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Diffraction des rayons X appliquée au patrimoine

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Academic year: 2021

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HAL Id: hal-01908481

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Diffraction des rayons X appliquée au patrimoine

Michel Dubus

To cite this version:

Michel Dubus. Diffraction des rayons X appliquée au patrimoine. Arqueometría. Estudios analíticos

de materiales arqueológicos, Ediciones Instituto Francés de Estudios Andinos, Université Bordeaux

Montaigne, Universidad de Tarapacá, 2018, Travaux de l’Institut Français d’Études Andines,

978-612-4358-02-9. �hal-01908481�

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1

Diffraction des rayons X appliquée au patrimoine

Dubus, Michel, ingénieur, Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France, 14 quai François Mitterrand 75001 Paris, michel.dubus@culture.gouv.fr

Résumé

Au début du XXe siècle, la découverte des rayons X a permis de vérifier les théories énoncées par les minéralogistes depuis le XVIIIe siècle sur la structure atomique des cristaux. La diffraction des rayons X permet de caractériser les cristaux dans les matériaux du patrimoine comme les pigments, les opacifiants des verres, les argiles crues, les métaux. Elle donne des informations quantitatives sur l'épaisseur de couches minces, la concentration d'atomes dans une solution solide, la texture. Plusieurs configurations permettent de s'adapter aux dimensions et à la fragilité des œuvres, qu'un prélèvement soit envisageable ou non : appareils portables, diffractomètres de laboratoire, en réflexion ou en transmission.

Abstract

At the beginning of the XXth century, the discovery of the X-rays allowed to verify the theories expressed by crystallographers during the XVIIIth century. X-rays diffraction allows characterizing polycrystalline materials of the cultural heritage as pigments, opacifiers in glasses, raw clays and metals. It gives quantitative information on the thickness of thin layers, the concentration of atoms in a solid solution, the texture. Several configurations are possible depending on the size and fragility of the artefacts: portable devices, laboratory facilities, in reflection or in transmission.

Mots clés : applications, méthodes expérimentales, phases, principe, structure Keywords : applications, experimental, phases, principle, structure

"L'analyse aux rayons X, souvent, ne peut donner des résultats si elle est employée seule. C'est en liaison avec d'autres méthodes physiques ou chimiques qu'elle rend les plus grands services" (Guinier, 1956, 356).

Structure atomique des matériaux

Jusqu'au XVIIe siècle la cristallographie était limitée à l'étude géométrique des cristaux naturels observable à l'œil nu. L'invention du télescope permit à Huyguens d'énoncer en 1690 dans son Traité de la lumière "qu'en général la régularité, qui se trouve dans ces productions, vient de l'arrangement des petites particules invisibles et égales dont elles sont composées" (Huygens, 1920, 114).

En 1781, Haüy décrivit les sept systèmes cristallins (Haüy, 1809, pl. xxxiij). A chaque système cristallin correspond une base de réseau particulière, la maille de la structure cristalline qui résulte d’un tel choix pouvant être simple ou multiple. Les systèmes cristallins sont une classification des groupes de symétrie, pas une classification des différents types de métrique, la symétrie déterminant le type de métrique, mais pas l'inverse.

En 1851 Bravais dénombra 14 réseaux répartis en 7 systèmes : triclinique, monoclinique, orthorhombique, tétragonal, rhomboédrique, hexagonal, cubique (Bravais, 1866, 1-276). Les classes cristallines et les réseaux de Bravais sont résumés en 6 familles : triclinique, monoclinique, orthorhombique, tétragonal, hexagonal, cubique. En 1879, Léonard Sohncke identifia des groupes de symétrie et ouvrit la voie à Schoenflies et Fedorov qui établirent les 230 groupes d'espace à la base des idées modernes sur la structure atomique des cristaux (Schoenflies, 1891, 31 ; Fedorov, 1891, 1-146). Les 32 classes de symétrie (autour d'un axe, sur un plan, rotation-inversion par rapport à un point) sont réparties en 7 systèmes cristallins : triclinique, monoclinique, orthorhombique, tétragonal, trigonal, hexagonal, cubique. Pour plus de précisions se référer au site de l'association française de cristallographie (AFC)

http://www.afc.asso.fr/

La diffraction des rayons X par les cristaux

Les rayons X

Les rayons X furent découverts le 8 novembre 1895 par Röntgen qui utilisait les "rayons cathodiques" pour observer des radiations invisibles de hautes fréquences prévues par von Helmoltz. Il publia successivement Eine neue Art von Strahlen le 28 décembre 1895, la première radiographie le 1er janvier 1896 ; le 5 janvier 1896 sa découverte fut en première page de Die Presse, en 1901 il obtint le premier prix Nobel de physique. Les rayons X sont le support essentiel à la diffraction des rayons X pour l'analyse des matériaux.

