• Aucun résultat trouvé

Impact de l'état dépressif sur l'attention et l'estimation temporelle

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "Impact de l'état dépressif sur l'attention et l'estimation temporelle"

Copied!
68
0
0

Texte intégral

(1)

IMPACT DE L’ÉTAT DÉPRESSIF SUR L’ATTENTION ET L’ESTIMATION TEMPORELLE û ô<û~,

Sj״//

Mémoire présenté

à la Faculté des études supérieures de !’Université Laval

pour l’obtention

du grade de maître en psychologie (M.Ps.)

École de psychologie

FACULTÉ DES SCIENCES SOCIALES UNIVERSITÉ LAVAL

JANVIER 2002

(2)

Afin de déterminer l’influence de la dépression sur !’attention et l’estimation du temps, 120 participants ont rempli le Beck Depression Inventory II constituant ainsi deux groupes (15 participants déprimés et 20 participants non déprimés). Ils ont effectué des tâches

informatisées de production d'intervalles d'une et de dix secondes, de discrimination de durées de 80-120 ms, 450-550 ms et 1120-1280 ms ainsi que d’attention soutenue (Continuous Performance Test). Les participants ont également effectué deux estimations verbales rétrospectives reliées au laps de temps qu'ils croient avoir passé à réaliser les tâches

d'estimation temporelle et la tâche d'attention soutenue, respectivement. Les résultats obtenus démontrent que les participants déprimés commettent plus d’erreurs d’omissions au CPT, ont des performances plus instables lors des productions d’une et de dix secondes et ont un taux de discrimination correcte inférieur pour les intervalles de 1120-1280 ms. Cependant, aucune différence entre le groupe de déprimés et de non déprimés n’a pu être mise en lumière pour les tâches d’estimations verbales rétrospectives et de discrimination pour les intervalles de 80-120 ms et 450-550 ms. Il semble donc que les déprimés présentent des déficits au niveau du

processus d’attention soutenue et que ces mêmes déficits ont pu influencer les performances de discrimination pour les intervalles de 1120-1280 ms et la stabilité des productions d’une et de dix secondes.

(3)

Je voudrais tout d’abord remercier Messieurs James Everett et Simon Grondin. Merci de m’avoir rassurée lorsque je doutais de moi. Merci d’avoir fait de moi une personne

différente en m’accompagnant dans cette aventure qui m’a permis de dépasser mes propres limites.

Je souhaite également faire part de mes plus profonds remerciements à mes parents, Marie et Claude, pour avoir gardé vivante en moi la volonté d’atteindre les buts queje me suis fixés. Merci de croire en moi malgré les remises en question et les soubresauts d’un

tempérament parfois difficile... Il n’y a aucune façon banale d’exprimer comment votre amour est important pour moi. Merci également à ma sœur Caroline. Merci de ta bienveillance à mon égard. Tu es le plus beau cadeau que papa et maman m’ont donné.

Merci à mes compagnons des « bas-fonds » : Bastien, Marie-Ève, Isabelle, Caroline et les 2 Julie pour leur tolérance à mon anxiété et leurs conseils toujours justes et appréciés. Merci de plus à Isabelle, Chántale, Chantal, Vanessa, Amélie et Manon pour l’écoute et l’intérêt manifestés pendant ces deux années. La folie des unes et la sagesse des autres sont pour moi des aventures à vivre. Je vis chaque jour sereinement de vous savoir à mes côtés.

Je remercie également ma chère tante Julie pour son aide et sa parfaite maîtrise des aspects techniques toujours nécessaires à la concrétisation d’un tel projet. Tu es arrivée au moment le plus opportun et tu m’as donné le courage de me rapprocher encore plus du meilleur de moi-même, qui j’espère s’incarne à travers ce projet.

Mes plus grands honneurs à tous les participants de l’étude et à tous ceux qui m’ont permis de vous rejoindre (Robert Ladouceur, Christian Jacques et Alain Lavigne) sans qui ce projet n’aurait jamais vu son accomplissement. C’est par votre implication que nous pouvons à notre tour participer à cette grande quête du savoir. Le foisonnement des connaissances auquel nous avons accès dans notre société fait de la recherche du savoir un devoir collectif et

(4)

SOMMAIRE... ...II AVANT-PROPOS...III TABLE DES MATIÈRES... IV

RECENSION DES ÉCRITS...1

Introduction... 1

La DÉPRESSION...2

L'attention... 4

Déficitsattentionnelsdansladepression... 6

Laperceptiondutemps... 9

Approchedel'horlogeinterne...13

Approchescognitives...13

Perceptiondutempsdansladépression... 15

Objectifsethypothèses...19 MÉTHODE... 20 Participants... 20 Matériel... 21 Procédure... 23 RÉSULTATS... 25 Attention... 25 Production... 26 Discrimination...29

Estimationsverbalesrétrospectives... 30

DISCUSSION... 31

Attention... 32

Production... 33

Discrimination...35

Estimationsverbalesrétrospectives... 37

BIBLIOGRAPHIE...39

ANNEXE A... 48

ANNEXE B... 57 60 ANNEXE C

(5)

Introduction

Le concept du temps est un sujet de prédilection dans plusieurs disciplines. Le temps est également une préoccupation de la vie quotidienne. C'est aussi un aspect important dans des phénomènes perceptifs, il semble d'ailleurs qu'il soit prédominant sur l'ensemble des autres, notamment l'espace (Navon, 1978). En psychologie, le temps occupe une place de choix dans le domaine de la perception. Précisément, l'habileté à estimer le temps et les mécanismes qui sous-tendent cette estimation sont des fonctions importantes dans l'adaptation humaine. Les recherches sur le sujet se sont orientées sur des sujets normaux mais également sur des populations psychiatrisées, puisqu'il y a maintes raisons de croire que la perception du temps peut être l'un des premiers aspects à être altéré dans les psychopathologies (Lhamon, Goldstone etGoldfarb, 1965).

Dans cette étude, l'intérêt sera porté directement sur la dépression. En effet, il y a raison de croire que certains processus cognitifs déficitaires dans la symptomatologie dépressive tels que T attention puissent affecter l'habileté à estimer le temps chez les déprimés. Se situant dans le domaine fondamental, cette recherche tente donc de vérifier l'importance relative de

T attention sur l'estimation du temps dans la dépression.

Dans un premier temps, le syndrome dépressif et plus précisément le retard

psychomoteur seront évalués. Par la suite, une revue de !'implication de !'attention dans la dépression et ses aspects déficitaires sera effectuée. Le domaine de la perception du temps sera investigué en rapportant ses méthodes, les processus qui sous-tendent l'estimation temporelle et ses modèles explicatifs. Finalement, il sera question de la littérature portant sur l'estimation du temps dans la dépression.

(6)

La dépression

La dépression est la psychopathologie la plus répandue de nos jours. En général, la dépression est classifiée comme un trouble de l’humeur (DSM-IV, 1994). Globalement, les dépressions se subdivisent en trois types : les dépressions majeures, les désordres

dysthymiques et les dépressions non spécifiques. Les symptômes associés à la présence de dépression sont dans un premier temps la persistance de l'humeur dépressive ou la perte de plaisir et d'intérêt dans presque toutes les sphères d'activités de la personne atteinte. L'humeur du patient est triste et affaissée. Fréquemment, certains patients présenteront des sentiments d'anxiété, de culpabilité et de dévalorisation associés à l'humeur dépressive et que les cliniciens nomment ruminations. Au niveau de la perte d'intérêt, le patient ne semble plus ressentir de plaisir à effectuer les activités qu'ils pratiquaient auparavant avec satisfaction. Dans un

deuxième temps, il y a perturbation à la baisse dans l'appétit, le sommeil, la sexualité, l'énergie et l'activité psychomotrice. Les symptômes rapportés doivent nuirent considérablement aux activités professionnelles et sociales de l'individu pour que le diagnostic de dépression soit confirmé. Finalement, dans le cas de dépressions profondes, il y a présence d'idées suicidaires qui sont associées à différents degrés de risque de passage à l'acte.

La perturbation des activités psychomotrices dans la dépression est connue sous le nom de retard ou de ralentissement psychomoteur. Selon le DSM-IV(APA, 1994), le retard

psychomoteur se manifeste par un ralentissement marqué de la pensée, des mouvements

corporels et de la parole. Plus spécifiquement, la parole est détériorée au niveau du volume, du temps de réponse dans une conversation et du nombre d'idées véhiculées. Le ralentissement psychomoteur est un aspect clinique central dans le diagnostic de dépression et plus

particulièrement au diagnostic de dépressions majeures (Buchwald et Rudick-Davis, 1993 ; Dantchev et Widlôcher, 1998 ; Sobin et Sackeim, 1997). Le principal avantage associé à !'utilisation du concept de retard psychomoteur réside dans le fait qu'il réfère à des symptômes observables et mesurables avec l'aide de techniques appropriées (temps de réponse, analyse de l'activité motrice, etc.)

