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FXR: un récepteur aux acides biliaires comme cible pour le traitement du cancer de la prostate - Étude des effets de FXR en lignées cellulaires

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FXR : un récepteur aux acides biliaires comme cible

pour le traitement du cancer de la prostate - Étude des

effets de FXR en lignées cellulaires

Mémoire

Louis Gauthier-Landry

Maîtrise en sciences pharmaceutiques

Maître ès sciences (M. Sc.)

Québec, Canada

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Résumé

FXR est un récepteur nucléaire qui s’est démontré avoir des effets ambivalents dans le contexte de différents cancers. Son effet dans le cancer de la prostate (PCa) est peu documenté. Nous avons observé une répression des enzymes UGT2B15 et 2B17, les enzymes d’élimination des hormones androgènes; ces dernières ont un rôle prépondérant dans la croissance du PCa, suggérant que l’activation de FXR pourrait avoir un effet pro-prolifératif dans le PCa. Ce projet vise à évaluer le potentiel de trois agonistes (6-ECDCA, CDCA, GW4064) dans des lignées de PCa dépendantes (LNCaP, LAPC-4) et androgéno-indépendantes (DU-145, VCaP et LN95). À l’opposé des résultats attendus, un effet antiprolifératif fut observé caractérisé par un arrêt du cycle cellulaire et une induction de l’apoptose. Une inhibition transcriptionelle du récepteur aux androgènes fut obtenue, exposant un avantage de FXR sur les traitements actuels du PCa. Les résultats recueillis ici proposent FXR comme nouvelle cible thérapeutique pour le PCa.

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Abstract

FXR is a nuclear receptor that exerts ambivalent effects in multiple cancers. FXR signaling in prostate cancer (PCa) is not yet defined, but recent observations indicate that its activation represses two major androgen-metabolizing enzymes, namely UGT2B15 and 2B17. Based on this observation, we proposed that FXR acts as a pro-carcinogenic agent that may promote the development of androgen-dependent PCa tumors. The aim of this project is to evaluate the potential of three FXR agonist’s (6-ECDCA, CDCA, GW4064) in androgen-dependent (LNCaP, LAPC-4) and androgen-inandrogen-dependent (DU-145, VCaP, LN95) PCa cell lines. Unexpectedly, anti-proliferative effects were observed, characterized by a cell cycle blockade and an induction of apotosis. Furthermore, a negative transcriptional regulation of the androgen receptor was observed, exposing an advantage of FXR over the actual PCa treatment. Results collected here propose FXR as a new target to medicate PCa.

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Table des matières

Résumé ... III Abstract ... V Table des matières ... VII Liste des tableaux ... IX Liste des figures ... XI Liste des abréviations et des sigles ... XIII Remerciements ... XV Avant-propos ... XVII

1-Introduction ... 1

1.1 La prostate : Développement, anatomie et fonctions ... 1

1.1.1 Le rôle des hormones androgènes dans la prostate ... 4

1.2 Les hormones androgènes ... 4

1.2.1 La synthèse des hormones androgènes ... 5

1.2.2 Le métabolisme des androgènes... 8

1.3 Le cancer de la prostate ... 11

1.3.1 Carcinogénèse de la prostate ... 11

1.3.2 Épidémiologie et facteurs de risque... 16

1.3.3 Outils diagnostiques – systèmes de classification ... 17

1.3.4 Le récepteur aux androgènes ... 20

1.3.5 Rôle des androgènes dans la croissance et le traitement hormonal du cancer de la prostate ... 22

1.3.6 Traitements ... 23 1.4 Farnesoid-X-Receptor ... 30 1.4.1 Caractéristiques générales ... 30 1.4.2 Ligands ... 32 1.4.3 Fonctions de FXR ... 33 1.4.4 FXR et le cancer ... 35 2-Hypothèse et objectifs ... 37

3-Chapitre 1: Bile acids and prostate cancer remediation through FXR activation ... 39

4-Discussion ... 73

4.1 Analyse et résultats supplémentaires ... 73

4.1.1 Effets des agonistes de FXR dans des modèles de PCa dépendants et androgéno-indépendants. ... 73

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VIII

4.1.2 Efficacité des agonistes de FXR pour inhiber la croissance du CRPC ... 76

4.1.3 Retour sur les données de biopuces à ADN ... 78

4.1.4 Implication exclusive ou non de FXR dans les effets obtenus ... 80

4.1.5 Retour sur les données d’immunohistochimie dans les cohortes de biopsies ... 81

5-Perspectives et Conclusions ... 83

6-Bibliographie... 85

7-Annexes ... 91

7.1 The human UDP-glucuronosyltransferase UGT2A1 and UGT2A2 enzymes are highly active in bile acid glucuronidation. ... 91

7.2 MULTIPLE ROLES FOR UDP-GLUCURONOSYLTRANSFERASE (UGT)2B15 AND UGT2B17 ENZYMES IN ANDROGEN METABOLISM AND PROSTATE CANCER EVOLUTION ... 105

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Liste des tableaux

Tableau I. Constituants du liquide séminal, concentrations physiologiques et fonctions [10]. ... 3 Tableau II. Description des grades de Gleason selon le dernier consensus de 2005 [73]. ... 19 Tableau III. Code du système de classification TNM de 2002 [48]. ... 20

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Liste des figures

Figure 1. Représentation des différents types cellulaires de la prostate humaine par immunohistochimie. ... 2

Figure 2. Représentation schématique en trois dimensions de l'anatomie de la prostate humaine. ... 3

Figure 3. Structure de la pregnenolone. ... 4

Figure 4. Schéma simplifié de la boucle de rétroaction négative contrôlant la synthèse des hormones androgènes (adaptée de [21]). ... 5

Figure 5. Représentation de l’incorporation du cholestérol dans la cellule... 6

Figure 6. Schéma général de la biosynthèse des hormones androgènes dans les testicules et les glandes surrénales. ... 6

Figure 7. Schéma des voies conventionnelle et alternative de formation de la DHT dans la prostate. ... 7

Figure 8. Représentation de l'exemple de la N-glucuronidation de la nicotine. ... 8

Figure 9. Représentation grossière d'un cas d'obstruction urinaire dû au BPH. ... 12

Figure 10. Schéma général du développement métastatique. ... 14

Figure 11. Représentation manuscrite du classement de Gleason. ... 18

Figure 12. Schéma structural du AR ainsi que de son variant constitutivement actif AR-V7. ... 21

Figure 13. Représentation schématique des principaux mécanismes de signalisation du AR. ... 21

Figure 14. Régulation du cycle cellulaire par le récepteur aux androgènes en conditions normales. ... 22

Figure 15. Association du traitement à la phase du cancer de la prostate [74]. ... 24

Figure 16. Schéma de la biologie du PCa et des molécules potentielles pour son traitement. ... 28

Figure 17. Organisation génomique et protéique des isoformes de FXR. ... 31

Figure 18. Représentation des séquences consensus des FXRE. ... 33

Figure 19. Les agonistes de FXR diminuent la prolifération des cellules LN95 par une induction de l’apoptose et un arrêt du cycle cellulaire. ... 77

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Liste des abréviations et des sigles

3β HSD 4-dione ACAT ADN ADT ADTh AR ARN BPH CA CDCA CRPC CYP DCA DHEA DHEA-S DHT ER FOXM1b FXR GS GWAS HCA HDCA HNF1α IFNγ JNK LBD LCA LDL LH LHRH LRH-1 NTD PAP PEPKC PCa PIA PIN PSA RAR ROS SHP siRNA SOCS3 SREBP-1 StAR StARD4 3β hydroxystéroïde déshydrogénase androstènedione

acyl-CoA : cholestérol acyltransférase acide déoxyribonucléïque

androstérone

Androgen deprivation therapy récepteur aux androgènes acide ribonucléïque

hyperplasie bénigne de la prostate acide cholique

acide chenodésoxycholique

Cancer de la prostate résistant à la castration Cytochrome p450

acide désoxycholique déhydroépiandrostérone déhydroépiandrostérone-sulfate dihydrotestostérone

récepteur aux estrogènes

forkhead box M1b transcription factor farnesoid-x-receptor

score de Gleason

genome-wide association studies acide hyocholique

acide hyodésoxycholique facteur nucléaire hépatique interféron γ

Jun-NH2-terminal kinase domaine de liaison au ligand acide lithocholique

lipoprotéine de faible densité hormone lutéinisante gonadolibérine

Liver-receptor homolog 1 domaine N-terminal

phosphatase acide spécifique à la prostate phosphoénolpyruvate carboxykinase cancer de la prostate

prolifération inflammatoire atrophique néoplasie intraépithéliale de la prostate antigène spécifique à la prostate récepteur à l’acide rétinoïque Espèce réactive à l’oxygène small heterodimer partner

technologie des petits ARN interférants suppressor of cytokine signaling 3

sterol regulatory-element-binding-protein 1 protéine de la régulation des stéroïdes domaine de transfert de lipide StAR-relié

