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ARTheque - STEF - ENS Cachan | La question vive de la pluralité des cultures scientifiques : quelles perspectives à l'école primaire ?

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Academic year: 2021

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LA QUESTION VIVE DE LA PLURALITÉ DES CULTURES

SCIENTIFIQUES : QUELLES PERSPECTIVES ÉDUCATIVES À

L'ÉCOLE PRIMAIRE ?

Corinne FORTIN, Nadia OUAHIOUNE

La main à la pâte

MOTS-CLÉS : CULTURES SCIENTIFIQUES – UNIVERSALITÉ – PÉDAGOGIE

RÉSUMÉ : L'atelier s'est organisé autour d'un projet La main à la pâte centré sur la production des savoirs scientifiques dans le monde arabo-musulman. À partir de la question vive de l'origine locale ou universelle de la connaissance scientifique, les participants ont recherché les modalités de travail de classe. Deux propositions ont émergé, l'une minimisant l'environnement socio-culturel dans la construction du savoir scientifique, l'autre donnant la possibilité d'un ancrage culturel à une problématique didactique.

ABSTRACT : The workshop was based on a pedagogical project from LAMAP on the production of scientific knowledge in the Arabic-Muslim World during the Middle-Age. Starting from the controversial question about a local or a universal origin of the scientific knowledge, workshop participants searched for classroom modalities of work. Two proposals came up from discussions, one minimizing socio-cultural environment of the scientific knowledge building, and the other offering the possibility of a cultural rooting to the didactic issue.

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1. INTRODUCTION

La main à la pâte a engagé, depuis 2000, trois grands projets intégrant une dimension socio-culturelle et historique de la production des savoirs scientifiques : « Sur les pas d’Ératosthène », « L’Europe des découvertes » et « Apprendre à se repérer : de la boussole au satellite ». Prochainement, un nouvel ouvrage LAMAP sera consacré aux découvertes scientifiques dans le monde arabo-musulman.

Chacun de ces projets a pour objectif de valoriser la construction du savoir scientifique en ciblant l’apport des différentes cultures : grecque, européenne, arabo-musulmane, etc. Cependant, en évoquant la pluralité des cultures scientifiques, une question se pose quant au rapport entre l’universalité du savoir scientifique et son origine socio-culturelle. Parler de science « arabo-musulmane », « européenne », etc. pour souligner un lieu géographique, une époque historique, et un contexte socio-culturel donné, est-ce un raccourci de langage pour désigner une variante géo-culturelle d’un savoir universel, ou bien cela signifie-t-il que, la production scientifique est liée à un contexte socio-culturel et historique ?

2. CADRE DE RÉFLEXION DE L'ATELIER

La question de la production « locale » de savoirs scientifiques universels a été particulièrement d'actualité durant l'année 2006. Deux expositions, l’une à l’Institut du Monde Arabe, à Paris, intitulée « L’âge d’or des sciences arabes » et l’autre, au Museum of Science and Industry de Manchester consacrée à « 1001 Inventions » issues le monde islamique, distinguent une « astronomie arabe », une « médecine arabe », une « optique arabe », etc., montrant ainsi que, ce savoir acquis en astronomie, en médecine, etc. est lié à la culture arabo-musulmane entre le IXe et le XIVe siècle. Dans Le Monde Diplomatique, daté de mai 2006, Jean Marc Lévy-Leblond interroge les conditions culturelles de la production du savoir savant et pose la question de savoir si, comme on le croit généralement, « La science est-elle universelle ? »

Ainsi se trouve réactivé, un débat déjà ancien sur les origines du savoir scientifique. D’un côté, la position internaliste selon laquelle la connaissance scientifique est le produit d’un processus intellectuel où les idées sont discutées par la communauté scientifique, jusqu’à obtention d’un consensus provisoire. De l’autre, la position externaliste valorisant les conditions sociologiques de la production des savoirs (politiques, économiques, croyances, etc.).

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Si l’école n'a pas à se prononcer dans ce débat, elle ne peut cependant faire l'économie d'une réflexion sur les choix effectués, en classe, concernant le contexte socio-culturel et historique des découvertes scientifiques, l'articulation entre diversité culturelle de la production et universalité des savoirs, ou l'intégration de la diversité culturelle des élèves.

L’atelier a donc mené une réflexion en interrogeant le référent socio-culturel et historique d’un savoir reconnu universel.

