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L'appropriation d'une question socialement vive environnementale portant sur l'exploitation de l'uranium par des enseignantes et enseignants de sciences de la vie et de la terre du secondaire au Gabon : rapport à l'expertise scientifique et aux sciences,

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Academic year: 2021

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Texte intégral

(1)

L’APPROPRIATION D’UNE QUESTION SOCIALEMENT

VIVE ENVIRONNEMENTALE PORTANT SUR L’EXPLOITATION DE

L’URANIUM PAR DES ENSEIGNANTES ET ENSEIGNANTS DE

SCIENCES DE LA VIE ET DE LA TERRE DU SECONDAIRE AU GABON

RAPPORT À L’EXPERTISE SCIENTIFIQUE ET AUX SCIENCES, DISPOSITIONS À L’ENSEIGNEMENT

Thèse

Christophe Ndong Angoue

Doctorat en didactique

Philosophiæ doctor (Ph.D.)

Québec, Canada

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(3)

iii

RÉSUMÉ

Cette thèse vise à documenter le rapport à l’expertise scientifique et aux sciences d’enseignantes et enseignants de sciences de la vie et de la terre (SVT) du secondaire au Gabon placés en situation d’analyse d’une question socialement vive environnementale (QSVE) mobilisant des experts scientifiques au sujet des conséquences environnementales et sanitaires de l’exploitation de l’uranium au Gabon. Elle s’intéresse également à leurs dispositions à enseigner de telles questions. Dans une perspective socio-épistémologique et didactique, elle s’inscrit en prolongement d’études développées dans le champ des questions socialement vives (QSV) qui invitent à mieux appréhender les enjeux contemporains portant sur l’usage de l’expertise scientifique et sur la prise en charge à l’école des questions de société. Cette thèse mobilise également le cadre théorique du rapport au savoir selon une perspective socio-anthropologique pour interroger la relation de sens des enseignants vis-à-vis des arguments d’experts scientifiques sur une question sensible. Grâce à une analyse thématique des données, la manière dont cinq (5) enseignants (es) se sont approprié cette QSVE durant des entretiens individuels en deux temps (10 entretiens) a été examinée. Le premier entretien a consisté à cerner leurs idées de départ sur la notion d’expertise scientifique et la nature des sciences, sur l’enseignement du thème étudié et sur la question de l’expertise scientifique dans la QSVE étudiée. Le deuxième entretien, plus spécifique, a permis de poursuivre la réflexion à partir d’une cartographie présentant les arguments des principaux experts et acteurs de cette controverse. Les portraits épistémologiques qui se dégagent illustrent que leur rapport à l’expertise scientifique et aux sciences lorsqu’il est contextualisé en fonction d’une question précise tend à valoriser la position de certains experts plutôt que d’autres, tout en mobilisant une conception des sciences plutôt réaliste. En outre, ces derniers bien que disposés dans leur majorité à enseigner les QSVE semblent toutefois relever diverses contraintes (programmes chargés, référents peu nombreux, etc.) ne permettant pas leur prise en charge effective. Ces résultats apportent ainsi un éclairage riche et nuancé sur la manière dont les enseignants face à une QSVE précise se représentent le rôle des experts scientifiques dans la gouvernance des questions sensibles, mais aussi leurs rôles dans la prise en charge scolaire de ces questions.

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v

ABSTRACT

The purpose of this doctoral thesis is to study Gabonese Science teachers’ relationship to scientific expertise and to sciences in general, when faced with analysing and environmental socio-scientific issue (ESSI) that has galvanized the scientific community, such as the health and environmental consequences of mining uranium in Gabon. This study also seeks to discover how inclined Gabonese science teachers teach such issues. From a didactic and socio-epistemological perspective, this study follows on from previous research on socio-scientific issues (SSI), which seek to gain insights into contemporary issues on the various uses of scientific expertise and how societal issues are being approached at school. The theoretical framework of this thesis also uses a socio-anthropologic perspective on the relationship to knowledge in order to examine teachers’ conceptions of scientific experts’ positions on a particular controversial issue. A thematic analysis of qualitative data was used to study how five (5) teachers approached the ESSI provided during the two-part one-on-one interviews (for a total of 10 interviews). The first interview consisted of identifying the teachers’ initial conceptions of scientific expertise, the teaching of the theme being studied and the scientific expertise invested in the ESSI being studied. The second interview enabled the research to continue on the basis of mapping the various positions of the main experts and key players in this controversy. The resulting epistemological profiles revealed that, whenever the teachers were asked to describe their relationship to scientific expertise and the sciences in the context of a specific issue, they tended to value the position of certain experts rather than others, all the while assuming a more realistic view of sciences. Moreover, although the great majority of these teachers were readily willing to teach the ESSI, they however seemed to fall under various constraints (busy schedules, lack of resources…) that kept them from developing an effective approach for teaching them. In this way the results from the research were able to shed a rich and nuanced light on how teachers, when faced with having to teach a particular ESSI, were able to better grasp the role of scientific experts in governing how controversial issues are presented in society, as well as their own role in teaching ESSI.

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vii

TABLE DES MATIÈRES RÉSUMÉ……… ... iii

ABSTRACT….. ... v

TABLE DES MATIÈRES ... vii

LISTE DES TABLEAUX ... xi

LISTE DES FIGURES... xiii

LISTE DES ACRONYMES ... xv

DÉDICACE…….. ... xvii

ÉPIGRAPHE……. ... xix

REMERCIEMENTS ... xxi

INTRODUCTION... ………...1

I.1 Le contexte d’émergence de mes préoccupations de recherche... 1

I.2 Le plan de la thèse ... 3

CHAPITRE 1 : LA PROBLÉMATIQUE ... 7

1.1 L’émergence des questions de société dans le programme de sciences de la vie et de la terre au Gabon : une volonté d’éducation scientifique citoyenne ... 9

1.1.1 Le programme d’éducation en matière de population (EmP) ... 9

1.1.2 L’étude du thème de l’exploitation des ressources naturelles dans le programme de SVT au Gabon ... 11

1.2 L’étude des questions de société sous l’angle des QSV: quelques repères théoriques 16 1.2.1 Pour une didactique des questions socialement vives ... 16

1.2.2 Les enjeux épistémologique et didactique de l’enseignement des QSV au secondaire... 19

1.2.3 Synthèse partielle ... 22

1.3 La situation de l’exploitation de l’uranium en Afrique francophone ... 23

1.3.1 L’industrie uranifère dans le monde : Quelques généralités ... 23

1.3.2 L’exploitation de l’uranium en Afrique francophone: un choix de développement économique complexe et controversé ... 26

1.3.3 Le cas particulier de l’exploitation de l’uranium à Mounana au Gabon ... 33

1.4 L’usage de l’expertise scientifique en contexte de controverses socioscientifiques ... 38

(8)

1.4.2 Les différents modèles d’expertise scientifique : entre « science faite » et « science en

train de se faire » ... 44

1.4.3 Le mouvement STS et la notion d’expertise scientifique ... 51

1.4.4 Synthèse partielle ... 54

1.5 L’appropriation des QSVE par les enseignants de sciences : un état de la question ... 55

1.5.1 Des conceptions traditionnelles des sciences en œuvre dans l’enseignement des QSV . 56 1.5.2 Des dispositions contrastées à s’engager dans le traitement didactique des QSV ... 56

1.5.3 Autour des pratiques enseignantes ... 58

1.5.4 La question du rapport à l’expertise scientifique et aux sciences en contexte de controverses socioscientifiques ... 60

