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La rédaction des lois en droit civil et en common law /

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Texte intégral

(1)

(

ET EN CCI ... ~

par

Dominique LIZOTTE

Institut de droit comparé Université McGi11

Montréal

Juillet 1991

Thèse présentée ~ la faculté d'études supérieures et de recherche dans le cadre de l'obtention du diplôme de maîtrlse en droi t (LL. M. ) •

(2)

t

Je dëdle cette thèse avec reconnaIssance

(3)

so-called C1V1I law style and so-called

common law stylp.. 1 do not know what the dlfference 15."

E. A. DRIEDGER, "Statutory Draftlng and Interpretatlon: Canadlan Common Law", p.77

"MalS qu'est-ce donc que le Québec?" L. DION, Québec 1945 - 2000, Tome 1 - A la recherche du Québec, "Avant-propos", p.IX.

(4)

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,

Cette thèse aborde d'abord les prln~1paux aspects lIngUIstIques du sUjet de la rédactlon lég1slatlve pour a,profondlr ensu1te la façon de rédlger les 1015 dans les deux prlncipaux systèmes Jurldlques ayant eu une Influence au Canada, le DrOIt Clvll (en partlculler celul de langue françalse) et la Common Law. Les conceptlons respectIves de la 101 et du drolt dans ces deux systèmes, les techn1ques léglslatlves à la dlSpos1t1on des léglstes, et surtout le style !églslatlf cal'"<'lctérlstlque de chacun d'eux sont lCl analysés. Flnalement, ces mêmes sUjets sont abordés dans le contexte canadlen en approfondlssant la rédactlon léglslat1ve au Québec, au gouvernement fédéral et dans les autres prOVInces. Cette étude comparatIve de la rédact10n des 101S en France (BelgIque et SUIsse), en Angleterre et au Canada faIt ressortlr l'orlglna11té pl'"oprement canadlenne en la matlère, que ce SOlt en Common Law ou en Drolt ClV1l.

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R E S U M E

After havlng conSldered the 1 InguIstlc aspects of leglslatlve draftlng, thls study undertakes to summarlze ltS maIn characterlstlcs ln Clvll Law (malnly ln French Clvll Law countrles) and Common Law. The concept of law, the per~eptlon of statutory materlals ln the two legal systems, as weIl as

the draftlng technlques and style ln the two systems are analysed ln a comparatlve way. The samE matters are examlned ln th€' Canadlan context, especlally at the levels of the federal and Quebec governments. ThIS study uf statutory draftll"1g ln France (Belglum and SWltzerland), England and Canada also alms at stresslng the Canadlan approach both ln Clvll and Common Law.

(6)

....

P R É F A C E

Je tiens ~ souligner ma profonde gratitude envers les professeurs Pierre Issalys et Êthel Groffier qUi se sont constamment intéressés ~ ce travail, m'ont soutenu de leurs conseils et m'ont appuyé dans mon cheminement intellectuel. Je remerCie aussi Richard Tremblay, Coordonateur du secteur 1 ég l st l que au gouvernement du Québec, Ml c hel Sparer, Secrétalre et Directeur des communications de l'Office des professlons du Québec, et Robert C. Bergeron, avocat général princlpal de la Section de la législation au gouvernement fédéral, qUi m'ont chacun accordé une entrevue malgré leurs nombreuses occupations et m'ont ainsl permiS de compléter mes

informations sur le Canada. Mes remerciements vont aUSSi au professeur Paul-André Crépeau qUl m'a appuyé dans ce travail par la lecture d'une verSion antérieure du Titre 1 et par la mise à ma diSposition de certains ouvrages portant sur mon sUJet. Enfin, mes remerClements vont aux professeurs Emmanuel Didler, Wade MacLaughlln et Jean-Louis Bergel qUi m'ont surtout conseillée en matière bibliographique •

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T A B L E DES MATIÈRES

PR~~ACE •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 1

"

TABLE DES MATIERES •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 1 1

1 NTRODUCT 1 ON G~N~RALE •••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 1

ChapItre prélImInaIre - Le droit et le langage • . . . 7

Introductlon . . . 7

1 - Langue et langage du droit •.•.. 10

IntroductIon .•••.•••••... 10

A) NotIons préalables • . . • . . . • . . . • 11 B) CaractérIstIques du langage du drolt . . . . 16

1. Le langage du cirolt et les autres langages spéclallsés ••.•.•.•...• 17

2. Le langage du drOIt au Canada . . . 25 3. Apports des nouvelles langues du

drolt . . . 28

ConclusIon •••••••••• . . . . . 31

I I - Droit, linguistique et méthode comparatlve.33 IntroductIon ••.•.•.•....•.

...

.33 A> Drol t et drOl t comparé • • • . • . . . • . • . . 34 B> LIngUIstIque et drOIt comparé .•.•••... 43 C) Drolt, stylIstIque et méthode

compara-t 1 ve . . . . . . . 45

ConclusIon •••••.•••• . . . . 48

(8)

(.

(

Tltre 1 - La rédaction des lois en Droit C1vil et en Common Law . . . 52

1 n t r oduc t 1 on . . . 52

Chapltre 1 - Droit Civil ••..•..•.••.••.•..•••••••••. 60 Int yoduc t 1 on • . . • • . . • . . . • • . . . • . . . • • . . • • . . • • • . • 60 A) Conceptlon de la 101 et du dr01t ••..•••.•..•• 61 1. Rappel hlstorlque .••••.•••••••.••••••••• 62 2. Hlérarchle des sources du dr01t • . • . • . . . • 69 3. Méthodologle Jur1d1que utlllsée •••••••.• 75 B) Techniques d'élaborat10n des 1015 .•.•••••••.• 79 1. Contexte entourant les lég1stes ••.•••..• 79 2. Ut1] lsatlon de la techn1que de

COd1fl-ca t 1 on . . . 81 C) Style lég1slatlf •••..••••••••••••••••••••.••• 84

1. ObJectlf prlnclpal : conClS10n et

clar-té . . . • 85

2. Tra1t caractérlstlque : mlse en éV1den-ce des prlnc1pes généraux •.•••••••.••••• 88 3. Prlnc1pales techn1ques 1llustrant le

style . . . • . . . • • . . • . . . . 91 Cene 1 USlon . . . 94

Chapitre 2 - Common Law •••••••••••••••••••••••••••••• 95 Introductlon •••••.•••••••••••••••••••••••••••••• 95 A) Conceptlon de la 101 et du drolt ••••••••••••• 97 1. Rappel hlstorlque •••..••••••••••••••••.• 98 2. H1érarch1e des sources du dro1t •••••••• 102 3. Méthodologle Jur1d1que utlllsée •••••••• 108 B) Techn1ques d'élaborat1on des 101s .•.•••••••. 112 1. Contexte entourant les léglstes •••••••• 112 2. Utl11sat1on de la techn1que de

consol1-da t 1 on . . . 11 7

C) Style léglslat1f ••.•••••••..••.••••••••••••• 119 1. ObJect1f p~lnclpal : précIsion et

sécu-rité JuYldlque ••••••••••••••••••••••.•• 119 2. Tralt caractérlst1que : recherche

cons-tante de l'applicablllté concrète de la

(9)

3. PrIncipales techniques Illustrant le

style •••••••••••••••••••••••••••••••••• 123 Con c 1 us i on. • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 1 26

Con c 1 us 1 on. • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 1 28

Titre Il - La rédaction des lois au Canada

Introduct 10n • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 129

Chap i t re 1 - Le Québec ••••••.••.•••.••••••••••.••••• 132 Introductlon •••••••••••••••••••••••..•.•••...•. 132 A) ConceptIon de la 101 et du drOIt .••••.•••••• 134 1. Rappel hIstorIque •••••••••••••.•••.••.• 134 2. HIérarchIe des sources du drolt •••.•••• 144 3. Méthodolog1e Jurldique ut11lsée •••.•••• 149 B) TechnIques d'élaborat10n des 101S •.••••••••• 150 1. Contexte entourant les léglstes ••...•.• 150 2. UtilisatIon de la technique de

COdlfl-ca t 1 on •••••• l • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • f9 153

C) Style léglslatlf ••••••••••••••••••..••...••• 155 1. Partlcular1tés proprement québécolses •• 155 2. Pr1nc1pales techniq~es Illustrant ce

style • • • • • • • • • • • • • • • • • • . • • . . . • • • . . . • • 164

Con c 1 us i on. • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 167

Chapitre 2 - Le gouverneMent fédéral et les autres provinces •••••••..••••..•••..•••.•..••• 169

IntroductIon ••••••••••••••••••••••••••••••.•••• 169 A) ConceptIon de la 101 et du drOIt ••••••••.••• 170 1. Rappel hlstorique ••••••••••.••••••.•••• 170 2. HIérarchie des sources du drolt •••••••• 178 3. Méthodolog1e jurld1que utlllsée ••••..•• 181 B) Techniques d'élaboration des 101S ••••••••••• 182 1. Contexte entourant les léglstes •••.•••• 182 2. Util1satlon de la technique de

consoll-dation ••••••••••••••••••••••••••••••••• 188

(10)

-C) Style législatlf ••••.•.••••.•••••••••••••••• 190 1. Partlcularités proprement canadlennes •• 190 2. Prlnclpales technlques Illustrant ce

style •••••••••••• fi • • • • • • • • • • • • • • • • • • 196 ConclusIon •••••••.••

.

