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Il a fait d ’autres métiers dans sa vie, facteur, sommelier, respon­ sable d ’Action catholique, secré­ taire syndical... mais c’est en d e­ venant vigneron-encaveur q u ’il a trouvé son accomplissement. Il s ’appelle André Savioz, 67 ans solides, belle tête de Valaisan

têtu. C ’est un hom m e concret, avançant dans la vie en assurant ses prises. C ’est aussi un so u­ cieux, cherchant toujours à co m ­ prendre pourquoi les choses ne vont pas com m e il faudrait. C ’est un vigneron qui ne dope pas ses vignes, un éleveur de vins qui respecte leur nature et, plutôt que de viser à l’obtention d ’un produit moyen, travaille à libérer les qualités intrinsèques de ch a ­ que cépage et de chaque terroir.

Ses vignes sont à Cham oson, à Sion, à Corin, c’est-à-dire dans les plus beaux vignobles du c a n ­ ton. Sa cave niche en plein coeur de Sion, au som m et du Grand- Pont, dans de vieux murs épais qui, selon certains, pourraient rem onter au XIIIe siècle. Elle n ’a

rien des usines ripolinées et aseptisées de nos grandes mai­ sons de vins. Elle est toute en recoins, couloirs, escaliers mais elle garde sa fraîcheur en été et son équipem ent est moderne. C ’est là qu e nous l’avons rencon­ tré. La veille, il avait terminé ses vendanges. Fatigué mais con­ tent.

Nous avons bavardé un bon m om ent dans le carnotzet rusti­ qu e où, sur la lourde table, il

avait posé le pain, le fromage, le saucisson de l’hospitalité. Nous avons parlé de tout. De ses enfants: Philippe qui le rem place progressivement à la tête du dom aine et de la cave. Cette année, il assum e seul les respon­ sabilités de l’encavage et de la vinification et il y met la m êm e passion que son père. Domini­ q ue est instituteur mais aussi chanteur- compositeur. Le p apa a hoché la tête au début mais m aintenant il en est fier.

Nous avons évoqué le passé, la jeunesse m arquée par le travail et l’inconfort. Et nous avons dégusté les vins de la récolte 1986. Père et fils sont entière­ m ent acquis à la personnalisa­ tion des vins. Ils vinifient sép aré­ m ent les diverses provenances d ’un m êm e cépage. Ainsi nous avions devant nous cinq bouteil­ les de fendant proposées sous cinq appellations différentes: Sion-Uvrier, Sion-M ont-d’Orge, Sion-Gravelone, Ville de Sion et Fendant de Sion. Seule la der­ nière étiquette portait la mention Fendant et recouvrait un vin de plusieurs provenances: excel­ lent, équilibré, dégageant un bouquet bien net. Mais quel plai­ sir raffiné que de déceler le caractère propre de chaque ter­ roir: plus rude ici, un peu mince là, tout d ’élégance et de finesse ailleurs...!

Les Savioz n ’ont pas peur des hauts sondages; l’im portant est l’équilibre et cette pointe d ’aci­ dité qui seule peut donner la fraîcheur et la légèreté.

A ndré Savioz qui a racheté une partie du vignoble du Dr Henry Wuilloud, d ’illustre mémoire, a conservé les cépages particuliers q u ’il y avait introduits, n o tam ­ m ent le Chenin blanc, un plant tardif qui donne chez nous une excellente goutte et la Syrah, un

Le pain, le fro m ag e et le vin de l’h o sp italité

Voilà! D ites-moi ce que vous en p ensez?

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rouge de haute classe. Nous avons tâté en philosophant, d ’un Chardonnay trop capiteux, d ’une petite Arvine merveilleusement équilibrée, d ’un Pinot jeune très prometteur, et d ’autres encore. Ruppen, qui était de la partie, osait des appréciations catégori­ ques et corsées et riait à en oublier son métier de p hotogra­ phe.

C om m e c’est la règle dans toutes les pintes et caves du canton, nous avons abordé la situation de la viti-viniculture. Les difficul­ tés ne sont pas finies. Les stocks encore élevés pèsent lourdem ent sur le marché. La réglem en­ tation de la production par le système des quotas ouvre la porte à des abus et à des triche­ ries. Les prix sont trop bas pour q u e le vigneron puisse s ’en tirer avec une production au mètre trop strictement limitée, etc. Que la vendange 1987 n ’ait pas été trop abondante et qu e sa qualité soit bonne malgré l’été pluvieux c’est un événem ent heureux dont il faut se réjouir. Il ne doit pas occulter les problèmes de fond, n otam m ent celui du débor­ dem ent du vignoble hors des zones propices à une production de qualité, etc.

Nous avons m êm e esquissé des solutions mais, accablés par l’am pleur de la tâche, nous avons renoncé et vidé une der­ nière fois nos verres. Sur le G rand-P ont il faisait froid et la lumière des réverbères était triste. - Allons en face! De l’autre côté de la rue il y a un vrai vieux café, tout simple, un peu bruyant, où les gens s’interpel­ lent d ’une table à l’autre. L’occa­ sion d ’un dernier coup de ch a ­ leur, d ’un coude à coude frater­ nel avant de nous quitter. Salut, André! A bientôt!

Texte: Félix C arru zzo P h o to s: O sw ald Ruppen

O r d r e d e la C h a n n e

A n n é e in te r n a tio n a le d e la v ig n e e t d u v in

L’unité

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