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4.3 Dégradation et conséquences sur les modes

5.3.2 Variance de phase

Nous allons présenter une analogie entre la diusion de la phase et une marche aléatoire. Soit δη(t) une variable aléatoire de type bruit blanc gaussien. Un bruit blanc est un processus stochastique non-autocorrélé et de moyenne nulle tel que :

hη(t)i = 0, (5.3.1a)

κ(τ ) = hη(t)η(t + τ)i = 2Dδ(t + τ), (5.3.1b)

où D est la constante de diusion. Dans ces dénitions, les moyennes sont calculées sur toutes les réalisations possibles du bruit [152]. Un bruit blanc peut être simulée de façon simple en eectuant de nombreux tirages de la variable aléatoire δη(t), à des intervalles de temps discrets. Prenons l'exemple d'un processus binomial uniforme. A intervalle de temps réguliers, on tire une valeur qui peut être -1 ou 1 avec une même probabilité. Un telle réalisation est représentée sur la gure 5.12a. La somme des valeurs successives d'un bruit blanc est une marche aléatoire. Sur la gure 5.12b, nous avons représenté trois marches aléatoires δη(t) = Rt

0 δη(t)dt construites en intégrant trois réalisations de δη(t). La variance η(t)2 = h(η − hηi)2i est une fonction généralement utilisée pour

Figure 5.12  (a) Liste de tirage aléatoire d'une variable ∆x(t) appartenant à un processus binomial équiprobable simulant un bruit blanc (b) Accumulation de trois réalisations de bruit blanc simulant des marches aléatoires. (c) Variances de trois réa-lisations de la variable aléatoire x(t) calculées sur une seule trace. (d) Variance de la variable aléatoire x(t) moyennée sur 5, 10 et 100 réalisations.

décrire une variable aléatoire. C'est une mesure moyenne de la déviation au carré des valeurs et dans le cas d'une marche aléatoire, on peut montrer qu'elle est linéaire en temps (ou en pas) telle que

∆η(t)2 = 2dDt, (5.3.2)

où d est la dimension du mouvement, D le coecient de diusion, et t le temps écoulé. Sur la gure 5.12c, nous avons tracé les variances ∆η(t)2 des marches aléatoires η(t) présentées sur le panneau (b). Nous constatons que la variance ainsi calculée n'est pas linéaire et subit de très fortes dérives. Cela vient du fait que, pour un nombre ni d'évènements, les propriétés statistiques ne sont pas représentatifs du comportement du bruit blanc. De ce fait, pour un temps ni hη(t)i 6= 0. Par dénition, les moyennes des expressions 5.3.1 sont soient calculées sur un temps inni, soit sur toutes les réalisations possibles du bruit. Nous allons donc calculer la variance selon la seconde méthode. Nous avons représenté sur la gure 5.12d, la variance moyennée sur 5 puis 100 réalisations. Nous constatons que, pour un faible nombre de réalisations, la variance augmente avec le nombre de points mais n'est pas linéaire. Alors que pour 100 réalisations, la variance devient linéaire en fonction du nombre de point. Nous avons donc retrouvé le comportement linéaire attendu de la variance d'une marche aléatoire

calculées sur un grand nombre de réalisations.

Montrons maintenant que, dans le cas où la variance est linéaire, la raie spectrale est de forme lorentzienne. La DSP se calcule d'après la transformée de Fourier de la fonction d'autocorrélation. En utilisant la notation introduite dans l'équation 2.3.43, on écrit la moyenne de l'amplitude complexe du signal total en fonction de l'amplitude et de la phase du signal telle que

hc(t)i = h(a0+ δa(t))e−iΦ(t)i, (5.3.3a)

= a0he−iΦ(t)i (5.3.3b) car la moyenne des uctuations d'amplitude δa(t) est nulle. La phase totale s'exprime sous la forme

Φ(t) = −ω0t + φ(t), (5.3.4)

où φ(t) =Rt

−∞δω(t)dt est la variation de la phase et δω(t) la variation de la fréquence. La fonction d'autocorrélation de l'amplitude complexe c est alors égale à

hc(τ)c(0)i = a20he−iΦ(τ )eiΦ(0)i, (5.3.5a) = a20e−iω

he−φ(τ )φ(0)i. (5.3.5b) La fonction d'autocorrélation de la tension hV(τ)V(0)i est proportionnelle à la fonc-tion d'autocorrélafonc-tion de l'amplitude complexe hc(τ)c(0)i [57]. A partir de l'expres-sion 5.3.5b, il est possible de montrer que dans le cas où la variation de fréquence suit une distribution gaussienne la fonction d'autocorrélation est fonction de la variance de phase ∆2φ(t) telle que

κ(τ ) = p0e−iωe∆2φ(t)2 . (5.3.6) On a précédemment montrer que, dans le cas d'une marche aléatoire, la variance est linéaire en temps. Dans ce cas, la fonction d'autocorrélation κ(τ) est une oscillation exponentiellement décroissante

où τc est l'inverse de la largeur de raie. Il a été montré que, dans ce cas, la forme de la raie spectrale est une lorentzienne telle que [8]

Sv(ω) = A

∆ω2

(ω − ω0)2+ (∆ω

2 )2 (5.3.8)

Il a aussi été montré que, si

κ(t) ∼ e12hδf2it2

(5.3.9) alors la raie est de forme gaussienne [8].

