• Aucun résultat trouvé

Nutrition minérale de la canneberge au Québec

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "Nutrition minérale de la canneberge au Québec"

Copied!
48
0
0

Texte intégral

(1)

   

Nutrition minérale de la canneberge au Québec

Mémoire

   

Chedzer-Clarc Clément

 

Maîtrise en sols et environnement

Maître ès sciences (M. Sc.)

 

Québec, Canada

(2)

 

 

Nutrition minérale de la canneberge au Québec

Mémoire

Chedzer-Clarc Clément

           

Sous la direction de : 

 

Léon‐Étienne Parent, directeur de recherche 

(3)

Résumé

Les recommandations d’engrais dans la production de canneberge sont guidées par les analyses foliaires et de sols. Cependant, les intervalles critiques de concentrations utilisés à des fins de diagnostic sont biaisés par les interactions entre les éléments nutritifs et l’âge physiologique de la plante. L’utilisation des ratios logarithmiques isométriques (ilr) pour l’analyse des données compositionnelles peut éviter les biais relatifs aux interactions. L’objectif de ce mémoire est de développer des normes nutritives foliaires non biaisées pour la canneberge à haut rendement au Québec en utilisant la méthode des balances nutritives (ilr).

Des essais de fertilisation ont été conduits pendant deux années consécutives avec des traitements variés de N, P, K, Mg, Cu, B sur quatre sites de production de canneberge dans la région Centre-du-Québec. Les tissus foliaires ont été analysés pour leur concentration en N, P, K, Mg, Ca, B, Cu, Mn, Fe et Zn. Les données ont été jumelées aux données des analyses foliaires de six essais de P réalisés par Marchand et al. (2013) entre 2001 et 2003 dans la même région et sur le même cultivar « Stevens ». Les résultats des analyses foliaires ont été transformés en balances nutritives entre composantes ou groupes de composantes, puis partitionnés selon la procédure Cate-Nelson et des arbres de classification.

Des intervalles de balances nutritives de référence, ainsi que des intervalles de concentration en soutien, ont été calculés pour la canneberge à haut rendement (> 35 Mg ha-1). Les spécimens à faible rendement ont montré des concentrations en K et en

Mg plus faibles, ce qui peut expliquer le déséquilibre des balances [Ca |Mg] et [K |Ca, Mg] par rapport aux spécimens à haut rendement. Comparés aux intervalles de concentration retenus dans la littérature, ceux de cette étude sont plus restreints partiellement en raison de l’exclusion des cas de consommation de luxe et de contamination nutritive par cette méthode de calcul. Les intervalles de concentration de N et K sont les plus fiables, étant donné que les fertilisations N et K sont les seules auxquelles la culture a répondu de façon significative (P < 0.05). Pour tous les autres éléments, les intervalles caractérisent de bons rendements sans forcément être des valeurs critiques, étant le résultat des conditions de sol et de la gestion générale de la fertilisation.

(4)

Tables des Matières

RESUME ... III 

TABLES DES MATIERES ... IV 

LISTE DES TABLEAUX ... V 

LISTE DES FIGURES ... VI 

REMERCIEMENTS ... VII 

INTRODUCTION ... 1 

CHAPITRE 1 : REVUE DE LITTERATURE ... 4 

1.1.-LA CANNEBERGE ... 4 

1.2.-FERTILISATION ET ANALYSES FOLIAIRES DE LA CANNEBERGE ... 5 

1.2.1.-Période d’échantillonnage foliaire ... 5 

1.2.2.-Parties du plant visées par l’analyse foliaire ... 6 

1.2.3.-Concentration foliaire critique en éléments nutritifs ... 7 

1.2.4.-Recommandations en éléments fertilisants ... 7 

1.3.-APPROCHE COMPOSITIONNELLE OU CONCEPT DES BALANCES ... 9 

1.3.2.-Principes de l’analyse compositionnelle ... 10 

1.3.3.-Transformations des données compositionnelles : les ratios logarithmiques (logs ratios) .. 11 

CHAPITRE 2 : HYPOTHESES ET OBJECTIFS ... 13 

2.1.-HYPOTHESE ... 13 

2.2.-OBJECTIFS ... 13 

CHAPITRE 3 : MÉTHODOLOGIE ... 14 

3.1.-ENSEMBLE DE DONNÉES ... 14 

3.2.-SITES EXPÉRIMENTAUX ... 14 

3.3.-STRUCTURE DES TRAITEMENTS ET DISPOSITIF EXPÉRIMENTAL ... 14 

3.4.-ANALYSES DE SOLS ET FOLIAIRES ... 17 

3.5.-RÉCOLTE ... 17 

3.6.-EXPÉRIENCE ANTÉRIEURE :MARCHAND ET AL.(2013) ... 17 

3.7.-ANALYSE DES DONNÉES ... 18 

3.7.1.-Définition des balances nutritives ... 18 

3.7.2.-Transformation des données foliaires en log ratio isométriques (ilr)... 18 

3.7.3.-Partition de Cate-Nelson ... 19 

3.7.4.-Interprétation du test de diagnostic ... 20 

3.7.5.-Apprentissage automatique ... 21 

CHAPITRE 4 : RÉSULTATS ET DISCUSSIONS ... 22 

4.1.-PROPRIÉTÉS DES SOLS ET PRODUCTIVITÉ ... 22 

4.2.-DIAGNOSTIC FOLIAIRE... 23 

4.2.1.-Partition de Cate-Nelson ... 23 

4.2.2.-Intervalles de suffisance nutritive ... 25 

4.2.3.-Comparaison entre TN et TP ... 30 

CONCLUSION ... 35 

(5)

Liste des tableaux

Tableau 1: Intervalles de suffisance nutritive des tissus de canneberge ... 7  Tableau 2: Recommandations en azote, phosphore et potassium au Québec (Parent et Gagné, 2010) ... 8  Tableau 3: Structure des traitements de l'expérience ... 15  Tableau 4: Calendrier d'application des engrais ... 16  Tableau 5: Contrastes logarithmiques et partition séquentielle binaire des analyses foliaires de la canneberge ... 18  Tableau 6. Propriétés des sols des sites de canneberge en Mai 2014 (Mai 2001 pour les sites de Marchand et al., 2013)... 22  Tableau 7. Intervalles de confiance (P < 0,01) des balances (ilr) pour les vrais négatifs (TN) .. 25  Tableau 8. Intervalles de suffisance nutritive des tissus de canneberge ... 28 

(6)

Liste des figures

Figure 1.- Contenus saisonniers en azote et en potassium dans les tissus de canneberge au Massachussetts (DeMoranville, 1992) ... 6  Figure 2. Disposition des parcelles expérimentales : cas d'un site. ... 16  Figure 3. Partition de Cate-Nelson entre la distance de Mahalanobis et le rendement en fruits de la canneberge. ... 24  Figure 4. Arbre de Classification des rendements élevés (HY) et bas (LY) au niveau de 35 Mg ha-1. ... 31 

 

(7)

Remerciements

Je tiens à remercier mon directeur de recherche, Mr Léon-Étienne Parent, professeur au département des sols et génie agroalimentaire, pour son temps et sa patience, et de m’avoir fourni toute l’aide nécessaire pour mener à bien ce projet.

Mes remerciements vont aussi à Serge-Étienne Parent qui m’a beaucoup aidé dans les analyses statistiques, et à Reza Jamaly qui a été mon collègue de travail tout au long du projet.

Je témoigne aussi une particulière gratitude au Dr Lotfi Khiari et au Dr. Antoine Karam. Qu'ils trouvent ici l'expression de mes remerciements les plus sincères.

Ce projet a reçu un appui financier du Conseil de Recherche en Sciences Naturelles et en Génie du Canada (CRDPJ 385199 09) et des partenaires industriels suivants : Atocas de l’érable Inc., Atocas Blandford et la Cannebergière.

À tous ceux qui, d’une manière ou d’une autre, m’ont apporté une aide dans la réalisation de ce travail : Je vous dis un grand merci.

(8)

Introduction

La canneberge (Vaccinium macrocarpon Ait.) est une éricacée sauvage domestiquée en Amérique du Nord à partir du XIXe siècle. Elle est depuis cultivée pour la production et

la qualité de ses fruits (Roper et Vorsa, 1997). Le petit fuit rouge, sec ou transformé, est très apprécié pour sa teneur élevée en antioxydant. Le Québec est le second producteur mondial de canneberge après l’État du Wisconsin aux États-Unis. La canneberge est cultivée sur des sols acides sableux ou organiques dans des bassins de 1 à 2 ha endigués pour faciliter la gestion de l’eau. Un ponçage régulier de la surface du support et l’élagage des cultures permettent de maintenir le rendement de la canneberge en limitant une fructification biennale (Roper, 2006).