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XIV SULT T TNFα TRUS TURP UDPGA UGT VDR sulfotransférase testostérone

tumour necrosis factor α

imagerie rectale par transonographie trans-urethral resection of the prostate uridine-diphosphate gulcuronic acid

uridine-diphosphate glucuronosyltransférase récepteur à la vitamine D

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Remerciements

J’aimerais tout d’abord remercier le Dr. Olivier Barbier pour m’avoir permis de réaliser ma maîtrise dans son laboratoire ainsi que pour sa ponctualité et sa capacité d’adaptation. Je n’ai pas eu le parcours le plus classique pour un étudiant aux cycles supérieurs et je tiens à le remercier pour sa compréhension. Merci également de m’avoir offert plein de belles opportunités, comme des publications et un beau voyage en Californie, c’est très apprécié. Je tiens par la suite à remercier notre Mélanie Verreault nationale, la maman du labo, pour son aide tout au long de mon projet. Sans ses conseils et ses histoires, j’aurais probablement perdu plus de temps à chercher d’un bord et de l’autre et à me perdre dans mes réflexions. Dans tous les cas, une chose est sure : Mel, elle sait s’enligner. Merci également à Jocelyn Trottier, qui, du haut de sa tour, était toujours là pour nous rappeler que nos questions étaient niaiseuses. J’aimerais dire un merci tout spécial au beau Martin Perreault; c’est à lui qu’on m’a confié quand j’étais stagiaire en commençant au laboratoire. Selon ce que le monde racontait, il faisait peur à tout le monde avec ses commentaires un peu déplacés, mais moi je n’ai jamais remarqué ce côté la de sa personnalité. Merci aussi à tous les autres étudiants de l’équipe qui ont passé ces deux années de ma vie de jeune adulte à mes côtés : Sarah Caron, Valérie Brousseau, Cyril Bigo, Anna Cieslak, Laurence Langlois, Marine Da Silva et Laurent Grosse.

Merci aussi à mes parents, Lisette et Claude, de me supporter dans mes études, même si en fait ils le savent aussi bien que moi que la raison pour laquelle j’étudie aussi longtemps c’est d’éviter d’avoir une vie de vrai adulte. Merci à mes deux grands frères, Martin et Alex, de faire des enfants pour assurer la descendance pendant que moi j’étudie. Enfin, merci infiniment à Ariane Thérien, tout simplement parce que c’est elle qui m’endure le soir et fins de semaine et qu’elle sait comment m’encourager quand c’est le temps.

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Avant-propos

Dans ce document se retrouvent trois articles scientifiques qui témoignent de ma productivité, du moins je l’espère. Le premier figurant au Chapitre 1 n’est pas publié pour l’instant puisque certaines données cruciales sont toujours manquantes afin de compléter la boucle. Il s’intitule «Bile acids and prostate cancer remediation through FXR activation» et j’en suis le premier auteur. Je ne peux toutefois pas m’attribuer tout le mérite puisque les données et les analyses présentées dans cet article sont l’ensemble de mes résultats combinés à ceux de deux autres étudiantes qui ont travaillé sur le projet avant moi. Mme Jenny Kading, ancienne étudiant au doctorat, a effectué les analyses de biopuces à ADN, les analyses du cycle cellulaire pour les cellules DU-145 et VCaP et le protocole de co-traitement avec le stigmastérol acétate. Mme Élise Houssin, ancienne étudiante à la maîtrise, s’est chargée des protocole MTS et de l’analyse ARN dans les DU-145 et les VCaP, ainsi que des analyses ARN avec le GW4064 et le CDCA dans les LNCaP et les LAPC-4. C’est également elle, en collaboration avec Mélanie Verreault, la professionnelle de recherche du laboratoire, qui a procédé aux dosages de FXR et TGR5 en ARN dans les tissus de prostate humaine. Pour ma part, j’ai confirmé tous les tests dans les LNCaP et les LAPC-4 avec le 6-ECDCA, le CDCA et le GW4064 (MTS, caspase-3, cycle cellulaire, QPCR, immunobuvardage). J’ai également réalisé les analyses avec des LNCaP exprimant un shRNA inductible contre le AR. C’est également moi, ainsi que Mélanie, qui a produit les résultats avec la lignée cellulaire LN95, un récent modèle de cancer de la prostate résistant à la déprivation en androgènes. Les deux autres articles sont publiés et figurent en annexes. Le premier s’intitulant «The human UDP-glucuronosyltransferase UGT2A1 and UGT2A2 enzymes are highly active in bile acid glucuronidation» fut publié lorsque j’étais stagiaire sous la supervision de Martin Perreault. Ma contribution à cet article est davantage dans la réalisation des expériences, soit des essais enzymatiques, ainsi qu’une participation minime à l’interprétation des résultats. Le dernier est une revue de littérature que j’ai réalisé en collaboration avec Olivier Barbier et Alain Bélanger et il se nomme «Multiple roles for udp-glcuronosyltransferase (UGT)2B15 and 2B17 enzymes in androgen metabolism and prostate cancer evolution». J’étais en charge de la recherche bibliographique et de la révision des textes avant la soumission.

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1-Introduction

1.1 La prostate : Développement, anatomie et fonctions

La prostate est une glande accessoire de l'appareil urogénital humain qui sert essentiellement à la production du liquide séminal. Chez l'homme, elle est située directement sous la vessie en un seul organe de la taille d'une noix de Grenoble, tandis que l'équivalent chez la femme se compose d'une multitude de petites protubérances le long de l'urètre appelées glandes de Skenes [1, 2]. Contrairement aux autres organes, la prostate se développe presqu'exclusivement après la naissance [1]. En fait, l’instauration des structures s'amorce aux alentours de la dixième semaine de gestation, lors de l'apparition du premier bourgeon prostatique à partir de l'endoderme urogénital, endoderme duquel proviennent également la glande bulbo-urétrale et la vessie. La différenciation sexuelle décide ensuite du sort de ce bourgeon via la sécrétion d'hormones sexuelles, soit les androgènes ou les estrogènes pour les garçons et les filles respectivement [1, 3]. Chez les garçons, une structuration minimale se produit à ce moment sous l'action d'une faible quantité d'hormone masculine produite par les testicules; cette étape résulte en la production des premiers tubules prostatiques inactifs et en la formation de la prostate précoce grosse comme une noisette [1, 4].

Le développement de la prostate ne recommence qu'à la puberté menant ainsi à la maturité sexuelle, sous l'action desdites hormones androgènes [1]. À ce moment, le mésenchyme ou stroma qui répond plus fortement aux hormones se multiplie afin de produire de plus en plus de canaux où iront s'établir les cellules épithéliales de la prostate suite à une activation paracrine [1]. Le stroma est majoritairement composé de tissu musculaire lisse, de fibroblastes, de tissu conjonctif et même de tissu musculaire squelettique en plus faible proportion, fournissant ainsi une structure rigide à la prostate [1, 5]. Les cellules épithéliales, quant à elles, sont subdivisées en deux principales catégories: les cellules basales et les cellules luminales sécrétrices (Figure 1 A & B). Avec l'avancement de la puberté, les cellules luminales acquièrent la capacité de répondre aux hormones androgènes par l'expression d'un récepteur nucléaire: le récepteur aux androgènes (AR) [1]. Ces cellules ainsi organisées forment des acinii qui se rejoignent tous en un même point afin d'évacuer les sécrétions des cellules luminales, soit dans l’urètre. On croyait établi le fait que les cellules basales sont précurseurs aux cellules luminales et qu’une différenciation progressive menait au renouvellement des cellules sécrétrices, mais certains groupes soutiennent- maintenant que les cellules luminales sont issues de cellules souches précurseurs présentes dans le tissu [6]. Un dernier type cellulaire est retrouvé en petite quantité dans la prostate: les cellules neuroendocrines servant à faire le pont entre le système nerveux et endocrinien par la sécrétion de multiples neuropeptides ainsi que des facteurs de croissance (Figure1 C) [5, 7]. La prostate adulte ne croît normalement que très peu et ce n'est qu'aux alentours de 60 ans qu'on peut observer une augmentation de sa taille [1].

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Figure 1. Représentation des différents types cellulaires de la prostate humaine par immunohistochimie.

