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Les CDB sont l'une des formes les plus délétères des dommages de l'ADN. C’est dans le cadre de ces lésions que la protéine ATM opère.

Les capteurs : L’apparition de CDB va rapidement induire l’assemblage d’un complexe

récepteur MRN constitué des protéines Mre11-RAD50-Nbs1 au niveau du site de cassures de l’ADN. Ce complexe « récepteur » va d’une part assurer la détection des CDB et d’autre part permettre de conserver un rapprochement des extrémités d’ADN lésées. Le complexe MRN va ensuite recruter la kinase ATM au site des CDB via Nbs-1 [201]. À l’état inactif, ATM est sous la forme d’homodimères. Les extrémités émoussées des simples brins d’ADN à la suite de leurs cassures associées au complexe MRN va activer ATM par autophosphorylation intermoléculaire de la sérine 1981 (domaine FAT), libérant des monomères actifs présentant une activité kinase. [200].

Immédiatement après son activation, ATM phosphoryle le variant H2AX de l’histone H2A sur la sérine 139 (nommée alors γH2AX) qui se déplace de part et d’autre des CDB. C’est un évènement clé du processus activateur des effecteurs d’ATM.

γH2AX va recruter la protéine Mdc1. Ceci a pour effet la formation de foyers γH2AX-Mdc1 sur les foci de part et d’autre de la cassure. Mdc1 a le pouvoir de recruter la protéine ATM. Ainsi la capacité de Mdc1 à lier à la fois γH2AX et ATM fournit un mécanisme amplificateur de reconnaissance l'ATM sur la chromatine encadrant les CDB. Plus de protéines ATM recrutées va entrainer plus de phosphorylation de l’histone H2AX. Il en suit une boucle d’alimentation amplificateur qui propage ATM et les foyers γH2AX-Mdc1 sur de large pan de chromatine.

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Les effecteurs : Les premiers effecteurs de la collection de protéines ATM concernent les

acteurs de la régulation du cycle cellulaire Chk2 (Checkpoint) et la protéine suppresseur de tumeur p53 [202]. ATM va phosphoryler Chk2 qui joue un rôle dans l’activation des points de contrôle du cycle cellulaire G1/S. ATM va parallèlement phosphoryler p53, produisant le blocage du cycle. p53 phosphorylé de induit l’expression du régulateur du cycle cellulaire p21Cip1 qui est responsable de l’inhibition de la cycline E et des kinases cycline-dépendante

cdk2 qui lui sont associées, empêchant ainsi la progression du cycle vers la phase S [203].

La voie ATM peut activer le checkpoint intra-phase S via le recrutement de BRCA1 par le complexe MRN. ATM peut également conduire à l’activation des points de contrôle du cycle cellulaire en G2/M par ubiquitinylation puis la dégradation de la phosphatase Cdc25A. Ceci maintient Chk2 phosphorylé ce qui entraine l’inactivation de la kinase cdc-2 (cell division cycle protein 2) du fait de groupements phosphates inhibiteurs, empêchant ainsi la progression du cycle cellulaire et l’entrée en mitose [204]. Ces arrêts du cycle cellulaire sont une étape transitoire mais essentielle afin d’éviter la réplication d’ADN endommagé. (Figure 17)

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La régulation : La voie ATM est principalement régulée par des modifications post-

traductionnelles des différentes protéines impliquées dans la signalisation parmi lesquelles on compte la phosphorylation/déphosphorylation, l’ubiquitination/déubiquitination, la sumoylation/désumoylation. Mais de récentes études [205,206] ont révélées un mécanisme de régulation de la voie ATM par une série d’ARN non-codants parmi lesquelles on compte :

• Des miARNs (microARNs) qui exécutent une régulation négative de l’expression des acteurs biochimiques H2AX, p53, Cdk2 et Cdc25a et ATM lui-même par fixation sur leurs ARN messagers (ARNm).

• Des lncARNs (long non-coding ARNs) qui exercent une activité épigénétique sur les gènes cibles. Mais à la différence des miARNs, les lncARNs sont impliqués dans une large gamme de processus de la réparation de l’ADN essentiellement régulés par la protéine p53. Par exemple, lorsque l’atteinte du génome des cellules immunitaires est trop importante p53 va activer l’expression de PANDA lncARN qui associée à NF-YA, forme un complexe pro-apoptotique. Un autre exemple est celui du JADE lncARN, dont l’activation, ATM-dépendante est un acteur clé de l’acétylation des histones H4 après la détection des dommages de l’ADN. (Figure 18.) [207]

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L’expression des lncRNAs est globalement régulée par p53 ou par des facteurs de transcription activés par la lésion de l’ADN. Ces lncRNA, une fois activés, participent à la DDR en modulant l'expression des gènes en aval.

La voie ATM est activement impliquée dans la méiose dont sont issues les gamètes. [208] Elle est aussi importante au niveau du système immunitaire car elle répare les CDB survenant lors de la recombinaison V(D)J des récepteurs lymphocytes B et T immatures qui permet de produire un clone lymphocytaire unique [176,209]

La voie ATM joue un rôle crucial dans le contrôle et la suppression de l’instabilité génomique. L’importance de la voie ATM est particulièrement illustrée par des maladies génétiques associées à des mutations affectant le gène ATM responsable de la maladie neurodégénérative de l’ataxie-télangiectasie (AT) [210], des mutations du gène codant la protéine Nbs1 du complexe MRN conduisant à l’apparition du syndrome des cassures de Nijimegan ou des mutations de Chk2 impliquées dans le développement de la maladie de Li- Fraumeni [211]. Ces pathologies héréditaires sont généralement caractérisées par une déficience immunitaire et une prédisposition au développement de divers cancers du fait de l’instabilité chromosomique générée à la suite des dommages de l'ADN.