Malgré sa récente domestication, la nutrition de la canneberge est plus proche de celle des espèces fruitières domestiques que celle des espèces fruitières sauvages (Parent et al., 2013). La canneberge est sensible à l’ajout d’éléments nutritifs. Elle l’est beaucoup plus à l’ajout d’azote que de phosphore (Parent et Marchand, 2006). L’ajout d’éléments nutritifs est guidé par les analyses de sols et foliaires (Yarborough et al., 1993 ; Marchand et al., 2013). Un diagnostic nutritif des tissus des plantes doit être conduit de façon à intégrer tous les facteurs d’interaction, et par conséquent, doit refléter à la fois les facteurs génétiques et environnementaux (Munson et Nelson, 1990). Selon la loi de l’optimum de Liebscher (De Wit, 1992), l’effet d’un élément nutritif sur le rendement d’une culture dépend de la proximité des autres éléments de leur optimum. L’hypothèse derrière l’interprétation des analyses de plantes est qu’une courbe de réponse nette peut être dérivée de la relation entre le rendement et la concentration des tissus en un élément nutritif où tous les autres éléments sont maintenus dans leurs plages optimales de concentration pour éviter de modifier l’effet de l’élément nutritif cible sur le rendement par un effet nuisible d’un autre élément nutritif (Ulrich et Hills, 1967). Une concentration critique est généralement interpolée là où la croissance des plantes diminue de 5-10%.

Comme toutes les autres données compositionnelles (Aitchison, 1986), les analyses foliaires sont des données strictement positives et intrinsèquement multivariées. Elles font partie d’un simplex compositionnel dont les composantes expriment une information relative à l’unité ou à l’échelle de mesure telle que le g kg-1 ou le

(9)

pourcentage, et sont généralement exprimées sur la base de matière fraîche ou de matière sèche (Jones et al., 1990) ou sur une autre base comme l’azote (Ingestad, 1987). Bien avant qu’Aitchison (1986) ait développé, pour des raisons mathématiques et géométriques, le concept de « l’espace clos » derrière l’analyse des données compositionnelles, Lagatu et Maume (1934), les fondateurs des analyses et diagnostics foliaires, intégrèrent dans une relation le N-P-K dans les feuilles de pomme de terre en utilisant un diagramme ternaire. Des concepts d’interprétation ultérieurs tels que les seuils ou les plages de concentration critique (Macy, 1936 ; Ulrich, 1952) et les ratios binaires conçus pour refléter des interactions importantes entre les éléments (Redfield, 1936 ; Beaufils, 1973) ont ignoré le problème de « l’espace clos » conduisant ainsi à des distorsions à l’étape du diagnostic (Parent et Dafir, 1992 ; Parent et al., 2012). En plus des biais méthodologiques liés aux analyses des données compositionnelles tels que la redondance, l’incohérence de sous-composition et la distribution non normale, la délimitation des intervalles d’éléments nutritifs par des moyennes graphiques (Ulrich et Hills, 1967) ou des intervalles de confiance (Beaufils, 1973) est assujettie à des cas de concentrations sous-optimales, de consommation de luxe et de contamination (Parent et al., 2012).

Les diagrammes de performance des cultures en fonction des indices nutritifs peuvent être partitionnés en quadrants suivant la procédure de Cate-Nelson afin d’isoler les vrais négatifs (true negative) et d’en déduire les normes nutritives associées (Parent et al., 2012). Les ratios logarithmiques, notamment le ratio logarithmique centré (centered log ratio) (Aitchison, 1986 ; Parent et Dafir, 1992) et le ratio logarithmique isométrique (isometric log ratio) (Egozcue et al., 2003 ; Parent, 2011), sont des techniques d’analyse compositionnelle très utiles ayant déjà été utilisées dans le diagnostic nutritif des tissus des plantes. La transformation logarithmique ordinaire et le ratio logarithmique centré donnent exactement les mêmes résultats de l'analyse statistique si et seulement si les moyennes géométriques des compositions testées sont les mêmes (Lovell et al., 2011). Cependant, les moyennes géométriques diffèrent à cause de l’hypothèse ceteris paribus (tous les autres facteurs autres que ceux étudiés sont égaux) qui est rarement applicable en raison de la redondance des données à l’intérieur de l’espace clos compositionnel (Aitchison, 1986) ou à la suite d’interactions entre les éléments nutritifs (Bates, 1971) qui contribuent aussi à la redondance des données (toute variation dans la concentration d’un élément modifie celle d’un ou de plusieurs autres éléments).

(10)

Il est donc devenu impératif d’utiliser des méthodes appropriées pour analyser les données des analyses foliaires en vue d’un diagnostic nutritif non biaisé. L’approche des ilr est la plus appropriée pour décrire des modèles naturels et les balances nutritives dans les tissus des plantes (Parent, 2011). C’est dans ce contexte que s’inscrit ce travail de recherche orienté vers un diagnostic nutritif non biaisé des tissus de canneberge en utilisant la technique du ratio logarithmique isométrique afin d’établir des normes nutritives foliaires caractéristiques de haut rendement.

(11)

Chapitre 1 : Revue de littérature 1.1.-La canneberge

La canneberge appartient à la famille des Ericacées, qui colonisent en général les sols très acides et mal pourvus en éléments nutritifs. En plus d’être peu exigeante en éléments nutritifs, la canneberge vit en association avec un champignon mycorhizien endophyte (Bajwa et Read, 1986 ; Stribley et Read, 1974). Cette symbiose améliore son approvisionnement en éléments minéraux.

Le pH d’un sol sous culture de canneberge doit se situer entre 4,0 et 5,5 (Eck, 1990). Cette fourchette de pH assure à la canneberge un approvisionnement en azote ammoniacal, la forme d’azote que la canneberge préfère (Barak et al., 1996 ; Greidanus et al., 1972 ; Rosen et al., 1990).

L’azote ammoniacal provenant de la matière organique ou des engrais peut se transformer sous la forme nitrique par le processus de nitrification (Alexander, 1980). La canneberge utilise très mal le nitrate. Vu que dans les conditions d’aérobie et d’acidité dans lesquelles elle évolue, l’azote ammoniacal est la forme d’azote minéral qui prédomine. En plus, le nitrate peut être lessivé dans le sol ou converti sous des formes gazeuses comme N2 et N2O. C’est une réaction d’oxydation qui se fait par

catalyse enzymatique reliée à des bactéries nitrifiantes (nitrosomonas et nitrobacter) (Schmidt, 1982). La nitrification peut être évitée par la gestion du pH afin de limiter l’activité des bactéries nitrifiantes (Foy, 1984). Ces bactéries sont sensibles aux conditions du milieu dans lesquelles elles vivent. Leur croissance ainsi que les enzymes qu’elles produisent à chaque séquence du processus de nitrification subissent l’influence des facteurs du milieu. Parmi les facteurs d’influence, le pH est un facteur capital qui affecte la nitrification (Alexander, 1980 ; Paul et Clark, 1989).

Le pH optimal favorisant la nitrification varie entre 6.6 et 8 (Paul et Clark, 1989). Dans les sols sableux ou les sols de canneberge (M. O<5%), il est recommandé de maintenir un pHeau entre 4 et 5. Si le sol contient plus de 5 % de matière organique, un pHeau

(12)

1.2

.-

Fertilisation et analyses foliaires de la canneberge

Les plants de canneberge nécessitent l’apport d’éléments nutritifs pour assurer une bonne croissance végétative et une production élevée de fruits. Quand ces éléments se trouvent en quantité insuffisante, la croissance ainsi que le rendement peuvent être affectés. Des éléments fertilisants comme l’azote, le phosphore et le potassium sont apportés aux plants de canneberge pour suppléer les quantités déjà disponibles dans le sol. Les analyses foliaires permettent d’évaluer l’adéquation entre les éléments minéraux prélevés par la plante et ses besoins nutritifs. Les résultats de ces analyses aident à diagnostiquer d’éventuels problèmes de nutrition de la plante, à prévoir les besoins en éléments fertilisants pour l’année suivante et à ajuster un programme de fertilisation d’une plante pérenne comme la canneberge (Davenport et al., 1995).

Des recherches ont montré des relations entre la fertilisation et la concentration des éléments dans les tissus de canneberge. Ainsi, la concentration en azote dans les tissus augmente avec l’augmentation de la fertilisation azotée dans la culture de la canneberge (Davenport et Provost, 1994 ; Eaton, 1971 ; Eaton et Meehan, 1973; Eck, 1971). Il n’y a pas que la concentration en azote qui augmente avec l’application de fertilisant azoté, la concentration du P et du K augmente aussi pendant que celle du Fe diminue (Davenport et Prevost, 1994). Parent et Marchand (2006) ont trouvé une augmentation linéaire de la concentration de P dans les tissus suite à l’ajout de P dans les sols ayant un ratio molaire P/(Al+Fe) MIII compris entre 0,024 à 0,044.

1.2.1.-Période d’échantillonnage foliaire

Lors du prélèvement des échantillons foliaires, les feuilles et la tige ne sont pas séparées. Les analyses foliaires incluent donc la tige et les feuilles. Des changements importants dans la concentration en certains éléments sont observés durant la période de croissance active (mai à août) comme illustré à la figure 1. Les concentrations en N et K dans les tissus varient rapidement durant la saison de croissance, soit de mai à août, pour atteindre un niveau constant entre mi-août et mi-septembre (fig.1). Il est préférable de prélever les échantillons lorsque les éléments nutritifs contenus dans les tissus sont stabilisés (Davenport et al., 1995). L’échantillonnage doit être effectué quand la concentration des éléments nutritifs dans les tissus est stable (Davenport et al., 1995). La figure 1 illustre le risque émanant de la collecte des tissus tard en septembre. La

(13)

concentration en azote diminue aussitôt que la plante entre dans la période de dormance. Ainsi, les échantillons prélevés durant cette période ne permettent pas d’avoir une image précise du statut nutritionnel de la plante (Davenport et al., 1995). L’échantillonnage doit donc être effectué quand la concentration des éléments nutritifs dans les tissus est stable (Davenport et al., 1995).

