Propriétés multifractales de la divergence de séries
d’ondelettes
Céline ESSER
Celine.Esser@univ-lille1.fr
Université Lille 1 – Laboratoire Paul Painlevé
GDR Analyse multifractale 22 septembre 2016
Introduction
NotonsSnfles sommes partielles de la série de Fourier d’une fonction deLp(T)
(1 < p < +∞).
Pour toutβ ≥ 0, on considère les ensembles
E(β, f ) := x : lim sup n→∞ n−β|Snf (x)| > 0 E(β, f ) := x : lim sup n→∞ log |Snf (x)| log n = β
Aubry (2006), Bayart, Heurteaux (2011)
• Pour toute fonctionf ∈ Lp
(T)et toutβ ∈ [0, 1/p],
dim E (β, f ) ≤ 1 − βp.
• Pour quasi (resp. presque) toute fonctionf ∈ Lp
(T)et toutβ ∈ [0, 1/p],
Introduction
Séries d’ondelettes
Aubry (2006)
• Pour toute fonctionf ∈ Lp
(T)et toutβ ∈ [0, 1/p], dim x : lim sup J →∞ 2−βJ J X j=0 2j−1 X k=0 | < f, Ψj,k> Ψj,k(x)| > 0 ≤ 1 − βp
• Dans le cas de l’ondelette de Haar, étant donné un ensembleEtel que
dim E < 1 − βp, il existef ∈ Lp (T)tel que lim sup J →∞ 2−βJ J X j=0 2j−1 X k=0 < f, Ψj,k> Ψj,k(x) = +∞ ∀x ∈ E.
Objectif du travail : Extension de ces résultats dans le cas des espaces de Besov et
pour des ondelettes générales, et optimalité générique (points de vue Baire et prévalence)
Contexte
Point de vue adopté : On ne considère pas l’expansion en ondelettes d’une fonction
dans un espace donné, mais plutôt desséries d’ondelettesoù la suite des coefficients satisfait une propriété de convergence (type Besov).
→pas besoin de fortes hypothèses sur les ondelettes (régularité, base orthonormée,...)
Système d’ondelettes : collection deN fonctionsψ(i)définies sur
Rdqui
• sont bornées et à décroissance rapide
• satisfont lapropriété de recouvrement dyadique des ondelettes(satisfaite pour les bases d’ondelettes continues, pour la base de Haar,...)
Série d’ondelettes : série de la forme
N X i=1 X j≥0 X k∈Zd c(i)j,kψ(i)(2jx − k) = N X i=1 X j≥0 X k∈Zd c(i)j,kψj,k(i)(x)
Introduction
Divergence des séries d’ondelettes
Considérons une collection de coefficientsC =nc(i)j,ko.Divergence de la série d’ondelettes à un tauxγ ∈ Renx:
C ∈ Dγ(x) ⇔ ∃C > 0, jn→ +∞, in, kn tels que c (in) jn,knψ (in) jn,kn(x) ≥ C2 γjn Exposant de divergence enx: δC(x) = sup{γ : C ∈ Dγ(x)} Ensembles de niveau : E(γ, C) = {x : δC(x) = γ}
Spectre de divergence de la série d’ondelettes : DC : γ 7→ dim E(γ, C)
Remarque :C ∈ Dγ(x)n’implique une divergence de la série que siγ ≥ 0. Siγ < 0,
la négation deC ∈ Dγ(x)exprime un taux de convergence des sommes partielles
PJ,C(x) = X j≤J X i,k c(i)j,kψj,k(i)(x).
En effet, supposons que
∃a ∈ R : |c(i)j,k| ≤ C2aj.
Si
∃C > 0, ∀i, j, k |c(i)j,kψj,k(i)(x)| ≤ C2γj,
alorsPJ,C(x)admet une limitefC(x)quandJ → +∞et
∀γ0> γ, |fC(x) − PJ,C(x)| ≤ C2γ
0J
Introduction
Espaces de Besov discrets
Soients ∈ Retp, q ∈ (0, +∞]. Une suiteC =nc(i)j,koappartient à l’espace de Besov
bs,qp si elle satisfait X i,k c (i) j,k2 (s−d p)j p 1/p = j avec (j)j ∈ lq En particulier, ∃C > 0 : ∀j X i,k |c(i)j,k2(s−dp)j|p≤ C =⇒ |c(i) j,k| ≤ C 1 p2(dp−s)j Conséquence : SiC ∈ bs,q p , alors δC(x) ≤ d p− s, ∀x ∈ R .
