Dans ce cas, il est raisonnable de négliger les changements d’entropie.
Dans la limite des chocs forts (ζ 1), les relations de Rankine-Hugoniot deviennent :
µ ∼r γ −1 2γ c− c+ ∼p(γ − 1)ζ ρ− ρ+ ∼ γ+ 1 γ −1 [~v] c+ ∼ s 2ζ γ(γ + 1)~n.
La célérité du son et la vitesse du fluide à l’avant du choc, c+ et ~v+, sont alors négligeables
comparées aux valeurs à l’arrière du choc dans cette approximation. En revanche, la compres- sion est finie quelle que soit l’intensité du choc. Pour un gaz parfait et un rapport de chaleurs spécifiques de 1.4, le facteur de compression, ρ−
ρ+, est au maximum de 6. De même, le nombre
de Mach aval du choc est borné : µ ≈ 0.378.
2.3
Vision level-set du front de choc
La définition mathématique d’un front de choc mobile, i.e. comme objet manipulable, est aisée à travers le formalisme level-set [87]. À l’instant t, la surface de choc est définie comme la ligne de niveau zéro d’une fonction scalaire Φ dite “level-set” (ou de niveau) :
Γ(t) = {~x ∈ Ω/Φ(~x, t) = 0}. (2.26) La fonction Φ est supposée régulière sur Ω et ~∇Φ non nul au niveau du choc. La surface de choc est par conséquent continue et dérivable au moins par morceaux. On note ~n le vecteur normal unitaire de Γ(t) orienté dans le sens de propagation du choc, défini par
~n= ~
∇Φ
|~∇Φ|. (2.27)
Pour établir l’équation vérifiée par la fonction Φ, on définit les rayons comme étant les courbes intégrales de la vitesse du front de choc ~V , i.e.
d~x(t)
dt = ~V (~x(t), t) . (2.28) En dérivant l’équation Φ(~x, t) = 0 le long des rayons, il vient alors :
∂Φ
∂t + ~V · ~∇Φ = 0. (2.29)
Étant donné (2.27), il est aisé de vérifier que la vitesse normale du choc, U = ~V · ~n, vérifie la relation
U = − ∂tΦ
|~∇Φ|, (2.30)
où ∂t désigne la dérivée partielle par rapport au temps.
Le choc n’est pas une surface matérielle. Par conséquent, son mouvement intrinsèque n’est induit que par sa vitesse normale :
~
Vn= U~n.
La composante tangentielle de sa vitesse provient de l’écoulement amont :
~
Vt= ~V − ~Vn = P · ~v+,
CHAPITRE 2. RAPPELS SUR LES ONDES DE CHOC
où P = (I − ~n ⊗ ~n) est l’opérateur de projection sur le plan tangent au choc. La vitesse du choc
~
V, dans le repère du laboratoire, s’écrit alors : ~
V = WS~n+ ~v+, (2.31)
où WS, cf. figure 2.1, est la vitesse locale du choc relativement à l’écoulement amont :
WS = U − ~v+· ~n. (2.32)
Remarque 2.2
Le nombre de Mach s’exprime M = WS
c+ d’après (2.25).
Le vecteur normal au choc (2.27), ainsi que la vitesse du choc (2.30) et (2.31) sont des quantités définies localement au niveau du front, i.e. en (~x, t) = (~xsh(t), t). Il est toutefois
possible de les définir sur Ω tout entier. Soit
W=n(~x, t) ∈ Ω × R+ tel que |Φ(~x, t)| < et |~∇Φ(~x, t)| 6= 0
o
,
pour > 0, l’ensemble des voisinages du choc pour tous les instants t. Il existe une fonction plateau P définie sur Ω × R+ infiniment dérivable, et à support compact K dans W
, telle que
P(~x, t) ≡ 1 sur K ⊂ O ⊂ W et P(~x, t) ≡ 0 sur ¯O ,
avec O un ouvert de Ω, et ¯O son complémentaire dans Ω. Les relations (2.27) et (2.30) sont ainsi étendues sur Ω par les formulations :
~
N(~x, t) = ∇~Φ(~x, t)
|~∇Φ(~x, t)|P(~x, t) et U(~x, t) = −
∂tΦ(~x, t)
|~∇Φ(~x, t)|P(~x, t). (2.33) De même, on définit l’extension de la vitesse du choc (2.31) par :
~
V(~x, t) = ~U(~x, t) − ~v+(~x) · ~N(~x, t) ~N(~x, t) + ~v+(~x), (2.34)
étant donné que le champ de vitesse initial ~v+ est connu sur Ω. Il est alors aisé de vérifier que
l’on retrouve les définitions locales du vecteur normal et de la vitesse du choc :
~
N(~xsh(t), t) = ~n (~xsh(t)) ,
U(~xsh(t), t) = U (~xsh(t)) et ~V (~xsh(t), t) = ~V (~xsh(t)) .
