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3 CorFish : Mise en évidence scalable pour vues multiples

3.1 Problématique et existant

3.1.1 Vues composées de vues

On dit que des vues sont distinctes si elles renseignent sur différents aspects des données, par exemple en présentant une information différente ou en soulignant différents aspects de

la même information [6]. Les techniques de visualisation pour données multi-dimensionnelles

elles-mêmes peuvent être considérées comme constituées de multiples sous-vues correspondant

à des représentations des sous-espaces des données. L’interaction debrossage et lienpar exemple

a été initialement conçue pour les matrices de nuages de points [9]. Les coordonnées parallèles

et les matrices de nuages de points, sont des exemples de représentations décomposables en

sous-vues, une par sous-espace 2D des données2qui sont les espaces séparant chaque paire

d’axes pour les coordonnées parallèles et les éléments de la matrice pour les matrices de nuages de

points. La figure3.2présente un exemple de vues liées, incluant une matrice de nuages de points

et des coordonnées parallèles, où un ensemble d’entités, sélectionné par brossage sur un nuage de points, est mis en surbrillance en bleu sur les autres vues. La nature composée des matrices de nuages de points et des coordonnées parallèles les expose aux deux problématiques majeures des

vues liées : (1) le maintien de cohérence [6,135] dans l’encodage des vues, notamment au cours des

interactions, et (2) l’encombrement visueldû à la multiplicité des vues et à la quantité limitée

d’espace écran.

Pour les coordonnées parallèles, de précédent travaux proposent des interactions de défor-mations spatiales pour atténuer l’encombrement visuel. Certaines interactions agrandissent

localement une zone pointée par le curseur : sur les axes [57], entre les axes [57] ou sur l’ensemble

de la vue (cf. figure3.3, page25). Sur ces exemples, la déformation est appliquée localement pour

mettre en évidence un sous-ensemble des entités et n’est pas propagée aux autres sous-vues.

1. http://www.cs.ou.edu/~weaver/improvise/examples/census

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(a) Déformation verticale sur un axe [57]. (b) Déformation radiale [57]. (c) Lentille fisheye dans l’espace image (extrait de [98]).

Figure 3.3 – Exemples de lentilles de déformation sur les coordonnées parallèles.

3.1.2 Déformation spatiale et vues fisheye

Les termes de vues fisheye et de degré d’intérêt (doi ouDOI) tirent leur origine des travaux de

Furnas [63] qui s’intéresse initialement au filtrage dynamique pour présenter, sur une même

vue, une partie des données de manière détaillée et une vue d’ensemble du reste de manière moins détaillée. Dans sa définition, le degré d’intérêt d’un élément est une fonction DOI(x, y) =

API(x) – D(x, y) où API fournit un niveau d’intérêt intrinsèque, D est une fonction de distance,

xla position d’un élément et y la position du point de focus. Le point de focus peut être unique

(comme pour l’utilisation d’une lentille suivant le curseur de la souris) ou bien multiple. Cette fonction propose l’idée de degré d’intérêt, c’est-à-dire une définition de l’intérêt non plus binaire (sélectionné ou non), mais à plusieurs niveaux, voire par des valeurs dans un domaine continu.

Cette idée est reprise dans la définition de Hauser [70] (DOI ∈ [0, 1]) et dans le modèle en

trois ensembles F, M et B de Hall et al. [69] où F et B désignent respectivement l’ensemble des

éléments de plus grand et de plus faible intérêt alors que M regroupe des éléments ayant des niveaux d’intérêt intermédiaires.

Le terme de vues fisheye est aussi utilisé pour désigner des techniques utilisant la

déforma-tion spatialeplutôt que le filtrage dynamique pour intégrer une zone de focus dans une zone de contexte. De manière générale, la déformation spatiale peut pallier les deux problèmes liés : la restriction de l’espace écran en réduisant localement l’encombrement visuel, et la densité

d’infor-mation en guidant l’attention de l’utilisateur vers une zone spécifique rendue saillante [92,101].

Les déformations spatiales peuvent avoir des caractéristiques variées [29,123]. Elles peuvent par

exemple n’affecter que la position des éléments visuels (déplacement ou déformation discrète [123])

ou conjointement affecter leur position et leur forme (déplacement et agrandissement ou

déforma-tion continue[123]). Certaines méthodes de déformation sont générales et utilisent des fonctions

de déformations 2D ou 1D [7] ou des manipulations de projection de vue 3D [28]. Les modèles

EPF (Elastic Presentation Framework) [30] et magnification fields [91] définissent les déformations

spatiales par des cartes de hauteur et le modèle déformation-agrandissement de Leung et Apperley

[101] décrit plusieurs déformations 1D par des fonctions de déformation continues.

D’autres méthodes sont des interactions dédiées à une représentation spécifique comme

la navigation dans les diagrammes nœuds-liens [99] et les tableaux [136], ou la réduction de

l’encombrement visuel dans les nuages de points [93] et les coordonnées parallèles [125,57]. Les

techniques multi-foci agrandissent plusieurs zones à la fois pour les comparer [144,56,157]. Dans

les cas où les zones de focus se chevauchent, Keahey et Robertson [92] propose trois approches

pour composer les déformations : l’application séquentielle, la segmentation et l’interpolation.