Le premier cliché de diffraction X

En 1912 Friedrich, Knipping et Laue obtirent le premier cliché de diffraction des rayons X par un cristal (Friedrich et al. 1912, 300), confirmant la notion de réseau réciproque exprimée par Ewald (Ewald, 1913, 465) et permettant de déterminer la structure de composés cristallins à l'échelle atomique. La diffraction des rayons X est une diffusion cohérente des photons X par la matière, dépendant de la structure de la maille, des dimensions et de la forme des

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2 cristaux. La diffraction a lieu pour une longueur d'onde (énergie) donnée des rayons X (faisceau incident et faisceau diffracté).

La loi de Bragg

Dans le même temps William Henry Bragg inventait le diffractomètre constitué d'un tube à rayons X et d'un goniomètre. Son fils William Lawrence Bragg démontra qu'un cristal est le produit de convolution de la fonction réseau, responsable de la position des pics de diffraction et de la fonction motif de laquelle dépend l’intensité des pics ; il montra aussi que la différence de marche des rayonnements issus de deux plans d'atomes, distants de dhkl est égale à un nombre entier de longueur d'onde nλ (Bragg, 1912, 360). Connaissant l'angle de diffraction θ, la loi de Bragg permet de connaître cette distance dhkl :

2dhkl sin θ = nλ

λ = longueur d'onde de la source

d : espacement entre 2 plans parallèles du cristal

θ : angle de Bragg entre le faisceau incident et le réseau de plan (figure 1).

Figure 1 : "à chaque plan réticulaire du cristal correspond un cône de rayons diffractés, à la condition que sa distance réticulaire soit supérieure à λ/2, de façon que la relation de Bragg donne une valeur de sin θ plus petite que 1" (Guinier, 1956, 157).

La diffraction des rayons X et le patrimoine

Plus de 95% des matériaux du patrimoine sont constitués d'agrégats de cristaux de tailles très variables, visibles à l'œil nu, microscopiques ou même invisibles au microscope optique (métaux écrouis). Ces cristaux étant orientés de façon aléatoire, on parle de "diffraction de poudres".

Pour identifier ces matériaux, il faut connaître leur composition chimique : la fluorescence X est un moyen rapide et bon marché mais, en configuration non destructive, ne permet pas d'accéder aux éléments légers (Li, B, C ; N ; etc.…). Dans la plupart des cas, la diffraction X permet d'identifier ces composés dont chaque phase cristalline est associée à un diagramme qu'il est possible d'interpréter à l'aide d’une base de donnée de références, constituée à partir de 1936 par Hanawalt (Dow Chemical Company), de 1941 à 1968 par l'American Society for Testing and Material (ASTM) et depuis 1969 par le Joint Commitee on Powder Diffraction Standards (JCPDS)

http://www.afc.asso.fr/documentation/bases-de-donnees Le générateur

Un diffractomètre est constitué d'un générateur de rayons X, d'un porte objet, d'un détecteur, le tout agencé de façon à satisfaire la loi de Bragg et obtenir un signal satisfaisant en un temps raisonnable. Le tube à rayons X comprend une source d'électrons (cathode) et une cible ou anode entre lesquelles une tension (25-50 kV) est appliquée pour accélérer les électrons. Le spectre X est constitué d'un bruit de fond dû au rayonnement de freinage et des raies d'émissions caractéristiques (K, L, M) très intenses avec des énergies qui dépendent de la nature de l'anode : chrome K-α (E=5,4 keV ou λ = 0,23 nm), molybdène K-α (E=17,5 keV ou λ = 0,07 nm), cuivre K-α

