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Trois essais sur les liens entre le port et son territoire environnant : le cas du Québec

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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Trois essais sur les liens entre le port et son territoire

environnant : Le cas du Québec

Thèse

Koffi Koudzega Gbenyo

Doctorat en aménagement du territoire et développement régional

Philosophiæ doctor (Ph. D.)

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Trois essais sur les liens entre le port et son

territoire environnant

Le cas du Québec

Thèse

Koffi Gbenyo

Sous la direction de :

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Résumé

Cette thèse explore les relations qui peuvent exister entre le port et son environnement économique. Elle est rédigée en trois chapitres qui proposent une certaine gradation. Le premier chapitre cherche à identifier des territoires géographiques, formés par des cercles de rayons variables autour des ports comme centres, au sein desquels les valeurs d’un ensemble d’indicateurs économiques sont stables. Cette première étape cherche à identifier une échelle pour laquelle les résultats d’analyses portant sur ces indicateurs varieraient moins. Pour arriver à cette fin, des analyses économétriques issues de tests de stabilité sont utilisées. Les résultats révèlent un territoire défini sur des rayons compris entre 4 000m et 4 500m autour des ports.

Le second chapitre présente d’abord les fonctions des ports du Québec selon leurs activités, puis une analyse de classification de ces ports à partir d’une classification statistique basée sur les activités de ces ports, puis sur les activités économiques localisées dans un rayon de 4 250m autour de ces ports. Les deux typologies ainsi formées sont comparées pour ensuite vérifier si les paysages économiques autour des (groupes de) ports reflètent les activités principales exercées par les ports qui les constituent. Les résultats révèlent que les activités autour de (certains) ports appartenant au groupe de ports ruraux et métropolitains reflètent plus leurs propres activités, mais que ceci n’est pas toujours le cas pour le reste des ports. Par conséquent, il est globalement difficile de simplifier la réalité des activités économiques avoisinantes aux activités portuaires.

Le troisième chapitre étudie la relation entre la croissance des activités portuaires et la croissance des activités économiques de secteurs industriels différents autour des ports, au moyen d’analyse de corrélation. Le chapitre vérifie si la croissance des activités (des ports et de leurs régions respectives) est statistiquement liée, et si cette relation est positive. Les résultats montrent que la croissance des activités portuaires est seulement suivie d’une croissance des emplois manufacturiers autour des ports.

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Abstract

This thesis investigates the relations between ports and their economic environment. It is written in three chapters that offer a gradation. The first chapter seeks to identify the geographical territories, formed by circles of variable radii around the ports as centers, within which the value of a bunch of indicators remain stable. This first step identifies the scale over which the results of analyses using those indicators vary less. To achieve this goal, econometric analyses are used through parameters stability testing. The results reveal a territory defined over a range of radii between 4,000m and 4,500m.

The second chapter presents first the principal functions of the ports of the province of Quebec based on their activities, and then a classification of these ports using a statistical classification based on the ports’ activities, and on the economic activities located within 4,250m around these ports. The groups (of both typologies) obtained are compared, in order to verify whether (or not) the business landscape of these (groups of) ports reflects their main activities. The results show that the activities of ports that belong to the rural and metropolitan categories of ports have landscape reflecting their main activities, which is not the case for the majority of ports. Consequently, one could hardly simplify the economic reality of the ports’ neighbourhood to the activities of the incumbent ports.

The third chapter uses correlation analysis to study the relationship between the growth of the ports’ activities and the growth of their surrounding economic activities from different industrial sectors. It verifies whether (or not) the growth of these activities is statistically associated, and (whether or not) the eventual resulting associations are positive. The results show that the growth of the ports’ activities is only followed by the growth of jobs in the manufacturing sector around the ports.

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Table des matières

Résumé ... ii

Abstract ... iii

Table des matières ... iv

Liste des figures ... vii

Liste des tableaux ... viii

Liste des abréviations, sigles, acronymes ... ix

Remerciements ... xi

Avant-propos ... xii

Introduction ... 1

Mise en contexte : Pourquoi s’intéresser au port ? ... 4

Le port dans l’histoire ... 7

Le port à l’ère de la révolution industrielle ... 8

Le port à l’ère du conteneur ... 9

Littérature portuaire générale ... 12

Cadre conceptuel théorique ... 17

La théorie des pôles de croissance ... 18

Théorie des pôles de croissance et le port ... 19

Question de recherche, objectifs, hypothèses ... 21

Question de recherche ... 21

Trois objectifs généraux ... 21

Hypothèses de recherche ... 21

1 Chapitre 1 : Le MAUP et l’insoluble question de frontière optimale ... 23

1.1 Résumé ... 23

1.2 Abstract ... 24

1.3 Introduction ... 25

1.4 Revue de littérature ... 27

1.5 Méthodologie d’analyse ... 31

1.5.1 Des indicateurs locaux ... 31

1.5.2 Test d’égalité des moyennes (Analyse de la variance) ... 32

1.5.3 Test de bris structurel spatial ... 33

1.6 Les microdonnées spatiales ... 35

1.6.1 Les données : ports et établissements ... 37

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1.7 Résultats – Stabilité des indicateurs locaux ... 41

1.8 Conclusion ... 50

Transition entre le chapitre 1 et le chapitre 2 ... 52

2 Chapitre 2 : Activités portuaires et activités économiques avoisinantes : existe-t-il un lien? Une approche par la classification hiérarchique ... 53

2.1 Résumé ... 53

2.2 Introduction ... 54

2.3 Revue de littérature ... 55

2.4 Méthodologie ... 57

2.4.1 Classification ascendante hiérarchique ... 57

2.4.2 Les variables ... 62

2.5 Données ... 67

2.5.1 Données des ports ... 69

2.5.2 Données des établissements ... 75

2.6 Résultats et discussions ... 77

2.6.1 Classification des ports basée sur leurs propres activités ... 77

2.6.2 Classification des ports basée sur leur environnement économique ... 80

2.6.3 Comparaison des deux typologies ... 84

2.7 Conclusion ... 87

Transition entre le chapitre 2 et le chapitre 3 ... 89

3 Chapitre 3 : le port est-il un vecteur de développement régional ? Le cas du Québec . 90 3.1 Résumé ... 90 3.2 Abstract ... 91 3.3 Introduction ... 92 3.4 Littérature ... 93 3.5 Méthodologie ... 98 3.6 Données ... 101 3.6.1 Présentation ... 101 3.6.2 Variables : description ... 106 3.7 Résultats ... 108

3.7.1 Exploitation des ressources ... 109

3.7.2 Manufacturier ... 112

3.7.3 Transport et entreposage ... 115

3.8 Conclusion ... 118

Conclusion générale ... 120

(7)

Rappel des applications empiriques ... 121

Les originalités et forces de la thèse ... 122

Les limites de la thèse ... 122

Implications des conclusions et des travaux de la thèse ... 123

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Liste des figures

Figure 1.1: Distribution d’une variable en fonction de l’échelle géographique ... 34 Figure 1.2: Représentation des points de localisation des ports commerciaux stratégiques et des établissements au Québec ... 36 Figure 1.3: Distribution des valeurs de l’indicateur de spécialisation d’emplois autour des ports .... 44 Figure 1.4: Distribution des valeurs de l’indicateur de diversification d’emplois autour des ports .. 45 Figure 2.1: Méthodes de calcul de distances entre observations ... 60 Figure 2.2: Représentation cartographique de la localisation des ports et établissements de la

province du Québec ... 68 Figure 2.3: Classification des infrastructures portuaires du Québec basée sur leurs activités ... 78 Figure 2.4: Classification des ports basés sur leurs environnements économiques dans un rayon de 4 250 m ... 80 Figure 3.1: Distribution de la croissance du tonnage transigé sur la période 2007-2011... 107 Figure 3.2: Relation entre croissance du tonnage transbordé (2007-2011) et croissance du nombre d’établissements et d’emplois en exploitation de ressources (2011-2016) ... 111 Figure 3.3: Relation entre croissance du tonnage transbordé (2007-2011) et croissance du nombre d’établissements et d’emplois du manufacturier (2011-2016) ... 114 Figure 3.4: Relation entre croissance du tonnage transbordé (2007-2011) et croissance du nombre d’établissements et d’emplois en transport et entreposage (2011-2016) ... 117