(A) Les cellules luminales sont mises de l'avant par immunohistochimie contre la phosphatase acide spécifique à la prostate (PAP). (B) le récepteur nucléaire p63 permet de bien discerner les cellules épithéliales basales, tandis que (C) les cellules neuroendocrines sont identifiables par leurs granules cytoplasmiques rouges [5].

D'un point de vue anatomique, la prostate se trouve à entourer le point de jonction entre l'urètre, les canaux éjaculateurs et les canaux prostatiques qui se nomme le verumontanum [1]. Cette glande est subdivisée en 3 régions principales, chacune étant symétrique de part et d'autre de l'urètre: la zone centrale, de transition et périphérique (Figure 2) [5]. Les subdivisions dans la prostate ont fait l'objet d'un débat dans la communauté scientifique au cours du vingtième siècle dû à une très forte similitude au niveau histologique de chaque lobe. Lowsley établit le premier modèle à l'aide de prostate humaine fœtale, tandis que Frank, Tissell et McNeal utilisèrent des prostates adultes à différents âges et affectées par diverses pathologies, ce qui venait introduire des biais et semait sans cesse le doute [4]. Malgré cela, avec l'avancement des technologies de microscopie et d’immunohistochimie, des différences marquées ont pu être identifiées entre les lobes présentés à la figure 2. Notamment, la zone périphérique et de la zone de transition comportent des acinii circulaires avec un stroma de densité faible et dense respectivement. La zone centrale quant à elle est composée de grands acinus aux formes irrégulières avec une membrane de cellules basales proéminentes, le tout pris dans un stroma dense [5]. L'anatomie de la prostate se complète par une couche antérieure de tissu fibromusculaire vascularisé. Le tout est entouré d'une capsule fibreuse qui recouvre toute la prostate à l'exception de la base où se trouve le sphincter prostatique impliqué dans l'éjaculation et le contrôle de la miction [1].

La fonction principale de la prostate est la formation du liquide séminal, produit de sécrétion qui permet la liquéfaction et la protection des spermatozoïdes et assure ainsi la fertilité de l’homme. Elle en produit et en entrepose continuellement une certaine quantité afin de prévenir tout besoin reproducteur; il est à noter que l’activité sexuelle stimule la production de liquide séminal par la prostate et qu’il compte pour 20-30% de l’éjaculat [8, 9]. La composition de ce liquide est principalement de l’acide citrique, de la spermine, du zinc, des antigènes spécifiques à la prostate (PSA), de la phosphatase acide spécifique à la prostate (PAP) et finalement les prostasomes (Tableau I) [10]. Les prostasomes sont largement plus complexes que les composés décrits dans le Tableau I et leurs fonctions sont beaucoup moins comprises. Ces petites vésicules extracellulaires comportent un grand nombre d’enzymes, de protéines de structures, de chaperonnes, et de

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Figure 2. Représentation schématique en trois dimensions de l'anatomie de la prostate humaine.

Ce schéma permet la visualisation de l’organisation des lobes de la prostate humaine, organe qui relie l’urètre, les canaux éjaculateurs et les canaux prostatiques. On observe la symétrie de part et d’autre de l’urètre avec les lobes de la zone de transition au centre, entouré de la zone périphérique et surmonté de la zone centrale [5].

molécules de signalisation qui participent à la capacitation des spermatozoïdes [10]. Dans le vagin, le pH acide permet la fusion hydrophobe entre les prostasomes et les spermatozoïdes [9]. Ce faisant, cela provoque une augmentation de la motilité des flagelles du spermatozoïde par plusieurs mécanismes comme le transfert de transporteurs d’ions calciques et l’augmentation de la fluidité membranaire par l’incorporation de la membrane riche en cholestérol des prostasomes [9]. Ce phénomène protège le spermatozoïde de cet environnement hostile en empêchant les réactions acrosomiques prématurées et par ses propriétés immunosuppressives, antioxydantes et antibactériennes [10]. En résumé, sans l’apport prostatique à l’éjaculat et le rôle de la structure de la prostate dans l’appareil uro-génital, on observerait une fertilité beaucoup plus faible chez l’homme et même une impotence sexuelle.

Tableau I. Constituants du liquide séminal, concentrations physiologiques et fonctions [10]. Composé Concentration Fonction

Acide citrique 97-128 mM Anion majeur du liquide séminal, liaison d’ions métalliques Spermine 5-35 mg/L Inconnue, lié à la quantité de spermatozoïdes et à la motilité Zinc 0,1-5,4 mM Cofacteur enzymatique, effet antibactérien PSA 110-2211 mg/L Liquéfaction de l’éjaculat PAP inconnue Hydrolyse

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Figure 3. Structure de la pregnenolone.

Les carbones y sont numérotés suivant la convention internationale et les indications α et β indique l'orientation des groupements fonctionnels [20].

1.1.1 Le rôle des hormones androgènes dans la prostate

Le récepteur aux androgènes (AR) est essentiel au bon développement de la prostate chez l'homme; on le retrouve notamment dès le premier trimestre de la gestation durant lequel il agit comme facteur de différenciation [1, 11]. Il s’agit d’un facteur de transcription activé par un ligand, dans ce cas les hormones androgènes [11]. Quand la concentration de son ligand est assez importante dans le cytoplasme, le AR est alors activé; il migre au noyau et provoque un changement au niveau de la transcription de gènes cibles. Durant la gestation, seulement les cellules du mésenchyme expriment le AR et peuvent donc répondre à ses ligands. Le développement initial se fait alors via une signalisation paracrine pour diriger l'organisation des cellules épithéliales [12]. À l'âge adulte, toutes les cellules épithéliales basales, de même que certaines cellules luminales, expriment le AR et dépendent alors des androgènes pour proliférer [12]. Les hormones androgènes occupent alors un rôle central dans le contrôle du cycle cellulaire et des produits de sécrétion des cellules épithéliales de la prostate. Le AR régit précisément la croissance des cellules épithéliales en déployant un effet stimulant dans les cellules luminales et inhibiteur dans les cellules basales [12].

1.2 Les hormones androgènes

Les hormones sexuelles ont un rôle très important dans plusieurs sphères du fonctionnement du corps humain [1]. Le caractère masculin est associé à l’action des hormones androgènes, des composés à 19 carbones dérivés du cholestérol alimentaire qui lui comporte 27 carbones [13]. Les hormones équivalentes féminines s’appellent les estrogènes et ont une structure très apparentée avec un seul carbone de moins à leur structure [1]. C'est le cholestérol qui confère aux hormones stéroïdes leur structure commune à 4 cycles nommée le cycloperhydropentanophénanthrène (Figure 3). Les testicules et les glandes surrénales sont les principaux organes où se produit la synthèse enzymatique de ces composés ainsi que de leurs

précurseurs chez l’homme; ils produisent respectivement la testostérone (T) et la déhydroépiandrostérone (DHEA) comme produit final. Originellement, il était assumé que les hormones masculines étaient synthétisées uniquement dans les testicules, comme quoi il s'agissait de l'organe qui différencie homme et femme. Toutefois, diverses expérimentations dans le cadre du traitement du PCa ont démontré que la castration induit bien une diminution de 95-97% du niveau circulant de T comme attendu, mais que le niveau de dihydrotestostérone (DHT) qui est le métabolite le plus actif dans la prostate ne diminue que de 40% environ [14]. Ceci laisse croire à au moins une seconde source d'hormone androgène dans le corps qui n'aurait pas comme produit circulant la testostérone. C'est ainsi qu'on associa les glandes surrénales à ce phénomène [15, 16]. La T et la DHT sont les deux hormones androgènes actives chez l’homme et elles lient

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toutes deux le AR traité brièvement à la section 1.1.1 [3, 17]. Ces deux molécules n’ont pas exactement la même activité et affinité pour le AR: la DHT est 10 fois plus puissante que la T et il a été démontré que leur patron de signalisation diverge considérablement [18].