(7)

Cependant, le concept de retard psychomoteur demeure élusif et ce, pour plusieurs raisons. Dans un premier temps, aucune définition formelle du concept n'a été formulée. Deuxièmement, selon Cornell, Suarez et Berent (1984) le terme psychomoteur est en soit une source d'ambiguïté puisqu'il fait référence à des composantes cognitives (psycho) et des composantes liées à l'activité visible (motrice). Troisièmement, le lien entre les déficits

moteurs et cognitifs demeure nébuleux. Peu d'études se sont intéressées aux liens existant entre la sphère motrice et la sphère cognitive dans le ralentissement psychomoteur. Quatrièmement, les mesures objectives du ralentissement psychomoteur se sont surtout axées sur les aspects moteurs tels que la fluidité de la parole, le temps de réaction et l'activité motrice spontanée (Smith, Brébion, Banquet et Allilaire, 1994). En ce qui concerne l'appréciation des aspects cognitifs, il semble que ceux-ci soient plus difficilement mesurables.

Le retard dans le processus décisionnel est un des aspects retenus pour expliquer le ralentissement psychomoteur (Thier, Axmann et Giedke, 1986 ; Widlöcher et Hardy-Bayle, 1989). Le déficit se situerait dans l'activation des actions qui affecterait ainsi l'ensemble des activités motrices et cognitives. Cornell et al. (1984) ont utilisé une série de tâches permettant de faire varier la demande motrice ou cognitive du travail à réaliser par le sujet. Cette

manipulation a permis aux auteurs de décomposer le temps de réponse en deux composantes : le temps de décision (composante cognitive) et le temps d'exécution (composante motrice). Le temps de décision serait donc par définition central et refléterait ainsi la vitesse cognitive. Il est sollicité lors de tâches cognitives complexes. Le temps de mouvement quant à lui est de nature périphérique et est indépendant du temps de décision (Marquard, 1996). Les résultats obtenus dans cette étude ont démontré que les déprimés mélancoliques et non mélancoliques

manifestaient un retard au niveau de la composante motrice, mais que seuls les mélancoliques montraient un déficit dans la sphère cognitive. Bref, ce ne serait pas tant la performance qui est déficitaire dans la dépression majeure mais le temps requis pour reconnaître le stimulus et le délai qui s'ensuit pour prendre la décision d'agir de manière appropriée.

(8)

L'attention

La notion de temps de décision semble liée au concept d'attention par le fait que le temps de décision nécessite un certain contrôle volontaire du traitement de !'information et que ce contrôle nécessite un effort cognitif constant (Widlôcher et Hardy-Bayle, 1989). De même, le concept de contrôle cognitif volontaire réfère à la notion de processus automatique et contrôlé. Les processus automatiques s’incarnent dans des tâches qui ne requièrent qu'une quantité minime d'attention pour être réalisées adéquatement puisqu'elles se sont améliorées avec la pratique (marcher, parler, se brosser les dents, etc.), tandis que les processus contrôlés nécessitent beaucoup d'attention (Fortin et Rousseau, 1989 ; Roy-Byme, Weingarter, Bierer, Thompson et Post, 1986). Par exemple, la conduite automobile lorsqu'elle est encore à l'étape de !'apprentissage, requiert la quasi-totalité des ressources attentioimelles. Ainsi, la personne qui apprend à conduire un véhicule automobile aura probablement beaucoup de difficulté à tenir une conversation normale quand elle se tiendra au volant puisque la grande majorité de ses ressources attentionnelles seront orientées sur la conduite et non sur la poursuite d'une

conversation cohérente. La capacité de maintenir un effort cognitif pourrait être perturbée par un déficit attentionnel (Weingarter et Silberman, 1982).

L'attention est un des processus centraux dans le fonctionnement cognitif de l'être humain. Par contre, la présentation d'une définition de !'attention est une entreprise ardue. Il n'existe pas de consensus sur cette question. Certains auteurs, tel Lezak (1995), proposent des définitions plus restreintes du concept d'attention. Pour Lezak, !'attention est une fonction qui permet de résister à la distraction et de moduler précisément le comportement sans influence de l'intention. D'autres auteurs mentionnent que !'attention est une fonction ayant des

implications beaucoup plus vastes. Selon Braun (1997), !'attention est un processus de sélection mentale des informations internes et externes qui réfère à des opérations globales telles que le filtrage et la gestion des ressources mentales.

D'une façon plus particulière, !'attention regroupe des activités cérébrales complexes et primitives : l'éveil, l'orientation spatiale et temporelle, la vigilance, la motivation et la vitesse mentale. L'attention regroupe généralement trois grands processus à savoir !'attention partagée,

(9)

la vigilance (ou attention soutenue) et !,attention sélective. Par contre, Fortin et Rousseau (1989) mentionnent que les processus d'attention partagée et d'attention sélective ne sont que deux aspects d'une même fonction : l'allocation des ressources attentionnelles. En effet, !'attention partagée réfère à la capacité de l'individu d'être attentif à deux ou plusieurs stimuli concomitants. En ce qui concerne !'attention sélective, il s'agit de la capacité de demeurer attentif à un stimulus pertinent en ignorant ceux qui sont inopportuns. En laboratoire, la seule différence se situerait au niveau de la directive donnée à l'individu. Si l'individu doit porter volontairement son attention sur deux ou plusieurs stimuli simultanés, il s'agit d'attention partagée. Cependant, si la personne doit ne dévouer aucune attention à un stimulus au profit d'un autre présenté en même temps, il est question ici d'attention sélective.

L'allocation des ressources attentionnelles comporte un aspect décisionnel. En effet, les théoriciens qui se sont penchés sur le thème de !'attention ont postulé de prime abord que les ressources attentionnelles se trouvent en quantité limitée. La littérature sur le sujet mentionne que l'être humain possède la capacité d'exécuter deux tâches simultanément. Cependant, la qualité de la réalisation de la tâche dépendra fortement de la quantité d'attention qui lui sera dévouée. Ce constat est né d'une série d'études, notamment celles de Treisman (1960, 1964a,

1964b) qui ont montré qu'un individu placé dans une situation où deux tâches doivent être réalisées simultanément est apte à traiter une partie de !'information provenant de la tâche à laquelle l'individu dévoue volontairement moins de ressources attentionnelles. Par contre, la performance à cette tâche sera moindre. Ces types d'épreuves nécessitent un processus

d'allocation des ressources puisqu'il y un choix à réaliser sur quelle tâche !'attention sera portée avec plus de rigueur. Bref, les tâches nécessitant une allocation des ressources sont

essentiellement basées sur la notion de compétition entre deux tâches que l'individu doit exécuter simultanément.

Deuxièmement, !'attention soutenue réfère à la capacité du sujet à maintenir l'éveil mental de façon constante pour une période dépassant dix minutes. De même, ces tâches sont plutôt axées sur l'aptitude à demeurer fixé sur le travail et à éviter les distracteurs. L'attention

soutenue (également nommée vigilance) se mesure classiquement par l'exécution de tâche visant la détection de cibles parmi des distracteurs pendant une assez longue période de temps.

(10)

Comme le mentionne Braun (1997), ce type de tâche comporte une forte composante stratégique. En effet, le sujet peut choisir d'opter pour la vitesse, ce qui aura tendance à amener le participant à produire un plus grand nombre d'erreurs de commission et/ou d'omission. Dans une autre optique, le sujet peut décider de s'axer sur la précision. Cette stratégie conduit habituellement à une augmentation des temps de réaction.

Déficits attentionnels dans la dépression

La littérature atteste la présence de déficits attentionnels chez les dépressifs. Brown, Scott, Bench et Dolan (1994) rapportent dans leur étude que les participants déprimés ont pu être distingués des participants normaux en grande partie par des tests ayant une forte

composante attentionnelle. Selon eux, un déficit au niveau de la gestion de !'attention peut expliquer un bon nombre des déficits cognitifs dans la dépression. Pour Braun (1997), une dépression peut diminuer sérieusement les capacités attentionnelles de l'individu. Selon

Mendez, Benson et Cummings (1996), les troubles de l'attention et de la concentration peuvent être considérés comme un symptôme dans plusieurs perturbations du comportement entre autres, la dépression.

Dans la perspective de l'allocation des ressources, il semble que les déficits attentionnels chez les déprimés soient du ressort d'une mauvaise répartition plutôt que d'un manque de ressources (Hertel, 1997). Dans cette étude, Hertel mentionne que des participants déprimés ont des résultats identiques à ceux de participants non déprimés lorsqu'ils doivent être très attentifs à la tâche. Ce constat laisse présager une déficience au niveau de contrôle volontaire de !'attention dans la dépression dans une tâche requérant une allocation des ressources. De plus, d'autres auteurs ont démontré que des déprimés obtiennent des temps de réponses plus bas que des participants non déprimés à la tâche S troop des mots de couleurs (Benoît et al., 1992 ; Gotlib et McCann, 1984).