.

. .

. .

.

. . .

. .

. .

. . .

. . . .

. . .

199 Conclusion. III • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 200 C()NCLUS 1 ON G~N~RAl.E...

. ...

201 BIBL 1 OGRAPH lE . . . 206

...

(11)

~---~---INTRODUCTION G~N~RALE

L'un des phénomènes Jur1d1ques maJeurs de cette f1n de XXe slècle en Occ1dent est certes l'lnflat1on lég1slat1ve. Le nombre de 101S a augmenté de façon cons1dérable depuls que l'État 1nterv1ent davantage aux n1veal'X soclal et économlque. Étant donné que les 101s sont aUJourd'huI devenues un 1nstrument maJeur d'organ1sat1on soc laIe et de contrôle économlque, ell es sont présentes dans presque toutes 1 es sphères posslbles d'lnterventlon de l'État. Cha~ue État possède de plus ses propres 101S nat10nales et 1 es

organ1~at1ons supranat1onales, telle la Communauté économ1que européenne, ou 1nternat1onales, telle l'Organ1sat1on des Natlons Un1es, ont aUSSl leurs 1015.

Sl les pays occ1dentaux dOlvent tous sublr l'lnflatlon léglslat1ve, Ils ne la vlvent pas tous au m~me degré en ce qU1 concerne le volume de la léglslatlon qU'lIs adoptent. Par exemple, dans son Rapport flnal au Colloque franco-brltannlque portant sur la rédactlon des 1015, Wlillam Dale écrlvalt au sUJet de la longueur des 101S frança1ses prlses collec.tlvement pour l'année 1984, qu'elle corresponda1t au quart, slnon au c1nqu1ème seulement de la longueur totale de l'ensemble des 101S br1tclnn1ques pour là m~me année. 1 Cette dl fférence

Jo W. DALE, "Conclud1ng Report", Brltlsh and French

Statutory Draft1ng - The Proceedlngs of the F-ranco-Brltlsh Conference of 7 and 8 April 1986, p.166. Wlll1am Dale préc1se que "the Conference was called to explore the reasons for and the consequences of the dlfferences ln the style of the draft1ng of Br1t1sh and French leglslat1on" (volr lbJd.). A noter que ce rapport a été soumlS et adopté par les

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{

d'ordre quant1tatlf S'e)(pl1que non pas pa ... le fait que la G ... ande-Bretagne a adopté quatre fOlS plus de lOIS que la F ... ance en 1984 (pu1squ'elle en a adoptées 79 contre 62 en France), ma1S plutôt pa ... le fa1t qu'en ce qU1 concerne la forme, la G ... ande-B ... etagne ne léglfè ... e pas de la mime façon que la F ... ance.

Certes, étant donné l'impo ... tance ... ema ... quable des lois de nos ~ours dans les sociét~s occidentales, les aspects formels du sUJet ne d01vent pas it ... e négl1gés, étant intrinsèquement liés au)( aspects matériels du mime sUJet. Comme l'écrivait déjà ve ... s 1878 un auteur québécoIs;

"On ne V01t dans le style de la 101 qu'une question de fo ... me. C'est, 11 est vrai une question de forme, mais l'1nté ... it du fond y est engagé, l'esprit de la

loi y est intéressé au plus haut pOint, et à l ' espr 1 t de 1 a l o i , l'on peut ajouter, 1 a bonne adm1nistrat10n de la ~ustice et l'économ1e sociale. Souvent, en ef fet, l il forme emporte Je fond. ,,2

Nous allons donc aborder, dans cette étude, ce sujet qU1 Jusqu'aux années 1970 était peu discuté Québec comp .... at1vement aux autres provinces canadiennes et au

fédéral: la rédaction des lOIS. Nous allons nous intéresser en partlcu11er au domaine de la stylistique législative, un domaine qui a également été peu approfondi Jusqu'à mainten.nt

représentants frança1s Colloque sera c 1-après br1tann1que.

et britanniques, (J,d.m, p.159). Ce désigné comme le Colloque

franco-a P. E. SMITH, Essai sur la r*daction des lois, "Préface", p. III et IV.

(13)

par les auteurs, notamment québéc01S et ~anadlens.3

D'ailleurs, le sujet de la rédact10n des 101S ne manque pas d'lntér~t dans le contexte du Québec, celu1-c1 possédant au moins en partie une trad1t10n Jurldlque dlfférente de celle des autres provlnces canad1ennes et du gouvernement fédéral,

le Droit ClVl1 d'orlglne françalse. Ce llen avec le Drolt Ci vi 1 de rrance d01t nécessairement transparaître non seulement concernant le fond de ses actes législatifs, malS aussI concernant leur forme.

ToutefolS, les llens que le Québec possède avec la Common Law d'Angleterre ne dOivent pas non plus ~tre négl1gés. Que ce SOl t en mat 1ère de dro1 t fédéral, de drol t publ1C en général ou m'me partiellement de drolt prlvllo québéc01S, la mixité du drOit de cette prov1nce est là pour en témol0ner. Cette m1xité explique la pertinence tout à falt partlcul1ère en droit québécoIs du droit comparé. Comme l'a Sl bien écrit Chrlstlan Atias en effet:

"Déf inir la cul ture ",ur id 1que québécoise, dévoiler ce qUl lUI est essentiel pour mettre à part ce qUI pourrait @tre abandonné ou changé sans dommage, tel est le moyen de la sauvegarder plus eff1cacement, de permettre, VOlre de préparer les évolut ions nécessaires, de lUI conserver toute sa souplesse. D'où l'lntérit tout particul1er qui s'attache à la d1fférenciation du droit C1V1l et de la common

3 Emmanuel Didier écr1vait par exemple récemment qu' "11 y aurait ••• lieu d'effectuer des recherches plus approfondies sur la stylistique législative, afln de déterm1ner les formes d'énonciation les plus a1sément compréhens1bles en françals et en angl als." Infra, note 17, no 521, p.300.

(14)

..

1 aw! ".4

Introduisons donc la questIon principale sous-tendant l'ensemble de nos travaux: où se sItue le drOIt québécoIs dans les deux grandes tradItions occIdentales, le DrOIt C1V1l et la Common Law? Seuls des travaux en dro1t comparé peuvent permettre de répondre ~ cette question et préc1ser davantage ce qu'est, â l'aube du XXle slècle, l'identité jurid1que québéco1se. Ce trava1l tentera donc modestement de faire avancer nos conna1ssances en la matière au niveau particulier du st yi e lég 1sl at 1 f ,",uébécois.

Mal gré tout, cet object if ne peut ftre atteInt sans prendre tout d'abord un certain recul face au droit québéCOIS en tant que tel. Selon MIchel Sparer, en effet, ilia différence entre common

1.""

et drOIt de type civ1llste au Québec est beaucoup plus profonde qu'une slmple varIation styllstique. Il s'agit de différences essentielles de conceptl0n, de log ique interne et d' interprétat Ion. Ile Nous nous devons donc

d'expllquer préalablement en quoi conslste le style légIslatif c lvillste et par quoi est caractérisé de façon générale le style de Common Law.

