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.�.� Organisation en faisceaux

En ����, Nicolaus Steno, scientifique Danois et pionnier en anatomie, souligne le besoin de méthodes de dissection permettant l’observation de la substance blanche dont l’étude a été largement délaissée à l’époque (cité dans Catani et Thiebaut de Schotten,����). Les fibres se regroupent pour former de larges voies qui favorisent l’inter-communication. Le développement de différentes techniques de dissection� a en effet permis de mettre en exergue l’anatomie et la disposition de plusieurs faisceaux de fibres indépendants. Ainsi, en ����, sur la base de ces observations, Theodor Meynert propose une classification des faisceaux en fonction des trois grands types de connexions qu’ils assurent. Les fibres de projection (corona radiata, capsule interne, faisceaux cortico-spinaux, entre autres) raccordent le cortex cérébral aux noyaux gris centraux, au tronc cérébral ou encore à la moelle épinière. Les fibres commissurales (corps calleux, commissures blanches antérieures et postérieures, corps du fornix) servent de connexions inter-hémisphériques entre l’hémisphère droit et l’hémisphère gauche. Enfin, les fibres d’association sont en charge des connexions intra-hémisphériques et relient, au sein d’un hémisphère, différents territoires corticaux. Les fibres courtes (fibres en U) connectent les gyri adjacents, tandis que les longs faisceaux relient les différents lobes dans le même hémisphère. Ces faisceaux d’association sont présents en double dans chacun des hémisphères (Figure�.�).

Avec la description du phénomène de diaschisis (von Monakow,����), c’est-à-dire des effets engendrés par une lésion sur d’autres régions situées à distance via des déconnexions, un courant néo-associationniste se développe (e.g. Ludwig Lichtheim [����-����], Paul Emil Flechsig [����-����]). Les neurochirurgiens du début du XXesiècle commencent à se saisir de ces modèles associationnistes pour proposer de nouveaux traitements chirurgicaux par section des fibres de substance blanche. Ainsi, en ����, les premières opérations de déconnexion sont réalisées chez des patients psychotiques sévères (Moniz & Lima,����). Toutefois, les effets sont très mitigés, avec une amélioration modeste de certains symptômes psychiatriques accompagnée d’effets secondaires délétères et sévères sur la cognition. La réalisation de déconnexions chirurgicales sur le corps calleux de patients atteints d’une épilepsie réfractaire et sévère (patients split brain) amène aux mêmes conclusions. En effet, si l’épilepsie est maintenant confinée et restreinte à un hémisphère, les callosotomies ne sont pas sans conséquences sur le plan cognitif (Glickstein & Berlucchi,����). L’observation

Vieussens (����) distingue les fibres calleuses des autres fibres en faisant bouillir l’encéphale dans de l’huile

pour durcir les tissus avant dissection; Reil (����) utilise une méthode de dissection après imbibition complète du cerveau dans une solution alcoolique, ce qui a permis d’établir le profil de la plupart des faisceaux d’association. Des procédés plus récents, permettant une séparation mécanique des fibres selon un clivage naturel, ont été développés et ont permis d’affiner les observations antérieures. Par exemple, Rosett (����) utilise une technique de micro-explosions par immersion du cerveau dans un compresseur de gaz contenant du dioxyde de carbone liquide (CO�) ou encore Klinger (����) propose de se baser sur les propriétés mécaniques de passage d’un état liquide à solide en congelant le cerveau après l’avoir imprégné d’eau (voir Mandonnet et al.,����pour une revue).

intensive des effets engendrés par ce type de chirurgie apporteront deux découvertes importantes : (�) il existe une latéralisation hémisphérique dans le traitement cérébral de certaines fonctions cognitives ; et (�) la matière blanche est indispensable à la cognition (Gazzaniga,����; Levy,����).

