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Chapitre I: Généralités

2 Système océan/banquise/atmosphère

2.4 Climatologie

2.4.2 Variabilité séculaire à pluri-décennale

antarctique lors d'un évènement la Niña ressemble à la structure atmosphérique d'un SAM positif très prononcé, toutefois moins zonale. En revanche, l'inverse, un évènement El Nino ressemblant à un SAM négatif n’est pas nécessairement vrai (Stammerjohn et al., 2008). Lors d’un évènement El Niño, l'amplification de la convection atmosphérique au-dessus de la

Warm Pool alimente également la cellule d'Hadley, qui se trouve renforcée et contractée dans

le Pacifique Sud, induisant ainsi une intensification du jet subtropical et un déplacement vers le nord des cyclones extratropicaux (Fig. 14a). Conjointement, une anomalie de hautes pressions centrée en Mer d'Amundsen-Bellingshausen (ABS) permet l’entrée d’air chaud dans la région, ainsi qu'en Mer de Ross et l’export d’air froid à l'Est de l'AP et en Mer de Weddell (Fig. 14a) (Yuan, 2004). Un évènement la Niña génère les effets inverses (Fig. 14b).

2.4.2 Variabilité séculaire à pluri-décennale

Le climat Holocène à l'échelle globale est dominé par l’influence du forçage orbital estival. Dans l’HS, ce dernier a peu augmenté (environ 2 W.m2

à 65°S; Wanner et al., 2011) au cours des derniers 2000 ans (Fig. 15), et n'explique pas la variabilité rapide pluri décennale a pluri centennale ainsi que les disparités régionales importantes qui caractérise le climat à l'Holocène tardif. A l’échelle des derniers 2000 ans qui nous intéresse ici, d’autres processus tels que les variations de l'activité solaire, de l’activité volcanique et de la circulation thermohaline sont donc responsables de la variabilité climatique rapide pluri-décennale et séculaire (Wanner et al., 2011; Bertler et al., 2011).

Figure 15. Insolation d'été due aux variations orbitales dans l'HN et dans l'HS (d'après Wanner et al., 2011).

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a L'activité solaire

L’activité solaire, modulée par le nombre de taches solaires, semble faire varier l'irradiance solaire d'environ 0,1% (0,24 W/m2) arrivant à la surface de la Terre sur une période de 11 ans, période qui est amplifiée à l'échelle séculaire (Fig. 16). Une période d'activité solaire intense correspond à une augmentation du nombre de taches solaires (Fig. 16), et à un soleil plus lumineux . A l'inverse, le nombre de tache diminue pendant les phases d'activité moins intense. Il a été montré que les taches solaires étaient inexistantes au XVIIe siècle pendant le Minimum de Maunder du Petit Age Glaciaire et ont atteint un maximum en 1959 (Fig. 16) (Steinhilber et al., 2011).

Figure 16. Le cycle solaire. La partie haute montre deux états moyens du soleil au cours d'un cycle solaire, du maximum en Mars 2001 (à gauche) au minimum (à droite) en Janvier 2005. Images tirées de la NASA/ESA. La partie basse montre les variations du nombre de tâches solaires au cours des derniers 400 ans avec, notamment, le Minimum de Maunder (en rouge).

Au cours des derniers 1000 ans, le Soleil a connu plusieurs périodes de faible activité (Fig. 16) (Steinhilber et al., 2009; Ljungqvist et al., 2010) : le minimum de Oort (1010-1050 C.E.), le minimum de Wolf (1280-1340 C.E.), le minimum de Spörer (1420-1530 C.E.), le minimum de Maunder (1645 - 1715 C.E.) et le minimum de Dalton (1790-1820 C.E.). L'irradiance solaire (Fig. 17) montre également des valeur de Be10 (isotope produit dans l'atmosphère sous

31 l'effet des rayons cosmiques liés à l’activité solaire; Beer et al., 2000) plus négatives autour du VIIe siècle, puis de nouveau entre le XIIIe et XIXe siècle, cohérente avec le refroidissement observé au cours des phases climatiques : Dark Age Cold Period (DACP) et Little Ice Age (LIA) (Wanner et al., 2011). Inversement, les anomalies positives de l'irradiance solaire coïncideraient avec les périodes plus chaudes: Roman Warm Period (RWP), Medieval Warm Period (MWP) et plus récemment le réchauffement climatique qui a débuté au début du XXème siècle (Wanner et al., 2011).

Figure 17. Variation de l'activité solaire reconstruite d'après les enregistrements de10Be mesurés dans la glace polaire (Steinhilber et al., 2009), indiquant les anomalies positive (aires rouges) et négatives (aires bleues), les pics reconnaissables (en gris) de l'activité solaire du dernier millénaire ainsi que les grande phases climatiques connues de l'Hémisphère Nord (surlignées).

b L'activité volcanique

Les éruptions volcaniques constituent un important forçage climatique, à n’importe quelle échelle de temps. Quasiment imprévisibles, on peut cependant avoir une idée des effets du volcanisme sur le climat à travers les archives géologiques et historiques qui montrent que l’activité volcanique a des implications environnementales et sociétales majeures, au cours des derniers millénaires. En effet, les éruptions volcaniques les plus importantes ont été