Figure 1.- Contenus saisonniers en azote et en potassium dans les tissus de canneberge au Massachussetts (DeMoranville, 1992)

1.2.2.-Parties du plant visées par l’analyse foliaire

Une plante de canneberge est composée d’une tige verticale et d’un stolon. Le stolon est la partie reproductive de la plante qui s’enracine dans le sol afin de former de nouvelles tiges verticales. Quant aux tiges verticales, ce sont elles qui portent les fruits. Toutes les tiges verticales ne forment pas de fruits durant la même année. Dans un champ de canneberges, on distingue donc des tiges fructifères (celles qui vont former des fruits durant l’année en cours) et des tiges non-fructifères (celles qui formeront des fruits durant l’année suivante). Une analyse foliaire, pour être adéquate, doit être réalisée sur des échantillons composés d’un mélange de tiges fructifères et de tiges non-fructifères. Il est recommandé de recueillir 10 sous-échantillons de 20 tiges chacun en dix endroits représentatifs de la parcelle pour former un échantillon composite de 200 tiges verticales (Davenport et al., 1995).

(14)

1.2.3.-Concentration foliaire critique en éléments nutritifs

La majorité des résultats de recherche sur la canneberge proposent des normes foliaires établies pour chaque élément minéral individuellement. Pour chaque élément, un intervalle de suffisance est donné en pourcentage ou en ppm par rapport au poids sec du tissu végétal. En-dessous de la limite minimale fixée par cet intervalle, l’élément est considéré en carence et au-dessus de la limite maximale, il est considéré en excès. Le tableau 1 présente les intervalles de suffisance nutritive des plants de canneberge au Maine (Yarborough et al., 1993), au Wisconsin (Roper, 2001) et au Québec (Marchand et al., 2013).

Tableau 1: Intervalles de suffisance nutritive des tissus de canneberge

Éléments Intervalle de suffisance

Roper, 2001 Yarborough et al., 1993 Marchand et al., 2013 % massique Azote (N) 0,90-1,10 0,95-1,05 1,09-1,24 Phosphore (P) 0,10-0,20 0,11-0,14 0,11-0,13 Potassium (K) 0,40-0,75 0,40-0,65 0,50-0,56 Calcium (Ca) 0,30-0,80 0,60-0,80 0,84-1,00 Magnésium (Mg) 0,15-0,25 0,20-0,25 0,17-0,20 Soufre (S) 0,08-0,25 ND ND mg.kg-1 Bore (B) 15-60 30-50 30-39 Fer (Fe) >20 40-80 60-69 Manganèse (Mn) >10 150-250 493-711 Zinc (Zn) 15-30 15-30 22-26 Cuivre (Cu) 4-10 4-7 4-5

1.2.4.-Recommandations en éléments fertilisants

Les recommandations actuelles en N-P-K dans la culture de la canneberge au Québec sont basées sur des résultats expérimentaux obtenus dans le Centre-du-Québec avec la

(15)

variété « Stevens » sur des sols du groupe de texture sableuse. Les doses à appliquer dépendent de la quantité de l’élément présent dans le sol et des concentrations foliaires visées (Parent et Gagné, 2010). Les concentrations foliaires visées au Québec entre le 15 août et le 15 septembre sont de 0,90 à 1,10 % en azote, 0,10 % en phosphore (bien que des États américains recommandent 0,11 %) et de 0,40 à 0,75 % en potassium (Parent et Gagné, 2010). Les doses d’application proposées au Québec sont présentées au tableau 2.

Tableau 2: Recommandations en azote, phosphore et potassium au Québec (Parent et Gagné, 2010)

Azote

Temps et mode d’apport Recommandation (kg N ha-1)

Dose répartie en 4 applications

(au début de la floraison, à 50 % floraison, à 50 % nouaison,

Au grossissement du fruit)

20-65

Phosphore Indice de saturation en phosphore :

(%) Recommandation selon le P foliaire visé (kg P2O5 ha-1) 0,10 % 0,11 % 0-3,5 40 80 3,6-7,0 20 65 7,1-14,0 0 0 14,1 et plus 0 0 Potassium Analyse (kg KM-3 ha-1) Recommandation (kg K2O ha-1) 0-115 65-110 116-230 0-65 231 et plus 0

Ces recommandations s’appliquent à des sols de pH 4 à 5 et pour des champs en production depuis au moins 3 ans.

Cette approche de diagnostic foliaire selon laquelle chaque élément est considéré isolément est biaisée vu qu’elle ne prend pas en compte les interactions entre les

(16)

éléments ainsi que l’âge physiologique de la plante (Bates, 1971 ; Parent, 2011 ; Marchand et al., 2013). Ainsi, une nouvelle méthode de diagnostic nutritif a été développée au fil des années : l’approche compositionnelle qui permet de faire un diagnostic nutritif non biaisé (Parent et Dafir, 1992 ; Parent, 2011 ; Parent et al., 2013). 1.3.-Approche compositionnelle ou concept des balances

1.3.1.-Définition et concepts de base

Les données compositionnelles sont définies comme un vecteur où toutes les composantes sont des nombres réels strictement positifs et fournissent uniquement des informations relatives. En effet, l’information relative réside dans l’unité de mesure de la composition exprimée en général en pourcentage de poids ou de volume, en ppm, en ppb ou en proportion molaire. La somme de toutes les composantes d’une composition est égale à une constante k. À noter que les valeurs prises par k dépendent de l’unité de mesure. Les valeurs usuelles sont 1 si l’unité de mesure est en proportion, 100 si c’est en pourcentage, 106 si elle est en ppm et 109 si c’est en ppb (Pawlowsky-Glahn et

Buccianti, 2011).

Mathématiquement un vecteur de composition est défini par le simplex : SD={x=[x1, x2, … xD]; avec xi>0; i=1, 2,…, D;∑ } ;

x1, x2,…, xD sont les D composantes du vecteur de composition.

À la lumière de ces définitions, on reconnaît que les données des analyses foliaires sont des données compositionnelles :

 Ce sont des nombres réels strictement positifs

 Elles fournissent uniquement des informations relatives

 La somme des résultats d’analyse de toutes les composantes est contrainte à k. Si toutes les composantes du vecteur de composition ne sont pas disponibles, on doit, soit définir une valeur de remplissage ou valeur résiduelle, ou simplement définir une sous-composition avec les composantes disponibles (Egozcue et Pawlowsky-Glahn, 2006).

La valeur de remplissage est la différence entre la constante k et la somme de toutes les composantes analysées. Elle représente les composantes non prises en compte dans le vecteur de composition.

(17)

Pour définir une sous-composition à partir d’une composition dont toutes les composantes ne sont pas disponibles, on procède comme suit (Pawlowsky-Glahn et Buccianti, 2011) :

Soit z une composition avec s composantes analysées et connues et C(z) une sous-composition de z: z = [z1, z2, … zj]; avec zj>0; j=1, 2,…, D; ∑ ; C(z)= [ . 1 ∑ 1

,

. 2 ∑ 1

, … ,

. ∑ 1

] avec z

i>0 et i= 1,2,…,s.

1.3.2.-Principes de l’analyse compositionnelle

Selon Aitchison (1986), trois (3) conditions doivent être remplies pour une analyse non biaisée des données compositionnelles :

a. Invariance d’échelle

La plus importante caractéristique des données compositionnelles est le fait qu’elles apportent seulement une information relative due à l’unité de mesure (proportion, %, ppm, ppb, etc.) (Pawlowsky-Glahn et Buccianti, 2011). Ainsi, changer l’unité de mesure des données (par exemple de ppm à %) revient à multiplier les données par une constante de conversion ʎ  (équivalence compositionnelle). Les analyses doivent donner les mêmes résultats peu importe la valeur de ʎ ou l’unité de mesure des données. C’est ce qu’Aitchison (1986) appelle invariance d’échelle.

b. Invariance de permutation

Il y a invariance de permutation si on obtient des résultats équivalents même en changeant l’ordre des composantes dans une composition.

Pour résoudre le problème de singularité de la matrice de covariance des données compositionnelles, la méthode classique est de réduire le nombre de dimensions D à D-1 sans perte d’information (i.e. en évitant d’enlever une composante redondante utile).

c. Cohérence sous-compositionnelle

Ce principe peut être résumé comme suit : projeter les données compositionnelles dans l’espace réel sans dépasser les limites de l’espace clos.

(18)

Autrement dit, les sous-compositions devraient se comporter de la même façon que les projections orthogonales dans les analyses réelles conventionnelles. La dimension d’un segment projeté est inférieure ou égale à celle du segment lui-même. En d’autres termes, la distance entre deux compositions complètes doit être supérieure ou égale à leur distance quand on considère des sous-compositions.

