité, révélatrice de comportements exploratoires... 382

3.3. L’influence de la conscience de soi publique et de la disposition à l’optimisme ... 382

3.4. L’influence modérée du désir de contrôle personnel ... 384

4. La question d’une influence directe des traits de personnalité ... 385

Conclusion au chapitre 6 ... 388

Conclusion générale ... 390

1. Réponses apportées aux questions de recherche... 390

2. Les contributions de la recherche ... 394

a) Apports au niveau théorique ... 394

b) Apports au niveau méthodologique ... 398

c) Apports au niveau managérial ... 400

3. Les limites et les voies de recherche ... 406

a) Les limites au niveau théorique ... 406

b) Les limites au niveau méthodologique ... 409

Références bibliographiques

...

413

Liste des tableaux

……….

449

Liste des figures

……….

453

(13)

Introduction générale

«Il faut prendre soin de ton corps, afin que ton âme ait envie de l'habiter. »

Proverbe chinois

1. Le contexte de l’étude

Plusieurs facteurs socioculturels peuvent expliquer l’explosion des aliments santé partout dans le monde: la lutte contre le vieillissement combinée à la volonté de prendre sa santé en main, les problèmes de surpoids dans les pays développés qui ont mobilisé les acteurs publics et les consommateurs, le retour des valeurs féminines, et plus globalement, une recherche de bien-être et de réassurance dans un contexte anxiogène généralisé (Steptoe et al., 1995 ; Gilbert, 2000 ; Roberfroid, 1998 ; De Jong et al., 2005). Depuis longtemps, les consommateurs ont su établir le lien entre leurs habitudes alimentaires et leur état de santé. Les industriels ont bien compris les attentes générées par cette prise de conscience et ont su exploiter cette aspiration au bien-être en mettant sur le marché de produits à bénéfice santé toujours plus innovants.

Cette revendication d’une alimentation répondant aux objectifs santé s’articule autour de cinq grandes orientations de la préoccupation envers la santé: (1) l’expertise, en ce sens que les individus sont en quête de connaissances et de savoir-faire nutritionnels, (2) des considérations morales associées à la condamnation de certains nutriments tels que le gras ou le sucre, (3) le désir de soin exprimé à travers un comportement proactif, pour soi et pour ses proches, (4) un phénomène de compensation satisfait principalement par les produits renforcés, qui offrent des bénéfices santé et enfin, (5), des pratiques de restriction et d’évitement qui expliquent le développement des produits allégés (Hasson, cité dans Heasman et Mellentin, 2001).

(14)

a) Clarification du concept : aliments santé ou aliments fonctionnels ?

De manière générale, on qualifie d’aliments santé, des produits qui apportent un bénéfice en termes de préservation ou d’amélioration de la santé et de la forme, ou de réduction de risques de maladies. Parmi les vertus santé les plus populaires, on peut citer la protection du système cardiovasculaire, le bien-être digestif ou l’amélioration des défenses naturelles, mais également l’effet beauté et minceur, toujours présent dans l’esprit du grand public. La perception de l’alimentation santé recouvre ainsi une hétérogénéité de philosophies et de sens différents, selon les cultures et les interlocuteurs. Au regard de l’ambigüité entourant la notion d’aliments santé, il importe de spécifier d’emblée la conception adoptée dans ce travail doctoral. L’objet d’étude dans cette recherche correspond très précisément aux aliments santé à orientation fonctionnelle dits de seconde génération, définis selon Doyon et Labrecque (2005) de

la manière suivante :

« Un aliment fonctionnel est un aliment conventionnel ou similaire en apparence à un aliment conventionnel. Il fait partie d’une alimentation standard et est consommé de façon régulière et dans des portions normales. Il procure des bienfaits physiologiques démontrés qui réduisent le risque de maladies chroniques ciblées ou de déficiences, et cela, au-delà de ses fonctions nutritionnelles de base. »

Notre acceptation des aliments santé correspond ainsi au « périmètre restreint » de l’alimentation santé (Arts-Chiss et Guillon, 2003). A l’instar de l’auteur de référence

dans ce domaine, Roberfroid (1998), nous désignerons, par commodité et par souci de précision, ce comportement par la terminologie générique de consommation nutrition-santé (CNS) tout au long de cette recherche doctorale. Compte tenu de

cette définition, nous utiliserons indifféremment les termes d’aliments santé, d’aliments santé à orientation fonctionnelle (ASOF) ou d’aliments fonctionnels

pour désigner notre objet d’étude. Si le terme « alimentation fonctionnelle » est largement rentré dans le langage courant, Roberfroid (1998) lui préfère l’appellation

(15)

plus appropriée de « nutrition optimale »1, le terme alimentation fonctionnelle renvoyant à un régime alimentaire général, exclusivement composé d’aliments fonctionnels.

b) Aujourd’hui, un marché sous pression

Dans la mesure où l’on doit déplorer l’absence de terminologie officielle encadrant le concept d’aliments santé à orientation fonctionnelle, il paraît difficile de cerner de manière exacte les données chiffrées de ce marché. Si les estimations sont variables d’une étude à l’autre, et d’un pays à l’autre, il semble cependant possible de faire émerger quelques grandes tendances générales de l’évolution du marché. En 2005, l’agence Eurasanté constatait le potentiel élevé du secteur : tandis que le marché de l’agroalimentaire subissait une stagnation, dans les pays développés, le marché des aliments fonctionnels constituait un des segments porteurs de l’alimentaire, les prévisions tablant sur un taux de croissance de 20% par an.