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Liste des tableaux

Tableau 1.1: Liste de 25 ports commerciaux stratégiques de la province du Québec et leur trafic (en

millions de tonnes) transigé de 2005 ... 38

Tableau 1.2: Définition des secteurs d’activités économiques ... 40

Tableau 1.3: Résultats de test basé sur l’analyse de variance ... 43

Tableau 1.4: Test de bris structurel spatial relatif au paramètre α1 - Statistiques Student ... 48

Tableau 1.5: Test de bris structurel spatial relatif au paramètre α2- Statistiques de Student ... 49

Tableau 2.1: Classification des ports en fonction de leurs activités commerciales principales ... 73

Tableau 2.2: Quantités de marchandises transigées dans les ports en 2011 (en milliers de tonnes) . 74 Tableau 2.3: Statistiques d'indicateurs du paysage économique dans un rayon de 4 250 m autour des ports ... 76

Tableau 2.4: Statistiques par classes de ports regroupés selon les activités portuaires ... 79

Tableau 2.5: Statistiques par classes de ports regroupés selon leur paysage économique ... 83

Tableau 3.1: Catégorisation des ports basée sur la portée des activités ... 102

Tableau 3.2: Catégorisation du réseau portuaire du Québec, basée sur les types de marchandises 103 Tableau 3.3: Catégorisation du réseau portuaire du Québec, basée sur le paysage économique ... 104

Tableau 3.4: Définition de trois grands sous-secteurs d’activités économiques en lien direct avec l’industrie portuaire ... 106

Tableau 3.5: Corrélation entre performance des ports (2007 - 2011) et performance des établissements (2011 - 2016) par secteur d’activités en lien potentiel avec l’industrie maritime et portuaire ... 109

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Liste des abréviations, sigles, acronymes

ANOVA Analyse de la variance

ASRDLF Association de Science Régionale de Langue Française

CAH Classification ascendante hiérarchique

CEMT Conférence européenne des ministères de transport

CRAD Centre de Recherche en Aménagement et Développement

CRDT Centre Régional de Développement Territorial

DEA Data envelopment analysis

EVP Equivalent vingt pieds

GMM Generalized Method of Moments

m Mètre

MAUP Modifiable Area Unit Problem

MTQ Ministère des Transports du Québec

MTMETQ Ministère des Transports de la Mobilité durable et de l'Électrification des Transports du Québec

OCDE Organisation de coopération et de développement économiques

PIB Produit intérieur brut

PPP Partenariat privé-public

RERU Revue d'Economie Régionale et Urbaine

RMR Région métropolitaine de recensement

SCIAN Système de classification des industries de l'Amérique du Nord

SIC « Standard Industrial Classification »

TMCD Transport maritime sur courte distance

TIC Technologies d’information et de communication

UL Université Laval

UNESCAP United Nations Economic and Social Commission for Asia

and the Pacific

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Remerciements

Je remercie ma famille pour le support moral dont ils ont fait preuve à mon endroit durant toutes ces années de recherche qui aboutissent sur la production de ce document.

Je remercie mon Directeur de recherche, Jean Dubé, pour toutes ces années durant lesquelles il a accepté de me diriger. Il a toujours corrigé mes textes dans un court délai et m’a permis à chaque occasion de faire avancer au mieux mes travaux. Ses conseils et recommandations ont été mes guides tout au long de cette aventure, et continueront de l’être au cours des années à venir.

Je remercie les organisations de CRAD et de l’ÉSAD pour leur soutien professionnel et administratif dont j’ai bénéficié depuis septembre 2014.

Je remercie également l’UQAR et tous ces professeurs qui ont vu commencer cette aventure en 2012, et dont les cours, conseils et apports de diverses formes ont contribué à ce moment. À tous ceux qui, de près ou de loin, ont contribué à la réalisation de ce travail, je dis : un grand merci. Je ne saurai dresser cette liste interminable de personnes au rang desquelles : professeurs, frères, sœurs, amis, collègues.

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Avant-propos

Tout a commencé un jour de 2012 quand, en fouillant sur internet avec les mots clés tels que « économétrie », « économie », « statistique », j’ai découvert le nom de Jean Dubé, et ses travaux en « économétrie spatiale ». De mes souvenirs de ma formation en économétrie, je me rappelle avoir rencontré des concepts centraux à l’économétrie spatiale tels que la matrice de pondération, par exemple, dans l’utilisation de la méthode des moindres carrés généralisés pour estimer des paramètres de modèles statistiques. Là où ce concept m’avait accroché, c’est de savoir qu’on intégrait une autre dimension, géographique celle-là, dans les données individuelles. Cette dimension ne fait qu’ajouter à la richesse de l’information que l’on pouvait disposer sur les individus lors des analyses. Même si ma thèse, aujourd’hui, n’a pas eu besoin d’utiliser cet outil (l’économétrie spatiale), je me rappelle m’être précipité (sur le conseil de Jean), sur le livre phare en la matière, intitulé « Introduction to Spatial Econometrics » de Lesage et Pace (2009) ; livre dont je ne me suis plus séparé. J’ai alors

contacté Jean et manifesté mon souhait à travailler avec lui. Après m’avoir longuement entretenu sur mes motivations, on a convenu d’une entrevue en personne.

La suite : un premier voyage de Montréal à Rimouski où Jean Dubé enseignait. Un voyage qui a duré plus de six heures (l’Équivalent d’un vol Montréal-Paris). Le plus long voyage que j’effectuais depuis que j’avais foulé le sol de la province un après-midi de mars 2008. Entre mon entretien avec Jean à son bureau et un aller-retour à la cafétéria de l’UQAR (nos discussions allaient bon train) l’avenir allait finalement me guider à m’inscrire au doctorat en développement régional à l’UQAR puisqu’il acceptait de diriger mes travaux. Sans hésiter, j’ai soumis mon dossier de candidature pour le doctorat au Directeur des études doctorales à l’époque, le professeur Yann Fournis. Mon admission marque le début de cette longue aventure qui s’achève par la présente thèse.

En cours de route, j’ai fait la connaissance de formidables camarades doctorants (je me rappelle notamment Isabelle Morin et Cindy Giroux). Je me rappelle également les colloques du CRDT auxquels on participait dans une grande ambiance de convivialité à l‘hôtel SEPIA à Sainte-Foy dans la ville de Québec, les professeurs qui nous enseignaient par binômes (Marie-José Fortin et Marc-Urbain Proulx; Bruno Jean et Martin Simard ; Yann Fournis et

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j’allais faire le chemin sous la supervision du même professeur (Jean Dubé), Nicolas Devaux. Je me rappelle les mots de motivation de ce dernier à mon endroit (dans l’aventure à venir, dans laquelle lui-même s’est engagé une année plutôt) une fin de matinée sur ma route de l’UQAR à la gare d’autocar de Rimouski pour Montréal. Je me rappelle également un après-midi sur le chemin retour après un bref séjour de connaissance et de travail, les discussions et encouragements de Cédric Brunelle dans le train qui nous menait de Québec à Montréal. Le mois de septembre 2014 constitue un tournant qui marquera mon passage de l’UQAR (où je venais de passer mon examen doctoral) à l’Université Laval puisque mon Directeur de recherche, Jean Dubé, venait d’y obtenir un poste de professeur. Cette thèse concrétise plusieurs années de travail durant lesquelles j’aurai découvert un domaine de recherche stimulant, celui de l’économie géographique. Nous nous sommes lancés dans des recherches appliquées suite à un premier contrat de recherche avec le Ministère des Transports du Québec (MTQ), entre temps le MTMETQ et qui est redevenu le MTQ, pour explorer les liens d’interdépendance qui pourraient exister entre les ports de la province et les activités économiques qui se développent dans leur environnement. Les contrats de ces recherches sont assortis d’une clause qui permettait au doctorant impliqué (moi-même) d’utiliser les données et résultats comme intrants pour rédiger ses travaux de recherche (la présente thèse), sous réserve de respect de leur confidentialité. Deux contrats ont été exécutés, chacun sanctionné par un rapport écrit et livré au Ministère. La quasi-totalité des montants alloués à

ces contrats m’a permis d’obtenir un support financier pour effectuer les recherches.