3. ORGANISATION DE L'ATELIER

Composé de 18 participants, l’atelier s'est organisé autour de deux thèmes : - la découverte au XIIIe siècle de la circulation pulmonaire par Ibn al Nafis, - l’astrolabe d’al Khwrizami au IXe siècle,

Nous avons proposé aux participants de travailler sur les relations entre pratiques scientifiques (observer, expérimenter, modéliser, théoriser, etc.), et les caractéristiques de la culture arabo-mulsulmane (économie, croyances, politique, valeurs, langue, etc.). Pour ce faire, nous avons demandé aux participants de discuter deux points précis :

- quel(s) choix d’enseignement et pour quel(s) projet(s) éducatif(s) ? - quel(s) message(s) faire passer : « quoi » et « comment » enseigner ? Les participants, selon leur choix, ont formé deux groupes :

- l’un, composé de 5 personnes sur le thème « Circulation pulmonaire », - l’autre, composé de 13 personnes sur le thème « Astrolabe ».

Une fiche-document, contenant des points repères : historiques, scientifiques, et sociologiques, etc. pour chacun des deux thèmes, a été remise aux participants, pour alimenter leur réflexion. Pour le groupe « Astrolabe », un instrument en carton, ainsi qu'une carte du ciel ont été mis à disposition. Dans un premier temps, chaque groupe a travaillé en interne. Signalons que le groupe « Circulation » connaissait déjà le principe du flux sanguin à sens unique, et s’est interrogé assez rapidement sur le lien possible entre diversité culturelle et universalité du savoir. Quant au groupe « Astrolabe », il s’est d’abord approprié le fonctionnement de l’objet, puis a engagé une réflexion sur : comment et pourquoi introduire cet objet en classe ? Dans un second temps, nous avons demandé aux deux groupes de mettre en commun leurs réflexions pour proposer des modalités de travail en classe.

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4. DISCUSSION

La discussion en interne est principalement une étape d'appropriation du thème étudié, tandis que la discussion collective a été l'occasion d'exprimer des divergences à propos de l’introduction, en classe, d’une dimension socio-culturelle du savoir scientifique.

4.1. La discussion en interne

Pour le groupe « Circulation », la discussion est d'abord centrée sur le contenu scientifique : peut-on et doit-on parler de circulation ? Ne serait-il pas plus juste de dire flux, comme pour les circuits électriques ? Ensuite, la discussion s'oriente sur la conception "en boucle" de circulation selon le schéma d'Ibn al Nafis (cœur cloisonné en deux parties étanches et boucle du trajet du sang entre cœur et poumons) en relation avec le travail d'Averroes sur les valvules (trajet du sang en sens unique) par comparaison avec la conception erronée de Galien qui supposait perméable la cloison entre les deux ventricules. Les participants ont aussi discuté de l'intérêt de l'approche historique. Faire, en classe, un historique de la circulation sanguine de l'Antiquité à la Renaissance n'apporterait, a priori, pas grand-chose aux élèves. En revanche, trouver un ancrage historique à une problématique didactique serait constructif pour montrer que chaque découverte a son histoire avec ses avancées, ses impasses et ses rectifications.

Pour le groupe « Astrolabe », les participants ne connaissant pas l'instrument ont longuement échangé, entre eux, pour comprendre son fonctionnement et son utilisation en le manipulant et en identifiant ses principaux composants (le tympan, l'alidade, l'araignée, etc.). Ils ont aussi appris à repérer les étoiles dans le ciel en fonction de la date, de l'heure et de des points cardinaux, à partir d'une carte céleste montrant le ciel visible à la latitude de Paris. Ensuite, ils ont pensé à une possible construction de l'instrument par les élèves : matériel disponible, connaissances nécessaires, coût de la réalisation, etc. Au cours de la discussion a été évoquée la nécessité pour les navigateurs de s'orienter vers La Mecque et de connaître l'heure des prières. En ce sens, les participants ont proposé que l'astrolabe soit présenté aux élèves comme l'équivalent de l'ancêtre de la montre. Puis, la discussion a tourné autour de l'intérêt pédagogique de l'astrolabe en relation avec les notions enseignées : repérage dans l'espace, notion d'angle, mesure du temps, mesure d'une hauteur, etc.