1.5.5 Des études sur les questions socialement vives dans le contexte gabonais ... 66

1.5.6 Synthèse partielle ... 67

1.6 Les questions de recherches ... 68

CHAPITRE 2 : LE CADRE THÉORIQUE... 71

2.1 La notion de rapport au savoir ... 71

2.1.1 La perspective clinique ou psychanalytique ... 72

2.1.2 La perspective microsociologique ou socio-anthropologique ... 75

2.1.3 La perspective anthropologique de Chevallard ... 80

2.1.4 La perspective socio-anthropologique en éducation aux sciences... 82

2.2 Le modèle d’écologie des controverses socioscientifiques ... 85

2.2.1 La question des références ... 87

2.2.2 À propos des relations que les enseignants et les élèves ont avec les savoirs... 87

2.2.3 Les dispositions à l’engagement dans l’étude des controverses ... 88

2.2.4 L’apport du modèle dans notre étude... 89

2.3 L’articulation des orientations théoriques identifiées ... 91

CHAPITRE 3 : LE CADRE MÉTHODOLOGIQUE ... 93

3.1 L’approche de recherche : un choix tributaire du paradigme sous-jacent ... 93

3.2 La production des données ... 95

3.2.1 Le recours à une cartographie de controverse ... 95

3.2.2 La descente sur le terrain et le choix des participants ... 99

3.2.2 Des entretiens individuels semi-dirigés en deux temps ... 102

3.3 Le format d’analyse : une analyse thématique ... 104

3.3.2 Quelques considérations sur l’analyse thématique ... 104

(9)

ix

CHAPITRE 4 : L’ANALYSE DES DONNÉES ... 115

4.1 Le premier niveau d’analyse ... 116

4.1.1 Le portrait de Bertin ... 116

4.1.2 Le portrait de Gaston ... 165

4.1.3 Le portrait d’Abdou ... 177

4.1.4 Le portrait de Jeanne ... 187

4.1.5 Le portrait d’Annabelle ... 199

4.2 Bilan général du premier niveau d’analyse ... 210

4.2.1 Synthèse des thèmes identifiés ... 210

4.2.2 Bilan général du rapport à l’expertise scientifique et aux sciences ... 218

4.2.3 Bilan général des dispositions à l’engagement des enseignants dans le traitement didactique de la QSVE ... 219

4.3 Le deuxième niveau d’analyse ... 221

4.3.1 Les aspects communs du rapport à l’expertise scientifique et aux sciences (sans la cartographie) ... 221

4.3.2 Les aspects singuliers du rapport à l’expertise scientifique et aux sciences (sans la cartographie) ... 225

4.3.3 Les aspects communs du rapport à l’expertise scientifique et aux sciences (avec la cartographie) ... 227

4.3.4 Les aspects singuliers du rapport à l’expertise scientifique et aux sciences (avec la cartographie) ... 232

4.3.5 En guise de résumé ... 233

4.3.6 Les aspects communs et singuliers des dispositions enseignantes face à l’enseignement du thème étudié et de la QSVE s’y rattachant ... 234

4.3.7 En guise de résumé ... 249

CHAPITRE 5 : DISCUSSION DES RÉSULTATS ... 251

5.1 Retour sur le cadre théorique et méthodologique ... 252

5.1.1 La pertinence de la notion de rapport au savoir et du modèle d’écologie des controverses socioscientifiques ... 252

5.1.2 Les limites méthodologiques de cette étude ... 253

5.2 Retour sur les résultats clés de cette étude ... 254

5.2.1 À propos du rapport à l’expertise scientifique et aux sciences des enseignants (sans cartographie) ... 254

5.2.2 À propos du rapport à l’expertise scientifique et aux sciences des enseignants (avec la cartographie) ... 255

5.3 À propos des dispositions à l’engagement des enseignants dans le traitement didactique des QSVE ... 264

(10)

5.3.1 Des enseignants disposés à enseigner les QSVE et soucieux de leur trouver une niche

écologique dans leur cours de sciences ... 264

5.3.2 La scolarisation des QSVE : obstacles et enjeux ... 266

5.3.3 À propos de la posture de neutralité ... 269

5.4 L’apport de la cartographie de la QSVE dans notre étude et sa pertinence dans l’enseignement des QSVE au secondaire ... 270

5.5 En guise de conclusion ... 271

CONCLUSION….. ... 273

C.1 Les principaux résultats et leurs enseignements ... 273

C.2 L’importance de la cartographie des QSVE dans notre étude ... 276

C.3 Regard critique sur la thèse et quelques considérations sur les perspectives de recherche... 276

OUVRAGES CITÉS ... 279

ANNEXE 1 : FICHE DE RENSEIGNEMENTS ... 296

ANNEXE 2 : LE CANEVAS D’ENTRETIEN ... 297

ANNEXE 3 : PRÉSENTATION DÉTAILLÉE DU CURRICULUM DE SVT DU SECONDAIRE AU GABON ... 299

(11)

xi

LISTE DES TABLEAUX Tableau 1 : Les dix premiers pays producteurs d'uranium pour la période 2003-2012 (production en tonnes d’uranium : tU) ... 25

Tableau 2 : Les dix grands groupes producteurs d'uranium... 25

Tableau 3 : Les trois modèles de l'expertise adaptés de Joly (2007) ... 50

Tableau 4 : Le profil des trois enseignants et des deux enseignantes ayant participé à la recherche ... 102

Tableau 5 : Les informations sur les entretiens individuels réalisés ... 104

Tableau 6 : Quelques conventions de transcription ... 107

Tableau 7 : L’exemple d'en-tête ... 107

Tableau 8 : Les dimensions descriptives des propos des enseignants ... 109

Tableau 9 : L’illustration d'une phase de repérages de thèmes ... 112

Tableau 10: Rapport à l’expertise scientifique et aux sciences de Bertin (sans la cartographie) .... 127

Tableau 11 : Le traitement didactique du thème étudié vu par Bertin (sans la cartographie) ... 136

Tableau 12 : Rapport à l’expertise scientifique et aux sciences de Bertin (avec la cartographie) .. 151

Tableau 13 : Le traitement didactique de la QSVE vu par Bertin après examen de la cartographie 162 Tableau 14 :Rapport à l’expertise scientifique et aux sciences de Gaston (sans cartographie) ... 166

Tableau 15 : Le traitement didactique du thème étudié vu par Gaston (sans la cartographie) ... 169

Tableau 16 : Rapport à l’expertise scientifique et aux sciences de Gaston (avec la cartographie) 171 Tableau 17 : Le traitement didactique de la QSVE vu par Gaston (avec la cartographie) ... 173

Tableau 18 : Rapport à l’expertise scientifique et aux sciences d’Abdou (sans cartographie) ... 178

Tableau 19 : Le traitement didactique du thème étudié vu par Abdou (sans la cartographie) ... 180

(12)

Tableau 21 : Le traitement didactique de la QSVE vu par Abdou (avec la cartographie) ... 184

Tableau 22 : Rapport à l’expertise scientifique et aux sciences de Jeanne (sans la cartographie) . 189

Tableau 23 : Le traitement didactique du thème étudié vu par Jeanne (sans la cartographie) ... 191

Tableau 24 : Rapport à l’expertise scientifique et aux sciences de Jeanne (avec la cartographie) 193

Tableau 25 : Le traitement didactique de la QSVE vu par Jeanne (avec la cartographie)... 195

Tableau 26 : Rapport à l’expertise scientifique et aux sciences d’Annabelle (sans cartographie) ... 200

Tableau 27 : Le traitement didactique du thème étudié vu par Annabelle (sans la cartographie) ... 202

Tableau 28 : Rapport à l’expertise scientifique et aux sciences d’Annabelle (avec la cartographie)