Dans l'optique de la vigilance, plusieurs autres auteurs concluent à des déficits au niveau de !'attention soutenue dans la dépression (Bâckman, Hill et Forsell, 1996 ; Griffin, Dember et Warm, 1986). Ce sont les processus qui demandent un haut degré d'attention soutenue (les

(11)

processus contrôlés) qui semblent être les plus déficitaires dans la dépression (Roy-Byme et al. , 1986). Par exemple, les tâches de rappel libre et de rappel de matériel sans sens sont très affectées par la dépression (Weingarter, Cohen, Martello et Gerdt, 1981). La dépression et une altération du processus d’attention soutenue sont d’ailleurs fortement tributaires d’une atteinte de l’hémisphère droit et plus particulièrement, du cortex préfrontal. Cependant, l’hémisphère gauche jouerait également un rôle crucial dans la médiation des fonctions d’attention.

L'un des plus forts appuis à la présence de déficits attentionnels dans la dépression se situe au niveau des études utilisant la technique de tomographie par émission de positrons (TEP scan) en neuroimagerie in vivo. En effet, un nombre considérable de recherches ont démontré une réduction du flux sanguin dans certaines régions associées aux processus attentionnels. La majorité des études concluent à une réduction du flux sanguin au niveau du cortex préfrontal médial antérieur gauche (Dolan et al., 1992 ; Dolan, Bench, Brown, Scott et Fracowiak, 1994), du cortex préffontal dorsolatéral gauche (Bench, Fristen, Brown, Frackowiak et Dolan, 1993 ; Brown et al., 1994), du gyrus angulaire gauche (Bench et al., 1993 ; Dolan et al., 1994) et du cingulum gauche (Bench et al., 1993 ; Brown et al., 1994). Par ailleurs, le lobe frontal droit ne semble pas non plus privé d’un rôle important dans la gestion des capacités attentionnelles (Paquette, 1996). L'ensemble de ces structures semble jouer un rôle dans la gestion de

!'attention (Kolb et Whishaw, 1995). De même, Dolan et al. (1994) ont démontré dans leur étude que 18% de la variance pouvait s'expliquer par un facteur lié à des déficits attentionnels. Ce facteur était lui-même associé aux régions corticales préfrontales, plus particulièrement aux portions supérieures et médiales. Le cortex préfrontal semble donc jouer un rôle important dans le contrôle et le maintien de !'attention (Wilkins, Shallice et Mc Carthy, 1987).

Ce profil de résultats conduit Dolan et al. (1994) à conclure que l'altération des

fonctions cognitives dans la dépression pourrait s'expliquer par une perturbation au niveau de l'exécuteur central tel qu’exprimé par Baddeley (1981) et Hitch (1980), responsable entre autres de la gestion de !'attention. De plus, une réduction du flux sanguin dans le cortex préfrontal (plus spécifiquement les portions dorsolatérale et médiale) est fortement associée avec les manifestations du ralentissement psychomoteur et de !'appauvrissement cognitif dans la dépression (Bench et al., 1993). Il semble donc que le retard psychomoteur et les déficits

(12)

Hertel, 1997 ; Weingarter et Silberman, 1982).

Quelle est donc l’influence des difficultés attentionnelles sur les performances cognitives des individus souffrant de dépression ? Dans la dépression, il est possible

d’observer un ralentissement dans la vitesse de traitement de !’information. Eysenck (1982) mentionne d’ailleurs l’importance des fonctions d’attention dans le processus de traitement de !’information. S hum, Mc Farland et Bain (1994) ont démontré une forte corrélation entre la vitesse de traitement de !’information et les mesures psychométriques des fonctions

attentionnelles. En général, !’attention joue un rôle de premier plan dans la séquence de traitement de !’information. En effet, les processus attentionnels s’inscrivent notamment entre la mémoire sensorielle et la mémoire de travail (Fortin et Rousseau, 1989). En fait, le rôle de !’attention serait d’apporter une certaine saillance aux stimuli à traiter et permettrait une analyse optimale de !’information (Boiler, Marcie et Traykov, 1996). De ce fait, il est possible qu’une perturbation des mécanismes attentionnels crée un effet d’entraînement sur l’ensemble des autres étapes du fonctionnement cognitif en altérant le simple transfert en mémoire de travail de !’information ; la privant ainsi d’un passage fructueux à travers !’ensemble des autres étapes. Cet effet d’enchaînement peut s’exprimer par des performances réduites lors de tâches mnésiques (Hertel, 1997) de vitesse psychomotrice et de temps de réaction (Marquard, 1996).

La diminution de la vitesse psychomotrice et le ralentissement des temps de réaction sont souvent retenus comme des manifestations cliniques du ralentissement psychomoteur dans la dépression. Or, l’appréciation des aspects purement cognitifs du retard psychomoteur est demeurée à ce jour plus ardue de par la relative difficulté à les mesurer. Plusieurs auteurs se sont intéressés au problème de la mesure du retard psychomoteur. Entre autres, Dantchev et Widlôcher (1998) ont développé un instrument de mesure spécifique du retard psychomoteur : le Salpêtrière Retardation Rating Scale (SRRS). Cet instrument évalue quatre aspects généraux qui sont altérés dans la symptomatologie dépressive : la motilité (démarche, vitesse des

mouvements du tronc et des bras et vitesse des mouvements de la tête et du visage), la parole (fluidité verbale, modulation de la voix et longueur des réponses), l’activité cognitive objective (variétés des thèmes employés dans le discours et richesse dans !'association des idées) et

(13)

l’activité cognitive subjective (ruminations, niveau d'énergie, intérêt dans les activités, perception ralentie du temps, mémoire, concentration et appréciation du retard).

L’un des aspects retenus par Dantchev et Widlöcher dans l’évaluation du retard

psychomoteur est l’activité cognitive subjective. Dans cette catégorie de déficits, il est question de la perception ralentie du temps comme l’une des manifestations du ralentissement

psychomoteur dans la dépression. La perception ralentie du temps (le sentiment que le temps passe plus lentement) est un phénomène largement documenté dans la symptomatologie dépressive. Il n’existe cependant pas, comme il en sera question plus tard, de véritable consensus à savoir si cette perception subjective ralentie du temps s’exprime par des déficits réels dans l’estimation objective du temps (production, reproduction, discrimination ou estimation verbale de durées) chez les individus souffrant de dépression. Nonobstant, il serait question intéressant de vérifier si d’éventuels déficits attentionnels chez les déprimés peuvent rendre compte de la perception du temps dans la dépression puisque la perception ralentie semble reliée au ralentissement psychomoteur et par le fait même à !’attention. Avant de traiter de ce sujet plus intensivement, il est de mise de discuter de la psychologie de la perception du temps.

La perception du temps

L'intérêt pour la psychologie de la perception du temps est né presque simultanément avec la naissance de la psychologie elle-même. En effet, William James en 1890 parlait déjà du concept du temps et des différents états qui pouvaient en modifier sa perception, notamment les intoxications de diverses natures. Le constat qui découle de ce discours est que le temps physique et le temps psychologique sont deux réalités aux aspects quelques fois divergents. Pour Lehmann (1967), le temps physique est objectif, universel et absolu tandis que le temps psychologique (le temps tel que perçu par un individu) est subjectif, personnel et relatif d'un individu à l'autre. C'est d'ailleurs cet aspect individuel du temps psychologique qui le rend aussi intéressant à l'étude du point de vue de la psychologie. En effet, tout un champ de recherches s'est développé autour de la problématique des processus sur lesquels sont basés les

(14)

marqueurs du temps psychologique. Ce domaine est connu en psychologie sous le nom de perception du temps.

L'étude de la perception du temps se subdivise en deux grands axes de recherche : les études sur l'expérience du temps et les études sur l'estimation du temps (Bech, 1975). Dans un premier temps, les recherches portant sur l'expérience du temps s'intéressent principalement à la manière dont l'individu interprète le temps et la façon dont il s'oriente par rapport à ce dernier. Classiquement, l'expérience du temps est très liée au domaine plus vaste de la phénoménologie et de la psychologie existentielle. De même, les théoriciens de ce domaine orientent leurs études au niveau de deux phénomènes principaux, soient la conscience du temps et la perspective temporelle (Lehmann, 1967). Premièrement, la conscience du temps se définit comme une impression ressentie par l'individu que le temps passe lentement ou rapidement. Étant donné la connotation fortement subjective de ce phénomène, il a été démontré que la conscience du temps est modulée par des facteurs tels que la maladie corporelle (fièvre), le fait d'être passif ou actif et finalement par les psychopathologies. Deuxièmement, la perspective temporelle est beaucoup moins étudiée en perception du temps. Il s'agit essentiellement de l'orientation de l'individu dans le passé, le présent ou le futur. Peu d'études sont réalisées sur ce sujet et c'est pourquoi il ne sera pas discuté plus intensivement à ce moment.