Figure �.�:Classification des différents faisceaux de substance blanche

Classification d’après Meynert (����), illustrée par Catani et Thiebaut de Schotten,����. En bleu sont représentées les fibres de projections, descendante-ascendantes; en rouge, les fibres commissurales qui assurent les connexions gauche-droites; en vert, les fibres d’association dont les connexions sont antéro- postérieures. Quel que soit le type de connexion, les communications sont supposées bidirectionnelles avec des feedforward et feedback d’informations permettant une cognition intégrée. Les relations peuvent être de nature excitatrice ou encore inhibitrice. (feedforward = projections d’action vers des niveaux de traitement supérieurs; feedback = rétroaction/ rétrocontrôle, considérées comme modulatoires)

.�.� Modèles hodologiques langage-mémoire

Les Dejerine et Dejerine-Klumpke (����) ont été les premiers à décrire l’implication du faisceau longitudinal supérieur (Superior Longitudinal Fascicle : SFL) et du faisceau arqué (Arcuate Fascicle: AF) dans le langage. Ils ont, en outre, décrit l’implication d’autres faisceaux, le faisceau fronto-occipital inférieur (Inferior Fronto-Occipital Fascicle: IFOF), longitudinal inférieur (Inferior Longitudinal Fascicle: ILF) ou encore l’unciné (Uncinate Fascicle: UF) également atteints chez certains patients présentant des troubles aphasiques. Leurs observations anatomo-fonctionnelles ont servi de socle à la conception moderne des différentes voies dorsales et ventrales décrites dans le traitement du langage (voir Krestel et al.,����pour une revue historique). Un siècle plus tard, M.-M. Mesulam (����), dans son célèbre ouvrage « Principles of Behavioral and Cognitive Neurology » décrit plusieurs grands réseaux impliqués dans la cognition et le comportement sur la base d’études lésionnelles et d’imagerie fonctionnelle. Parmi eux, un réseau « langagier » avec deux épicentres : les aires de Broca et Wernicke ; un réseau de « reconnaissance » des objets et visages qui converge vers une zone cruciale du système sémantique : le pôle temporal; et un réseau « mémoire-émotion » dont les épicentres se situent dans le lobe temporal interne (complexe amygdalo-hippocampique). Ces trois grands réseaux, majoritairement sous-tendus par de larges faisceaux d’association (Catani et al.,����; Catani, Mesulam,

et al.,����), pourraient constituer la base structurelle des comportements langage-mémoire (Figure�.�). Plus récemment, des modèles hodologiques ou modèles neurocognitifs (voir Box�.�) s’attachant à décrire les faisceaux de matière blanche au cœur du fonctionnement langagier ou mnésique, ont spécifié et détaillé les différentes voies de traitement impliquées dans ces fonctions.

Figure �.�:Principales voies structurelles engagées dans le langage et/ou la mémoire

Illustration des principaux systèmes impliqués dans le langage ou la mémoire (décrits par M.-M. Mesu- lam,����) et faisceaux correspondants. Le système langage implique le faisceau longitudinal supérieur (Superior Longitudinal Fascicle: SLF) et le faisceau arqué (Arcuate: Arc). Le système de l’identification et de la reconnaissance comprend le faisceau longitudinal inférieur (Inferior Longitudinal Fascicle: ILF) et le faisceau fronto-occipital inférieur (Inferior Fronto-Occipital Fascicle: IFOF). Le système mémoire-émotion engage le fornix (Fox), le cingulum (Cing) et le faisceau unciné (Uncinate Fascicle: UF). Figures adaptées de Catani, Dell’Acqua, et al. (����), Catani et Thiebaut de Schotten (����)

