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Variations géographiques des concentrations en T-Hg

A ce jour, malgré une activité de pêche importante près des côtes allemandes de la mer Baltique, très peu d’études se sont intéressées de manière conjointe à la contamination en T-Hg et aux concentrations en Se chez les espèces de poissons les plus commercialisées (Tableau 6).

Les concentrations en mercure observées dans le cadre du présent travail sont comparables à celles observées lors d’études précédentes, que ce soit en mer Baltique ou dans les autres mers, avec toutefois des différences géographiques notables (Tableau 6). Ces différences de concentrations reflètent les différences d’exposition des différents sites aux pressions anthropiques (Driscoll et al., 2013).

Ainsi, les moules analysées dans cette étude présentent des concentrations en T-Hg supérieures à celles des individus provenant de la mer du Nord et de l’océan Atlantique (Tableau 6). Ces organismes occupent un bas niveau de la chaine trophique : ils filtrent l’eau au niveau de leurs branchies et retiennent ainsi la matière en suspension (D’Aoûst and Paré, 2015). De par leur stratégie alimentaire, ils sont en contact direct avec les polluants absorbés sur la matière organique en suspension (Szefer et al., 2002). Par ailleurs, les concentrations en T-Hg chez le cabillaud montrent les mêmes tendances que chez les moules : les individus vivant à proximité des côtes allemandes de la mer Baltique ont des concentrations en mercure trois fois plus élevées que les cabillauds de la mer du Nord (Julshamn et al., 2013). Le cabillaud se situe appartient au niveau trophique le plus élevé parmi les poissons : il a un régime alimentaire carnivore et se nourrit d’autres poissons à l’âge adulte (Kautsky and Svensson, 2009). Il accumule ainsi le mercure via la consommation d’organismes de niveaux trophiques inférieurs.

Il peut être déduit des différences de concentrations en T-Hg chez ces organismes que la mer Baltique est un environnement plus pollué que la mer du Nord et l’océan Atlantique. Ces concentrations élevées en T-Hg sont le résultat de pollutions historique et actuelle (Antoinette, 2011). En effet, en raison de ses caractéristiques géographiques (industries côtières, nombreux pays voisins industrialisés, etc.) et de son trafic maritime intense, cette

Tableau 6: Lieu et période d’échantillonnage, taille (cm), concentrations en mercure total (µg.kg-1

PF) et en sélénium (mg.kg-1 PF) dans le muscle chez les moules, poissons et mammifères marins échantillonnés en mer Baltique et dans les mers voisines pour ce mémoire et des études précédentes. Les résultats sont exprimés sous forme de moyenne ± écart-type.

Le poids frais a été déterminé selon le rapport PF/PS=1.7, d’après les données de ce travail.

Moules (individus entiers)

6 Mer Baltique allemande 5.5 ± 1.3 220 ± 92 2.7 ± 1.7

Rüdel et al. (2010) ND Mer Baltique (~1990 – 2010) - 4 ± 0.8

-Rüdel et al. (2010) ND Mer du Nord (allemande)

(~1990 – 2010) - 23 ± 2

-Baeyens et al. (2003) ND Mer du Nord

Océan Atlantique - 2 - 170

-Harengs

Cette étude 7 Mer Baltique allemande

(2015-2016) 18.2 ± 2.5 192 ± 103 2 ± 0.3

E. Nfon et al. (2009) 12 Mer Baltique

(1991 – 1993) - 20 ± 10

-Polak-Juszczak (2009) 54 Mer Baltique allemande

(2003) - 22 ± 13

-Bełdowska and Falkowska (2016) 75 Mer Baltique 18 – 27 134

-Frantzen et al. (2015) 800 Mer de Norvège

(2006 – 2007) 31.4 ± 2.6 39 ± 28

-[T-Hg] muscle (µg.kg-1 PF) [Se] muscle (mg.kgˉ¹ PF)

