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CHAPITRE 1 REVUE DE LITTÉRATURE

1.2 Mécanismes et modèles théoriques d’enlèvement de colloïdes en milieu poreux

1.3.4 Variations de qualité d’eau et performance de filtres granulaires

Les prises d’eau potable sont sujettes à des variations de qualité d’eau. Ces variations sont fonction de l’occupation du territoire en amont, mais aussi de facteurs hydrologiques, météorologiques et géologiques comme discuté dans la section 1.1.3. Voilà pourquoi cette section de revue de littérature s’intéresse à l’impact de ces variations de concentrations de Cryptosporidium et Giardia, mais aussi à l’occurrence de particules d’argiles à l’eau brute sur l’efficacité d’abattement de kystes et oocystes.

1.3.4.1 Impact de la concentration initiale de protozoaires sur la performance

des filtres

Seules quelques études relevées dans la littérature scientifique ont évalué l’effet de la concentration microbienne sur l’enlèvement par filtration granulaire par l’entremise d’essais pilotes ou de données issues en usine. Tout d’abord, des observations faites lors d’une étude pilote ont indiqué que la performance du traitement conventionnel était indépendante de la concentration de protozoaires à l’eau brute (McTigue et al. 1998). Toutefois, dans le cadre de cette étude, aucun duplicata d’expérience n’a été fait. Par ailleurs, la méthode analytique utilisée pour énumérer les kystes et oocystes manquait de précision puisqu’un taux de récupération supérieur à 100 % a été répertorié par moment. Conséquemment, les conclusions issues de cette dernière étude sont discutables. À l’opposé, d’autres ont par la suite démontré qu’il semble exister une relation entre la concentration de protozoaires à l’eau brute et leur abattement par procédés de filtration. D’une part, les résultats obtenus lors d’essais pilotes de filtration en ligne ont démontré qu’il semble exister une relation entre les concentrations à l’affluent et l’abattement seulement pour les plus gros microorganismes comme Giardia. Ces observations sont cependant peu concluantes puisque la relation entre la concentration d’organismes/substituts à l’affluent (Cryptosporidium, Giardia, microsphères, E.coli, Bacillus stearothermophilus, Micrococus luteus, MS-2, Phi-X-174, Eco-virus-12 et 3 types d’algues) et l’enlèvement total mesuré a seulement été observée auprès d’organismes dont la concentration à l’eau filtrée était négligeable (Hendricks et al. 2005). D’autre part, cette problématique a aussi été étudiée dans le cadre d’essais pilotes de traitement conventionnel. Les essais ont été menés à l’aide d’eau très peu turbide et, donc, avec un très faible nombre de particules. Lors de ces essais, une hausse de l’enlèvement de Giardia et de Cryptosporidium a été observée en fonction de la concentration de kystes et d’oocystes dosés à l’affluent. Précisément, une amélioration de la performance sur deux ordres de grandeur a été observée à la suite d’une hausse de la concentration de kystes et d’oocystes à l’eau brute de 2 logs. (Assavasilavasukul et al. 2008a, Assavasilavasukul et al. 2008b). Quoi qu’il en soit, la relation entre l’abattement et la concentration de kystes ou d’oocystes à l’eau brute semble dissimuler l’impact de la dose d’alun tout comme la hausse de cinétique de floculation en raison d’une hausse de la concentration de protozoaires dosés à l’affluent. Ceci est pertinent, d'autant plus qu’il a été répertorié dans le cadre de la même étude, que la performance était fonction de la concentration de protozoaires, mais aussi de la turbidité de

l’eau brute. D’autres recherches sont donc nécessaires afin de déterminer si la relation répertoriée entre la concentration de protozoaires et l’enlèvement est indépendante de la concentration de particules à l’eau brute. Pour terminer, la relation entre la concentration initiale et la performance du traitement conventionnel a été étudiée par l’entremise de données historiques issues du suivi réglementaire britannique de Cryptosporidium à l’eau filtrée provenant de huit usines et de mesures de parasites non pairées à l’eau brute provenant des mêmes installations. Les résultats obtenus démontrent que la performance du traitement conventionnel varie d’un site à l’autre puisque l’évaluation ponctuelle de l’enlèvement moyen d’oocystes par usine varie de 1.8 à 5.2 logs. Plus précisément, les résultats indiquent que l’abattement de Cryptosporidium semble relié à la concentration d’oocystes à l’eau brute puisque les concentrations observées à l’eau filtrée de chacun des sites étudiés sont comparables (Smeets et al. 2007). Par contre, il est à noter qu’aucune donnée de turbidité n’a été intégrée dans cette analyse et qu’il est impossible de déterminer si ces variations de performances entre usines sont attribuables à des variations de concentrations de particules à l’eau brute. Ainsi, il est d’intérêt de poursuivre des recherches sur l’influence des variations de concentrations de protozoaires parasites sur la performance de procédés de filtration granulaire tout en s’intéressant à la turbidité ou à la concentration des particules à l’eau brute.

