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Le calcul des coûts de la congestion routière causée par les ponts reliant Québec et Lévis

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Academic year: 2021

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(1)

Le calcul des coûts de la congestion routière causée

par les ponts reliant Québec et Lévis

Mémoire

Marc Therrien

Maîtrise en économique

Maître ès arts (M. Sc.)

Québec, Canada

© Marc Therrien, 2017

(2)

Le calcul des coûts de la congestion routière causée

par les ponts reliant Québec et Lévis

Mémoire

Marc Therrien

Sous la direction de :

Philippe Barla, directeur de recherche

Luis Miranda-Moreno, codirecteur de recherche

(3)

iii

Résumé

La congestion routière est un problème qui fait supporter de nombreux coûts à la société, qu’il s’agisse de perte de temps, d’une consommation accrue de carburant ou d’une pollution atmosphérique supplémentaire. Dans la région métropolitaine de Québec, le problème est particulièrement présent aux alentours des ponts de Québec et Pierre-Laporte. Ce mémoire propose de calculer trois types de coût de la congestion routière autour des ponts en utilisant des données GPS, soit le coût total, le coût externe et la perte sociale de la congestion. Nos résultats semblent indiquer que la congestion fait supporter un coût total à la société de plus de 40 millions $ par année dans la zone autour des ponts, en estimant ce coût selon deux approches différentes. Le coût externe de la congestion dans la zone est estimé à 21,7 millions $ et la perte sociale entraînée par cette congestion à 5,5 millions $ annuellement. Les coûts de la congestion estimés sont nettement supérieurs à ceux de l’étude parue en juin 2017 de Raymond Chabot Grant Thornton qui estimait le coût total pour les tronçons routiers principaux dans une zone similaire autour des ponts à 15,8 millions $.

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iv

Abstract

Road congestion is a problem that burdens society with many costs, whether it is loss of time, an increased consumption of fuel or supplementary atmospheric pollution. In the metropolitan region of Quebec, the problem is particularly present in the vicinity of Quebec and Pierre-Laporte bridges. This master’s thesis proposes to calculate three types of cost of road congestion around the bridges using GPS data : the total cost, the external cost and the social loss of congestion.

Our results seem to indicate that the congestion imposes a total cost to the society over $40 million per year in the area around the bridges, estimating this cost with two different approaches. The external cost of congestion in the area is estimated to $21.7 million and the social loss incurred by this congestion to $5.5 million annually. The estimates of the cost of congestion are considerably higher than those of the study published in June 2017 by Raymond Chabot Grant Thornton that estimated the total cost for the main roads within a similar zone around the bridges of $15.8 million per year.

(5)

v

Table des matières

Résumé ... iii

Abstract ... iv

Table des matières ... v

Liste des tableaux ... vi

Liste des figures ... viii

Liste des abréviations ... ix

Remerciements ... x

1 - Introduction ... 1

2 - Revue littéraire ... 4

2.1 - Instruments et concepts d'ingénierie ... 4

2.2 - Modèle économique ... 11

2.3 - Évaluations existantes du coût de la congestion ... 18

3 - Données et champ d'application ... 27

3.1 - Champ d'application de l'étude ... 27

3.2 - Guide 2016 de l'analyse avantages-coûts des projets publics en transport routier .. 29

3.3 - Enquête Origine-Destination 2011 ... 32

3.4 - Données GPS de l'application mobile Mon trajet ... 33

4 - Méthodologie ... 36 4.1 - Méthode d'ingénierie ... 36 4.2 - Méthode économique ... 41 5 - Résultats ... 47 5.1 - Scénario central ... 47 5.2 - Analyse de sensibilité ... 50

6 - Pertinence d’un troisième lien ... 54

7 - Conclusion ... 56

Bibliographie ... 58

ANNEXE I : Exemple de direction pour un segment dans la ZAT 704 ... 63

ANNEXE II : Calcul des données agrégées ... 65

(6)

vi

Liste des tableaux

Tableau 1. Coûts de la congestion annuelle en 2001 selon le seuil pour la région

métropolitaine de Québec (en millions de dollars de 2002) ... 22

Tableau 2. Valeur horaire du temps selon le motif de déplacement pour un véhicule léger (en dollars de 2014) ... 29

Tableau 3. Coût de déplacement en carburant pour un véhicule léger selon sa vitesse (en dollars de 2014) ... 30

Tableau 4. Coût des émissions polluantes pour un véhicule léger selon sa vitesse (en dollars de 2014) ... 31

Tableau 5. Exemple de données de déplacements recueillies dans le cadre de l'Enquête Origine-Destination 2011 dans la région de Québec ... 32

Tableau 6. Exemple de données d'un déplacement recueillies par l'application mobile ... 33

Tableau 7. Exemple de déplacement supplémentaire généré par découpage d'un déplacement de l'échantillon (dans ce cas-ci, le déplacement détaillé au Tableau 6, en éliminant le premier et le dernier segment du déplacement). ... 34

Tableau 8. Exemple de calcul du coût de la congestion pour un déplacement, en supposant que le conducteur est le seul occupant du véhicule et qu'il se déplace pour un motif «affaires» ... 39

Tableau 9. Données agrégées pour l’ensemble du réseau routier de la ZIP pour une journée typique de semaine (vitesse de circulation fluide = 78,90 km/h) ... 42

Tableau 10. Résultats de l’estimation de la fonction BPR par moindres carrés non linéaires (MNCL) ... 43

Tableau 11. Résultats des estimations de la relation vitesse–coût/km par moindres carrés ordinaires (MCO) ... 45

Tableau 12. Coût total annuel de la congestion routière dans la ZIP selon la méthode d’ingénierie (en dollars de 2014) ... 47

Tableau 13. Coût total annuel de la congestion routière dans la ZIP selon la méthode d’ingénierie, par période de pointe (en dollars de 2014) ... 47

Tableau 14. Retards annuels dans la ZIP selon la méthode d’ingénierie ... 48

Tableau 15. Retards annuels dans la ZIP selon la méthode économique ... 48

Tableau 16. Coût total, coût externe et perte sociale annuels de la congestion routière dans la ZIP selon la méthode économique (en dollars de 2014) ... 49

Tableau 17. Coût total, coût externe et perte sociale annuels de la congestion routière dans la ZIP selon la méthode économique, par heure de la journée (en dollars de 2014) ... 49

Tableau 18. Débits optimums dans une journée de semaine à l’intérieur de la ZIP ... 49

Débit observé (nombre de véhicules) ... 49

Débit optimal (nombre de véhicules) ... 49

Débit excédentaire (nombre de véhicules) ... 49

Débit excédentaire par rapport au débit observée (%) ... 49

Tableau 19. Coût total annuel de la congestion routière dans la ZIP selon la méthode d’ingénierie, avec l’approche du seuil (en dollars de 2014) ... 50

Tableau 20. Comparaison du coût total annuel de la congestion routière dans la ZIP selon la méthode d’ingénierie, avec les données de l’application mobile et les données des simulations du MTQ (en dollars de 2014) ... 51

Tableau 21. Impact d’une variation du paramètre β sur les estimations du coût de la congestion ... 52

(7)

vii

Tableau 22. Impact d’une variation de l’élasticité de la demande sur la perte sociale de la congestion ... 52 Tableau 23. Débits horaires calculés avec la méthode économique... 66

(8)

viii

Liste des figures

Figure 1 : Relation vitesse-débit (VDF) ... 5

Figure 2 : Fonction BPR standard (où C=500 et 𝒗𝒇𝒇 = 𝟏𝟎𝟎 km/h) ... 9

Figure 3. Fonction BPR pour différentes valeurs de β ... 9

Figure 4 : Modèle économique de la congestion ... 11

Figure 5 : Coût moyen en situation d'hypercongestion ... 14

Figure 6 : Coûts de la congestion ... 16

Figure 7 : Trois formes possibles de la fonction de coût moyen ... 17

Figure 8. Point d'engorgement majeur à Québec relevé par l'Association canadienne des automobilistes (CAA) : représenté par le trait rouge, un tronçon de 700 mètres de l'Autoroute 73 entre le chemin des Quatre-Bourgeois et l'avenue Dalquier ... 21

Figure 9. Zone d'influence des ponts (ZIP). La zone orangée représente la ZIP. Les lignes rouges représentent les autoroutes. Les lignes vertes représentent des routes provinciales. 27 Figure 10. Exemple de déplacement traversant la ZIP ... 33