Dans un autre ordre d'idées, l'estimation du temps est le domaine de recherche de prédilection dans l'étude du temps psychologique puisque celui-ci se prête beaucoup mieux à !'expérimentation en tant que tel. En général, les études sur l'estimation du temps cherchent à faire juger par un individu la durée d'un intervalle donné, sans l'aide d'appareils de mesure quelconques. On peut donc affirmer que l'estimation du temps sera entièrement basée sur un substrat mental. Plusieurs méthodes sont employées pour étudier l'estimation du temps. De façon générale, ce domaine de recherche utilise quatre grandes méthodes : la discrimination, la production, la reproduction et l'estimation verbale.

Premièrement, la discrimination d’intervalles est une méthode où un individu doit juger de la durée d'un intervalle présenté entre deux stimuli, soit en le comparant avec un intervalle témoin présenté préalablement, soit en indiquant son choix par rapport à une catégorie fixée au

(15)

préalable par l'expérimentateur. L'utilisation de la discrimination permet au chercheur d'étudier le jugement temporel lorsque celui-ci est basé sur une méthode comparative. Par exemple, le sujet devra décider si l'intervalle présenté entre deux stimuli auditifs est de 130 ou de 200 millisecondes. Par contre, la discrimination est modulée par certains paramètres. Un premier aspect modulant la discrimination d’intervalles est la nature des intervalles à juger. En effet, les intervalles utilisés dans les tâches de discrimination peuvent être vides ou pleins. Un intervalle plein est un intervalle où un signal continu est interrompu par un premier signal marquant le début de l'intervalle et un second en marquant la fin. Par contre, un intervalle vide est un laps de temps durant lequel aucun événement ne survient à part les signaux de début et de fin de l'intervalle à juger. Dans la littérature sur le sujet, les auteurs concluent que les intervalles pleins conduisent habituellement à une meilleure discrimination que les intervalles vides (Rammsayer, 1994 ; Rammsayer et Lima, 1991). Cependant, en mode visuel, il semble que la performance puisse être meilleure pour des intervalles vides (Grondin, 1993). Un second paramètre influence la discrimination d’intervalles : la modalité dans laquelle ils sont

présentés. En effet, il semble que la présentation des intervalles en modalité auditive conduit à une meilleure performance que lorsque les intervalles sont présentés en mode visuel (Grondin, 1993 ; Grondin, Meilleur-Wells, Ouellette et Macar, 1998 ; Grondin et Rousseau, 1991 ;

Rousseau, Poirier et Lemyre, 1983). Aussi, la performance décroît encore quand les intervalles sont présentés de façon intermodale (en utilisant plusieurs modalités pour délimiter un

intervalle vide) plutôt que de façon intramodale. (Grondin, Ivry, Franz, Perreault et Metthé, 1996 ; Grondin et Metthé, 1993 ; Grondin et Rousseau, 1991 ; Rousseau et al., 1983).

En second lieu, une autre méthode utilisée pour estimer le temps est la production. La production mesure la capacité du sujet à exécuter un intervalle donné sans présentation

préalable d'un intervalle témoin. Dans une tâche de production, le chercheur vise à évaluer la capacité du sujet à générer adéquatement le rythme (justesse). Par exemple, le chercheur demandera au sujet de produire un rythme de quatre secondes en frappant sur une touche enregistrant la distance temporelle entre les frappes.

(16)

Troisièmement, dans une tâche de reproduction, le participant doit tenter d'imiter le plus fidèlement possible des intervalles présentés préalablement par l'expérimentateur. Un exemple de tâche de reproduction pouvant être exécutée par le participant serait de reproduire un

rythme de deux secondes en frappant sur une touche quand ces intervalles lui ont été présentés auparavant. Dans ce cas, !'expérimentateur cherche à évaluer si le participant est apte à

exécuter plusieurs fois le même rythme. Les tâches de production et de reproduction, malgré une similarité méthodologique, sont influencées par des processus différents. En effet, les tâches de reproduction sont modulées par des facteurs comme !'attention puisqu'elles font fortement appel à la mémoire de travail (Lehmann, 1967). Par ailleurs, les tâches de production et de reproduction d’intervalles servent également à apprécier la variabilité des performances. Lorsque la variabilité est mesurée, il est question de vérifier dans quelle mesure le participant génère un rythme stable en vérifiant l’écart de temps entre chaque frappe.

Quatrièmement, une tâche d'estimation verbale requiert du participant qu'il fournisse à haute voix une évaluation en unité chronologique (secondes, minutes etc.) Dans le cas des trois dernières méthodes, !'expérimentateur évalue dans quelle mesure le participant a sous- estimé l'intervalle (la durée estimée par le sujet est plus courte que la durée réelle) ou surestimé l'intervalle (la durée estimée par le participant est plus longue que la durée réelle).

Lorsque la méthode pour estimer le temps est identifiée, il faut dès lors prendre en considération le paradigme employé. En effet, T expérimentation sur l'estimation du temps implique toujours !’utilisation du paradigme prospectif ou du paradigme rétrospectif. En situation prospective, les participants à l'étude sont informés à l'avance qu'ils auront à estimer un intervalle donné. Par contre, en situation rétrospective, les participants ne sont informés qu'ils doivent fournir une estimation temporelle qu’après que l'intervalle à juger se sera écoulé. De façon générale, les jugements prospectifs et rétrospectifs conduisent souvent à des résultats différents dans de nombreuses conditions, puisqu'ils sont influencés par des processus

différents. Selon Block (1974), le jugement prospectif est une estimation d'une durée «ressentie» (a priori) tandis que le jugement rétrospectif est un jugement sur une durée «remémorée» (a posteriori). Il est important de noter à ce moment que les méthodes de discrimination, de production et de reproduction sont par définition prospectives puisque

(17)

lorsqu’elles sont employées, les participants sont toujours informés à l'avance qu'ils auront à réaliser une estimation de durée. Bref, l'estimation verbale est la seule méthode pouvant être utilisée pour étudier le jugement rétrospectif.

Approche de l'horloge interne

À ce stade, il est de mise de se questionner sur quelles bases l'être humain fournit un jugement temporel. Sur ce point, deux grandes approches proposent leur vision respective. Dans un premier temps, l'approche par l'horloge interne se base sur la prémisse qu'il existe chez l'humain une horloge biologique responsable de la gestion des estimations temporelles

(Treisman, Faulkner, Naish et Brogan, 1990). Cette horloge comporte deux fonctions. Premièrement, l'horloge joue un rôle d'émetteur. Elle émet des pulsations selon un rythme régulier ou aléatoire. Deuxièmement, l'horloge accumule ces pulsations ce qui permet à l'individu de porter un jugement de durée sur la base de la quantité de pulsations accumulées. Un plus grand nombre de pulsations émises et accumulées donnent lieu à un jugement de durée plus long. Les erreurs dans l'estimation du temps selon l'approche de l'horloge interne résultent de la variabilité qui lui est propre.

Approches cognitives

Dans un deuxième temps, l'approche cognitive propose que les estimations temporelles soient directement déterminées par des processus cognitifs tels que la mémoire et !'attention. Le principal tenant de l'approche cognitive mnésique est Omstein (1969). Selon Omstein, une estimation temporelle rétrospective est directement reliée à la dimension qu'occupe l'intervalle dans la mémoire de l'individu. Par le terme dimension, Omstein réfère ici aux nombres

d'événements qui se sont produits durant l'intervalle à juger. De plus, le degré de complexité des événements influencera également l'estimation du temps résultante (Mc Gain, 1983), Dans cette optique, une durée sera perçue comme étant plus longue si augmentent le nombre et la complexité des événements survenus durant cet intervalle (Poynter, 1983).

(18)

Un second modèle relié aux fonctions mnésiques est le modèle par segmentation. Le modèle par segmentation a été développé par Block et Reed (1978). Ce modèle se base également sur la mémoire pour expliquer le jugement temporel prospectif et rétrospectif. Par contre, les auteurs postulent que ce n'est pas le nombre et la complexité des événements qui se produisent durant l'intervalle à juger qui ont un rôle primordial dans l'estimation temporelle mais plutôt la quantité de changements qui apparaissent durant l'intervalle. En général, plus il y a de changements à l'intérieur de l'intervalle, plus ce dernier sera perçu comme étant long

(Poynter et Homa, 1978 ; Zakay et Feldman, 1993 ; Zakay, Tsai, Moses et Shahar, 1994). L'un des constats qui ressort des modèles utilisant la mémoire pour expliquer le jugement temporel est qu'ils sont habituellement plus efficaces pour rendre compte des estimations temporelles de nature rétrospective (Block, George et Reed, 1979 ; Block et Zakay, 1997 ; Grondin, 2001 ; Hicks, Miller et Kinsboume, 1976 ; Predebon, 1996 ; Vanneste et Pouthas, 1995 ; Zakay, 1996 ; Zakay et Feldman, 1993 ; Zakay et al., 1994).