... 204

(13)

xiii

LISTE DES FIGURES

Figure 1 : Le modèle d'écologie des controverses socioscientifiques ... 86 Figure 2 : Les liens entre les différents éléments théoriques identifiés ... 92 Figure 3 : La cartographie de la controverse de l'exploitation de l'uranium au Gabon ... 98

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LISTE DES ACRONYMES

AGSSN : Agence gabonaise de sûreté et de sécurité nucléaire AIEA : Agence internationale de l’énergie atomique

APC : Approche par les compétences

CATRAM : Cercle des anciens travailleurs miniers de Mounana CEA : Commissariat à l’énergie atomique

CNPPRI : Centre national de prévention et de protection contre les rayonnements ionisants COMUF : Compagnie des mines d’uranium de Franceville

CREF : Centre de recherche Éducation et Formation

CRIIRAD: Commission de recherche et d’informations indépendantes sur la radioactivité

CRSH : Conseil de Recherches en Sciences Humaines du Canada

COGÉMA : Compagnie générale des matières nucléaires DD : Développement durable

EmP : Éducation en matière de Population

ENFA : École nationale de formations agronomiques ENS : École Normale Supérieure

ESCOL : Éducation, Socialisation et Collectivités Locales IUFM : Institut Universitaire de Formation des Maîtres IPN : Institut Pédagogique National

MEN: Ministère de l’Éducation Nationale NISA: Nuclear and Industrial Safety Agency ONG : Organisation non gouvernementale

PCBF : Programme canadien des bourses de la francophonie QSV : Question socialement vive

QSVE : Question socialement vive environnementale QSSV : Question scientifique socialement vive STS : Sciences Technologie Société

SVT : Sciences de la vie et de la terre

(16)

URSS : Union des Républiques Socialistes Soviétiques WNA: World Nuclear Association

(17)

xvii

DÉDICACE

Je dédie cette thèse à mon père Samuel Ndong Angoué et à ma mère Zang Clémentine qui se sont sacrifiés pour que je sois l’homme que je suis aujourd’hui.

(18)
(19)

xix

ÉPIGRAPHE

[…] à vouloir éliminer le conflit, nous éludons l’opportunité de le dépasser. Nous sacrifions

un meilleur possible au profit d’une démocratie du moindre mal

Christophe Pacific

(2011)

Préface de l’ouvrage Consensus/Dissensus

Principe du conflit nécessaire

(20)
(21)

xxi

REMERCIEMENTS

Au terme de cette recherche doctorale, je tiens à remercier tous ceux et toutes celles qui ont permis l’aboutissement de ce travail. Mes premiers remerciements vont à l’endroit de ma directrice de thèse,

Mme Barbara Bader, qui m’a encouragé à entreprendre cette aventure doctorale après avoir supervisé la rédaction de mon essai de maîtrise. Ses conseils, sa disponibilité, son regard critique et constructif sur mes productions, son sens aigu du travail bien fait, sa générosité, ses encouragements lorsque j’étais « au creux de la vague » ont grandement contribué à la finalisation de cette thèse. Je crois sincèrement que j’ai été hautement favorisé d’être son étudiant. Je voudrais également remercier Mme Chantal Pouliot qui a accepté malgré ses nombreuses charges d’être la co-directrice de cette étude doctorale. Ses remarques pertinentes et ses suggestions de lectures ont contribué à donner à ce travail plus de clarté et de pertinence sur le plan théorique et méthodologique. Je n’oublierais pas tous les autres membres du jury à commencer par Mme Renée Fountain qui a accepté de faire la prélecture de cette thèse et dont les suggestions ont grandement bonifié ce travail, puis Mme Virginie Albe qui a accepté de donner un avis externe à cette thèse depuis la France et Mme Sylvie Barma qui a accepté d’examiner également ce travail.

Je ne peux passer sous silence tous les organismes et institutions qui ont financé ce laborieux et exaltant travail. Premièrement, le Programme Canadien des Bourses de la Francophonie (PCBF) qui a financé une grande partie de ma formation doctorale en m’octroyant une bourse d’excellence. Je remercie également le Conseil de Recherches en Sciences Humaines du Canada (CRSH) via Mme Geneviève Therriault et Mme Barbara Bader et le Centr’ERE de l’UQAM de Mme Lucie Sauvé qui m’ont offert également des bourses pour finaliser ce travail. Je n’oublierais pas le Gouvernement gabonais qui a accepté ma mise en stage pour entreprendre ce projet doctoral.

Je remercie également les enseignantes et enseignants de sciences du secondaire au Gabon qui ont accepté de participer aux entretiens individuels. Leur disponibilité et leur engagement à prendre part à l’exercice de réflexivité que j’ai mis en place autour de mon objet de recherche a grandement rendu possible l’aboutissement de ce travail.

(22)

Que mes bien-aimés Jean et Violette, Tity et Odette, David et Sylvie, Viorel et Christine, Jean Jacques et Flavienne, Aude Alice et Yvan, Ludovic et Géraldine, Clotaire et Brigitte, Carine et Pierre René, Landry et Bijoux, Emmanuel et Danielle, Stéphane et Tatiana, Christian et Gracia, Franck, Jessy Ludovic, Alain Claude, Muriel, Liliane, Marie Claude, j’en oublie sûrement, trouvent ici également l’expression de ma gratitude pour leur soutien spirituel, matériel et financier.

Je pense aussi à toutes ces personnes que j’ai croisées à la tour des sciences de l’éducation et qui m’ont encouragé dans ce parcours notamment Vincent, Marta, Isabelle, Émilie, Nathalie, Carmen, Martine, Serge, Michaël. Une pensée spéciale pour tous mes compatriotes gabonais et particulièrement pour Gabin et Hugues Stéphane mes compagnons de lutte.

Pour finir, je tiens à remercier ma famille, tout d’abord ma chère et tendre épouse qui a accepté d’endurer toutes ces années d’absence et qui, via le téléphone ou Skype, m’a encouragé à donner le meilleur de moi-même pour finir cette thèse. Nous y sommes arrivés ensemble mon cœur. Je pense aussi à mes enfants Yona, Joanna, Gabrielle qui ont réussi à me rejoindre à Québec et ont donc vécu « en live » toutes les péripéties de cette fin de parcours doctoral. Je pense aussi à Samuela et Mathéo mes deux enfants restés au Gabon et que j’ai vu grandir de loin. Je ne finirais pas mon propos sans remercier profondément ma sœur Secondine et son mari Gaétan qui m’ont épaulé durant toutes ces années doctorales à Québec.

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1

INTRODUCTION

La démarche conduisant à des études doctorales est très souvent la résultante d’un certain nombre d’expériences personnelles, académiques, professionnelles. C’est à ce titre que de nombreux travaux de thèse (Bader, 2001; Demba, 2010; Jobin, 2011; et bien d’autres) qui s’inscrivent dans une approche socioconstructiviste de la production des savoirs s’engagent la plupart du temps à fournir aux lecteurs et aux lectrices des indices contextuels qui ont présidé au choix de leurs sujets d’étude. Je1 ne dérogerai pas à cette coutume, car il me semble opportun de présenter dans le cadre de cette

introduction avant d’expliciter le plan de ma thèse, quelques éléments contextuels qui m’ont permis d’amorcer une réflexion sur l’objet de cette étude.