Figure 11. Exemple de déplacement supplémentaire traversant la ZIP ... 34

Figure 12. Méthodologie globale pour calculer le coût total annuel de la congestion, méthode d’ingénierie ... 41

Figure 13 : Forme graphique de la relation entre la vitesse et le coût par kilomètre selon l’équation 12) (exemple où γ=15 et K=0) ... 43

Figure 14. Exemple de segment de direction « nord » ... 63

Figure 15. Exemple de segment de direction « sud » ... 63

(9)

ix

Liste des abréviations

BTRE : Bureau of Transport and Regional Economics FHWA : Federal Highway Administration

ISQ : Institut de la Statistique du Québec MCO : Moindres carrés ordinaires MNCL : Moindres carrés non-linéaires MTQ : Ministère des Transports du Québec RTC : Réseau de transport de la Capital

SAAQ : Société de l’assurance automobile du Québec STL : Société de transport de Lévis

TTI : Texas Transportation Institute ZAT : Zone d'analyse de transport ZIP : Zone d'influence des ponts

(10)

x

Remerciements

Je remercie Philippe Barla, mon directeur de recherche, pour ses précieux conseils et son aide lorsque j’étais confronté à quelque difficulté. Sans lui, ce mémoire n’aurait jamais pu être complété. Je remercie aussi Luis Miranda-Moreno, mon codirecteur de recherche, et son équipe de l’Université McGill, tout particulièrement Joshua Stipencic et Amir Zahabi, pour avoir manipulé les données GPS de l’application mobile « Mon Trajet » et les avoir mises à ma disposition dans un format que je pouvais exploiter. Je remercie également Babacar Sambe du Ministère des transports du Québec (MTQ) pour son aide et ses réponses à nos questions. Je remercie le MTQ pour m’avoir fourni les données de l’Enquête Origine-Destination 2011 pour la région de Québec.

Je remercie le Centre de Recherche en économie de l'Environnement, de l'Agroalimentaire, des Transports et de l'Énergie de l’Université Laval (CREATE) pour son soutien financier au cours de ma maîtrise. Je remercie également Sophie Magnan et les autres employés de la Direction du livre, de l’audiovisuel et de la recherche du Ministère de la Culture et des Communications du Québec pour m’avoir permis de travailler avec eux à temps partiel pendant que je travaillais sur ce mémoire.

Finalement, je remercie ma famille et mes amis qui n’ont jamais douté de moi et pour leur soutien tout au long de ce projet. Je remercie l’Université Laval de m’avoir accueilli parmi leurs étudiants de maîtrise et de m’avoir fait vivre deux années enrichissantes d’études, ainsi que l’Université de Montréal où j’ai effectué mon baccalauréat en économie. J’ai été très heureux d’effectuer mes études en économie dans ces deux institutions et je suis fier de les avoir fréquentées.

(11)

1

1 - Introduction

La congestion routière est une problématique à laquelle font face toutes les grandes villes. Les routes urbaines sont, à quelques exceptions près, des biens en accès libre financés par un ou plusieurs gouvernements. Ce libre accès des infrastructures routières peut mener à des situations où le réseau routier est utilisé au-delà de sa capacité par les usagers. Or, cette surutilisation entraîne bien des inconvénients, pour les usagers comme pour les non usagers de la route :

• délais dans les temps de déplacement

• incertitude accrue autour du temps nécessaire aux déplacements • changements d'horaire de départ et d'arrivée

• coûts d'opération supplémentaires des véhicules (consommation de carburant et de lubrifiant, usure des pneus, entretien et réparation, usure du véhicule)

• pollution atmosphérique accrue • pollution sonore

• modification de la fréquence et de la gravité des accidents • détérioration accélérée des infrastructures routières • stress des usagers

• délocalisation de résidents et d'activités économiques

Les problèmes entraînés par la congestion ont amené des experts de plusieurs disciplines (ingénieurs, économistes, urbanistes) à se pencher sur la question. Plusieurs rapports et études ont été rédigés pour tenter de calculer les coûts engendrés pour la société par la congestion routière.1 Les délais subis quotidiennement par les automobilistes en milieu urbain et les enjeux de développement économique régional reliés au problème de la congestion en font une question politique parfois importante.

Dans la région de Québec-Lévis, des acteurs politiques et économiques appellent à la construction d'un troisième lien entre la Rive Nord et la Rive Sud, jugeant que le réseau routier actuel est insuffisant pour satisfaire la demande. En effet, la région connaît un important développement économique et démographique depuis 20112 et les deux ponts

1 Certains de ces rapports et études seront discutés dans la revue littéraire.

(12)

2

reliant les villes de Québec et Lévis (le pont de Québec et le pont Pierre-Laporte) peinent à assurer une circulation fluide entre les deux villes sur les heures de pointe. Un troisième lien est donc vu par plusieurs comme nécessaire pour assurer le développement économique future de la région et pour réduire la congestion observée aux alentours des ponts.

Cependant, il n'existe aucune estimation des gains économiques potentiels qu'un troisième lien pourrait apporter à la région. Aucune analyse coûts-bénéfices n'a été réalisée à ce jour sur l'impact d'un troisième lien. Plusieurs invoquent la réduction de la congestion comme raison suffisante pour aller de l'avant avec ce projet. Il n’existe à ce jour qu’une seule étude qui ait tenté d’estimer les coûts de la congestion à proximité des ponts (Raymond Chabot Grant Thornton, 2017) et une autre estimant les coûts de la congestion pour l’ensemble de l'agglomération urbaine de Québec, datant de 2006.3

La quasi-totalité des études sur la congestion au Canada ont jusqu'à maintenant utilisé des modèles de simulation de la demande routière.4 Les études plus récentes utilisent davantage le « Big Data », des bases de données complexes de déplacements collectées en temps réel utilisant des technologies comme le GPS, l'imagerie satellite, des réseaux de sondes installées sur des véhicules ou des appareils de détection sur le réseau routier.

Ce mémoire a pour objectif de calculer les coûts de la congestion routière dans la zone d'influence des ponts reliant la Rive Nord et la Rive Sud dans la région de Québec. Il s'agit de la première tentative au Canada d'estimer les coûts de la congestion routière d'une zone donnée à l'aide de données GPS5. Réalisés avec l'aide des données GPS de déplacements récoltés par une application mobile, nos calculs permettent d'avoir une idée des gains économiques potentiels qui pourraient être réalisés par la construction d'un troisième lien. Trois coûts différents de la congestion sont calculés :

1) Le coût total 2) Le coût externe 3) La perte sociale

3

Transports Canada. Le coût de la congestion urbaine au Canada, Transports Canada, 2006.

4Alors que ce mémoire était en cours de rédaction, Raymond Chabot Grant Thornton a fait paraître la première étude canadienne tentant d’évaluer les coûts de la congestion avec des données relevées sur le terrain.

(13)

3

Seuls les véhicules automobiles sont inclus dans l'estimation, c'est-à-dire que les coûts calculés ne tiennent pas compte de l'effet de la congestion sur les modes de transport en commun ou les camions lourds. Les composantes du coût de la congestion qui sont pris en compte sont les délais imposés aux véhicules, la consommation de carburant supplémentaire et la variation des émissions de polluants atmosphériques. La congestion étudiée ici se limite à la congestion récurrente, soit celle observée aux heures de pointe du matin et du soir les jours de semaine, lorsque les gens se rendent habituellement au travail ou en reviennent. La section 2 du mémoire présente une revue littéraire des études précédentes qui ont cherché à estimer les coûts de la congestion, en détaillant la méthodologie qu'elles ont utilisée. Elle énonce également des concepts clés qui ont été nécessaires aux calculs réalisés ainsi que le cadre théorique qui les ont guidés. La section 3 fournit des renseignements sur les différentes sources de données utilisées. La section 4 décrit la méthodologie suivie pour arriver aux différents résultats. La section 5 fournit les résultats des calculs effectués, tout en procédant à une analyse de sensibilité des résultats. La section 6 étudie la pertinence d’un troisième lien en regard des résultats. La section 7 présente les conclusions du mémoire.