Ces hormones sont indispensables au bon fonctionnement du corps tout au long de la vie et leur action commence aussi tôt que la 16ième semaine de gestation afin d’induire la différenciation sexuelle. Il est d’ailleurs

à noter qu’une dysfonction au niveau de la synthèse résultant en une sécrétion trop faible à ce stade peut mener à un développement incomplet des structures primitives de l’appareil génital masculin, un désordre de développement sexuel comme le syndrome de Turner ou de Klinefelter [19]. Le premier pic d’hormone postnatal est observé entre le deuxième et le sixième mois pour achever le développement masculin primaire. Ensuite, les niveaux sanguins restent indétectables jusqu’à l’adrénarche, période précédant la puberté de deux années, donc normalement aux alentours de 6 à 8 ans [19,

20]. C’est seulement à la puberté que les sécrétions androgéniques deviennent assez importantes pour induire la maturation sexuelle. C’est à ce moment que les sécrétions provenant des testicules et des glandes surrénales provoquent graduellement le processus de virilisation, soit la pousse du poil, le développement de la stature musculaire, la mue, ainsi que l’activation du système reproducteur et l’apparition de pulsions sexuelles [1, 19]. Cet équilibre de sécrétion hormonale est finement régulé par une boucle de rétroaction négative entre les organes cibles et l’hypothalamus, via les niveaux sanguins d’hormones de signalisation (Figure 4) [21].

1.2.1 La synthèse des hormones androgènes

La biosynthèse hormonale est initiée suite à un signal hormonal en provenance du cerveau [20, 21]. Chez un homme adulte en bonne santé, l’hypothalamus sécrète des gonadolibérines (LHRH) à toutes le 90-120 minutes [18]. Ce sont ces hormones

qui provoquent la libération des hormones lutéinisantes (LH) ainsi que des hormones adrénocorticotropiques (ACTH) à partir de la glande pituitaire [21]. Ces deux derniers messagers déclenchent alors la synthèse des hormones androgènes dans les testicules et les glandes surrénales respectivement [21].

Le cholestérol est à la base de la chaîne de synthèse des hormones sexuelles. Il peut provenir de l’alimentation et être pris en charge par les différents véhicules lipidiques comme les lipoprotéines de faible Figure 4. Schéma simplifié de la boucle de rétroaction négative contrôlant la synthèse des hormones androgènes (adaptée de [21]).

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densité (LDL) et ensuite être incorporé du sang aux cellules par internalisation [20]. La cellule est également en mesure de synthétiser son propre cholestérol à partir de l'acétyl-CoA, mais il s’agit d’un processus énergétiquement coûteux et cela ne correspond qu’à une proportion minimale de l’apport en cholestérol [22]. Il est à noter que le cholestérol peut être estérifié par l’enzyme ACAT à des fins de stockage en gouttelettes lipidiques dans le cytoplasme; ce dernier n'est donc jamais limitant (Figure 5) [20]. Le cholestérol libre se lie à la protéine StARD4 afin de favoriser son transport vers les mitochondries. À son tour, la protéine StAR permet le passage rapide du cholestérol à travers les membranes des

mitochondries jusqu’à l’intérieur où le cholestérol sera clivé par une enzyme du cytochrome p450 (CYP), la CYP11A1, pour donner un premier intermédiaire à 21 carbones : la pregnenolone (Figure 3) [20]. Ensuite, l'enzyme CYP17A1 fait subir une hydroxylation à la pregnenolone pour donner le 17-hydroxy-pregnenolone qui sera ensuite converti en DHEA par le clivage du lien C17-20. Cette réaction retranche ainsi 2 carbones de plus pour donner un androgène inactif à 19 carbones (Figure 6) [3, 22]. Ce sont ces réactions qui sont ciblées par l'abiratérone acétate, un des agents de traitement du PCa les plus récents sur le marché. Il produit ainsi un blocage à la source de la synthèse androgénique autant aux testicules qu'aux glandes surrénales [23]. Le

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Figure 6. Schéma général de la biosynthèse des hormones androgènes dans les testicules et les glandes surrénales.

La synthèse des hormones androgènes débute avec le cholestérol comme premier précurseur. Une chaîne de réaction impliquant le cytochrome p450 (CYP) mène à deux précurseurs principaux soit la déhydroépiandrostérone (DHEA) au niveau des glandes surrénales (en gris) et la testostérone (T) dans les testicules (quadrillé). La DHEA peut être sulfaté pour assurer sa circulation dans le corps [20-24].

Figure 5. Représentation de l’incorporation du cholestérol dans la cellule.

Le cholestérol stocké dans les LDL est incorporé dans les cellules via endocytose. Le cholestérol libre peut alors être estérifié par l’enzyme ACAT pour être stocké en gouttelette lipidique ou encore être escorté par les protéines StArD4 et StAr jusqu’aux mitochondries où il sera transformé [20].

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DHEA est d'ailleurs le produit majeur des glandes surrénales ainsi qu'un intermédiaire au niveau des testicules. Dans les glandes surrénales, il est sulfaté (DHEA-S) par des sulfotransférases (SULT2A1, SULT2B1b) afin de favoriser son relargage dans le sang [3]. Une fois dans le sang, vue son incapacité à signaler, il devient le précurseur principal des androgènes pour les tissus périphériques, comme la peau ou la prostate [14]. Dans les testicules, le DHEA continue sa transformation sous l'action dHOD3-ȕ hydroxystéroïde déshydrogénase de type 1 ou 2 (3ȕ HSD) pour former l'androstènedione (4-dione). La synthèse de la testostérone est achevée par la 17ȕ HSD de type 3 ou 5 [3]. Ce produit final est le plus abondant dans les testicules et une très faible proportion de DHT y est retrouvée, ce qui suggère une activité négligeable de la part de la 5-Įréductase (Figure 6) [24].

En situation normale, c'est la testostérone qui est le principal androgène retrouvé dans le sang avec une proportion de 90-95% tandis que la DHEA/DHEA-S compte pour environ 5-10% (Figure 4) [18, 21]. Toutefois, en situation de castration chimique ou physique, on ne retrouve presque plus de testostérone tandis qu'on retrouve encore environ 60% du taux normal de DHT dans la prostate, ce qui suggère que la DHEA serait alors le précurseur principal des hormones androgènes actives dans les tissus périphériques [14]. Il est d'ailleurs maintenant considéré qu'en situation

normale les précurseurs surrénaliens comptent pour 50% des androgènes dans la prostate [25]. Une fois récupérée par les cellules de prostate, la DHEA et la DHEA-S est d'abord débarrassée de son groupement sulfate s’il y a lieu, pour ensuite être transformée en 4-dione par la 3- β HSD de type 1 ou 2 (Figure 7) [3]. Par la suite, 2 voies de synthèse semblent être possibles pour mener à la DHT. La voie conventionnelle commence par déshydrogéner la 4-dione en testostérone par l'action de la 17β HSD de type 3 ou 5 pour ensuite la transformer en DHT par réduction du double lien en position 5 par la 5α réductase de type 1,2 ou 3 [3]. La voie alternative, quant à elle, inverse les étapes et n'a donc pas la testostérone comme intermédiaire réactionnel; elle procède par réduction du lien double en position 5 pour donner le 5α-dione puis une déshydrogénation se produit en position 17 pour en arriver au même produit final [3]. Fait important, il semblerait que la

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6XOIDWDVHGH VWpURwGH ȕ+6' ȕ+6' Į5HG

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7

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ȕ+6'  Į5HG 

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9RLHFRQYHQWLRQQHOOH 9RLHDOWHUQDWLYH

Figure 7. Schéma des voies conventionnelle et alternative de formation de la DHT dans la prostate.

Deux patrons de synthèse de la DHT ont été élucidés dans la prostate humaine. Elles utilisent les mêmes enzymes, mais dans un ordre différent. Il est à noter que la voie alternative fait appel à d’autres isoformes de la 17βHSD [20-23].

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8

voie alternative serait la plus fréquente dans les tumeurs de PCa résistantes à la castration (CRPC) et il devient important d'en tenir compte dans le cas d'un éventuel traitement ciblant des enzymes de synthèse précises [16].

1.2.2 Le métabolisme des androgènes

Les hormones androgènes peuvent avoir des effets dans plusieurs organes, mais leur action n'y est pas souhaitable à tout moment. C'est pourquoi leur activation et leur inactivation se produit souvent directement dans les cellules visées, comme dans la prostate [26]. Ce processus se nomme intracrinologie et fut premièrement décrit par l'équipe du Dr. Labrie en 1991 [25]. En arrivant dans les cellules prostatiques, la DHEA et la T sont transformées localement en DHT comme décrit à la figure 7 avant d'agir sur le AR [14, 20]. Ensuite, la majeure partie de la DHT est prise en charge par les enzymes 3-α-HSD ou 17-β-HSD pour donner respectivement le 3-α-androstanediol (3-α-diol) ou l'androstérone (ADT); il s'agit d'une réaction du métabolisme de phase I qui inactive la DHT [26, 27]. Ces métabolites peuvent alors aussi bien retourner dans la circulation ou être retransformés en DHT, mais un mécanisme irréversible peut également se produire dans la cellule pour favoriser leur excrétion: la glucuronidation [26, 27].