Pour projeter les données compositionnelles dans l’espace réel, les logs ratios ont été conçus par des mathématiciens. Il s’agit du log ratio additif (alr), du log ratio centré (clr) et du log ratio isométrique (ilr). En plus de libérer les données compositionnelles de leur espace clos et de les projeter dans l’espace réel, le log ratio respecte le principe de l’invariance d’échelle. Quel que soit l’échelle de mesure, le log ratio doit être le même pour que l’interprétation soit cohérente.

1.3.3.-Transformations des données compositionnelles : les ratios logarithmiques (logs ratios)

a. alr (additive log ratio)

Cette transformation a été élaborée par Aitchison (1986) et utilisée comme une variable stoïchiométrique par Ingestad (1987) pour le suivi de la nutrition des plants forestiers. Le nombre de degrés de liberté est réduit à D-1 en utilisant une composante comme dénominateur commun. L’analyse multivariée est invariante au choix du dénominateur commun (Aitchison, 1986). Dans le modèle d’Ingestad (1987), le dénominateur commun est la concentration en N. Le jème alr est calculé

comme suit :

 est le jème élément nutritif hormis le dénominateur commun, N. Par exemple, si un

tissu contient 1.8 % N et 0.12 % P, le est égal à 0.12

1.8 2.71.

Toutefois, les alr sont obliques (60 o) l’un à l’autre dans l’espace euclidien et donc

difficiles à ajuster géométriquement à un espace orthogonal (Egozcue et Pawlowsky-Glahn, 2005).

(19)

b. clr (centered log ratio)

La transformation clr a été utilisée pour l’analyse des tissus végétaux (Parent et Dafir, 1992 ; Parent et al., 2009), des sols (Parent et al., 2012) et des solutions nutritives (Lopez et al., 2002). Le jième clr pour la ième observation est calculé comme

suit :

ln

Où est la jième composante et est la moyenne géométrique des proportions

pour la ième observation. Comme il y a D clr pour D concentration et que la somme

des clr est égale à 0, la matrice est singulière et un clr (généralement celui de la valeur de remplissage) doit être sacrifié pour effectuer une analyse multivariée. Par conséquent, le clr n’est pas adapté aux mesures de corrélation (Filzmoser et Hron, 2009).

c. ilr (isometric log ratio)

L’ilr, aussi appelé « balance orthonormale » décrite dans une partition binaire séquentielle, est défini comme le ratio logarithmique entre les moyennes géométriques de deux composantes ou groupes de composantes. L’ilr permet de résoudre le problème de la matrice de singularité. Contrairement à l’alr, il a l’avantage d’être géométriquement adapté pour conduire des analyses multivariées en raison de l’orthogonalité (Filzmoser et al., 2009). Il est calculé comme suit (Egozcue et al., 2003) :

Où ilri est la ième balance entre deux sous-compositions, i est compris entre 1 et D-1,

r et s sont respectivement le nombre de composantes au numérateur et au dénominateur, et et sont les moyennes géométriques des sous-ensembles au numérateur et au dénominateur, respectivement.

(20)

Chapitre 2 : Hypothèses et Objectifs 2.1.-Hypothèse

Les essais de fertilisation font varier un ou plusieurs éléments nutritifs sous l’hypothèse du « ceteris paribus » (tous les autres facteurs ont un effet égal par ailleurs), ce qui permet de relier le rendement de la culture à l’analyse foliaire (Ulrich et Hills, 1967). Notre hypothèse est que la fertilisation N, P, K, Mg, Cu, et B de la canneberge permet d’élaborer des normes nutritives foliaires caractéristiques de rendements élevés compte tenu de la variation normale de l’ensemble de la composition minérale d’une feuille. 2.2.-Objectifs

L’objectif général de ce travail est de développer des normes foliaires nutritives pour la canneberge (cv. ‘Stevens’) à haut rendement, établie sur des sols sableux acides au Québec en utilisant de nouvelles méthodes d’analyses de données comme l’analyse compositionnelle et les arbres de classification et de régression. Plus spécifiquement, nos objectifs sont de :

1. Définir des balances nutritives idéales des plants de canneberge à haut rendement ; 2. Réévaluer les normes de concentrations foliaires de la canneberge ;

3. Comparer les nouveaux intervalles de concentration aux normes de concentrations foliaires publiées dans la littérature.

           

(21)

Chapitre 3 : Méthodologie 3.1.-Ensemble de données

Les données utilisées dans le cadre de ce travail sont issues d’essais de fertilisation réalisés pendant deux (2) ans dans la région Centre-du-Québec et des travaux de Marchand et al. (2013). Au total, le jeu de données est constitué de 488 observations dont 202 sont issues des travaux antérieurs.

3.2.-Sites expérimentaux

L’expérience a été réalisée pendant deux ans (2014 et 2015) sur quatre (4) sites (A9, 10, 45 et 9) sur les fermes Atocas Blandford (Latitude: 46o14ˈ48,63 ̎ N; Longitude: 72o

02ˈ01,20 ̎ O), la Cannebergière (Latitude: 46o19ˈ37,15 ̎ N; Longitude: 71o 44ˈ04,27 ̎ O)

et Atocas de l’érable (Latitude: 46o21ˈ33,57 ̎ N; Longitude: 71o 52ˈ34,16 ̎ O) localisées

dans la région Centre-du-Québec. Le sol est un brunisol de la série Blandford (site A9) (Rompré et al., 1984), un podzol de la série Villeroy (sites 9 et 45) et un gleysol de la série Lyster (site 10) (Laflamme et al.,1989). Durant la première année de l’expérience, les quatre sites étaient en production conventionnelle. En 2015, un bassin chez Atocas Blandford (A9) est passé en transition biologique. La deuxième année de l’expérience a été donc réalisée en utilisant des engrais alors certifiés biologiques par Écocert sur le site A9.

L’étude a été menée sur le cultivar ‘Stevens’. C’est un cultivar hybride de mi- saison qui produit de gros fruits ronds de coloration moyenne (Eck, 1990). C’est le cultivar le plus populaire au Québec étant donné son haut potentiel de rendement.

3.3.-Structure des traitements et dispositif expérimental

Au total 18 traitements ont été testés, répartis en cinq (5) doses d’azote, trois (3) doses de phosphore, quatre (4) doses de potassium, deux (2) doses de magnésium, deux (2) doses de cuivre et deux (2) doses de bore. Sur les sites conventionnels, les éléments fertilisants ont été apportés sous forme de sulfate d’ammonium (21-0-0), de triple superphosphate (0-46-0), de sulfate de potasse (0-0-50), de sulfate de potasse magnésien (sulpomag) (0-0-22-11% Mg), du sel d’Epsom (9% Mg), de sulfate de cuivre (25% Cu) et de solubor (21% B). Sur le site en transition biologique (A9), l’azote, le phosphore et le potassium ont été apportés sous forme d’engrais alors certifiés biologiques par

(22)

Écocert, soit des acides aminés liquides (8-0-0) pour l’azote, de l’os fossile moulu (0-13-0) pour le phosphore, du sulfate de potasse et du sulpomag biologiques pour le potassium. Le sel d’Epsom, le sulfate de cuivre et le solubor sont aussi certifiés biologiques. Dans le cas des traitements sans magnésium (Mg0) et sans potassium (K0), du sel d’Epsom et du sulfate de potassium ont respectivement été utilisés.

Les traitements sont structurés de façon telle qu’une parcelle reçoit le traitement qui lui est attribué aléatoirement et la dose des autres éléments recommandée par Parent et Gagné (2010). Par exemple, les traitements azotés sont composés de doses différentes d’azote mais d’une même dose de phosphore, de potassium, de magnésium, de bore et de cuivre. Le tableau 3 présente avec plus de détails la structure des traitements.

Tableau 3: Structure des traitements de l'expérience

Composantes (kg/ha) Traitement N P K Mg B Cu N0 0 30 80 12 2 1 N15 15 30 80 12 2 1 N30 30 30 80 12 2 1 N45 45 30 80 12 2 1 N60 60 30 80 12 2 1 P0 45 0 80 12 2 1 P15 45 15 80 12 2 1 P30 45 30 80 12 2 1 K0 45 30 0 12 2 1 K40 45 30 40 12 2 1 K80 45 30 80 12 2 1 K120 45 30 120 12 2 1 Mg0 45 30 80 0 2 1 Mg12 45 30 80 12 2 1 B0 45 30 80 12 0 1 B1 45 30 80 12 2 1 Cu0 45 30 80 12 2 0 Cu2 45 30 80 12 2 1

Les traitements sont randomisés dans des unités expérimentales disposées en blocs complets. Le dispositif expérimental de chacun des sites est constitué de deux (2) blocs

(23)

dans le sens de la longueur de la parcelle de part et d’autre d’une ligne d’irrigation par aspersion pour un total de 36 parcelles expérimentales de 12 m2 (3 m par 4 m) par site.

Les parcelles expérimentales d’un même bloc ainsi que les blocs sont espacés d’un mètre. La figure 2 illustre l’arrangement des parcelles expérimentales.

Figure 2. Disposition des parcelles expérimentales : cas d'un site.

Les engrais étaient fractionnés selon le stade de développement de la plante et appliqués manuellement à la volée (DeMoranville et Davenport, 1997). Le calendrier d’application est présenté au tableau 4.