Les deux contrats (projets) exécutés ont inspiré la rédaction de l’ensemble des chapitres de cette thèse. Le premier chapitre intitulé « Le MAUP et l’insoluble question de frontière

optimale » dont je suis l’auteur principal a été rédigé en collaboration avec mon directeur de recherche, Jean Dubé. Il a été initialement écrit et communiqué sous le titre « Le problème d’unité d’aire modifiable : une application empirique au Québec avec indicateurs spatiaux calculés sur données individuelles », au 53e colloque de l’Association de science régionale de langue française (ASRDLF) tenu les 7, 8, et 9 juillet 2016 à Gatineau au Québec. Suite à cette communication, l’article a été sélectionné pour faire partie d’un numéro spécial de la Revue d’économie régionale et urbaine (RERU) sur le thème de la frontière. Il a été soumis à la revue sous le titre « Tester le problème d’unité d’aire modifiable à partir de microdonnées

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spatiales : peut-on identifier une échelle invariable ? » puis accepté avec modifications. Nous avons notamment modifié le titre, sous proposition d’un évaluateur : « Le MAUP et l’insoluble question de frontière optimale ». L’article a été définitivement accepté, sous ce titre, et publié en juin 2018 dans le volume 3 du numéro spécial de cette revue (n°2018-3), aux pages 619 à 650.

Le second chapitre intitulé « Les activités portuaires reflètent-elles l’environnement géographique : une approche par la classification hiérarchique : le cas du Québec » a été préalablement rédigé en deux versions. Une première (dont je suis le co-auteur) sous forme de rapport d’études livré au MTMETQ en avril 2015 sous le titre : « Classification économique des ports du Québec : Une approche basée sur la description du paysage économique »1 puis une seconde version, rédigée sous forme d’article (non publié encore), a été écrite en deux formats : un premier intitulé « Vers une classification économique des ports du Québec : une approche basée sur la description du paysage économique », présenté le 20 mars 2015 lors du 20e colloque étudiant pluridisciplinaire organisé par le CRAD. Un second format, bonifié du premier et qui intègre des éléments théoriques (de la littérature) en appui aux résultats, a été écrit en Anglais. Intitulé « The nature of economic activities in the neighbourhood of ports in Quebec ? », celui-ci a été présenté lors d’une conférence, la « World Conference on Transport Research Society (WCTRS) »2 tenue à Anvers (en Belgique) les 11 et 12 mai 2015.

Le troisième chapitre intitulé « Le port est-il encore un vecteur de développement régional ? Le cas du Québec », dont je suis l’auteur principal, a été rédigé en collaboration avec Jean Dubé, sous forme d’article. Celui-ci est en cours de révision afin d’être traduit en anglais dans le but d’être soumis à une revue en transport. Initialement intitulé « Relation entre croissance des activités portuaires et distribution spatiale des activités économiques au Québec », il a été écrit et communiqué lors du 22e colloque étudiant pluridisciplinaire

1 http://www.bv.transports.gouv.qc.ca/mono/1176076.pdf (consulté le 23 Octobre 2019)

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xv

organisé par le CRAD le 17 mars 2017. Il a ensuite été bonifié et livré sous le même titre sous forme de rapport final d’études3, en août 2018 au MTMETQ.

.

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Introduction

C’est en s’assurant le contrôle des océans et des mers que plusieurs empires se sont hissés au sommet de leurs ambitions. A contrario, la perte de contrôle de cette infrastructure a souvent marqué le début du déclin de certains empires. La mer, comme l’océan, est le lieu de toutes les richesses, car c’est par là que circulent, depuis des millénaires, les marchandises, mais également les idées à travers les personnes telles que les explorateurs (Attali, 2017). Ils sont les lieux de plusieurs formes de pouvoirs : le pouvoir économique, via les échanges commerciaux ; le pouvoir géopolitique, via l’accès privilégié à un territoire et à ses ressources ; le pouvoir militaire, via les grandes batailles navales qui ont décidé du sort des nations ; le pouvoir social (les puissances exercent une domination ou une coopération) et culturel (une vitrine qui donne sur une autre culture).

Aujourd’hui, environ 90 %4 des échanges commerciaux mondiaux se font par la mer, et tout semble indiquer que cette tendance ne s’essoufflera pas avec le temps. Le port constitue une interface entre la mer et la terre qui représente l’arrière-pays et l’avant-pays à laquelle sont destinés les produits, matières, et personnes, transportés sur des navires par la mer. À ce titre, le port tient lieu de richesse, tout comme la mer et l’océan.

Chaque jour, des milliers de tonnes de marchandises sont chargées et déchargées des navires. Le succès des ports est tributaire des demandes émanant de ses utilisateurs de services que sont les producteurs de ces marchandises, mais également des intermédiaires tels que les affréteurs qui ont la responsabilité de charger (et décharger) les marchandises des navires. Ils tiennent ainsi une place de choix dans le succès des entreprises qui produisent les marchandises, de par leur capacité à livrer ces marchandises à temps et en l’état aux destinataires. Pour cerner cette interdépendance entre les ports et les entreprises, il faut comprendre les forces à l’œuvre dans les industries de ces unités de production et de transport.

D’un côté, les productions manufacturières, qui étaient jadis localisées en des points précis, s’organisent de plus en plus en réseau dans l’espace. Par exemple pour des raisons

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d’efficacité de production, une partie de la fabrication peut être assurée à un endroit (un pays, une région, où le coût salarial est le plus faible), une autre partie fabriquée à un autre endroit, et le tout assemblé à un tiers endroit, alors que la gestion de la production et de la distribution peut également être assurée en un autre lieu. En réalité, les entreprises ne proviennent pas que du secteur manufacturier, et leur présence sur le territoire du port n’implique plus nécessairement un lien fonctionnel avec celui-ci, leur présence pouvant être due à des raisons totalement indépendantes de la seule présence du port. Par exemple, des raisons liées aux caractéristiques urbaines telles que la présence de capital humain dont peuvent bénéficier, directement ou indirectement, les entreprises.

D’un autre côté, les ports s’organisent en réseaux de systèmes et en chaînes logistiques, incluant à la fois d’autres ports (de relais par exemple), des transporteurs ferroviaires et terrestres, qui assurent le relai des marchandises une fois arrivées à quai. Cette efficacité d’organisation permet d’asseoir une notoriété des ports, et de tout le réseau de chaînes logistiques dont il fait partie, et qui verrait alors à conforter sa place dans la compétition qui s’établit entre les différents réseaux de chaînes logistiques. Dans un monde de plus en plus globalisé, où les humains, les capitaux, et les innovations sont de plus en plus mobiles, les phénomènes économiques ont une envergure qui transcende les frontières. Ces phénomènes continus et leur analyse nécessitent moins la prise en compte des frontières que de celle de la continuité.

Si la mer, les océans et par ricochet le port font l’objet de convoitise, le territoire adjacent au port l’est tout autant sur le plan national, régional (au sens infra national), ou local. Le territoire est appelé à se développer, en bénéficiant des retombées de son port.