Cette étude

Cabillauds

Cette étude 33 Mer Baltique allemande (2015- 23.9 ± 4.5 379 ± 205 2.2 ± 0.5

Polak-Juszczak (2012) 74 Mer Baltique (2009 – 2010) - 96 ± 41

-Polak-Juszczak (2013) 25 Mer Baltique (Gdansk) (2011) 30 521

-Bełdowska and Falkowska (2016) 47 Mer Baltique (2001 – 2011) 24 – 47 284

-Julshamn et al. (2013) 516 Mer du Nord 65 ± 17 110 ± 70

-Flets

Cette étude 29 Mer Baltique allemande

(2015-2016) 37.1 ± 8.17 450 ± 185 2.7 ± 0.3

Bełdowska and Falkowska (2016) 75 Mer Baltique (2001 – 2011) 28 – 109 183.7

-Baeyens et al. (2003) 5 Mer du Nord - 53 ± 18

-Polak-Juszczak (2013) 38 38 469

-Marsouins

Cette étude 9 Mer Baltique allemande

(2015-2016) 103 ± 12.4 2258 ± 1473 1.5 ± 0.5

Phoques communs

Cette étude 2 Mer Baltique allemande

(2015-2016) 90 - 172 13155 et 8439 1.5 – 1.8

Phoques gris

Cette étude 2 Mer Baltique allemande (2015- 201 - 214 3596 et 4903 1.5 – 1.8

Bełdowska and Falkowska (2016) 5 Mer Baltique (2001 – 2011) - 3022.7

-Océan Atlantique (côte portugaise) (2011)

[T-Hg] muscle (µg.kg-1 PF) [Se] muscle (mg.kgˉ¹ PF)

mer est très polluée par les activités humaines (OCDE, 2008). De même, la faible amplitude des marées ainsi que la surface d’échange réduite avec la mer du Nord permettent très peu de mouvements d’eau. Dès lors, les sédiments des fonds marins sont peu remis en mouvement et faiblement mélangés : le mercure s’y accumule en grande quantité (Pinot, 2016). De plus, la mer Baltique a subi une pollution beaucoup plus importante que les mers et océans voisins au cours du 20e siècle. Suite à la seconde guerre mondiale, de nombreuses armes chimiques, munitions et déchets radioactifs y ont été déversés afin de réduire les coûts inhérents à leur destruction (Bayou, 2014). Ces produits contenaient des proportions importantes de mercure : leur rejet en mer a contribué à une contamination exacerbée en T-Hg de tout l’écosystème de la mer Baltique.

Toutefois, au sein de la mer Baltique, les cabillauds échantillonnés le long des côtes allemandes présentent des concentrations en T-Hg supérieures à celles des individus de même taille vivant au large. Ainsi, les cabillauds vivant à proximité des côtes allemandes ont des concentrations en T-Hg quatre fois plus élevées que ceux analysés au large de la Pologne par Polak-Juszczak (2012) et deux fois plus élevées que celles déterminées par Bełdowska and Falkowska (2016). Ces différences de concentrations en T-Hg peuvent être liées à l’éloignement par rapport à la côte. Pour ce travail, les poissons ont été capturés à proximité directe des côtes allemandes. Ces derniers vivaient donc à une plus faible distance des zones de rejets des déchets anthropiques. De même, pour des individus de même taille,les harengs des côtes allemandes présentent des concentrations en mercure 10 fois plus élevées que celles des harengs prélevés dans le Golfe de Botnie (Nfon et al., 2009). Cependant, ces concentrations sont dans le même ordre de grandeur que celles reprises dans l’étude de Bełdowska and Falkowska (2016), menée de 2001 à 2011 le long des côtes polonaises. Une telle différence de concentrations entre le Golfe de Botnie et les côtes allemandes et polonaises peut en partie être expliquée par une densité de population plus importante dans le sud de la mer Baltique que dans le nord (Polak-Juszczak, 2013). Cette population engendre une pollution anthropique supérieure à proximité des côtes bordant le sud de cette mer, principalement en raison de la quantité de déchets industriels qui y sont déversés (Bayou, 2014).

Les flets des côtes allemandes de la mer Baltique suivent la même tendance que les harengs et les cabillauds : ils ont des concentrations en T-Hg huit fois plus élevées que les flets vivant en mer du Nord (Baeyens et al., 2003). Cependant, les flets de la mer Baltique présentent des concentrations en T-Hg équivalentes aux individus de même taille pêchés près des côtes

portugaises de l’océan Atlantique en 2011 (Polak-Juszczak, 2013). Les flets de l’océan Atlantique ont été échantillonnés au niveau de l’estuaire du fleuve Douro. Selon la littérature, l’embouchure de ce fleuve est considérée comme une région très contaminée de la côte atlantique portugaise. En effet, il reçoit les eaux usées et les déchets industriels de plus d’un million de personnes avant de se déverser dans l’océan Atlantique (Lucyna Polak-Juszczak, 2013). Les concentrations en T-Hg élevées chez les flets de cette région et des côtes allemandes de la mer Baltique soutiennent l’hypothèse que les apports fluviaux jouent un rôle important dans la pollution maritime.