Tableau 4: Calendrier d'application des engrais Tâches Période de la

saison

Stade de développement Engrais Fertilisation Mg et

K

Début juin Stade élongation Sulpomag ou sulpomag*

Fertilisation B et Cu

Mi-Juin à fin Juin Stade crochets Solubor* et sulfate

de Cu* Fertilisation N-P-K (4 applications) 1. 15 % 2. 35 % 3. 35 % 4. 15 % 1. Fin juin 2. Début juillet 3. Mi- juillet 4. Fin juillet 1. 10 % floraison 2. 50 % floraison 3. 50 % nouaison 4. Grossissement des fruits N : 21-0-0 et 8-0-0* P : 0-46-0 et 0-13-0* K : 50 ou 0-0-50*

(24)

3.4.-Analyses de sols et foliaires

Des échantillons de sols composés d’un mélange de cinq (5) sous-échantillons ont été prélevés dans la couche 0-15 cm de chaque parcelle avant la fertilisation afin de caractériser les sites. Les échantillons ont été mis à sécher à l’air libre (20oC) et tamisés

à < 2 mm avant les analyses au laboratoire.

Le pH a été déterminé dans une solution de CaCl2 (0,01 M) en utilisant un rapport de

sol-solution de 1:2 (Hendershot et al., 1993). Les éléments assimilables (P, K, Ca, Mg, Cu, Fe, Zn, Mn) ont été déterminés par extraction à la solution Mehlich –III (Ziadi et Tran, 2006). Les formes amorphes d’Al et de Fe ont été extraites par l’oxalate d'ammonium 0,2 M et l’acide oxalique 0,2 M (Schwertmann, 1973).

Des échantillons foliaires ont été prélevés à raison de 200 tiges par parcelle (Davenport et al., 1995). Les échantillons ont été séchés à 55 oC, broyés à 2 mm et analysés à

l’acide perchlorique (P-K-Ca-Mg-Al-Cu-Mn-Zn-Fe) (Barnhisel et Bertsch, 1982). Quant au bore, il a été extrait par calcination puisque le bore peut se volatiliser durant la digestion humide (Wickner, 1986). Le dosage des éléments a été réalisé par spectrométrie d’induction au plasma à haute fréquence (ICP-OES).

3.5.- Récolte

Les fruits ont été récoltés manuellement dans quatre placettes d’un pied carré par parcelle entre les deuxième et troisième semaines de septembre. Pour chaque parcelle, les fruits récoltés ont été pesés afin de déterminer le rendement par unité de surface. 3.6.-Expérience antérieure : Marchand et al. (2013)

Marchand et al. (2013) ont mené un essai de fertilisation de P sur six sites pendant trois ans dans la région Centre-du-Québec. L’essai a été réalisé sur le cultivar ‘Stevens’ avec trois (3) niveaux de P (0 à 39 ou 99 selon l’année). Au total 202 observations sur les concentrations foliaires en N, P, K, Mg, Ca, B, Zn, Cu, Mn, Fe ainsi que les rendements correspondants ont été rapportées par Marchand et al. (2013).

(25)

3.7.-Analyse des données

3.7.1.-Définition des balances nutritives

Les prélèvements des tissus foliaires ont été analysés en adoptant l’approche compositionnelle vu qu’il s’agit de données compositionnelles, c’est-à-dire des données strictement positives faisant partie d’un système et que chaque composante peut être calculée par la différence entre le système et la somme des autres composantes (Egozcue et Pawlowsky-Glahn, 2005). Les ratios logarithmiques isométriques (ilr) est l’approche la plus appropriée pour décrire les balances nutritives des plantes (Parent, 2011). Ainsi, dix (10) contrastes logarithmiques ont été définis à partir des 10 éléments (C-N-P-K-Ca-Mg-Mn-Cu-Zn-Fe-B) analysés dans les tissus foliaires (Tableau 5). Tableau 5: Contrastes logarithmiques et partition séquentielle binaire des analyses foliaires de la canneberge Ilr N P K Ca Mg B Cu Zn Mn Fe Fv 1 -1 -1 -1 -1 -1 -1 -1 -1 -1 -1 1 1 10 2 1 1 1 1 1 1 -1 -1 -1 -1 0 6 4 3 1 1 1 1 1 -1 0 0 0 0 0 5 1 4 1 1 -1 -1 -1 0 0 0 0 0 0 2 3 5 0 0 1 -1 -1 0 0 0 0 0 0 1 2 6 0 0 0 1 -1 0 0 0 0 0 0 1 1 7 1 -1 0 0 0 0 0 0 0 0 0 1 1 8 0 0 0 0 0 0 1 1 -1 -1 0 2 2 9 0 0 0 0 0 0 1 -1 0 0 0 1 1 10 0 0 0 0 0 0 0 0 1 -1 0 1 1

3.7.2.-Transformation des données foliaires en log ratio isométriques (ilr)

Le calcul des ilr a été réalisé en utilisant le package « compositions » de R (R Development Core Team, 2013). Pour éviter toute redondance, le nombre de balances

(26)

entre les éléments nutritifs (ilr) doit être égal au nombre d’éléments nutritifs D analysés dans le tissu foliaire moins un (D-1) pour ainsi assurer l’orthogonalité des contrastes logarithmiques. Le calcul des ilr est effectué comme suit (Egozcue et Pawlowsky-Glahn, 2005) :

Où est le nombre de composantes au numérateur, est le nombre de composantes au dénominateur, est la moyenne géométrique des composantes au numérateur et est la moyenne géométrique des composantes au dénominateur. Le coefficient

permet de normaliser les balances orthogonales en balances orthonormales.

Comme les balances sont orthogonales dans l’espace euclidien, la distance de Mahalanobis peut être calculée comme indice de balance nutritive comme suit (Parent et al., 2013) :

∗ ∗

Où ∗ est l’ilr de la composition de la population de référence et COV est la matrice de covariance. Cette population est isolée à l’aide de la procédure itérative de Cate-Nelson (Cate-Nelson et Anderson, 1977) où les paramètres ∗ et COV sont recalculés à chaque itération jusqu’à ce que le nombre de spécimens vrais négatifs ne change plus. 3.7.3.-Partition de Cate-Nelson

La procédure de partition de Cate-Nelson se fait en plusieurs étapes (Nelson et Anderson, 1977). La première consiste à ordonner les observations en ordre croissant selon leur distance de Mahalanobis calculée avec des normes nutritives provisoires (moyennes et écart-types) en utilisant une sous-population à haut rendement (initialement, le quartile supérieur basé sur les rendements) comme composition de référence. La seconde étape est de maximiser la somme des carrés des valeurs de rendement comme suit :

(27)

∑ ∑

Où Y est le rendement, k est un compteur d’incrémentation allant de 1 à n, le nombre total d’observations, et CF un facteur de correction calculé comme suit : ∑ ⁄ . La partition donne lieu à quatre (4) groupes d’observations. Les TN (True Negative en anglais appelés Vrais Négatifs en français) sont les observations à haut rendement qui sont diagnostiquées balancées (c’est-à-dire en dessous de la distance multivariée critique) ; les FN (False Negative en anglais) appelés « Faux Négatifs » en français sont les observations à faible rendement incorrectement diagnostiquées comme balancées en raison de facteurs limitants autres que ceux pris en compte. Ce groupe représente l’erreur de type II. Les FP (False Positive, « Vrais Positifs » en français) représentent l’erreur de type I. Ce sont les observations à haut rendement incorrectement classées dans le groupe des spécimens non balancés (c’est-à-dire au-dessus de la distance multivariée critique) à cause de cas de consommation de luxe ou de contamination. Les TP (True Positive, « Faux Positifs » en français) sont les observations à faible rendement et correctement diagnostiquées non balancées parce qu’au moins un élément nutritif est limitant pour la croissance.

3.7.4.-Interprétation du test de diagnostic

Le test de diagnostic est interprété à l’aide des critères de performance suivant (Parent et al., 2013) :

 NPV (Negative Predictive Value) est la probabilité pour qu’un diagnostic équilibré retourne un haut rendement. Elle est calculée comme suit : TN/(TN+FN).

 PPV (Positive Predictive Value) est la probabilité pour qu’un diagnostic déséquilibré retourne un faible rendement. Elle est égale au rapport suivant : TP/(TP+FP).

 Précision (Accuracy) est la probabilité pour qu’une observation soit correctement diagnostiquée comme équilibrée ou déséquilibrée. Elle est calculée comme suit : (TN+TP)/(TN+FN+TP+FP).

 Spécificité (Specificity) est la probabilité pour qu’une observation à haut rendement soit équilibrée et est calculée comme suit : TN/(TN+FP).

(28)

 Sensibilité (Sensitivity) est la probabilité pour qu’une observation à faible rendement soit diagnostiquée en déséquilibre nutritif. Ce critère est calculé comme suit : TP/(TP+FN).

Le NPV, la précision et la sensibilité sont des critères qui permettent d’identifier des carences nutritives potentielles et d’indiquer si d’autres facteurs autres que ceux pris en compte dans le diagnostic limitent la croissance de la plante. Par conséquent, le modèle avec le NPV, la précision et la sensibilité les plus élevés sera considéré comme le plus approprié à des fins diagnostiques. Le PPV et la spécificité permettent de détecter de problèmes potentiels de consommation de luxe, de concentration sous-optimale et de contamination.