En conséquence, ce travail sera divisé en deux grandes parties. La première (TItre 1) comprendra d'abord une étude

11,

C. ATlAS, Savoir des Juges et savoir des Jur istes, no p.34.

• M. SPARER, "La st*réophonie législative, facteur de haute ln f ldél i té?", p.606.

(15)

.'

comparative de la rédactlon des lois en Drolt C1Vll et en

Common Law, et sera alnSl dlvlsée en deux chapltres. Ces

chapItres seront consacrés chacun de façon excluslve à une

façon de rédiger les 101S, dùns un premier temps celle du

système CIViliste, représenté surtout par la France <la

BelgIque et la SUlsse), et dans un deUX1ème temps, la façon de rédlger les 101S en Commen Law, représentée surtout par l ' Ang 1 eterre.

Chacun de ces chapltres comprendra trols sect10ns

dest i nées à nous alder à comprendre 1 e st yI e 1 ég i sI at 1 f en questlon. Nous aborderons en premier lieu la conceptlon de la loi et du drolt (sectlon A), les tpchnlques léglslatlves dont se servent les légIstes dans chacun des systèmes (sectlon B) et surtout, quel style léglslatif est caractérlstlque dans le système en questlon (sectlon C).

Notre deux lème grande part le (T 1 tre II) aura 1 e même pl an que l a première, malS cette fOlS pour analyser la façon dont les lois sont rédIgées au Canada Spéclflquement. Après une

étude de la question au Québec, la rédactlon des 101S au

gouvernement fédéral de mime que dans les provlnces de Common Law sera abordée puisque cette analyse nous permettra elle aussi de mieux comprendre le style léglslatlf québéCOIS.

Bien entendu, le drolt comparé constitue l'une des clés fondamentales de cette recherche. I l doit donc avant tout être définl en tant que technlque largement utlllsée lCl, ce que nous allons falre dans le cadre d'un chapltre préllmlnalre.

(16)

l

(

6

I!;t;ant donné l'lmportance également grande des aspects linguIstiques de la rédaction des 101S, ceux-ci seront aussi abordés dans ce m~me chapitre prél1m1nalre.

En conséquence, le prlnclpal apport de ce travail sera de procéder à une étude comparative, d'une part, de la rédactIon des 1015 en Orolt C1V1I et en Common Law, d'autre part, au Canada, cela ahn de faire ressortir les ressembl ances de ce pays avec ses deux anc lennes mères-patr1es, mais surtout, af1n de soullgner les orlginalités proprement canadlennes.

(17)

Chapitre pr61i.inaire - Le droit et le lanaage

I l est certain que les aspects lingUIstIques de la

r1dact ion des lOIs sont très Importants, pUIsqu'un texte législatlf est en tout premi~r lIeu un texte écrit, un texte utilIsant en conséquence les sIgnes d'une langue, sInon les sIgnes d'un langage particulIer, ainSI donc un texte soumIs

à cette partIe de linguistique.

la science des sIgnes qu'est la

La dIsciplIne de la llngulstlque a pour obJet la langue enVIsagée en elle-m~me et pour elle-mime (F. de Saussure). Elle est d'autant plus pertinente dans le domaIne l.glslatlf que les slgnes lInguIstiques envoyés par le législateur (émetteur) aux cltoyennes et cltoyens (destinatalres) doivent obligatolrement ~tre appliqués et dOlvent donc ~tre le plus clairement compris possible. Or, étant donné que la 10l est écrit., d'une part, dans un langage particulier, SOIt celUI du droit, et d'autre part, dans une langue préclse (l'anglaIS ou le français au Canada), la présence de ce langage et de cette langue Influence la compréhenSIon que peuvent en avoIr les destinataires, et conséquemment, Influence le style de cette loi.

En cons6quence, ce chapItre préllmlnaire aura en tout premler lieu pour obJet de mieux éclairer la dImension linguistIque de notre sujet (Section !), pUlsqu'en tant que juriste, cette dimension nous est souvent moins connue qu'elle ne le devrait. On pourrait m.me parler semIJle-t-il d'Ignorance

(18)

(

mutuetll e entre 1 a pl upart des Jur istes et des lInguistes, pUlsque selon E. DIdier:

"Le drolt et la langue ont tous deux vocatlon à

réglr l'ensemble des actlvltés humalnes, de leurs

pOlnts de vue respectifs. Ce sont donc des

phénomènes concurrents, dont aucun n'englobe

totalement l'autre. Côte à côte, I l s s'influencent

réclproquement malS s'lgnorent plus souvent

encore.

fi.

De plus, dans la deuxIème partle de ce chapItre portant

sur les prlnclpaux préalables à notre sUJet, nous jugeons

également nécessaIre de mleux préclser ce qu'est le drOIt comparé, la dlmenslon .JurIdIque fondamentale d'une étude de la rédaction des 101S en Droit C1Vl1 et en Common Law. La

méthode comparative sera donc l'objet de notre deuxième

partle (SectIon II>' En partlcul1er, nous préclserons la

vlsl0n du drolt comparé que nous avons adoptée dans le cadre de ce trava 11, et nous examlnerons 1 es llens profonds un issant la méthode comparatlve non seulement au drolt, malS aussi à

la Ilngulst1que. Enfln, c'est dans cette partle que, de par leur apport remarquable au sUJet de la rédaction des 101S et des styles lég1slatifs, les not1ons de "stylistique" et notamment de "Styl1St lque comparée" seront lntrodui tes.

Préc1sons tout de sUIte que, n'étant pas spéc1aliste ni en Styllst ique comparée, n1 en 1 ingulst ique Jur Id lque et encore m01ns en Ilngulst1que générale, nous sommes grandement

redevable dans ce chapItre prél im1na1re aux ouvrages des

E.

Canada,

D 1 DIER , D:..:..r.;::o~lwti:.-.::d:.::e:..:s==--....ll~a::n..:.;q:a.=u~e:..:s=--.:Ie:.lti:.-....ll:.:a::n..:.;gilll.=u~e:.:si:.-.=d:.:::u=--.=d~r..::o::..li:..:t:""...la=:.u=­ no 15, p.13.

(19)

...

sp&ciallstes de ces disciplines. Mentionnons en particulier l'ouvrage tout récent de M. Emmanuel DidIer, Langues et langages du droit?, l'ouvrage tout aussi récent de M. Gérard Cornu, Llngulstlgue Jurldlgue et l'ouvrage anCien, malS touJours d'actuallté-, de J.-P. Vinay et du regretté Jean Darbelnet, Stylistique comparée du français et de l'anglais. C'est dans ces troIs ouvrages que nous avons surtout pUlsé les connaIssances que nous exposerons iCl.

7 Cet ouvrage canadien nous a beaucoup enrlchl. Il falt le

tour de la question de la linguistique Jurldique. De plus, grace â une étude approfondie de la C.L.E.r. et du D.C.A., cet ouvrage est d&taché des idéaux de "pureté" des langues et de "pureté" des systèmes juridiques, SOlt des moules intellectuels de pensée de plUSieurs lingUIstes et comparat lstes (Slnon Jur lstes) de notre époque sur ces sUJets. • TrOIS traductrices profeSSionnelles écrivaient encore récemment dans Le Devoir au sujet de cet ouvrage que "cette étude a un peu vleilli, malS elle contient encore de nombreuses vérités". VOir L. BELLEY et al., "Traduction et traduct Ion" (Lettres au Devoir), p.A-10.

(20)

l ...

1 - LAngue et langage du droit

AinSI, nous allons dans cette partIe aborder davantage la dimension linguistique pertInente à notre sUJet, en particulier les notions de "langue", de "langage", de "lanQage spéc1allsé" et de "langage du drolt". Plus encore, les Impllcatlons de la "llngulstlque JuridIque", cette hypothèse de recherche selon G. Cornu, seront également enVIsagées. Ce n'est qu'après avoir examIné ces notIons préalables que nous nous pencherons davantage sur les caractér lSt iques essentielles du langage du droit en tant que tel.

