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REPONSES DE DEFENSE

1. Voies de signalisation hormonales classiques impliquées dans les réponses de défense

L’acide salicylique (SA), l’acide jasmonique (JA) et l’éthylène (ET) sont les trois hormones végétales les plus communément associées à la signalisation déclenchée en réponse à des agents pathogènes. Les nombreux travaux menés afin de décortiquer les mécanismes impliquant ces molécules ont conduit à formuler un modèle simplifié selon lequel le cycle de vie d’un agent pathogène détermine les voies hormonales impliquées dans les réponses de défense (Glazebrook, 2005). Ainsi, l’ET et le JA seraient plutôt impliqués dans la résistance aux agents pathogènes nécrotrophes (se développant sur des tissus morts), alors que le SA serait impliqué dans la résistance aux agents pathogènes biotrophes (se développant sur des tissus vivants) (Glazebrook, 2005). Concernant les microorganismes hémibiotrophes, ayant un profil biotrophe dans les étapes précoces d’invasion puis nécrotrophe dans les étapes tardives de l’infection, le SA serait également l’hormone impliquée (Glazebrook, 2005). De plus en plus d’interconnections (synergiques ou antagonistes) entre ces trois voies hormonales sont mises à jour (Pieterse et al., 2009).

Une manière d’identifier une voie de signalisation hormonale impliquée lors d’une interaction entre une plante et un agent pathogène est de déterminer l’expression de gènes marqueurs. Ces gènes codent des protéines PR (Pathogenesis-related) qui sont classées en 17 familles selon leurs propriétés biochimiques. Chez Arabidopsis, les protéines PR-1, PR-2 et PR-5 sont dépendantes du SA, tandis que THI1.2 (Thionin 1.2) est dépendante du JA, que PR-3 et PR-4 le sont pour l’ET, et que PDF1.2 (Plant Defensin 1.2) dépend des deux voies ET/JA (Tab. I). Une autre stratégie couramment employée pour évaluer le rôle des voies ET- JA-SA consiste à croiser un mutant ayant une réponse altérée à un agent pathogène par rapport à une plante sauvage avec un mutant déficient pour la synthèse ou la signalisation d’une de ces voies et d’étudier si cela affecte le phénotype d’origine (Fig. 9). Par exemple, si un mutant résistant est croisé avec un mutant d’une voie de signalisation JA et que cela

Chorismate AS Tryptophane CM Phénylalanine PAL ICS Acide cinnamique Intermédiaires benzoïques BA2H Isochorismate IPL A id li li N hG Auxine Glucosinolates indoliques

Acide benzoïque BA2H Acide salicylique

(SA) Catéchol SABP2/ MES NahG SAGT ? Methyl-salicylate (MeSA) SAMT MES Conjugués SA‐acides aminés Salicylic acid glucoside (SAG) SAGT ?

Figure 10. Représentation simplifiée de la voie de biosynthèse et du métabolisme de l’acide salicylique

(d’après Vlot et al., 2009).

Les enzymes responsables de la formation des différents composés sont indiquées en orange et le nom des composés intermédiaires en noir. L’acide salicylique est présenté en vert. L’action du transgène bactérien

NahG est indiquée en bleu. La connexion avec les voies de synthèse de l’auxine et des glucosinolates à partir

du tryptophane sont schématisées en gris pointillé.

AS: anthranilate synthase; CM: chorismate mutase; PAL: phénylalanine ammonia lyase; ICS: isochorismate th IPL i h i t t l BA2H b i id 2 h d l SAMT li li id synthase; IPL: isochorismate pyruvate lyase; BA2H : benzoic acid 2-hydroxylase; SAMT: salicylic acid methyltransferase; SABP2: Salicylic acid-binding protein 2; MES : methylesterase; NahG : Naphthalene hydroxylase G ; SAGT: salicylic acid glucosyltransferase.

restaure la sensibilité à l’agent pathogène, cela démontre que l’acide jasmonique est impliqué dans les mécanismes de résistance (Fig. 9). Chez Arabidopsis, les croisements sont classiquement réalisés avec sid2, npr1 ou NahG pour le SA, avec ein2 pour l’ET et avec coi1 ou jar1 pour le JA.

1.1 L’acide salicylique (SA)

Lors de la mise en place de la PTI ou de l’ETI, les gènes impliqués dans la synthèse d’acide salicylique sont parmi les premiers gènes à être induits, ce qui signifie qu’une production de SA est initiée très rapidement au cours de ces deux types de défense (van den Burg and Takken, 2009). Chez Arabidopsis, le SA est synthétisé dans les chroloplastes par deux voies enzymatiques distinctes à partir du chorismate (Fig. 10). Il est intéressant de noter que le tryptophane, précurseur d’auxine et des glucosinolates indoliques, dérive lui aussi du chorismate (Fig. 10).

Concernant la synthèse de SA, d’un côté, la L-phénylalanine, dérivée du chorismate, est convertie par la Phenylalanine Ammonia Lyase (PAL) en acide cinnamique qui, à son tour, est converti en SA par différentes étapes enzymatiques successives (Fig. 10). D’un autre côté, la synthèse se fait en deux étapes : une IsoChorismate Synthase (ICS) convertit le chorismate en isochorismate qui lui est converti en SA par l’action d’une Isochorismate Pyruvate Lyase (IPL) (Fig. 10). Même si la voie ICS représente environ 90% de la production de SA, comme le montre la très faible quantité de SA contenue dans le double mutant ics1 ics2, les deux voies sont fonctionnelles chez Arabidopsis (Wildermuth et al., 2001; Garcion et al., 2008). Selon le contexte physiologique, la biosynthèse de SA emprunte l’une ou l’autre des voies. Par exemple, la voie des phénylpropanoïdes intervient pour promouvoir la mort cellulaire en réponse à des éliciteurs fongiques, comme par exemple une glycoprotéine de Phytophthora megasperma (Dorey et al., 1997). La production de SA se fait via la voie de l’isochorismate suite à l’infection par P. syringae pv. maculicola ou Erysiphe orontii, pour induire l’expression de PR-1 et déclencher la SAR (Systemic Acquired Resistance) (Wildermuth et al., 2001).