La distribution des ilr des TN a été examinée graphiquement avec le logiciel Orange 3.2. Les intervalles de confiance des ilrs des TN (P < 0,01) ont ensuite été soumis à 100 000 combinaisons de Monte Carlo dans R (Parent, 2016) puis transformés en valeurs de concentration (fonction ilrInv du module compositions de R). Les valeurs maximales et minimales des concentrations ont été retenues comme intervalles de concentrations. Ceci évite de calculer des statistiques sur des valeurs de concentration biaisées par des interactions.

3.7.5.-Apprentissage automatique

Cette méthode appelée « apprentissage par arbre de décision », utilisée notamment en fouilles de données (data mining) et en apprentissage automatique (machine learning), consiste à utiliser un arbre de décision comme modèle prédictif permettant d’évaluer la valeur d’une caractéristique d’un système depuis l’observation d’autres caractéristiques du système en question (Rokach et Maimon, 2008). Un arbre de décision de type « classification » est utilisé afin de différencier les observations équilibrées à haut rendement et celles non équilibrées à faible rendement. Pour ce faire, le module orngtree du logiciel Orange Canvas a été utilisé. Le modèle de régression k nearest Neighbors du logiciel Orange Canvas a permis de prédire la performance du système (rendement) à partir des valeurs de ses différentes composantes (ilr).

(29)

Chapitre 4 : Résultats et Discussions 4.1.-Propriétés des sols et productivité

Les sols sont des sols acides (pH CaCl2 < 4,5), contenant plus de 85 % de sable, tous de

la même classe de fertilité potassique (classe 1 : 0-115 kg KM-3 ha-1) et leurs indices de

saturation en P (ratios molaires [P/(Al+Fe)]M-3 sont inférieurs à la valeur limite

environnementale de 11 % (Parent et Gagné, 2010) (Tableau 6).

Tableau 6. Propriétés des sols des sites de canneberge en Mai 2014 (Mai 2001 pour les sites de Marchand et al., 2013)

Propriété de sol Site A9 10 45 9 Marchand et al. (2013)† Sable, % 91,5 92,7 93,8 92,8 89,3 Limon, % 4,9 5 3,7 4,4 7,1 Argile, % 3,6 2,3 2,6 2,8 3,6 Al, mg kg-1 1488 594 1240 1510 1847 Ca, mg kg-1 15 32 70 106 ND Cu, mg kg-1 0,9 1,8 1,1 1,7 ND Fe, mg kg-1 238,7 177,4 304,3 281,5 248,6 K, mg kg-1 10,7 8,5 26,1 16,6 ND Mg, mg kg-1 3,9 10,7 6,6 9,8 ND Mn, mg kg-1 0,4 1,5 0,7 1,2 ND P, mg kg-1 90,8 62,9 100,3 164,3 119 Zn, mg kg-1 0,4 0,6 1 1,9 ND pH (CaCl2) 4,1 4,2 4,2 4,3 4,3 P/ (Al+Fe) M-3, % 4,9 8,2 6,4 8,8 5,3

ND Valeur non disponible

Moyenne de cinq sites

Les rendements des nouveaux essais variaient de 6 à 74 Mg ha-1. La culture n’a répondu

de façon significative qu’aux fertilisations azotée et potassique (Jamaly, 2017). Pour les deux (2) années de l’expérience, le rendement a augmenté suivant un effet linéaire

(30)

significatif avec l’augmentation de la dose d’azote (P < 0,0001 en 2014 et 2015). Dans le cas du potassium, une augmentation linéaire significative a été obtenue en 2014 (P < 0,05). En 2015, aucune différence significative n’a été décelée entre les doses de potassium appliquées. Les traitements se sont comportés de la même façon sur tous les sites (interaction site*traitement non significative). Les variations de rendement sont attribuables en partie au statut nutritif différentiel des plantes de canneberge sous les divers régimes nutritifs.

4.2.-Diagnostic foliaire

4.2.1.-Partition de Cate-Nelson

La partition de Cate-Nelson a divisé les observations en deux (2) sous-populations à un seuil de rendement de 35 Mg ha-1. Le compromis optimal entre spécificité et sensibilité

a été trouvé à 80 % pour les deux (spécificité et sensibilité), ce qui correspond à un seuil de prédiction (distance de Mahalanobis) de 4,65. En somme, quatre groupes ont découlé de la partition (Fig. 3). Les observations ont été réparties comme suit : 180 vrais négatifs (TN), 207 vrais positifs (TP), 55 faux négatifs (FN) et 47 faux positifs (FP). Les TN regroupent les observations à haut rendement (>35 Mg ha-1) qui sont

correctement diagnostiquées en équilibre nutritif (distance de Mahalanobis inférieure à 4,65). Les FP sont les observations à haut rendement incorrectement diagnostiquées en déséquilibre nutritif (distance de Mahalanobis supérieure à 4,65). Ces observations indiquent une consommation de luxe de nutriments ou des cas de nutrition sous-optimale ou de contamination. Les cas de consommation de luxe par la canneberge concernent surtout le potassium (Roper, 2010). D’autre part, les contaminations (Cu, Zn et Mn) proviennent des applications de fongicides. De plus, la canneberge est cultivée sur une large variété de sols, des sols organiques aux podzols sableux, avec de larges gammes de Mn et de Fe disponibles (Marchand et al., 2013).

(31)

Figure 3. Partition de Cate-Nelson entre la distance de Mahalanobis et le rendement en fruits de la canneberge.

Les TP sont les observations à faible rendement (< 35 Mg ha-1) et qui sont correctement

diagnostiquées en déséquilibre nutritif. Les FN représentent les bas rendements qui sont incorrectement diagnostiquées en équilibre nutritif. Au moins un autre facteur que ceux pris en compte dans le diagnostic nutritif limite le rendement de ces observations (Marchand et al., 2013). Un grand nombre de FN sont souvent dus à de petites variations climatiques et à des changements naturels ou pathologiques au niveau de la plante. Ils peuvent aussi avoir pour cause le caractère biennal de la canneberge qui alterne des années à haut rendement (on-year) et à faible rendement (off-year) (Monselise and Goldschmidt, 1982 ; Parent et al., 2013). La taille et le sablage servent à réduire l’effet biennal sur le rendement (Roper, 2006).

La majorité des spécimens sont correctement diagnostiqués (précision ou accuracy de 80 %) par la distance de Mahalanobis comme indice de diagnostic. Plus de 80 % des spécimens diagnostiquées non balancés avaient un rendement inférieur au seuil de rendement critique de 35 Mg ha-1 (PPV=80 %). D’autre part, plus de trois quarts des

(32)

spécimens balancés ont eu un rendement supérieur au seuil de rendement critique (NPV=76%).

4.2.2.-Intervalles de suffisance nutritive

Le groupe des TN étant le groupe équilibré à haut rendement, on peut établir à partir de ces observations des intervalles de suffisance nutritive pour avoir de bon rendement. Des intervalles de référence pour les balances nutritives sont proposés dans le tableau 7. Tableau 7. Intervalles de confiance (P < 0,01) des balances (ilr) pour les vrais négatifs (TN)

Balance Minimum Moyenne Maximum

[Fv | B,Ca,Cu,Fe,K,Mg,Mn,P,Zn,N] 7,47 7,50 7,53 [Cu,Fe,Mn,Zn | B,Ca,K,Mg,P,N] -6,32 -6,23 -6,15 [Fe,Mn | Cu Zn] 3,07 3,13 3,20 [Fe | Mn] -0,78 -0,68 -0,57 [Cu | Zn] -1,33 -1,24 -1,16 [B | Ca,K,Mg,P,N] -3,99 -3,93 -3,87 [P,N | Ca,K,Mg] -0,33 -0,31 -0,29 [P | N] -1,73 -1,71 -1,69 [K | Ca,Mg] 0,17 0,19 0,22 [Ca | Mg] 1,03 1,05 1,08

Les balances nutritives décrivent les interactions qui peuvent survenir entre les éléments nutritifs au niveau du sol ou des tissus des plantes. Ces interactions interviennent quand l’ajout ou l’absorption d’un élément affecte l’absorption ou l’utilisation d’autres éléments (Fageria, 2001). La balance [P | N] décrit l’interaction positive entre le N et P. Wilkinson et al. (2000) ont rapporté que le N peut augmenter le prélèvement du P par la plante par une augmentation de la croissance racinaire et de la capacité des racines à absorber et à acheminer le P vers les autres parties et par une baisse du pH du sol résultant de l’absorption de NH4+ augmentant ainsi la solubilité du P. Le N et le P

interagissent aussi avec le Ca, le Mg et le K (balance [P, N | Ca,K,Mg]) (Wilkinson et al., 2000).

(33)

L’augmentation du niveau de N dans la plante peut augmenter (si le niveau de K est élevé dans le milieu) ou diminuer (si K est faible dans le milieu) la concentration de K dans les tissus des plantes (Dibb et Thompson, 1985). Le Mg est un activateur des enzymes kinases et active la plupart des réactions impliquant le transfert des phosphates. De ce fait, on s’attend à une interaction positive entre le P et le Mg (Fageria et al., 2011) dans les tissus de la plante.