(E=8,05 keV ou λ = 0,154 nm), cobalt K-α (E=6,93 keV ou λ = 0,18 nm) (Broll, 1996, 4). Ce phénomène de fluorescence est utilisé pour l'analyse élémentaire par fluorescence des rayons X (X-ray fluorescence, XRF) ; en diffraction cette fluorescence crée un bruit de fond important et dégrade le rapport signal / bruit. C'est la raison pour laquelle, pour étudier des pigments riches en fer on préfèrera un tube à anode de cobalt à un tube de cuivre pour étudier des composés du manganèse. Des miroirs (figure 1) permettent d'obtenir un faisceau parallèle, monochromatique (une seule longueur d'onde λ), très brillant, de quelques dizaines de µm de diamètre, de supprimer le rayonnement de freinage et de limiter l'influence de la rugosité (Schuster et Göbel, 1995, 270), pour étudier des micro prélèvements ou des détails sur de gros objets.

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3 L'échantillon

La géométrie Bragg-Brentano permet d'obtenir des raies de diffraction très fines et intenses. L'angle du faisceau incident varie, le détecteur est mobile, le faisceau diffracté divergent converge sur un point du cercle de focalisation où se fait la détection. La surface irradiée dépend de la taille du faisceau et de l'angle d'incidence. L'échantillon plan effectue une rotation uniforme de vitesse angulaire θ, le détecteur placé sur le cercle de focalisation tourne autour de l'échantillon avec une vitesse 2 θ (figure 2).

Figure 2 : trajet du faisceau en géométrie Bragg-Brentano. α angle d'ouverture, θ angle incident, 2θ angle de diffraction, © Siemens.

Pour que les rayons X soient diffractés, il faut qu'ils soient de basse énergie donc de longueurs d'ondes λ supérieures à 2 fois les distances inter réticulaires à identifier. En principe on préfère éviter ou limiter les prélèvements et analyser directement les œuvres sans aucun contact. Plusieurs configurations peuvent être utilisées selon que l'œuvre ne peut pas se déplacer (trop grande ou trop fragile), qu'aucun prélèvement n'est possible (respect de l'intégrité de l'œuvre), qu'un tout petit prélèvement peut être effectué ou que l'échantillon peut être préparé et broyé.

La limite de détection est de quelques % selon l'échantillon : les cristaux de très haut degré de symétrie comme les structures cubiques produisent un petit nombre de pics. On mesure une série d'angles 2 θ correspondant aux diffractions par les différents plans. Un mélange de cristaux de faible symétrie produira de nombreux pics de diffraction à des angles très proches les uns des autres, difficiles à indexer, donc la limite de détection (de l'ordre du pour cent) sera plus haute (Castaing et al. 2009, 5).

In situ

Pour les œuvres qui ne peuvent pas se déplacer, un système portable de fluorescence et de diffraction X a été développé dans le cadre du programme européen Access, Research and Technology for the conservation of the European Cultural Heritage (Eu-ARTECH), 2004 – 2009 (Gianoncelliet al., 2008, 418). L'appareil est constitué de composants fixés sur un châssis en carbone, l'ensemble est approché du mur, de la statue ou de la peinture. Le choix de la longueur d'onde se limite à un tube à anode de cuivre (Kα, λ= 0,154 nm) car avec un angle d'incidence α de 10° il est possible d'obtenir un signal diffracté pour 2 θ plus grand que 15° et jusqu'à 60° ce qui, selon la loi de Bragg, correspond respectivement à des distances inter réticulaires d = 0,6 et 0,15 nm. Le tube d'une puissance de 30 W est refroidi par air ; un filtre de 20 µm de nickel filtre la raie kβ du cuivre ; le faisceau d'un diamètre de 4 mm et de divergence 0,25° (4,36 mrad) est obtenu avec une optique poly capillaire. Le détecteur EDS pour l'analyse élémentaire par fluorescence des rayons X est perpendiculaire au plan analysé ; l'écran à fluorescence photo stimulée (appelé aussi "plaque d'image", de l'anglais imaging plate, IP) est fixé à 35 cm de la source, perpendiculairement au faisceau incident et peut être translaté (figure 3). Dans cette configuration, les anneaux diffractés sous un angle 2θ < 60° sont des cercles concentriques (Guinier, 1956, 159). Après une exposition de 5 à 30 minutes, l'image est numérisée avec un scanner.