Notons par ailleurs, que selon la théorie la phase totale s'exprime comme la somme de la phase moyenne hΦ(t)i = −ω0t, et de l'intégrale des uctuations thermiques ℑ(fn(t)) et des uctuations de puissance δp dont les moyennes en nulles :

Φ(t) = −ω0t + Z t

−∞

(√1p

0ℑfn(t) − Nδp(t))dt. (5.3.10) Ces deux sources de bruit sont des bruits blancs gaussiens et toutes combinaisons linéaires d'un bruit est à son tour gaussien. En résumé, les sources de bruits aectant la fréquence et l'amplitude sont blanches ce qui implique que la phase soit une marche aléatoire similaire à η(t) (gure5.12).

Nous calculons la phase Φ(t) des traces expérimentales du mode A de l'échantillon I3 en utilisant le signal analytique xa(t), déni grâce à la transformée de Hilbert. Dans ce cas, l'argument de xa(t)est donc une mesure expérimentale de la phase Φ(t) = ω0t+φ(t) dont la dérivée est la fréquence ω(t) = ω0+ dφ(t)dt . Nous avons représenté arg[xa(t)] sur la gure 5.13 et nous constatons une variation majeure de l'argument de xa en forme de dents de scie. Cela est clairement dû au fait que la phase, telle qu'elle est dénie est contenue entre 0 et 2π et n'est pas continue. Il est alors nécessaire de reconstruire la variation continue de la phase corrigée du modulo 2π puis de calculer la variation continue de la phase en cumulant les variations de phase successives au cours du temps. Sur la gure5.14a, nous avons représenté la variation de la phase totale Φ(t). On obtient une variation croissante quasi-linéaire, dont la pente est bien la fréquence moyenne ω0

Figure 5.13  Argument de la variable analytique xa(t) de I3 en fonction du temps pour une tension de -350 mV.

les seules uctuations aectant la phase φ(t). Les uctuations de la phase ainsi obtenues sont représentées sur la gure5.14b. On remarque déjà une ressemblance visuelle avec une marche aléatoire.

Nous allons maintenant calculer la variance de la phase expérimentale φ(t) dénie telle que :

∆φ2 = h(φ − hφi)2i = hφ2i − hφi2. (5.3.11) De la même manière que nous avions traité l'exemple d'une marche aléatoire composée de pas de ±1 de même probabilité, nous calculons la variance de phase sur plusieurs réalisations. Pour cela, nous coupons la mesure de la phase en segments courts ; on peut alors calculer la variance après avoir soustrait à chaque segment sa valeur moyenne. On reconstruit ainsi un bruit de moyenne nulle. On obtient alors une variance qui varie quasi-linéairement et dont la pente est bien la valeur de la largeur de raie. On prendra cependant toujours soin de calculer la variance pour plusieurs tailles de segment an de déterminer la longueur de segment optimale à utiliser. Sur la gure5.15, nous avons représenté des exemples de variances obtenues pour diérentes tensions appliquées et moyennées sur 8200 segments de 2,5 ns. Dans l'encadré, nous avons représenté un agrandissement des variances pour des temps inférieurs à 3 ns. Par des temps longs, la variance est bien linéaire mais pour des temps courts, elle est plutôt quadratique.

Figure 5.14  (a) Variation de la phase Φ(t) au cours du temps. (b) Dérive de la phase (uctuations de phase φ(t)) au cours du temps.

La variance de phase des oscillateurs à transfert de spin s'exprime en fonction du temps, d'après la référence [60], telle que

∆φ2(t) = 2∆ω0  (1 + ν2)|t| − ν21 − e −2Γp|t|p  , (5.3.12)

où ∆ω0 est la largeur de raie linéaire, ν est le coecient de nonlinéarité sans dimension de la fréquence des oscillations induites par le transfert de spin (Eq.2.3.60). Pour des temps courts tels que t ≪ 1/2Γp = 50ns, on eectue un développement à l'ordre 2 de l'exponentielle. La variance est alors égale à

∆φ2(t) ≈ 2∆ω0



|t| − ν2Γpt2

. (5.3.13)

Celle-ci revêt une dépendance quadratique, alors que pour des échelles de temps longues, i.e. supérieures au temps caractéristique 1/2Γp, ∆Φ2

R(t) varie linéairement en fonction du temps telle que

∆φ2(t) ≈ 2∆ω0(1 + ν2)|t|. (5.3.14)

Ces deux tendances sont en accord avec la forme de la variance observée sur la gure5.15

où pour des temps courts, la variance est quadratique alors qu'elle est linéaire pour des temps longs.

Figure 5.15  Variances de phase pour diérentes tensions appliquées. Dans l'encadré, on présente un agrandissement de la variance de phase aux temps courts.

régime linéaire de la variance (éq.5.3.14), la raie est de forme lorentzienne et le coe-cient de nonlinéarité induit un élargissement homogène. Dans le régime quadratique de la variance (éq.5.3.13), la raie est de forme gaussienne car à des échelles temps courtes, le bruit est coloré. Les uctuations gardent alors une  mémoire  des uctuations précédentes ce qui induit un élargissement inhomogène de la raie, comme représenté sur le schéma 5.16 [45, 8]. Dans la section précédente, on avait exprimé le fait que le couplage puissance-phase induisait un élargissement inhomogène de la raie. En eet, dans notre cas, la raie mesurée est intermédiaire entre les deux régimes et sa forme est non-lorentzienne.