La SAR correspond à une mise en place d’un niveau de défense basée sur l’accumulation systémique de SA, à partir d’une réponse localisée au site d’infection (Loake and Grant, 2007). Il a été proposé que le méthylsalicylate (MeSA), dérivé méthylé du SA (Fig. 10), pouvait être le signal émis pour déclencher cette réponse (Fig. 11) (Park et al.,

Réponse systémique Réponse SAR SA NPR1 MeSA SABP2 Réponse locale SA MeSA Déclenchement PTI/ETI SAMT Système vasculaire Attaque par un agent pathogène

Figure 11. Représentation simplifiée de la mise en place de la SAR avec le MeSA comme molécule signal à longue distance (d’après Vlot et al., 2008).

D’après ce schéma le MeSA serait synthétisé localement au niveau du site d’infection par la méthylation du D après ce schéma, le MeSA serait synthétisé localement au niveau du site d infection par la méthylation du SA par une SA-methyltransferase (SAMT). Puis, en tant que signal mobile, le MeSA serait transporté via le système vasculaire jusqu’aux feuilles adjacentes pour y déclencher une réponse de défense systémique, la SAR, après que le MeSA soit déméthylé par la SA-binding protein 2 (SABP2) en SA.

SA : Salicylic acid; MeSA : Méthylsalicylate; SAR : Systemic Acquired Resistance ; PTI/ETI : PAMP/Effector-Triggered Immunity; NPR1 : No expression of PR genes 1.

2007). Si le MeSA est un composé volatile normalement absent chez les plantes, il est fortement accumulé en réponse à une infection par le virus de la mosaïque du tabac (Park et al., 2007). Biologiquement inactif en soit, le MeSA serait ensuite véhiculé par le système vasculaire pour rejoindre une zone non attaquée de la plante. Le MeSA serait alors déméthylé pour former du SA par l’enzyme SABP2 (SA-Binding Protein 2), permettant d’initier une voie de signalisation NPR1-dépendante aboutissant à la défense (Fig. 11). Cependant, une récente étude remet en question le MeSA en tant que signal déclencheur (Attaran et al., 2009). En effet, le mutant bsmt1 (benzoic acid and salicylic acid methyltransferase 1) n’est plus capable de produire du MeSA en réponse à une infection par P. syringae pv. maculicola, ce qui n’empêche pas la SAR d’être activée dans les feuilles adjacentes aux feuilles infectées (Attaran et al., 2009). Par conséquent, si la SAR est établie en absence de MeSA, alors le signal responsable de la mise en place de cette réponse de défense ne peut pas être le MeSA.

Outre la méthylation, le SA subit d’autres modifications telles que la glucosylation ou la conjugaison à des acides aminés (Fig. 10). La plupart du SA est stocké sous la forme de SA- O-ß-glucoside (SAG) dans la vacuole, a priori pour favoriser la détoxification de la cellule (Dean et al., 2003; Dean et al., 2005). Il a été proposé que cette séquestration vacuolaire soit réversible et que cela jouerait un rôle dans l’homéostasie cellulaire du SA et sa disponibilité en tant que molécule signal lors des réponses de défense (Dean et al., 2005).

Plusieurs protéines impliquées dans les réponses de défense dépendantes du SA ont été identifiées (Fig. 12). Chez Arabidopsis, les mutants eds1 (enhanced disease susceptibility 1) et pad4 (phytoAlexine deficient 4) ont été initialement découverts lors de deux cribles de mutants affectés respectivement dans leur réponse à l’oomycète Hyaloperonospora parasitica (Parker et al., 1996) ou à la bactérie Pseudomonas syringae pv. maculicola (Glazebrook et al., 1996). Les mutants eds1 et pad4 présentent une sensibilité accrue aux agents pathogènes utilisés lors des cribles respectifs, ainsi qu’un défaut d’accumulation de SA et d’induction de gènes PR (PR-1, PR-5) (Zhou et al., 1998; Falk et al., 1999). Une application exogène de SA permet de restaurer l’induction de gènes de défense chez les mutants eds1 et pad4, et dans un fond génétique sauvage, le SA induit l’expression de EDS1 et PAD4 (Zhou et al., 1998). EDS1 et PAD4, deux protéines à domaine lipase, interagissent et interviennent dans la mise en place de la PTI (infection par H. parasitica et P. s. pv. maculicola) et l’ETI dépendante des gènes R de type TIR-NB-LRR (Fig. 12) (Falk et al., 1999; Jirage et al., 1999). EDS1 interagit dans le noyau avec une autre protéine de type lipase, SAG101 (Senescence-Associated Gene 101), d’après des études de FRET (Fluorescence Resonance Energy Transfer) (Fig. 12) (Feys et al., 2005). Une protéine kinase, MPK4, a été identifiée comme répresseur d’EDS1 et

Agent pathogène avirulent (TIR-NB-LRR) ou virulent (H. parasitica, P. s. maculicola)

EDS1