Toujours tenants de l'approche cognitive, d'autres théoriciens ont retenu les processus attentionnels pour expliquer les jugements temporels. L'instigateur de cette approche est Thomas (Thomas et Weaver, 1975 ). Le fleuron de ce modèle est que l'estimation du temps (prospective et rétrospective) sera plus juste si davantage d'attention est consacrée au passage du temps. Relevant du principe de la limite des ressources attentionnelles, le modèle

attentionnel postule que !'information temporelle (le passage du temps durant l'intervalle à juger) entre en compétition avec !'information non temporelle (l'activité que le participant

réalise pendant l'intervalle) pour absorber le maximum des capacités attentionnelles de

l'individu. De même, plus la tâche concomitante augmente en difficulté, plus celle-ci accapare une grande partie des ressources attentionnelles. Étant donné qu'une large part des ressources sont mobilisées pour la réalisation de la tâche, moins d'attention est dirigée sur le passage du temps, ce qui résulte en un jugement de durée plus court. Généralement, le modèle

attentionnel est associé aux jugements temporels prospectifs (Block et Zakay, 1997 ; Brown, 1985 ; Brown et West, 1990 ; Grondin, 2001 ; Hicks et al., 1976 ; Mc Clain, 1983 ; Predebon, 1996 ; Sawyer, Meyers et Huser, 1994 ; Vanneste et Pouthas, 1995 ; Zakay, 1996 ; Zakay, 1998). Notons par ailleurs que les approches dites de l'horloge interne et cognitives ne sont pas mutuellement exclusives. Certains auteurs contemporains proposent des théories mitoyennes

(19)

qui intègrent les processus cognitifs et les fonctions de l'horloge interne (Fortin, Rousseau, Bourque et Kirouac, 1993 ; Grondin et Macar, 1992 ; Rousseau et al., 1983 ; Zakay et Block, 1997).

La majorité des recherches dans le domaine de la perception du temps se sont déroulées sur des populations normales. Par contre, depuis quelques décennies, un nombre croissant de chercheurs se sont penchés sur le sujet de l'étude de la perception du temps chez des individus souffrant de troubles psychiatriques. Le domaine de la perception du temps dans les

populations cliniques est devenu populaire suite à la constatation que l'expérience du temps semble déréglée dans plusieurs types de psychopathologies, notamment la schizophrénie, les troubles anxieux, les troubles maniaques et la dépression. Ce dérèglement influencerait négativement d'autres fonctions chez l'individu, entre autres la pensée, le langage, la volonté et le mouvement volontaire (Wallis, 1967). Les études sur le sujet se sont intéressées à plusieurs groupes cliniques et les chercheurs ont ainsi pu formuler des conclusions. De façon générale, les individus souffrants de troubles anxieux et maniaques auront tendance à ressentir que le temps passe plus rapidement et surestimeront des intervalles de temps et les individus atteints de troubles psychotiques auront le sentiment que le temps passe plus lentement et sous- estimeront des intervalles de durée (Orme, 1962).

Perception du temps dans la dépression

Dans le cas spécifique de la dépression, les études se sont fortement orientées au niveau de l'expérience subjective du temps car cet aspect était déjà fortement documenté dans le domaine clinique. En effet, bon nombre d’auteurs arrivent à la conclusion que l'expérience du temps est ralentie dans la dépression (Bech, 1975 ; Blewett, 1992 ; Hawkins, French, Crawford et Enzle, 1988 ; Kitamura et Kumar, 1982 ; Lehmann, 1967 ; Wyrick et Wyrick, 1977). En d'autres termes, les déprimés ont l'impression que le temps passe plus lentement lorsque comparés avec les gens ne souffrant pas d'états dépressifs quelconques. La perception ralentie du temps dans la dépression est très souvent reliée au sentiment de déplaisir qui caractérise les états dépressifs (Hawkins et al., 1988). Le sentiment que le temps passe lentement est associé à un sentiment négatif, très souvent caractérisé par l'attente passive (Block et al., 1980).

(20)

L'attente passive se caractérise par l'attente qu'un événement se produise. Cependant, Γincidence de ce sentiment n'a pas été véritablement étudiée dans les états dépressifs. Par contre, plusieurs chercheurs ont tenté «d'objectiver» la perception ralentie du temps dans la dépression en tentant de relier ce phénomène avec un déficit dans l'estimation du temps. Ces auteurs ont postulé qu'étant donné que les déprimés ressentent que le temps passe plus

lentement, ce dérèglement devrait également s'exprimer dans la dépression par une altération dans l'estimation temporelle de divers intervalles de temps.

Il existe quelques raisons de croire que la perception subjective ralentie du temps peut s'exprimer dans des mesures objectives d'estimation du temps (discrimination de durée,

production, reproduction et estimation verbale). Premièrement, dans une étude sur l'expérience du temps dans la dépression, Blewett (1992) démontre que la perception ralentie est reliée à une mesure de la dépression : le HARD scale (Rufin et Ferreri, 1984 ; Ferrer! et al., 1986). Ce test comporte quatre sous-échelles : humeur (H), anxiété (A), ralentissement (R) et danger suicidaire (D). Dans l'étude de Blewett, la perception ralentie du temps était le facteur le plus corrélé avec la sous-échelle mesurant le ralentissement psychomoteur, soit la sous-échelle «R». Deuxièmement, tel que mentionné plus haut, la perception ralentie du temps serait un

symptôme à part entière du retard psychomoteur. En effet, le sentiment que le temps passe lentement est un aspect de l'activité cognitive subjective retenue par Dantchev et Widlöcher dans le Salpêtrière Retardation Rating Scale (SRRS) comme un symptôme du ralentissement psychomoteur dans la dépression. Finalement, l’intérêt d’étudier l’estimation temporelle dans la dépression provient du fait que des processus cognitifs qui sont reconnus comme étant perturbés dans la dépression, tels que la mémoire et !’attention, jouent un rôle dans le résultat du jugement temporel. De plus, selon Zakay et Fallad! (1984), l'estimation du temps est une tâche cognitive en soi qui est influencée par les conditions dans lesquelles elle est réalisée. Il y a donc raison de croire que l’estimation du temps pourrait être perturbée dans la dépression.

Dans cette optique, les résultats des études sur l'estimation du temps dans la dépression sont contradictoires. En effet, la perturbation du jugement temporel dans la dépression donne lieu à un portrait beaucoup moins clair que dans le cas de l'expérience ralentie du temps. Certains auteurs concluent à une perturbation de la capacité à estimer objectivement le temps

(21)

chez les déprimés (Kuhs, Hermann, Kammer et Toile, 1991 ; Wyrick et Wyrick, 1977).

Wyrick et Wyrick ont démontré que les participants dépressifs ont surestimé des intervalles de 160 et de 240 secondes en prospectif ainsi que des intervalles de 15 et 30 minutes avec

utilisation du paradigme rétrospectif. La méthode utilisée est T estimation verbale. Kuhs et al. ont quant à eux demandé à des participants déprimés d’estimer verbalement un intervalle de 30 secondes en utilisant le paradigme prospectif. Les participants déprimés ont produit des

estimations significativement plus longues que les participants normaux.

Cependant, d'autres auteurs mentionnent que le jugement temporel objectif est préservé dans la dépression. Mezey et Cohen (1961), ont utilisé les méthodes suivantes pour vérifier T estimation temporelle dans la dépression : reproduction d’intervalles de trois secondes,

estimations verbales de 3 et 30 secondes ainsi que de 20 minutes et une production d’intervalles d’une seconde. Ils sont arrivés à la conclusion que l’estimation temporelle est préservée dans la dépression puisque l’ensemble des résultats se sont avérés non significatifs. De plus, Lehmann (1967) en utilisant des estimations verbales variant entre 20 et 60 minutes, des productions de 15 secondes et des reproductions de 15 secondes conclut également que le jugement temporel objectif est imperturbé par la dépression. Bech (1975) arrive aux mêmes résultats avec des estimations verbales rétrospectives de trois et de cinq minutes. De même, Kitamura et Kumar (1984) concluent que la reproduction prospective d’un intervalle de 1,5 secondes est préservée dans la dépression. Finalement, Hawkins et al. (1988) avec des estimations verbales

rétrospectives de 4 et 13 minutes concluent que l’estimation temporelle est préservée dans la dépression. Ce profil de résultats peut s'expliquer entre autres par le manque de contrôle des conditions pouvant influencer le jugement temporel.

Dans un premier temps, !'utilisation du paradigme prospectif ou rétrospectif influence largement l'estimation temporelle. En effet, les estimations prospectives fournissent un jugement plus juste que les estimations rétrospectives (Block et Zakay, 1997 ; Brown et Stubb,

1992). Par ailleurs, les jugements prospectifs sont habituellement plus longs que les jugements rétrospectifs. Pour expliquer ce fait, les théoriciens ont proposé que le jugement prospectif soit plus juste puisque l'individu est beaucoup plus incité à porter attention au passage du temps quand il sait à l'avance qu'il aura à fournir un jugement de durée. Dans le cas plus particulier

(22)

des dépressions, les estimations prospectives semblent altérées dans la dépression. Cependant, la nature de cette perturbation ne fait pas l'objet de consensus. En effet, il y a une tendance à la surestimation selon Mezey et Cohen (1961) et à la sous-estimation selon Kuhs et al. (1991). Ces derniers expliquent ces résultats par !'implication du retard psychomoteur qui viendrait handicaper les processus responsables de l'estimation temporelle. Dans le cas des jugements rétrospectifs, Bech (1975) conclut que le jugement rétrospectif est préservé chez les déprimés et ne rapporte aucun lien entre le retard psychomoteur et le jugement temporel, de même que Kitamura et Kumar (1984).