Sept ans après, force est de constater la multiplication des échecs de lancement de produits dont les causes sont variées : défiance des consommateurs face à la légitimité scientifique des promesses santé, intensification de la concurrence avec l’entrée sur le marché de produits substituables, défaut de positionnement de produit, campagnes médiatiques d’associations de consommateurs mettant en doute l’efficacité des produits et par-dessus tout, sévérité croissante de l’appareil réglementaire européen entourant les allégations santé. Le taux de mortalité des produits lancés excédant le nombre des succès dans ce secteur témoigne de la rencontre malheureuse entre opportunités

du marché, avancées technologiques et ressources financières (Menrad, 2003).

Par ailleurs, les aliments fonctionnels sont qualifiés de « biens de confiance » (Doyon et al., 2006 ; Urala et Lähteenmäki, 2004), le bénéfice santé n’étant pas immédiatement perçu dans la consommation du produit. En l’absence d’effets directement mesurables durant l’expérience de consommation, la crédibilité et la confiance sont donc des

(16)

vertus cardinales, donnant ainsi toute son importance à la communication et à la

caution scientifique. De nombreux freins à la confiance persistent encore dans une situation de suspicion alimentée par les associations de consommateurs, qui dénoncent certains abus de la part de l’industrie agroalimentaire. Les aliments fonctionnels sont plus que jamais des produits alimentaires controversés et l’explosion des demandes en faveur de produits bien-être ne doit pas occulter les menaces qui pèsent sur la pérennité du marché. A ce titre, la méfiance et la perplexité des consommateurs face à la multiplication et la complexification de l’offre et de l’information constituent le défi majeur dans les années à venir. En réaction à cette « cacophonie nutritionnelle », les consommateurs refusent de payer un prix plus élevé pour des bénéfices santé parfois incertains, et, dans le cas particulier des Français, se montrent réticents face au caractère trop médicalisé et trop industriel des aliments santé nouvelle génération.

Si les stratégies marketing tendent donc prioritairement vers l’assurance de la confiance du consommateur, essentiellement bâtie sur la recherche d’une information claire et compréhensible concernant les fonctions du produit, quelques recherches académiques parmi les plus récentes (depuis 2003) s’intéressent progressivement aux réponses perceptuelles des consommateurs envers les aliments fonctionnels, ainsi qu’à leur expérience subjective avec le produit (e.g, Urala et Lähteenmäki, 2007 ; Laros,

2006 ; Niva et Mäkelä, 2007). Williams, Stewart-Knox et Rowland (2004) soulignent

d’ailleurs la carence de recherches qui chercheraient à explorer les perceptions des consommateurs dans la nutrition-santé.

2. Problématique et objectifs de recherche

Dans une perspective de fidélisation du consommateur, la notion de qualité perçue a longtemps été privilégiée dans la détermination d’avantages concurrentiels. Mais ce levier est apparu comme insuffisant pour instaurer une relation de long terme avec le consommateur (trop centrée sur les attributs du produit, sur la transaction ponctuelle durant l’acte d’achat et sur la démarche raisonnée du consommateur). En outre, des évolutions socioculturelles et l’avènement de ce que l’on appelle le consommateur

(17)

postmoderne ont changé la donne. Le consommateur, à la fois hédoniste et paradoxal, demande autre chose dans ses actes de consommation : de l’expérience, du sens, de la valeur.

Il est communément admis que le consommateur attribue aux aliments un certain nombre de significations symboliques liées au principe d’incorporation, a fortiori dès lors qu’il s’agit de santé et d’ingrédients fonctionnels (Hubert, 2001; Saher, 2006). Alors que la grande majorité des travaux définissent la « valeur » des aliments fonctionnels comme dépendant essentiellement du produit, des recherches encore minoritaires évoquent, plus ou moins explicitement, l’intérêt d’étudier plus largement les aspects expérientiels de la nutrition-santé et les inférences subjectives que le

consommateur forme à l’égard des aliments fonctionnels. Ces derniers pourraient trouver leur origine dans la quête d’un bien-être global, la valorisation des dimensions hédoniques et émotionnelles ainsi que la recherche de gratifications symboliques à travers la nutrition-santé (Laros et Steenkamp, 2003; Urala et Lähteenmäki, 2007; Krystallis et al., 2008; Niva, 2008).

A deux reprises, Urala et Lähteenmäki (2004, 2007) valident empiriquement le rôle prédictif majeur de la valeur perçue (individual perceived reward). Cette conception de la valeur de CNS se définit ainsi comme « la gratification perçue au niveau individuel reflétant le plaisir personnel » que l’on retire de la consommation des aliments fonctionnels. La problématique de cette recherche doctorale est donc de mettre à jour et d’approfondir les mécanismes en jeu dans la formation de la valeur perçue de CNS, dans le but d’en proposer une validation empirique puis un modèle conceptuel

intégrateur selon une perspective expérientielle. En quoi la valeur perçue peut constituer une clé d’analyse primordiale dans l’explication de l’acceptabilité des aliments fonctionnels ? Apporter des réponses à ces interrogations nous conduit à

inscrire cette recherche dans les théories du courant expérientiel.