Quant au K, à concentration élevée, il a des effets antagonistes potentiels sur l’absorption du Ca et du Mg (Fageria, 2001). La diminution du prélèvement du Ca avec l’augmentation de la concentration du K est liée à la compétition entre les deux éléments due aux propriétés physiologiques des ions Ca2+ et K+ (Johansen et al., 1968).

L’effet antagoniste du K à concentration élevée sur le prélèvement du Mg peut être interprété comme le résultat de la compétition entre le K et le Mg pour se lier à des composés métaboliques (Omar et Kobbia, 1966). Ces effets sont décrits par la balance [K | Ca,Mg].

Les interactions entre les éléments majeurs et les éléments mineurs ([Cu,Fe,Mn,Zn | B,Ca,K,Mg,P,N]; ainsi que celles entre les éléments mineurs ([Cu | Zn]; [Fe | Mn]; [Fe,Mn | Cu Zn]) sont aussi décrites par les balances. Dans le cas où de grandes quantités de phosphore sont appliquées, une consommation de luxe de P (Tagliavini et al., 1991) peut faire augmenter les ratios P/Fe (De Kock et al., 1965) et P/Zn (Loneragan et al., 1979 ; Loneragan et al., 1982) dans les tissus de plante et a souvent été associée à des symptômes de déficience en ces deux éléments mineurs (Murphy et al., 1981).

Les interactions de N avec les micronutriments sont dues aux changements de pH dans la rhizosphère et de la forme de N utilisée (Fageria, 2001). Dans le cas de la canneberge, l’azote ammoniacal NH4+ est la forme utilisée. L’absorption cationique du NH4+ fait

baisser le pH du sol et du coup augmente le prélèvement de certains micronutriments notamment le fer (Wilkinson et al., 2000). D’autre part, quand l’azote stimule la croissance, cela peut causer une augmentation de la demande pour certains micronutriments (bore, manganèse, molybdène) et une possible déficience (Fageria, 2001). Il peut aussi avoir une compétition cationique entre le NH4+, Cu2+, Zn2+ et Mn2+

(34)

Pitman,1983) vu que la somme des cations dans les tissus de la plante est à peu près constante (Dibb et Thompson, 1985).

La balance [Fe | Mn] décrit l’importance de maintenir un ratio Mn/Fe équilibré. Un excès de Mn augmente ce ratio et peut induire une déficience en fer (Lee, 1972) et dans les sols où des problèmes de toxicité due au fer existe, le prélèvement du Mn peut être fortement réduit (Fageria, 2001).

Les « ilr » sont utilisées à des fins de diagnostic nutritif. Pour avoir une appréciation en termes de carence nutritive, d’adéquation, de consommation de luxe ou d’excès, les concentrations nutritives sont plus familières. En effet, l’utilisation des ratios logarithmiques isométriques ne permet pas de savoir si le niveau d’un élément nutritif est élevé, adéquat ou insuffisant. Ceci est une faiblesse apparente de l’interprétation des ratios nutritifs (Walworth and Summer, 1987 ; Wilkinson et al., 2000 : Marschner, 2011).

L’approche des balances intègre les balances et les concentrations nutritives dans un modèle physiologiquement cohérent et statistiquement non biaisé, où les concentrations nutritives peuvent aider à apprécier les résultats des analyses statistiques effectuées sous forme de ratios logarithmiques isométriques (Parent et al., 2013).

L’utilisation des ilr permet un diagnostic nutritif non biaisé avec des valeurs de concentrations nutritives en soutien pour fournir une appréciation des résultats (carence relative, adéquation ou excès par rapport aux TN). Les intervalles de concentrations dérivées des simulations de Monte Carlo sont présentés au tableau 8 à titre de comparaison aux normes nutritives foliaires déjà établies qui ont été présentées au tableau 1.

(35)

Tableau 8. Intervalles de suffisance nutritive des tissus de canneberge

Éléments

Minimum Moyenne Maximum % Azote (N) 1,00 1,08 1,17 Phosphore(P) 0,090 0,097 0,100 Potassium (K) 0,46 0,50 0,54 Calcium (Ca) 0,76 0,83 0,90 Magnésium (Mg) 0,17 0,19 0,20 mg kg-1 Bore (B) 46,27 51,4 57,04 Fer (Fe) 84,58 98,83 116,53 Manganèse (Mn) 218,07 256,76 301,82 Zinc (Zn) 14,47 16,73 19,33 Cuivre (Cu) 2,5 2,9 3,3

Contrairement aux méthodes traditionnelles de diagnostic qui incluent toutes les observations à haut rendement (équilibrées et non équilibrées) pour établir des normes nutritives foliaires, la méthode utilisée dans ce travail inclut uniquement les observations à haut rendement et équilibrées (TN). Les cas de consommation de luxe, de concentration sous-optimales et de contamination (FP) ne sont pas pris en compte dans les intervalles proposés. Ainsi, les intervalles de concentrations présentés au tableau 8 sont plus restreints que ceux retrouvés dans la littérature et présentés au tableau 1. Toutefois, seuls les intervalles de N et K sont fiables vu que les fertilisations azotée et potassique sont les seules auxquelles la culture a répondu de façon significative. Les intervalles nutritifs pour les autres éléments caractérisent de bons rendements sans nécessairement montrer des valeurs critiques.

Un élément important qui ne figure pas dans le diagnostic est le soufre. C’est l’un des trois (3) éléments secondaires requis par la plante pour s’assurer d’une croissance normale et saine ; les deux autres étant le calcium et le magnésium. Il existe un équilibre significatif entre l'azote et le soufre : sans une quantité suffisante de soufre, les plantes ne peuvent pas utiliser l'azote et les autres nutriments de façon efficace afin d'atteindre leur plein potentiel. De ce fait, les engrais apportés à la canneberge (sulfate de K et de

(36)

Mg, sulfate d’ammonium, sulfate de cuivre, sulfate de K, sel d’Epsom) ont des teneurs non négligeables en soufre.

Vu que le soufre n’était pas pris en compte dans les travaux de Marchand et al. (2013), il a été enlevé du modèle de diagnostic initial. Toutefois, dans le diagnostic initial réalisé seulement avec les données foliaires des expériences de 2014 et 2015 (excluant les données de Marchand et al. (2013)), on a obtenu des intervalles de suffisance nutritive de 0,08 % à 0,09 % pour cet élément. Cet intervalle de suffisance se trouve à l’intérieur de la norme établie par Roper (2011) qui est de 0,08 % à 0,25 %.

Les écarts observés entre les intervalles de concentration de la littérature (tableau 1) et ceux de ce travail (tableau 8) peuvent résider dans divers facteurs qui prévalaient lors des expériences. L’un des premiers facteurs qui peut affecter les intervalles de concentrations est le cultivar sur lequel l’expérience a été réalisée. Il est connu que les concentrations critiques varient d’une espèce à une autre (Chapman, 1966) même si les mêmes organes sont comparés au même stade physiologique (Marschner, 2011). De même, les cultivars d’une même espèce fruitière donnée varient considérablement en leur capacité à extraire et à utiliser les éléments nutritifs du sol ou des milieux nutritifs (Vose, 1963). Ces variations sont principalement basées sur des différences dans le métabolisme et la composition des plantes (Marschner, 2011). Par exemple, Kessler (1961) a montré des différences marquées dans les concentrations critiques du zinc pour deux variétés de pommes, et Holford (1968) dans les concentrations critiques de l’azote dans des cultivars de canne à sucre. Bien que plus d’informations puissent sembler nécessaires avant de valider ces conclusions pour la canneberge, il y a lieu de penser que les différences variétales pourraient causer des écarts entre les intervalles de concentration quand on sait que la grande majorité des recherches ayant conduit à l’élaboration des normes nutritives pour la canneberge ont été réalisées aux États-Unis où un grand nombre de cultivars sont utilisés (Early Blacks, Howes, Stevens, Searles, Ben Lear, McFarlin). Au Québec, le cultivar Stevens, sur lequel cette expérience a été réalisée, est de loin, le plus populaire.

L’utilisation d’engrais liquides (concentrations élevées en bore et zinc), un drainage inadéquat du sol (teneur en Mn dépasse 300 mg Mn kg-1), des sols saturés ou secs, une

(37)

conditions expérimentales pouvant affecter les intervalles de concentrations des éléments nutritifs (Davenport et al., 1995).

Les fluctuations dans les facteurs environnementaux tels que la température et la teneur en eau du sol peuvent aussi affecter considérablement les concentrations en éléments nutritifs des tissus foliaires (Marschner, 2011 ; Bates, 1971). Ces facteurs influencent à la fois la disponibilité et le prélèvement des éléments nutritifs par les racines ainsi que le taux de croissance des racines (Marschner, 2011). Divers auteurs ont relié l’effet des facteurs environnementaux aux concentrations foliaires de certaines cultures. Burr (1961) a montré que les températures du sol et de l’air ainsi que l’intensité de la lumière affectent la concentration de l’azote dans les tissus foliaires de la canne à sucre. Les plus faibles concentrations en azote ont été enregistrées pour une forte intensité lumineuse, des sols froids et un air chaud et les concentrations les plus élevées dans le cas de sols chauds, un air froid et une faible intensité lumineuse. Des tendances similaires ont été retrouvées pour le phosphore foliaire de la canne à sucre. Les variations des facteurs environnementaux sont beaucoup plus importantes d’une région à une autre (Bates, 1971). Ces variations sont susceptibles d’être à la base des écarts qui existent entre les intervalles de concentrations élaborés ici au Québec et les standards de concentrations nutritives qui ont été élaborés aux États-Unis.