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4 a

b

Figure 3 : a) schéma de l'appareil portable © B. Moignard. EDS : détecteur dispersif en énergie refroidit par effet Peltier. F : faisceau incident formant un angle de 10° par rapport à la surface de l'objet. IP : écran à fluorescence photo stimulée du commerce pour les radiographies panoramiques dentaires. L : laser. O : objet analysé. T :

tube. b) analyse d'un pastel du musée des beaux-arts de Bordeaux. Le point rouge du laser L matérialise l'emplacement analysé (Birot et al. 2013, 52).

L'absorption dans 20 cm d'air pour un rayonnement Cu Kα (8,05 keV) est de l'ordre de 20%, ce qui est assez faible pour rester acceptable. En termes de sécurité, dans 3 m d'air la transmission du même faisceau étant de l'ordre de 3%, il n’y a aucun risque d’irradiation au-delà de 3 mètres (Castaing et al. 2009, 12).

Sur objet

Sur un objet de petites dimensions dans un appareil commercial (figure 4), le tube et le détecteur peuvent être fixes ou mobiles, l'objet est fixe. La surface analysée est au centre du cercle de focalisation, le faisceau diffracté n'est pas focalisé. La position de l'objet dans le faisceau influence la précision sur les distances inter réticulaires et par conséquent sur la position des pics, ce qui impose de maîtriser la géométrie du système de mesures et d'étalonner l'appareil avec des matériaux connus (alumine, quartzite…).

Figure 4 : étude avec un diffractomètre de laboratoire de la tête en verre égyptienne du musée du Louvre (inv. E11658). Un verre est théoriquement amorphe mais peut cependant contenir des minéraux qui n'ont pas été complètement transformés par la cuisson, des opacifiants, des phases néoformées qui diffractent. A : tube équipé d'un miroir. B : objet dont la surface est placée au centre du cercle de focalisation. C : détecteur mobile Si-PIN équipé de fentes de Soller de 230 mm. © M. Dubus.

Pour étudier des couches superficielles de très faible épaisseur on fixe l'angle d’incidence α (alpha) entre 2 et 10°. Le détecteur se déplace en fonction du domaine angulaire des composés recherchés, le faisceau diffracté n'est pas focalisé. La profondeur explorée augmente avec l'angle d'incidence :

avec i

A

i i

A

i

x

µ

µ

3

,

2

)

1

,

0

ln(

=

=

)

2

sin(

1

sin

1

α

θ

α

+

=

i i

A

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5 µi : coefficient d’atténuation linéaire des rayons X (en cm-1)

Cette méthode permet de mettre en évidence des composés invisibles en mode classique (θ/2θ) car présents sur une trop faible épaisseur, comme dans l'exemple de lustres archéologiques à base d'argent métallique (cubique à faces centrées, paramètre de maille a=0,40740nm) dont la raie la plus intense (d111=0,23600nm) est différenciée en interférence avec celle de la cassitérite (d200=0,23690nm), ce qui oblige à vérifier la présence de la raie 200 (d200 = 0,20300) ( figure 5).

Figure 5 : diffractogramme d'une céramique lustrée. C cassitérite, opacifiant de la glaçure. Ag argent métallique (Hélary et al. 2003, 115).

Sur prélèvement broyé

La configuration la plus utilisée en laboratoire consiste à préparer l'échantillon sous forme de poudre broyée. En théorie la taille des cristallites devrait être comprise entre 0,3 et 1 µm pour obtenir un signal avec une limite de détection de l'ordre du pour cent ; dans la pratique des grains de 5 à 10 µm donnent de très bons résultats. Le broyage peut créer des contraintes, des changements polymorphiques, des défauts, décomposer certains composés, provoquer des réactions solide/solide et contaminer l'échantillon. On peut ajouter un étalon interne pour vérifier la position et l'intensité des pics (figure 6).

Figure 6 : verre opacifié à l'arséniate de sodium (lignes bleues) broyé avec un étalon interne de quartz (SiO2, lignes rouges) (Lehuédé et al. 2016, 4).