En ce qu i concerne ces ~aractér ist Iques essent lell es, nous verrons que le langage du drOIt, tout en ayant plusieurs SImilitudes avec les autres langages spéCIalisés, s'en dIstinguent aussI par plusieurs aspects. De m~me, les caractéristiques particulières se dégageant du contexte canadien seront résumées, ce contexte ayant bien entendu fortement Influencé la façon dont les lois sont rédigées au Canada.

En f in, en lIen avec ce contexte part icul ier, nous examlnerons aussI les principaux apports pertinents des nouvelles langues du drOIt canadiennes que sont la Common Law en ~rançals (CLEr) et le Droit Civil en AnglaIS (DCA). Nous aurons néanmoins l'uccaslon de revenIr davantage sur ces nouvelles langues dans le Titre I l de ce travaIl.

(21)

'.

A) Notions préalables

Il nous faut tout d'abord d1st Inguer davantage les termes "langue" et "langage". G. Cornu entre autres se penche sur cette quest1on. I l préclse, dans son fort Intéressant ouvrage, Llngulstlgue Jurldlque, que:

"Dans son sens prem1er, 1 e l.angélge est 1 a facul té

naturelle de parler, l'usage de la parole ••• Une

l.angue est la façon part1cul1ère dont cette faculté

est m1se en oPuvre dans une communauté

llngu1st1que ••• 51 l'on admet ces défln1tion~

courantes, le langage du drolt n'est n1 le langage au sens prem1er, n1 une langue.

Ma 1 s on donne auss l i e nom de l.angélge, au se 1 n d'une langue, à la façon partlcul1ère dont celle-cl est paY'lée dans un groupe ou dans un secteur d'actlvlté, si du mOIns cette façon présente assez de propr 1étés llngu1st1ques pour i t r e Isolée comme un parler part 1cul1er. ".

On constate donc qu'en résumé, le mot "langage" peut avoir deux sens particulIers, SOlt d'une part celu1, plus général, de l'usage de sIgnes écrits, veY'baux ou non-verbaux pour se

faire comprendre, soit d'autre part celuI plus paY'tlculleY' de

"lélng.age sp~cjélllt10 ou spéclalisé, un langage pY'opre à une

disc Ipl ine, tandIs qu'en f ln la 1 angue est la façon

particullère dont les sIgnes oraux ou écrlts (langage non-verbal exclu) sont énoncés.

Ëgalement, 11 nous faut aussl déf in i r i e teY'me

"linguistique ,Juridique" (ou "jurl1ingu1stique"). Comme le

résume bien G. Cornu, "dans son ple1n déplolement, la

G. CORNU, L1ngu1stique Juridique. no S, p.21 et 22.

10

Idem,

p.22.

(22)

(

(

linguistique Juridique comprend à la fOIs l'étude du langage du droit", SOit le langage spécialisé que nous avons déJà mentionné, "et celle du drOit du langage" 11 ou des drOits

lingUistiques. Bien entendu, dans le contexte de la présente recherche, seul le premier objet d'étude de la linguIstique Juridique sera approfondi ICI.

TOUJours selon G. Cornu:

"Comme le langage du drOit, la lInguIstique Juridique est une expression commode: une hypothèse de recherche plus qu'une sCience élaborée. La question est de savoir SI l'étude de ce langage mérite d' ~tre systématIsée sous le nom de lingUistique ,JuridIque (question de contenu, pas seulement d'étIquette).

La réponse est dans ce que l'étude du 1 angage du droit emprunte à la llnguistique, et dans ce qu'elle apporte au droit. 1112

Cette étude du langage du drOit est aussI appelée "JurlI1ngui'litique", en particulier par les spécialistes québécoIs de la question. J.-C. Gémar définit ainsi, pour sa part, ce terme:

11 12

" ••• Ia JUYllingulstlque • pour objet prlncipal l'étude lInguistique du langage du droit sous ses divers aspects et dans ses différentes man 1 festat ions, • f in de dlttgager 1 es moyens, de

dlttfinlr les techniques propres à en .méllorer la qualité, par exemple aux fins de traductlon, réd.ctl0n, termlnologle, lexicographie, etc. selon 1 e type de besoin cons ldéré. C'est dire que 1 e Jur i Ilngu 1 ste s'Intéresse tout part icullèrement aux questions d'ordre sémantique, syntaxique et

Idem, no 1, p.14.

(23)

-stylIstIqUe de l'écrIt JurIdIque. ,,1.:'

On devIne tout de sUIte l' lntér~t de cette dIsCIplIne pour qUIconque veut étudIer en profondpur le style des 101S.

Notons par contre que ce terme, "Jurlllngulstlque", largement utIlISé au Québec, est d'une certaIne façon remIs en questIon par G. Cornu qUI préfère le vocable

"llngu1st1que Jur1dlque", ce pour les ra1sons SUlvantes: "Au Québec, le terme "Jur111ngu1stlque" est souvent employéC ••• l.L'avantage de ce choIx est de donner un nom de métIer (Jurll1ngulste) à ceux qUI s'y adonnent. MalS les rapports de la Jur11lngulstlque et du drol t llnguist lque ne sont pas touJours éV1dents. Avec une préférence de gOût pour "llngu 1St 1 que Jur Id 1 que", l' essent leI est de comprendre que celle-cl englobe non seulement l'étude Ilngu1stlque du langage du drOIt, malS celle du droIt du 1 angage. "I.~

Pour notre part, étant donné que, dans cette étude, le doma1ne des drOIts lIngUIstIques ne sera pas abordé, nous utIlIserons de préférence l'expressIon "Jurlllngulstlque", surtout qu'elle est largement reçue iCI.

Il ressort donc de ces déflnltlons que le langage et le droit ont beaucoup de choses en commun. Un auteur parle m~me

de "rapports profonds": "ce sont tous deux des phénomènes

SOCI~UX, de formation largement coutumIère, et empreInts d'un caractère normat 1 f • " l S Ces deux

13 J.-C. G*MAR, "FonctIons de la traductIon JurIdIque en

mil ieu bIlIngue et langage du drOIt au Canada", p.135 (le souligné est de nous).

1~

Supra, note 9, no 2, p.17.

(24)

(

14

phénomènes sont d'autant plus 11és que le droit, à notre époque poslt1v1ste, n'existe souvent comme norme obl1gato1re que s' 11 se présente sous forme écr 1 te. t. Grof f 1er et D. Reed mentionnent ce p01nt: " ••• l e dro1t ut1l1se avant tout la langue. Un des tra1ts pr1nC1paux qU1 dist1ngue l'lnst1tution Juridlque des autres est précisément cela. La médec1ne et la chim1e ont un vocabula1re qUI leur est propre, malS leurs out lis et leurs obJets ne sont pas des textes. 111.

Mals, s' 11 est vra1 d'écr1re que "le dro1t existe hors des 1 angues ma i s pas en dehors du 1 angage" 1'7

,

11 faut aussi

soullgner comme le fa1t E. Dld1er que le dro1t ut1l1se les langues à des flns qU1 lU1 sont propres: "mime s' 11 reconnaît l'autonom1e du phénomène lingu1st1que, 1 I l e ta 1 Ile et

l'habille à ses propres mesures, en lUI conférant des caractéristiques qU1 font des langues des droits des langues de spéc1al1té."1

Finalement, précIsons que selon G. Cornu, deux éléments composent le langage du drOit. Il écrit en effet que:

1 .

" •.• 1'ex1stence du langage du drOit ressort, en plénitude, de la mIse en éVidence des deux éléments qUi Il' constItuent. I l y a l e langage du drOit parce que le droit donne un sens particulIer à certa1ns termes. L'ensemble de ces termes forment le vocabula1re Jurld1que. Il y a un langage du droit parce que 1 e dro1 t énonce d'une man 1ère part lcul ière ses propos1t Ions. Les énoncés du dro1t donnent corps

t. GROFFIER et D. REED, La lexicographie jur1dique, p.2. Voir aUSS1 t. GROFTIER, "La langue du drOIt", p.314.

1.,.. E. DIDIER, Langues et langages du droit, no 816, p.451.

(25)

à un dlscours ,Juridlque.