Espaces de Besov discrets
Soients ∈ Retp, q ∈ (0, +∞]. Une suiteC =nc(i)j,koappartient à l’espace de Besov
bs,qp si elle satisfait X i,k c (i) j,k2 (s−d p)j p 1/p = j avec (j)j ∈ lq En particulier, ∃C > 0 : ∀j X i,k |c(i)j,k2(s−dp)j|p≤ C =⇒ |c(i) j,k| ≤ C 1 p2(dp−s)j Conséquence : SiC ∈ bs,q p , alors δC(x) ≤ d p− s, ∀x ∈ R .
Introduction
E., Jaffard (2016)
• Pour toute suiteC ∈ bs,q
p et toutγ ∈ [−s,dp − s],
dimx : δC(x) ≥ γ ≤ d − sp − γp. • La série d’ondelettes de quasi (resp. presque) toute suiteC ∈ bs,q
p est maximally
divergente dansRd.
SoitAun ouvert non-vide deRd. Une suiteC ∈ bs,q
p a une série d’ondelettes
“maximally” divergentedansAsi
∀x ∈ A, δC(x) ∈
−s,d
p− s
pour presque toutxdansA,δC(x) = −s,
et pour tout ouvert non-videB ⊂ A
Borne supérieure
Preuve. On pose Ej,γ := n (i, k) : c (i) j,k ≥ 2 γjo Eε j,γ := [ k:∃i:(i,k)∈Ej,γ i k2−j− 2(ε−1)j, k2−j+ 2(ε−1)jh Eε γ := lim sup j→+∞ Ej,γε . PuisqueP i,k|c (i) j,k2 (s−d p)j|p ≤ C, on a #Ej,γ≤ C · 2(d−sp−γp)j, et donc dim(Eγε) ≤d − sp − γp 1 − ε .Introduction
Montrons que
x /∈ Eε
γ =⇒ δC(x) ≤ γ
On estime|c(i)j,kψj,k(i)(x)|. Rappelons que
Eγε= lim sup j→+∞ [ k:∃i:(i,k)∈Ej,γ i k2−j− 2(ε−1)j, k2−j+ 2(ε−1)jh 1.(i, k) /∈ Ej,γi.e. c (i) j,k < 2 γj, alors|c(i) j,kψ (i) j,k(x)| ≤ C2 γj. 2.(i, k) ∈ Ej,γi.e. c (i) j,k ≥ 2
γj Vue la décroissance rapide des ondelettes,
∀N, ∃CN tel que |ψ(i)(2jx − k)| ≤
CN (1 + |2jx − k|)N. Commex /∈ Eε γet(i, k) ∈ Ej,γ, on a|2jx − k| ≥ 2εjsij et donc |ψ(i)(2jx − k)| ≤ C N2−εN j.
Rappelons que|c(i)j,k| ≤ C2−(s−d/p)j, d’où
Montrons que
x /∈ Eε
γ =⇒ δC(x) ≤ γ
On estime|c(i)j,kψj,k(i)(x)|. Rappelons que
Eγε= lim sup j→+∞ [ k:∃i:(i,k)∈Ej,γ i k2−j− 2(ε−1)j, k2−j+ 2(ε−1)jh 1.(i, k) /∈ Ej,γi.e. c (i) j,k < 2 γj, alors|c(i) j,kψ (i) j,k(x)| ≤ C2 γj. 2.(i, k) ∈ Ej,γi.e. c (i) j,k ≥ 2
γj Vue la décroissance rapide des ondelettes,
∀N, ∃CN tel que |ψ(i)(2jx − k)| ≤
CN
(1 + |2jx − k|)N.
Commex /∈ Eε
γet(i, k) ∈ Ej,γ, on a|2jx − k| ≥ 2εjsij et donc
|ψ(i)(2jx − k)| ≤ CN2−εN j.
Rappelons que|c(i)j,k| ≤ C2−(s−d/p)j, d’où
Introduction
Propriété de recouvrement dyadique des ondelettes
Un système d’ondelettes(ψ(i))
i=1,...,Nsatisfait lapropriété de recouvrement
dyadiques’il existeC > 0et une collection finie de triplets(il, jl, kl),l ∈ {1, . . . , L},
tels que∀l,jl> 0et ∀x ∈ [0, 1]d, ∃l ∈ {1, . . . , L} : ψ (il)(2jlx − k l) ≥ C. On note M = max l∈{1,...,L} jl.
Remarque : Cette propriété est satisfaite pour
• le système de Haar (s’il est défini correctement aux points dyadiques, i.e.
ψ = 1[0,1/2)− 1[1/2,0)),
Pour toutl ∈ {1, . . . , L}, on considère l’application affineµldéfinie par la relation
µl [0, 1)d = λl
oùλlest le cube dyadique défini par(jl, kl).