I.1 Le contexte d’émergence de mes préoccupations de recherche

Les questionnements à l’origine de cette recherche doctorale s’inscrivent en prolongement du « dérangement épistémologique » dont j’ai été l’objet lors de mon premier contact avec le modèle socioconstructiviste de la production des savoirs lors de mes études2 de maîtrise en didactique des

sciences effectuées dans le cadre du partenariat entre l’École normale supérieure (ENS) du Gabon et l’Université Laval de Québec. En effet, avant cette expérience académique et comme la plupart des collègues ayant vécu cette aventure intellectuelle, j’envisageais en tant qu’enseignant, les sciences comme une activité, dont la visée principale était de produire des connaissances vraies, dénuées de toute forme de subjectivité et de socialité. Mon enseignement des sciences consistait

1 Pour ce faire, il apparait souvent opportun dans un tel contexte narratif de faire appel à une forme personnelle d’écriture que j’adopte volontiers dans ce propos introductif.

2 Cette première étape dans mon appropriation du modèle socioconstructiviste s’est achevée par la rédaction d’un essai de maîtrise en didactique des sciences dans lequel j’ai caractérisé l’orientation épistémologique du programme de sciences du secondaire au Gabon (Ndong Angoué, 2005). De cette caractérisation, il ressort globalement une orientation épistémologique du programme qui semblerait prôner une vision empiriste des sciences dans laquelle les savoirs scientifiques seraient dénués de toute influence sociale et les questions scientifiques traitées de manière décontextualisées selon la méthode scientifique (OHERIC c'est-à-dire Observation, Hypothèse, Expérimentation, Résultats, Interprétation, Conclusion) développée par Claude Bernard (1813-1878), bien qu’on y note un souci de responsabilisation des élèves face aux enjeux sociaux liés à l’impact environnemental du développement technoscientifique.

(26)

ainsi à travers cette vision étroite3 de l’activité scientifique à présenter aux élèves les théories

scientifiques c'est-à-dire les productions scientifiques comme des faits pouvant être saisis étape par étape à travers la méthode scientifique (OHERIC). À la suite de plusieurs lectures dans le cadre de cette maîtrise (Aikenhead, 1992; Fourez, Englebert-Lecomte & Mathy, 1997; Mathy, 1997; Fountain, 1998, 1999; Fourez, 2000; Bader, 2001; Fensham, 2002, et bien d’autres), j’ai été ainsi confronté à une autre conception des sciences plus sociale incluant le contexte social permettant une compréhension enrichie des processus en œuvre dans l’élaboration des théories scientifiques. Cette perspective théorique, ancrée dans le champ de recherche dénommé « Sciences Studies »4 (Pestre,

2006) encourageant un enseignement des sciences plus citoyen, permet en effet de considérer les sciences non pas seulement à travers leurs produits, mais aussi à travers les processus intrinsèques à ces productions5. Une telle conception de l’activité scientifique axée sur les processus sociaux m’a

ainsi conduit à m’intéresser aux controverses qui constituent pour plusieurs auteurs (Stengers, 1997; Bader, 2001; St-Louis, 2004), le « lieu naturel » de la production des faits scientifiques et dont l’étude en milieu scolaire permettrait d’engager les élèves dans des activités éducatives replaçant les savoirs dits scientifiques dans le contexte social de leur élaboration.

Fort de ce qui précède et au regard de la volonté institutionnelle d’intégrer les questions6 de société

dans le programme de sciences au Gabon pour une formation scientifique citoyenne des jeunes gabonais et gabonaises, je me suis alors intéressé particulièrement dans le cadre de cette recherche doctorale à la manière dont les enseignantes et enseignants de sciences du secondaire au Gabon s’approprient et traitent dans le cadre de leur cours de sciences de la vie et de la terre (SVT) une question locale vive portant sur l’exploitation de l’uranium dont la particularité est de mobiliser à la

3 Cette conception de l’activité scientifique axée principalement sur les produits des sciences conduit notamment aux dires de plusieurs auteurs (Mathy, 1997; Knain, 2001) à renforcer en milieu éducatif en l’occurrence dans les manuels scolaires et les programmes d’enseignement, une image mystique des sciences occultant les contextes et les processus qui président à la construction des connaissances scientifiques.

4 Les « Sciences Studies » sont un champ de recherche en sociologie qui tente de rendre compte des dimensions sociales des sciences. Nous revenons sur ce champ de recherche dans notre problématique.

5 Cet ancrage sur les processus de l’activité scientifique permet d’envisager les énoncés scientifiques tout d’abord comme des propositions qui, à travers des débats et des controverses peuvent être soient abandonnées ou consolidées (St-Louis, 2004). Cette perspective permet ainsi de replacer les sciences et ses productions dans un contexte socio-historique et culturel précis permettant de mieux en saisir la pertinence sociale.

6 Parmi ces questions, on note celles relatives au développement durable, à la question du sida, aux risques sanitaires et industriels, etc.

(27)

3 fois des aspects scientifiques et sociaux dans une controverse entre experts autour des risques

environnementaux et sanitaires de cette exploitation. Il m’a paru en effet intéressant d’interroger les considérations épistémologiques et didactiques qui président au choix des enseignants à prendre en charge de telles questions en sachant qu’un tel enseignement dans une perspective citoyenne et émancipatoire, pourrait jouer un rôle majeur dans l’intégration des gabonais et des gabonaises dans le développement de leur économie, mais également dans le développement de leur capacité à porter un regard critique sur les enjeux nationaux et internationaux sur les questions énergétiques et environnementales.

I.2 Le plan de la thèse

Cette thèse s’articule autour de cinq chapitres. Le premier chapitre porte sur la problématique et permet de mettre en exergue le problème éducatif et social en lien avec la question de l’exploitation de l’uranium au Gabon. Dans ce chapitre, je tente premièrement de replacer cette question autour des enjeux socio-éducatifs gabonais et contemporains portant sur l’enseignement des questions de société et plus précisément des questions socialement vives (QSV). Ensuite, je dépeins le contexte particulier de l’exploitation de l’uranium en Afrique francophone et particulièrement au Gabon et au Niger marqué par des enjeux politiques, économiques et environnementaux. Ce qui me permettra de souligner la complexité et la vivacité de la question socialement vive environnementale (QSVE) portant sur les conséquences de l’exploitation de l’uranium au Gabon. Par la suite, je problématise la notion d’expertise scientifique au regard des différentes perspectives qui tentent de mettre en lumière la complexité de sa caractérisation notamment en contexte de prise de décision sur une controverse socioscientifique. Je me positionne ensuite sur la nécessité de placer la question de l’expertise scientifique à la croisée d’autres formes d’expertise pour une prise de décision enrichie sur une question sociale complexe. Avant d’énoncer les questions de recherche qui orientent cette étude, je fais le compte rendu des travaux qui se sont intéressés à la manière dont les enseignants s’approprient les QSVE dans différents contextes. Ce qui me conduira à mieux expliciter l’originalité de cette étude.

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Le deuxième chapitre de cette thèse est consacré au cadre théorique. Dans cette section, je mobilise la notion de rapport au savoir et le modèle d’écologie des controverses socioscientifiques. Autour de la notion de rapport au savoir, je présente les différentes perspectives données à cette notion en didactique et je me prononce pour la perspective microsociologique ou socio-anthropologique (Charlot, 1997; Maury & Caillot, 2003). Cette perspective me permettra d’envisager la déclinaison de cette notion en termes de rapport à l’expertise scientifique et aux sciences au regard des recherches en didactique des sciences (Venturini, 2007; Pouliot, 2007). Le rapport à l’expertise scientifique et aux sciences que cette recherche privilégie sera alors défini comme une relation de sens vis-à-vis des processus, des situations et des objets d’enseignement et me permettra alors de mieux comprendre l’expérience enseignante face à une QSVE qui interpelle sur le plan social. Le modèle d’écologie des controverses socioscientifiques (Albe, 2009) me permettra ensuite de mettre en perspective les dispositions enseignantes à l’engagement dans le traitement didactique des QSVE notamment à travers la dimension épistémologique et la dimension de l’activité du groupe classe. Le troisième chapitre portera sur les orientations méthodologiques qui ont présidé aux choix du format d’investigation. Ces choix ont notamment été gouvernés par la posture épistémologique socioconstructiviste qui traverse cette thèse et par le désir de permettre aux enseignants de s’exprimer librement sur les tenants et les aboutissants de l’objet étudié à travers l’examen d’une cartographie portant sur la QSVE étudiée durant des entretiens individuels en deux temps. Mais aussi par le souci de rendre compte des portraits épistémologiques des enseignants et leurs dispositions à l’engagement dans l’enseignement des QSVE à partir d’une analyse thématique (Paillé & Mucchielli, 2008).