"l'

En ce qui concerne le dIscours JurIdique, SOlt "l'ensemble des énoncés de drolt"ZO

, dlscours qUI nous lntéresse blen plus

lci que le vocabulalre du drolt, notons que l'énoncé qUl retlendra plus partlcullèrement notre attentlon est celul des textes de 101, que G. Cornu appelle aUSSl "dlscours 1 ég 1 sI at 1 f" • 21

En résumé, Sl l'on reprend le schéma classlque de JakobsonZZ dans le contexte de la présente étude, rappelIons

que l'émetteur de la 101 (le léglslateur), par l'emplol d'un code (une 1 angue) et d'un canal ( l e dl scours 1 ég 1 sI at 1 f

écrlt), envoie un énoncé ou un message (la 101) au récepteur ou destinataire (le cltoyen ou l~ citoyenne). Reste à saVOlr Sl le destlnatalre en comprend le référent (le contenu du message légIslatIf), pUlsque la communlcatlon ne sera réUSSIe que s'lI connaît le code qu'utlilse l'émetteur et connaît la réalité à laquelle référent les sIgnes de l'énoncé.::r.II Nous allons revenir sur ce pOlnt d'accesslbl11té très blentôt.

l'

Suprd, note 9, no 4, p.20.

Idem, p.21.

21 Idem, no 47, p.215. VOlr pour plus de détails les nos 65

à 89 (p.266 à 234) de ce mime ouvrage.

22 VOl r ce schéma tel qu' 11 a été slmp 1 1 f lé par Sour 10UX et Lerat, infra, note 25, no 39, p.63. Voir aUSSl l'ouvr~ge de Cornu, supra, note 9, no 46, p.212.

G. Cornu, supra, note 9, no 46, p.212.

(26)

B) Caractéristiques du langage du droit

Le langage du droIt, tel que défIni précédemment, est donc un langage de spécialité au m~me titre que les langages de la médecine, du génie ou de l'économIe. Dans ce sens, il possède plusleurs slmliitudes avec ceux-ci, caractérIstiques que possèdent d'ailleurs tous les langages de splklalités, dont prlnclpalement le faIt qu'Il est hermétIque ou ésotérique. Nous nous pencherons en part Iculler sur cet aspect, aspect qui influence de dIfférentes façons le5 technIques et les styles législatIfs. Il nous faudra aussI mentIonner le faIt que ce langage de spécialIté, à l'instar des autres langages de spéCIalIté comme de la langue française en général, est encore de nos jours peu féminIsé.

D'un autre pOInt de vue, le langage du drOIt possède aussI des caractéristIques spécifiques par rapport aux autres langages spécialIsés. Nous allons à cet égard mentIonner le faIt que c'est un langage obligatoire pour les gens du peuple, en ce sens que ceux-c i sont les dest inatal res obl igés des règles de droit, et qu'Ils doivent donc s'y conformer.

EnfIn, nous examinerons aussi les caractéristiques propres au langage du droit dans le contexte canadIen, en partIculIer le faIt qu'Il est bilIngue. En lIens avec ce contexte, les apports des nouvelles langues du droit seront brIèvement mentIonnés.

(27)

-1. Le langAge du droit et les autres langages sp*cialisés

Comme les autres langages spéc lallsés, le langage du droit est hermétique ou ésotérique: 11 est difficile A comprendre, sauf pour les lnltés. Le décodage par les

non-inités est en effet difficile, vOire Impossible, lorsque les termes spéCialisés sont totalement étrangers leur compétence, comme par exemple les termes "emphytéose" ou "subrogation", ou lorsque ces termes ont dans la vie courante une signification différente de leur slgn1flcatlon Juridique, comme c'est le cas par ex~mple pour les termes "compensation" et "con fusion". 3 4 Sans compter que, comme 1 e soulignent

Sourioux et Lerat, au sein mime du discours juridique, un mime mot peut avoir différentes significations, comme c'est par exemple le cas pour "droit" ou "obllgatlon".2S

C'est pourquoI ces mimes auteurs par 1 ent d'un "ef fet ThémiS", tandiS que G. Cornu souligne l'eXistence d'un "écran linguistique,,:IIa entre le léçpslateur et le publiC en général. Ce dernier écrit ainSI que: "le fait est que le langage juridique n'est pas Immédiatement compris par un non-Juriste. Il n'entre pas d'emblée dans l'entendement de celui qui ne possède que le langage commun. La communication du droit se

E. Didier,

supr.,

note 17, no 103, p.G6.

. . J.-L. SOURIOUX et P. LERAT, Le langage du droit, no 33, p.5S.

(28)

(

heuY'te à un éCY'an llnguistlque".2? Cet auteur écrit justement que Sl le langage du drolt eXlste, c'est bien parce qu' 11

n'est pas comprls: "lI est en dehoY's du clrcuit naturel d'lntercompréhenSlon caractérise les échanges llngulstiques oY'dlnaires entre membY'es d'une mime communauté 1 ingulst ique. ,,211

C'est donc iCl que nous Y'etrouvons l'lmportance d'un des deux éléments du langage du droit déjà mentlonnés, le vocabul aire ,JUY' ld lque, qu i se déf in 1 t comme étant, "au se ln

d'une langue, l'ensemble des termes qUI ont, dans cette langue, un ou plUSIeurs sens ,JuY'idiques."~

Cependant, Sl l'on tlent compte, d'un côté, de l'idéal démocratique qUI veut promouvoir une accessIbilité maximale du drolt aux gens du peuple, ce peuple qUI détient la souveralneté de l'~tat, et de l'autre, de l'impérativlté des règles de droit, devraIt-on conclure qu'il faudraIt que le vocabul alre ,Jur idique cesse d' Itre spéc ial isé? E. Didier résume bIen le probl~me:

"Le probl ème de l ' accessibil i té du langage jur Id ique tend •••• dépasser le niveau du vocabulaire et passe au niveau plus général des habitudes d'expression des IndivIdus et des institutions. Cependant, le vocabulaire Juridique a depuis longtemps fait

27 Supra, note 9, no 3, p.18 et 19. Et il ne faut pas

oublier non plus que m~me si les lois sont aujourd'hui largement diffusées dans des recueils, ouvrages, etc, elles restent toujours méconnues sinon inconnues de façon précise et complète aux analphabètes.

Idem, p.19.

(29)

l'objet des critlques et des tentatlves de réformes

à cause de sa situat10n stratéglque pour la compréhension et l'actl0n dans le domalne du drolt. Les attentes du publlC relatlvement à la démocratle dans la créat10n et l'admlnlstratl0n du drolt se reflètent directement sur les moyens d'expresslon de cel Ul-C 1. ,,30

Pour cet auteur, le langage du dro1t gagneralt ~ ~tre

davantage simpllflé qu'il ne l'est maintenant, et 5urtout, que ne l'e5t celu1 des autres spéclalltés, cela pour en garantlr l'access1bilité. Ainsi, lorsque deux mots de slgnlf1catl0n égale sont disponlbles, 11 falJt ~ son aV1S cholslr le plus slmple, ou, lorsqu'un énoncé peut ~tre condensé en quelques mots, il doit ~tre slmpl1flé.31

Pour sa part, G. Cornu préclse aUSS1 qu':

"il importe de comprendre ••• que ••• la technlc1té du langage du drolt est une eXlgence lrréductlble de la fonction soc laie du droit [et que] la querelle du langage techn1que, opposé au langage courant, est un problême mal pos~. D'abord parce que le 1 angage ord lna 1 re n'est pas une al ternat 1 ve du langage Juridlque. Ce sont deux éléments complémentaires."zz

M~me si cet auteur semble plus conservateur qu'E. Dld1er, 11 appu1e lui aUSSl sur l'importance du destinataire des 1015, le peuple, d'autant plus que "nul n'est censé 19norer la loi". V01Cl ce qu'il écrit:

"5i nul ne peut se soustraire  la loi en prétendant

qu'il l ' 19nore, l ' except 10n d'Incompréhension est aussI inopérante que l ' except ion d'Ignorance. La

Supra, note 17, no 106, p.SS.

31 Idem, no 524, p.300. VOir aUSS1 supra, note 9, no 83,

p.322 et 323.