Siλest un cube dyadique arbitraire, on appelle la collection
{µl(λ)}l=1,...,L
lerecouvrement dyadique deλ.
Propriété : Pour toutx ∈ λ, il existe unl ∈ {1, . . . , L}tel que|ψ(il)
µl(λ)(x)| ≥ C.
−→donne des sous-cubes à des échellesj0proches de l’échellejdeλ
Divergence maximale
Suites saturantes
Objectif : Construire une suite aléatoire qui appartient àbs,q
p et dont la série
d’ondelettes est presque sûrement maximally divergente. On va travailler sur(0, 1)d.
Soientj ≥ 1etk ∈ {0, . . . , 2j− 1}d. On considère la représentation irréductible
k 2j = k0 2J où k 0= (k0 1, . . . k 0 d)
etk01, . . . k0dne sont pas tous pairs. On pose
Soitm > 0. Considérons un cube dyadiqueλ ⊂ [0, 1]dd’échelle
j ∈ {mM + 1, · · · (m + 1)M }.
S’il existe au moins un cube dyadiqueνde taillemMtels queµl(ν) = λ, alors on
pose
fλ(i)= sup e(i)ν
où le supremum est pris sur tous lesl ∈ {1, . . . , L}et tous les cubesνde taillemM
tel queµl(ν) = λ; sinonf (i)
λ = 0.
Remarque : Pour tout cube dyadiqueνde taillemM, le recouvrement dyadique deν
a des coefficients de taille au moins égale àeν, i.e.
fµ(i)
l(ν)≥ e
(i)
Divergence maximale
On pose
c(i)λ = ξ(i)λ fλ(i)
où lesξλ(i)sont des variables aléatoires indépendantes qui suivent une loi uniforme sur[−1, 1].
Résultat
La suite aléatoireC =nc(i)j,koest à valeurs dans un ensemble compact debs,q p , et la
série d’ondelettes correspondante est presque sûrement maximally divergente sur
Appartenance à l’espace de Besov
Pour toutJ ≤ j, il y a2dJcoefficients tels que 2kj =
K 2J. Donc X k |e(i)j,k2(s−dp)j|p= 2−p(log j)2 j X J =1 2dJ(2−dJp)p= j2−p(log j)2, et X j≥1 (j1p2−(log j)2)q < ∞. ⇒ok pour la suite n e(i)j,ko
d’où aussi pour la suitenfj,k(i)o(changement d’échelle de taille au plusM) et donc pour la suite
n
Divergence maximale
Divergence en tout point
On doit montrer que presque sûrement,∀x ∈ (0, 1)d, on aδ
C(x) ≥ −s. Commençons
par remarquer que les v.a.ξλ(i)ne peuvent pas être simultanément petites à beaucoup d’échelles successives.
Soitλun cube d’échellej = mM. On noteEλl’événement
Eλ= ∀l ∈ {1, . . . , L} |ξµl(λ)| ≥ 1 j . Propriétés : • P(Eλ) ≥ 1 − Lj
• siEλa lieu, alors∀x ∈ λil existe un cubeµl(λ)d’échellej0≤ j + Met un
indiceitel que
c (i) µl(λ)ψ (i) µl(λ)(x) ≥ C eλ j
• les événementsEλqui correspondent à différents multiples deM sont
Fixons une échellej = 2mMet considérons un cube dyadiqueλd’échellej. Notons
λ1, . . . , λmles cubes dyadiques d’échelles respectives
2mM, (2m − 1)M, · · · , (m + 1)M
qui contiennentλ. La probabilité qu’aucun desEλi,i = 1, . . . , m, n’ait lieu est bornée
par L 2mM L (2mM − 1)M · · · L (m + 1)M ≤ L (m + 1)M m ≤ e−Cm log m ≤ e−Cj log j
Donc, la probabilité qu’au moins un cube dyadiqueλd’échellej = 2mM satisfasse la propriété “aucun desEλi,i = 1, . . . , m, n’a lieu” est bornée par2
Divergence maximale
Le lemme de Borel-Cantelli implique que presque sûrement, pourmsuffisamment grand, pour tout cubeλd’échellej = 2mM, il existe un cubeλ0d’échellej0tel que
j
2+ M ≤ j
0≤ jqui contientλet pour lequelE
λ0a lieu.