Seules des études en laboratoire ont été menées afin d’évaluer en milieu poreux les répercussions de l’impact de la concentration initiale de bactéries ou de substituts (microsphères) sur les mécanismes d’enlèvement dynamiques impliqués comme la maturation, le blocage15

et l’enlèvement stérique. La maturation a lieu lorsque les interactions entre les colloïdes (ou microorganismes) sont favorables. Dans ces circonstances, les microorganismes préalablement attachés aux matériaux filtrants agissent à titre de collecteurs additionnels (Camesano et al. 1999). Plus la concentration initiale de microorganismes est élevée, plus ce mécanisme est amplifié, ce qui se répercute en une amélioration de rétention de microorganismes en fonction de la concentration dosée à l’affluent (Camesano & Logan 1998). Au contraire, lorsque les interactions entre les microorganismes sont non favorables, un blocage des sites d’attachement a lieu. Plus précisément, lorsque ces microorganismes sont retenus en surface du matériau filtrant,

ils bloquent les sites d’attachement et confèrent une charge négative additionnelle au matériau. Ainsi les microorganismes subséquents subissent de plus grandes forces de répulsions ce qui cause une diminution de l’attachement. Ce phénomène est en outre amplifié par la concentration de colloïdes qui est injectée (Bradford & Bettahar 2006, Camesano & Logan 1998, Liu et al. 1995, Rijnaarts et al. 1996). Pour terminer, une hausse de la concentration initiale de colloïdes augmente l’ampleur de la rétention par enlèvement stérique. Une fois qu’un colloïde se coince dans un pore, les colloïdes subséquents s’accumulent derrière celui-ci dans l’embouchure du pore et ce phénomène s’amplifie lorsque de plus grandes concentrations sont dosées (Bradford & Bettahar 2006). Enfin, en absence de coagulation, la concentration initiale de microorganismes injectée influence la rétention en milieu poreux, et ce, en fonction des interactions entre microorganismes ou particules. Alors, une identification des mécanismes impliqués lors d’essais de filtration rapide non assistée chimiquement permettrait une meilleure compréhension de l’impact des variations de concentration de Giardia et de Cryptosporidium à l’eau brute sur la performance de la filtration granulaire en usine.

1.3.4.2 Impact de la cooccurrence de particules d’argile sur la rétention de

protozoaires parasites

Peu d’études se sont attardées à l’impact du cotransport de particules d’argile et de microorganismes. Ce sujet est d’intérêt d’autant plus que les particules d’argile dans les eaux de surface peuvent représenter une fraction importante des matières en suspensions (Gauthier et al. 2001, Gauthier et al. 2003). D’ailleurs, les seules études relevées dans la littérature scientifique ont été menées en milieu contrôlé et à des débits représentatifs du transport en eaux souterraines. D’ordre général, la rétention de virus (Syngouna & Chrysikopoulos 2013), de bactéries (Vasiliadou & Chrysikopoulos 2011, Yang et al. 2012) et de protozoaires (Gitis et al. 2002, Park et al. 2012) en milieu poreux, semble plus importante en présence de particules d’argile. Notamment, une augmentation de l’efficacité d’attachement d’oocystes de Cryptosporidium aux grains de sable d’un réacteur complètement mélangé a été répertoriée après l’ajout de particules de kaolinite. Les auteurs de cette étude en ont déduit que les particules de kaolinite adhérent aux grains de sable pour ensuite former de nouveaux sites plus favorables à l’attachement d’oocystes (Gitis et al. 2002). Dans le même ordre d’idée, une amélioration de l’efficacité d’attachement de Cryptosporidium dans des colonnes de sable a été observée lorsque les oocystes étaient

simultanément dosés avec des particules d’illite. Les auteurs de cette étude ont posé comme hypothèse que la hausse de rétention observée était le résultat d’hétéroaggrégation d’oocystes et de particules d’illite. Puisque la densité des particules d’illite est supérieure à celle des oocystes, la formation d’agrégats hausserait de transport d’oocystes par décantation à proximité du grain et ainsi augmenterait l’efficacité d’attachement de Cryptosporidium (Park et al. 2012 ). Malgré que ces études relèvent que les particules d’argiles semblent améliorer la rétention d’oocystes en milieu poreux, les conclusions issues de celles-ci se limitent en des conditions expérimentales contrôlées. Il est donc difficile de transposer ces connaissances à filtration rapide en traitement des eaux potables. Conséquemment, d’autres recherches doivent être poursuivies notamment dans un contexte de filtration directe non assistée chimiquement pour déterminer si la performance de ce procédé est sujette à des pointes de turbidité de nature minérale.

Enfin, cette revue de littérature nous a permis de conclure que les concentrations de Giardia et de Cryptosporidium présents dans les prises d’eau brute d’usine de traitement des eaux potables varient dans le temps. Ces variations de concentrations de kystes et d’oocystes sont fonction de l’occupation du territoire, mais aussi de facteurs hydrologiques et météorologiques. Actuellement, peu d’études ont investigué l’impact de ces variations de concentrations, qui sont parfois concomitantes avec des pointes de turbidité, sur l’efficacité de traitement de la filtration rapide.

CHAPITRE 2

OBJECTIFS DE RECHERCHE ET PLAN