1.2.2.1 La Glucuronidation

La glucuronidation est une réaction enzymatique visant à éliminer des composés autant endogènes qu'exogènes pouvant avoir des effets nuisibles pour l'organisme [28]. Plusieurs molécules connues sont glucuronidées, par exemple le bicalutamide, la nicotine (Figure 8) ainsi que les acides biliaires [28-32]. La famille d'enzymes responsable de ce mécanisme est celle des Uridine-diphospho-glucuronosyl-transférases (UGT) [26, 28, 32, 33]. Les 19 UGTs humains se divisent en trois sous-familles: les UGT1A et les UGT2A et

Figure 8. Représentation de l'exemple de la N-glucuronidation de la nicotine.

La réaction de glucuronidation de la nicotine implique l’amine tertaire de celle-ci en réaction avec le carbone #1 du sucre glucuronide de l’UDPGA. Il en résulte un produit plus hydrophile et facilement d’élimination ainsi qu’une molécule d’uridine-diphosphate (UDP) [30].

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les UGT2B [30]. Cette réaction de conjugaison du métabolisme de phase II consiste en le transfert d'un sucre (glucuronide) à partir d'un acide glucuronique-uridine-diphosphate (UDPGA) sur une molécule acceptrice (Figure 8). Cette réaction correspond à une substitution de type SN2 entre un hétéroatome et le carbone 1 du

glucuronide et se produit lorsque les deux molécules sont à proximité dans le site actif de l'enzyme [28, 30]. Les hétéroatomes les plus rencontrés sont l'oxygène et l'azote, et les molécules sont alors O- ou N-glucuronidées [28, 30]. Cette conjugaison induit ainsi une augmentation du caractère hydrophile en plus de rendre inactif le composé facilitant ainsi son évacuation par les reins ou la bile [26, 30]. La conjugaison peut se faire sur plusieurs groupements fonctionnels comme un carboxyle, un carbonyle, un hydroxyle, un sulfuryle ou une amine. La glucuronidation a d'abord été associée à l'élimination des produits exogènes comme les médicaments puis on découvrit que plusieurs molécules endogènes étaient régulées par ces enzymes, notamment les acides biliaires, la bilirubine, les rétinoïdes, les dérivés d'acides gras ainsi que plusieurs hormones (androgènes, estrogènes, thyroïde, glucocorticoïde, etc) [26, 28]. Chaque UGT est différent au niveau de son site actif et comporte un grand nombre de substrats. Ceci fait en sorte que le nombre de molécules pouvant être éliminées par le système de glucuronidation est quasi infini [26].

1.2.2.2 La glucuronidation des hormones androgènes

Plusieurs UGTs humains sont en mesure de glucuronider les hormones androgènes, notamment l'UGT1A3, 1A4, 1A7, 1A9, 1A10, 2A1, 2A2, 2B4, 2B7, 2B11, 2B15, 2B17 et 2B28 [22, 34, 35]. Chacune de ces enzymes a une affinité différente pour un ou plusieurs membres de cette famille d'hormones décrites à la section 1.2.1, soit la DHT, la testostérone, la 3-α-diol ou l'ADT par exemple. Seulement trois d'entre elles ont une activité assez importante pour avoir un impact physiologique: les UGT2B7, 2B15 et 2B17 [26, 34]. L'UGT2B7 est capable de conjuguer le groupement hydroxyle en position 3 (3-OH) (Figure 3) du 3-α-diol et de l'ADT, mais n'est pas en mesure de conjuguer le groupement 17-OH de la DHT. Cette enzyme est exprimée au foie, aux reins, dans les glandes mammaires ainsi que dans les poumons, mais pas dans la prostate [26]. L'UGT2B15 est spécifique à la glucuronidation en 17-OH de la DHT; elle a une grande capacité de conjugaison pour le 3-α-diol mais une capacité modérée pour l'ADT. Enfin, l'enzyme UGT2B17 est celle associée à la conjugaison de l'ADT en 3-OH avec une capacité équivalente à 4 fois celle des UGT2B7 et 2B15. Elle se distingue également des autres par son habilité à conjuguer en position 3 et 17, faisant en sorte qu'elle a la même capacité pour glucuronider le 3-α-diol en 3-OH que ces deux soeurs UGT2B de même que la testostérone [26]. L'expression des UGT2B15 et 2B17 est semblable à celle de l'UGT2B7 sauf qu'on les retrouve également dans la prostate, la peau, les testicules et l'utérus [22]. Elles sont alors les deux seules enzymes ayant une grande capacité de conjugaison pour les androgènes présentes dans la prostate et ont donc un rôle très important. L'élimination des hormones via la glucuronidation est essentielle à l'équilibre des mécanismes

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10

de signalisation du corps humain; c'est pourquoi certains groupes proposent les UGTs comme cible thérapeutique afin d'augmenter ou diminuer leur activité [36].

1.2.2.3 La glucuronidation et le cancer de la prostate

À ce sujet, plusieurs études génétiques portant sur des polymorphismes dans les UGT2B15 et 2B17 laissent croire à une association entre une défectuosité des mécanismes d'élimination de la DHT et le risque de développer le cancer de la prostate (PCa) [26]. C'est notamment le cas du phénotype UGT2B17 del/del qui résulte en une absence de la protéine ou encore de certaines mutations non synonymes comme celle de l'UGT2B15 D85Y. Bien que ces études soient controversées et demandent confirmation, il n'est pas à négliger qu'elles mettent en lumière un lien direct entre les mécanismes d'élimination des androgènes et le cancer de la prostate [26].

D'autre part, il a été observé chez certains patients que le traitement anti-androgénique au bicalutamide augmente l'expression de ces dernières enzymes, comme quoi le AR réprimerait l'expression des UGT capable d'éliminer ses ligands [36, 37]. Des tests complémentaires en culture cellulaire utilisant des petits ARN interférents (siRNA) contre l'UGT2B15 et 2B17 laissent croire que la hausse d'expression normalement provoquée par le bicalutamide serait en cause dans les effets antiprolifératifs de ce traitement et serait dû à l'acquisition d'une meilleure capacité d'élimination des hormones androgènes [36]. De plus, une fluctuation du taux d'expression en fonction de l'avancement du cancer fut réalisée et laisse entrevoir la possibilité d'utiliser ces deux enzymes comme biomarqueur afin d'évaluer la persistance de la réponse au traitement [36]. 1.2.2.4 La régulation des UGTs métabolisant les hormones androgènes

Plusieurs récepteurs nucléaires ont un effet sur l'expression des enzymes UGTs et il est important d'en prendre compte lorsqu'on cible un de ces derniers. En ce qui a trait à la régulation des principaux UGTs métabolisant les androgènes, soit les UGT2B7, 2B15 et 2B17, six récepteurs principaux ont été identifiés à ce jour, soit: le AR, le récepteur aux estrogènes (ERα), le Farnesoid-X-Receptor (FXR), le récepteur de la vitamine D (VDR), le facteur nucléaire hépatique (HNF1α) et le récepteur à l'acide rétinoïque (RARα) [37]. Il a été démontré que le AR diminue l'expression des UGT2B15 et 2B17 tandis que ERα l'augmenterait [37]. FXR réprime les trois UGT, RAR seulement celle de l'UGT2B7 alors que VDR réprime l'UGT2B15 et 2B17. Enfin, HNF1α augmente l'expression de l'UGT2B7 et 2B17 [37]. Ceci crée en un rien de temps un réel casse-tête qui peut rapidement s'entremêler et avoir un impact final important sur l'élimination des androgènes ainsi que des autres substrats associés à ces enzymes. Il est donc important de prendre en considération les conséquences des déséquilibres qu'un simple traitement peut provoquer.

