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Partie I : Evaluation et modélisation de l’aléa tsunami au Maroc

Chapitre 3 e : Indices sédimentaires : Approche géomorphologique

3.3. Témoignages sédimentaires de tsunamis sur le littoral atlantique marocain

3.3.1. Les washovers du complexe lagunaire Oulidia –Sidi Moussa

3.1.1.1. Le washover de Oualidia

Les premiers travaux sur les dépôts de tsunami ont été menés par l’équipe du Laboratoire de Géosciences Marines et Sciences du Sol d’El Jadida en collaboration avec le centre de géologie de Lisbonne. Ces travaux ont été poursuivis dans le cadre du projet MAREMOTI. Ils concernent un épandage sableux type ‘‘washover fan’’ déposé à environ 900 m au Nord de la passe septentrionale de la lagune de Oualidia à environ 75km au sud d’El Jadida (Figure 16). Notre objectif est de caractériser ce Washover, déterminer les mécanismes de sa mise en place et sa relation avec une tempête exceptionnelle ou un tsunami.

Il s’agit d’un dépôt très meuble composé de sables moyens à grossiers, riche en bioclastes d’environ 200 m de large pour 120 à 130 m de profondeur en direction de la lagune et parsemé par des galets de tailles différentes. Une estimation des volumes mobilisés pourraient être de l’ordre de 40.000 à 70.000 m3 selon l’épaisseur du prisme sableux (épais de 1 à 2 mètres). Ce dépôt sableux, remobilisé depuis la plage, a vraisemblablement franchit l’ancien cordon dunaire.

Deux carottes (washC1 et washC2) et une tranchée de 2 mètres de profondeur ont été effectuées et une vingtaine d’échantillons de sédiments de surface et de la plage ont été prélevés afin de caractériser toute l’étendue du washover (Figure 17).

Les sondages ont été réalisés avec un carottier à succion de type Van der Staay jusqu’à 2m de profondeur et une tarière équipée d'une tête standard de type Edelman et des rallonges de 1m pour chacune permettant d'échantillonner jusqu'à 5 m de profondeur si besoin et possibilité.

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Figure 17. Localisation des carottages et de la tranchée effectuées sur le washover de Oualidia.

La carotte sédimentaire washC1 présentée ici a été prélevée au niveau de la partie la plus distale du washover, d’une longueur de 190 cm. L’analyse sédimentologique et micropaléontologique (foraminifères) a permet de distinguer 3 unités lithostratigraphiques (Figure 18) :

L'unité inférieure A (89 - 190cm), Cette unité est composée de sable moyen à grossier, carbonaté (CaCO3> 80%), peu vaseux, modérément à mal trié, avec une faible teneur en matière organique (M.O. <3%). Elle est dominée par les espèces marines Cibicides lobatulus, Elphidium crispum et Beccarii ammoniac mais moins abondamment. Ce sont des espèces robustes capables de résister à de longues distances de transport (Leorri et al, 2010).

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La sous-unité BI (60 - 89cm) constituée de sable vaseux à la base qui devient vase sableuse vers le sommet, (le sable est fin et bien trié). La teneur des CaCO3 est inférieure à celle de l’unité A (30-60%), par contre la teneur en MO a augmenté légèrement (3-4%). Dans cette sous-unité on trouve les mêmes espèces identifiées dans l’unité A (C. lobatulus, A. Beccarii, et E. Crispum) avec la présence de Haynesina Germanica, espèce typique d'eau saumâtre.

La sous-unité BII (37 - 60cm) composée de vase organique (7-10% OM), avec de faibles teneurs en CaCO3 (6-12%) et en sable. Elle est fortement dominée par des espèces agglutinantes, principalement Jadammina macrescens, bien que la présence de C. Lobatulus est toujours significative (Leorri et al., 2010).

L’unité supérieure C (0 - 37cm), Cette unité se compose de sable moyen à grossier, carbonaté (CaCO3> 85%), bien trié, sans MO. L'assemblage des foraminifères est dominé par C. lobatulus, A. Beccarii et E. Crispum, et moins abondamment des miliolidès (comme subrotunda Miliolinella et Massilina spp.) (Leorri et al., 2010).

La plage actuelle est constituée de sable similaire à celui de l’unité C, sable moyen, propre et bien trié avec une teneur de CaCO3 supérieure à 90%. Les foraminifères présents sont E. crispum C. lobatulus et A. beccarii, avec une faible abondance de subrotunda Miliolinella.

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Figure 18. Variation verticale des paramètres de texture, composition et unités lithostratigraphiques de la carotte Wash C1.

Ces résultats montrent que les sédiments accumulés dans la partie ouest de la lagune de Oualidia représente le confinement et l’envasement progressifs de la lagune (Annexe 1). La base de la carotte (unité A) témoigne d’un milieu de dépôt de forte énergie connecté à la mer ouverte, peut-être correspondant à un chenal subtidal ou à un replat sableux intertidal, sous une influence marine complète.

L’unité B indique un changement net du milieu de dépôt avec des conditions plus restrictives et moins énergétiques, ce qui peut représenter une évolution vers le développement d’un replat boueux peu profond, ce qui implique un processus d’envasement généralisé de la lagune, les sédiments d’origine continentale redistribués par les courants de marée dans un environnement confiné.

Ce dépôt de faible énergie a été brusquement interrompu par le dépôt du washover (Unité C) lors d’un événement de haute énergie.

La deuxième carotte washC2 d’une longueur de 260 cm, a été effectuée dans la partie moyenne de la structure, elle représente une lithostratigraphie similaire à celle du washC1.

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La tranchée a été creusée à l’extrémité ouest du washover, elle montre une séquence de 200

cm de sable grossier au sommet et moyen vers la base, coquillé (très coquillé entre 120 et 140 cm), avec la présence de petits galets à 80 cm et 150cm de profondeur.

L’analyse des accumulations de part et d’autre de la lagune de Oualidia a également mis en évidence l’existence de dépôt de galets de tailles variées, plaqués aux niveaux des falaises vives du cordon (Figure 19). Un grand nombre de ces galets sont sub-arrondis ou peu anguleux et témoignent d'une érosion par des houles. Une origine fluviale peut être totalement écartée, puisque notre site est totalement déconnecté de tout système de drainage. Une origine éolienne est également impossible, vu leur taille qui va jusqu'à 1 m.

Ces galets carbonatés qui ne peuvent provenir d’aucunes formations géologiques continentales et/ou littorales pourraient être issus de l’érosion des affleurements rocheux jurassico- crétacés de la plate forme adjacente (Cirac et al., 1979) et seraient mis en place lors d’un événement exceptionnel (tempête ou tsunami).

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