(14)

4

2 - Revue littéraire

Calculer les coûts de la congestion pour un axe routier, un réseau ou une région implique des concepts à la fois économiques et d'ingénierie. Les ingénieurs ont été les premiers à s'intéresser à la congestion et à y chercher des solutions. Ils ont donc développé les premiers outils pour analyser le phénomène. Lorsque les économistes ont commencé à s'intéresser eux aussi à la question dans les années 1960, ils ont emprunté certains des outils développés par les ingénieurs pour les aider à effectuer leurs propres analyses. Nombre d'études sur la congestion, y compris ce mémoire, font d'ailleurs appel à la collaboration entre des personnes issues des deux disciplines. Cette revue de la littérature tient compte de cette dualité de la vision de la congestion en présentant d'abord une revue des instruments et concepts d'ingénierie qu'elle utilise, avant de faire de même pour les instruments et concepts économiques. Elle se termine en examinant les précédentes tentatives de calcul du coût de la congestion effectuées au Canada et un peu partout dans le monde.

2.1 - Instruments et concepts d'ingénierie

Le monde de l'ingénierie a développé une série d'équations mettant en relation divers variables qui permettent d'observer l'état d'utilisation d'un réseau routier. Ces variables incluent :

• la vitesse des véhicules

• le débit (nombre de véhicules empruntant une route sur une période de temps donnée) • la densité (nombre de véhicules sur une distance donnée)

• la capacité (nombre maximum de véhicules sur une route sur une période de temps donnée)

Les mêmes définitions tiennent pour un réseau routier comme pour une route. Le débit, la vitesse et la densité sont liés par la relation suivante telle que l'expliquent Jorgensen et Nielsen (2008) :

(1) 𝐷 = 𝐹 𝑉

Où : 𝐷 = densité (véhicules/km) 𝐹 = débit (véhicules/heure)

(15)

5 𝑉 = vitesse (km/heure)

La plupart des modèles de congestion sont basés sur une relation entre le débit et la vitesse, ce que l'on appelle plus communément dans la littérature une relation VDF (volume-delay function). Elle suit habituellement la forme suivante (Jastrzebski, 2000) :

(2) 𝑡(𝑣) = 𝑡0× 𝑓 ( 𝐹 𝐶)

Où : 𝐹 = débit (véhicules/heure) 𝐶 = capacité (véhicules/heure) 𝑣 = vitesse (km/heure)

𝑡0 = temps de déplacement en l'absence de congestion (heures/km)

𝑡(𝑣) = temps de déplacement en fonction de la vitesse observée (heures/km)

Comme la vitesse est égale à l'inverse du temps de déplacement, il est possible de modifier l'équation pour obtenir la forme suivante :

(3) 1 𝑣 = 1 𝑣𝑓𝑓× 𝑓 ( 𝐹 𝐶)

Où : 𝑣𝑓𝑓 = vitesse de circulation fluide ou free flow (km/heure)

De manière empirique, la relation entre la vitesse et le débit sur un tronçon de route peut être représentée par la Figure 1.

(16)

6

Dans cette représentation simplifiée, tous les véhicules évoluent à la même vitesse. La vitesse maximale est représentée par la vitesse de circulation fluide, 𝑣𝑓𝑓. Il s'agit de la vitesse à laquelle les véhicules évoluent lorsqu'il n'y a aucune interaction entre eux les ralentissant et qu'ils peuvent se déplacer à la vitesse de leur choix. Tant et aussi longtemps que le débit reste inférieur à un certain niveau, ici représenté par 𝐹𝑓𝑓𝑐, les véhicules peuvent se déplacer à la vitesse de circulation fluide. C'est ce que l'on appelle une situation de circulation libre. Cependant, à un débit supérieur à 𝐹𝑓𝑓𝑐, le nombre de véhicules empruntant une même route à l'intérieur du même intervalle de temps devient trop élevé pour qu'ils puissent continuer à se déplacer à la vitesse maximale. Ils doivent ralentir. Cette situation où la vitesse de déplacement des véhicules diminue tandis que le débit augmente est ce qui caractérise le phénomène de la congestion. Chaque véhicule supplémentaire qui vient s'ajouter force l'ensemble des véhicules à ralentir. Si le nombre de véhicules continue d'augmenter, ils atteindront la capacité de la route. Cette dernière ne peut accueillir plus que sa capacité. C'est à ce moment que survient le phénomène de l'hypercongestion, caractérisé par la baisse simultanée de la vitesse et du débit pour chaque véhicule supplémentaire qui vient se joindre à la circulation. C'est en situation d'hypercongestion que se forment les files d'attente (Chu et Small, 2003). L'hypercongestion est encore mal comprise par les experts et la plupart des études préfèrent se concentrer sur la partie supérieure de la relation, celle concernant la congestion dite « normale ». Ce mémoire fait de même et ignore le phénomène de l'hypercongestion. Pour plus de détails sur la relation vitesse-débit, voir Evans (1992), Winaisathaporn (2013) et Small et Verhoef (2007).

Selon Litman (2011), qui cite un article de William Vickrey paru en 1969, il existe 6 types de congestion :

I. Interaction simple sur des routes homogènes (deux véhicules qui se déplacent à proximité l'un de l'autre se ralentissent mutuellement)

II. Interaction multiple sur des routes homogènes (plus de deux véhicules se déplacent à proximité les uns des autres et se ralentissent)

III. Goulot d'étranglement ou bottleneck (plusieurs véhicules tentent de traverser un point de passage étroit simultanément)

(17)

7

IV. Trigger neck (plusieurs véhicules tentent de traverser un passage étroit simultanément, ce qui provoque la formation d'une file d'attente interférant avec d'autres véhicules qui ne tentent pas d'empruntant le point de passage étroit)

V. Congestion de contrôle du réseau (les contrôles de circulation sur les heures de pointe étendent les périodes de congestion)

VI. Congestion causée par la configuration du réseau routier (la congestion reflète l'état de la circulation sur tous les itinéraires et avec tous les modes de transport sur le réseau)

La plupart des études estimant les coûts de la congestion se concentrent sur les types II et III. Les fonctions VDF qui ont été développées l'étaient d'ailleurs au départ pour représenter l'état de la circulation sur une route homogène, ou un tronçon de cette route, soit le type II de congestion. Des études ultérieures les ont ensuite utilisées et/ou adaptées pour qu'elles puissent être utilisées à plus grande échelle, sur un réseau ou une zone. Jastrzebski (2000) et Small et Verhoef (2007) fournissent chacun une liste de ces fonctions qui incluent, sans nécessairement s'y limiter :

• La fonction BPR (1964) • La fonction BPR généralisée • La fonction S logit

• La fonction INRETS • La fonction conique

• La fonction linéaire de Greenshield (1935) • La fonction de Wardrop (1968)

• La fonction quadratique de Keeler et Small (1977) • La fonction temps-dépendante de Small (1983) • La fonction d'Akçelik (1991)

La plus utilisée de ces fonctions dans la littérature est la fonction BPR, développée en 1964 par le Bureau of Public Roads (d'où l'appellation BPR), l'ancêtre de la Federal Highway Administration (FHWA) aux États-Unis, sous la gouverne du Département du Commerce des États-Unis. Elle prend la forme suivante :

(18)

8 (4) 1 𝑣 = 1 𝑣𝑓𝑓[1 + 𝛼 ( 𝐹 𝐶) 𝛽 ]

Où : 𝐹 = débit (véhicules/heure) 𝐶 = capacité (véhicules/heure) 𝑣 = vitesse (km/h)

𝑣𝑓𝑓 = vitesse de circulation fluide ou free flow (km/h) 𝛼, 𝛽 : paramètres de la fonction

Si les paramètres de la fonction prennent les valeurs 𝛼 = 0,15 et 𝛽 = 4, on parle d'une fonction BPR standard. Certains fusionnent la capacité (qui est une valeur constante) avec le paramètre 𝛼, ce qui donne la formule suivante (Parry, 2009) :

(5) 1 𝑣 =

1

𝑣𝑓𝑓[1 + 𝛼𝐹 𝛽]

D'autres utilisent une version simplifiée de la formule (Parry, Heine, Lis et Li, 2014) : (6) 1

𝑣 = 1

𝑣𝑓𝑓+ 𝛼𝐹 𝛽

Les experts retiennent en général des valeurs de 2,5 à 5 pour le paramètre 𝛽 (Parry et al), mais Manzo (2013) a démontré à l'aide de données sur la circulation au Danemark que la valeur de ces paramètres peut être en fait très éloignée de cet intervalle et varie énormément selon le type de route. Skabardonis et Dowling ont d'ailleurs estimé en 1996 une fonction BPR dite « améliorée », où 𝛽 = 10 et 𝛼 = 0,2 sur une autoroute et 𝛼 = 0,05 sur une artère (Small et Verhoef, 2007).