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1.3 Le cancer de la prostate

Le premier cas de cancer de la prostate (PCa) a été répertorié pour la première fois par un chirurgien londonien en 1853, le Dr. J Adams [15]. À ce moment, on considérait ce genre de pathologie comme extrêmement rare, faute de moyen de la différencier avec les autres désordres du système uro-génital masculin. De plus, la quasi-totalité des PCa identifiés en était à un stade très avancé, souvent symptomatique, puisque les moyens de détection étaient inexistants à cette époque [15]. Se faire diagnostiquer d’un tel cancer était donc synonyme d’une sentence de mort dans l’année suivante. L’augmentation de l’incidence du PCa a poussé la recherche à se développer dans cette branche de la médecine. C’est en 1941 que Huggins découvrit ce qui peut être considéré comme la pierre angulaire des traitements actuels : la dépendance en hormones androgènes des tumeurs de prostate [38]. C’est à partir de cette découverte que les premiers traitements systémiques pour le PCa furent développés et contribuèrent à augmenter l’espérance de vie des patients atteints. Bon nombre de nouvelles stratégies de détection et de traitement furent mise au point depuis ce temps et aidèrent grandement à l’amélioration des soins du PCa [15]. Selon des statistiques récentes aux États-Unis, 93% des PCa sont désormais détectés à la phase localisée et le taux de survie de 5 ans est passé de 67,8% à 99,9% en 25 ans [39]. Le taux de survie de 10 et 15 ans est également mesuré aujourd’hui, il est de 98,8% et 94,3% respectivement [39]. Le taux d’incidence est également en légère décroissance depuis les années 90 à l’instar de la période de 1975 à 1990 où on observait une constante augmentation [39]. Malgré toute les innovations réalisées dans le domaine de la recherche, le cancer de la prostate est toujours le deuxième cancer le plus souvent diagnostiqué chez les hommes dans le monde, de même que la sixième cause de mortalité par cancer [40]. Selon la société canadienne du cancer, 1 homme sur 6 sera diagnostiqué du cancer de la prostate cette année et 1 sur 28 en mourra, ce qui démontre que les stratégies actuelles comportent des lacunes qui doivent être résolues [41].

1.3.1 Carcinogénèse de la prostate

Le cancer de la prostate est un cancer extrêmement hétérogène et imprévisible, il est donc difficile de comprendre pourquoi le PCa chez un individus peur progresser rapidement, tandis qu’il peut stagner pendant 20 ans chez un autre [42]. Néanmoins, il semble y avoir plusieurs stades qui suivent une progression logique de la simple inflammation à la formation de tumeurs solides éparpillées à la grandeur de l'organisme et cette section sera consacré à une description de ces dernières [43-46].

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1.3.1.1 Hyperplasie bénigne de la prostate Il est plutôt accepté désormais qu'un des stades précurseurs du PCa serait l'hyperplasie bénigne de la prostate (BPH), une pathologie qui consiste en un grossissement progressif de la prostate (Figure 9) [47]. Ce phénomène est très fréquent chez les hommes dans la cinquantaine et atteint 80% des septuagénaires [43]. Un diagnostic de BPH ne mène pas obligatoirement à l'établissement d'un cancer, mais dans un certain nombre de cas oui [47]. Les causes exacte de cette croissance tardive ne sont pas claires encore aujourd'hui, mais les

conditions établies dans les années 80 par Walsh semblent encore valides, soit que l'individus doit avoir des testicules fonctionnels et doit être âgé d'au moins 55 ans [44]. Ces critères laissent croire qu'on observerait un changement hormonal en lien avec les androgènes provenant des testicules et que cela mènerait à une croissance intraprostatique, mais aucune preuve tangible n'a été identifiée à ce jour. Il est parfois nécessaire de procéder à la résection transurétrale qui est une opération pour retirer du tissu prostatique par l'urètre en cas d'obstruction due au BPH [48]. En fait, plusieurs autres hypothèses ont été posées dernièrement comme la possibilité d'un lien avec le syndrome métabolique, le mode de vie à l'américaine ou encore un dérèglement de facteurs de croissance, mais elles ne demeurent encore aujourd'hui que des pistes de la solution [43]. Le BPH est caractérisé par la formation de nodules de croissance à l'intérieur de la prostate (Figure 9) [43]. Ces nodules sont le fruit d'une croissance impliquant 4 types cellulaires présents dans la prostate, soit les cellules de musculaires lisses, les cellules épithéliales basales et luminales ainsi que les fibroblastes [43, 44]. Le phénomène de prolifération serait initié dans le stroma de la zone de transition de la prostate par les fibroblastes et les autres types cellulaires s'entremêleraient par la suite [43, 44]. Dans certains cas graves, le grossissement occasionné peut interférer avec les fonctions urinaires et même mener à une obstruction urinaire totale. Cette situation nécessite alors le retrait d'une portion de la prostate afin de soulager le patient [44]. Un des points qui a longtemps fait douter la population scientifique sur le lien ou non du BPH au PCa est que le BPH tend à se développer majoritairement dans la zone de transition de la prostate, tandis que seulement 20% des PCa y sont retrouvés [5]. Néanmoins, une récente étude statistique auprès de plus de 3 millions de danois suivis pendant une période 27 ans démontre qu'il y aurait une association entre ces deux paramètres et qu'être atteint du BPH augmente les chances de développer un cancer de la prostate d’un facteur de 2,22 (intervalle de confiance de 95%) [47]. Bien qu'aucun lien de causalité n’ait pu être établi jusqu'à maintenant, il semblerait que ces deux pathologies partagent des facteurs physiopathologiques au niveau de changements génétiques, hormonaux et inflammatoires [47].

Figure 9. Représentation grossière d'un cas d'obstruction urinaire dû au BPH.

Le BPH est le résultat d’une réactivation de la croissance de cellules de la prostate, ce qui provoque le grossissement de la prostate et peut mener à une obstruction urinaire par exemple [43].

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1.3.1.2 Prolifération inflammatoire atrophique

La prolifération inflammatoire atrophique (PIA) est un autre stade précurseur du PCa [45]. De façon générale, il est à noter qu'environ 20% des cas totaux de cancer sont associés à un phénomène inflammatoire. Cette hypothèse est basée sur le principe qu'à force d'être exposées de manière répétitive à des espèces réactives d'oxygènes (ROS), l'accumulation de dommages cellulaires ainsi qu'à l'ADN peuvent induire des changements génétiques permanents aux cellules [45]. Ces altérations génétiques ou épigénétiques entraîneraient un changement de programmation cellulaire vers un patron de croissance exagéré et feraient en sorte que ces cellules soient désormais non saines. Ce processus est très près des concepts de développement d'un cancer évoqué par Weinberg [49]. Il est important de noter également que le PIA est très fréquent dans la zone périphérique de la prostate, comme l'est le PCa avec un 70% d'incidence [5, 45]. Enfin, une analyse génétique a permis d'établir que des changements génomiques étaient communs au PIA, à la néoplasie intraépithéliale prostatique (PIN) ainsi qu'au PCa [45]. Ces régions sont identifiables par le marqueur ki-67, un marqueur de prolifération reconnu, sans toutefois exposer un patron aussi désorganisé que dans le cas du PIN [45]. 1.3.1.3 Néoplasie intraépithéliale prostatique

Le prochain stade est celui de la néoplasie intraépithéliale de la prostate (PIN) [45]. Ce stade se divise en deux groupes: le PIN de stade précoce (LPIN pour Low-grade PIN) et le PIN de grade élevé (HPIN pour High-grade PIN). Les LPIN sont caractérisés par une légère désorganisation de la couche de cellules épithéliales basales, comme des phénomènes de stratifications ou d'espacements irréguliers. La forme des cellules peut également être affectée (pléomorphisme) ainsi que la taille de leur noyau qui est anormalement élevée. Toutefois, ce stade est difficile à identifier dû à un manque de reproductibilité et à une possibilité de régression, ce qui fait en sorte qu'il est souvent ignoré dans des études de biopsie en vue de diagnostique [45]. Le HPIN quant à lui est reconnu comme étant l'étape menant directement au PCa [45]. Il partage avec le PCa un grand nombre de désordres au niveau génétique, clinique et morphologique [45]. Cette phase est identifiable par sensiblement les mêmes critères que pour le LPIN, mais de façon plus importante. On dénote une désorganisation importante des cellules luminales des conduits prostatiques ou acinus. L'augmentation de la croissance peut se manifester par différents motifs comme la formation de touffes, de micropapilles ou par la présence de cellules cribriformes (trouée) ou aplaties [45]. Ceci résulte donc en une dilatation des portions glandulaires de la prostate et peut être identifiable également par la formation de strates de cellules sécrétrices, par un espacement irrégulier entre les cellules et par l'altération de la membrane de cellules épithéliales basales. La taille du noyau est également un facteur important; différents phénomènes sont observables, notamment l'anisonucléose (taille des noyaux d'un même tissu qui diffère), l'hyperchromatisme, l'agrégation chromosomale et des irrégularités au niveau de la membrane nucléaire. Ces évènements sont associables avec les changements génétiques et épigénétiques qui surviennent dans ces cellules et appuient

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la non-conformité et l'augmentation de la prolifération de ces régions à l'intérieur de la prostate. Un autre caractère distinctif des HPIN est la présence de nombreuses vésicules cytoplasmiques apicales ainsi qu'un cytoplasme éosinophile ou amphiphile identifiable par la pigmentation lipochrome, une technique de coloration [45]. Au niveau de son incidence, le HPIN toucherait environ 8% des hommes dans la trentaine et plus de 60% des octogénaires selon une étude d'analyse suite aux autopsies [45].

