RENFORCEMENT DES CAPACITÉS DES FILLES EN SCIENCES
ET EN TECHNOLOGIE DU PRIMAIRE AU SECONDAIRE
AU BURKINA FASO
*Yvette SÉRÉ/DEMBÉLÉ et Fatimata SORÉ/ZONGO FESCIFA/PRESCITEF, Ouagadougou (Burkina Faso)
MOTS-CLÉS : SCIENCE – MATHÉMATIQUES – TECHNIQUE – TECHNOLOGIE – SEXO-SPÉCIFICITÉ
RÉSUMÉ : Au Burkina Faso, les différentes données statistiques révèlent le faible taux d’orientation des filles dans les séries scientifiques et les filières industrielles. D’une manière générale la réussite et le maintien des filles dans ces filières sont plus faibles que chez les garçons. Face à cette situation, la participation de toutes les couches sociales est indispensable. Des recommandations et suggestions sont faites à l’endroit de tous les acteurs du système éducatif afin de renforcer les capacités des filles en science et en technologie.
1. INTRODUCTION
À l’aube du troisième millénaire, nombre de pays africains au sud du Sahara restent marqués par de multiples maux dont les plus saillants sont : misère, maladie, guerres, famine, ignorance. Dans la tourmente de ces multiples problèmes dont le vecteur principal est la pauvreté, ces pays se trouvent en déphasage sur bien des points par rapport à ceux du nord et s'interrogent toujours sur les voies à suivre et les moyens à déployer pour la promotion d’une éducation au service du développement et d’une meilleure qualité de vie.
La question de l’éducation en Afrique se pose en des termes très préoccupants. Qu’il s’agisse de l’accessibilité, de la qualité ou de l’équité, il existe un important déficit qu’il est urgent de combler En ce qui concerne les volets scientifiques et techniques de l’éducation, il convient de remarquer que les garçons sont jusque-là fortement représentés, à cause des considérations culturelles favorables et d’un plus fort taux de scolarisation. Les filles, quant à elles, pour celles qui ont eu la chance de fréquenter les structures scolaires, se sont regroupées dans des filières dites « pour femmes » comme les filières littéraires ou commerciales pour ne citer que celles-là.
Aujourd’hui, la prise de conscience individuelle et collective de la nécessité de la participation de la femme à l’œuvre de développement nous interpelle tous.
La présente étude est réalisée à partir de l’hypothèse principale suivante : l’insuffisance des méthodes d’application et d’actions concrètes, dans la politique éducative du Burkina Faso, relatives à l’approche « genre » ne favorise pas la performance des filles en sciences et en technologie.
Afin de conduire la recherche, une méthodologie de recherche mixte a été retenue. Dans la dimension quantitative de la recherche, l’accent a été mis sur la collecte du maximum d’informations sur les résultats scolaires des filles du primaire et du secondaire. Dans sa dimension qualitative, les informations ont été recueillies auprès des encadreurs pédagogiques de science et de technologie pour confirmer ou infirmer certaines hypothèses secondaires.
2. MÉTHODOLOGIE
2.1. Population cible
Elle est composée d’élèves des années scolaires 1999 à 2003 au primaire et au secondaire, d’encadreurs pédagogiques, d’enseignants et de responsables administratifs.
2.2. Échantillons
L’étude a concerné au primaire les 100 premiers élèves au concours d’excellence de trois années (2002 à 2004), les 1002 candidats du concours de 2004 pour la représentation des filles.
Au secondaire, elle a concerné des résultats de :
• 2024 élèves candidats au BEPC dont 900 filles, ceux de 734 candidats au CAP et BEP industriels dont 135 filles ;
• 9495 élèves du second cycle de 2002 à 2004 dont 1902 filles, • 202 candidats au baccalauréat série C dont 28 filles ;
•1164 candidats au baccalauréat série D dont 281 filles,
2.3. Instruments et techniques de collecte des données
Il s’agit principalement d’une analyse documentaire, d’entretiens individuels et de questionnaires.
2.4. Collecte et traitement des données
Les données récoltées ont permis les traitements suivants :
• le traitement des données relatives aux performances des filles au primaire obtenues dans les procès-verbaux de la Direction des Examens et Concours (DEC) et dans les concours de l’excellence. Ces données concernent les résultats des années 1999, 2000, 2001, 2002, 2003, et 2004 ;
• le traitement des données relatives aux performances des filles au secondaire obtenues dans les registres de certains établissements secondaires, et dans les annuaires statistiques du Ministère ayant à charge les enseignements secondaire et supérieur. Ces données concernent les résultats des années 2000, 2001, 2002 et 2003 ;
• le traitement des données obtenues à partir des questionnaires ; • le traitement des données obtenues à partir des guides d’entretien.
Toutes ces données ont été dépouillées et traitées à l’ordinateur avec le logiciel Excel 2000.
3. RÉSULTATS
3.1. Enseignement de base (tableaux et graphiques 1 et 2)
L’observation des résultats aux concours de l’excellence au CM1 ne révèle pas de différence significative de performance sexo-spécifique. À ce niveau, aucune différence entre les disciplines
garçons à s’exprimer dans les disciplines scientifiques dès l’enseignement de base, qu’elles soient des disciplines instrumentales ou d’éveil.
Au niveau de l’enseignement technique l’augmentation régulière des candidats malgré la stabilité de la capacité d’accueil et la discrimination positive en faveur des filles les rendent plus performantes que les garçons pour l’entrée en 6e.