Le quatrième chapitre est consacré à la présentation détaillée des données produites. Cette présentation se fera selon un double mouvement. Le premier mouvement d’analyse permettra de présenter les différents portraits thématiques de chaque enseignant. Le deuxième mouvement d’analyse plus interprétatif soulignera les aspects communs et singuliers de ces portraits.

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5 Le cinquième chapitre va me permettre d’engager une discussion sur les résultats auxquels je suis

parvenu. Cette section me permettra notamment de répondre explicitement aux questions de recherche. Pour ce faire, je reviens sur le cadre théorique et méthodologique en soulignant la pertinence du recours à la notion de rapport au savoir et au modèle d’écologie des controverses socioscientifiques et je présente les limites de cette étude qui sont essentiellement d’ordre méthodologique. Ensuite, je précise le rapport à l’expertise scientifique et aux sciences des enseignants et leurs dispositions à s’engager dans le traitement didactique des QSVE au regard des résultats observés dans les travaux identifiés dans l’état de la question. Les résultats auxquels je suis parvenu illustrent des portraits épistémologiques nuancés et porteurs sur la manière de se représenter le rôle et la crédibilité des experts dans la gouvernance des risques dans une controverse et d’autre part la manière dont les enseignants envisagent la scolarisation des QSVE. En effet, tout en mobilisant une conception courante des sciences et de l’expertise scientifique, face à une controverse précise, les enseignants de sciences du secondaire mobilisés dans cette recherche vont mettre en perspective une expertise problématique sous l’influence de considérations sociales (corruption, conflits d’intérêts, etc.) et souligner le caractère incertain des savoirs produits dans un tel contexte par certains experts scientifiques. En outre, ils vont accorder une crédibilité aux experts scientifiques en fonction de leur organisme d’affiliation, mais également en fonction des valeurs de justice sociale qu’ils vont partager avec ces derniers. Sur le plan didactique, les enseignants vont déclarer manifester des dispositions favorables à traiter les QSVE dans leurs cours de sciences et en même temps souligner différentes contraintes (programmes chargés, supports didactiques inexistants, etc.) ne leur permettant pas d’enseigner de manière effective de telles questions.

En conclusion, je présente de nouveau les principaux résultats de cette thèse et leurs enseignements. Je souligne notamment la capacité des enseignants à se prononcer sur une QSVE surtout lorsque ces derniers sont placés face à une cartographie présentant une telle question. Dans ce contexte, ils mobilisent en effet, non seulement une conception positiviste des sciences et de l’expertise scientifique, mais également une conception plus sociale des sciences et de l’expertise. Sur le plan didactique, je montre l’importance accordée par les enseignants à la scolarisation des

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QSVE, mais aussi les contraintes qu’ils mettent de l’avant autour des programmes scolaires et de la forme scolaire. Je témoigne ensuite de l’importance des cartographies des controverses notamment dans leur capacité à permettre une meilleure explicitation des processus sociaux des sciences et de l’expertise scientifique par les enseignants. Je termine mes propos en présentant les perspectives de recherche qui s’ouvrent non seulement autour de l’utilisation des cartographies des QSVE comme dispositifs de réflexivité, mais également comme outil d’organisation d’informations sur les QSVE pour une participation démocratique aux débats sur les sciences en société par les acteurs éducatifs. Je montre également la nécessité de mieux expliciter le rapport à l’expertise scientifique et aux sciences des enseignants et la « niche écologique » des QSVE dans le cours de sciences en engageant par exemple les enseignants dans des débats encadrés (Simonneaux, 200, 2003).

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7

CHAPITRE 1 : LA PROBLÉMATIQUE

Ce millénaire est marqué sur le plan éducatif par une prise de conscience de la nécessité d'ancrer l'école aux réalités sociales contemporaines (Albe, 2009; Kagawa & Selby, 2010; Legardez & Simonneaux, 2011; Bencze & Alsop, 2014). Le leitmotiv est alors de proposer aux élèves à travers les différentes réformes curriculaires un enseignement intégré, contextualisé, rattaché à la vie quotidienne et visant leur formation citoyenne (Hasni & Lebeaume, 2010). Concernant plus spécifiquement l’éducation scientifique, il s’agit de « donner du sens au cours de sciences » (Mathy, 1997) par l’introduction de thématiques plus transversales en lien avec des approches novatrices telles que l’approche STS (sciences, technologies, société), l’approche environnement-DD (développement durable) (Giordan, 2010) et la mise en œuvre de pratiques éducatives en sciences soucieuses de protection environnementale et de justice sociale (Bencze & Alsop, 2014).

C'est dans ce contexte de renouveau curriculaire que l'enseignement des sciences de la vie et de la terre (SVT) et plus particulièrement de la géologie s'est enrichi au Gabon de thématiques en lien avec la gestion des ressources naturelles dans une visée de développement durable et dans la perspective du programme d’éducation en matière de population (EmP). L’étude de ces thématiques EmP permettrait de développer chez les élèves non seulement un sens des responsabilités dans la gestion des ressources naturelles et la préservation de l’environnement, mais aussi des capacités à établir des corrélations entre l’exploitation des ressources naturelles et le développement durable (Ministère de l’Éducation Nationale, Institut Pédagogique National & Programme Information-Éducation-Communication (IEC) multisectoriel, 1997/1998). Ce qui aboutirait à une meilleure compréhension par ces derniers des interactions entre populations-environnement-développement (MEN, IPN & Programme IEC-multisectoriel, 1997/1998).

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Cette éducation aux sciences citoyenne7 qui prend ainsi forme au Gabon sous le label d’une

éducation au développement durable (EDD) tente d’articuler les savoirs scolaires au contexte de vie des élèves concernant notamment l’exploitation des ressources naturelles, l’environnement, les risques environnementaux. En contextualisant ainsi l’enseignement des sciences, cette EDD se veut au Gabon un tremplin permettant d’établir une adéquation entre les exigences de développement économique de ce pays axées principalement sur l’exploitation de nombreuses ressources (pétrole, manganèse, uranium, etc.) dont regorge son sous-sol et la formation de citoyens conscients et responsables face aux enjeux environnementaux liés à un tel choix de développement. En effet, bien qu’il n’y ait pas à ce jour d’études d’impacts accessibles sur les répercussions de l’exploitation des ressources naturelles sur l’environnement au Gabon, certaines recherches tendent à montrer que celle-ci ne saurait se faire sans risque pour le milieu de vie et la santé des populations locales (Mombo, Moussavou-Makanga, Ntchandi-Otimbo & Agondogo, 2000) comme en témoigne la question de l’exploitation de l’uranium qui fait l’objet de notre étude et qui met en scène des polémiques entre experts scientifiques autour de la dangerosité radioactive de l’ancien site d’exploitation de cette ressource au Sud-est du Gabon. C’est pour cerner cette question sensible de l’exploitation des ressources naturelles et plus spécifiquement la question des conséquences environnementales et sanitaires de l’exploitation de l’uranium au Gabon que ce premier chapitre va tenter de montrer la pertinence sociale et scientifique de notre étude.