En science régionale, le « local » revêt un intérêt certain, et dans l’industrie portuaire en particulier, on peut (légitimement) penser que les autorités publiques locales ont le pouvoir sur une partie des dynamiques économiques qui transcendent les frontières, dans le but d’influencer le processus de développement de leur territoire. Le pari n’est pas toujours gagné.

La présente thèse propose d’étudier les liens d’association entre les activités portuaires et les activités économiques dans l’environnement des ports de la province du Québec. Sa portée empirique concerne deux sortes d’activités : les activités de transport de marchandises qui

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arrivent et quittent un ensemble de ports de la province du Québec, et les activités des établissements qui se localisent dans les territoires qui abritent ces ports. L’analyse proposée considère uniquement les volumes et les types de marchandises qui sont transigés dans les ports d’une part, et les nombres d’établissements et d’emplois qui sont logés sur les territoires de ces ports d’autre part. Elle permet de renseigner, d’un point de vue de la géographie économique, la distribution des établissements et des emplois par rapport aux ports, et de donner un éclairage sur les liens pouvant exister entre ces deux entités. Les données utilisées sur les établissements dans cette recherche ne font pas état des liens qui peuvent exister (ou pas) entre certains de ces établissements avec les ports. La recherche se base sur les éléments de la littérature, sur des données factuelles (exemple : volume et types de biens) sur les ports, les tendances survenues dans l’industrie portuaire et maritime, les forces attractives et répulsives qui guident la localisation des établissements sur un territoire, telles que les coûts faibles de transport des marchandises (dus au développement des moyens de transports terrestres) des ports vers les utilisateurs de services et vice versa.

La thèse est subdivisée en trois chapitres qui en constituent le corps ; ces chapitres sont présentés sous forme de trois applications empiriques. Bien avant d’entamer ces chapitres, une mise en contexte situe la thèse dans un contexte global et général, suivie d’une littérature qui présente l’état de la question sur les recherches portuaires et situe la thèse dans un contexte plus particulier.

Le premier chapitre, sous forme d’article, a été publié dans une revue scientifique (RERU). Le second chapitre, sous forme de rapport de recherche, présente le lien pouvant exister entre la composition des activités portuaires et les activités économiques autour des ports. Le troisième et dernier chapitre, sous forme d’article (non soumis), étudie le lien qui peut exister entre croissances des activités portuaires et des activités économiques. Une conclusion générale reprend le contexte de la thèse, rappelle les applications empiriques (les chapitres), les objectifs et les résultats qui permettent de juger de leur atteinte, ainsi que quelques implications de ces résultats en termes de politiques publiques.

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Mise en contexte : Pourquoi s’intéresser au port ?

La thèse s’inscrit dans un contexte général de développement régional. Elle vise à fournir quelques éléments de compréhension des liens qui peuvent exister entre les unités économiques (entreprises et établissements) opérant sur un territoire et les activités portuaires dans le but, ultimement, d’appuyer l’élaboration des politiques publiques visant à développer un territoire sur la base des relations économiques qu’il entretient avec les agents économiques.

Les notions d’« espace » et de « territoire », souvent rencontrées en géographie, méritent une brève précision. L’espace désigne l’étendue de la surface autour de soi ; il est neutre (Moine, 2006)5. Le territoire désigne un espace habité par des individus qui y expriment leur mode de vie, leur culture, et exercent des activités économiques ; il n’est donc pas neutre. La thèse propose d’adopter le terme de « territoire » plutôt que celui d’« espace ». Dans la présente recherche, ce territoire désigne la région avoisinant les ports, sur laquelle ces derniers exercent leur influence.

Lors des analyses (spatiales) en science régionale, il est pratique courante de définir le territoire sur lequel un phénomène observé (exemple : la pauvreté, la criminalité, la croissance, le développement, etc.) est étudié avant de commencer par rassembler les données. Autrement, on peut facilement passer du temps et de l’énergie à collecter des données pour se rendre compte qu’elles ne sont finalement que peu ou pas pertinentes pour l’analyse. Il n’existe pas de règle fixe pour définir ce territoire, les délimitations des frontières devant s’ajuster en fonction du problème analysé ; sa définition apparait alors dans l’analyse comme un choix méthodologique. Selon l’objectif poursuivi, on peut adopter divers critères pour le saisir.

5Des procès sont faits à l’économie néoclassique par exemple sur le fait qu’elle ait longtemps supposé la

neutralité de l’espace. Des chercheurs réintroduisent la dimension spatiale dans leur analyse en soutenant que l’espace n’est ni économiquement (Krugman, 1991 ; Thisse, 1997 ; Crevoisier, 2004 ; Le Gallo et Thomas, 2015) ni socialement neutre (Proulx, 2002).

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Trois caractérisations classiques des régions (comme formes de territoire) sont proposées très tôt par l’économiste français Jacques Boudeville (1972), chacune définie selon un critère donné : i) la région polarisée définie selon le critère de nodalité ; ii) la région définie comme des aires contiguës selon le critère d’homogénéité ; et iii) la région plan définie selon le critère administratif et politique.

Selon le critère de nodalité, les régions sont définies comme des aires d’influence polarisées par un lieu central ; on parle de régions nodales ou de régions polarisées. Selon le critère d’homogénéité, les régions sont définies comme un ensemble d’aires contiguës ayant des traits particuliers (histoire, culture, langue, base économique, etc.) qui devient le principe de leur regroupement ; on parle alors de régions homogènes. Selon le critère de frontières administratives ou politiques, on parle de régions administratives ou politiques, ou de régions plan. Dans ce dernier cas, les frontières de la région sont parfois tracées en fonction des besoins d’agence ou d’organismes spécialisés. Ces trois distinctions de la région n’épuisent pas toutes les possibilités de définitions, et le concept n’est pas immuable, mais change d’une période à l’autre. Un pas de plus vers l’élucidation du territoire6 est rendu possible grâce aux microdonnées.

Les politiques publiques en matière d’aménagement et de planification sont destinées à influencer l’organisation de l’espace de manière à lui assurer un développement moins hétérogène (Friedmann, 1987). Ultimement, ces politiques espèrent diminuer les inégalités de développement qui se forment par le simple fait de la croissance économique et de l’organisation des activités économiques dans l’espace, devenu territoire.

Il existe des inégalités dans la façon dont s’organisent et se développent les territoires. Plusieurs raisons existent à cela. Par exemple, le fait que les territoires n’aient pas la même histoire ni les mêmes dotations (ressources naturelles), et par conséquent n’ont pas les mêmes conditions de départ, sont des raisons pour expliquer les écarts de développement (Hoover, 1948 ; Engerman and Sokoloff, 2002). Même s’ils bénéficiaient des mêmes conditions de départ, le fait que les territoires ne pratiquent pas les mêmes politiques internes les amène souvent à emprunter des voies divergentes de croissance et de développement (Hoover, 1948;

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Demazière, 2014). Par exemple, certains territoires peuvent avoir adopté une politique fiscale qui attire plus d’entreprises que d’autres, ou encore une politique d’immigration qui attire plus de populations actives que d’autres. Ces différences de politiques internes peuvent faire en sorte qu’il y ait plus d’opportunités, plus de services publics de qualité pour les citoyens qui sont de fait attirés et/ou retenus sur un territoire par rapport à un autre.

Au Canada et au Québec, les gouvernements successifs tentent d’impulser des dynamiques économiques et sociales aux régions les plus éloignées des grands centres urbains, afin de leur donner les moyens de leur propre développement et de réduire les écarts d’avec les centres. Pour y arriver, ils adoptent des politiques économiques de développement au moyen de divers outils. Un de ces outils concerne le transport7.