Certains critiquent la fonction BPR et lui reprochent de ne pas représenter le phénomène de la congestion avec réalisme. La fonction est néanmoins plutôt simple en comparaison de plusieurs autres formes fonctionnelles développées pour illustrer la relation entre la vitesse et le débit, et c'est d'ailleurs l'une des raisons majeures de son utilisation généralisée, mais elle a tout de même ses inconvénients. Si on observe la Figure 2, qui représente un exemple de la fonction BPR standard, on constate qu'elle ne suit pas la relation empirique entre la vitesse et le débit. Ce point est la plupart du temps considéré comme non significatif dans les études, puisque la fonction BPR demeure assez représentative du phénomène de la

(19)

9

congestion tant et aussi longtemps qu'on se limite à étudier la congestion dite « normale » et qu'on ne s'attarde pas à l'hypercongestion (voir Figure 1), c'est-à-dire tant que le débit demeure inférieur à la capacité (représentée par la ligne rouge dans la Figure 2). Tant qu'il n'y a pas de file d'attente qui se forme à l’entrée ou à la sortie de la zone étudiée, la fonction BPR peut être appropriée (Jorgensen et Nielsen, 2008).

Figure 2 : Fonction BPR standard (où C=500 et 𝒗𝒇𝒇 = 𝟏𝟎𝟎 km/h)

La fonction BPR présente aussi d'autres inconvénients. Par exemple, si la valeur du paramètre 𝛽 est trop élevée, la vitesse estimée 𝑣 peut être très semblable pour une large étendue de débits (Spiess, 1990). En effet, si 𝛽 → ∞, alors 𝑣 =𝑣𝑓𝑓 ∀ 𝐹 < 𝐶. D'un point de vue mathématique, cela entraîne plusieurs complications. Une très petite variation dans le débit mesuré peut faire varier la vitesse estimée de manière dramatique à proximité de la capacité. La Figure 3 illustre ce qui arrive quand la valeur de 𝛽 augmente.

Figure 3. Fonction BPR pour différentes valeurs de β

0 20 40 60 80 1 0 0 Vi te sse (km /h ) 0 500 1000 1500

Débit (nombre de véhicules/heure)

(20)

10

Il faut cependant souligner qu'il est complexe de définir une forme fonctionnelle à la relation entre la vitesse et le débit qui soit satisfaisante sous tous les aspects. Plusieurs conditions doivent être respectées pour avoir une forme fonctionnelle acceptable. Les propriétés mathématiques de base d'une fonction vitesse-débit suivant l'équation 2), où le temps de déplacement est la variable dépendante et le débit est la variable indépendante, sont d'être continue, strictement croissante et non négative (Jastrzebski, 2000 et Spiess, 1990). Or, une équation qui représenterait mieux le phénomène, surtout en cas d'hypercongestion, par exemple une forme quadratique, ne respecterait pas la condition de croissance stricte puisqu'une fois la capacité dépassée, une baisse du débit est accompagnée d'une augmentation du temps de déplacement, ce qui signifie que la fonction serait décroissante en situation d'hypercongestion. C'est d'ailleurs pourquoi beaucoup d'études se concentrent sur le phénomène de la congestion normale. Il est entre autres possible de réduire les chances d'être confronté au problème de l'hypercongestion en utilisant des observations pour l'ensemble d'un réseau routier plutôt que pour un lien en particulier, car les vitesses auxquelles se produisent l'hypercongestion sont plus basses sur un réseau que pour une route particulière (Thomson, 1998). Tant et aussi longtemps que l'étude se concentre sur la congestion et exclut l'hypercongestion, comme c'est le cas ici, la fonction BPR est un bon outil pour étudier le phénomène.

50 60 70 80 90 1 0 0 Vi te sse (km /h ) 0 200 400 600

Débit (nombre de véhicules/heure)

β=0 β=2

β=4 β=6

β=8 β=10

(21)

11

Bien que cela n'entre pas dans le champ de ce mémoire et qu'ils ne seront pas utilisés ici, il semble adéquat de parler brièvement des modèles qui permettent de prendre en compte le phénomène d'hypercongestion. Ces modèles font appel à d'autres équations d'ingénierie en plus de la traditionnelle relation vitesse-débit. Pour étudier la circulation à Copenhague, Jorgensen et Nielsen (2008) utilisent conjointement la fonction BPR pour la congestion normale et estiment une relation débit-densité pour les situations d'hypercongestion. Williams (1996) fait la revue de ces équations dans un document de la Federal Highway Administration. Le plus connu et le plus utilisé à ce jour est le modèle à double flux développé par Herman et Prigogine (1979), puis par Herman et Ardekani (1984). Prouvé empiriquement à partir de données obtenues par photographie aérienne (Herman et Ardekani, 1987), il met en relation diverses variables sur la circulation dans une zone étendue (proportions de véhicules à l'arrêt et en déplacement, vitesses maximales et moyennes de déplacement, temps à l'arrêt et en déplacement…). Chung, Hong, Kho et Lee ont prouvé plus récemment (2005) que ces relations tenaient aussi en utilisant des données GPS à Séoul. D'autres modèles utilisent la densité de la circulation par voie sur une même route pour mieux l'évaluer. On désigne ces modèles de congestion comme des modèles dynamiques, à l'opposé de ceux basés uniquement sur la relation vitesse-débit vue précédemment et que l'on désigne comme des modèles statiques. Les modèles dynamiques se basent plus souvent sur le modèle de goulot d'étranglement ou de bottleneck développé par Vickrey (1969) et prennent en considération la possibilité pour les usagers de la route de retarder ou devancer leurs déplacements en réaction à la congestion.

2.2 - Modèle économique

Il est possible de développer un modèle économique de l'offre et de la demande d'utilisation d'une route ou d'une zone routière à partir de la fonction BPR ou de toute autre relation vitesse-débit. Le premier a été développé pendant les années 1960, notamment par Walters (1961) et dans le Rapport Smeed (1964) tel que le souligne Thomson en 1968. Cette théorie économique de la congestion peut être illustrée par le graphique de la Figure 4.

(22)

12

La théorie est très bien expliquée dans l'étude du BTRE (2007, pp. 99-102) et par Winaisathaporn (2013). Le modèle suit cependant plusieurs hypothèses de base (voir Parry, 2009 et Winaisathaporn, 2013) :

• Aucune externalité (à l'exception de celle qu'un véhicule fait supporter à un autre véhicule, soit l'externalité propre à la congestion)

• Aucun coût de transaction

• Information parfaite des utilisateurs sur leurs coûts de transport

• Aucune file d'attente à l'entrée ou à la sortie de la zone étudiée (c'est-à-dire que le débit est identique à l'entrée et à la sortie de la zone)

• Débit uniforme sur toute la période couverte • Débit uniforme sur toutes les voies d'une route

• Valeur du temps et coûts d'opération uniformes pour tous les automobilistes • Indépendance vis-à-vis de la congestion à l'extérieur de la zone étudiée

Ce modèle s'apparente au modèle classique de l'offre et de la demande d'un bien, mais son interprétation est quelque peu différente. L'ordonnée représente le coût du transport par kilomètre pour les usagers au lieu d'un prix, tandis que l'abscisse représente le débit de véhicules plutôt qu'une quantité de biens achetés. La demande représente la volonté marginale à payer pour se déplacer des automobilistes et est décroissante en fonction du nombre de véhicules. L'aspect le plus important du modèle réside dans les coûts de transport

