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ARTheque - STEF - ENS Cachan | La situation d'accompagnement scientifique à l'école primaire, une « nouvelle donne » entre les partenaires des interactions

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A. GIORDAN, J.-L. MARTINAND et D. RAICHVARG, Actes JIES XXV, 2003

LA SITUATION D’ACCOMPAGNEMENT SCIENTIFIQUE

A L’ECOLE PRIMAIRE, UNE « NOUVELLE DONNE »

ENTRE LES PARTENAIRES DES INTERACTIONS

Marie-Odile LAFOSSE-MARIN

Espace des Sciences de l’ESPCI, Université Paris V – Sorbonne

MOTS-CLES : ACCOMPAGNEMENT SCIENTIFIQUE – INTERACTIONS LANGAGIERES – CO-ELABORATION – CO-MEDIATION – OFFRE DE SAVOIR TEMOIGNEE ESPACE MEDIATIONNEL – « PLACES » POUR APPRENDRE

RÉSUMÉ : Nous présenterons les spécificités de la situation pédagogique suscitée par la présence d’un accompagnateur scientifique dans une classe. Nous étudierons les rôles de co-élaboration et de co-guidage d’une séance de science par l’enseignant et l’accompagnateur dans la complémentarité de leurs compétences et de leurs ignorances. Nous tenterons une modélisation des contextes interactionnels. L’étude de l’enregistrement d’une séance particulière servira à tester nos hypothèses. Elle met en évidence l’ouverture de l’espace médiationnel opéré dans ce contexte.

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1. INTRODUCTION

L’objet de notre étude concerne l’accompagnement scientifique « en présentiel » à l’école primaire, c’est à dire la co-animation des séances de sciences par des binômes formés d’un professeur des écoles et d’un scientifique.

Cette situation pédagogique est innovante de plusieurs façons : innovante par la présence d’un tiers dans la classe. Ce tiers est le plus souvent un jeune scientifique, lui-même encore élève (étudiant). Celui-ci est d’une génération intermédiaire entre le maître et l’élève. Il a un rapport au savoir scientifique différent à la fois de celui de l’enseignant et de celui des élèves. Son statut dans l’école est particulier : il n’est ni enseignant, ni élève, il est accompagnateur scientifique. Son rôle n’est pas de faire une « intervention » à la place de l’enseignant, mais de collaborer avec lui. Sa collaboration n’est pas ponctuelle, elle s’inscrit dans la durée (sur plusieurs mois). Cet accompagnement permet la mise en relation d’une classe avec le monde extérieur, à travers un partenariat avec une institution scientifique. L’enseignant n’est plus le seul référent des connaissances. Il donne une place et un rôle à un autre dont les savoirs et les ignorances ne sont pas les mêmes que les siens.

Si le constructivisme et le cognitivisme peuvent servir de point d’appui à l’étude des apprentissages, l’interactionnisme social est le courant le plus porteur pour analyser ce qui se joue dans les interactions multiformes, dyadiques et triadiques entre maître, accompagnateur et élèves, lesquelles créent une situation pédagogique singulière.

2. L’ACCOMPAGNEMENT SCIENTIFIQUE

L’accompagnement scientifique n’est pas d’abord assistance, soutien ou conseil pour apprendre les sciences comme pourrait le laisser entendre le terme d’« accompagnement ». Il peut être désiré par l’enseignant non scientifique comme une aide pour surmonter son appréhension à les enseigner mais il est plus que cela. Il se fait dans la co-élaboration, la co-médiation d’une séance de science où l’enseignant garde la maîtrise pédagogique du déroulement de la séance tandis que l’accompagnateur a un rôle de guidage de la démarche scientifique, dans le dialogue et l’interaction avec l’enseignant. Ensemble, ils identifient les enjeux et les objectifs et se mettent d’accord sur le déroulement des activités. Ce fonctionnement dans la complémentarité où ils s’aventurent ensemble n’est pas immédiat. En effet, il existe toujours la tentation, pour un enseignant qui craint d’enseigner les sciences, de passer les rênes à celui qui sait, et, pour un scientifique, celle de les prendre pour transmettre ses connaissances à sa façon. L’apport pédagogique sera dépendant de leur

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interaction car c’est la situation interactionnelle elle-même qui permet aux élèves de trouver et prendre de nouvelles places pour apprendre.