Le transport répond à une demande de mobilité des personnes (travailleurs, touristes) et d’informations ainsi que de biens et marchandises de leurs lieux de disponibilité vers les lieux de besoin. En ce sens, il est une demande dérivée. En le promouvant, les politiques publiques recherchent à stimuler des effets directs et indirects. Les effets directs résultent d’une meilleure connexion géographique entre individus, activités économiques, régions, et entre les différentes combinaisons de ceux-ci. Par « meilleure », on entend un effort d’optimisation du temps et du coût de déplacement, par une minimisation de la distance économique (mesurée par exemple par le différentiel de prix monétaire payé pour le déplacement avant et après la mise en place d’un moyen de transport), la distance physique restant la même. Les effets indirects, quant à eux, résultent de l’influence que le transport exerce, par exemple, sur la distribution des populations et activités économiques sur et entre les territoires.

Comme les activités économiques sont liées entre elles, en développant le transport, les politiques exercent une influence indirecte sur les différents secteurs de l’économie (l’agriculture, l’industrie, le commerce, etc.) (Goss, 1990). Le transport contribue ainsi à

7 Au Canada, les responsabilités en matière de transport sont partagées entre le fédéral et le provincial. Une plus

grande part revient aux provinces et aux municipalités ; le fédéral détient la responsabilité directe des grandes autoroutes reliant toutes les provinces et verse une part financière aux provinces pour la réalisation de grands projets internes. Le fédéral détient la responsabilité des ports dont il peut décider de transférer la gestion aux communautés locales.

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l’amélioration, mais aussi à la détérioration (à travers la congestion, la pollution) du bien-être des populations (Rodrigue, 2017).

Ce qui est vrai pour le transport en général l’est en particulier pour le transport maritime qui n’échappe pas à ces effets directs et indirects. Bien plus, le transport maritime représente une composante de choix dans les échanges commerciaux de plus en plus globalisés où la plupart (90%) passent par la voie maritime, dont la porte d’accès est le port.

Le port est une interface entre la mer et la terre, par laquelle transitent la plupart des échanges de marchandises, depuis des millénaires. Il exerce un rôle remarquable dans l’histoire de développement des villes et des pays, histoire que l’on peut distinguer chronologiquement en trois grandes périodes : avant le XIXe siècle, pendant l’ère de la révolution industrielle (XIXe siècle), et l’ère du conteneur (XXe siècle et suivants).

Le port dans l’histoire

Le port fait partie de l’histoire des civilisations et de la vie des sociétés. Il a servi de premier levier pour l’expansion européenne dans le monde du XVIe au XVIIIe siècle à travers l’utilisation de la voie maritime par laquelle transitaient les matières premières depuis les nouvelles terres conquises jusqu’aux territoires à des fins de fonctionnement des usines. Il était à l’origine de la création de plusieurs villes. Ces villes nées de la présence du port étaient caractérisées par des activités économiques développées en symbiose avec celles du port. Il n’était pas rare de voir des villes naissantes qui assumaient une fonction commerciale, présente à cette époque du mercantilisme par ailleurs.

La ville de Richmond dans l’État de Virginie aux États-Unis en est un exemple (Bleakley et Lin, 2010). Celle-ci est née grâce à la présence des chutes de la rivière James, qui rendaient difficile la navigation et compliquaient les échanges de tabacs entre les navigateurs et les producteurs du milieu. Quelques premières activités s’y sont installées à partir desquelles se sont développées d’autres activités commerciales, et plus tard des services financiers. Au Québec, des postes de traites se sont d’abord développés comme lieux de premiers échanges commerciaux le long des voies navigables notamment, le fleuve Saint-Laurent. À Montréal, la préoccupation d’avoir une mainmise sur les affaires des Grands Lacs par des marchands

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anglais, et de transborder les marchandises, fit construire le canal de Lachine dont la présence favorisera le développement des industries (Desjardins, 2006).

Le port à l’ère de la révolution industrielle

En plus des fonctions de provision en matières premières et de commerce des villes, s’ajoutait une fonction industrielle. La révolution industrielle du XIXe siècle a amélioré des systèmes de navigation et consacré des changements (évolutions) technologiques qui ont induit une baisse des tarifs d’affrètement par voie maritime, ce qui a permis une augmentation du commerce international. L’environnement immédiat du port devenait une véritable plateforme industrielle. Par exemple à Montréal, le canal de Lachine qui offrait la possibilité de l’utilisation de l’énergie hydraulique favorisait l’implantation industrielle. Cet environnement constituait déjà un objet d’étude en économie géographique, car il est la source de rendements croissants d’échelles pour la production d’entreprises localisées autour et qui bénéficient de cette proximité. Cet avantage (source de rendements croissants d’échelles) tient aux bénéfices (énergie hydraulique déjà disponible pour la production industrielle, baisse des coûts de transport et donc de production) que le port crée aux riverains sans contrepartie financière. Ces riverains sont soit des individus qui s’installent aux abords du port dans l’espoir d’y trouver un emploi, soit des établissements (exemple : entreposage, transformation manufacturière) qui devaient leurs services à l’arrivée ou au départ des marchandises dans le port à proximité desquels ils sont installés. Alors que le port continuait d’attirer certains établissements, force est de constater que les premières villes créées s’affranchissaient de cette proximité tout en continuant de prospérer grâce à une diversification des activités économiques.

Les évènements qui se produisent dans ces villes ne sont plus totalement dictés par les ports dont le nouveau paysage autour se trouve déterminé par des processus socio-économiques externes au port, tels que les forces agglomératives qui se sont installées et qui s’auto entretiennent (Fujita et Mori 1996). Dans le cas de la ville de Richmond par exemple, l’ère industrielle correspondait à la construction de rails, écluses et canaux pour contourner les chutes de la rivière. Ces constructions ont rendu obsolète l’avantage premier de ce lieu d’échange, mais n’ont pas empêché cette région de continuer de se développer (Bleakley et Lin, 2010, op. cit.) C’est également le cas au Québec avec les villes de la Côte-Nord qui

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continuent de prospérer sans leur port. À Montréal, on assistait à une transformation de l’industrie et un éclatement des centres de production, en lien avec le développement du réseau routier et l’industrie du camionnage (Desjardins, 2006).

Si cette révolution industrielle constitue une phase importante dans la relation entre le port et son environnement, c’est surtout avec celle du conteneur que cet environnement allait connaitre un tournant marquant.

Le port à l’ère du conteneur

L’introduction du conteneur à la fin du XXe siècle a changé le rôle des ports, entrainant toute une révolution à la fois dans l’industrie portuaire et maritime, mais également dans les industries clientes (ex. : le manufacturier), l’industrie du transport, et l’économie de manière générale.

La révolution du conteneur survenue dans la seconde moitié du XXe siècle et l’utilisation des technologies d’information et de communication (TIC) dans la gestion portuaire ont permis de baisser significativement les coûts de transport, de production, et d’augmenter les capacités de production portuaires du fait d’une forte demande à satisfaire grâce à la taille des navires de plus en plus grande pour transporter des conteneurs. Par exemple en 1973, le plus grand navire-porte-conteneurs du monde avait une capacité de 3000 EVP, une longueur de 228 m et pouvait transporter 15 000 tonnes de marchandises. Quatre décennies plus tard, en 2017, le plus grand navire-porte-conteneurs du monde était doté d’une capacité de 21 413 EVP, d’une longueur de 400 m (Attali, 2017 p. 172). Les TIC viennent faciliter la coordination des déplacements et les mouvements complexes requis pour charger ou décharger les conteneurs des navires bien avant que ceux-ci arrivent à quai. Les progrès du secteur maritime sont considérables et facilitent la gestion des affaires portuaires. Par exemple, il est plus facile de déterminer l’ordre de décharge des conteneurs de sorte à accélérer le processus sans déséquilibrer le navire ; ce qui augmente l’efficacité de tout le système, et la livraison « just in time » des biens. De plus, les informations sur papier sont de plus en plus remplacées par un système de communication électronique afin d’améliorer la performance et la transparence du transport maritime, ainsi que la confiance entre les parties

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prenantes, tout en réduisant les charges administratives et une partie des coûts liés (McLaughlin et Fearon, 2014).