Ancrée dans cette problématique, la thèse tentera de répondre aux quatre questions de recherche suivantes :

(18)

Question (1) : Dans quelle mesure la consommation nutrition-santé revêt-elle des aspects expérientiels?

Autrement dit, peut-on considérer les aliments fonctionnels comme des produits expérientiels, c’est à dire, offrant une gratification émotionnelle et hédoniste? Une exploration documentaire expansive permet de tirer profit d’une lecture socio-anthropologique de l’alimentation et des apports théoriques offerts par le paradigme expérientiel. L’approche expérientielle de la valeur perçue permet ainsi d’étudier la subjectivité du consommateur et les ressorts psychologiques auparavant négligés qui peuvent intervenir dans l’expérience de consommation proprement dite, contrairement à la conception traditionnelle centrée sur la logique raisonnée et le processus d’achat.

Question (2) : Quelle valorisation le consommateur retire-t-il de la consommation nutrition-santé ?

Plus précisément, quelles sont les composantes de la valeur que le consommateur retire de l’expérience de CNS? Les recherches sur la consommation nutrition-santé se focalisent essentiellement sur la valeur-utilité apportée par les attributs tangibles et instrumentaux du produit. A l’aide d’une revue de littérature confortée par une étude qualitative conduite auprès de consommateurs réels, la valeur perçue se révèle comme un concept multidimensionnel, étendue à des facettes hédoniques et symboliques, au-delà de l’aspect purement utilitaire.

Question (3) : Quels sont les facteurs d’influence qui participent à la formation de la valeur de consommation dans l’expérience de CNS ?

La question de la formation de la valeur perçue revient à s’interroger sur les déterminants qui peuvent avoir un impact sur la valeur de CNS. Dans cette optique, nous positionnons notre recherche dans la relation personne-objet, puis, grâce à l’étude qualitative, nous identifions les facteurs d’influence liés au produit puis au consommateur qui sont à même d’expliquer les variabilités dans la valorisation de la CNS. Les variables individuelles mobilisées présentent un double intérêt : être spécifiques à la consommation nutrition-santé (conscience santé, auto-efficacité dans la

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CNS) et utilisées fréquemment dans le cadre d’analyse expérientiel (implication, risque perçu).

Question (4) : Des traits de personnalité durables pourraient-ils correspondre à des degrés de valorisation différenciés ?

Pour affiner le portrait du consommateur d’aliments fonctionnels, ce travail doctoral met en exergue le rôle potentiel de caractéristiques de personnalité, encore très peu exploitées, sur le comportement de consommation. Le recours aux variables de désir de contrôle, de conscience de soi, d’attrait pour la nouveauté et de disposition à l’optimisme éclaire ainsi le processus de formation de la valeur à travers une dynamique nouvelle. Notre recherche, empruntant un certain nombre de construits à la psychologie sociale, s’inscrit ainsi dans le cadre d’une meilleure compréhension du comportement santé du consommateur et tente de répondre à la question suivante : y aurait-il une catégorie spécifique de consommateurs d’aliments santé à orientation fonctionnelle ?

En répondant à ces interrogations, cette recherche doctorale aspire à apporter des contributions à la fois d’ordre théorique, méthodologique et managérial.

3. Contributions attendues de la recherche

a) Contributions théoriques

Jusqu’à présent, la démarche cognitiviste et le modèle de traitement de l’information domine largement les recherches en matière de consommation nutrition-santé (CNS) (Poulsen, 1999; Verbeke, 2005; Bech-Larsen et Grunert, 2003; Frewer et al., 2007). Les travaux accordent une place quasi-exclusive aux variables attitudinales dépendant du produit, telles que l’attitude par rapport à la nouveauté, les croyances relatives à la santé, la familiarité du produit ou la fiabilité de l’information. Le dessein majeur de cette recherche sera de montrer que l’approche expérientielle a vocation à offrir un

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plaçant la valeur en tant qu’élément central du processus. Ce recours au concept

de valeur peut être ainsi source de plusieurs enseignements théoriques:

(1) L’intégration de la valeur perçue dans un modèle explicatif du comportement de consommation nutrition-santé pourra faire émerger de nouveaux moteurs du processus, en dehors des variables d’attitudes ou des cognitions.

(2) Le point de vue holiste et global offert par la valeur permettra de mieux saisir

la multidimensionnalité du comportement de consommation, notamment

alimentaire, champ de recherche riche qui nécessite un raisonnement transversal. Une mesure de la valeur perçue sera ainsi proposée et viendra compléter les outils existants dans les recherches antérieures, essentiellement centrées sur la valorisation utilitaire.

(3) L’intérêt est également d’envisager le comportement de consommation de produits tangibles, controversés et non intrinsèquement hédoniques sous une perspective originale : un angle d’entrée par la valeur perçue permettra d’explorer la dimension affective de la CNS, négligée par la grande majorité

des recherches antérieures, et d’appréhender les réactions perceptuelles du consommateur au cœur de la consommation quotidienne.