Il s’agira pour nous de dépeindre tout d’abord le contexte d’émergence des questions de société dans le programme de SVT au Gabon. Ensuite, l’enseignement de ces questions de société au secondaire sera arrimé aux préoccupations du champ éducatif des questions socialement vives (QSV). Puis la situation de l’exploitation de l’uranium au Gabon sera décrite en la replaçant dans le contexte général de l’exploitation de cette ressource dans le monde et particulièrement en Afrique francophone qui est articulée autour d’enjeux sociopolitiques, économiques et environnementaux.

7 Selon Albe (2011), deux visions extrêmes d’un continuum d’approches d’éducation aux sciences citoyenne sont identifiables à travers la littérature spécialisée. La première vision extrême consiste à « enseigner les contenus scientifiques pour eux-mêmes » sans lien avec le contexte social. Ici l’éducation scientifique se veut élitiste et vise la formation de futurs scientifiques. La deuxième vision qui s’inscrit plus dans la perspective d’une « science pour tous » (Fourez & Englebert-Lecompte, 1994; Fensham, 2002) consiste par contre en l’élaboration des savoirs scolaires en référence au contexte social. Dans cette perspective, on milite plus pour que tous les élèves développent des outils conceptuels pour comprendre les sciences, leur nature et leurs rôles dans la société.

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9 Ensuite, la notion d’expertise et plus spécifiquement celle d’expertise scientifique convoquée dans la

question de l’exploitation de l’uranium au Gabon sera problématisée pour montrer la complexité de sa mise en œuvre et de sa caractérisation lorsqu’il s’agit de se prononcer sur une question controversée dans laquelle la solution technoscientifique ne suffit pas. Pour finir et avant d’énoncer nos questions de recherche, nous tenterons d’établir un état de la question sur la manière dont les enseignants de sciences au secondaire dans des contextes divers s’approprient des questions de société comme celle qui nous concerne.

1.1 L’émergence des questions de société dans le programme de sciences de la vie et de la terre au Gabon : une volonté d’éducation scientifique citoyenne

1.1.1 Le programme d’éducation en matière de population (EmP)

Comme nous le soulignions ailleurs (Ndong Angoué, 2005), durant l’année scolaire 1997-1998, un programme intégré multisectoriel a été initié de manière expérimentale au premier cycle de l’enseignement secondaire au Gabon en partenariat avec l’UNESCO et le Fonds des Nations unies pour la population. Ce programme8 multisectoriel avait comme visée éducative d’introduire dans le

système éducatif gabonais l’éducation en matière de population (EmP) dans diverses disciplines scolaires, dont l’histoire-géographie, l’instruction civique et les sciences naturelles. La finalité de ce programme EmP était alors :

Le développement intégral de l’homme et de la femme, ainsi que la formation d’un citoyen conscient des interrelations entre les phénomènes démographiques et les facteurs de développement économique, social et culturel; aux fins de participer à la résolution des problèmes auxquels sont confrontés les individus, les familles et la collectivité (MEN, IPN & Programme IEC Multisectoriel, 1997/1998).

Il s’agissait ainsi de former des citoyens et des citoyennes dotés de capacité leur permettant d’appréhender les différents problèmes économiques, sociaux et culturels de leur communauté et de

8 La communauté internationale inquiète des répercussions de l’accroissement démographique des pays dits du « tiers monde » sur la qualité de vie de leurs populations et par conséquent sur leur « développement » va encourager la mise en place d’orientations curriculaires permettant d’apporter des solutions éducatives aux multiples problèmes rencontrés par les populations africaines en général et gabonaises en particulier (MEN, IPN & Programme IEC Multisectoriel, 1996/1997).

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participer au développement de leur pays. Pour ce faire, les élèves devaient d’une part « acquérir » des connaissances concernant les variables démographiques, la sexualité humaine, la santé, la reproduction, la vie familiale, l’écosystème et l’environnement et d’autre part, adopter des comportements responsables comme individu et membre de la communauté. Ces différentes thématiques EmP en lien avec l’éducation sexuelle, l’environnement, la nutrition seront alors articulées autour de contenus disciplinaires en géographie, en sciences naturelles et en éducation civique et devaient être dispensées suivant des approches méthodologiques participatives9 axées

sur l’investigation, la résolution de problèmes et la clarification des valeurs soutenues par des stratégies éducatives telles que les débats, les discussions, les jeux de rôles et de simulation. Par ses contenus et ses approches méthodologiques participatives, l’EmP se voulait ainsi un programme éducatif permettant d’établir des ponts10 entre l’école et la société gabonaise. Toutefois, malgré les

résultats probants11 de l’expérimentation du projet d’intégration de ce programme EmP, au cours de

l’année 2002, une note officielle12 du ministère de l’Éducation nationale gabonais va annoncer le

réaménagement du programme de sciences naturelles et la fin13 de la généralisation du programme

EmP dont quelques contenus allaient toutefois être maintenus dans les classes de 6e (première

9 Ces approches méthodologiques se présentent comme des démarches devant offrir aux enseignés non pas une ligne de conduites toute faite mais plutôt des informations pertinentes, des aptitudes et des dispositions pour cerner, identifier leurs problèmes, analyser les systèmes d’interaction qui les ont déterminé, imaginer des réponses possibles (MEN, IPN & Programme IEC Multisectoriel, 1996/1997).

10 Les auteurs tels que Dodo-Bouguendza et l’Institut Pédagogique National (2000, p. 42) vont souligner la démarche participative particulièrement intéressante adoptée dans la mise en place du programme EmP à savoir :

- l’analyse de la situation;

- l’identification des problèmes de population; - la sélection et l’organisation des contenus;

- l’examen des programmes et des manuels scolaires, et l’intégration des contenus; - l’élaboration de matériels didactiques;

- la validation des curricula et des matériels didactiques;

- la formation des enseignants expérimentateurs et des encadreurs pédagogiques; - la pré-expérimentation et l’expérimentation;

- l’évaluation de l’expérimentation.

11 Ces résultats semblaient probants parce que d’une part « la structuration des curriculums et l’utilisation de certains supports didactiques rendaient la tâche de l’enseignant plus aisée » et d’autre part il semble que les élèves se soient montrés plus intéressés par les cours de sciences que par le passé à travers ce programme (Dodo-Bouguendza & IPN, 2000, p. 42).

12 Arrêté ministériel nᵒ 000372 MEN/SG/DGEP du 26 septembre 2002.

13 Malgré les résultats probants de l’expérimentation EmP, on note toutefois à la suite de Mbazoghe-Owono (2012) que certaines difficultés vont entraver la généralisation de ce programme notamment sa diffusion limitée car très peu d’enseignants pouvaient disposer du format papier de celui-ci mais également son caractère pluridisciplinaire exigeant une approche globale des différentes problématiques étudiées et dans lesquelles les enseignants se sentaient moins compétents.

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11 année du secondaire au Québec) et de 4e (troisième année du secondaire au Québec). Ce

réaménagement va aboutir aussi à l’émergence de la discipline scolaire des « sciences de la vie et de la terre » (SVT) en lieu et place des « sciences naturelles ». À travers ce nouveau programme de SVT en vigueur depuis l’année scolaire 2002-2003, sont ainsi abordés en classe de 4e des

thématiques EmP portant sur le développement sexuel et la reproduction humaine; la prévention en matière de sexualité de reproduction; la gestion des ressources naturelles et le développement durable (DD) (MEN, IPN & Programme IEC Multisectoriel, 1996/1997).