(30)

...

f

présomption que chacun connaît la loi se double de la présompt1on que chacun la comprendC .•• J~Que tirer de l.? Simplement, ma1S fermement, une djrectjve

renvoyée â celui qU1 parle. La maX1me se retourne contre l'Auteur du message. Elle requIert de lU1 la clarté. Elle eXIge qu'il se fasse comprendre. La maxIme Jur1d1que a un corollaire linguIstique: le devoir d'itre clalr."~

Il existe donc une contradictIon, au niveau Juridique, entre l'exigence de préc1s1on et de sécurité du langage, et l'ld.al de sImplIcité et d'accessIbIlité démocratique. Comme l'écrit encore G. Cornu:

"C'est l'amblguité (ou le défi) [du langage Juridiquel d'itre • la fois savant (dans son origIne) et populaire (par destination), technique de fa~ture et CIvique de vocatIon. Sa Juridiclté le sp*clallse, quand sa finalIté le destine ~

tous ••• ,,:.4

Pour rendre le langage du droit plus accessible, E. DidIer entrevoit deux modes d'intervention. Il propose le remplacement, la suppression ou l'explicatIon des termes, lInguistiquement parlant, ou de forcer l'émetteur <le législateur) à changer ses habitudes et ~ se mettre au niveau des dest1nataires, l*gls1ativement parlant.~ Nous examinerons bIentôt si les émetteurs de Droit Civil et de Common Law ont réagI de la mime façon devant ce prob1.me de forme pour les dest lnatalres non-ini t i*s. Mais, i l faut bien conc lure avec G. Cornu que chaque fois que seul un terme technique peut

Idem,

no S, p. 23, • 1. note 8.

(31)

rendre avec précision le message du législateur, 11 dOit préval oi ....

Chose certaine, 11 eXiste bien à l'heu ... e actuelle un mouvement Juridique en faveu ... d'une accessibilité plus grande du dlSCOU ... S Juridlque aux gens en général, le mouvement du "plain language" ou de la llslbllité.~ Selon F. Bowers d'ailleu ... s, "the desl ... e for "o ... dinary st ... alghtfo ... ward Engllsh" has been constant in the twentieth centu ... y and many movements fo ... plain Engl ish ln laws, ... egulatlons, and contracts have a ... isen, with va"'Ylng success. ,,3? Ce mouvement est par ailleurs

plus pertinent en Common Law qu'en DrOit CIVil étant donné la complexité plus grande dF la langue Juridique anglaise et la t ... adltion Civiliste d' accessib i 1 i té du d ... Ol t. Nous rev i endrons.

Selon ce mouvement:

"Rendre un texte lisible sur le plan juridique, c'est écrl ... e en fonction des beSOins du lecteur. Ce style [sicl découle du p ... inclpe voulant qu' 11 revient au ... édacteur de fai ... e l'effort nécessal ... e pou... fai ... e comprendre 1 es choses adéquatement au 1 ec t eur. ,,:..

y

Mais il ne faut pas non plus ~tre trop Simpliste en la matière

~ Voir notamment les ouv ... ages de R.C. DICK, Legal D ... aftlng (2e éd.>, Toronto, Ca ... swell, 1985; N. FERNBACH, La liSibilité dans la rédaction juridique, Ott.wa, Centre canadien d'information ju ... idique, 1990; Mort au charabia' Rapport du comlté mixte sur 1. liSibilité juridigue, Assoclatlon du Ba ... e.u canadien et Association des banqule ... s canadlens, 1990. :JI7 F. BOWERS, Llngulstic Aspects of Leglslatlve Exp ... esslon,

p.331.

(32)

...

(

pui1ique le droit a bien besoin de la préci1iion et de la sécurité juridique qu'apportent ses termes technlques.

D'un autre pOlnt de vue, il nOU1i nous d.von1i de mentionner le falt qu'è l'ln1itar de la langue françai1ie en général, le langage du droit devralt ~tre féminisé, en particulier celul du discours législatif. L'usage du masculin pour déslgner supposément le neutre (SI neutre 11 peut y avoir

en la matière ••• ) doit en particulier ~tre remis en question pour faire en sorte que le langag. représente mieux la réal ité sociale qui est aussI composée, et cela mime majoritairement, de femmes.

Comme le précise en effet K. de Jong:

"Use of neutral language makes women invi1iible, obscures the unequal impact of the law, and m.kes

it ev en more difficult for women to frame equality claim •• Th. practice of drafting legislation in male term • • nforces the 5uperior status of men because women must seek constant confirmation (from the "context") that they are persons for whose benefit a given law will operatlP[ ••• J".~

Comme le préci •• également E. Didier, l'état de fait1i sur la que1ition du genre est le suivant:

"LIP domaine de la rédaction législative semble itre le dernier ba.tion de la mascul inisation des genres. Des critiques s. font d. plus en plus entendre pour r.former le. r.gles de r*daction de manière • éliminar la prééminence du masculin sur le féminin. [ ••• Clet exercice pourrait permettre une étude

: f t K. d • .JaNG, "On Equal ity and Language", p.132. Voir aussi

M.E. RITCHIE, "Alice Through the Statutes", (1975) 21 McGill

b.:..:l.s..

685, E.A. DREIDGER, "Are Statutes Written for Men Only?",

(1976) 22 McGill L.J. 666, IPt M.E. RITCHIE, "The Language of Oppresluon - Alice Talks Backlt (1977) 23 McGill L.J. 535.

(33)

.-, ,

rationnelle et détaillée des prinCipes de rédaction législatlve."«)

Il faut d'autant moins badiner avec cette question que du mot précIs utilisé dans un texte de lOI peut dépendre en grande partie une Interprétation favorable ou non â la condition féminine. L'exemple par excellence que l'histOire nous fournit est bien sûr l'Interprétation donnée au mot

"personnes" dans l'article 24 de la Loi constitutionnelle de 18674

1.. I_a Cour suprime du Canada avait conclu dans cette

affaire que le mot "personnes" ne comprenait pas les femmes. Comme le rappelle K. de Jong:

"The word person lS frequently cited as an example of "neutral" 1 anguage. P"rson i s usuall y used to describe an entity wlthout referrlng to any relatlonshlp in which that entlty may be lnvolved. Vet 1 t s mean lng i s 0 ften amb IgUOUS [ ••• ].

Historically, Canadian courts have turned this amblguity to the advantage of men by refuslng to include women when lnterpreting leglslation WhlCh confers rlghts and prlvileges on persons."43

De plus, cette auteure nous apprend que, m~me SI cet exemple peut sembler d.pass., il ne l'est pas du tout, pUisque:

" ••• sexism has been codified in the law. To resolve the amblgulty that is inherent ln person, statutory provisions ••• have been enacted [whlch ••• ] assume that the word person alttlays includes men unless they are exc luded in axcept lonal si tuat ions. But confUSion still surrounds the question of whether women (and/or corporat ions) are Inc 1 uded in

Supra, note 17, no 748, p.416.

41. Voir ~ ce sujet l ' arr't Edward.. (In the Matter of a

Reference as to the Meaning of th. Word "Persons" in Section 24 of the British North Am.ric .. Act. 1867>, [1928] S.C.R. 276 •

(34)

L

partlcular pu!ces of legislatlon ... ...:.

QuoIqu'Il en SOIt, à la dIfférence des autres langages spécIalIsés, par aIlleurs, notons que le langage du droit est caractérisé par son pouvoir autorItaIre: c'est en effet le seul langage spécIalisé qUI dOlt itre obéI de façon obllgatolre par le peuple en général. Comme le préc ise E. DIdier:

Il Le 1 angage Jur 1 dl que a des marques et des

caractérIstiques qui le distInguent des autres langages à l'Intérieur d'une mime langue [ ••• l.L'effet prodult par ces spécificités est double. En pr~mier lieu, Il indique la nature Juridique du dIscours à l'audIteur et au récepteur et les avertit de prendre des précautions dans sa lecture. Il impose aUSSl un sentlment de respect et d'autorlté qui renforce l'efficaclté de l'énoncé."~ Nous allons maintenant nous pencher sur d'autres caractéristiques propres au langage du droit, cette fois dans le contexte du droit canadlen.