Ces innovations, entre autres dérivées, incitent les entreprises à relocaliser sur les territoires à bas salaire et à bas prix de terrains, parce qu’il est désormais possible que le produit fabriqué atteigne n’importe quel endroit géographique du monde, en quantité voulue et dans les meilleurs délais ; ce qui rend le facteur capital de plus en plus mobile. Que les entreprises le veuillent ou non, elles sont désormais en compétition à l’échelle planétaire dans la mesure où le marché mondial de biens (et celui de l’emploi, et des salaires) viennent à elles. Non seulement les producteurs découvrent qu’il devient plus efficace de ne plus avoir à tout faire à un seul et unique endroit, mais aussi ils doivent se rapprocher le plus de la demande dès lors que l’économie s’est transformée en passant d’une économie de l’offre à celle de la demande. Ils peuvent morceler la production en de petites unités spécialisées bien intégrées dans une nouvelle forme d’organisation, l’intégration verticale, qui permet d’économiser le temps dans le port (temps d’accès au port, temps de chargement/déchargement, temps de transbordement), sur les autres tronçons de transport et lors de la distribution, et de permettre une livraison rapide des biens et matières à temps selon le concept du « just-in-time ». Ces nouvelles organisations de la production ont pour avantage de ne laisser que peu de matières ou de biens semi-finis en stock, économisant ainsi également les coûts liés aux inventaires. Les productions, manufacturières, sont de moins en moins concentrées autour des ports. En substitution à la dynamique locale s’installe une dynamique globale renforcée par des coûts de transport maritime très faibles, des coûts de transports terrestres et ferroviaires (voies alternatives au maritime) et des coûts d’inventaires également faibles.

La suite ne comporte pas que des avantages. Elle apporte aussi son lot d’inconvénients : difficultés d’inspection de toutes les marchandises, vecteurs de transport de biens illicites, des congestions et pollutions (Bernhofen et al., 2016), que le marché choisit parfois de corriger par exemple par les prix. Les changements suite à l’avènement du conteneur ne se limitent pas qu’aux ports de conteneurs ; ils s’étendent à ceux qui n’accueillent pas de conteneurs dès lors que tous les ports évoluent en réseau sur le plan continental et mondial, la coopération étant plus prononcée entre certains que d’autres (Cullinane et Song, 2007). On peut également noter que les ports qui ne font pas le conteneur (comme les traditionnels

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cargos, les pétroliers, les vraquiers) n’ont toutefois pas totalement disparu. Ils se sont agrandis partout dans le monde et ont progressivement évolué vers une automatisation accrue. Ces changements contribuent à modifier à la fois les activités des ports, mais également celles de leur environnement.

Les activités économiques du port contiennent aussi des activités plus classiques liées aux livraisons de vrac solide et de vrac liquide. Les marchandises qui n’ont pas besoin d’une livraison « urgente » ou qui doivent être livrées suivant un système « just-in-time », notamment les biens lourds qui prennent plus de place, peuvent emprunter des chaînes plus longues. En revanche, les marchandises qui doivent être livrées de façon urgente, notamment les denrées périssables, peuvent emprunter des chaînes plus courtes ; et si l’on souhaite malgré tout acheminer ces dernières par les longues chaînes de transport, alors elles doivent faire l’objet d’un bon conditionnement (dans des camions frigorifiques par exemple). Le développement des voies alternatives de transports et des modes de conditionnement (inclus au sens général dans le concept de logistique) des marchandises périssables constitue d’autres arguments (en plus du conteneur) qui libèrent les expéditeurs et destinataires de marchandises de l’obligation de se localiser proches des ports. Ils peuvent se localiser plus loin des ports et du même coup s’affranchir des prix parfois élevés des terrains situés à proximité. Les paysages économiques portuaires sont alors bouleversés par des relocalisations, délocalisations, créations ou disparitions d’entreprises. Les dynamiques locales (attraction des citoyens et des entreprises à s’installer dans un voisinage immédiat des ports) s’estompent avec le temps, et l’environnement des ports fait l’objet de nouvelles politiques d’aménagement de territoire, qui consacrent au port de nouvelles fonctions, économiques, culturelles, et résidentielles (Mah, 2014).

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Littérature portuaire générale

La littérature portuaire s’est développée, jusqu’au début des années 1960, autour des thèmes précis tels que la géographie portuaire (Morgan, 1961 ; Weigend, 1958; Bird, 1963 ; Taaffe et al., 1963) et les opérations portuaires - types de marchandises - (Carter, 1962). Elle s’est étendue à divers enjeux impliquant les forces et les effets (de ces forces) sur l’industrie portuaire et maritime, l’industrie des transports, et sur l’économie en général. Nous adoptons ici une perspective de présentation orientée sur les forces et leurs effets, qui ont jalonné la littérature portuaire.

Ces forces sont des chocs, des changements qui entrainent un bouleversement, par exemple, au plan économique (Mankiw et Scarth, 2008), au rang desquels, on note les révolutions technologiques des conteneurs (Graham et Hughes, 1985 ; Jansson et Shneerson, 1987 ; Levinson, 2006 ; McLaughlin et Fearon, 2014) et les technologies de l’information et de la communication -TIC- (Redding et Turner, 2015), deux composantes importantes liées à la globalisation (Stiglitz, 2006). Les chocs portent également sur les interventions des acteurs (Mankiw et Scarth, 2008, op. cit.) gouvernementaux, à travers les régulations et dérégulations portuaires (Brooks et Cullinane, 2007) et les facteurs externes tels que le (besoin de) commerce, l’industrialisation, l’internationalisation, l’informatisation (CEMT, 2001 p.10). Le lien entre ces chocs et effets se fait souvent en boucle entrainant une chaîne de rétroactions : un choc entraine un effet qui devient un choc qui entraine un autre effet, etc. De même, plusieurs des chocs peuvent entrainer un même effet, et un choc peut entrainer plusieurs effets.

La technologie des conteneurs, l’industrialisation et la forte demande mondiale en biens de consommation (chocs), ont entrainé ou accéléré la globalisation (effet) qui a, à son tour, engendré une compétitivité et une recherche d’efficacité et de performance accrue des ports (Juhel, 2001). Les dérégulations, en rupture avec les régulations d’avant et d’après seconde guerre, pratiquées par les gouvernements (Brooks et Cullinane, 2007, op. cit.), ont entrainé ou facilité la privatisation des ports (Baltazar et Brooks, 2001 ; Robinson, 2002), faisant place à de nouveaux investisseurs privés. Ces nouveaux acteurs se substituent de plus en plus aux autorités portuaires traditionnelles, publiques (Verhoeven, 2010 ; Musso et al., 2014). La privatisation des ports ou « terminalisation » (Olivier et Slack, 2006 ; Rodrigue et

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Notteboom, 2009) est une forme (ancienne, mais qui se renouvelle) d’organisation par laquelle l’industrie portuaire entend atteindre l’efficacité de gestion par la recherche d’une maximisation des profits, contrairement aux autorités portuaires traditionnelles qui recherchaient principalement à maximiser le bien-être des populations locales et nationales. Ces nouvelles formes d’organisations portuaires sont financées par de nouvelles tendances dont la recherche de l’excellence et l’émergence des partenariats publics-privés (ou PPP – Van Garsse et al., 2014).

