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Biodiversité et gestion forestière, quels enjeux ?

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LES INFOS DE RND I 2ÈME TRIMESTRE 2018

REGARD FORESTIER

UN CONCEPT D’ACTUALITÉ

L’exercice en vaut la peine. Interrogez un quidam où que vous vous trouviez  quant à savoir quel est son rapport à la forêt ou comment il perçoit le rôle de la forêt. Il est vraisemblable que les aspects récréatifs et la biodiversité soient cités avant la production ligneuse. A priori ce constat rentre dans les tendances fortes de la perception actuelle de la forêt et d’une politique forestière affichant clairement sa volonté de développer la multifonctionnalité. Mais avec quel poids pour chaque usage ou fonction ? Il est en effet très tentant au nom de considérations économiques, environnementales, écologiques ou sociologiques, d’aspirer à voir celles-ci occuper, à titre propre, un champ très large de l’espace dévolu à la forêt. Se pose donc, comme déjà évoqué dans la note publiée précédemment traitant de la gestion durable et de la

multifonctionnalité (Les Infos de RND, 3ème trimestre 2017),

la question de savoir comment gérer celle-ci sur le terrain au mieux des attentes de tous les acteurs concernés. C’est sans conteste le cas pour la biodiversité.

A BIEN PESER…

Si ce ne sont les réserves intégrales et des étendues ciblées de territoire à haute valeur biologique et faisant l’objet de mesures assez drastiques de protection, la biodiversité ne peut cependant devenir un objectif à atteindre en termes de maximalisation vs d’optimisation sous peine de constituer un obstacle à l’équilibre entre les divers aspects de la gestion forestière.

On peut évidemment tenir le même raisonnement pour d’autres « utilités » mais la tendance actuelle est de placer la biodiversité à un haut degré de préoccupation relayé en cela par les incertitudes, voire craintes, relevant des changements climatiques et une attention beaucoup plus forte à l’égard des causes environnementales.

Cela peut conduire en matière de biodiversité à confondre biodiversité «  remarquable  » et biodiversité «  ordinaire  » pourtant liées à des degrés différents de prise en compte. Dans le champ de la biodiversité les domaines des possibles est immense. Les objectifs sont bien identifiés pour ce qui concerne la biodiversité remarquable. Espèces protégées, sites Natura 2000 se réfèrent à des documents de gestion fixant des objectifs à long terme déclinés eux-mêmes en objectifs opérationnels visant le court ou moyen terme.

Pour ce qui regarde la biodiversité ordinaire ou générale le champ d’application est moins bien défini et dépend largement de sensibilités par exemple tournées vers une volonté de stopper l’érosion d’espèces et de milieux biologiquement riches. Pour ce faire il est souhaitable sur un plan opérationnel lié aux écosystèmes et au patrimoine génétique d’opérer des choix à l’échelle de territoires, reflets de caractéristiques écologiques et socio-économiques, et des actions humaines. La biodiversité peut, suite à certaines pratiques et accidents touchant l’intégrité de la forêt, être menacée et il convient de limiter les risques. Il serait utopique de vouloir la maintenir ou la protéger partout avec la même intensité sous peine de se heurter à des difficultés de type économique pouvant mettre la fonction de production ligneuse en difficulté (exploitation forestière par exemple).

ECOLOGIE ET ÉCONOMIE

A vrai dire la biodiversité est un concept dont l’existence et le fonctionnement se situent entre nature et société et on avance régulièrement l’idée selon laquelle son maintien conditionne aussi celui des écosystèmes au cours du temps. Il n’est pas rare d’entendre dire que «  seule une forêt écologique est une forêt économique  » dès lors qu’elle se

QUELS ENJEUX ?

BIODIVERSITÉ ET

GESTION FORESTIÈRE,

Bois mort sur pied.

Forêt mélangée d’âges multiples.

Professeur ordinaire émérite rattaché à l’Université de Liège - Gemboux Agro-Bio Tech, et chargé de mission pour l’ULiège, Jacques Rondeux a consacré toute sa vie au développement de notre patrimoine forestier.

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utilisé à l‘échelle du peuplement forestier et est établi à partir

d’observations relatives à 10 facteurs généralement considérés comme favorables à l’expression

directe ou indirecte, pour nos régions, de leur diversité biologique interne. Ils concernent, au travers de 3 cotations liés à leur importance, 7 variables liées à la gestion et 3 au contexte

des milieux concernés.

Les premières ont trait au nombre de genres autochtones (végétaux) rencontrés, au nombre de strates ligneuses et herbacées, à la moyenne par hectare de gros bois morts (à terre et sur pied), à la moyenne par hectare du nombre d’arbres porteurs d’au moins 1 micro-habitat par type de micro-habitat, au pourcentage de surface occupée par une végétation spécifique des milieux ouverts.