Dans le cadre de notre étude des côtes allemandes de la mer Baltique, le lieu d’échantillonnage des poissons n’a eu aucun impact sur leur concentration en mercure ou en sélénium, à l’exception du mercure dans le muscle des flets. De ce fait, les cabillauds et les harengs vivent exclusivement dans le milieu marin, contrairement aux flets. Ces derniers possèdent un cycle de vie dépendant à la fois de l’eau douce et l’eau de mer : ils remontent dans les rivières pour se nourrir avant de retourner à la mer pour se reproduire entre les mois de février et mai. Cette espèce est dès lors abondante dans les estuaires (Hillewaert, 2016). Or, comme mentionné précédemment, il semble que les cours d’eau soient en grande partie responsables de l’acheminement des polluants jusqu’à la mer. Il est dès lors envisageable que les flets vivant à proximité directes des fleuves présentent des concentrations en mercure plus importantes que ceux vivant plus loin des embouchures. De ce fait, les individus provenant de la baie de Mecklenburg (MB), recevant le fleuve Warnow, et de Darss-III (DA), recevant le Recknitz, présentent des concentrations en mercure total supérieures à ceux de la baie d’Arkona (AK) et de la baie de Lübeck (LB).

Toutefois les concentrations en T-Hg ne dépendent pas uniquement de la contamination environnementale mais de plusieurs autres facteurs biotiques tels que la position trophique des organismes, leur mode de vie (benthique/côtier/pélagique ou leur taille (Polak-Juszczak, 2015). En effet les concentrations en mercure dans les tissus des organismes peuvent augmenter avec le niveau trophique (Teffer et al., 2014) ou bien peuvent être plus élevées chez les poissons benthiques (Boalt et al. 2014) ou encore dépendre de l’âge des individus (Frantzen et al. 2015).

2. Influence du niveau trophique et du mode de vie sur les concentrations en T-Hg et en Se

Les valeurs en δ13C mesurées dans les tissus des moules, des poissons et des mammifères marins reflètent les sources de carbone et en conséquence la distribution des organismes considérés (Layman et al., 2012).

Fig.17 : Valeurs en δ15

N (‰) et en δ13

C (‰) dans le muscle chez les différentes espèces échantillonnées.

De manière générale, la gamme des valeurs en δ13C présentées par la totalité des organismes échantillonnés dans cette étude est relativement étendue (de -22.7 à -15.7‰). En mer du Nord, cette gamme comparable (-20.5 à -15.1‰) (Eike Jansen, 2013). Ce résultat reflète le brassage entre eaux douces et eaux saumâtres qui a lieu à proximité des côtes allemandes et de la baie sud de la mer du Nord (Ojaveer and Schiedek, 2002). En effet, un apport d’eau douce entraine une grande hétérogénéité des conditions physiques et biologiques d’un écosystème (clarté de l’eau, productivité, dynamique de la matière organique, etc.). Cette hétérogénéité influence la diversité des ressources primaires et peut modifier le régime alimentaire de base des organismes (Naman et al., 2016). Par conséquent, le mélange entre eaux douces et eaux de mer entraine une diversification des organismes et des sources de carbone à la base de la chaine trophique, ce qui peut expliquer la gamme étendue des valeurs en δ13C observées dans ce mémoire. Outre les caractéristiques environnementales, le mode de

7 9 11 13 15 17 19 -25 -24 -23 -22 -21 -20 -19 -18 -17 -16 -15 δ¹⁵ N (‰) δ¹³C (‰)

vie des espèces, et donc leur distribution dans la colonne d’eau, leur stratégie alimentaire et les migrations saisonnières peuvent induire des différences dans les valeurs isotopiques du carbone (Layman et al., 2012).