Ainsi, de l’aspect géographique des ports à la privatisation en passant par la technologie, la globalisation, les interventions de divers acteurs (gouvernements et privés), la littérature aborde les ports dans leur aspect multidimensionnel (Rodrigue at al., 2009 ; Rodrigue, 2017). Elle se situe au confluent des champs de connaissances de plusieurs disciplines : la géographie, l’économie, l’organisation industrielle, le commerce international, etc. Elle renouvelle d’anciennes problématiques telles que la géographie portuaire (Rodrigue at al., 2009 ; Rodrigue, 2017), et en aborde de nouvelles, telle que la gouvernance portuaire à l’heure où le port ne représente qu’un pion (Slack, 1993) dans un ensemble formé de réseaux de chaînes logistiques (Van de Voorde et Vanelslander, 2014): elle repositionne les enjeux relatifs aux relations entre les ports et les villes. Ce dernier enjeu, bien qu’ancien, se renouvelle à l’ère du développement des régions portuaires (Jugie, 2017).

Weigend (1958) décrit un ensemble de relations entre des facteurs physiques et humains qui tiennent une place de choix dans la genèse et l’évolution des ports. Il montre comment les conditions physiques des sites (favorables) et les conditions humaines (besoins d’échanger leurs productions) incitent les humains à construire des ports et à les modifier au besoin. Plus tard, Bird (1963) élabore un modèle formel d’organisation spatiale des ports, le modèle Anyport. Ce modèle décrit le processus de développement portuaire en trois phases : i) construction ; ii) expansion ; et iii) spécialisation. Il analyse l’évolution des infrastructures portuaires dans le temps et l’espace en fonction des caractéristiques des sols (et des eaux) sur (dans) lesquel(le)s les ports sont construits en tenant compte des caractéristiques des biens qui y transitent. Toutefois, la portée de ces recherches demeure locale et limitée à l’interface portuaire. Taaffe et al. (1963) analysent l’évolution portuaire dans un cadre régional en modélisant la structuration de l’arrière-pays portuaire en lien avec les ports. Leur modèle

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rend compte d’un regroupement de ports géographiquement proches (concentration), à mesure que se développent des transports internes et des centres urbains.

Le concept de transports internes, alternatifs au maritime, représente un défi dans le développement des modèles portuaires dans la mesure où l’efficacité et l’efficience des chaînes de logistique (dictée par la globalisation) dont fait partie le port sont dérivées pour une large part du positionnement des centres de distributions intérieures aux territoires. Notteboom et Rodrigue (2005) bonifient le modèle de Bird par une phase de régionalisation qui explique le développement des terminaux portuaires, comme centres de transbordement tel qu’on les observe aujourd’hui, et intègre la dimension intérieure des territoires comme un moteur dans les dynamiques de développement portuaire. Ce modèle s’inscrit dans un contexte de globalisation facilité par l’essor et le développement complet de la technologie de conteneur, un choc majeur qui bouleverse la production portuaire et maritime, les systèmes de productions utilisant les services portuaires (ex. : le manufacturier), et crée une croissance économique liée à l’industrie portuaire (Levinson, 2006).

On sait depuis Solow (1957) que les facteurs de production de base (le capital, l’emploi, et même le sol sur lequel les productions économiques ont eu lieu) ont perdu de leur importance dans l’explication de la croissance économique, notamment au profit des innovations technologiques dont la dernière importante dans l’industrie portuaire est le conteneur. Développé en 1956 par Malcolm McLean et popularisée en début des années 1960, le conteneur, combiné à l’usage des TIC et aux techniques de mécanisation, se trouve au cœur de la littérature portuaire. Il entraine un phénomène de concentration de ports en créant des économies d’échelles (De Langen, 2002 ; 2003), contrairement à Kuby et Reid (1992) qui observaient le contraire (une faible, voire une absence de concentration). La technologie du conteneur et ses effets, la concentration portuaire et les économies d’échelles (Cullinane et Song, 2007), sont deux phénomènes interreliés.

D’abord introduit par Marshall (1890) et formalisées par Krugman (1979, 1980, 1991), les économies d’échelles sont profitables à toute l’industrie portuaire (De Langen, 2002 ; 2003), mais également à chaque port qui en fait partie. Les économies d’échelles (internes aux ports) créées par la technologie de conteneur à travers l’augmentation de la taille des navires et l’élargissement subséquent des infrastructures portuaires représentent un choc qui crée des

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effets tels que le bénéfice économique (aux ports et aux entreprises) à la base de la croissance. Dans l’industrie portuaire, la traduction de l’innovation de conteneur en croissance économique vient du fait que les entrepreneurs ont su tirer avantage des économies d’échelles créées par cette technologie.

À leur tour, les concentrations et économies d’échelles constituent des chocs qui engendrent des effets. Par exemple, certains changements organisationnels doivent être opérés par le port afin de tirer profit des économies d’échelles causées par la révolution technologique (Rosenberg, 1976; Devine, Jr, 1983; Mokyr, 1992; Brynjolfsson et Hitt, 2000). Ainsi, selon Fleming et Hayuth (1994), c’est parce que le port de Singapour a su opérer les changements organisationnels nécessaires, qu’il s’est hissé au rang de « grand port mondial ». Ces changements concernent entre autres l’adoption des technologies de communication (les ordinateurs qui permettent de suivre la traçabilité des marchandises) dans la gestion des activités des ports.

Un autre exemple de ces changements organisationnels sur lesquels porte la littérature portuaire est la « terminalisation » des ports. Olivier et Slack (2006) analysent le cas des ports de l’Asie de l’Est et évoquent la constitution des sociétés transnationales comme exigence structurelle d’ajustement au conteneur et aux TIC. Selon les auteurs, le fonctionnement des « nouvelles » structures organisationnelles exige un changement de paradigme qui passe notamment par : i) l’application des théories d’analyse spatiale, jusqu’alors limitée aux entreprises classiques au secteur portuaire analysé ; et ii) un recentrage de l’unité d’analyse, qui devient le terminal au lieu du port. Par exemple au Québec, on distingue des terminaux portuaires qui appartiennent aux investisseurs privés, à l’instar du « Terminal Arcelor-Mittal » situé à Port-Cartier, à l’embouchure du Saint-Laurent. Ce phénomène de « terminalisation » procède d’une recherche d’efficacité portuaire (Juhel, 2001). L’inconvénient de ces structures est qu’elles peuvent facilement ignorer les intérêts locaux et nationaux (que recherchent par exemple les autorités portuaires publiques) lorsque ceux-ci ne satisfont pas aux intérêts privés (de maximisation de profits) des actionnaires de ces sociétés privées. À ce propos, l’intérêt de cette littérature se reflète dans l’analyse de Slack (1993) qui livre un plaidoyer dans lequel il défend le pouvoir des autorités portuaires publiques dont le degré de liberté est sans cesse questionné (Goss, 1990; Musso et al., 2014).

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Selon Slack (1993), le pouvoir de ces autorités, s’écroule au profit des grands armateurs et opérateurs de terminaux qui sont les grands gagnants dans ces réorganisations institutionnelles des ports.

Ainsi, l’apparition du conteneur dans l’industrie portuaire crée une forme de « destruction créatrice » (McCraw, 2007), pour reprendre l’expression de Joseph Aloïs Schumpeter. La destruction d’une ancienne économie où la production des ports est orientée sur l’utilisation intensive de l’emploi, au profit d’une nouvelle économie orientée sur l’utilisation intensive du capital. Le conteneur s’accompagne des TIC qui, ensemble, entrainent une économie des coûts (de transports et d’inventaires de biens). Dans le port, cette baisse de coût a lieu principalement entre les navires dans le port et les lieux de production, de transformation ou de consommation (Levinson, 2006), rendant les ports plus efficaces et plus compétitifs. Le conteneur s’accompagne également du développement des voies de transports alternatifs (Glaeser et Kohlhase, 2004 ; Ducruet et al., 2015) qui connectent les différents points jadis éloignés des ports, occasionnant une forte densité des populations et entreprises (Fujita et Mori, 1996 ; Ducruet et al., 2015) et une baisse additionnelle des coûts de transport. À mesure que ces coûts baissent, relativement aux autres coûts, des industries se relocalisent, d’abord nationalement, puis internationalement, afin de diminuer certains autres coûts (salariaux, foncier) qui peuvent devenir rapidement considérables (Levinson, 2006, p. 14).