�.�.�.� Modèle double-voie du langage

Le modèle hodologique proposé par Duffau et al. (����) centré sur le langage, contribue grandement à remettre en question les vues traditionnelles, modulaires et sérielles du traitement du langage. Basé sur les relations anatomo-fonctionnelles des faisceaux de matière blanche, il démontre que le traitement sémantique, phonologique et syntaxique est soutenu par un vaste réseau linguistique structurel, permettant un fonctionnement en parallèle de différents sous-réseaux interconnectés. En accord avec d’autres descriptions (e.g. Dick et al., ����; Friederici, ����), ce modèle propose une architecture « double voie », impliquant un système dorsal phonologique et de production, ainsi qu’un système ventral sémantique sous-tendant la compréhension verbale. Le long de la voie dorsale, les régions temporo-pariéto-frontales sont notamment interconnectées par les faisceaux longitudinaux supérieurs (SLF) et le faisceau arqué (Arc), qui participent à l’élaboration des représentations phonologiques, articulatoires, syntaxiques et motrices. Le long de la voie ventrale, les régions temporo-frontales sont principalement interconnectées par les faisceaux longitudinaux inférieurs (ILF et IFOF) le faisceau unciné (UF) mais aussi la capsule extrême ou encore les faisceaux longitudinaux moyens (MLF), permettant notamment la compréhension de mots et de phrases. Ces deux voies principales sont

étroitement interconnectées et couplées (voir aussi Hickok et Poeppel,����; Silbert et al.,����) et la production et la compréhension sont toutes deux basées sur une variété d’opérations linguistiques pour le traitement de l’information (Lœvenbruck et al.,����; Price,����). Par ailleurs, il existe chez le sujet sain, et depuis son plus jeune âge, une asymétrie des propriétés micro-structurelles des faisceaux de l’hémisphère gauche qui semble correspondre à l’asymétrie morphométrique retrouvée dans les aires corticales langagières (Dubois et al.,����). Cette spécialisation structurelle pourrait être la cause ou la conséquence de la spécialisation fonctionnelle observée typiquement dans l’hémisphère gauche pour le langage (cf. Chapitre�)

.�.�.� Modèle double-voie de la mémoire déclarative

Concernant la mémoire déclarative, notamment épisodique, il n’existe pas à ce jour de modèle hodologique en tant que tel. Un vaste réseau fronto-pariéto-temporal impliquant préférentiellement l’hémisphère gauche semble être responsable de la mémoire verbale (Alessio et al.,����; Perrone-Bertolotti et al.,����). Sheldon et al. (����) ont rapporté que la connectivité du lobe temporal mésial aux cortex occipito-pariétaux postérieurs est liée à une mémoire contextualisée du souvenir, qui se reflète dans l’accès et la construction d’images mentales et détaillées d’un événement passé en mémoire (proche de la notion de mémoire épisodique). La connectivité du lobe temporal mésial au cortex préfrontal inférieur et moyen est, quant à elle, liée à une mémoire organisant et intégrant des informations conceptuelles d’ordre supérieur (proche de la notion de mémoire sémantique). Ce point de vue est conforme aux modèles neurocognitifs de la mémoire à long terme qui proposent une architecture interactive à double-voie (Duvernoy et al.,����; Ranganath & Ritchey, ����). Dans ce contexte, le Cingulum (principalement) relie le système postéro-mésial (PM) décrit par le cadre PMAT (Ranganath et Ritchey,����; voir Chapitre�) et représente l’échafaudage contextuel au sens large. L’UF, l’ILF et le fornix (Fox) relient quant à eux le système antérieur (AT) et représentent l’échafaudage conceptuel et émotionnel (Baldassano et al.,����; Richter et al.,����).