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moyen et marginal (CM et Cm). Ces deux courbes sont dérivées directement d'une relation vitesse-débit, dans ce cas-ci la fonction BPR. En effet, le coût de transport du véhicule varie selon la vitesse de celui-ci. Plus la vitesse diminue, plus le coût de se déplacer sur un kilomètre augmente en raison du temps supplémentaire requis pour traverser cette distance. Il y a d'autres composantes du coût de la congestion (voir l'introduction) qui ne suivent pas nécessairement cette évolution, mais les délais représentent le plus souvent le coût le plus important de la congestion. En situation de congestion normale (hypercongestion exclue), la vitesse diminue à mesure que le débit augmente (voir Figure 1), ce qui signifie que le coût augmente avec le débit, ce qui explique la croissance du coût moyen et du coût marginal. Le coût moyen représente le coût de transport subi par chaque véhicule individuellement. Cependant, comme nous l'avons expliqué avec la relation vitesse-débit, au-delà d'un certain débit (𝐹𝑓𝑓𝑐), chaque véhicule supplémentaire qui vient se rajouter à la circulation fait diminuer la vitesse de l'ensemble des véhicules. Il en résulte donc que chaque véhicule qui se rajoute impose un coût de transport supplémentaire à l'ensemble des véhicules utilisant la route ou la zone concernée, mais que l'utilisateur ressent seulement son propre coût moyen. Le coût marginal représente le coût supplémentaire que fait supporter chaque véhicule à l'ensemble des usagers, incluant lui-même. La différence entre le coût marginal et le coût moyen est ce qu'on appelle l'externalité de la congestion. Tant et aussi longtemps que le débit demeure inférieur à 𝐹𝑓𝑓𝑐, il n'y a pas d'externalité, car les véhicules ne se ralentissent pas mutuellement. Le coût marginal est alors égal au coût moyen. Au-delà de ce seuil, chaque véhicule qui vient se rajouter au réseau entraîne une externalité qui se traduit en coût de déplacement supplémentaire pour l'ensemble des autres véhicules. C'est avec ces arguments théoriques que plusieurs économistes suggèrent l'instauration de péages routiers pour corriger les externalités de la congestion, le débit optimum se situant à 𝐹∗ alors que l'équilibre l'amène à 𝐹𝐸.

Il est très important de se rappeler que ce modèle ne s'attarde qu'à la congestion normale et non à l'hypercongestion. En effet, à cause de la baisse conjuguée du débit et de la vitesse dans cette dernière situation, un modèle qui tiendrait compte de l'hypercongestion donnerait une courbe CM retroussée vers la gauche au-delà de la capacité (Parry, 2009), telle que représentée à la Figure 5. Comme nous ne considérons que la congestion normale, soit la

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partie supérieure de la courbe vitesse-débit (voir Figure 1), le modèle présenté à la Figure 4 est celui auquel nous nous référons.

Figure 5 : Coût moyen en situation d'hypercongestion

Il existe plusieurs façons de calculer le coût de la congestion. Nous en avons retenu trois pour ce mémoire, les mêmes que celles évaluées par le BTRE (2007) :

1) Le coût total 2) Le coût externe 3) La perte sociale

Le coût total évalue les coûts qui seraient économisés si tous les véhicules évoluaient à la vitesse de circulation fluide (𝑣𝑓𝑓) plutôt qu'à celle observée (𝑣). Sur la Figure 6, le coût total de la congestion peut être représenté par l'espace DHEK, ou par FHN. Ce concept du coût de la congestion est le plus utilisé par les études (voir la section 2.3), mais beaucoup le critiquent comme étant une mesure inadéquate du coût. Litman (2011) cite Goodwin en 2003 qui avançait que :

The most widely quoted [congestion cost] studies may not be very useful for practical purposes, since they rely, essentially, on comparing the existing traffic conditions against a notional ‘base’ in which the traffic volumes are at the same high levels, but all vehicles all deemed to travel at completely congestion-free speeds. This situation could never exist in reality, nor (in my view) is it reasonable to encourage public opinion to imagine that this is an achievable aim of transport policy.

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Bref, la circulation fluide ou free flow n'est pas un objectif souhaitable ou réalisable, donc calculer les coûts de la congestion à partir d'un scénario idéal où tous les véhicules évolueraient comme s'il n'y avait pas de congestion serait inutile. Cependant, la majorité des études utilisent ce concept ou un concept voisin pour estimer les coûts de la congestion. Il peut donc être pertinent de calculer le coût total, ne serait-ce qu'à des fins de comparaison. Le coût externe de la congestion représente une meilleure mesure. Il s'agit du coût que les usagers de la route imposent aux autres usagers, soit le coût des externalités de la congestion. Sur la Figure 6, il peut être représenté par la région FNE. Cependant, la mesure la plus adéquate pour représenter ce que la congestion coûte à la société serait probablement la perte sociale qu'elle engendre, représentée par le triangle ONE sur le graphique. À cause des externalités, les utilisateurs ne paient le plein prix de l'usage de la route. Par exemple, le véhicule qui rejoint le réseau au point B fait supporter un coût de transport correspondant au segment OB, mais il ne paye que la portion BJ du segment. La portion OJ du segment représente l'externalité, la portion du coût causé par le véhicule qui est supporté par les autres véhicules. Cette imperfection du marché entraîne un équilibre au point E plutôt qu'à l'optimum social qui se situe au point O. Le réseau est surutilisé. En théorie, si un péage routier était installé correspondant au montant OJ, le coût moyen se déplacerait vers le haut et l'équilibre serait à l'optimum social. Cependant, dans un cas où il n'y aurait aucune taxe ou impôt pour corriger l'externalité, la société perd l'équivalent de la zone ONE en bien-être. La perte sociale est la perte de bien-être subie par la société à cause de la surutilisation du réseau routier par rapport à son utilisation optimale, ou encore le gain que la société ferait si la route était utilisée de manière optimale. Certains (Harrison, 2012) critiquent cependant la perte sociale comme moyen de calculer les coûts de congestion puisqu'il est pratiquement impossible d'atteindre l'optimum social en pratique par des péages routiers, comme ce modèle théorique pourrait le laisser entendre. Les tentatives pour éliminer la perte sociale à l'aide d'un système de péages comme il est souvent suggéré peuvent se solder dans la réalité par un détournement de la circulation vers des routes non tarifées, et les coûts d'implantation et d'opération d'un tel système permettant d'atteindre l'équilibre social sont souvent très élevés et font disparaître une partie du bénéfice social du retour à l'optimum. Harrison est d'avis que chaque projet visant à réduire les coûts de la congestion doit faire l'objet d'une analyse

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coûts-16

bénéfices tenant compte de l'effet du projet sur la réduction des coûts totaux de la congestion, d'où la pertinence de continuer à calculer le coût total autant que la perte sociale.

Il existe d'autres moyens de mesurer les coûts de la congestion auxquelles nous nous attarderons en faisant la revue des études antérieures ayant calculé un coût de la congestion, mais les trois mesures que nous venons d'examiner seront les principales que nous calculerons dans ce mémoire.

Figure 6 : Coûts de la congestion

Nous avons déjà souligné que le coût du transport était déterminé à partir de la relation vitesse-débit. Cependant, la forme de la fonction reliant le débit au coût par véhicule, qui équivaut au coût moyen, est tout aussi importante que celle de la relation vitesse-débit. Il n'y a pas de consensus sur la forme appropriée d'une telle fonction de coût. Evans (1992) avait retenu trois formes dans son étude sur les péages routiers, soit 1) la fonction linéaire inverse, 2) la fonction linéaire inverse tronquée et 3) la fonction bottleneck. Ces trois fonctions sont illustrées graphiquement dans la Figure 7. Nous avons cependant retenu une autre forme fonctionnelle pour ce mémoire, tel qu'il sera expliqué dans la méthodologie. Quant au coût marginal, il est déterminé à partir d'une dérivation du coût total par rapport au débit tel que représentée par la relation suivante tirée de Parry et al. (2014) :

(7) 𝐶𝑚 =𝑑𝐶𝑇 𝑑𝐹 =

𝑑(𝐶𝑀×𝐹) 𝑑𝐹

Où : 𝐹 = débit (véhicules/heure)

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17 𝐶𝑚 = coût marginal du transport ($/km) 𝐶𝑇 = coût total du transport ($/km)

Figure 7 : Trois formes possibles de la fonction de coût moyen

Le coût moyen et le coût marginal du transport sont très sensibles à la valeur horaire du temps, les délais étant la principale composante du coût de la congestion. En théorie, la valeur horaire du temps de transport devrait être égale au salaire horaire net (Parry et al., 2014) en raison du coût d'opportunité du temps perdu. Une heure perdue dans la circulation équivaut à une heure de travail perdu selon cette vision. Cependant, Hansen (2001) remarque que la congestion tend à réduire le temps de loisir des individus, car la durée du travail est exogène à l’individu. Les horaires flexibles de plus en plus de personnes les incitent à travailler plus tard ou plus intensément s'ils perdent du temps dans la congestion routière. Le temps de travail n'est donc pas autant affecté par la congestion qu'on pourrait le croire. De plus, la valeur du temps peut varier selon plusieurs critères. Hansen affirme que cette valeur grimpe en flèche à l'approche des vacances ou des congés, par exemple. Elle varie également d'un individu à l'autre, selon les circonstances et les motifs des déplacements (Thomson, 1998). Plusieurs expériences de comportement ont été menées pour estimer une valeur horaire au temps de déplacement, et les résultats varient énormément d'une étude à l'autre selon les circonstances et les méthodes employées. (Winaisathaporn, 2013). Ces résultats divergents semblent tout de même converger sur certains points. Parry (2009) et Parry et al. (2014) indiquent que la valeur du temps estimée tend à peu près vers la moitié du salaire du marché

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(selon des études réalisées au Canada, en France, au Royaume-Uni et aux États-Unis) et un peu moins que le salaire net. La valorisation du temps est également plus élevée lorsque le motif de déplacement est associé au travail plutôt qu'au loisir. Thomson (1998) affirme de son côté que la valeur du temps de loisir équivaut à peu près au tiers (entre 25% et 40%) de la valeur du temps de travail.