De surcroît, ce travail a également pour ambition de démontrer les forces qui animent le réseau d’interdépendance entre variables cognitives classiques (attributs du produit, variables individuelles) et traits de personnalité peu étudiés en marketing et dans la consommation nutrition-santé.

b) Contributions méthodologiques

Les contributions d’ordre méthodologique sont attendues au niveau de deux aspects :

(1) L’étude qualitative exploratoire aura pour fonction de « débroussailler » un phénomène encore mal connu de la consommation nutrition-santé. Nous

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tenue d’un journal personnel, des entretiens semi-directifs et un questionnaire en ligne. Cette recherche se proposant de mettre en évidence la facette affective de la CNS, l’originalité du choix méthodologique résidera dans le recours à une étude longitudinale au cœur de l’expérience vécue, à travers le journal de bord

consommateur tenu sur plusieurs jours, dont il est démontré qu’il est particulièrement adapté à une analyse en profondeur, et sur la durée, des sentiments et perceptions personnels.

(2) L’étude quantitative, en prenant ces racines dans la recherche qualitative, va permettre la mise en place d’une échelle multidimensionnelle de la valeur perçue de CNS. Cette mesure cherchera à faire émerger plusieurs facettes de la

valeur et aura pour ambition d’appréhender de manière plus fine les réponses du consommateur aux stimuli associés aux aliments fonctionnels. Enfin, le recours à un site Internet dédié et programmé pour l’enquête, outil restant à développer en recherche marketing, permettra d’atteindre le consommateur effectif au sein de son quotidien.

Soulignons, par ailleurs, que durant les deux études empiriques, le vocable « aliments santé » est systématiquement utilisé en vertu de sa résonance dans l’esprit du consommateur.

c) Contributions managériales

Sur le plan managérial, les réflexions et l’élaboration d’un instrument de mesure de la valorisation des aliments fonctionnels devraient permettre de découvrir de nouveaux leviers concurrentiels dans le but d’un enrichissement du positionnement de l’offre

(Filser, 2002): la grande majorité des consommateurs d’aliments fonctionnels sont, en effet, des individus bien portants qui recherchent avant tout un mieux-être (Bech-Larsen et Scholderer, 2007). Les aliments fonctionnels sont au cœur d’un marché aux frontières floues avec une interconnexion d'activités traditionnellement distinctes, entre nutrition, bien-être, forme et santé. La perspective expérientielle permettrait de capturer cette logique de la demande pour repenser les catégories de consommation et trouver de nouveaux terrains d’expression. Combiner l’argumentation scientifique avec

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les réponses aux aspirations personnelles et immatérielles des individus peut ouvrir de nouvelles stratégies de positionnement et de communication.

Figure 1. Publicité Danone Activia (2005)

« Keep your Inner-self healthy and happy »: Gardez votre

moi intérieur en bonne santé et heureux.

« outer-self » : mon moi extérieur « inner-self » : mon moi intérieur

« Look after your Inner-self » : Prenez soin de votre moi

intérieur

Une autre contribution réside dans les interprétations des effets des variables de personnalité qui devraient permettre de comprendre les motivations profondes des consommateurs. Leur croisement avec les variables psychologiques du consommateur peut donner une image plus nette du profil-type du consommateur d’aliments fonctionnels et serait ainsi à l’origine d’une « segmentation plus fine des consommateurs, qui permettrait d’avoir des actions plus ciblées et sans doute plus

efficaces » (Gurviez, 2007).

4. Démarche et structure de la thèse

Partant de l’ensemble de ces considérations et au regard des questions de recherche, notre raisonnement nous a amené à définir la démarche de la thèse suivante, structurée en deux grandes parties:

(23)

La première partie sera consacrée aux réflexions théoriques et aux études

préliminaires qui ont abouti au développement d’une approche expérientielle de la consommation nutrition-santé. Le premier chapitre présentera les fondements théoriques de la

dimension santé dans le comportement alimentaire, à travers, tout d’abord, un retour sur une approche pluridisciplinaire intégrant un arrière-plan socio-anthropologique, psycho-social et marketing. Cette problématique sera ensuite affinée en interrogeant la spécificité et les précisions conceptuelles concernant la consommation nutrition-santé, une revue de littérature qui permettra de dégager les déterminants du comportement.

Le second chapitre montrera l’intérêt du cadre d’analyse expérientiel dans

l’approfondissement du comportement de CNS, une attention particulière étant accordée à la centralité du concept de valeur perçue et des aspects expérientiels qui émergent du comportement de consommation nutrition-santé. Au cours du troisième chapitre, des perspectives de recherche seront établies et feront le lien entre les

enseignements théoriques des précédents chapitres. Les pistes de recherche concernant les composantes de la valeur perçue de CNS, les coûts perçus, les variables individuelles potentielles et les traits de personnalité seront exposées. Ces pistes seront ensuite étayées par une étude qualitative exploratoire multi-méthodes qui jettera les bases d’un modèle conceptuel préliminaire.