(35)

2. Le langage du droit au Canada "Le langage du droit au Canada est aussI original que le langage du droit en France ou en Angleterre. En fait, chaque langue a son histoire et chaque langage Juridique reflète cette histoire. Aucun langage juridique ne peut servir d'exemple ab~olu à d'autres. Le français et l'anglais Juridiques au Canada sont uniques et autonomes( ••• J. La spéCIficité du langage Juridique canadien Vient précisément de sa multipliCité. Il a été marqué par des influences Juridiques et lingUistiques multiples qui influencent encore sa forme, sa structure et son organisat Ion. 1148

La particularité essentie1le du langage du drOit canadien est donc qu'Il est multiple, pUisqu'Il est bilingue et bljurldlque. Nous pensons ICI surtout au langage du drOit fédéral, mais aussI, pour ce qUI est du bilinguisme, à celul des lois provinciales du Québec, du Manitoba, du Nouveau-Brunswick et de l'Ontario, soit les provinces qUI utilisent la CLEF ou le DCA. Avec le biJurldlsme (sur lequel nous reViendrons plus lOin), le bilingUisme const ltue donc un aspect important du drOit canadien. A ce sUJet, E. Didier note aussi que:

"Le vocabulaire Juridique a la mime histOire que celle des institutions et des Individus qUI le créent et l'emplOient. (Au Canada, I I I est bilingue et bljuridlque, pUlsqu'en·françals comme en anglaiS il se rapporte à deux familles Juridiques distinctes. Son originalité lUI a été Imprimée par la réception du droit français et du drOit anglais, ainsi que par le développement des Inst 1 tut Ions législatives et JudiCiaires locales."~

Or, toujours selon cet auteur, l'eXistence, et surtout

Id.m, no 2, p.l et 2.

Idem, no 5, p.3.

(36)

,~"----~---~-(

Iii prat1que quot1d1enne du b1l1ngu1sme canadIen, apporteraient plus1eurs nuances à la notion de "pureté" de la langue et tenderaient à faIre reconnaître l'existence d'une mIXIté bénéfique pour les deux communautés l1ngulstiques.

Ainsi, en ce qU1 concerne la relatiVIté de la not10n de "pureté" de 1 a 1 angue, un thème important dans l'ouvrage de M. DIdier, celul-c 1 préCIse que le vocabula1re Jur1dlque d'une langue est 101n d'itre composé seulement de mots de cette langue, étant donné les nombreux emprunts que se sont fa1t les unes aux autres les langues dans le passé. I l écrIt en effet que:

"Les vocabulaires JuridIques anglaIS et françaIs au Canada ont lourdement emprunté aux vocabulaIres Jur Id lques de Iii r:--rance, de l ' Angl eterre et des

~tAts-Unis, lesquels ont A leur tour emprunté largement au latin, ilU grec, à d'autres langues vlvilntes et entre eux. Parmi ces mots d'origIne "étrangere", on retrouve des mots grecs ••• , des mots d'orIgIne latine ••• , des mots ltaliens ••• Le françaIs et l'anglais ont aussi lourdement emprunté l'une à l'autre ••• Les résurgences sont aussi lmportilntes, car elles passent pour des termes étrangers alors que ce sont SImplement des mots dlspilrus du lilngage ••• ,,4t'7

Il ne faut pas oubl ier d' a i l l eurs que l ' angl ais et le français, deux langues occidentales, sont très proches culturellement, et qu'elles se sont donc influencées mutuellement. En cons*quence, i l est diffiCile de déterminer 1. degré de "pureté" d'un mot aUJourd'hui franCisé ou ilnglicisé. Comme le rappelle E. Didier en rapport avec la mise

4t7 Idem, no 82, p.SS. VOir aussi l'ouvrAge de CORNU, supra,

(37)

1

l,

.-.,.

en oeuvre de la term1nologie, donc:

"La termInologie consiste

a

trouver le mot Juste qUl eXlste ou

a

créer un nouveau mot s'lI n'en eX1ste pasJ elle ne consIste pas

a

trouver un mot plus ou mOlns "françals" ou "anglals", car chaque langue cont lent des mots "étrangers" totalement

lntégrés. ,,~

Il faut donc retenlr de ce qUl précède que la f ~. =lère entre un mot d'une langue, et un mot qUl IUl est étra ,~er, est très fraglle, selon E. Dldler. Cette front 1ère dOlt se détermlner non pas

a

l'alde d'une classlflcatlon "blanc/no1r" mals plutôt

a

l'alde d'une classlf1catlon "plus/molns", touJours selon cet auteur. M~me les dénomlnatlons de "langue françalse" et "langue anglalse" recouvrent des réal ités qUl sont de l'ordre du plus ou mOlns. Il écr1t en effet, en llens avec les 1015 consacrant des drolts Ilngulstlques, que:

"L'octroi d'un statut à une langue est la reconnalssance de son Importance. La langue déslgnée est toutefois une abstractlon: le "français" ou l ' "angla1s" de la Charte de 1982 ne sont pas décrlts de façon préc1se. Ce sont des langues standards abstra1tes qUI permettent de dés1gner sous un terme un 1que et commode des réall tés compl exes. ".,

A1nsi, on parle bIen d'un mythe lorsqu'on parle de la "pureté" de la langue françalse, en particuller de celle de Franceeo,

selon E. Didler.

Voyons maintenant ce que nous apprend également l'exlstence de nouvelles langues du drOIt.

~

Idem, no 614, p.347.

.,

Idem, no 714, p.398.

110

(38)

3. Apports des nouvelles langues du droit A propos de l'existence au Canada des nouvelles langues du drOit que sont la Common Law en Français (C.L.E.F.> et le Droit CIvil en Anglais (D.C.A.>, notons trois points Intéressants, troIs points largement démontrés dans l'ouvrage d'E. Didier. Ainsi, l'utilisation au quotidien de ces langues relatlvement récentes par rapport à la Common Law en anglais et au Drolt CIvil en français, nous apprend en premier lieu qu' 11 np. faut évidemment pas confondre les systèmes Juridiques·' et les langues.

Comme le précise davantage E. Didier:

"La relation entre une langue et un système juridique n'est pas absolue. Pour des raisons t'llstorlques, politiques et lingUistiques, il ne faut pas penser qu'un système juridique n' "appartient" qu'à une seule langue.

L'histOire du droit nous rappelle que le drOit a changé de langage: le Droit CiVil n'a pas touJours parlé français et la langue française a véhiculé d'autres systèmes Juridiques. La Common Law s'est exprimée en latin et en français pendant six siëc 1 es, plus longtemps qu' ell e n'a Jamais parlé l'anglaiS. On fait du Droit Civil en anglais AU

Québec, en LOUisiane et en I!:cosse. On fait de la Common Law pft français aujourd'hui au Canada et au

Cameroun.

La langue ___ plus souple que le drOit, qui la modèle à son image. La langue permet donc de passer d'un système juridique à un autre avec une per fect ion croissante dans le temps ••• "sa

tgalement, en deuxième lieu, ce fort intéressant ouvrage

III' Par "système Juridique", nous n'entendons pas l'ensemble

des règles du droit positif d'un I!:tat, mais bien l'un des grands systèmes Juridiques occidentaux contemporains, la Common Law ou le Droit Civil.

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nous apprend qU'lI ne faut pas non plus confondre culture et droit. Comme l'expllclte en effet E. Dldler:

"[ Il ne faut pas par exempl e présumer) que 1 es canadlens-frança1s ne peuvent ~tre "eux-m~mes" qu'en Droit ClV1I. [Cette hypothèseJ peut ~tre crltlquée pour deux ralsons: en prem1er 11eu, elle méconnaît la nature du dr01t du Québec, qUl n'est Clvlliste que dans le droit prlvé ••• En second lieu, nombre de francophones Vlvent dans des prov1nces de Common Law sans pour autant cesser d' ~tre francophones. La rel at ion ent re 1 e droi t , l a 1 angue et 1 a cul ture n'est pas absolue. Elle est de l'ordre du "plus ou mOlns" et non pas du "OU1 ou non".s::.

Comme pour la question de la "pureté" du vocabula1re juridlque, donc, 11 faut 1Cl ~tre nuancé. Cet auteur dénonce en conséquence l'''attitude frileuse et méflante à l'égard de

la faculté d'adaptation de la langue à de nouveaux contextes soc lo-jur id iques ,,!M.

Tro1slèmement, l'existence concrète de la CLEF et du DCA rappelle l ' 1 mportance fondamentale de la traduction léglslat lve au Canada. Ces nouvelles langues sont en effet des langues de traduction. Comme le souligne d'alilpurs ~.