Par conséquent, pour toutx ∈ λ0, il existe un cubeλ00d’échellej00tel que
j0< j00≤ j0+ M et tel que c (i) λ00ψ (i) λ00(x) ≥ C eλ0 j0 ≥ C 1 j02 −(log j0)2 2−sj0
Total : Pour toutx ∈ [0, 1)d, il existe une suite de cubesλnd’échelles croissantesjn
tels que c (i) λnψ (i) λn(x) ≥ C 0 1 jn 2−(log jn)22−sjn, et donc ∀x ∈ [0, 1]d, δ C(x) ≥ −s
Spectre de divergence
Idée :
• Raffinement du résultat précédent pour devoir remonter moins loin dans les échelles
• Par Borel-Cantelli, presque sûrement, pour toutx ∈ [0, 1]d, il existe une suite de
cubesµnd’échellesjnqui satisfont
jn− jn−1≤ 2([(log jn)2] + 1), et tels que c (i) µnψ (i) µn(x) ≥ fµn2 −jn/ log jn≥ e λn2 −jn/ log jn,
oùµnappartient au recouvrement dyadique deλn
• Lien entre l’ensemble{x : δC(x) ≥ dp− s −pαd }et l’ensemble des points
Divergence maximale
Généricité au sens de Baire
Idée de la construction : La série d’ondelettes de toute suite dont une infinité de
coefficients sont suffisamment proches de ceux de la suite saturanteCva avoir les mêmes propriétés de divergence.
• L’ensemble(An)n∈Ndes suites finies à coefficients rationnels est dense dans
bs,q p
• On considère une suite croissante(Nn)ntelle que les coefficients deAnsont
nuls pourj ≥ Nn • Bn= An+N1
nCa les mêmes propriétés de divergence queCet(Bn)n∈Nest
dense dansbs,q p • On considère leGδdense R = \ m∈N [ n≥m B(Bn, rn), où rn= 1 22 −(log Nn)22−Nnp
Prévalence
La notion de prévalence a pour but de généraliser le concept de“presque partout”
(pour la mesure de Lebesgue) au cas des espaces de dimension infinie, en gardant certaines propriétés :
- Un ensemble négligeable a un intérieur vide (ie.“presque partout” implique la densité).
- Tout sous-ensemble d’un ensemble négligeable est négligeable. - Toute union dénombrable d’ensembles négligeables est négligeable. - Tout translaté d’un ensemble négligeable est négligeable.
Néanmoins, il est apparu qu’il était impossible de définir une telle notion via une mesure spécifique : dans un espace métrique de dimension infinie, il n’existe pas de mesureσ-finie et invariante par translation.
Divergence maximale
Définition (Christensen 74, Hunt, Sauer, Yorke 92)
SoitEun espace vectoriel métrique complet. Un ensemble borélienA ⊂ Eest Haar-null s’il existe une mesure de probabilité à support compactµtelle que
∀x ∈ E, µ(x + A) = 0.
Un sous-ensemble deEest Haar-null s’il est inclus dans un ensemble borélien Haar-null. Le complément d’un ensemble Haar-null est appelé un ensembleprévalent.
Remarque : Pour montrer qu’une propriétéPest vérifiée sur un ensemble Haar-null, il suffit de trouver un processus aléatoireXtdont les trajectoires sont presque
sûrement dans un compact deEet tel que pour toutf ∈ E, l’événement “P(Xt− f )
est satisfait” a une probabilité nulle, i.e.
La prévalence dansbs,q
p de l’ensemble des suites dont la série d’ondelettes est
maximally divergente s’obtient directement grâce au résultat suivant.
Lemme
SoitDune suite debs,qp . Alors presque sûrement, la série d’ondelettes deC + D˜ est maximally divergente.
Idée : Le raisonnement est le même que pour la suite saturante, mais les variables
aléatoires ne sont plus centrées. Elles restent indépendantes et les estimations des probabilités des événements considérésEλne peuvent qu’augmenter (au vu de la
Références
Références
J.M. Aubry.
On the rate of pointwise divergence of Fourier and wavelet series inLp.
J. Approx. Theory, 538 :97–111, 2006.
F. Bayart and Y. Heurteaux.
Multifractal analysis of the divergence of Fourier series.
Ann. Sci. Ec. Norm. Supér., 45 :927–946, 2012. 22 :663–682, 2006.
S. Jaffard.
On the Frisch-Parisi conjecture.
J. Math. Pures Appl., 79(6) :525–552., 2000.
S.E. Kelly, M.A. Kon, and L.A. Raphael. Local convergence for wavelet expansion.
J. Funct. Anal., 126 :102–138, 1994.
Y. Meyer.
Ondelettes et opérateurs.
Hermann, 1990.
G.G. Walter.
Pointwise convergence of wavelet expansions.