La seconde partie de la thèse explicitera la mise en œuvre et le test d’un modèle explicatif

global. Dans un quatrième chapitre, nous exposerons les hypothèses de recherche

découlant de nos pistes de recherche et décrirons la procédure adoptée pour les deux collectes de données de l’étude empirique. Préalablement au test, le cinquième chapitre décrira la démarche de construction et de validation des échelles de mesure

des variables de la recherche. Enfin, les résultats des tests d’hypothèses seront détaillés dans le sixième chapitre qui conclura ensuite sur la discussion et la mise en

perspective des principaux enseignements des études statistiques.

La démarche de la thèse ainsi que les étapes générales sont schématiquement représentées dans la figure 2 suivante :

(24)

Figure 2. Démarche générale de la thèse

Chapitre 6. Résultats du test des hypothèses et discussions

Chapitre 5. Opérationnalisation des variables de la recherche

Chapitre 4. Hypothèses de recherche et procédure de collecte des données quantitatives

Chapitre 3. Proposition d’une modélisation de la consommation nutrition-santé dans une

perspective expérientielle

Chapitre 2. Théories du marketing expérientiel et valeur perçue : apports pour la CNS

Chapitre 1. L’alimentation santé à orientation fonctionnelle: fondements théoriques PARTIE I.

Cadre de la recherche : vers une

approche expérientielle de la consommation nutrition-santé PARTIE II. Opérationnalisation et test du modèle explicatif global de la valeur perçue de CNS : phase empirique

(25)

Première partie

Cadre de la recherche : vers une approche

expérientielle de la consommation

nutrition-santé

Chapitre I

L’alimentation santé à orientation fonctionnelle :

fondements théoriques

Chapitre II

Théories du marketing expérientiel, valeur de

consommation et apports pour la CNS

Chapitre III

Proposition d’une modélisation de la

consommation nutrition-santé dans une

perspective expérientielle

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Chapitre 1

L’alimentation santé à orientation

fonctionnelle: fondements théoriques

Section 1.

La dimension santé dans la consommation

alimentaire : une approche pluridisciplinaire

Section 2.

La spécificité de la consommation

nutrition-santé : délimitation des frontières du concept

Section 3.

Les déterminants de l’acceptabilité des aliments

santé à orientation fonctionnelle : état des

recherches

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CHAPITRE 1.

L’ALIMENTATIONSANTEAORIENTATIONFONCTIONNELLE:FONDEMENTS

THEORIQUES

Introduction au chapitre 1

La place que les hommes accordent à la santé dans leur alimentation n’est pas une question nouvelle dans l’histoire humaine. Comme le rappellent Apfelbaum et al. (2009), « la diététique est aussi ancienne que l’espèce humaine » et constitue donc par nature une problématique de l’anthropologie. Historiquement, la santé et l’alimentation sont donc deux concepts indissociables dans l’esprit du consommateur-mangeur, cette imbrication prenant une acuité nouvelle en cette période de modernité alimentaire. S’interroger sur la valeur perçue de la consommation nutrition-santé (CNS) nécessite de remonter, en tout premier lieu, aux sources de la dimension santé dans l’alimentation et ses diverses facettes. Comme le rappelle Filser (2006), « la consommation alimentaire est en effet influencée par des contraintes psychologiques, sociologiques et même anthropologiques extrêmement puissantes, en raison du statut symbolique si spécifique de l'alimentation par rapport aux autres domaines de consommation […] L'alimentation est un comportement très chargé symboliquement».

Dans la lignée de cet auteur, il nous paraît important d’installer préalablement la toile de fond de notre raisonnement au regard des écrits dans le domaine des sciences humaines et sociales (première section). Par la suite, au cours de la deuxième section, nous

préciserons nos propos à travers le recentrage sur la spécificité de la consommation nutrition-santé : clarification du concept d’aliments santé qui sera retenu dans cette

recherche, positionnement au sein de l’univers santé et aspects scientifiques autour du concept de consommation nutrition-santé. Enfin, la troisième section aura pour objectif de dresser un panorama des déterminants qui, selon les recherches les plus citées, influencent l’acceptabilité des aliments fonctionnels.

(28)

Section 1. La dimension santé dans la consommation alimentaire : une

approche pluridisciplinaire en sciences humaines et sociales

Comment les sciences sociales ont théorisé le lien entre alimentation et santé ainsi que la place de la santé dans l’alimentation ? C’est pour tenter de répondre à cette question que nous entreprenons une lecture croisée de trois approches disciplinaires qui prévalent dans ce domaine de l’alimentation: en socio-anthropologie (§1), en psychologie de la santé (§2) et en science marketing (§3).

1. L’approche en socio-anthropologie de l’alimentation

Les pratiques alimentaires à but thérapeutique (préventif ou curatif) ont été nombreuses et ont varié selon les époques, les civilisations et les sociétés: du régime des « proportions judicieuses » d’Hippocrate (Lahlou, 1999), des combinaisons d’aliments favorables prônées par la diététique ayurvédique (Verbois, 2009), du végétarisme et des restrictions alimentaires purifiantes et fortifiantes dans la Grèce antique (Haussleiter, 1935), du régime de santé gastronomique de la Renaissance Italienne2 (Flandrin, 2003a), de l’arbitrage entre aliments chauds ou froids pour la régulation des humeurs dans la diététique persane (Ferreira et Emamjomeh, 20123), à la quête d’équilibre nutritif entre le yin et le yang de la diététique zen (Flandrin, 2003b), etc.… Les exemples foisonnent et sont riches d’enseignements sur les savoirs diététiques profanes et scientifiques qui ont été accumulés au fil du temps.