3. MODÉLISATION DES INTERACTIONS

La présence dans la classe d’un scientifique dont le rôle est différent et complémentaire de celui du maître crée une « nouvelle donne » dans ce qui se joue entre les partenaires des interactions. Le triangle pédagogique : < enseignant – apprenant – savoir >, se transforme en une sorte de pyramide dont la base est constituée par les interactions entre maître, accompagnateur et élèves, interactions multiples et complexes, chacun des interactants ayant un rapport au savoir différent. La situation duelle traditionnelle correspondant à une dissymétrie de compétence entre professeur expert et élèves novices n’est plus. La situation triadique multiforme peut être modélisée (figures 1a et 1b). Ces schémas traduisent des modèles de communication qui coexistent mais apparaissent tour à tour sur le devant de la scène suivant le contexte interactionnel.

En accusant le trait concernant le rapport au savoir scientifique dans le cas de maîtres qui n’ont pas fait d’études en sciences (cas le plus fréquent), on peut dire que maître et élèves se trouvent, en quelque sorte, partager le statut de « novice ». L’accompagnateur est alors l’expert ou la personne ressource pour eux, même s’il est étudiant en sciences et donc encore élève dans ce domaine (Fig. 1a). Concernant la pédagogie et la construction des connaissances dans l’interaction, c’est le maître qui est expert, il est le régulateur des échanges entre les locuteurs-acteurs et avec l’environnement, régulateur de la démarche (Fig. 1b).

Un autre concept de référence a été retenu pour caractériser la situation pédagogique : celui d’observation. En effet, chacun des interactants de la séance est observateur des actions et interactions langagières qui ont lieu entre les autres acteurs-locuteurs (Figure 2a, 2b et 2c). Chacun peut observer et/ou interagir.

= novices Accompagnateur Maître = expert, régulateur des échanges Elèves Accompagnateur = expert, personne ressource

Maître Elève = novices

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(2a) (2b)

(2c)

Le maître observe les élèves dans leurs interventions, leur expérimentation ; il suit l’évolution de leur langage au cours des interactions. Il a la possibilité de prendre cette posture et ce temps d’analyse de leur comportement et de leur démarche originale de construction de savoir (Fig. 2a). L’accompagnateur est observateur du bon déroulement de la séance et des interactions entre les élèves et le maître, ce qui lui permet d’ajuster ses interventions pour guider la démarche scientifique et favoriser une certaine dynamique de classe autonome en dehors de lui (Fig. 2b).

Les élèves observent aussi ce qui se passe entre l’accompagnateur et leur maître en train d’apprendre les sciences. Ils le voient se risquer dans un questionnement, des tâtonnements, une expérimentation, voire des échecs ou des erreurs. Pour les élèves, être témoins plus qu’observateurs, signifie être concernés par l’événement, avoir la possibilité de s’y engager personnellement. Il leur devient possible d’imaginer une démarche dans laquelle s’aventurer (Fig. 2c). Cette dernière situation d’observation a un pouvoir de mobilisation des élèves important et constitue peut-être l’une des originalités les plus pertinentes de l’accompagnement scientifique. Elle rejoint la question de J. Beillerot : « L’idée du savoir est déterminée à partir d’une situation de classe. Il n’est jusqu’au mode de l’offre qui importe : est-elle injonctive ou témoignée… ? »

4. ANALYSE D’UNE SEANCE PARTICULIERE D’ENSEIGNEMENT DES SCIENCES Les interactions langagières d’une séance de science particulière ont été enregistrées puis analysées. Cette analyse visait à confronter notre modélisation de l’accompagnement scientifique avec des pratiques effectives. Elle a été suscitée par trois hypothèses déduites de cette modélisation.