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4.2 . La discussion collective

La discussion collective a permis de cibler des différentes approches entre les participants, quelle que soit leur appartenance au groupe « Circulation » ou « Astrolabe ». Trois orientations sont à relever :

- Certains participants font valoir la primauté du factuel et privilégient ce qui est directement accessible de visu aux élèves. Par exemple, pour l'astrolabe, l’instrument peut être étudié indépendamment du contexte arabo-musulman en s'en tenant à sa description et à son fonctionnement. Cette approche n'exclut pas pour autant une référence à la culture arabo-musulmane, mais seulement à titre anecdotique, sans être reconnue comme constitutive du savoir. De même, pour la circulation pulmonaire, le retour à conception d'Ibn al Nafis comparée à celle de Galien n'est pas jugé pédagogiquement utile car difficilement vérifiable en classe. Pour autant, les participants, envisagent, là aussi, de présenter Ibn al Nafis aux élèves comme celui a qui a été à l'origine de la découverte circulation pulmonaire. Certains participants remettent en cause le schéma de la circulation sanguine proposé dans tous les manuels comme schéma référent. D’autres schémas peuvent-ils être discutés en classe, et dans quel but ? Au cours de la discussion, il apparaît que l’approche historique de la circulation sanguine à travers les conceptions de Galien, d’Averroes, d’Ibn Al Nafis ou d’Harvey n’a de sens que dans la mesure où, ces conceptions étaient des propositions explicatives (inexactes ou pas) à des problèmes « scientifiques » liés au fonctionnement de l’organisme d’ordre médical, chirurgical, nutritionnel, etc… Certains participants considèrent que ces problèmes ne sont pas accessibles à l’école primaire, et qu'ils ne peuvent être pris en considération.

- D'autres participants cherchent à mettre en avant l'ancrage socio-culturel et historique de la production du savoir scientifique. Ils proposent que la référence socio-culturelle soit un point d'ancrage pour donner sens à des activités scientifiques, n classe. Il ne s'agit donc pas de reprendre un historique, mais de construire une problématique didactique articulant problème scientifique à résoudre et apport socio-culturel pour résoudre ce problème : technologie disponible, état des connaissances sur le sujet, pratiques scientifiques de l’époque, etc.

- Un des participants affirme le caractère universel de la raison, et suggère de faire référence à l'existence d'une seule "culture humaine", même si l’environnement socio-culturel produisait une diversité de mise en œuvre des savoirs.

Il a aussi été fait mention de l'importance du texte de J. M. Levy-Leblond comme réflexion sur l'avenir de la science. Même, si celle-ci est aujourd'hui mondialisée, cette science mondiale héritée de la science occidentale, pourrait à son tour disparaître comme les sciences : grecque, chinoise,

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Face à ce constat, l'un des participants interpelle l'atelier : Mais que voulons nous valoriser de cette culture arabo-musulmane dans l’enseignement scientifique et pourquoi ? Ainsi, le débat est-il relancé sur le projet éducatif. Deux projets éducatifs se dégagent en accord avec les positions précédemment exprimées :

- l'un, centré sur l'activité de l'élève : construire un astrolabe ou travailler autour d'activités sur la nutrition ou la respiration pour illustrer le trajet du sang dans le corps. Dans ce cas, le contexte arabo-musulman n'est pas constitutif du projet éducatif, mais à la marge.

- l'autre, centré sur l'ancrage socio-culturel et historique pour construire un problème scientifique, en classe. Malheureusement aucun exemple concret n'a été proposé.

Nous avons cependant constaté qu'il n'existait pas de clivage absolu entre ces deux projets. A priori, ils ne sont pas en rupture l'un par rapport à l'autre, car certains participants oscillent entre les deux comme s'il existait une contiguïté possible. En fin d'atelier, quelques participants font remarquer l'importance qu'il y a, à ne pas imposer un enseignement scientifique à une seule entrée : historique, culturelle, conceptuelle, expérimentale, etc., mais à prendre en compte différents niveaux d'intégration du savoir.

5. CONCLUSION

À la question initiale du caractère inter-culturel des connaissances scientifiques, la discussion a fait émerger des pistes pour des modalités de travail de classe. Il apparaît que les démarches pédagogiques sont à réinventer, si l'on prend acte que l'activité scientifique est une production sociale où chaque culture construit ses propres outils conceptuels.

BIBLIOGRAPHIE/SITOGRAPHIE

LÉVY-LEBLOND J.M : La science est-elle universelle ? Le Monde diplomatique, mai 2006, p 32-33.

Sur les pas d'Ératosthène : http://www.mapemonde.org/eratos/ L'Europe des découvertes : http://www.mapemonde.org/europe/

Références

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