Par définition, le concept de santé dans le régime alimentaire n’est donc pas universel et constitue un phénomène culturellement construit (Shatenstein et Ghadirian, 1998), variable selon les cycles temporels, les lieux, les contextes socioculturels et les conditions biologiques. C’est en raison de l’ampleur de ce phénomène que nous

2 Au XVè siècle, le Regimen sanitatis préconisé par le médecin Magninus de Milan considérait que le plaisir

gustatif devait être partie prenante de la diététique car cela démontre l’adéquation entre la nourriture et le tempérament du mangeur, en améliorant la digestion.

(29)

délimiterons nos réflexions à une lecture socio-anthropologique de la dimension santé essentiellement canalisée sur les sociétés occidentales4.

Trois entrées privilégiées définies par Poulain et Corbeau (2002) nous semblent pertinentes pour aborder la dimension santé dans une perspective socio-anthropologique dans les sociétés occidentales contemporaines : (1) les pratiques alimentaires et les images du corps, (2) la superposition de la pensée imaginaire et de la pensée rationnelle, et (3) la place de la dimension santé dans la décision alimentaire. Les travaux de ces auteurs vont nous servir de canevas pour une approche socio-anthropologique de la santé-nutrition dans les sociétés occidentales. A travers ces questionnements, nous replacerons également la dimension santé au sein des trois principales approches de l’anthropologie de l’alimentation que sont le statut d’omnivore de l’être humain, le principe d’incorporation et la pensée classificatoire (cf. encadré 1)5.

Encadré 1. Les trois problématiques-clés de notre rapport à l’alimentation

- Le statut d’omnivore : l’être humain, pour survivre, est obligé de faire varier son alimentation. De ce principe, découle un paradoxe : l’omnivore peut jouir de la variété des sources de nourriture plus abondante, mais cet éventail d’alternatives ouvre un plus grand nombre de probabilités de risques quant aux conséquences potentiellement négatives de son choix.

- Le principe d’incorporation : manger constitue un acte d’ingestion de la nourriture, l’action de mettre une entité étrangère à l’intérieur de son corps. Par la voie de l’assimilation, la nourriture transforme donc le mangeur en transférant à celui-ci ses attributs concrets ou imaginaires.

- La pensée classificatoire : l’omnivore, face aux choix alimentaires qui s’offrent à lui, procède à des catégorisations qui l’aideront dans son processus de décision (comestible/non comestible). Cette structure lui sert ensuite de grille pour évaluer les caractéristiques de ces choix et ordonner la classification des aliments et des situations qui y sont associées.

Source : Fischler (1993)

4 Kuhnlein et Receveur (1996) étudient cependant les travaux de plusieurs scientifiques où il est attesté que

la modernité alimentaire, au sens des pays développés occidentaux, tend à se généraliser, même dans les groupes ethniques les plus isolés. A titre d’exemple, la transition vers la sédentarité d’une communauté de Bushmen au Kalahari (les Kung) a entraîné un bouleversement du modèle alimentaire ancien et des conséquences nouvelles sur la santé telles que l’anémie, des carences vitaminiques diverses et des déficiences hépatiques. Un grand nombre de travaux en anthropologie (cités par Kuhnlein et Receveur) témoignent également de cette expansion de modèles alimentaires de type occidental vers la structure nutritionnelle des sociétés traditionnelles telles que les Masai, les Inuits ou les Tarahumara au nord du Mexique.

5 Nous choisissons de ne pas aborder les grands courants classiques de la socio-anthropologie de

l’alimentation comme le courant maussien, le paradigme durkheimien, l’approche structuraliste ou le fonctionnalisme. Nous invitons ainsi le lecteur à consulter les documents concernés qui sont spécialisés

(30)

1.1. La prévalence de la dimension santé dans la modernité alimentaire

La prévalence de la santé est une des facettes emblématiques de ce que l’on appelle la modernité alimentaire, caractérisée notamment par l’apparition d’une nouvelle norme : la centralité de la notion de nutrition, l’alimentation asservie au maintien d’une bonne santé, dans une société de mangeurs individualistes, réflexifs et tournées vers la rationalisation de leur alimentation. Corbeau (2002) résume cette centralité du dogme nutritionnel et la « réflexivité de la relation à l’alimentation » par cette question : « Que manger et comment manger pour être en bonne santé ?». Nous exposerons dans les paragraphes qui suivent les répercussions et les manifestations de cette injonction devenue obsédante : la santé devenue valeur centrale de l’alimentation (§1.1.1), le changement du rapport au corps vécu par le mangeur (§1.1.2) et les relations entre

la notion d’efficacité sociale et l’image du corps (§1.1.3).