Indépendamment du paradigme employé, la méthode choisie pour mesurer l'estimation du temps influence également le jugement temporel. En général, Brown (1985) mentionne que l'estimation verbale d'un intervalle tend à être plus longue et moins juste que la reproduction du même intervalle. Par ailleurs, Zakay (1996) mentionne que la production d'un intervalle donné conduit à un jugement plus court que la reproduction et l'estimation verbale du même

intervalle. Deuxièmement, la durée de l'intervalle à juger a également un effet sur son estimation. En général, les individus tendent à surestimer les intervalles courts et à sous- estimer les intervalles plus longs (Brown et West, 1990). Il importe donc de prendre cet aspect en considération dans l'analyse des différentes études sur le sujet.

Lorsque l'estimation verbale est employée comme méthode d'estimation d'intervalles (en minutes ou secondes), les résultats tendent à ne démontrer aucune perturbation dans la

dépression (Bech, 1975 ; Hawkins et al., 1988). Par contre, Wyrick et Wyrick (1977) ont obtenu des résultats opposés. Les dépressifs dans leur étude avaient tendance à surestimer les intervalles temporels de plus de 160 secondes. De plus, Kuhs et al. (1991) ont démontré que les dépressifs de leur étude sous-estiment un intervalle de 30 secondes de près de 6 secondes. Dans des études utilisant la méthode de reproduction, les recherches ont conclut que le jugement temporel est préservé dans la dépression (Kitamura et Kumar, 1984 ; Lehmann,

1967). Pour ce qui est des tâches de production d'intervalles, seule l’étude de Lehmann (1967) a été réalisée sur le sujet. Il en ressort qu'aucune différence significative ne distingue les participants déprimés et normaux. En ce qui concerne la discrimination de durée, aucune étude connue n'a été effectuée sur des individus atteints de dépression.

(23)

Objectifs et hypothèses

Il ressort de la littérature sur ce sujet une certaine carence au niveau de sphères précises. En effet, peu d'études ont été effectuées avec des participants déprimés en utilisant les

méthodes de production et de discrimination de durée. Par ailleurs, aucune étude n'a tenté de relier les déficits attentionnels avec des perturbations dans l'estimation du temps chez une population dépressive. Par ailleurs, il semble que les nombreux résultats contradictoires aux différentes études puissent provenir d'un manque de contrôle au niveau des méthodes

d'estimation temporelle ainsi que par le manque de rigueur dans la comparaison des durées estimées.

Le but premier de cette étude est de comparer des participants déprimés et normaux sur des mesures de discrimination et de production d’intervalles en situation prospective et

d'estimation verbale en situation rétrospective. En effet, des études doivent être réalisées afin de pallier le manque de résultats sur ces aspects dans le domaine de l'estimation du temps dans une population dépressive. Le deuxième but de cette étude est de vérifier la présence de troubles d'attention soutenue chez les déprimés et de constater si ces déficits ne peuvent pas rendre compte d'éventuelles perturbations dans la justesse et la constance des estimations du temps chez ces mêmes participants. À ce titre, une tâche les participants divisés en deux groupes (déprimés et non déprimés) réaliseront une tâche d'attention soutenue visant à

déterminer leur niveau de performance dans un tel type d'épreuve. Par la suite, les participants réaliseront trois épreuves différentes d'estimation temporelle. Enfin, par la comparaison des performances à la tâche attentionnelle d'une part et celles réalisées au cours des tâches

temporelles ; il sera permis de tirer quelques conclusions à savoir si !'attention peut expliquer en partie les performances d'estimation temporelle chez les déprimés. En fait, !’attention est un des processus le plus souvent retenu pour expliquer la justesse des estimations temporelles. De plus, !’attention semble être une des fonctions cognitives touchées dans la dépression. Il est donc permis de croire que des individus atteints de dépression peuvent présenter des déficits attentionnels pouvant à leur tour influencer l’estimation du temps. À ce jour, aucune étude ne s’est intéressée au lien explicatif entre attention et perception du temps dans la

(24)

Dans un premier temps, les participants déprimés réaliseront une performance inférieure à la tâche attentionnelle lorsque comparés avec les participants non déprimés. Ils réaliseront un plus grand nombre d'omissions et de fausses alarmes. Ce déficit dans Γattention soutenue pourra être compatible avec d’éventuelles performances réduites lors de la réalisation des tâches d’estimations temporelles. Premièrement, les performances de production d'intervalles seront inférieures et plus variables chez les participants déprimés. Cette variabilité dans les performances de production pourrait s’exprimer par des coefficients de variation plus élevés lors de la réalisation des derniers items de la tâche (15 derniers dans la tâche de production d'une secondes et 5 derniers lors de la tâche de production de dix secondes). Cette hausse des coefficients de variation lors des derniers items de la tâche pourrait être reliée à un relâchement dans le mécanisme d’attention, tel que mesuré lors de la tâche d'attention soutenue. De plus, les participants déprimés réaliseront une performance de discrimination d’intervalles inférieure en produisant des pourcentages de discrimination correcte plus bas. Finalement, les

participants déprimés produiront des estimations verbales rétrospectives moins justes que les participants non déprimés.

MÉTHODE

Participants

Le nombre total de participants pour l’étude est de 35 subdivisés en deux groupes : un groupe de participants non déprimés et un groupe de participants déprimés. Le groupe de non déprimés comporte 20 participants et est constitué de 15 femmes et de 5 hommes dont l’âge moyen est de 22,11 ans avec un écart-type de 2,81 ans. Le groupe de participants déprimés comporte 15 participants et est constitué de 13 femmes et 2 hommes. L’âge moyen de ce groupe est de 22, 3 ans avec un écart-type de 2,31 ans. Le recrutement des participants se fait par l’entremise du passage de 1 ’expérimentatrice dans des classes de premier cycle en

psychologie et communication de l'Université Laval ayant accepté de la recevoir. Au total, 120 individus ont complété le Beck Depression Inventory II (BDI-II). Un participant a été recruté au moyen d'affiche. Les individus désireux d'être conservés dans la banque de participants pour les sessions en laboratoire étaient invités à remplir une feuille en y inscrivant leur nom et

(25)

numéro de téléphone. Les participants sont sélectionnés à partir de leur résultat obtenu au BDI- IL Tous les participants ayant obtenu un résultat inférieur à 8 ont été placés dans le groupe de non déprimés tandis que les participants dont le résultat était supérieur à 14 ont été placés dans le groupe des déprimés. Le groupe de participants non déprimés présente une moyenne de 5,05 au BDI-II avec un écart-type de 2,39 tandis que le groupe de non déprimés obtient une moyenne de 19,93 avec un écart-type de 5,32. Après avoir sélectionné les participants

susceptibles de participer aux étapes subséquentes de la recherche, !,expérimentatrice a contacté les participants ayant laissé leurs coordonnées et leur a fixé un rendez-vous pour une session d'expérimentation en laboratoire. Pour la participation à l'étude, chaque sujet a reçu un montant de dix dollars.

Matériel

Afin de constituer !'échantillon de participants, l'Inventaire de Dépression de Beck (Beck, 1996) a été utilisé. Le BDI-II est un questionnaire visant à déterminer la présence ou l'absence de dépression chez un individu selon le résultat obtenu aux 21 items du questionnaire. Chaque item comporte quatre choix de réponse dont la valeur est en ordre croissant, le premier choix ayant une valeur de 0 point et le quatrième valant 3 points. Le résultat minimal pouvant être obtenu est de 0 et le résultat maximal est de 63. S'il y a présence de dépression, le BDI-II permet de classifier la dépression selon le résultat obtenu en tant que légère (14-19), modérée (20-29) ou sévère (30-63). Le BDI-II peut être administré oralement ou par écrit,

individuellement ou en groupe. Dans le cas de la présente étude, !'administration a été effectuée individuellement et de façon écrite.