α

=0,5°

α

=2°

α

=10°

α

=5°

2Theta

C

C

C

Ag

Ag

46

42

38

40

44

36

Cassitérite C

Argent Ag

(7)

6

Sur micro prélèvement

Si le prélèvement est plus petit que le faisceau, celui-ci irradie aussi le porte objet qui va diffracter ; dans ce cas on utilise un porte-objet en silicium monocristallin qui ne parasite pas le signal émis par l'échantillon (le verre ou le plastique produisent un halo). Lorsque l'échantillon est très absorbant et/ou le volume diffractant limité (la quantité de matière ne devant pas être inférieure à 0,1 mm3), le prélèvement est placé dans un capillaire en quartz (diamètre compris entre 0,3 et 0,5 mm) ou sur une tige en verre et analysé en transmission. Les coefficients d’absorption linéaire et massique déterminent l'intensité du signal et la position des pics. La rotation de la tige ou du capillaire permet d'accroître le volume irradié et de moyenner l'orientation des cristallites, ce qui améliore la statistique (figure 7).

Figure 7 : A faisceau incident. B : échantillon dans capillaire de quartz. C : puits. D : écran à fluorescence photostimulée. © M. Dubus.

Dans une chambre de Debye-Scherrer le porte échantillon positionné au centre est irradié par une source monochromatique focalisée par un collimateur. Un film ou écran à fluorescence photo stimulée placé sur les parois de la chambre enregistre les cônes de diffraction qui forment des anneaux elliptiques sur le cliché. Le faisceau primaire est recueilli dans un puits pour limiter la diffusion des rayons X par l’air qui crée un voile par rayonnement parasite. Les cônes des rayons diffractés coupent le film suivant une série de courbes. Par convention la circonférence de la chambre égale 180 ou 360 millimètres pour convertir facilement en une valeur d’angle de diffraction la mesure des distances entre les anneaux et le centre du film (figure 7).

a b

Figure 7 : a) chambre de Debye-Scherrer (A : faisceau incident. B échantillon. C : puits. D emplacement du film ou de la plaque d'image) b) les anneaux de diffraction d’une poudre de LaB6 conduisent aux distances dhkl. © M.

Dubus. Le détecteur

Différents compteurs de rayons X ont été développés : ponctuels (scintillateurs, à gaz, semi-conducteurs), multidimensionnels (à gaz linéaires ou courbes, semi-conducteurs), bidimensionnels (écran à fluorescence photo stimulée, proportionnels à gaz). Un détecteur doit posséder une efficacité quantique élevée, une bonne linéarité, une résolution suffisante. L'efficacité (rapport du nombre de particules détectées au nombre de particules reçues par le détecteur) dépend de la nature et de l'énergie du rayonnement. Pour les détecteurs électroniques, le temps mort est le plus petit intervalle de temps entre deux informations pour que chacune d'entre elles soit prise en compte par le système. Le mouvement propre est le taux de comptage enregistré en absence de toute source de rayonnement. Les caractéristiques géométriques définissent la forme du détecteur, l'importance de sa surface sensible et sa directivité.

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7 La résolution des scintillateurs est comprise entre 35% pour MoKα 45% pour CuKα 60% pour CrKα. Les diodes de silicium dopées au lithium Si(Li) ont une excellente linéarité, un temps de réponse de l’ordre de la nanoseconde, supportent jusqu’à 50 000 coups par seconde avec une réponse linéaire sur toute l’échelle de comptage. Entre 5 et 20 KeV, le rendement quantique est proche de 100% mais plus limité aux faibles énergies par les fenêtres en béryllium et aux énergies élevées par l’épaisseur du détecteur. La résolution est comprise entre 1,5% pour le MoKα 3% pour le CrKα ; cela correspond à 350 eV pour le CuKαce qui suffit à séparer les raies Kα et Kβ du cuivre. Le rapport signal sur bruit est 10 fois meilleur qu'un scintillateur. Les écrans à fluorescence photo stimulée flexibles imprégnées de cristaux phosphorescents et photo stimulables ont une résolution spatiale inférieure à 200 µm. Elles permettent de visualiser la taille et la morphologie des grains et d'éventuelles orientations préférentielles (Broll, 2001, 82).