3.1.3 Mise en évidence coordonnée

Les interactions coordonnées entre plusieurs vues sont construites à partir d’une fonction de

couplagespécifiant la correspondance d’entités entre vues, d’une fonction de propagation spécifiant

les conditions de coordinations (sélection ou navigation [126]) et enfin d’une fonction de rendu

dictant les changements visuels à propager [6]. Koytek et al. [97] décomposent la coordination

Figure 3.4 – Trois types d’interaction de sélection coordonnée : de gauche à droite, la surbrillance (ici par la

teinte), la superposition (ici par des liens visuels), et la déformation spatiale.

(a) couleur (teinte) (b) netteté (c) taille (d) halo (e) opacité (f) forme

Figure 3.5 – Exemples de surbrillance (altération d’une variable visuelle non-spatiale) pour mettre en évidence une entité (d’après Hall et al. [69]).

et la cible (les éléments qui sont en relation avec la source) et proposent une catégorisation des

techniques debrossage et lienselon cette décomposition.

Une difficulté importante de la conception d’interactions coordonnées et générique est la difficulté à composer avec les différences entres les vues. D’une part, elles peuvent représenter différentes parties ou différentes granularités des données (entité ou agrégation d’entités) ce qui rend le couplage et donc la propagation complexe.

Figure 3.6: Conflit de variable visuelle pendant la sur-brillance. L’effet de mise en évidence de la surbrillance en rouge (à droite) peut être diminué par l’utili-sation concurrente de la coloration pour encoder un attribut.

D’autre part, les différentes formes de vues rendent la dernière étape de rendu également complexe dû aux conflits potentiels d’usage de variable visuelle pour la sélection. Pour faciliter

la compréhension des systèmes de vues liées, Baldonado et al. [6] préconise de maintenir une

uniformité dans les états et les interactions de toutes les vues. Ainsi ces vues doivent, autant que possible, présenter les mêmes potentialités d’interaction (cohérence des interactions) et propager les changements d’une vue à toutes les vues présentant les mêmes données (cohérence des états).

On distingue trois approches pour la mise en évidence d’entités dans des vues liées, résumées

sur la figure3.4et dont les travaux correspondants sont décrits dans ce qui suit.

Surbrill ance La surbrillance est l’interaction la plus commune debrossage et lien. Elle

consiste à encoder les valeurs d’intérêt avec une variable visuelle non-spatiale telle que lateinte[9,

46], la forme, l’opacité, etc (cf. figure3.5). L’effet de mise en évidence peut être en conflit ou être

rendu inefficace lorsque cette variable visuelle est aussi utilisée pour l’encodage d’un attribut des

données, comme illustré sur la figure3.6. La multiplicité des vues peut mener à une

multipli-cation des variables visuelles utilisées et donc rendre difficile l’isolation d’une variable visuelle conjointement disponible sur toutes les vues.

S u p e r p o s it i o n La superposition est la dernière catégorie et regroupe les techniques utilisant des éléments graphiques supplémentaires pour concentrer l’attention de l’utilisateur, apporter du détail ou faciliter l’identification des entités identiques sur les vues liées. Les liens visuels

(visual links ou leader lines) en sont un premier exemple, illustré sur la figure3.4, qui matérialise

les connexions sémantiques entre entités visuelles du focus par des liens colorés. Pour limiter

l’encombrement dû à ces liens, Steinberger et al. [151] utilisent un faisceautage (bundling) qui

limitent le passage des liens sur les éléments saillants et sur les zones de couleur similaire. Les

lentilles liées sont une seconde approche dont un exemple est l’extension de Bring&Go [120]

proposée par Dubois et al. [49] qui synchronise des lentilles centrées sur une entité entre

plu-sieurs diagrammes nœuds-liens. Les approches par superposition ont l’avantage d’être plus indépendantes des techniques de visualisation utilisées que les deux autres catégories (pour les liens visuels), et donc directement compatibles avec des vues multiformes. Elles sont toutefois

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(a) Vue non déformée. (b) Vue déformée.

Figure 3.7 – Comparaison de deux arbres phylogénétiques avec TreeJuxtaposer [122], les zones en sur-brillance marquent les différences entre ces deux arbres et sont mises en avant par la déforma-tion.

peu adaptées aux sélections de grands nombres d’entités puisque l’ajout d’éléments graphiques supplémentaires tend à créer de l’encombrement visuel.

Déformation spatiale Pour la représentation de données hiérarchiques, Munzner

et al. [122] et Graham et Kennedy [67] ont montré l’efficacité de l’utilisation de techniques de

déformation spatialepour visualiser et comparer de grandes hiérarchies dont les entités seraient au-trement représentées trop petites pour être manipulées ou distinguées. Les premiers utilisent une interaction de déformation appelée AccordionDrawing liant deux vues d’arbres phylogénétiques

différents (cf. figure3.7).

Des travaux existants ont exploré l’utilisation de la déformation spatiale interactive au sein de vues uniques pour différentes représentations ainsi qu’entre des représentations hiérarchiques liées, mais pas dans le contexte plus général de vues multiformes. Pourtant, comme la transpa-rence ou la netteté, la déformation spatiale permet d’implémenter un filtrage visuel continu des éléments du contexte au profit de ceux du focus, ce qui en fait une technique potentiellement utile pour limiter le problème d’encombrement visuel des vues multiples et ainsi améliorer la scalabilité visuelle des interactions de mise en évidence d’entités.