Le rôle du lobe temporal mésial et notamment de l’hippocampe, au carrefour de ces deux voies serait d’unifier ces contenus multiples et multimodaux, extéro et intéroceptifs, contextuels et conceptuels (Barry et Maguire,����; en accord avec le modèle BIC proposé par Diana et al.,����) à la fois pendant l’encodage et la récupération (de Vanssay-Maigne et al.,����). Au sein du lobe temporal interne, les liens entre les structures limbiques et ceux entre ces structures et le reste du cortex permettent une synergie des activités entre émotions, comportement et mémoire (Catani, Dell’Acqua, et al.,����). Cette synergie est essentielle pour la création de souvenirs épisodiques. Certains faisceaux, comme le faisceau unciné sont régulièrement cités comme impliqués dans la mémoire déclarative (mémoire et langage ; Forkel et al.,����) notamment parce que leur section isolerait le cortex temporal associatif du cortex frontal. Le faisceau unciné a en effet été décrit comme sous-tendant les processus d’encodage et de récupération mnésiques (conscience autonoétique ; Travers, ����). Toutefois, son implication dans le système sémantique ventral semble encore à définir.

En effet, la stimulation de l’UF gauche n’entraîne généralement pas de troubles sémantiques observables (Duffau et al.,����). L’implication des différents faisceaux dans le langage et la mémoire pourrait donc dépendre, avant tout, du niveau de représentation nécessaire (en accord avec le cadre proposé par le modèle hiérarchique-représentationnel de la mémoire: Saksida et Bussey, ����). Le tableau en Annexe (Annexe A.�.�) illustre les différents faisceaux traditionnellement associés aux processus langagiers et/ou mnésiques.

�.�.�.� Fibres inter-hémisphériques

Le corps calleux�(Corpus Callosum : CC) sert littéralement de pont entre les deux hémis- phères et permet le transfert d’informations d’un hémisphère à l’autre. Il est ainsi sollicité pour la plupart des processus nécessitant un traitement bilatéral de l’information et notam- ment pour l’élaboration et le maintien d’informations verbales (e.g. Erickson et al.,���� pour une description en cas d’agénésie du corps calleux�).

Il serait également impliqué dans le phénomène de spécialisation hémisphérique décrit dans le chapitre précédent (Chapitre�). Toutefois, la question de la manière dont le corps calleux régule le transfert et la communication entre les hémisphères est matière à débats dans la littérature. Certaines études suggèrent que le corps calleux joue un rôle inhibiteur, tandis que d’autres laissent supposer que sa fonction est par essence, excitatrice (Bloom & Hynd,����). Pour le modèle excitateur, le corps calleux permet avant tout le partage inter-hémisphérique des informations et plus la connectivité entre les deux hémisphères est forte (i.e. plus le corps calleux possède de connexions en quantité/qualité), plus les informations peuvent être efficacement diffusées entre les hémisphères. Pour le modèle inhibiteur, à l’inverse, plus la connectivité transcalleuse est importante et plus il existe une inhibition inter-hémisphérique favorisant l’activité intra-hémisphérique et spécialisée. Les propriétés neurochimiques des fibres calleuses ne permettent pas de trancher. Les axones du corps calleux impliquent principalement le glutamate et sont donc considérés comme excitateurs (Conti & Manzoni,����). Cependant, en raison de la présence d’inter-neurones inhibiteurs, les messages calleux ont également été envisagés comme étant inhibiteurs (Kawaguchi,����). Les deux modèles sont soutenus par les résultats de plusieurs études et tous les deux peuvent expliquer la spécialisation hémisphérique d’un point de vue évolutionniste (van der Knaap et van der Ham,����pour une revue).

Le corps calleux, principal regroupement de fibres interhémisphériques, compte environ ��� à ��� millions

de fibres chez l’homme (Aboitiz et al.,����). Différentes sous-parties ont été décrites, principalement : le genou du corps calleux (GCC: Genu of Corpus Callosum) à l’avant, relie essentiellement les lobes frontaux et une partie des lobes temporaux; le corps (BCC: Body of Corpus Callosum) relie les lobes pariétaux et sa partie postérieure finit de connecter les lobes temporaux; et à l’arrière le splénium (SCC: Splenium of Corpus Callosum) se compose essentiellement de fibres inter-occipitales. Il existe également d’autres connexions inter-hémisphériques comme la commissure antérieure, par exemple.