4.2.3.-Comparaison entre TN et TP

L’arbre de classification conçu à l’aide du module Orngtree du logiciel Orange 3.2 a permis de détecter les balances qui diffèrent entre les TN et les TP (Figure 4). La précision de la classification est très élevée à 92 %. Cet arbre est un outil permettant d’identifier les balances nutritives critiques pour l’obtention d’un rendement > 35 Mg ha-1.

(38)

Figure 4. Arbre de Classification des rendements élevés (HY) et bas (LY) au niveau de 35 Mg ha-1.

La première balance qui semble limiter le rendement des TP est la balance [Ca | Mg]. La totalité des 72 observations de l’échantillon considéré (271 observations) dont la balance [Ca | Mg] est inférieure ou égale à 0,881 (sous la borne inférieure de 1,03 de l’intervalle optimal, tableau 7) sont des TP. Quand la balance [Ca | Mg] est supérieure à 0,881, la probabilité d’avoir des observations TN est de 59,3 %. Cette probabilité dépend des autres balances critiques. La deuxième balance dans la hiérarchie des balances limitantes est [K | Ca, Mg]. Quand cette balance est inférieure ou égale à 0,343 (près de la borne supérieure au tableau 7), 87,2 % des observations (dont [Ca | Mg] > 0,881 et [K | Ca, Mg] < ou = 0,343) sont équilibrées et à haut rendement. 80,5 % des observations à [Ca | Mg] > 0,881 et [K | Ca, Mg] > 0,343 sont du groupe des TP. Une autre balance importante dans l’obtention d’un bon rendement est la balance [Cu | Zn]. Lorsqu’elle est supérieure à -1,498 (près de la borne inférieure de l’intervalle optimal, tableau 7), les observations respectant les critères de bon rendement des autres balances critiques ont près de 97 % de probabilité pour être du groupe des TN. L’arbre de classification peut être un bon outil d’aide à la décision en permettant d’identifier les

(39)

balances critiques à équilibrer afin de maximiser ses chances d’obtenir le plus d’observations possibles du groupe des TN.

Un arbre de classification en fonction des concentrations nutritives peut être informatif pour savoir quels éléments nutritifs sont à la base du déséquilibre des balances. Cet arbre permet de différencier les concentrations nutritives du groupe des TN de celles des TP (Figure 5).

Figure 5. Arbre de classification des vrais négatifs et des vrais positifs selon les concentrations.

La classification des concentrations renseigne sur les éléments nutritifs à considérer pour équilibrer les balances critiques. Par exemple, la balance [Ca | Mg] plus élevée dans les TN que les TP peut s’expliquer par une concentration de Mg plus élevée (> 0,188 % ou 1880 mg kg-1) dans les TN. Cette valeur limite de 0,188 % est d’autant plus

fiable qu’elle est sensiblement égale à la moyenne de l’intervalle de suffisance établi pour le magnésium (tableau 8). Ceci n’est toutefois pas le cas de Ca et K. Comme les

(40)

arbres de classification et de régression sont utilisés pour la première fois pour effectuer des diagnostics nutritifs de cultures fruitières, des recherches additionnelles sont nécessaires pour intégrer l’information pertinente provenant de la classification Cate-Nelson et ces nouveaux outils numériques d’auto-apprentissage.

En s’inspirant des arbres de classification, on peut identifier les mesures appropriées pour corriger les balances nutritives. Les mesures correctives incluant un élément peuvent influencer toutes les balances qui intègrent cet élément. Par conséquent, l’effet des mesures correctives sur un système si complexe doit être confirmé par expérimentations (Parent et al., 2013).

Les méthodes de Cate-Nelson et des arbres de classification ne produisent donc pas toujours les mêmes résultats. Il devient alors intéressant de vérifier si le rendement peut être prédit par une régression (Figure 6).

Figure 6. Rendement réel vs rendement prédit se basant sur les ilr des groupes TN et TP.

Les résultats de la figure 6 montrent que l’arbre de régression par les k= 5 voisins les plus près peuvent bien prédire (R2 = 0,829) le rendement de la canneberge avec les

balances nutritives, confirmant ainsi que celles-ci constituent une voie prometteuse pour les producteurs dans leur quête d’optimiser la fertilisation et d’augmenter le rendement

0 10 20 30 40 50 60 70 0 10 20 30 40 50 60 70 80 Rend em ent prédit (Mg/ha) Rendement (Mg/ha) R2=0,829

(41)

de la canneberge. Les producteurs ont tout intérêt à atteindre et à maintenir l’équilibre au niveau des différentes balances nutritives en vue d’obtenir des rendements supérieurs au seuil de 35 Mg ha-1.Pour cela, ils doivent connaître les doses d’engrais à appliquer

pour atteindre cet équilibre. D’où la nécessité d’effectuer des recherches additionnelles sur la sensibilité conjointe des rendements et des balances nutritives à la fertilisation afin de faire des recommandations d’engrais.

                                       

(42)

Conclusion

Cette étude a permis d’établir des normes nutritives foliaires dans la canneberge en utilisant de nouvelles méthodes de diagnostic nutritif. Les données de concentrations foliaires ont été transformées en indices non biaisés de balances nutritives (ilr). Des ilr standards ont été définis à partir de la sous-population équilibrée à haut rendement (> 35 Mg ha-1).

Les ilr, valeurs non biaisées utilisées à des fins de diagnostic, ont permis de générer des concentrations plus familières pour apprécier les résultats en termes de pénurie, d’excès, de carence ou d’adéquation nutritive. Toutefois, seuls les intervalles de concentrations pour le K et le N sont fiables vu que les fertilisations K et N sont les seules auxquelles la culture a répondu. Pour les autres éléments, les intervalles caractérisent de bons rendements sans nécessairement montrer des valeurs critiques.

Cette méthode de diagnostic exclut les cas de consommation de luxe et de contamination nutritive des intervalles. Ainsi, ces derniers sont plus restreints que les intervalles de concentrations de la littérature. En plus, les différences entre les intervalles obtenus et ceux de la littérature reflètent les conditions édaphiques locales et la gestion de la fertilisation.

Les spécimens à faible rendement (TP) ont montré des concentrations en K et Mg faibles par rapport aux spécimens à haut rendement (TN). Des mesures correctives devraient donc viser ces éléments afin d’équilibrer principalement les balances [Ca | Mg] et [K | Ca, Mg] qui constituaient les principales balances limitantes à l’obtention d’un bon rendement (> 35 Mg ha-1). Ces mesures correctives peuvent toutefois

influencer toutes les balances incluant les éléments K et Mg. Il est donc impératif de confirmer leurs effets par expérimentation.

Bien que cette étude fournisse des intervalles de balances nutritives et de concentrations pour obtenir de bons rendements, elle n’indique pas les doses d’engrais à appliquer pour un équilibre nutritif. D’ailleurs, la culture n’a pas répondu à la majorité des fertilisations (P, Mg, B, Cu). Une étude additionnelle sur la sensibilité conjointe des rendements et des balances nutritives à la fertilisation devrait être menée afin de recommander les doses d’engrais pour atteindre l’équilibre nutritif.

Figure

Figure 1.- Contenus saisonniers en azote et en potassium dans les tissus de canneberge  au Massachussetts (DeMoranville, 1992)
Tableau 1: Intervalles de suffisance nutritive des tissus de canneberge
Tableau 2: Recommandations en azote, phosphore et potassium au Québec (Parent et  Gagné, 2010)
Tableau 3: Structure des traitements de l'expérience
+7

Références

Documents relatifs

(Klimas et Patarca, 2001: p 75) A partir de ces définitions, nous pouvons confirmer que le sens donné à la fatigue nerveuse rejoint l’idée de &#34;Colez&#34; ce dernier affirme que

Les moyens consacrés à la vie étudiante sont en hausse de 134 M € par rapport à 2020, dont plus de 80 M € seront consacrés aux bourses sur critères sociaux (avec en

Une étude a été réalisée par le Conservatoire d’espaces naturels en 2014 pour déterminer les différentes voies de traitement à privilégier pour les déchets

de cheptel : du Danemark à la Flandre belge en passant par les Pays-Bas et le nord-ouest de l’Allemagne, dans l’ouest de la France, dans le nord de l’Italie et dans le nord-est

On dit souvent que les joueurs de tennis ont un bras plus court que l’autre.. 1 Note les deux mots qui se prononcent de la

Le but essentiel est de donner à l’étudiant les bases nécessaires au raisonnement d’une fertilisation minérale.

La mycorhization des plantes forestières en milieu aride et semi-aride et la lutte contre la désertification dans le bassin méditerranéen.. Zaragoza

À l’occasion de la prochaine Fête de la science les 12 et 13 octobre prochain, le Muséum national d’Histoire naturelle propose un week-end d’événements gratuits au Jardin