1.1.2 L’étude du thème de l’exploitation des ressources naturelles dans le programme de SVT au Gabon

1.1.2.1 Une manière d’introduire l’éducation au développement durable au secondaire au Gabon

Le thème de « l’exploitation des ressources naturelles » est étudié dans le cours de géologie au niveau de la section consacrée à « la gestion des ressources naturelles et développement durable14 » en classe de 4e au Gabon dans la perspective du programme EmP. Comme nous l’avons

souligné en préambule de ce chapitre, cet enseignement se veut un tremplin pour la contextualisation du cours de SVT aux « réalités » sociales, culturelles et économiques du Gabon. Pour ce faire, l’étude du thème de l’exploitation des ressources naturelles va consister à responsabiliser les jeunes gabonais et gabonaises face aux enjeux environnementaux15 liés à

14 Le concept de développement durable est présenté dans le programme EmP selon la définition inspiré du rapport Brundtland c’est-à-dire comme un développement qui tient compte des besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Il repose selon les concepteurs du programme EMP sur un juste équilibre entre la population, les besoins, l’exploitation des ressources et la protection de l’environnement (MEN, IPN & Programme IEC Multisectoriel, 1996/1997). Cette orientation de l’enseignement de la géologie semble cependant problématique si l’on tient compte des enjeux liés à ce concept que nous allons tenter de clarifier dans la section qui suit.

15 Les problématiques environnementales font de plus en plus l’objet de débat au Gabon du fait de la place stratégique occupée par ce pays comme d’ailleurs tous les pays du bassin du Congo dans le maintien des équilibres mondiaux à cause du réchauffement climatique, mais aussi à cause des risques environnementaux de plus en plus perceptibles des activités pétrolières et minières au Gabon. À ce titre, le Gabon a signé plusieurs conventions internationales sur ces questions notamment la convention d’Alger (1968) relative à la conservation de la nature et des ressources africaines, celle de Washington (1973) relative au commerce international des espèces de faune et de flore sauvage menacées d’extinction, celle des Nations Unies sur le réchauffement climatique et celle de Rio (Centre d’échanges

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l’exploitation des ressources naturelles telles que le pétrole, le manganèse, l’uranium, etc., mais également à leur faire prendre conscience de la complexité des interrelations entre populations, environnement et développement afin que leur rapport à la nature soit transformé. Au bout de cet enseignement les élèves devaient ainsi être capables de :

- citer et de définir quelques ressources exploitées au Gabon ;

- déterminer les techniques, les formes d’exploitation utilisées, etc. ; - dégager la notion de développement durable ;

- établir une relation entre l’exploitation de ressources et le développement durable ;

- situer la responsabilité humaine dans la dégradation des écosystèmes ; - proposer des solutions pour sauvegarder les écosystèmes et assurer le

développement durable (ministère de l’Éducation nationale, Institut Pédagogique National & programme IEC Multisectoriel, 1996/1997).

Toutefois le défi d’une telle éducation au développement durable (EDD) portant sur l’étude d’une question de société comme celle relative à l’exploitation des ressources naturelles dans une visée de DD réside dans la capacité des enseignants et enseignantes de sciences du secondaire au Gabon à prendre conscience des enjeux socioscientifiques et environnementaux qui traversent de telles thématiques notamment lorsqu’on considère qu’un tel enseignement se propose de former des citoyens critiques et responsables. En effet, des auteures comme Bader (2011) et Gouch (1997) ont manifesté une certaine inquiétude face à des orientations éducatives impulsées par les instances internationales qui se veulent un tremplin pour une éducation environnementale critique, mais dont le type de développement prôné à travers le concept de DD16 semble se réduire à une vision

ressourciste et économique de la nature comme « pourvoyeuse de ressources à exploiter à des fins de développement économique ». Ainsi en montrant que les discours des instances internationales en matière d’EDD tendent à s’appuyer sur une idéologie axée sur la croissance économique et le progrès technique pour traiter de notre rapport à la nature, à la suite de Berryman et Brunelle (2003), Bader (2011, p. 229) soulignera la nécessité pour les acteurs éducatifs (enseignants et élèves) de développer un regard réflexif non seulement sur l’idéologie qui oriente les manières de voir le monde

d’informations du Gabon, 2002). Cependant, les populations gabonaises restent très peu impliquées et sensibilisées sur les questions d’environnement (Centre d’échange d’informations du Gabon, 2002).

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13 et les autres dans un tel contexte, mais aussi sur la forme scolaire, car celle-ci « tendrait

systématiquement à minimiser le caractère politique [d’une telle orientation éducative], contribuant à « discipliner ce domaine éducatif en une forme d’éducation plus acceptable pour la reproduction des normes et standards académiques établis ». Annette Gouch (1997) va quant à elle, pointer particulièrement dans un tel contexte, la nécessité pour les éducateurs de clarifier leurs positions idéologiques, car les différentes déclarations actuelles sur l’environnement des organisations internationales tendent à incarner souvent des positions technocentriques et homocentriques n’encourageant pas une éducation critique à l’environnement visant la responsabilisation des élèves pour une transformation démocratique de leur société. Ces auteurs montrent ainsi qu’une réflexion doit être engagée par les acteurs éducatifs afin qu’ils clarifient leurs positionnements idéologiques et leurs postures épistémologiques dans un tel contexte d’enseignement qui se veut citoyen.

1.1.2.2 La question du développement durable : un enjeu idéologique

Né à partir de questionnements de plus en plus récurrents autour des répercussions du développement industriel sur l’environnement à partir des années 70, le concept de DD trouvera sa consécration lors de la conférence de Rio en 1992 (Aknin, 2009; Jeziorski, 2014). Au-delà de la difficile conciliation entre les questions d’environnement et de développement qui caractérisera les différentes conférences sur le sujet depuis la conférence de Stockholm en 1972, la conférence de Rio va permettre de prendre en compte de manière plus large à travers ce concept d’autres questions telles que celles des rapports Nord/Sud, de la lutte contre la pauvreté, des droits de la femme, de l’équité sociale, etc. (Aknin, Géronimi, Schembri, Froger & Méral, 2002). Les promoteurs du DD se proposent ainsi d’introduire un questionnement des dimensions économiques, sociales et environnementales du développement dans une perspective intergénérationnelle en dépassant les clivages Nord/Sud et en mettant de l’avant la dimension planétaire de l’environnement (Aknin, 2009). Ce modèle de société qui se veut mondial17 trouvera de ce fait dans la démocratie, la lutte contre la

17 Au-delà de son idéologie sous-jacente qui semble s’ancrer dans « une version capitaliste du progrès » (Hours, 2002) et du développement, le concept de DD semble apparaitre comme un instrument de la globalisation (Sauvé, 2007). La globalisation étant vue ici comme « une unification et une intégration économiques, morales, culturelles, politiques mondiales dont l’Occident constitue le modèle unique référence » (Hours, 2002, p. 293).