La relation (2.34) autorise de plus à étendre la définition de ~xsh à Ω tout entier :
d ~X(t)
dt = ~V ~X , t
, (2.35)
avec ~X : R+→Ω. Il en résulte en particulier : ~X(~x
sh(t), t) = ~xsh(t).
Remarque 2.3
Les extensions (2.33)-(2.34) montrent que les quantités ~n, U et ~V sont définies de manière unique au niveau du choc. Elles n’admettent par conséquent pas de discontinuité au travers de celui-ci. De surcroît, ces extensions autorisent à effectuer la dérivation de ~n, U et ~V au voisinage du choc (un ouvert de K) : on assimile alors ces quantités à leurs extensions le temps du calcul.
2.3. VISION LEVEL-SET DU FRONT DE CHOC
Soit ψ : Ω × R+ → Rd une quantité physique quelconque2. Il peut s’agir par exemple de
la pression p à valeurs dans R+ ou du champ de vitesse ~v à valeur dans R3. On suppose que
le choc est à passage unique, ce qui induit une relation univoque entre le temps d’arrivée du choc tshet la position de celui-ci, ~xsh:
tsh(~xsh(t)) = t. (2.36)
Soient ψtet ψxles valeurs de la quantité ψ suivant l’évolution temporelle et l’évolution spatiale
du choc respectivement :
ψt(t) = ψ (~xsh(t), t) et ψx(~x) = ψ (x, tsh(~x)) .
L’évolution temporelle de ψ suivant le mouvement du choc est alors donnée par dψt(t) dt = ∂ψ ∂t (~xsh(t), t) + d~xsh(t) dt · ~∇ψ(~xsh(t), t). (2.37)
Sa variation spatiale est déterminée par
~
∇ψx(~x) =
∂ψ
∂t (~x, tsh(~x)) ~∇tsh(~x) + ~∇ψ (~x, tsh(~x)). (2.38)
En dérivant la relation (2.36) par rapport au temps, il vient immédiatement :
~
∇tsh(~xsh(t)) · d~x sh(t)
dt = 1. Ainsi, en contractant (2.38) avec d~xsh
dt , on trouve naturellement le changement de variable entre
évolution temporelle et variation spatiale de ψ suivant le choc : dψt(t)
dt =
d~xsh(t)
dt · ~∇ψx(~xsh). (2.39)
En particulier dans le cas 1D, cette expression s’écrit : dψt(t) dt = dxsh(t) dt dψx dx (xsh). (2.40)
En pratique, puisqu’aucune ambiguïté n’est a priori possible, nous ne ferons aucune dis- tinction entre ψ et ψt dans la relation (2.37) :
dψ dt = ∂ψ ∂t + d~xsh dt · ~∇ψ. (2.41)
De même, aucune distinction ne sera faite entre ψt et ψxdans (2.40) :
dψ dt = dxsh(t) dt dψ dx.
Dans ce dernier cas (cas 1D), les dérivées temporelle et spatiale suivant le choc sont simplement définies par : dψ dt = ∂ψ ∂t + x 0 sh(t) ∂ψ ∂x et dψ dx = ∂ψ ∂x + 1 x0 sh(t) ∂ψ ∂t. (2.42)
En revanche, une attention particulière sera apporté au changement de variable (2.39), comme en section 4.5 par exemple.
2. En théorie, ψ est un tenseur d’ordre quelconque mais nous nous restreignons ici à l’ordre 0 ou 1 (fonction scalaire ou champ vectoriel). Dans le cas où ~ψ est un vecteur, ∇ ~ψ est un tenseur d’ordre 2 dont les composantes sont ∇ ~ψ ij =∂ψj ∂xi .
En conséquence, ~E · ∇ ~ψ est un vecteur dont la j-ième composante vaut Ei ∂ψj
∂xi avec la convention de l’indice
muet répété pour une somme.
Chapitre 3
Le modèle Geometrical Shock
Dynamics de Whitham
Sommaire
3.1 Modèle Geometrical Shock Dynamics (GSD) . . . . 44
3.1.1 Relation A − M pour la propagation d’un choc dans une tuyère . . . 44
3.1.2 Dérivation du modèle d’évolution du front de choc . . . 49
3.1.3 Solutions à symétrie radiale . . . 51
3.1.4 Étude du modèle en deux dimensions . . . 53
3.1.5 Application 2D : diffraction d’un choc plan sur une paroi . . . 58