1.1.1. La santé devenue « valeur contemporaine fondamentale »

La santé dans l’alimentation devient ainsi la pierre angulaire de tout un système de pensées et de pratiques alimentaires, structurées autour d’une normalisation nutritionnelle qui doit s’imposer au mangeur, entendu comme désormais au fait des

connaissances scientifiques. C’est à la sphère scientifique qu’il appartient de déterminer les besoins biologiques de l’individu en fonction de son âge, de son sexe ou de son état de santé (Kuhnlein et Receveur 1996). La médicalisation de l’alimentation, maintes fois pointée du doigt par les chercheurs de toute discipline (e.g, Chadwick, 2003 ; Davies, 2001 ; Poulain, 2001) est le corollaire de la primauté de la dimension santé et se manifeste par une individualisation des modèles alimentaires qui exhorte les individus à un certain dogmatisme alimentaire.

Poulain (2001) souligne le paradoxe existant entre la sortie de la sphère du religieux et l’instauration de la médecine et de la science en tant que nouvelles autorité suprêmes

(31)

religiosité est perceptible dans la désacralisation du corps humain (Saliba, 1999 ; Shilling, 1993), comme en témoigne la rationalisation prônée par la tradition positiviste biomédicale. Aggleton (1990, p.13) rappelle à ce sujet, les dangers de cette vision mécaniste qui appréhende le corps humain comme «un ensemble de parties anatomiques […] et de systèmes physiologiques», qui peut se fragmenter selon ses composantes, dissociant de cette manière le corps physique de la personne, sans considérer l’être humain comme une entité à part entière. Le Breton (2008) oppose, en ce sens, (i) la perspective de « l’homme anatomisé et du corps machine», que la modernité a totalement placé sous le contrôle de la science « centrée sur les causes organiques », (ii) à la vision du « corps sujet », où le corps est « l’enceinte du sujet, le lieu de sa limite et de sa liberté, l’objet privilégié d’un façonnement et d’une volonté de maîtrise ».

1.1.2. Le changement du rapport au corps

Pour les socio-anthropologues, le rapport avec le corps est traditionnellement d’ordre instrumental, l’objectif du mangeur étant essentiellement de nourrir son corps pour le rendre plus fort, lui apporter des nutriments pour assurer sa survie et son bon fonctionnement (Boltanski, 1971). Cependant, dans une époque d’abondance alimentaire, la primauté de la santé et de la nutrition s’est traduite par un glissement du rapport au corps vers une perspective réflexive (Poulain, 2001 ; Ostberg, 2003):

d’un rapport instrumental, la relation est devenue analytique, le corps est considéré d’un point de vue extérieur, une distanciation qui favorise la capacité d’écoute de ses signaux internes et de son état d’équilibre. Pour Lupton (1996), cette relation au corps pose ce dernier comme un objet « façonnable », propice aux changements et, en offrant les moyens de maîtriser sa santé, permet de maîtriser sa vie. Duboys de Labarre (2001) remarque qu’une différenciation par genre est à observer et que « le rapport au corps des femmes se distinguerait de celui des hommes par l'activité réflexive plus intense qu'elles y investissent ».

(32)

Parallèlement, l’on constate que cette attention accrue envers la santé s’est aussi accompagnée d’une peur pour la santé ; le mangeur réflexif, parce qu’il est omnivore, est placé devant la nécessité, génératrice d’anxiété, de choisir entre une offre pléthorique d’aliments de plus en plus variés, dans un contexte où il a à déplorer les retombées psychologiques de crises sanitaires hypermédiatisées et où les experts scientifiques multiplient les injonctions au « bien manger » (OCHA/Congrilait, 2002 ; Régnier et al., 2009; De Labarre et Blackler, 2001 ; Pichon, 2003). Selon les propos de la socio-anthropologue Annie Hubert (1991), « l’homme demeure un être inquiet face à sa nourriture car il se sent responsable de ce qu’il ingère et des conséquences qui en découle », cette inquiétude étant intensifiée en période d’hyperchoix, de « cacophonie alimentaire » et de multiplication de discours médicaux, politiques, sociaux contradictoires (Fischler, 1990). Cette prise de responsabilité et cette anxiété incitent le mangeur à développer des stratégies personnelles de gestion de sa santé (Eglem, 2010), « des pratiques de perpétuation » et d’entretien du corps qui marquent sa volonté d’être acteur de sa propre santé (Berthelot, 1983).

1.1.3. Images du corps et efficacité sociale

Corbeau (2002) qualifie « d’efficacité sociale », le comportement et les attitudes des individus tournés vers la démonstration de signes de performance, de réussite et de qualités socialement valorisées. Le corps se donne ainsi à voir comme la vitrine de cette performance et de cette efficacité sociale. Selon Hubert (2011), «dans l’imaginaire profane, l’amalgame fut vite fait entre standards de santé et standards de beauté. Les deux notions se mélangent. Un être sain est par définition beau, et jeune de préférence ». Cet affichage éclatant d’une bonne santé a ainsi pour vocation d’éloigner la vision d’un corps périssable et la « fragilité de la condition humaine » (Le Breton, 2008).