La littérature émergente tente d’analyser les relations entre la ville et le port (Ducruet et Lee, 2006 ; Grobar, 2008 ; Jacobs et al., 2010) à travers les liens entre les activités dans le port et les activités économiques en général. La croissance de l’un semble liée à la croissance de l’autre, à tel point que les prévisions de croissance économique sont prédictives du niveau de commerce des conteneurs transigés dans les ports (UNESCAP, 2005 ; 2007). L’inverse est également vrai : la croissance, exponentielle, du trafic portuaire est une conséquence de la croissance du commerce maritime, lui-même une conséquence des relocalisations des activités de production manufacturières à travers le monde (Musso, 2009). Les relocalisations d’activités de production sont principalement liées à : i) la mobilité croissante du capital (du fait que sa rentabilité espérée est plus élevée ailleurs où le coût salarial de l’emploi et le coût du foncier sont nettement plus faibles) ; ii) la baisse drastique des coûts et temps de transport

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et de communication depuis l’avènement du conteneur et des TIC, associée au développement des voies intérieures de transport.

La relocalisation du manufacturier a commencé tranquillement avec l’arrivée à maturité du conteneur (qui rendait le capital mobile) et l’interventionnisme d’après-guerre des états, qui protégeaient les travailleurs portuaires par des mesures sociales coercitives à l’endroit des employeurs (Levinson, op. cit). Cette relocalisation se poursuit avec le développement des systèmes de chaîne de transport dans lequel le port évolue et représente un nœud. L’exemple du secteur manufacturier se justifie par le fait que les grandes civilisations se sont toujours développées dans l’histoire à partir de ce secteur de leur économie, nourri en amont par les produits du secteur des ressources naturelles et agricoles.

Cadre conceptuel théorique

Les activités portuaires ne sont pas indépendantes, a priori, des autres activités économiques qui peuvent prendre forme à proximité des infrastructures. En termes plus techniques, la littérature qualifie d’« hinterland » la partie intérieure des terres qui est desservie par un service donné. Le cas des activités portuaires est propice à l’utilisation d’un tel terme. La chaîne logistique et d’approvisionnement du port est assez complexe pour que son impact se fasse sentir à plus grande échelle que celle de l’infrastructure uniquement. Le défi demeure néanmoins d’identifier avec précision la portée de cet hinterland, ou arrière-pays, afin d’en identifier les retombées potentielles.

Il est ainsi possible de voir le port comme un vecteur de développement régional. Un vecteur qui aurait une portée plus large et qui s’étendrait au-delà des limites spatiales des infrastructures. D’un point de vue théorique, cette vision s’apparente largement à celle des pôles de développement proposés d’abord par Perroux (1955) et Boudeville (1968, 1963), mais largement inspirés des premiers écrits de Smith (1776), qui suggère qu’un centre d’activités peut, par ses effets d’entraînements et ses retombées, s’avérer un stimulateur de l’activité autour du pôle. Bien que ce concept fut fortement popularisé avec le rapport Higgins, Martin et Raynauld (HMR, 1970), mais également très critiquée, notamment par l’ensemble des acteurs régionaux hors Montréal, ce concept peut servir de départ afin de

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comprendre la relation entre le port et son hinterland (la région sur laquelle il exerce son influence).

Tout comme le soulignaient, à juste titre, Polèse et Shearmur (2003) dans un article portant sur les limites du concept de pôle de développement et sa généralisation par HMR, l’idée du pôle de développement n’est pas pour autant dénuée de sens. Reposant sur l’idée qu’une concentration spatiale peut générer de multiples effets favorisant les économies d’agglomération. Cette idée d’économies liées à la localisation est elle-même à l’essence de la géographie économique qui tente d’expliquer les schémas de localisation des activités économiques. Tout comme pour le concept des économies d’agglomération, le concept du pôle de développement repose en large partie sur l’identification de l’ampleur des effets d’entraînements.

La théorie des pôles de croissance

Cette théorie a été inspirée de Christaller (1933) et développée dans les années cinquante par François Perroux (1955) qui l’a mise en évidence sur les industries motrices, avant qu’elle ne soit transposée aux unités géographiques telles que les grandes villes où les liens interindustriels sont plus denses (que dans les petites régions), et désignées comme pôle de développement. Elle tire ses origines du tableau intersectoriel, qui permet d’observer, entre autres, les interrelations économiques existantes entre les secteurs productifs d’une économie. Cet outil a notamment servi à simuler l’impact d’un choc (par exemple, une hausse de la demande externe), en termes de création d’emplois, d’augmentation nette de la production et de variation des entrées fiscales.

La théorie postule que la croissance n’apparaît pas uniformément dans l’espace, mais qu’elle se concentre en zones de croissances (pôles) où elle crée des phénomènes d’agglomération dont les effets se diffusent sur l’économie immédiate (périphérie). La croissance nait alors dans une zone, puis s’étale sur les zones avoisinantes. Généralement, selon cette théorie, la zone où nait cette croissance est un grand centre urbain formé de grandes entreprises motrices, dynamiques et innovatrices, dont l’action et l’effet d’entrainement sont suffisamment forts pour mériter que l’on s’y intéresse.

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Un des défis du concept de pôle de développement est de bien cerner l’ampleur et la portée spatiale que celui-ci peut réellement avoir. Si l’hypothèse voulant que les effets d’entraînements s’étendent à des centaines de kilomètres est plutôt forte (comme ce fut le cas avec le rapport HMR), il ne semble pas pour autant faux de supposer que ces retombées puissent exister au niveau local. Le défi demeure d’identifier la portée exacte de ces effets d’entraînements. Qui plus est, les changements structuraux que subit l’économie peuvent fortement influencer la portée spatiale au fil du temps. La substitution d’activités économiques par d’autres, ou encore la substitution des intrants dans une chaîne de production entraîne indubitablement des effets sur la relation qui peut exister entre les activités économiques. Supposer une relation temporelle constante et fixe entre les activités productives s’avère également une des faiblesses du concept de pôle de développement, qui est plutôt statique comme concept.

Il faut également noter que la théorie des pôles de croissance présente certains effets pervers. La concentration spatiale des activités économiques a pour effet de polariser la croissance dans un espace délimité, contribuant ainsi à créer des espaces marginalisés et, en conséquence, certaines inégalités spatiales. De plus, les relations importantes avec un centre auraient pour effet de stopper (ou du moins fortement diminuer) des relations économiques pouvant exister entre des sous-centres (ou entre des parties de l’hinterland). Ainsi, pour certaines localités, les effets de stoppages pourraient l’emporter sur les possibles effets d’entraînements générés par le pôle, et ainsi diminuer la position relative de certains secteurs, engendrant encore une fois une forme d’inégalité.

Théorie des pôles de croissance et le port

Le parallèle entre la théorie des pôles de croissance et la relation port-hinterland peut être établi à biens d’égards, même si les conditions d’opérationnalisation ne sont pas toujours les mêmes. Ainsi, le port peut être identifié comme un pôle, et sa région, à l’hinterland qui profiterait de l’effet d’entrainement de celui-ci.

En effet, le port est une source d’externalités positives qui exerce un effet de concentration de l’activité économique, mais également de diffusion de cette concentration dans l’espace. Le pôle de croissance entretient une certaine similitude avec le port, notamment

Figure

Figure 1.1: Distribution d’une variable en fonction de l’échelle géographique
Figure 1.2: Représentation des points de localisation des ports commerciaux stratégiques et  des établissements au Québec
Tableau 1.1: Liste de 25 ports commerciaux stratégiques de la province du Québec et leur  trafic (en millions de tonnes) transigé de 2005
Tableau 1.2: Définition des secteurs d’activités économiques
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