Il serait possible de calculer le coût total et le coût externe de la congestion en ayant recours uniquement au coût moyen et au coût marginal, mais le calcul de la perte sociale exige de calibrer une fonction de demande. Nous supposons à cette fin que la demande d'utilisation d'une route par rapport au coût de transport par kilomètre a une élasticité constante et qu'elle passe par le point d'équilibre du marché (le point E sur le graphique à la Figure 6). L’étude du BTRE (2007) est la seule étude sur les coûts de la congestion que nous ayons recensée qui ait estimé elle-même cette élasticité pour arriver à une valeur de -1.2. Le problème majeur rencontré en cherchant à dresser un portrait de cette élasticité est que la plupart des études qui calculent l'élasticité de l'utilisation des routes par rapport au coût de transport évaluent la demande uniquement en fonction du prix de l'essence (par litre ou par gallon) ou du coût de l'essence par km. Au mieux, elles estiment l'élasticité par rapport à l'ensemble des coûts d'opération des véhicules, comme Fouquet (2012) qui calcule des élasticités en incluant le coût des assurances, des réparations, de l'entretien, du carburant, de l'huile et de l'achat du véhicule. C'est aussi le cas de Goodwin (1992) et de Oum, Tong et Waters II (1992), qui sont les deux principaux articles de revue littéraire des études portant sur l'élasticité de la demande de transport. Un document du Victoria Transport Policy Institute (Litman, 2017) recense quatre études qui incluent le coût du temps de déplacement dans leurs estimations de l'élasticité. Seule l'une d'entre elles (Lee, 2005) s'intéresse à l'élasticité pour les véhicules individuels. Elle estime que l'élasticité se situe entre -0.5 et -1.0 à court terme, et entre -1.0 et -2.0 à long terme.

2.3 - Évaluations existantes du coût de la congestion

Harrison, Kanaroglou et Sweet (2015) recensent quatre approches pour étudier le phénomène de la congestion dans leur rapport du McMaster Institute for Transportation and Logistics :

1) La modélisation de la demande de transport. 2) Les études de la congestion de niveau régional.

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3) Les études de la circulation sur des infrastructures routières spécifiques. 4) Les systèmes de suivi de la circulation en temps réel.

Les études calculant les coûts de la congestion routière utilisent la plupart du temps l'une des deux premières approches. La modélisation de la demande de transport consiste à mettre au point des modèles mathématiques complexes qui permettent de prédire l'état de la circulation sur un réseau routier à partir de paramètres initiaux connus. Les modèles EMME, METROPOLIS6 et MOTREM7 en sont des exemples. Par exemple, de tels modèles peuvent permettre d'estimer la vitesse des véhicules et le détail de leurs déplacements à partir d'un point de départ, d'un point de destination et d'un débit de véhicules sur les routes connus. Ils ont souvent recours à des données de sondage et tentent de prévoir les réactions des usagers de la route à diverses politiques, par exemple un péage routier ou la construction de nouvelles routes. Les études de niveau régional utilisent des vitesses observées en temps réel et ont de plus en plus recours au Big Data8. Ces études donnent des mesures de l'état général de la circulation routière pour une région délimitée et requièrent moins d'hypothèses de départ que la modélisation de la demande, mais elles sont par contre incapables d'estimer l'effet des politiques publiques sur la congestion. La firme TomTom utilise une telle approche pour calculer son indice de trafic.9

Une étude est parue pendant la rédaction de ce mémoire sur les coûts de la congestion observée sur dix importants tronçons de route dans le secteur des ponts Pierre-Laporte et de Québec (Raymond Chabot Grant Thornton, 2017). Il s'agit de l'étude dont l'objectif se rapproche le plus de ce mémoire. Les débits sont obtenus à partir de compteurs permanents du MTQ installés à proximité des ponts et les vitesses sont collectées par des relevés sur le terrain également effectués par le MTQ. Cette étude utilise donc la deuxième approche pour calculer les coûts de la congestion. Les auteurs tiennent compte des camions et des voitures individuelles dans l'estimation des coûts et donnent une valeur du temps différente selon le motif de déplacement (affaires ou autres). Les composantes du coût de la congestion prises

6Voir De Palma et Lindsey, 2006.

7Le modèle MOTREM est utilisé par le MTQ pour modéliser la circulation routière dans la région de Montréal.

8Données de déplacements collectées par la technologie en temps réel (ex : données GPS) en volume suffisant pour rendre les méthodes traditionnelles de collecte de données désuètes.

9L'indice de TomTom indique la proportion de temps de transport supplémentaire causé par la congestion routière. En juin 2017, ils fournissaient un tel indice pour 390 villes dans 48 pays. Leurs données les plus récentes indiquent que les automobilistes de la ville de Québec voient leur temps de transport augmenter de 24% à cause de la congestion en 2016.

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en compte sont les délais, la consommation de carburant et les émissions de gaz à effet de serre10. Le coût est calculé selon deux méthodes, soit en comparant les vitesses observées par rapport à la vitesse de circulation fluide, soit en comparant avec 60% de la vitesse de circulation fluide. Les délais subis par les véhicules sont de 33,7 millions de dollars avec la première méthode et de 12,2 millions avec la deuxième méthode. Cependant, l'étude souligne que des variations dans la valeur du temps utilisée pour calculer le coût des délais ont un fort impact sur les résultats. Les coûts ci-haut ont été estimés en supposant que la valeur horaire du temps pour chaque individu variait de 23,03$ quand le motif de déplacement était lié aux affaires à 22,62$ pour tout autre motif. Cette dernière valeur correspondait au salaire horaire moyen des régions de la Capitale-Nationale et de la Chaudière-Appalaches en 2014 tel que fourni par l'ISQ. Si des valeurs différentes étaient choisies, par exemple 10$/heure pour les conducteurs et 7$/heure pour les passagers pour un motif de déplacement autre que les affaires, alors le coût des délais causés par la congestion diminuait de plus de moitié pour tomber à 15,8 millions avec la première méthode de calcul. Les auteurs ont retenu la première méthode avec le salaire horaire moyen pour obtenir le coût total de la congestion sur les dix tronçons étudiés. Ils sont arrivés à un coût annuel de 36,2 millions de dollars, dont 93% provient des délais.

Une autre étude canadienne utilise la deuxième approche, soit celle des vitesses observées en temps réel. Il s'agit de celle de l'Association canadienne des automobilistes (CAA, 2017) sur les pires points d'engorgement au Canada en 2015. Sur les vingt tronçons routiers recensés par l'étude, l'un d'eux se trouvait à Québec (voir la figure 8). L'étude estime que sur ce seul tronçon routier, les automobilistes perdent 78 000 heures par année à cause de la congestion, soit l'équivalent de 1,81 millions de dollars. Elle estime également que les automobilistes de la région métropolitaine de Québec ont perdu au total 5,3 millions d'heures en 2015 à cause de la congestion. Les données relatives aux vitesses ont été recueillies grâce à des sondes GPS auprès de la société HERE, un fournisseur de cartes numériques et de données sur la gestion du trafic. Les données sur les débits de véhicules proviennent de diverses sources qui ont été fusionnées. La vitesse de circulation fluide utilisée dans cette étude correspond au 95e

10Incluant les gaz suivant : 𝐶𝑂2, 𝐶𝐻4, 𝑁

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percentile de la vitesse horaire moyenne répartie sur une journée de semaine. La valeur horaire du temps est le salaire horaire moyen au Québec.