Maître =

observateur

Accompagnateur

Élèves Maître Elèves

Accompagnateur = observateur Elèves = observateurs et « témoins » Accompagnateur = expert Maître = novice

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 La situation pédagogique dans laquelle élèves, maître et accompagnateur peuvent interagir, chacun ayant un rapport au savoir scientifique et un rôle différents dans la classe, favorise les interventions des élèves dans les interactions.

 Parce que les élèves sont à la fois observateurs mais aussi témoins de ce qui se joue entre les acteurs / locuteurs, elle a un effet positif sur leur motivation / mobilisation.

 Ils peuvent trouver et prendre de nouvelles « places » dans un espace médiationnel agrandi qui autorise de nouvelles postures pour apprendre.

Ces hypothèses ont été testées selon plusieurs axes méthodologiques d’analyse du corpus. Celui-ci a été découpé en épisodes, séquences et échanges. Une approche structurale des séquences s’est attachée à analyser les différents échanges à deux ou à trois locuteurs, leur nature et leur succession. La complexité de ces échanges langagiers et de leur enchaînement, l’un provoquant l’autre, un dialogue entre deux interlocuteurs s’ouvrant souvent sur un échange à trois, l’association de plusieurs modes d’échange dans une même séquence, sont autant d’indices du développement de l’espace instauré par ce contexte interactionnel. Les actes de langage des entrées et des sorties des séquences ont été analysés. Leur pluralité, leur répartition entre les locuteurs ainsi que leurs combinaisons semblent stimulées par le nombre et le partage des rôles des interactants. L’alternance des initiateurs des séquences, intégrant les interventions imprévues des élèves, n’empêche pas la structuration et la cohérence du déroulement de la séance, une logique interactionnelle coexistant avec une logique des tâches. La variété des initiatives des élèves et des actes de langages qu’ils utilisent reflète la diversité de leurs postures. La possibilité, pour l’enseignant de s’aventurer, accompagné, dans une démarche scientifique et pour les élèves d’en être témoins semble favoriser la mobilisation des élèves et facilite leur enrôlement dans les activités. L’étude des assertifs de sortie des séquences a rendu plus explicite les rapports au savoir scientifique de l’enseignant et de l’accompagnateur ainsi que la complémentarité de leurs apports. La mise en perspective de l’ensemble de ces approches a eu pour résultat de rendre appréciable l’extension de l’espace médiationnel suscité par la situation d’accompagnement scientifique. (Pour les détails de cette étude, voir le numéro de la Revue ASTER intitulé « Interactions langagières », à paraître).

5. CONCLUSION

L’analyse des interactions langagières de cette séance confirme que la élaboration et la co-animation d’une séance de sciences par un binôme constitué d’un enseignant qui n’est pas scientifique et d’un accompagnateur qui l’est, est non seulement une carte jouable mais constitue une situation riche pour les élèves qui y participent et sont témoins de leurs échanges. Le partage des rôles entre le maître et l’accompagnateur n’est cependant ni évident, ni immédiat. Les

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représentations que chacun se fait de son rôle et de celui de l’autre, ainsi que leurs attentes, ne convergent pas nécessairement ; il peut donc y avoir conflit, nécessité d'explicitation et d'effort d'ajustement. Mais leur dialogue et leur collaboration est la condition de la création d’une situation pédagogique nouvelle par l’ouverture de l’espace médiationnel qu’elle provoque.

Les résultats de cette étude de cas restent trop partiels pour prouver pleinement les hypothèses posées à partir de la modélisation du contexte interactionnel.

Cette situation pédagogique originale reste particulière car elle ne peut être généralisée dans toutes les classes primaires. Elle pourrait cependant être développée par la mobilisation d’un plus grand nombre de scientifiques, d’étudiants d’université et d’écoles d’ingénieurs en particulier. Elle se situe dans un contexte de partenariat entre scientifiques et enseignants se sentant co-responsables, chacun à leur façon, de la rénovation de l’enseignement des sciences à l’école et prêts à en relever le défi dans un certain partage de leurs savoirs.

BIBLIOGRAPHIE

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