1.3.1.4 Cancer de la prostate localisé et métastatique

Le cancer de la prostate comporte plusieurs manifestations structurales et génétiques, ce qui peut en partie expliquer son imprévisibilité [50]. En tout, plus de 70% des PCa proviennent de la zone périphérique de la prostate (Figure 2) [5]. Parmi les sous types documentés, il y a le PCa avec des caractéristiques pseudohyperplasiques, le PCa PIN-like, le PCa intra-canalaire, le PCa

canalaire et le PCa provenant du développement des cellules basales, une forme très rare. Bien que chacun de ces types de cancer ait ses caractéristiques organisationnelles propres, plusieurs propriétés sont communes [45]. On dénote une localisation dans les canaux glandulaires, une augmentation de la taille des noyaux, un espacement irrégulier entre les cellules ainsi qu'une absence de couche de cellules basales dans plusieurs cas. Il est aussi possible d'observer la présence de cellules cribriformes qui envahissent les acinus sains [45]. D'un point de vue génétique, certaines anomalies sont très fréquentes dans le développement du PCa, notamment la perte d'expression de PTEN, une phosphatase très importante dans la régulation de la voie d'activation de la PI3-Kinase promotrice de la prolifération [51]. La fusion d’ERG et TMPRSS2 est retrouvée dans environ 50% des cas de PCa, mais les conséquences sont encore obscures à ce jour [51, 52]. Il y a également l'inactivation de p53, un suppresseur de tumeur très important dans le cancer en général, qui est très souvent retrouvée dans le PCa et est associé avec un mauvais pronostic [53]. Ces étapes de désorganisation s'inscrivent bien dans les «Hallmarks of cancer» de Weinberg et Hannahan, comme quoi les cellules développent une instabilité génomique qui mène à l'insertion de mutations et ensuite à une dérégulation de l'équilibre énergétique, une résistance à la mort cellulaire, une prolifération accrue de même qu'une promotion de l'angiogenèse et de la lymphangiogénèse [49]. À un certain moment, le

Cellules tumorales Macrophages lymphangiogénèse et angiogénèse tumorale Métastase ganglion lymphatique Invasion Métastases aux organes

Figure 10. Schéma général du développement métastatique. L’expansion d’une tumeur dépend de son microenvironnement; suite à certains signaux, les cellules entreront dans le processus de transition épithéliale-mésenchymateuse(TEM) afin de quitter la niche initiale via le réseau lymphatique. Par la suite, elles peuvent soit coloniser les ganglions ou atteindre la circulation sanguine pour ressortir dans des organes précis [55].

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microenvironnement tumoral, comprenant les cellules cancéreuses, les cellules saines et certains médiateurs de l'immunité comme les macrophages, commence à sécréter des molécules pour rejoindre des récepteurs comme Twist et Snail afin d'induire la transition épithéliale-mésenchymateuse (TEM) de certaines cellules pour que ces dernières puissent quitter le foyer initial et entrer dans la circulation [46, 49]. Une fois dans le système sanguin ou dans le réseau lymphatique, les cellules cancéreuses partent à la recherche d'une niche où établir un foyer secondaire (Figure 10). Plusieurs organes sont des cibles pour le cancer, mais chacun semble avoir des préférences. Les principales niches métastatiques pour le PCa selon une étude avec une cohorte de 74 826 patients sont les os (84%), les ganglions lymphatiques (10,4%), le foie (10,2%) et le thorax (9,1%) [54]. Certaines métastases ont également été retrouvées dans le cerveau, le système digestif, les reins et les glandes surrénales [54]. Une fois que la cellule cancéreuse est dans un organe, son sort dépend de l'environnement qui l'entoure; elle peut alors être détruite, tomber en dormance pour une durée indéterminée ou encore procéder à la transition mésenchymato-épithéliale et développer un nouveau site métastatique [46, 55].

1.3.1.5 Cancer de la prostate résistant à la castration

Le PCa résistant à la castration (CRPC) est un stade clinique issu de la résistance au traitement le plus populaire jusqu'à maintenant: la thérapie de déprivation en hormones androgènes (ADTh) ou encore castration chimique [12]. Cette stratégie vise à éliminer le plus possible la synthèse ainsi que l'action des hormones androgènes dans la prostate par la combinaison de molécules inhibitrices qui seront décrites dans les prochaines sections. Cette évolution est caractérisée par un arrêt de la réponse positive à l'ADTh et pose alors un problème thérapeutique majeur puisqu'aucune stratégie thérapeutique n'est efficace à ce jour. Les mécanismes derrière cette résistance sont variés. Ils comprennent l'activation de la voie de synthèse d'androgènes directement dans la prostate, ce qui résulte en une compétition avec les antagonistes du AR et limite leur effet. Des phénomènes d'amplification de l'expression du AR ainsi que de protéines stabilisatrices ont été documentés comme diminuant la réponse à l'ADTh. Outre cela, plusieurs mutations somatiques sont retrouvées, elles peuvent induire par exemple un changement structural au niveau du domaine de liaison au ligand du AR (LBD) qui fait en sorte que des antagonistes développent une activité d'agoniste [11]. Un processus de sélection de variant est aussi observé, soit ayant une meilleure affinité ou étant tronqué de leur LBD par un phénomène d'épissage alternatif (AR-V7, section 1.3.4) [56]. Ces formes du AR sans LBD sont donc constitutivement actifs et l'ADTh n'est utile en aucun recours pour les stopper [57]. Certains croisements des voies de signalisation ont également été documentés, par exemple l'expression du récepteur aux glucocorticoïdes (GR) serait amplifiée et il répondrait aux hormones androgènes dans de telles situations afin d’induire l'activation de voies procarcinogéniques [57].

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Un phénotype un peu particulier qui est également observé dans le CRPC est l'apparition de tumeurs de cellules neuroendocrines, ces dernières étant normalement peu nombreuses dans la structure prostatique et dont la prolifération est très faible [58]. En fait, leur origine est controversée; on ne sait pas exactement si elles dérivent de cellules neuroendocrines de la prostate, de cellules souches, ou encore de cellules épithéliales en réaction aux traitements qui mèneraient à cette différenciation [58]. Ce genre d'îlots de phénotypes neuroendocrine est retrouvé dans plusieurs cancers, mais dans une proportion ne dépassant normalement pas 5%, alors que dans le CRPC elles peuvent compter pour 30% du volume tumoral. Ce phénomène est assez inquiétant puisque ces tumeurs ne répondent pas à l'ADTh parce qu'elles n'expriment pas le AR. On doit alors se tourner vers les approches classiques que sont la chimiothérapie et la radiothérapie, faute d'avoir un traitement spécifique efficace à ce jour [58].

1.3.2 Épidémiologie et facteurs de risque

En 150 ans, depuis le premier cas de PCa répertorié, on dénote une grande augmentation du nombre de cas de PCa, mais à quoi est-ce dû [15]? On peut croire que c'est à cause des avancements dans ce domaine de recherche et au raffinement des méthodes diagnostics. Peut-être est-ce provoqué par la popularité du style de vie à l'américaine avec une alimentation riche et une tendance à la sédentarité. Mais globalement, où peut-on tracer une ligne? À quel point chacune de ces propositions peut réellement avoir un impact? Il n'est pas évident de répondre à ces questions et cette section fera un survol de ce qui ressort des démarches entreprises jusqu'à maintenant.

Il semblerait que le principal facteur de risque pour développer un PCa est le vieillissement [41]. En effet, selon la société canadienne du cancer, plus de 40% des cas seraient diagnostiqués chez des patients de 60 à 69 ans [41]. Les statistiques américaines vont dans le même sens avec seulement 2% des cas survenant chez des hommes de 50 ans et moins et un âge moyen de 66 ans chez les patients atteins [59]. L'équipe du Dr. Jarrard a proposé l'année dernière que cette relation pourrait être expliquée par un relâchement du contrôle épigénétique des cellules de la prostate [60]. Ce faisant, cela pourrait modifier le contrôle de l'expression des suppresseurs de tumeurs et mener à l'établissement de masses solides; il est à noter que l'hypométhylation de l'ADN est un phénomène fréquent dans le PCa et que cela a comme conséquence de moins bien restreindre le programme génétique de la cellule [60].