Les participants auront quatre types de tâches à réaliser soient une tâche attentionnelle, deux tâches de production, trois tâches de discrimination de durée et deux tâches d’estimation verbale rétrospective. Les instruments utilisés pour la réalisation des tâches temporelles de production et de discrimination sont de plusieurs types. Dans un premier temps, les

participants sont installés dans une salle à éclairage atténué. Devant le participant se trouve l'appareillage nécessaire à la réalisation des tâches. Les programmes utilisés pour générer les différentes tâches sont tous informatisés et générés par un ordinateur Zenith PC. En ce qui

(26)

concerne les tâches de production, deux programmes informatisés ont été utilisés. Dans la première tâche de production, 10 flashs lumineux de 10 ms séparés par une seconde d'intervalle sont présentés au participant à l'aide d'une diode circulaire lumineuse rouge (Radio Shack No. 276-088) placée devant lui sur un trépied à une distance de 60 cm et à une hauteur de 30 cm sur une table. Lors de la deuxième tâche de production, 4 flashs lumineux de 10 ms séparés par 10 secondes d’intervalles sont présentés au participant à l’aide du même appareillage. La tâche du participant est de reproduire le rythme qui lui a été présenté en appuyant sur une touche se trouvant sur un appareil de réponse. L'intervalle de temps entre chacune des frappes du participant est enregistré par l'ordinateur.

En ce qui concerne les tâches de discrimination, le matériel est identique à celui utilisé pour les tâches de production. Les points divergents se situent au niveau de la structure de la tâche et du programme utilisé. En effet, dans les trois tâches de discrimination, deux flashs lumineux sont présentés successivement au participant. Ce dernier reçoit la consigne de déterminer si l'intervalle qui lui a été présenté est court ou long. À côté de chaque touche se trouve une petite diode servant à générer la rétroaction au participant sous la forme de flash lumineux. Dans la première tâche de discrimination, le participant doit discriminer des intervalles de 80 et de 120 ms. Dans la seconde tâche, il s'agit de durées de 450 et 550 ms et finalement, dans la dernière tâche, le participant doit comparer des intervalles de 1120 et 1280 ms. Les trois tâches de discrimination comportent chacune 10 essais de pratique suivis de quatre blocs de 24 essais séparés chacun par 15 secondes de pause. Chaque bloc de 24 essais contient 12 intervalles courts (80,450 ou 1120 ms) et 12 intervalles longs (120, 550 ou 1280 ms) présentés aléatoirement à chaque participant. Il n’y a qu’un seul ordre de durées par bloc (80-120,450-550 ou 1120-1280 ms). Après la réalisation des trois tâches de discrimination, le participant aura jugé 144 intervalles courts et 144 intervalles longs.

Pour la tâche attentionnelle, le participant est conduit dans une autre pièce à éclairage atténué. Le participant est placé sur une chaise à environ 46 cm de distance du micro-

ordinateur Macintosh. La tâche attentionnelle consiste en une version maison informatisée du Continuous Performance Test (Brunner et Berry, 1987). Dans cette version du CPT, les 26 lettres de l'alphabet sont présentées en caractère 48 sur fond blanc sur l'écran de l'ordinateur

(27)

durant une seconde. Chaque lettre de l'alphabet est précédée d'une croix de fixation de taille de police 48 pendant 300 ms. De plus, un laps de temps de 200 ms durant lequel aucun stimulus n'est présenté précède chaque croix de fixation. L'ordinateur enregistre chacune des réponses du participant ainsi que le temps de réaction qui lui est associé.

Les estimations verbales rétrospectives sont basées sur le laps de temps que chaque participant passe dans les deux pièces pour réaliser d’une part les tâches temporelles et de l’autre part la tâche attentionnelle. Le participant doit dire combien de temps (en minutes) il croit avoir passé dans chacune des pièces à la fin de 1 ’ expérimentation. La durée moyenne nécessaire pour réaliser les tâches temporelles est de 44 minutes. Le temps maximal de réalisation est de 52 minutes et le temps minimal est de 39 minutes. En ce qui concerne la tâche attentionnelle, la durée moyenne de réalisation est de 18 minutes. Le temps maximal de réalisation est de 20 minutes et le temps minimal est de 16 minutes. Afin de déterminer le temps passé par les participants dans chacune des pièces, !'expérimentatrice utilise un chronomètre.

Procédure

Les participants doivent tout d'abord remplir le BDI-II afin de déterminer à quel groupe ils appartiendront. Par la suite, !'expérimentatrice convoque chaque participant

individuellement à une séance d'expérimentation au laboratoire de psychologie de la perception de l'Université Laval. La moitié des participants débutent la séance par la tâche attentionnelle tandis que l'autre moitié des participants commencent par les sessions de tâches temporelles. Avant de débuter la séance expérimentale, !'expérimentatrice demande au participant de lui remettre sa montre puisque cette dernière pourrait nuire à sa performance. Dès que le

participant entre dans la première pièce, !'expérimentatrice commence à chronométrer le laps de temps qui sera passé dans cette pièce.

Les premières tâches temporelles à être exécutées sont les tâches de production. Afin de réaliser ces tâches, les participants sont informés qu'ils doivent reproduire un rythme présenté à l'aide d'une série de flashs lumineux en appuyant sur une touche. Le participant doit effectuer

(28)

cette tâche à deux reprises. Les deux blocs d'essais sont séparés par cinq secondes de pause. De plus, !'expérimentatrice informe le participant qu'il ne doit pas compter dans sa tête lors de la réalisation de cette tâche. Dans la seconde tâche de production, le participant doit

reproduire à 10 reprises un rythme de 4 flashs lumineux séparés par 10 secondes d'intervalle. Cependant, cette deuxième tâche ne comporte qu'un seul bloc et le participant peut maintenant compter mentalement quand il reproduit le rythme. Lorsque le participant a complété les tâches de production, il doit par la suite effectuer les 3 tâches de discrimination. Les tâches de discrimination sont toujours présentées dans le même ordre, des durées les plus courtes aux durées les plus longues (80-120 ms, 450-550 ms et 1120-1280 ms). Les tâches de

discrimination de durée dans cette étude utilisent la méthode du stimulus unique et comportent des intervalles vides. Les consignes pour les trois tâches de discrimination ne sont données qu'au début de la première tâche puisque les trois tâches nécessitent la même performance de la part du participant. Le participant doit décider si l'intervalle entre chaque paire de flashs

lumineux est court ou long et ajuster sa performance selon la rétroaction visuelle qui lui est donnée. Le participant donne sa réponse en appuyant sur l'appareil de réponse. S'il juge que l'intervalle est court, il appuie sur la touche placée le plus à sa gauche. Par contre, s'il juge que l'intervalle est long, il appuie sur la touche placée le plus à sa droite. Le participant doit rendre sa réponse dans un délai de dix secondes. Dès que les tâches temporelles sont complétées, !'expérimentatrice cesse de chronométrer et note la durée réelle sur une fiche de résultats.

Lorsque les tâches temporelles sont terminées, le participant est conduit dans une autre pièce afín de compléter la tâche attentionnelle. Au moment où le participant entre dans la seconde pièce, !'expérimentatrice commence à chronométrer le laps de temps qui sera passé par le participant dans cette pièce. Les consignes données au participant sont d'appuyer sur la barre d'espacement seulement lorsqu'il détectera un «A» suivi d'un «X». Le stimulus à détecter par le participant est un «A» (avertisseur) suivi d'un «X» (cible). Le participant donne ses réponses en appuyant sur la barre d'espacement du clavier Macintosh. De faux avertisseurs («A» suivi d'une lettre autre que «X») et de fausses cibles («X» précédé d'une lettre autre que «A») sont insérés dans les différents blocs afin de mesurer l'occurrence d'erreurs de commissions. Afín de mesurer les erreurs d'omissions, le taux de cibles non détectées est calculé. Le participant doit effectuer cette tâche durant 3 blocs de 200 essais. Chaque bloc de 200 essais contient 10

(29)

avertisseurs, 10 cibles, 10 faux avertisseurs, 10 fausses cibles et 160 stimuli neutres. Lorsque le participant termine la tâche et qu'il quitte la pièce, !,expérimentatrice arrête le chronomètre et inscrit sur la fiche de résultats le laps de temps qui s'est écoulé depuis l'entrée du participant dans la seconde pièce. Par la suite, !'expérimentatrice demande au participant combien de temps il croit avoir passé dans chacune des pièces et note les réponses aux endroits

correspondant sur la fiche de résultats. Après un mot de remerciement et la remise de la montre, !'expérimentatrice reconduit le participant à la sortie du laboratoire.

RÉSULTATS

Deux types d'analyses statistiques ont été réalisés sur les données recueillies. Dans un premier temps, une série de tests T a été réalisée afin de déterminer les différences entre les groupes de participants déprimés et de participants non déprimés aux différentes mesures. De plus, une série d'analyse de variances à mesures répétées ont également été effectuées afin de dégager une possible interaction entre certains facteurs. Un seuil alpha de .05 a été utilisé pour l'ensemble des tests statistiques réalisés. Les différentes analyses réalisées se subdivisent en quatre ensembles, chaque ensemble correspondant à une tâche précise de !'expérimentation.