32 suivies d'une diminution d'ensoleillement et ainsi d'un refroidissement immédiat à grande échelle, comme par exemple l'éruption du Tambora (Indonésie) en 1815. Le refroidissement à court terme associé au volcanisme est dû à l’injection de dioxyde de soufre (SO2) et de cendres jusque dans la stratosphère où ils peuvent résider plusieurs années et être redistribués à l’échelle du globe (Robock et al., 2002). Les cendres contribuent à augmenter le couvert nuageux et les précipitations dans l'atmosphère inférieure. Le SO2, en se mélangeant avec la vapeur d'eau dans la stratosphère, forme un aérosol qui augmente l’albédo planétaire en absorbant et en réfléchissant vers l'espace le rayonnement solaire, provoquant ainsi un réchauffement stratosphérique et un refroidissement des basses couches de l’atmosphère (troposphère) et de la surface de la Terre, principalement pendant l'été lorsque les processus radiatifs dominent (Robock et al., 2002).De plus, à court terme, outre un impact direct sur la température de surface, à travers les variations d'ensoleillement, le volcanisme à également un impact indirect sur la configuration atmosphérique, à travers l'accentuation des gradients latitudinaux de température (Robock et al., 2002). En revanche, à long terme, le dégazage de CO2 et d’ H2O, principaux gaz à effet de serre, contribuent au réchauffement planétaire. Des mesures précises des effets radiatifs des éruptions volcaniques ne sont disponibles que pour les trois dernières décennies. Cependant, la reconstruction du volcanisme au cours des derniers millénaires est possible grâce à l’enregistrement des aérosols volcaniques préservés, notamment, dans les calottes polaires (Fig. 18). Ainsi, au cours de l’Holocène, il apparaît que la période des 2000 dernières années est marquée par une activité volcanique accrue comprenant 33 éruptions enregistrées et identifiées, dont les deux tiers ont eu lieu au cours du dernier millénaire (Cole-Dai et al., 2000; McGregor et al., 2015). Des études suggérent des liens possibles entre l'apparition des phases climatiques froides au cours des derniers 2000 ans et le nombre d'éruption volcaniques ou leur intensité (ex: Crowley et al., 2000; Bertler et al., 2011). Récemment, des données issues de la modélisation ont également montré qu'une succession d'évènements volcaniques a pu impacter la variabilité naturelle de l'Atlantic Meridional Overturning Circulation (AMOC) au cours du XXe siècle, à travers le refroidissement des eaux de surface et donc la formation de glace aux hautes latitudes (Swingedouw et al., 2013).

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Figure 18. Enregistrements de SO4nns (non seasulphate) à EPICA Dronning Maud Land (EDML) et à Victoria Lower Glacier (VLG) pour les derniers 900 ans, indiquant les éruptions volcaniques sur cette période. Les aires en gris soulignent les éruptions volcaniques identifiées aux deux sites, EDML et VLG. D'après Bertler et al., 2011.

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Figure 19. Circulation océanique mondiale montrant les principaux courants de surface et de fond, ainsi que les principaux sites de formation d'eau dense (d'après Rintoul et al., 1998).

La circulation thermohaline, est définie comme la circulation océanique à grande échelle générée par les gradients de température et de salinité des masses d'eau et qui participe au transport de chaleur de l’équateur vers les pôles. Aux tropiques, l'océan en surface est excédentaire en chaleur, alors qu'aux hautes latitudes les eaux atteignent la température de congélation de l’eau de mer (-2°C). Ces eaux de surface très denses (froides et salées), plongent par gravité sous les eaux chaudes moins salées, jusqu’à la profondeur où elles se trouvent en équilibre de densité avec les eaux voisines (vers 2000 m en région subarctique, 4000 m en Antarctique), formant les eaux de fond. Ainsi, les zones polaires constituent des régions de convection profonde (Fig. 19). Ces eaux profondes, moteur de cette circulation globale, entraîne ainsi un transport d’eaux en surface vers les hautes latitudes (Fig. 19). La plongée des eaux de surface qui a lieu principalement en Atlantique Nord, s’écoulent par le fond en vers le Sud, où vers 60° S, elle est reprise et distribuée par le courant circumpolaire Antarctique au sein duquel elles remontent progressivement vers la thermocline, puis et se répandent dans l’Atlantique sud, le Pacifique et l’océan Indien (Fig. 19). Le retour de cette grande circulation dans l’Atlantique nord s’effectue via des courants chauds, proches de la surface, dont la circulation est liée à la circulation atmosphérique. Ce brassage océanique a été schématisé sous la forme d’un «tapis roulant» à l’échelle du globe et peut durer environ 1000 ans environ (Fig. 19). L’intensité de la circulation thermohaline varie fortement entre périodes glaciaires et interglaciaires (Ballarotta et al., 2014). En effet, le développement aux hautes latitudes d'un couvert de banquise plus important pendant une période glaciaire limite la

35 formation d’eau profonde, dont les sites se décalent vers de plus basses latitudes, réduisant ainsi l'étendue et l'intensité de cette boucle océanique, et donc de la redistribution de chaleur entre les différentes régions du globe. En effet, diverses études suggèrent qu’un arrêt de la circulation thermohaline peut générer un refroidissement de plusieurs degrés, notamment en Atlantique Nord et en Europe. Ainsi, dans son étude, Lund (2006) estime que le débit total du Gulf Stream a diminué de 10% au cours du dernier millénaire, notamment entre 1250-1850 C.E. Cette cohérence avec l'évolution des températures de l'HN au cours du LIA suggère que la réduction du transport de chaleur océanique vers le nord peut avoir contribué à des températures plus basses caractérisant cette période. L’étude de la variabilité de la circulation thermohaline peut donc permettre de mieux appréhender la variabilité du climat.

En conclusion, il apparaît que les changements climatiques au cours de l'Holocène ne soient pas le résultat d'un seul forçage, mais au contraire soient issus de plusieurs mécanismes, eux mêmes interconnectés de façon non-linéaire et à plusieurs échelles de temps.