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Quelle Famille? L'homoparentalité à l'épreuve de l'approche systémique

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Academic year: 2021

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EDITORIAL

Quelle Famille ? L'homoparentalité à l'épreuve de l'approche systémique

Salvatore D?Amore

Médecine & Hygiène | Thérapie Familiale

2012/2 - Vol. 33 pages 85 à 88

ISSN 0250-4952

Article disponible en ligne à l'adresse:

---http://www.cairn.info/revue-therapie-familiale-2012-2-page-85.htm

---Pour citer cet article :

---D?Amore Salvatore, « Editorial » Quelle Famille ? L'homoparentalité à l'épreuve de l'approche systémique, Thérapie Familiale, 2012/2 Vol. 33, p. 85-88. DOI : 10.3917/tf.122.0085

---Distribution électronique Cairn.info pour Médecine & Hygiène. © Médecine & Hygiène. Tous droits réservés pour tous pays.

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Editorial

Quelle Famille ?

L’homoparentalité à l’épreuve

de l’approche systémique

Thérapie familiale,Genève, 2012, 33, 2, 85-88

La famille contemporaine connaît jour après jour d’incessantes mutations et un accroissement de sa diversité – tant au niveau de sa composition, de la culture, que de l’orientation sexuelle de ses membres.

Les assemblages kaléidoscopiques entre ces trois grandes dimensions contri-buent à la genèse d’une multiplicité de constellations affectives (Caillé, 2010) que nous appelons aussi nouvelles familles. Ces variations sur le thème imposent au chercheur tout comme au clinicien la nécessité de déconstruire certaines idées, idéaux et idéalisations du couple et de la famille au profit d’une progressive reconnaissance des différentes possibilités et potentialités des nouveaux liens affectifs et de filiation.

Dans ce contexte, les familles homoparentales représentent un laboratoire pour repenser l’identité du « familial » (Scabini, Cigoli, 2000) et les changements multiples que toute famille, traditionnelle incluse, est en train d’expérimenter.

D’ailleurs, les couples et les familles avec parents LGBT (lesbiens, gays, bisexuels et transgenres) deviennent de plus en plus visibles et demandeurs de reconnais-sance, non seulement juridique mais aussi psychologique, sociale, culturelle, civile et morale.

Dans l’histoire des sciences humaines, les minorités de genre et d’orientation sexuelle n’ont jamais été prises en considération dans la définition de famille et de relations familiales.

Ce manque trouve ses racines dans l’hétérosexisme (qui présuppose la supé-riorité de l’hétérosexualité sur les autres orientations sexuelles) et l’hétéronor-mativité (qui présuppose la supériorité du modèle hétérosexuel sur les autres) qui ont eu et continuent à avoir un impact majeur sur la vie des personnes les-biennes, gays, transsexuelles et bisexuelles et de leurs familles (Giammattei, Green, 2012).

Salvatore D’Amore PhD, Chargé de Cours, Psychothérapeute de Couple et Famille, Service de Clinique Systémique et Psychopathologie Relationnelle,

Faculté de Psychologie et des Sciences de l’Education, Université de Liège, Belgique

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De plus, la recherche et la thérapie avec la famille ont contribué à perpétuer ce manque en proposant le modèle du couple et de la famille hétérosexuelle comme le modèle de référence pour garantir la santé, la normalité et la fonctionnalité des relations familiales. En particulier, le couple homosexuel et la famille avec parents LGBT ont été abordés essentiellement à travers la loupe hétérosexiste, qui privilégie la conformité de genre et des rôles traditionnels. Et en conséquence, la famille homoparentale a été perçue comme « déviante » par rapport à la norme

plutôt que simplement différente1 dans un continuum de manières multiples d’être

et de faire couple et famille.

Invité par Robert-Jay Green auprès du Rockway Institute de l’Alliant Univer-sity à San Francisco j’ai pu, dans le cadre d’une mission scientifique de six mois, aborder certaines questions relatives à la recherche et à la clinique systémique concernant l’homoparentalité. Robert-Jay Green est professeur, il est l’un des plus importants experts dans le domaine au niveau international. Psychothéra-peute de couple et de famille, formé par les pionniers californiens, il a su conju-guer de façon admirable l’approche systémique avec la recherche et la clinique des familles LGBT. Le Rockway Institute, dont le Pr Green est le directeur, est le premier centre national pour la recherche, l’enseignement et les politiques sociales touchant aux personnes, aux couples et aux familles LGBT. S’appuyant sur l’expertise de chercheurs, cliniciens et juristes, l’Institut Rockway a pour mission d’informer scientifiquement tout type de public sur les questions rela-tives aux mino rités LGBT.

Sur la base des nombreux entretiens avec Robert-Jay Green et ses collabora-teurs, ainsi qu’en participant aux différents séminaires de recherche et de clinique avec les familles LGBT, j’ai pu prendre conscience de l’ampleur et de la complexité des questions qui concernent ce domaine.

De nombreuses études montrent, désormais, que les familles homoparentales sont des contextes de développement tout à fait adéquats et qui répondent aux besoins évolutifs de leurs enfants (pour une revue approfondie de la littérature voir Goldberg, 2010).