Figure 8. Point d'engorgement majeur à Québec relevé par l'Association canadienne des automobilistes (CAA) : représenté par le trait rouge, un tronçon de 700 mètres de l'Autoroute 73 entre le chemin des Quatre-Bourgeois et l'avenue Dalquier

D'autres études canadiennes sur les coûts de la congestion ont utilisé l'approche de la modélisation. C'est le cas de l'étude de Transports Canada qui estimait les coûts de la congestion pour les neuf plus grandes zones urbaines canadiennes, incluant la région de Québec (Transports Canada, 2006). Elle a eu recours à un modèle de demande de transport utilisé par la Ville de Québec pour déterminer les vitesses de déplacement des véhicules, ainsi qu'à des données sur le volume de transport fournies par la ville et les données des enquêtes origine-destination de la région. Les auteurs utilisent la méthode du seuil pour estimer les coûts annuels de la congestion, c'est-à-dire qu'ils considèrent qu'il y a congestion à partir du moment où la vitesse tombe en-dessous d'un certain pourcentage de la vitesse de circulation fluide. Le Tableau 1 illustre les résultats selon le seuil choisi.

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Tableau 1. Coûts de la congestion annuelle en 2001 selon le seuil pour la région métropolitaine de Québec (en millions de dollars de 2002)

Seuil Coût total ($)

Délais ($) Consommation supplémentaire de carburant ($) Émissions de GES ($) 50% 37,5 32,8 3,9 0,8 60% 52,3 45,5 5,6 1,2 70% 68,4 60,5 6,5 1,4

Comme on peut le constater dans le tableau ci-dessus, les composantes des coûts de la congestion pris en compte sont les délais, la consommation de carburant et les émissions de gaz à effet de serre11. Les délais causés par la congestion y représentent de 87 à 88% des coûts. Cette étude se limite à estimer la congestion sur les autoroutes et les artères. Elle ignore les routes collectrices et locales. La vitesse de circulation fluide est fixée par les limites de vitesse maximale pour ces deux types de route (100 km/h pour les autoroutes, 50 km/h pour les artères). L'étude ne tient aussi compte que des automobiles. Les autres véhicules comme les camions lourds, les autobus, les taxis, les véhicules d'urgence et les véhicules légers à usage commercial ne sont pas pris en compte. Seule la congestion en période de pointe est calculée, c'est-à-dire que l'étude ne tient compte que de la congestion récurrente12 et non de la congestion accidentelle13. La valeur du temps varie selon le motif de déplacement pour les délais (25,96$/heure pour un motif professionnel ou relié au travail, 8,15$/heure pour tout autre motif) et le coût du carburant par km varie selon la vitesse du véhicule et le type de route empruntée.

L'autre principale étude au Canada à avoir estimé les coûts de la congestion pour une région a été réalisée par le MTQ et les Conseillers ADEC pour la région de Montréal pour les conditions de l'année 2008 (Les Conseillers ADEC et le MTQ, 2014). Transports Canada s'est largement inspiré de cette étude pour réaliser la sienne.14 Elles se limitent toutes deux aux artères et autoroutes ainsi qu'à la congestion aux périodes de pointe les jours de semaine. Le modèle MOTREM08 a été utilisé pour obtenir les vitesses à partir de volumes de

11Incluant les gaz suivant : 𝐶𝑂

2, 𝐶𝑂, 𝐻𝐶, 𝑁𝑂𝑥, 𝑆𝑂𝑥, particules atmosphériques

12Congestion récurrente : congestion due à l'engorgement du réseau routier causé par une demande excédentaire à l'offre sur les heures d'utilisation intensive du réseau.

13Congestion accidentelle : congestion ponctuelle causée par des événements fortuit (accidents, chantiers routiers, phénomènes météorologiques…)

14Le MTQ a réalisé une série d'études sur la congestion routière à Montréal. Celle de 2014 est la dernière d'une série, ce qui explique qu'elle ait été publiée après celle de Transports Canada. L'organisme fédéral s'est inspiré des études ayant précédé celle de 2014.

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circulation fournis par l'Enquête Origine-Destination de 2008 pour la région de Montréal. La méthode du seuil est utilisée, mais un seul seuil est utilisé, soit celui de 60% de la vitesse de circulation fluide. Les vitesses de circulation fluide sont aussi déterminées par les vitesses maximales autorisées. Cette étude inclut cependant aussi les véhicules légers commerciaux, les camions porteurs, les camions remorques et les autobus en plus des automobiles. Elle fait également varier la valeur du temps de déplacement en fonction du revenu des individus et du motif de déplacement. Les composantes du coût de la congestion sont les mêmes que celles de Transports Canada, auxquelles on ajoute les coûts supplémentaires d'utilisation des véhicules (usure des pneus, dépréciation du véhicule, coûts d'entretien et de réparation, consommation de lubrifiant) et d'autres polluants atmosphériques. L'étude conclut que 88% des coûts de la congestion sont dus aux délais. Les autobus et les camions subissent 11% des coûts.

La dernière étude utilisant une modélisation de la demande que nous avons trouvée dans notre recherche a été publiée en 2013 par la New Zealand Transport Agency et estime les coûts de la congestion en 2006 pour la ville d'Auckland. Il s'agit aussi de la seule étude de notre revue littéraire à utiliser un modèle dynamique pour étudier la congestion, et donc à tenir compte du phénomène de l'hypercongestion. À ce titre, elle est la seule étude que nous avons recensée qui tiennent compte des délais d'horaire dans les coûts de la congestion, c'est-à-dire des coûts imposés aux individus qui modifient leurs horaires de déplacement à cause de la congestion (décision de partir plus tôt ou plus tard). Les autres composantes du coût de la congestion prises en compte sont les délais, les coûts d'opération des véhicules, les coûts environnementaux et les accidents. Une des observations importantes à effectuer quant aux résultats de cette étude est que la congestion a un impact négatif sur le coût des accidents, c'est-à-dire que le coût des accidents est moindre en situation de congestion qu'en l'absence de ladite congestion. Il est aussi intéressant de noter que les coûts imposés par les délais d'horaire font gonfler les coûts totaux de la congestion de 67 à 72%. La plupart des études ignorent cet aspect du coût de la congestion.

Au niveau international, deux organisations produisent des études qui font office de référence quand il s'agit de calculer les coûts de la congestion routière. Il s'agit du Texas Transportation Institute (TTI), qui estime les coûts de la congestion pour toutes les zones urbaines aux États-Unis (Texas A&M Transportation Institute et INRIX, 2015), et du Bureau of Transport and

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Regional Economics (BTRE) qui estime ce même coût pour les huit capitales régionales de l'Australie (Bureau of Transport and Regional Economics, 2007).

L'étude du TTI suit la deuxième approche pour étudier la congestion, soit en utilisant des données de vitesse récoltées en temps réel par les sondes de la compagnie INRIX. Les données sur les débits sont fournies par la Federal Highway Administration (FHWA), un organe du Département des Transports du gouvernement américain. La congestion est estimée en comparant les vitesses observées avec une vitesse de circulation fluide. Cette vitesse est estimée selon les observations d'INRIX au moment où le débit de véhicules est le plus bas sur les routes, entre 22h00 et 5h00 la plupart du temps. Une telle vitesse de circulation fluide est cependant plafonnée à 65 milles à l'heure sur les autoroutes, soit à peu près 105 km/h. La congestion est calculée sur les artères et les autoroutes et les calculs incluent la congestion subie par les camions. Le TTI inclut les délais et la consommation de carburant supplémentaire dans ses calculs, en plus des coûts d'opération pour les véhicules commerciaux et les camions. Les coûts supportés par les camions y représentent 17,5% du coût total de la congestion.