Dans la littérature, il a été observé que les poissons évoluant dans la zone pélagique présentent des valeurs en δ13C plus négatives que des espèces ayant un mode de vie benthique ou démersal (Choy et al., 2009). Cette constatation est bien corroborée par les espèces de ce mémoire, avec les harengs présentant les valeurs les plus négatives en δ13C (Fig.17) tandis que les flets et les cabillauds ont des valeurs enrichies en carbone 13. En effet, les harengs ont un mode de vie pélagique (Lacy, 2004). De même, si les flets ont un mode vie benthique et se nourrissent sur le fond marin, les cabillauds ont un mode vie démersal et chassent dans la colonne d’eau à proximité du fond algal (SeaWeb Europe, 2016 ; Hillewaert, 2016). Par ailleurs, les marsouins et les phoques gris ont des valeurs en δ13C comparables à celles des cabillauds et des flets, en relation avec leur mode de vie démersal. Par ailleurs, les phoques communs de cette étude sont isolés par rapport aux autres individus et présentent des valeurs en δ13C beaucoup plus élevées que celles des autres mammifères marins. Cette différence reflète le fait que le phoque commun vit principalement dans les eaux côtières, au niveau des baies, des estuaires et des zones intertidales (Lowry, 2016). Contrairement aux phoques communs qui sont associés à la côte, les marsouins et les phoques gris se déplacent continuellement. Selon la littérature, les marsouins se déplacent sur des distances modérées mais les phoques gris peuvent nager sur des distances de plus de 200km (McConnell et al., 1992 ; Carretta et al., 2001). Cependant, seuls 2 phoques gris et 2 phoques communs ont été échantillonnés le long des côtes allemandes pour cette étude. Ils apportent une valeur indicative mais il faudrait reproduire ces analyses sur une plus large gamme d’échantillons pour pouvoir corroborer cette théorie liée à leur lieu de vie.

Comme le montre la fig.17, la moule a les valeurs en δ15N les plus basses, suivies des 3 espèces de poissons et ensuite des mammifères marins. Cette distribution des espèces le long de l’axe δ15

N peut être en lien avec leur position dans le réseau trophique et leur régime alimentaire. En effet, on observe un enrichissement en isotope lourd depuis la base de la chaine trophique vers les niveaux les plus élevés (Layman et al., 2012). Cette relation est bien observée dans ce mémoire. Les moules (moyenne = 9.9‰, en bleu sur la fig.17) appartiennent au niveau trophique le plus bas, en relation avec leur mode de vie filtreur (D’Aoûst and Paré, 2015). Elles sont d’ailleurs souvent utilisées comme indicateurs du niveau trophique de base à la place du plancton (CASAS 2005).

Au-dessus des moules, on retrouve les poissons (en vert sur la Fig.17), qui ont des valeurs en δ15N intermédiaires entre celles des moules et celles des mammifères marins (moyenne = 11.5 – 13.5‰). Les valeurs des harengs et des flets sont comparables. Or, ces deux espèces ne partagent pas le même régime alimentaire : le hareng se nourrit d’organismes planctoniques (Ethic Ocean, 2016) tandis quel le flet capture des invertébrés et des crustacés (Don et al., 2016). Une des raisons possibles est que les harengs échantillonnés ne proviennent pas de la mer Baltique mais de la mer du Nord. En effet, contrairement aux flets et aux cabillauds, les harengs migrent beaucoup entre la mer Baltique et la mer du Nord selon des cycles saisonniers (Lacy, 2004). De plus, les individus de la mer du Nord présentent des valeurs en δ15

N plus élevées que les individus de la mer Baltique (Jansen et al., 2013) Le cabillaud présente des valeurs en δ15N supérieures à celles du hareng et du flet, en relation avec son régime alimentaire carnivore. Ainsi, il se nourrit d’invertébrés uniquement au début de sa vie. En devenant adulte, il capture des poissons de grande taille (ex : gobies) et peut même faire preuve de cannibalisme (Mohm, 2014).

Les isotopes ont permis de comprendre les relations entre les espèces ainsi que leur mode de vie. Selon la littérature, le mercure se bioaccumule dans les organismes, avec des concentrations plus élevées chez les organismes au sommet de la chaine trophique (Layman et al., 2012). Dans ce mémoire, le cabillaud, qui se situe à un niveau trophique plus élevé que le flet, présente des concentrations musculaires en mercure similaires à ce dernier (Tableau 3). Il semble donc que la position trophique ne soit pas un facteur déterminant pour la contamination en mercure des espèces. Selon une étude menée sur un grand nombre d’espèces dans le Golfe de Gascogne (nord-est de l’océan Atlantique), les organismes pélagiques montrent des concentrations totales en mercure plus faibles que les espèces benthiques (Chouvelon et al., 2012). Cette constatation soutient l’hypothèse selon laquelle la concentration en mercure chez les poissons augmente avec leur profondeur médiane d’occurrence dans la colonne d’eau (Choy et al., 2009) (Fig.18). En effet, le mercure s’accumule préférentiellement dans les sédiments marins (Morel et al., 1998). Les poissons vivant à proximité du fond marin, comme les flets, présentent donc une exposition au mercure plus importante que les individus nageant dans les eaux plus superficielles, comme les cabillauds (Choy et al., 2009). Cependant, l’influence du mode de vie des espèces sur leur concentration en mercure n’est applicable qu’à une partie des résultats de ce mémoire. En effet, les harengs présentent bien les concentrations en T-Hg les plus faibles, en relation avec leur mode de vie pélagique. Cependant, le cabillaud et le flet présentent des concentrations en