L’agénésie du corps calleux est une malformation cérébrale congénitale impliquant l’absence totale ou

La spécialisation hémisphérique dans le cadre de la théorie excitatrice peut s’expliquer, par exemple, par une augmentation du volume cérébral qui allonge de facto la distance inter- hémisphérique et le temps de transfert, contraignant ainsi les processus à grande vitesse au regroupement intra-hémisphérique. En effet, Tzourio-Mazoyer et al. (����) observent des corrélations positives entre le périmètre crânien et l’asymétrie fonctionnelle en faveur de l’hémisphère gauche pour une tâche de perception verbale. Il peut donc y avoir un impact « mécanique » du volume du cerveau sur la latéralisation hémisphérique gauche pour le langage. Pour le modèle inhibiteur, l’activité même du corps calleux permet la spécialisation en inhibant l’hémisphère opposé. Ce phénomène appelé « métacontrôle » est basé sur l’idée que le transfert et l’intégration des informations entre les deux hémisphères requiert du temps et de l’énergie. Ainsi, il serait plus efficace d’utiliser un seul hémisphère et d’inhiber l’autre, en tout cas lorsque la tâche est simple (van der Knaap & van der Ham, ����). Cette théorie est également confortée par certains résultats classiquement observés dans la littérature. En effet, d’un point de vue ontogénétique, le corps calleux est une des dernières fibres à devenir « mature », à l’adolescence, voire au-delà (Hervé et al.,����). Un corps calleux moins développé (en tout cas sur le plan micro-structurel) pourrait être à l’origine des patterns d’activation moins latéralisés chez les jeunes enfants par rapport aux adultes sur des tâches langagières, par exemple. Or, de nombreuses études développementales montrent, en effet, des activations plus diffuses (bilatérales) chez l’enfant et à mesure qu’il grandit et que son corps calleux se développe, le pattern d’activation se rapproche de celui d’un adulte (Perani et al.,����).

La question du rôle du corps calleux dans la spécialisation inter-hémisphérique reste donc non tranchée et les observations parfois contradictoires. En condition normale, le corps calleux est responsable de la majorité des transferts entre les hémisphères et il semble ainsi raisonnable de penser qu’il participe activement à une cognition unifiée, comme en témoigne les troubles présentées par les patients split brain dont le corps calleux est sectionné (e.g. Zaidel, ���� pour la mémoire à long terme ; Schechter, ���� pour une description des relations intriquées et complexes avec la conscience de soi).

.�.� Potentiel plastique de la matière blanche cérébrale

Lorsque la substance blanche est lourdement touchée (AVC, neurochirurgie, etc.) les déficits comportementaux observés sont plus importants et ils sont souvent le signe d’un moins bon pronostic pour la récupération, par rapport à une atteinte corticale isolée (chronicité des troubles : par exemple Duffau et al., ����; Kiran,����; Lunven et al., ����). Ainsi, les neurochirurgiens portent une attention particulière à la préservation des connexions des réseaux principaux. Les résections ne se limitent plus à certaines zones corticales (cortex éloquent) mais plutôt à l’approche de certains faisceaux de substance blanche. Ces observations étayent l’idée que la plasticité cérébrale sous-corticale, à un niveau macroscopique, est faible. Plusieurs observations confirment l’idée que la macrostructure de la substance blanche est peu sujette à la variabilité interindividuelle et à la réorganisation. Par exemple, les différents faisceaux tels qu’observés chez l’adulte sont déjà tous présents

chez les très jeunes enfants, même entre des régions cérébrales non matures (Dubois et al.,����). Une étude réalisée chez les chats sourds congénitaux (Lomber et al.,����) montre des patterns de connectivité structurelle identiques à ceux de chats non sourds et conforte également l’idée d’un câblage similaire pour tous. Ces données font écho au concept de « minimal common brain » décrit par Ius et al. (����) comme une partie invariante du système nerveux central, qui ne peut être compensée à la suite d’une atteinte et qui concerne les principales connexions de substance blanche. Ce sont les fortes contraintes exercées par l’architecture cérébrale même qui seraient à l’origine de cette faible plasticité macrostructurelle. En effet, les grands faisceaux sont composés de fibres qui convergent le long de petits espaces délimités par des frontières anatomiques (sulci, ventricules, noyaux gris profonds) empêchant ainsi l’apparition d’importantes variations morphologiques (Duffau,����).