Quant à l'étude du BTRE, elle utilise plutôt une modélisation de la demande pour estimer les vitesses des véhicules, mais la modélisation en question est plutôt simplifiée par rapport à des études comme celles de Transports Canada et du MTQ. Les auteurs du rapport précisent qu'il s'agit d'une modélisation agrégée, essentiellement basée sur des relations vitesse-débit spécifiques aux différents types de route. La vitesse des déplacements est estimée à partir de ces relations, le débit étant connu et fourni par les agences de l'État. L'étude du BTRE est la seule que nous ayons trouvée dans nos recherches qui calcule le coût total, le coût externe et la perte sociale de la congestion, les autres études se limitant au coût total.15 Le coût total est estimé selon une méthode semblable à celle du TTI, en comparant le coût de transport à la vitesse observée par rapport au coût de transport à la vitesse de circulation fluide. Les vitesses de circulation fluide pour chaque lien routier sont fournies par les villes australiennes et correspondent aux vitesses maximales autorisées, mais le BTRE estime que les véhicules ne peuvent pas circuler à de telles vitesses à cause de la conception des routes. Les vitesses de circulation fluide se situent donc généralement entre 56 et 65 km/h, soit environ 10 km/h de

15La New Zealand Transport Agency donne un estimé de la perte sociale à Auckland, mais seulement en supposant que la perte sociale équivaut à 50% du coût total, et ce en se basant sur les résultats du BTRE.

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moins que les vitesses maximales autorisées. Le coût externe et la perte sociale sont cependant calculés en établissant des courbes de coût moyen et de coût marginal à partir des relations vitesse-débit, ainsi que des courbes de demande avec une élasticité constante passant par la jonction entre la courbe de coût moyen et le débit de véhicules observé. Des intégrales sont ensuite calculées pour obtenir les coûts en question. Les résultats montrent que le coût externe de la congestion équivaut à peu près à 70% du coût total, et la perte sociale à 50%. Les délais représentent 76% de la perte sociale de la congestion. Les coûts associés à la congestion qui sont pris en compte sont les délais, la variabilité du temps de transport (la congestion rend le temps nécessaire à un déplacement plus incertain et oblige les voyageurs à partir plus tôt), les coûts d'opération des véhicules (principalement la consommation de carburant) et les émissions de polluants atmosphériques. L'étude tient compte de la congestion subie par les voitures, les motocyclettes, les autobus et les camions légers et lourds, et ce sur tous les types de routes (autoroutes, artères, routes secondaires, routes urbaines).

Comme les méthodologies du TTI et du BTRE servent de référence aux autres études sur la congestion, ce sont aussi les plus discutées et les plus critiquées. Transports Canada (2006) estime notamment que calculer les coûts de la congestion en comparant le système routier dans un état de congestion à un état où les véhicules pourraient circuler à une vitesse de circulation fluide, comme le fait le TTI, n'est pas approprié, puisqu'un tel état de la circulation n'est ni durable d'un point de vue environnemental ni efficace économiquement. C'est pourquoi Transports Canada et le MTQ avaient retenu des seuils de la vitesse de circulation fluide à partir desquels ils considéraient qu'il y avait congestion, quoique Transports Canada reconnaît elle-même que choisir un seuil à partir duquel calculer la congestion n'est pas évident. Lindsey (2007) partage les mêmes critiques sur la méthode du TTI, tout en critiquant également la valeur du temps fixe attribuée à tous les déplacements, indistinctement du motif de déplacement et du nombre de passagers. Il soulève également le fait que le TTI ne fournit aucune estimation relative aux externalités de la congestion et se limite à calculer son coût total.

Le BTRE semble avoir adopté une approche plus appropriée, son plus récent rapport calculant non seulement le coût total, mais aussi le coût externe et la perte sociale liés à la congestion. Il fait aussi varier la valeur du temps selon le motif de déplacement,

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contrairement au TTI, en plus d'inclure un plus large éventail de types de route et de véhicules ainsi que des composantes supplémentaires du coût de la congestion. Sa propre méthodologie n'est cependant pas infaillible. Le BTRE souligne lui-même dans son rapport que les résultats sont très sensibles à certains paramètres. Par exemple, la perte sociale varie énormément selon l'élasticité de la demande retenue. Harrison (2012) souligne également que la mesure du coût que le BTRE retient, soit celle de la perte sociale, n'est pas appropriée non plus, puisque l'élimination de cette congestion considérée comme non optimale d'un point de vue économique nécessiterait un système de péage routier très complexe et peu réalisable en pratique. Les coûts nécessaires à la construction et l'entretien d'un tel système pourraient s'avérer trop importants pour justifier une telle intervention des pouvoirs publics et la perte sociale n'est donc pas appropriée pour estimer les coûts de congestion qui pourraient être éliminés.

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3 - Données et champ d'application

Nous utilisons des données provenant de trois sources différentes pour calculer le coût de la congestion :

1) Le Guide 2016 de l'analyse avantages-coûts des projets publics en transport routier du MTQ

2) Les résultats de l'Enquête Origine-Destination 2011 sur la mobilité des personnes dans la région de Québec

3) Les données GPS de déplacements recueillies par l'application mobile Mon Trajet dans la région de Québec en 2014

Ces données sont utilisées pour calculer les coûts de la congestion dans une zone délimitée où il est estimé que les ponts ont une influence sur la circulation.

3.1 - Champ d'application de l'étude

Le but de ce mémoire est de calculer les coûts de la congestion aux alentours des ponts Pierre-Laporte et de Québec. Il faut donc délimiter une zone où la congestion est influencée par la présence des ponts. Cette zone est désignée comme la zone d'influence des ponts (ZIP) par après et présentée à la Figure 9.

Figure 9. Zone d'influence des ponts (ZIP). La zone orangée représente la ZIP. Les lignes rouges représentent les autoroutes. Les lignes vertes représentent des routes provinciales.

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La région de Québec est divisée en 774 ZAT (zones d'analyse de transport). La ZIP se compose de 53 de ces ZAT. La délimitation de la ZIP sur la Rive Sud a été effectuée à partir d'une étude sur les conditions de circulation sur le territoire de Lévis (Grégoire, 2009) qui détaillait la congestion à l'approche des deux ponts par le sud. Sur la Rive Nord, la délimitation s'est effectuée à partir d'observations de la congestion effectuées avec l'application Google Maps sur les heures de pointe lors des jours de semaine. Deux documents parus subséquemment à la définition de la ZIP (Ville de Québec, 2016 et MTQ, 2017) sont venus confirmer que la zone délimitée sur la Rive Nord est une importante zone de congestion. Le tronçon désigné par l'étude de la CAA (2017) à Québec comme l'un des pires points d'engorgement au Canada se retrouve également à l'intérieur de la ZIP. Cependant, le document du MTQ (2017) désignait aussi la région incluant l'Université Laval comme une importante zone de congestion. Or, l'Université Laval se trouve juste à l'extérieur de la ZIP. Néanmoins, la ZIP considérée dans cette étude inclut toute la distance séparant les ponts de l'Université Laval ainsi que les principaux points de congestion à proximité des ponts. Il faut aussi se rappeler que la ZIP est une zone où les ponts ont possiblement une influence sur le niveau de congestion. L'influence des ponts sur la congestion à proximité de l'université est plus douteuse que pour les autres ZAT adjacentes au boulevard Laurier (Route 175) qui se situent entre l'université et les ponts (les ZAT 170 à 174 et 181 à 183), d'autant plus que l'Autoroute Robert-Bourassa (Autoroute 740) rejoint le boulevard Laurier à la hauteur de l'université, amenant un flux supplémentaire de véhicules provenant de la Rive Nord qui se dirigent vers l'université et dont les déplacements ne passent pas par les ponts. Nous tentons de calculer les coûts de la congestion dans la ZIP définie. Cependant, il est à noter que ce ne sont pas tous les déplacements qui passent par la ZIP qui sont pris en considération par nos calculs. Tout d'abord, les camions et les autobus sont exclus à cause du manque de données les concernant. Les voitures individuelles, taxis et motocyclettes sont les véhicules que ce mémoire prend en considération. De plus, nous ne considérons pas la congestion incidente, celle qui est causée par des événements aléatoires ou spéciaux tels les accidents, les chantiers de construction ou les conditions météorologiques. Nous nous concentrons sur la congestion récurrente, celle qui se produit lorsqu'un trop grand nombre de véhicules utilisent un réseau routier en même temps, le plus souvent aux heures de pointe.

Figure

Figure 1 : Relation vitesse-débit (VDF)
Figure 2 : Fonction BPR standard (où C=500 et
Figure 5 : Coût moyen en situation d'hypercongestion
Figure 6 : Coûts de la congestion
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