T-Hg similaires alors qu’ils occupent des positions différentes dans la colonne d’eau (démersal pour le cabillaud, benthique pour le flet). L’influence de la taille sur la contamination au mercure serait une autre explication possible aux concentrations en T-Hg chez ces deux espèces. Ce point sera abordé lors du chapitre suivant.

Fig.18 : Concentration moyenne en mercure chez les différentes espèces de poissons

échantillonnées en fonction de leur occurrence dans la colonne d’eau.

Enfin, les mammifères marins (en orange sur la Fig.17) présentent les valeurs en δ15N les plus élevées (moyenne = 15.1 – 16.9‰). Ces valeurs sont comparables avec celles d’autres études en mer Baltique (Angerbjörn et al., 2006), dans le sud de la mer du Nord (Das et al. 2003b) et dans l’océan Atlantique (Das et al. 2003a). Les hautes valeurs en δ15N mesurées dans le muscle des mammifères marins reflètent leur régime alimentaire au sommet de la chaine trophique (Bełdowska and Falkowska, 2016). Leur position trophique est due au fait que les marsouins, phoques communs et phoques gris sont des espèces principalement ichtyophages, avec comme préférences alimentaires des cabillauds, des gobies, des bars et des maquereaux (Méheust et al., 2015). De même,ils ont les concentrations en mercure les plus élevées. Parmi les mammifères marins, les phoques sont plus contaminés en mercure que les marsouins (Tableau 3).Etant donné qu’ils partagent un régime alimentaire semblable, cette différence peut être liée à la quantité de nourriture ingérée quotidiennement (LPO, 2017). Ainsi, les marsouins se contentent de 3-5 kg de nourriture par jour tandis que les phoques en consomment de 5 à 10 kg, soit environ 4% de leur masse corporelle (LPO, 2017). De plus, les

114,80 287,78 294,66 0,00 50,00 100,00 150,00 200,00 250,00 300,00 350,00 400,00 450,00 [T -H g] ( µ g. kg -1PS)

pélagique démersal benthique

Surface <---> Profondeur

stratégies d’alimentation peuvent également influencer les types de proies ingérées par les prédateurs et par conséquence leur contamination (Polak-Juszczak, 2015). En effet, selon leur capacité à attraper les proies, les prédateurs peuvent cibler des poissons de plus ou moins grande taille, et donc des individus plus ou moins âgés. Par exemple, de récentes publications ont montré que les marsouins créent un courant d’aspiration pour attraper leurs proies, qu’ils ingèrent ainsi entièrement. De ce fait, ils se nourrissent principalement de poissons de petite taille, tels que des harengs ou des juvéniles d’autres espèces (Wisniewska et al., 2016). Au contraire, les phoques sont capables de déchiqueter leurs proies en morceaux et peuvent donc consommer des poissons de plus grande taille (Cale, 2012). Toutefois, peu d’échantillons de mammifères marins étaient disponibles pour cette étude. Il serait intéressant de reproduire ces analyses pour un nombre d’échantillons de mammifères marins plus élevé pour vérifier ces hypothèses.

Contrairement au mercure, il n’y pas d’influence du niveau trophique des organismes sur leur concentration musculaire en sélénium. Les concentrations en Se sont comparables quel que soit le mode de vie de l’organisme. Ceci est dû au fait que le mercure est un élément non essentiel tandis que le sélénium est défini comme essentiel (Darrigol and Blankoff, 2017). En effet, le mercure est un élément trace qui ne remplit aucune fonction biologie dans l’organisme. Il n’est pas utilisé dans les processus métaboliques et est donc très vite accumulé (Morel et al., 1998). Au contraire, le sélénium est un élément essentiel qui intervient notamment dans la synthèse de l’ADN et dans le système inflammatoire (Darrigol and Blankoff, 2017). Pour cette raison, la concentration en sélénium est régulée en continu par l’organisme. Cette différence entre les deux éléments traces explique le fait que la position trophique, le régime alimentaire et la distribution des organismes ne modifient pas le profil de contamination en sélénium.

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