Des règles esthétiques de minceur et de forme sont érigées en conséquence, exacerbant les catégorisations et les jugements de type binaire envers les aliments (bon/mauvais, gras/léger), ainsi que l’aversion envers certains nutriments (lipophobie,

(33)

saccharophobie)6. Selon Lupton (1996), ce diktat esthétique prend

symboliquement la forme de jugements de moralité portés sur l’apparence corporelle des mangeurs : la minceur est érigée en tant que vertu, témoignant de la

capacité de l’individu à réussir, à contrôler son corps et donc sa vie, une image de succès conforme à la représentation collective de l’idée d’accomplissement de soi. Le surpoids, à l’opposé, est stigmatisé, il trahit le laisser-aller, l’impureté physique et morale incarnée par les déviances alimentaires (Rozin, 1999 ; Stein et Nemeroff, 19957). Le comportement de condamnation et de rejet du gras à notre époque contemporaine est d’ailleurs le reflet des pratiques ascétiques et du désir de purification qui existaient dans les sociétés traditionnelles (Ascher, 2005).

Deux caractéristiques sont donc à distinguer dans ce domaine : l’aspect extérieur d’une image physique valorisante et l’idée d’une pureté corporelle intérieure. Le

sociologue Duboys de Labarre (2001) souligne que, dans le monde antique, ce souci de l’image corporelle extérieure correspondait à « une préparation du rôle de citoyen et avait pour horizon un idéal culturel et politique ». Par ailleurs, selon Reischer et Koo (2004), la représentation de la beauté physique, du corps esthétiquement valorisé met en exergue sa fonction d’ « icône des valeurs sociales, et, de manière moins anodine, un mécanisme de pouvoir et de contrôle ». Le corps pur, quant à lui, est l’idéal désiré et prend plusieurs acceptations. Douglas (1998) décrit la pureté matérielle, dans les cultures européennes, comme « l'absence de corps étrangers, ou l'exclusion d'un élément nuisible ». Pour Ouédraogo (1998a), sur le plan alimentaire, un corps pur est celui qui est nettoyé, assaini par « la nourriture pure », c’est à dire, les aliments les plus naturels et les moins altérés ou des herbes et des plantes médicinales dépuratives (Garreta, 1998), deux principes à l’origine du végétarisme et de la phytothérapie. Selon Apfelbaum et al. (2009), le mangeur contemporain se retrouve ainsi tiraillé entre deux désirs : manger des aliments naturels, au plus près de leur forme originelle et manger des aliments « modernes », mis à disposition par la technologie et qui répondent aux besoins de l’homme moderne.

6Cette catégorisation de type binaire se fonde sur l’approche structuraliste traditionnelle initiée par

(34)

Tableau 1. Les quatre principales métaphores du corps dans le rapport du mangeur à son alimentation (OCHA 2002)

Le corps vu

comme… Définition de la métaphore choix % de

Un arbre

Métaphore naturaliste : le corps est «un arbre, qui se nourrit en plongeant ses racines dans le sol, et qui a besoin d’eau, de soleil et de soins» - « renvoie à la nature mais aussi à l’enracinement dans un terroir et une culture et à un équilibre entre l’homme et son environnement ».

42%

Une usine

Métaphore mécanique : le corps est un ensemble de « transformations, stockages, circulations et flux divers » qui implique la gestion optimale de toutes les fonctions et de la consommation de l’énergie - « conception fonctionnelle et plus problématique de l’alimentation ».

21%

Un temple

Métaphore morale et religieuse : le corps est « vu comme un sanctuaire ou un don de Dieu », objet de rituels dédiés, qui lui confèrent donc une valeur sacrée, à protéger des tabous et des interdits - « conception morale du rapport au corps et à l’alimentation ».

15%

Une voiture Métaphore mécanique : les aliments sont considérés comme le « carburant » du corps, qui doit être nourri, réparé et entretenu, qui est

également objet de dysfonctionnements et de révisions. 10%

Source : enquête OCHA sur cinq pays européens (Suisse, Allemagne, Italie, France, Royaume-Uni) et les Etats-Unis.8

1.2. La superposition de la pensée imaginaire et de la pensée rationnelle

Corbeau (2002), en s’inspirant de Claude Javeau (1986), distingue deux niveaux de pensée qui structurent le raisonnement alimentaire : d’un côté (i) la pensée rationnelle associée à la facette matérielle , autrement dit, le raisonnement alimentaire sous son

aspect conscient, ce qui est « donné », et qui se rattache à la réalité scientifique et à l’information objective; de l’autre côté, (ii) la pensée imaginaire qui a trait à la facette mentale, c'est-à-dire « le pensé (la religion, l’idéologie, l’interprétation des

symboles, etc.) et l’impensé (les rêves, les mythes, les fantasmes collectifs, etc.) » attachés à l’imaginaire social caractérisé par l’irrationnel. La dimension santé dans le

Figure

Figure 1. Publicité Danone Activia (2005)
Figure 2. Démarche générale de la thèse
Tableau 1. Les quatre principales métaphores du corps dans le rapport du mangeur à son  alimentation (OCHA 2002)
Figure 4. Structure simplifiée du modèle Protection Motivation Theory
+7

Références

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