Les secondes portent sur la continuité de l’état boisé (évalué à partir des cartes de Ferraris, par exemple), l‘importance des milieux aquatiques et celle des milieux rocheux.

La sommation des cotes obtenues donne une valeur relative (en %) du potentiel de biodiversité.

POUR ALLER DE L’AVANT

L’intégration de la biodiversité dans les actes de gestion forestière suggère, pour l’essentiel, de prêter attention aux quelques considérations suivantes :

> promouvoir cette intégration via la mise en application de

pratiques sylvicoles qui lui sont favorables ou évitent de trop l’agresser (choix d‘essences et de structures de peuplements, modes de régénération et d’exploitation) ;

> différencier davantage les types d’actions à mener en matière

de protection de  la biodiversité ordinaire ou remarquable ;

> évaluer aux différentes échelles d’action (territoire, massifs,

parcelles, peuplements) les effets de mesures prises sur l’évolution de la forêt, sur les fonctions attendues et plus précisément sur celle de production de matière ligneuse et de la même manière évaluer l’évolution des diverses pratiques sylvicoles en termes d’incidences sur les fonctions « environnementales » et « sociales» de la forêt » ;

> gérer l’équilibre forêt-gibier, en particulier les surdensités

dont l’impact sur la biodiversité ne peut être passée sous silence ;

> veiller à mieux inscrire les objectifs et préoccupations de

conservation des milieux forestiers fortement anthropisés dans une dynamique non sectorielle et intégrer les orientations retenues et/ou préconisées dans des documents de gestion à créer ou à compléter ;

> mieux informer et aider les propriétaires, en particulier privés,

dans l’application sur le terrain de mesures recommandées (correctives et anticipatives) et tendre vers une simplification des nombreuses procédures administratives.

Jacques Rondeux développe dans des conditions respectueuses des conditions

et potentialités stationnelles et se caractérise par une grande biodiversité. Mais ne nous y trompons pas  : la diversité biologique est évolutive exprimant ainsi les influences subies par les écosystèmes forestiers. Il serait illusoire de vouloir la maintenir envers et contre tout et surtout partout. Il sera préférable de parler d’assistance sous peine de sanctuariser le concept et d’en inférer qu’il est un but à atteindre. La forêt étant un espace où la biodiversité est plus naturellement présente que dans des écosystèmes ou milieux davantage dominés par l’homme, la tendance serait de la mettre de plus en plus en avant - en Wallonie les sites Natura 2000 se situent à raison de plus de 70 % en forêt ! - au point pour le forestier d’être un peu considéré comme celui qui devrait «  laver plus blanc que blanc  » et appelé à compenser une certaine forme d’incurie politique tant préventive que curative se traduisant par l’absence ou la faiblesse de mesures à l’égard d’autres milieux aussi concernés par la biodiversité.

MESURER LA BIODIVERSITÉ

Davantage intégrer la biodiversité dans la gestion forestière participe largement de la multiplicité des usages mais cela implique qu’elle puisse être évaluée ou quantifiée pour jouer un rôle d’indicateur capable de traduire l’impact de mesures sylvicoles, l’incidence des conséquences prévisibles des changements climatiques et aussi les mesures inhérentes à la politique forestière en cours ou projetée.

Eu égard à la complexité même de la biodiversité et à tous les compartiments de la vie d’un écosystème qu’elle est censée représenter, son évaluation est bien plus complexe que le dénombrement par exemple d’une liste d’espèces ou que la détermination de la quantité de bois mort. On préférera utiliser des méthodes d’évaluation indirecte au travers d’indicateurs. Leur mise en œuvre et surtout leur suivi doivent idéalement tenir compte des besoins des utilisateurs en première ligne (gestionnaires) et d’autres acteurs tels que naturalistes et scientifiques.

L’INDICE DE BIODIVERSITÉ

POTENTIELLE

L’indice de biodiversité potentielle (IBP) est un outil qui permet assez facilement, mais de manière globale, au gestionnaire forestier d’identifier la capacité d’accueil en espèces et communautés végétales du milieu forestier. Il est

Site Life - zone humide en bordure de forêt.

Photos prises dans la forêt domaniale du Grand Bois de Vielsalm gérée selon le protocole PEFC - J. Rondeux

Larrieu L., Gonin P. [2010] - L’indice de biodiversité potentielle : un outil pratique au service de la biodiversité ordinaire des forêts. Forêt-Entreprise n°190, 52-56.

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EN WALLONIE,

LES SITES NATURA

2000 SE SITUENT

À RAISON DE PLUS

DE 70 % EN FORÊT.

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