Groffier, 11 existe un lien 1nt1me unlssant la rédactlon des lois, leur interprét at lon et leur traduct 1 on", cel a en particu11er dans le contexte canadien.

Finalement, comme E. Dld1er nous le falt S1 bien réallser, les relations tradit10nnelles entre le drolt et la

Idem, no 407, p.237.

Idem.

Ë. GROFFIER, "La juge P1geon et la lanQue du drolt", p.218.

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langue sont en train d'*clater, étant donné qu'aujourd'hui au C.nada, plusieurs langues expriment le m'me système Juridique et pl uSleurs systemes Jur idiques s' expr iment dans une mime langue." L'existence au Canada de minorit.s francophones et anglophone enrichit largement en con •• quence nos connaissances sur le langage du droi t. Certes, le Canada est particulièrement riche du point de vue jurilingulBtique.

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Pour conclure cette première section, notons en rêsumê trois prlncipau~ points en rapport avec les aspects linguistiques du discours lêgislatif. Premièrement, les langues et les systèmes de droit ne doivent pas .tre confondus. L'apport des nouvelles langues du drOIt que sont la CLEF et le DCA confirme qu'Il n'y a pas d'absolus en la matière. Les francophones du Canada peuvent alnSl .tre eux-mimes non seulement en DrOit CiVil malS aussI en Common Law.

Deu~ièmement, le langage du drOIt, m~me s'li est spécialisê et donc hermétique, doit aussI .tre accessible à

tous pour .tre obêi. En conséquence, 11 dOl t aussI ~tre

compris par tous, c'est-.·-dire .tre clair pour le plus de gens possible. Ces contradictions Inhérentes au langage du drolt ont étê résumées par E. Didier qui écrit encore que:

"Selon les recherches sur la lisibilité des textes législatifs et autr.~ textes juridiques, la clef de la compréhension est l ' adAptat ion aux beSOins et aux perspec t ives du lee: teur moyen. Or, 1 es tex tes jur id iques VI sent duux publ ics opposés par 1 eurs besoins et leurs qualifications: les spêc1alistes et les non-spéCialistes. Le. fonctions des textes juridiques sont au~.i divergentesl la fonction d'in format ion et la fonct ion de résol ut Ion des probl èmes."1I?'

Enfin, cette êtude Jurillngulstlque nous a aussi appris qu' il faut remettre en quest Ion la not ion de "pureté" des langues étant donné que celles-ci ont toutes fait divers emprunts l ' u n e . l'aut,.e. Cette notion est al.nsi fort relative. Soulignons aus'.i la relativIté de la l'lotion de

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32

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neutral ité du langage juridique et m~me de la langue française

en rapport avec la nécessIté de féminisation de ce langage et de cette langue.

En terml nant, cette étude sommai re de 1 a ';ur i l inguist ique nous. beaucoup apport., comme elle peut aussi apporter sans doute à tous les Juristes. I l est vrai d'affirmer que la Jurilingulstique canad1enne a devant elle un brillant aven 1 r - , en part icul ier gr3ce à 1 a richesse du droit au CanAda qUI, tout en étant bi 1 ingue, est bijur idique comme nous allons maintenant pouvoIr le mentionner davantage.

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I I - Droit, linguistique et . . thode ca.parAtive C'est Ici que nous allons introduire une dimension jurid1que fondamentale ~ notre sUJet: le droit comparé. Nous insisterons en particul1er sur les 11ens ul,issant les trois domaines du saV01r correspondant aux ét1quettes sUivantes: le droit, la lingUistique et la méthode comparative.

F"ormulé d'une autre manière, ce compte-rendu portera su.- les affinités entre, d'une part, le droit . t le drolt comparé, d'autre part, la linguistique et le droit comparé, et enfin, la stylistique comparée et le droit comparé. Alors que les relations particulières eXistant entre le droit et la langue ont déJ~ été examinées précédemment, nous Insisterons ici sur ce que le droit comparé peut apporter non seulement au droit et ~ la l1nguistlque, mais aussi. cette partie de

la linguistique qu'est la stylistique, un autre domaine du savoir en lui-m~me.

En fait, cette mise au point préalable s'avère nécessaire puisque les connaissances apportées par ces trois domaines du savoir seront imbr1quées dans notre travail au pOint d'une fusion entre elles. Bien entendu, le but de cette combinaison de connaissances est d'éclairer maximalement notre sUJet comme seule peut le faire la plurldisclplinarit •• La r*daction des lois dans plusieurs systèmes jurid1ques implique de toute façon une pluralité de diSCiplines, le drOit, la linguistique et la stylistique, de m'me qu'une méthode, celle de la comparaison, comme nous allons d.s maintenant le démontrer.

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A) Droit et droit comparé

Tout d'abord, le droit, comme on le sait, est un "ensemble de règles applicables à la vIe en société et sanctionnées par la pUIssance publique"" (droit objectif>. Chaque soc iété organ lsée en Ittat ou gouvernement autonome possède aInsI des règles de droit qUl lui sont partIculières. La comparaIson est ut1l1sée en drOIt lorsqu'on veut comparer les règles de drOIt de certaines sociétés entre elles ou les droits natIonaux entre eux.

En résumé, ce qu'on appelle communément aujourd'hui, "droit comparé" est né de la nationalisatIon des règles de drolt au niveau de chaque pays, phénomène datant surtout du siècle dernier. Selon l'ouvrage de Tancelin et Shelton,

"l' 19norance réciproque qui s'est installée [au XIXe siècle] entre les Juristes des différentes nationalItés a nécessité un effort particulIer de red*couverte au XXe SIècle. C'est alors qu'on a inventé l'expression droit cOliparé. " . 0

..

Comme le préCIse l'ouvrage du regretté Constantinesco: " •.. le terme Compar.tiv. L • .., et droit comp.r~, bien que largement accepté dans les terminologies ,Jur id lques anglo-saxonnes et 1 at Ines est douteux quant " sa signification. Il est évident que le

drOIt comp.r~ ne peut impliquer un corps de r*gles de drOl t appl icabl es. Il ne peut dés igner qu'une

CENTRE DE RECHERCHE EN DROIT PRIV~ ET COMPAR~ DU QU~BEC (ci-après désigné comme le Centre>, Dictionnaire de droit privé, "droit", tU, p.72. Voir aussi infr., note 60, p.12 et 13.

M. TANCELIN et D. SHELTON, Des Institutions - Branches et sources du droit, p.128.

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méthode ou une sc ience. "."

En cette f in de XXe sièc le~ cependant, le débat est toujours ouvert sur la question de savoir si le drolt comparé est simplement l'application de la méthode comparative au droit.a, s ' l i est véritablement une science, avec son apport propre-=-, ou s' 11 est les deux à la fois-. Cette quest ion épist.mologlque non-réglée, m~me si elle est primordiale et de base, nUlt considérablement ~ l'évolution du droit comparé. Selon l'ouvrage de Constantlnesco:

... le droit comparé n'est pa'5 encore arrivé au stade d'une existence non contestée et unanimement acceptée. Certains problèmes essentlels concernant son objet, son fondement, son domalne d'application, ses buts ou 'sa méthode ne sont pas encore éclaircIs. Sur de nombreux points et en part icul ier sur 1. conception de base de cette discipllne, des désaccords fondamentaux subsistent C ••• l.

11-Santi que nClus soyons prite à trancher ce débat récurrent, précisons que par "méthode comparatlve", i l faut comprendre la méthode qui procède par comparaison, c'est-à-dire qui envisage ensemble deux ou plusieurs objets de pensée pour en

... L.-J. CONSTANTINESCO, Traité de droit comparé, Tome 1 -Introduction au droit comparé, no 2, p. 6, note 1.

aa Tel que l'ont soutenu notamment M. Tancelln (VOlr supra, note 60, idE1m), R. David et R. Rodiere •

.:a Comme l'a soutenu notamment Lévy-Ullmann .elon Constantinefaco (supra, note 61, no 74, p.193).

.... Comme l'a soutenu notamment Constantinesco qui _tait aussi d'avis que la méthode comparative et la science comparative .e compl.tent (supra, note 61, no 81, p.211).

Figure

TABLE  DES  MATIERES ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••  1  1

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