Si la macrostructure de la substance blanche semble relativement immuable, sa microstruc- ture est, quant à elle, plastique. Marcello Malpighi (����) observe au travers du microscope que la substance blanche cérébrale, bien que relativement ordonnée, possède une anatomie microstructurale complexe composée à la fois de fibres nerveuses et de différentes cellules gliales (oligodendrocytes producteurs de myéline, astrocytes et microglies, principalement). Les progrès en neurohistologie, comme notamment la coloration des gaines de myéline, ont permis d’étudier le développement de la myélinisation à différents stades (cartes myélogénétiques de Flechsig (����) et ainsi de percevoir la microstructure de la substance blanche comme dynamique. Les faisceaux de projection étant les premiers à être myélinisés, Flechsig (����) s’est concentré sur l’étude du faisceau cortico-spinal et a décrit une asymétrie au niveau de sa décussation dans la moelle épinière. En accord avec ces observations, les études récentes montrent que le nombre d’axones myélinisés entre les faisceaux est variable et que tous les axones ne sont pas myélinisés de la même manière�(Walhovd et al., ����). Plusieurs recherches ont montré que les cellules précurseurs des oligodendrocytes producteurs de myéline peuvent répondre à des changements de l’activité neuronale (e.g. Gibson et al.,����). La connectivité structurelle supporte le câblage fonctionnel mais le fonctionnement module également les connexions (Hervé et al.,����). Les changements micro-structurels peuvent concerner tant la qualité des connexions (« force » ou vélocité) que la création ou l’élimination de synapses/de connexions (phénomène de potentialisation ou dépression à long terme�), qui dépendent de l’activité engagée entre différentes cellules ou, à plus grand échelle, entre différentes régions cérébrales.

Conformément aux résultats obtenus par Flechsig (����), les études en IRM de diffusion (Box�.�) – in vivo et non invasives – basées sur le modèle du tenseur de diffusion (Diffusion Tensor Imaging: DTI; Box�.�) montrent qu’il existe une maturation des faisceaux au cours

Pendant longtemps, l’épaisseur de la myéline a été pensée comme linéairement dépendante du diamètre

axonal (Tomassy et al.,����). Ainsi, les gros axones seraient plus fortement myélinisés. Toutefois, le rapport ne semble pas aussi évident et il existe, là encore, une grande variabilité. Selon Walhovd et al. (����), l’hypothèse la plus plausible est que les changements dans l’épaisseur de la myéline sont plutôt directement liés à l’activité neuronale.

Modulation de la structure et de l’efficacité synaptique par l’activité et l’expérience, entraînant une

augmentation ou une diminution des réponses aux inputs (informations reçues). Cette modification des propriétés synaptiques peut s’observer à court ou à plus long terme (Hebb,����).

du développement (Dubois et al.,����). Or, cette maturation est associée à une accélération de la transmission de l’influx nerveux et semble être le reflet des progrès que réalise le nouveau-né après sa naissance. Schlegel et al. (����) observent également une plasticité de la microstructure de certains faisceaux de substance blanche après l’apprentissage intensif d’une nouvelle langue. Chez les personnes âgées, il existe un lien entre l’intégrité micro-structurelle de la matière blanche et les capacités exécutives comme la vitesse de traitement de l’information (pour une revue, voir Madden et al.,����). En effet, le vieillissement entraînerait une dysmyélinisation�, en particulier là où la maturation de la

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