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pauvreté et la gestion rationnelle des ressources, les moyens les plus conformes à la réalisation de cet objectif (Bergandi & Galangau-Quérat, 2008, p. 39). Cependant, bien que le développement durable semble trouver son expression dans les pays occidentaux18 par son incorporation dans les

programmes d’action, les politiques locales et les stratégies d’entreprise, sa mise en œuvre demeure problématique dans les pays africains19 (Aknin, 2009). En effet, loin de demeurer une simple

proposition somme toute intéressante20 « ce paradigme » (Bergandi & Galangau-Quérat, 2008)

semble se confondre à une norme ou à une prescription à laquelle tous doivent se conformer occultant les modes traditionnels de gestion de l’environnement des pays du Sud et leurs priorités de développement (Aknin Géronimi, Schembri, Froger & Méral, 2002; Sauvé, 2007). Ce caractère normatif, prescriptif et hégémonique va ainsi amener plusieurs auteurs (Fien, 2006; Sauvé, 2007; Llena, 2008; Aknin, 2009) à considérer ce concept comme une idéologie équivoque21. Dans cette

perspective, il serait alors intéressant de voir si ce concept tel qu’il est promu par les organisations internationales et mis en œuvre par les opérateurs économiques permet véritablement la protection de l’environnement et la préservation de la santé des populations et l’émergence des pays africains, dont les économies sont à ce jour caractérisées par une gestion peu transparente des recettes issues de la vente des ressources naturelles, une forte corruption, de mauvaises performances en

18 Nous notons néanmoins qu’en Occident plusieurs experts notamment en environnement et en développement international (Rist, 1996; Hours, 2002; Sauvé, 2007) reconnaissent le caractère confus et hégémonique de ce concept.

19 Il faut dire aussi à ce propos que ce concept émerge dans un contexte socio-historique marqué par une remise en cause du néo-colonialisme occidental qui a utilisé le développement comme alibi pour maintenir une domination sur les territoires tiers-mondistes souvent riches en ressources naturelles (Hours, 2002).

20 Le contenu moral de ce concept paraît en effet louable par le désir énoncé de société réellement démocratique, équitable et prônant le bien-être commun. Mais son caractère dogmatique et hégémonique semble occulter la discordance entre les « faits » et le monde policé des traités internationaux (Bergandi & al., 2008, p. 41).

21 Sauvé (2007) souligne notamment que le déploiement du concept de DD comme projet éducatif mondial parait à bien d’égard très problématique car ce projet servirait les intérêts d’une catégorie d’acteurs sociaux notamment ceux qui détiennent le pouvoir économique et politique. Pour elle, les finalités d’un tel projet mondial n’ont pas été suffisamment questionnées car elle y décèle une tension autour de son caractère optimiste faisant croire que l’adhésion des acteurs politico-économiques aux préoccupations sociales et environnementales de ce programme va changer les pratiques de développement en vigueur. Ce qui ne semble pas être toujours le cas à son avis. En outre, bien que de nombreux organismes et éducateurs se soient accommodés au concept de DD, l’auteure souligne néanmoins que cette adhésion semblerait reposer sur des besoins de financement international. C’est à ce titre qu’elle propose une analyse critique de ce concept et sa déconstruction pour l’adoption d’autres cadres de référence. Toutefois, des auteures comme Bader (2012 cité dans Jeziorski, 2014) tout en étant d’accord sur l’idée d’une analyse critique du DD soulignent que ces débats autour du DD semble exister surtout sur le plan théorique et qu’en pratique pour des raisons de justice sociale et à cause de l’intensification des dégradations environnementales et sociales, différents chercheurs aux postures souvent différentes vis-à-vis de l’injonction du DD peuvent être amenés à travers ce cadre de référence à des analyses approfondies sur certaines réalités sociales problématiques et à des recherches actions avec les communautés sans pour autant minimiser les enjeux idéologiques d’un tel concept.

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15 matière de développement (Rosellini, 2005). En outre, si l’on s’en tient aux discours entourant ce

concept, pour que le DD soit effectif dans les pays africains dans une visée de justice sociale, il est nécessaire de passer, comme le souligne toujours Christine Rosellini, d’une logique de production pure à une logique de répartition des rentes, d’une situation déséquilibrée et opaque (entre États et compagnies d’exploitation) et inéquitable (coupée de la population) à une situation dans laquelle non seulement les États seraient plus forts face aux multinationales, mais aussi à une plus grande participation de la société civile. Ce qui ne semble pas être encore le cas. Il apparait ainsi indispensable dans un contexte institutionnel recommandant une EDD, d’adopter une posture critique face à ce concept (Bader, 2011; Jeziorski, 2014) afin d’engager les élèves dans des situations éducatives qui leur permettent de prendre conscience des enjeux idéologiques qui orientent les manières de voir le monde et qui les préparent adéquatement à participer aux débats sur l’impact du développement économique sur l’environnement et la santé des populations.

1.1.2.3 La question du développement durable : un enjeu didactique

Pour tenter de mettre en exergue quelques enjeux didactiques de l’émergence d’une EDD dans les programmes scolaires, l’étude de doctorat de Jeziorski (2014) nous paraît d’une grande fécondité. En effet, cette étude qui porte sur les représentations sociales du DD chez de futurs enseignants québécois et français de sciences de la nature et des sciences humaines et sociales va notamment mettre en exergue à travers une approche pluri-méthodologique alliant questionnaire et entretien semi-directif, l’existence d’un curriculum caché de l’EDD chez les futurs enseignants interrogés consistant à un enseignement implicite du DD à travers les thèmes des programmes scolaires disciplinaires et mettant l’emphase sur une approche locale devant conduire les élèves à adopter des comportements individuels considérés comme pro-environnementaux, mais également l’adoption par ces derniers d’une posture de partialité tacite sous prétexte de neutralité qui consisterait à développer une posture critique face au DD lorsqu’il s’agit de répondre aux questionnaires et durant des entretiens, tout en déclarant qu’une telle posture ne saurait être envisageable dans le contexte de leur cours à cause de leur obligation de neutralité face aux élèves. En outre, cette chercheuse montre que le curriculum caché analysé à travers les représentations sociales du DD chez les futurs

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enseignants du secondaire québécois et français serait articulé autour de certaines valeurs dominantes qui envisageraient l’environnement comme une ressource à gérer par rapport à son utilité pour l’être humain. Pour elle, de telles représentations constitueraient des obstacles à une éducation critique du DD et favoriseraient la perpétuation de la transmission des idéologies dominantes.

Ces différentes considérations d’ordre socio-épistémologique et didactique évoquées par Bader (2011), Gouch (1997), Jeziorski (2014) et bien d’autres autour de la prescription du DD dans les systèmes éducatifs et autour de l’enseignement de certaines questions de société à caractère environnemental dans une visée de DD nous amènent ainsi à nous interroger sur la manière dont les enseignants de sciences du secondaire au Gabon se sont approprié l’orientation éducative EmP qui met l’accent sur l’enseignement des questions de société dans une visée de DD. Comment cette nouvelle orientation éducative a-t-elle été accueillie par les enseignants de sciences du secondaire au Gabon et comment s’est-elle incarnée dans leurs pratiques de classe?

C’est pour tenter d’apporter un éclairage à ces différentes interrogations que nous avons choisi le cadre de référence des QSV.

1.2 L’étude des questions de société sous l’angle des QSV: quelques repères théoriques

1.2.1 Pour une didactique des questions socialement vives

En éducation aux sciences, l’étude des questions de société comme celle portant sur l’exploitation des ressources naturelles peut être rattachée aux préoccupations du champ éducatif francophone des QSV (Simonneaux & Simonneaux, 2005; Legardez & Simonneaux, 2006; Albe, 2009). Le courant éducatif des QSV est un champ de recherche en didactique des disciplines qui est en plein développement depuis quelques années (Legardez & Simonneaux, 2006). Il est apparu en France à partir de l’appel d’Yves Chevallard en 1997 lors d’une communication dont le titre sera « questions vives, savoirs moribonds : le problème curriculaire aujourd’hui » durant laquelle, il était question pour cet auteur, de suggérer une refondation des contenus scolaires de l’École obligatoire souvent

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Figure 1 : Le modèle d'écologie des controverses socioscientifiques
Figure 2 : Les liens entre les différents éléments théoriques identifiés
Figure 3 : La cartographie de la controverse de l'exploitation de l'uranium au Gabon
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