Attention

La tâche attentionnelle a permis de calculer trois mesures : le nombre d'erreurs

d'omissions, le nombre d'erreurs de commissions et le temps de réaction moyen. Les omissions sont des erreurs que le participant commet lorsqu'il ne fournit pas de réponse au stimulus

auquel il doit répondre (cible). Pour chaque participant, le nombre total d'erreurs d'omissions au CPT a été calculé. Les participants déprimés (M = 8.73, ET = 11.65) ont produit

significativement plus d'erreurs d'omissions que les participants non déprimés (M = 1.65, ET = 5.12), t (33) = 2.43, p = .021. Les commissions (ou fausses alarmes) sont des erreurs que le participant produit lorsqu'il répond à des stimuli autres que celui auquel il doit répondre. Encore une fois, le nombre total d'erreurs de commissions a été compilé pour chaque participant. Les participants déprimés (M = 4.00, ET = 7.80) n'ont pas produit

(30)

ET = 2.74), t (33) = 1.31, p = .200. Finalement, le temps de réaction moyen de la vitesse de détection générale (en millisecondes) a été calculé pour chaque participant. Les participants déprimés (M = 456.92, ET = 179.08) n'ont pas démontré un temps de réaction plus élevé que les participants non déprimés (M = 421.36, ET = 119.99), t (33) = .704, p = .487.

Production

Les ANOVA ont été effectuées sur les moyennes de production (calculées en

millisecondes). Les moyennes de production ont été soumises à un test T afin de déterminer la présence de différences significatives entre le groupe de participants déprimés et le groupe de participants non déprimés. Aucune différence significative n'a été trouvée entre les déprimés (M = 998.18, ET = 145.57) et les non déprimés (M = 1030.17, ET = 87.93) pour la moyenne de production d’une seconde, t (33) = .808, p = .425.

Les moyennes et écart-types ont également été calculés à partir de la moitié des essais, c'est-à-dire pour les 15 premières productions (première demie) et les 15 dernières (deuxième demie) productions dans la tâche de production d’une seconde. Les moyennes et écart-types des moyennes de production d’une seconde divisées en demies sont présentées au tableau 1.

Insérer tableau 1 ici

Les moyennes de production d’une seconde ont été soumises à une analyse de variances à mesures répétées (2 x 2) afin de dégager l’effet du groupe et des demies. L’effet principal du groupe est non significatif, F (1, 33) = .837, p = .367 ainsi que l’effet principal des demies qui est tout juste non significatif, F (1, 33) = 3.95, p = .055. L’effet d’interaction (groupe x demies) est non significatif, F (1, 33) = 2.52, p = .122. Les résultats sont présentés au tableau 2.

(31)

Pour la moyenne de production de dix secondes, les déprimés (M = 9563.83, ET = 1063.52) n'ont pas réalisé des productions plus élevées que les non déprimés (M = 9934.75, ET = 948.53), t (33) = 1.09, p = .285. Les moyennes et écart-types ont également été calculés pour la moitié des essais, c’est-à-dire pour les 5 premières et 5 dernières productions dans la tâche de production de dix secondes. Les moyennes et écart-types des moyennes de production de dix secondes divisées en demies sont présentées au tableau 1. Encore une fois, une analyse de variances à mesures répétées (2 x 2) a été effectuée sur les moyennes de production de dix secondes afin de dégager l’effet du groupe et des demies. L’effet principal du groupe est non significatif, F (1,33) = .559, p = .460 de même que l’effet principal des demies, F (1, 33) = .425, p = .519 et l’effet d’interaction (groupe x demies), F (1, 33) = .230, p = .635. Les résultats sont présentés au tableau 2.

Afin de vérifier une possible variabilité dans la performance respective des groupes dans les tâches de production, un coefficient de variation a été compilé. Les coefficients de variation ont été calculés en divisant l'écart-type par la moyenne des productions pour un bloc d'essais. Cette mesure est fréquemment utilisée pour évaluer la variabilité des performances de production et de reproduction d’intervalles. Pour les tâches de production d’une seconde, la moyenne, l'écart-type et le coefficient de variation sont calculés à partir de 30 productions, tandis que les mêmes mesures sont basées sur 10 productions dans la tâche de production de dix secondes. Étant donné la grande variabilité des scores, les coefficients de variation ont été transformés en appliquant la racine carrée à chaque observation. Les moyennes et écart-types des racines carrées des coefficients de variation pour les tâches de production d’une et de dix secondes sont présentés au tableau 1. Les racines carrées des coefficients de variation ont été soumises à une analyse de variance à mesures répétées (2 x 2) afin de découvrir la présence de différences significatives entre les groupes en production d’une et de dix secondes. L’effet principal des durées est non significatif, F (1, 33) = 3.85, p = .058 de même que l’effet d’interaction (durées x groupe), F (1, 33) = 1.04, p = .315. Par contre, l’effet du groupe est significatif, F (1, 33) = 4.31, p = .046. Les déprimés ont produit des performances de

production plus variables que les non déprimés dans la tâche de production d’une seconde et de dix secondes. Les résultats sont présentés au tableau 3.

(32)

Insérer tableau 3 ici

De la même manière que pour les moyennes de production, les coefficients de variation en production d’une seconde ont été calculés pour la moitié des essais, c'est-à-dire les 15 premiers essais (première demie) et les 15 derniers essais (deuxième demie). Encore une fois, pour pallier à la grande variabilité des scores, les coefficients de variation divisés en demies ont été transformés par !’application de la racine carrée à chaque observation. Les racines carrées des coefficients de variation pour la tâche de production d’une seconde divisées en demies ont été soumises à une analyse de variances à mesures répétées (2 x 2). L’effet du groupe est non significatif, F (1, 33) = 3.79, p = .060 de même que l’effet des demies, F (1,33) = .001, p = .973 et l’effet d’interaction (demies x groupe), F (1, 33) = .202, p = .656. Ainsi, dans la première demie, la performance des participants déprimés (M = .283, ET = .094) n'est pas plus variable que celle des participants non déprimés (M = .239, ET = .061). Dans la deuxième demie, aucune différence significative n'a été trouvée entre les participants déprimés (M = .291, ET = .130) et non déprimés (M = .232, ET = .079) en ce qui a trait à la variabilité des

performances. Les résultats sont présentés au tableau 4.

Insérer tableau 4 ici

Les coefficients de variation en production de dix secondes ont également été calculés pour la moitié des essais (5 premiers essais et 5 derniers essais) et dû à la grande variabilité des scores, ont été transformé par !’application de la racine carrée à chaque observation. Les racines carrées des coefficients de variation de production de dix secondes ont été soumises à une analyse de variances à mesures répétées (2 x 2). L’effet principal du groupe est non significatif, F (1, 33) = .182, p = .672 ainsi que l’effet principal des demies, F (1, 33) = .735, p = .398 et l’effet d’interaction (groupe x demies), F (1, 33) = 2.02, p = .164. Au cours de la première demie, la performance des déprimés n'a pas été plus variable (M = .212, ET = .078) que celle des non déprimés (M = .220, ET = .071). De plus, au cours de la deuxième demie, les

Figure

Tableau 2 SC  ddl  MC  FMesures Production 1 seconde Demies 5687.82 1 5687.82 3.95 Groupe 15391.65 1 15391.65 .837 Demies x Groupe 3626.98 1 3626.98 2.52 Erreur 606661.01 33 18383.67 Production 10 secondes Demies 95377.17 1 95377.17 .425 Groupe 982251.38 1
Tableau 3 Mesures SC ddl MC F Durées .028 1 .028 3.85 Groupe .027 1 .027 4.31* Durées x Groupe .008 1 .008 1.04 Erreur .209 33 .006 *g &lt; .05.
Tableau 4 Mesures SC ddl MC F Production 1 seconde Demies .000006 1 .000006 .001 Groupe .0449 1 .0449 3.79 Demies X Groupe .00096 1 .00096 .202 Erreur .391 33 .0119 Production 10 secondes Demies .0021 1 .0021 .735 Groupe .0018 1 .0018 .182 Demies X Groupe

Références

Documents relatifs

Dans cet article nous montrons que, dans un contexte distribué, la convergence en temps fini peut être obtenue en utilisant des matrices conjointement diagonalisables, formées...

La matrice A est inversible car l'algorithme du pivot partiel permet de se ramener à une forme triangulaire, on peut poursuivre alors pour calculer l'inverse.. Il existe un

Informations importantes ou faits marquants pour la prise en charge du jour. J 3

2°) En effet, une fois démontrée non contradictoire la formule qui l'exprime, on tiendra pour réduit à un énoncé fini tout énoncé idéal — donc valide dans un domaine infini —

En vous souhaitant une bonne réception de ce document important pour la poursuite des études de votre enfant et en vous demandant de nous faire parvenir pour le 25 mars 2019 au

En vous souhaitant une bonne réception de ce document important pour la poursuite des études de votre enfant et en vous demandant de nous faire parvenir avant le 25 mars 2019 le

L’impact de la double-tâche n’est pas le même selon le niveau d’expertise : pour les novices, la performance initiale en lien avec la tâche primaire diminue avec l’exécution de

L'impact de la double-tâche n'est pas le même selon le niveau d'expertise : pour les novices, la performance initiale en lien avec la tâche primaire diminue avec l'exécution de