2002 2003 2004 2002 2003 2004
Garçons 58 % 86 % 73 % Garçons 69 % 81 % 36 %
Filles 68 % 89 % 67 % Filles 75 % 89 % 33 %
Tableau 1 : Résultats des filles en problème au concours de l’excellence au CM1
Tableau 2 : Résultats des filles en sciences au concours de l’excellence au CM1 0 20 40 60 80 100 2002 2003 2004 Années Pourcentages Garçons Filles
Graphique 1 : Résultats des filles en problème au concours de l’excellence au CM1 0 20 40 60 80 100 2002 2003 2004 Années Pourcentages Garçons Filles
Graphique 2 : Résultats des filles en sciences au concours de l’excellence au CM1
3.2. Enseignement secondaire Premier cycle :
Pour la classe de troisième, les résultats au BEPC paraissent plus pertinents car tous les élèves subissent les mêmes épreuves (graphiques 3, 4 et 5 [mathématiques, sciences physiques et SVT]). De manière générale, les garçons réussissent mieux que les filles dans ces trois disciplines. Cependant, quelques remarques importantes s’imposent : les écarts entre filles et garçons ne sont pas toujours très importants et les contre-performances ne sont pas forcément liées au genre.
Le choix de s’orienter au second cycle est assez complexe et dépend de nombreux facteurs (contenus disciplinaires peu contextués, programmes souvent chargés, faible pratique expérimentale, méthodes pédagogiques ne prenant pas en compte l’approche genre…). Mais le facteur le plus important et le plus raisonnable est celui des capacités de l’élève à suivre avec succès les études dans la branche considérée ; ces capacités se mesurent généralement par les notes obtenues par le candidat dans les disciplines dont la maîtrise est indispensable pour aborder ladite branche ou filière. C’est pourquoi, au niveau de différents acteurs de l’éducation, on oriente vers les études scientifiques l’élève qui a révélé, à travers ses performances au BEPC, ses capacités dans les disciplines scientifiques (mathématiques, sciences physiques, sciences de la vie et de la terre).
Notes de Mathématiques 0 10 20 30 40 50 [0, 7] [7, 10] [10, 12] [12 et plus]
Classe des notes
Pourcentage
Garçons Filles
Notes de Sciences Physiques
0 10 20 30 40 50 [0, 7] [7, 10] [10, 12] [12 et plus]
Classe des notes
Pourcentage Garçons Filles Notes de SVT 0 10 20 30 40 50 [0, 7] [7, 10] [10, 12] [12 et plus]
Classe des notes
Pourcentage
Garçons Filles
Graphiques 3, 4, 5 : Distribution des notes suivant
les disciplines au BEPC 2003 selon le genre
Second cycle :
Les données du Bac 2004 séries C et D comportent les pourcentages suivants : Mathématiques :
Série C : 28 % des G et 18 % des F ont 10 et plus sur 20 ; 36 % de G et 48 % des F ont moins de 07/20.
Série D : 31 % des G et 20 % des filles ont obtenu 10 et plus ; 46 % des G et 61 % des filles ont obtenu moins de 07/20.
En mathématiques, il existe un problème au niveau de l’enseignement qui tend à confiner cette discipline dans un rôle sélectif. Dans ces conditions les filles apparaissent plus défavorisées et s’orientent très peu vers cette discipline.
Sciences Physiques :
Série C : 70 % des G et 68 % des F ont 10 et plus sur 20 ; 5 % de G et 11 % des F ont moins de 07/20.
Série D : Les différences ente F et G ne sont pas accentuées. Sciences de la vie et de la Terre :
Série C : 62 % des G et 58 % des F ont 10 et plus
Série D : Les filles et les garçons ont réalisé à peu près les mêmes performances.
• elles étaient soulagées de certaines corvées domestiques par la prise en compte du genre dans la répartition des activités familiales ;
• les conditions étaient réunies pour un enseignement efficace des disciplines scientifiques (pratique d’un enseignement expérimental en PC et SVT).
Les évaluations en mathématiques apparaissent moins sélectives.
3.3. Enseignement technique (graphique 6)
D’une manière générale, les filles s’orientent très peu dans les filières industrielles. Le taux global de promotion (public-privé) est de 85,25 %, dont 82,76 % pour l’enseignement technique et professionnel public et 86,07 % pour l’enseignement technique et professionnel privé. Il est de 85,76 % pour les garçons et de 84,74 % pour les filles.
Graphique 6 : Représentation des filles au BEP 2003 par spécialité
4. CONCLUSION
L’analyse des données recueillies dans les disciplines scientifiques et technologiques révèle que la réussite et le maintien des filles dans ces filières sont légèrement plus faibles que les garçons. Il faut cependant signaler que l’écart n’est jamais très important et que pour les Sciences de la Vie et de la Terre, les Sciences physiques, les filles s’expriment beaucoup mieux qu’en mathématiques.
La présente étude constate un léger progrès dans les capacités des filles en sciences et technologie mais des insuffisances subsistent et réduisent ainsi les chances d’atteindre à court terme l’inversion de la courbe de représentation des filles au niveau du système éducatif en général et au niveau des filières scientifiques et technologiques en particulier.
Afin de renforcer leurs capacités en science et technologie, des recommandations ont été formulées. Parmi elles, on peut retenir :
• Informer et sensibiliser les parents sur l’approche Genre, • Cultiver l’équité entre les filles et les garçons,
• Cultiver chez l’enfant dès le jeune âge les fondements de l’approche Genre en vue d’éliminer les représentations négatives pour la promotion de la jeune fille,
• Généraliser la formation en Genre.
BIBLIOGRAPHIE
FESCIFA/PRESCITEF. (2000). Amélioration des performances des filles dans les disciplines scientifiques dans les établissements secondaires et universitaires du Burkina Faso.
FESCIFA/PRESCITEF (2004). Renforcement des capacités des filles en sciences et en technologie du primaire au secondaire au Burkina Faso.