Il reste néanmoins toute une série de grandes questions qui doivent être prises en considération, comme par exemple les effets de la discrimination, de l’homo-phobie sociale et intériorisée, de l’ambiguïté relationnelle (liée au manque de reconnaissance légale et à l’absence de modèles sociaux et culturels) ainsi que du faible support social que les enfants et leur famille peuvent expérimenter (Green, 2012). Par ailleurs, les parents transgenres et leurs enfants doivent éga-lement faire face à la transphobie qui affecte leur vécu quotidien et qui risque de les marginaliser davantage car, à l’inverse des homoparents, ils sont moins reconnus comme sujets de droits civils et parentaux.

La rencontre significative avec de nombreux parents et enfants au sein de l’association Our Family Coalition m’a permis de partager leurs défis mais aussi les multiples ressources qu’ils sont capables d’activer à travers les réseaux affectifs et amicaux – dits aussi « familles de choix ». Des créations familiales qui viennent supporter et enrichir la qualité de vie et qui constituent de véritables

1 Pour une revue de la littérature voir Giammattei and Green (2012).

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tuteurs de résilience face aux épreuves que certains contextes hostiles peuvent proposer.

La gestion du stress à l’interface des multiples systèmes d’appartenance reste un défi constant tant pour les parents que pour les enfants.

Les modalités affectives, créatrices et novatrices dont ces familles font preuve – et qui peuvent nous surprendre – nous invitent à reconnaître leurs compétences et à changer d’optique.

Nonobstant leur dépathologisation ainsi que leur normalisation, l’homosexua-lité et l’homoparental’homosexua-lité, demeurent toujours actuellement absentes dans la for-mation du futur thérapeute – surtout en Europe.

En effet, la rencontre avec ces familles nous demande de prendre en considé-ration les différentes trajectoires dont elles sont protagonistes. Des trajectoires liées aux différentes modalités de filiation (insémination alternative, adoption, ges-tation par autrui) ainsi que de leur composition (coparentalité et recomposition). Les différentes transitions à la parentalité que chaque trajectoire comporte, soulèvent une série de questions qui peuvent faire l’objet d’une demande de thé-rapie (par exemple la gestion du coming out avec les enfants, la relation avec les familles d’origine, les éventuels conflits avec l’ex-époux/se s’il y a eu une précé-dente union hétérosexuelle, les craintes du parent non biologique de perdre les droits parentaux en cas de divorce, la maladie ou la mort du parent biologique, la gestion de l’accès aux origines chez l’enfant conçu par insémination alternative ou par mère porteuse, etc.)

Dans le travail clinique avec ces nouvelles familles, le thérapeute se doit de réfléchir à certaines questions essentielles – et qui pourtant sont encore peu explo-rées dans les programmes de formations – telles que l’effet de son identité de genre, de ses propres modèles familiaux, sociaux et culturels, ainsi qu’à son hétérocentrisme.

Il est sans doute important que le clinicien puisse avoir une certaine conscience de l’hétéronormativité inhérente aux modèles cliniques qu’il adopte. Certains modèles comme ceux post-modernes et féministes permettent de dépasser ce risque dans la mesure où ils abordent les systèmes humains dans une perspec-tive sociopolitique. Néanmoins, il ne s’agit pas ici de privilégier un modèle plutôt qu’un autre, mais de voir comment chaque modèle (qu’il soit structural, straté-gique, intergénérationnel, cognitiviste) peut s’adapter et tenir compte des spé-cificités familiales.

Nous sommes appelés en tant que chercheurs et thérapeutes à relever les défis que les familles homoparentales – comme toute nouvelle famille – nous proposent, ainsi qu’à développer une posture qui soit laïque et respectueuse des différences. La diversité est une valeur que nous devons pouvoir reconnaître et promouvoir dans nos pratiques. C’est avec ce souhait que je salue l’organisation de la journée consacrée à la recherche systémique que la revue Thérapie familiale organisera le 17 novembre 2012 à Bruxelles (Louvain-en-Woluwe), avec l’espoir que de nouvelles perspectives plurielles et inclusives dans la recherche et la psy-chothérapie avec la famille puissent être envisagées.

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1. Caillé P., 2010. Vous avez dit famille… Famille traditionnelle ou constellation affective ? In D’Amore S. (ed.) : Les nouvelles familles. Approches cliniques. De Boeck, Bruxelles. 2. Scabini E., Cigoli V., 2010. Il famigliare. Legami, simboli e transizioni. Raffaello Cortina,

Milano.

3. Giammattei S., Green R-J., 2012. GLBTQ couple and family therapy : History and future directions. In J.J. Bigner & J.L. Wetchler (Eds.), Handbook of LGBT-affirmative couple and

family therapy. Taylor & Francis, New York.

4. Goldberg A.E., 2010. Lesbian and gay parents and their children : Research on the family life

cycle. APA Books, Washington, DC.

5. Green R.-J., 2012. Gay and lesbian family life : Risk, resilience, and rising expectations. In F. Walsh (Ed.), Normal Family Processes, 4th Edition (pp. 172-195). Guilford, New York .

Bibliographie

Références

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