Un lien avec l'hérédité à également été mis en lumière dans les dernières décennies. Un lien familial direct avec un homme atteint du PCa augmenterait les chances de 23% d'être atteint à son tour [61]. Plusieurs «Genome-wide-association studies» (GWAS) ont été réalisées afin de relier cette augmentation du risque de développer le PCa avec un locus précis, mais aucune association forte n'a pu être identifiée [61, 62]. Il y aurait le gène BRCA2, qui est également un gène de susceptibilité pour le cancer du sein, mais encore une fois le

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lien est assez faible [62]. D'autres études ont établi de faibles liens avec la calvitie à 45 ans et la procédure de vasectomie qui augmenterait de 10% les probabilités de développer le PCa [63, 64]. Une étude réalisée sur plus de 11 000 patients a également permis de déterminer que les gens atteints de diabète de type 2 avaient plus de chances de mourir du PCa [65].

D'un point de vue nutritionnel, une augmentation du risque est observée chez les patients ayant une diète riche en viande rouge, en viande travaillée mécaniquement, en produits laitiers ainsi qu'en gras animal [66]. D'un autre côté, il semblerait que de consommer du poisson, des tomates crues ainsi que du café pourrait avoir un effet bénéfique pour la prévention du PCa [66-68]. Dans le même veine, il y a une association franche entre l'obésité, soit un indice de masse corporelle élevée, et le risque de développer un PCa ainsi que d'observer à sa récurrence [66, 69]. Du côté racial, la société américaine du cancer a déterminé que les noirs sont les plus susceptibles de développer le PCa, suivis des caucasiens et que les asiatiques sont les moins à risque [12]. Toutefois, une étude récente au sujet du taux de mortalité comparant des populations venant de milieux socio-économiques semblables et ayant un accès à des services de santé de qualité démontre qu'il n'y a pas de lien direct entre la race et la probabilité de mourir du PCa [62, 70].

1.3.3 Outils diagnostiques – systèmes de classification

Le premier outil diagnostique remonte à 1956, moment où l'examen rectal pour détecter les tumeurs de la prostate fut instauré [48]. Suite à quelques tests cliniques, cette méthode consistant à aller palper le derrière de la prostate fut adoptée par la plupart des médecins pour tester la présence d'anormalités. Ce n'est qu'en 1979 que l'antigène spécifique à la prostate (PSA) fut découvert comme marqueur de la taille de la prostate [48]. En effet, cette sérine protéase est spécifiquement exprimée dans les cellules épithéliales de la prostate et, bien que non spécifique au cancer, une augmentation de ce marqueur avec les années permet d'établir s'il y a eu croissance où non [48]. Son utilisation en pratique ne commença qu'en 1990 et nécessita une mise au point; des intervalles avaient été fixés pour déterminer si un patient risquait d'être atteint du PCa, mais l'expérience démontra qu'une grande variabilité interindividuelle existe pour ce marqueur de même qu’entre les différentes tranches d'âge. Il est donc désormais jugé plus approprié de tester un même individu aux 1 à 2 années afin de voir si sa situation change drastiquement. Un changement drastique peut être défini par une augmentation de 0,75ng/mL par année pour un patient se situant entre 4 et 10ng/mL [48]. Cette pratique contribua à l'accroissement du nombre de cas identifiés en phase précoce du PCa. Cette amélioration à l'arsenal de détection du PCa est une arme à 2 tranchants compte tenu de l'imprévisibilité de ce cancer. Comme on découvre plus de cancer, on traite plus de gens, mais comment peut-on distinguer ceux qui doivent réellement être traités de ceux pour qui le cancer ne se développerait pas finalement. Ce point est une des lacunes auxquelles on doit faire face et est la raison pour laquelle certain pays ont décidé de retirer ce test de leur routine de dépistage [71].

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Une autre méthode, davantage physique cette fois-ci, pour détecter la présence de masses anormales dans la prostate est l'imagerie rectale par transonographie (TRUS) [48]. Autrefois utilisé pour diagnostiquer le PCa, cette technique permet d'identifier les lésions hypoéchogènes qui peuvent ou non correspondre à des tumeurs. La TRUS avait malheureusement un grand taux de faux négatifs et n'était pas utile pour les cancers précoces [48]. Néanmoins, elle permet de très bien définir le contour de la prostate et donc de déceler toute bosse dans le cas de cancer de la prostate avancé [48]. Malgré tout, cette méthode d'imagerie est toujours très utile afin de guider les appareils de biopsies dans des régions précises de la prostate et ainsi maximiser l'efficacité de cette opération [48]. Les biopsies et leur classification sont traitées à la prochaine section. 1.3.3.1 Systèmes de Classement du cancer de la prostate

Le premier système de gradation du PCa est le Score de Gleason (GS) et il a vu le jour en 1966 lorsque M. Gleason constata une différence architecturale marquée entre une prostate saine et plusieurs biopsies de prostates comportant des tumeurs [72, 73]. Ces biopsies peuvent être autant des biopsies rectales que des biopsies transpérinéales (entre l'anus et les testicules) pour couvrir une plus grande partie de la prostate possible [48]. Ce système a été révisé deux fois depuis son établissement, soit en 1977 et en 2005, afin de l'adapter aux pratiques actuelles [73]. Il ne se base pas seulement sur la tumeur la plus grave pour classer un PCa, mais sur les deux tumeurs de grades les plus élevés. Il est à noter que la classification se fait à faible grossissement (40-100X). En identifiant le grade de ces deux tumeurs à l'aide des distinctions indiquées dans le Tableau II et représenté à la Figure 11, il devient possible d'additionner les grades auxquels ces dernières correspondent et d'obtenir un chiffre entre 2 et 10. Un GS de 2 n'est normalement pas pris en compte pour un diagnostic à moins d'évidences externes supportant que le patient soit bien atteint. Un GS de 3 ou 4 correspond à un cancer de bas grade et n'est pas jugé comme extrêmement grave [73]. Ces stades dépendent du jugement du praticien responsable et la distinction en un Grade 1 et un Grade 2 pour une même tumeur est parfois discutée. À partir de 5 et 6 on dit

Figure 11. Représentation manuscrite du classement de Gleason.

La désorganisation du tissu prostatique suit une évolution graduelle qui peut être quantifiée par le Score de Gleason datant de1966. Une région de type 1 n’est que très faiblement désorganisée et une région de type 5 est très anarchique et comporte de grand acinus irréguliers [72-73].

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qu'on a affaire à un PCa de grade moyen et delà de 7 il s'agit d'un cancer avancé avec possiblement des foyers métastatiques [73].

Tableau II. Description des grades de Gleason selon le dernier consensus de 2005 [73]. Grade Description

1 Nodules bien définis et bien arrangés, mais séparés, uniforme, forme de ronde à ovale, acinus de tailles moyennes (glandes plus grandes que grade 3).

2 Comme au grade 1, nodules assez bien définis, possibilité d'avoir des infiltrations minimales dans le contour des tumeurs. Les glandes sont arrangées de façons plus espacées et moins uniformes qu'en grade 1. 3 Unités glandulaires discrètes.

Typiquement, les glandes sont plus petites qu'en grade 1 et 2. Infiltration dans et aux alentours des acinii prostatiques sains. Variations marquées dans la taille et la forme des cellules. Petits nodules cribriformes tumoraux bien définis.

4 Glandes composées de microacinii fusionnés.

Lumière glandulaire malformée, différenciation incomplète. Grandes glandes cribriformes avec un contour irrégulier.

Apparence proche d'un hypernéphrome (cancer des tubules rénaux). 5 Essentiellement pas de différenciation glandulaire, tissu compact de

feuillets solides, en fibre ou en amas de cellules simples.

Comedocarcinome avec une région centrale nécrosée entourée de structures cribriformes, papillaires et de masses solides.

Le second système de classification ne prend pas en compte que les tumeurs localisées du PCa, il permet de déterminer l'étendue du cancer selon: la tumeur primaire (T), les ganglions lymphatiques (L) et les métastases (M). Le tout forme le système TNM établi en 2002 et est basé sur des examens cliniques, des techniques d'imagerie et d'endoscopie, des biopsies et des tests biochimiques [48]. Ce système permet d'obtenir beaucoup de détails sur l'avancement du cancer avec un très petit nombre de caractères comme démontré dans le tableau III. Il est très utile pour les cancers très avancés pour la tenue de dossier rapide et le suivi de l'évolution en réponse à une thérapie.

Figure

Figure 1. Représentation des différents types cellulaires de la prostate humaine par immunohistochimie
Figure 2. Représentation schématique en trois dimensions de l'anatomie de la prostate humaine
Figure 5. Représentation de l’incorporation  du cholestérol dans la cellule.
Figure 7. Schéma des voies conventionnelle et  alternative de formation de la DHT dans la  prostate
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