Interprétation

Absorption des rayons X par la matière

La quantité de matière analysée dépend de l’absorption des rayons X. Cette absorption dépend de l’énergie des rayons X (un rayonnement de grande énergie, c'est-à-dire de courte longueur d'onde, est moins absorbé et donc plus pénétrant qu'un rayonnement de plus faible énergie) et de la nature des atomes : l'épaisseur analysée augmente progressivement des éléments les plus légers vers les plus lourds. Pour un tube à anode de cuivre (K-α, λ = 0,154 nm; E = 8,05 keV), la longueur d’atténuation est de 80 µm dans la silice (constituant principal des terres, des poteries, des verres) et de 5 µm dans le carbonate de plomb, pigment blanc des peintures (tableau 1). La longueur d'atténuation correspond à une diminution de l'intensité des rayons X de l'inverse de la constante e (1/e = 1/2,718).

Anode Energie raie K-α λ nm raie K θ pour d = 1 nm θ pour d = 0.2 nm θ pour d = 0.1nm Épaisseur

Cr 5,4 keV 0,229 7° 35° No diffr 21 µm

Co 6,93 keV 0,178 5° 26° 63° 44 µm

Cu 8,05 keV 0,154 4° 23° 50° 69 µm

Mo 17,5 keV 0,071 2° 10° 21° 106 µm

W 59,3 keV 0,021 0.6° 3° 6° 3200 µm

Tableau 1 : caractéristiques des rayons X et angles de diffraction θ correspondants pour différentes anodes et pour les distances inter-réticulaires d. La colonne de droite correspond à l'absorption dans un matériau riche en Pb (densité 3,7 g/cm3) exprimée sous la forme d'épaisseur transmettant 1% de l’intensité incidente (Castaing et al. 2009, 4).

Les matériaux du patrimoine étant souvent hétérogènes, il est difficile d'estimer l'épaisseur analysée, surtout si l'objet est verni : à 8 keV (Cu Kα), 90% du rayonnement est transmis dans le poly méthyle méthacrylate (PMMA équivalent d'un vernis acrylique) de 20 µm d'épaisseur. Les peintures sont des mélanges de matériaux organiques et inorganiques en volume équivalent ; par conséquent, toutes les interprétations sur l'épaisseur de ces couches doivent être doublées pour des énergies supérieures à 3 - 4 keV, ce qui correspond à des conditions d'absorption négligeables.

Volume de matière analysé

L'absence de contact avec l'œuvre est la principale contrainte pour l'analyse in situ en réflexion. Il faut connaître la pénétration des rayons X pour déterminer la fraction de volume qui contribue au diagramme de diffraction. Pour Cu-Kα, il y a un facteur 3 entre les éléments légers (Si, Al) et les éléments lourds (Sn, Hg, Pb). Avec un angle d'incidence α de 10° (cas de l'appareil portable) sin α = 1/6, le volume diffractant est de 15 µm pour SiO2 (figure 9a) et 0,3 µm pour un composé riche en Pb (figure 9b).

(9)

8 Figure 9 : atténuation des rayons X traduite en épaisseur analysée sous 10° d'incidence a) dans la silice, b) dans le carbonate de plomb. Le rayonnement Cu kα est à 8000 eV http://henke.lbl.gov/optical_constants/

Autrement dit, pour des rayons X d'énergie comprise entre 2 keV et 30 keV, la transmission dans 20 µm silice est de 85%, pour 2% dans 20 µm de carbonate de plomb (figure 10).

Figure 10 : transmission des rayons X d'énergie comprise entre 2 keV et 30000 keV a) dans 20 µm de silice (SiO2) b) dans 20 µm de carbonate de plomb (PbCO3) http://henke.lbl.gov/optical_constants/

Taille des cristallites

Lorsque le volume d’un cristal diffractant est très petit les raies de diffraction s’élargissent de manière perceptible. Si on néglige les effets de contraintes dans le matériau cet élargissement peut être mis à profit pour déterminer la taille de cristallites compris entre 10 et 100nm, via la formule de Scherrer (Guinier, 1956, 462) (exemple figure 11) :

avec

L la taille apparente des cristallites

K une constante comprise entre 0,9 et 1,4 et fonction de la forme des cristallites (dans le cas d’un réseau cubique à faces centrées K=0,94)

β la largeur de la raie à mi-hauteur (FWHM, en radians) β0 la largeur de la raie à mi-hauteur du standard (en radians)

θ l’angle de Bragg 2 0 2

cos

θ

β

β

λ

=

K

L

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9 λ la longueur d’onde des rayons X (en nm)

Figure 11 : la taille apparente des cristallites dans une céramique lustrée contemporaine est de 12 à 13 nm en fonction de l'angle d'incidence alpha α du faisceau (Darque et al. 2005, 352).

Un faisceau bien parallèle limite la contribution instrumentale (Broll, 1996, 11). Solutions solides

"L'introduction des atomes dissous dans un corps pur ne modifie pas la nature du réseau mais en change le paramètre, si le volume des deux atomes est différent. La loi de Végard permet de connaître la concentration d'atomes dans une solution solide, ce paramètre étant une fonction linéaire de la concentration" (Guinier, 1956, 372, figure 12). Sur cette figure les pics de Cu2O sont décalés par rapport à leur position théorique en raison de la sous-stœchiométrie Cu2-xO.

Figure 12 : patine noire contenant sulfure de cuivre, sulfures mixtes de cuivre et d’argent, oxyde de cuivre et un alliage biphasé constitué d'une solution de cuivre dans l’argent et d'une solution solide d’argent dans le cuivre

très proche de l’eutectique (Robcis et al. 2015, 67). Orientations préférentielles

Sur des matériaux anisotropiques comme les argiles, les micas, les métaux, des effets de texture cristallographique modifient l'intensité des pics de diffraction, on parle d'orientations préférentielles. Il suffit par exemple de presser légèrement une poudre pour que des cristaux plats s'orientent parallèlement à la surface et modifient les intensités relatives du diagramme. Cette propriété est utilisée pour différencier des familles d'argiles (Holtzapfel, 1985, 22, figure 13).

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10 Figure 13 : diffractogrammes de la roche totale (en noir) et de la fraction inférieure à 2 µm orientée (en vert) d'une

terre à poterie. Dans la roche totale le pic 10-1 du quartz masque le pic 003 d'illite (I, en rouge) qui est mis en évidence dans la fraction argileuse inférieure à 2 µm orientée sur une lame de verre rainurée, malgré la kaolinite

majoritaire (K, en vert). © M. Dubus.

Conclusions

Fluorescence et diffraction des rayons X sont des méthodes non destructives complémentaires indispensables pour identifier de façon certaine les phases constitutives des collections patrimoniales.

La diffraction X permet de détecter des matériaux composés d'éléments légers indétectables par fluorescence X. L'anode doit être choisie en fonction de la composition élémentaire des échantillons, la fluorescence secondaire du matériau créant un bruit de fond très important et dégradant le rapport signal sur bruit.

Plusieurs configurations expérimentales peuvent être utilisées : in situ, sur objet, sur micro-prélèvement, sur prélèvement non préparé, ou broyé.

La qualité des mesures dépend de l'appareil, de la composition et de la géométrie de l'échantillon et du volume analysé.

Les diagrammes sont facilement interprétables avec un petit nombre de pics, plus difficilement quand les phases sont nombreuses et que les pics ont tendance à se superposer.

La diffraction des rayons X permet d'obtenir des informations quantitatives sur la taille des domaines cohérents de diffraction, la concentration atomique d'une solution solide, l'épaisseur de couches minces et des informations qualitatives sur la présence d’une texture cristallographique.

Références

Birot et al. 2013 : Castaing J., Dubus M. Guicharnaud H., Rozé V., Zea R., Dégradations, altérations, conservation des pastels : exemple de la collection du musée des Beaux-arts de Bordeaux, Support-tracé n°13, 2013, 52-60. Bragg, 1912 : Bragg W. H., X-Rays and Crystals, Nature, 90, 28 November 1912, 360-361.

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Remerciements

Figure

Figure  1  :  &#34;à  chaque  plan  réticulaire  du  cristal  correspond  un  cône  de  rayons  diffractés,  à  la  condition  que  sa  distance réticulaire soit supérieure à  λ /2, de façon que la relation de Bragg donne une valeur de sin  θ  plus petite
Figure 2 : trajet du faisceau en géométrie Bragg-Brentano. α angle d'ouverture,  θ  angle incident, 2 θ  angle de  diffraction, © Siemens
Figure  4  : étude  avec  un  diffractomètre  de  laboratoire de  la  tête  en  verre  égyptienne  du  musée du  Louvre  (inv
Figure 5 : diffractogramme d'une céramique lustrée. C cassitérite, opacifiant de la glaçure
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Références

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